C. UNE PRISE DE CONSCIENCE DES ENJEUX À L'ÉCHELLE NATIONALE EN MAL DE RÉSULTATS SUR LE TERRAIN
Les rapporteurs portent un regard plutôt positif sur la feuille de route « santé mentale et psychiatrie » du Gouvernement, lancée en 2018 qui témoigne d'une réelle prise de conscience. Les financements, mobilisés en parallèle, sont également à saluer, même s'ils ne suffisent pas à répondre à l'explosion de la demande de soins psychiatriques.
Toutefois, depuis 2018, les gouvernements successifs ont fait un usage important d'annonces programmatiques : Assises de la santé mentale et de la psychiatrie en 2021, consécration de la santé mentale en « Grande cause nationale » pour 2025, « stratégie nationale de prévention et d'accompagnement » à venir, présentation en juin 2025 d'un « plan psychiatrie ». Il semble que cet empilement de plans et de programmes réponde davantage à un souci de communication qu'à une réelle volonté réformatrice.
Dans ce contexte, la politique nationale de santé mentale se heurte à au moins trois écueils :
- l'ajout de nouvelles mesures sans toujours de déclinaison des actions sur le terrain crée des déceptions de la part de la population comme des soignants ;
- l'insuffisance de certains axes majeurs intégrés à la feuille de route comme la question de l'attractivité des métiers ;
- le risque de voir la psychiatrie - et ses difficultés déjà anciennes - être noyée dans les enjeux globaux de santé mentale, comme le craignent les soignants.
D. L'HÉTÉROGÉNÉITÉ DES INSTANCES LOCALES DE COORDINATION DES ACTEURS
Si l'utilité des projets territoriaux de santé mentale (PTSMS), déployés sous l'égide des ARS, n'est plus à démontrer pour coordonner les acteurs d'un département, leur mise en oeuvre reste marquée par une grande hétérogénéité territoriale. Certains projets territoriaux sont encore perçus comme trop « théoriques » par les soignants.
Une autre difficulté réside dans l'absence de concrétisation par les ARS de certains projets, pourtant en adéquation avec les priorités des PTSM. Une part importante des financements accordés par les ARS intervient dans le cadre du fonds d'innovation organisationnelle en psychiatrie (FIOP). Or, il est regrettable que d'autres dispositifs, qui ont pourtant fait leur preuve, ne puissent bénéficier d'un soutien budgétaire des ARS au motif de ne pas être assez innovants.
Les conseils locaux de santé mentale (CLSM), développés à l'initiative des collectivités territoriales, sont encore très loin de couvrir le territoire national, puisque seuls 280 CLSM actifs sont recensés en 2025. Toutefois, leur déploiement reste dynamique - une vingtaine de CLSM étant instaurés chaque année.
Ces instances sont un maillon essentiel d'articulation des différentes dimensions de la politique de santé mentale. Les questions de logement et d'habitat sont par exemple traitées dans 65 % des CLSM. Alors que le Gouvernement a édicté un référentiel national des CLSM, par la voie d'une longue instruction, il convient d'encourager le déploiement de ces conseils locaux tout en se gardant de promouvoir un modèle unique. Les CLSM doivent demeurer adaptables aux contextes locaux et s'organiser sur le fondement de leurs priorités spécifiques.