III. POUR ASSURER AU MIEUX UN CONTRÔLE DE LÉGALITÉ EFFICIENT ET ADAPTÉ AUX ENJEUX CONTEMPORAINS, IL CONVIENT DE MAINTENIR UN NIVEAU SUFFISANT D'EFFECTIFS FORMÉS, AVEC DES PARTENARIATS INSTITUTIONNELS ACTIFS ET DANS UN ENVIRONNEMENT NUMÉRIQUE ÉVOLUTIF
A. CONSOLIDER LE NIVEAU DES EFFECTIFS, AVEC DES FORMATIONS OPÉRATIONNELLES DÈS LA PRISE DE POSTE DES AGENTS
1. Consolider le niveau des effectifs en fonction des besoins des préfectures, avec des effectifs suffisants au niveau central pour assurer l'animation du réseau
a) La trajectoire des effectifs affectés aux contrôles de légalité et budgétaires doit a minima être maintenue au regard des créations de postes prévues par la LOPMI
Dans son rapport de 2022, la Cour des comptes avait estimé qu'un renforcement des effectifs à hauteur de 190 ETP serait nécessaire pour que l'État mène à bien ces contrôles.
Si ce niveau de renforcement paraît à moyen terme difficile à atteindre au regard du nombre total des 350 créations de postes envisagées dans le cadre de la LOPMI, il apparaît a minima nécessaire de consolider le niveau des effectifs en charge des contrôles de légalité et budgétaires en fonction des besoins des préfectures, d'autant plus que le ministère de l'intérieur martèle le caractère prioritaire de cette mission constitutionnelle dévolue aux préfets.
Ce niveau d'effectifs devrait pouvoir ressortir des documents budgétaires, au moins en ce qui concerne ceux affectés en préfectures, ce qui n'est pas le cas en l'état du projet annuel de performances de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ». En ce qui concerne les effectifs affectés dans les DDT, la rapporteure spéciale estime que le suivi devrait être repris par la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN), ne serait-ce que sur une base déclarative.
En effet, le suivi des effectifs au niveau agrégé est un préalable nécessaire afin de s'assurer de l'adéquation entre la répartition territoriale des effectifs et les enjeux du contrôle de légalité et budgétaire dans chaque département. À ce titre par exemple, une préfecture dans laquelle le contrôle de légalité des actes d'urbanisme est délocalisé dans les DDT aura de facto de moindres besoins que les préfectures dans lesquelles ce contrôle est centralisé.
Enfin, le repyramidage des effectifs au profit des agents de catégorie A doit de nouveau être envisagé dans ces services, au regard de la complexité des normes juridiques à appliquer et à contrôler. Par ailleurs, à moyen terme, ce repyramidage pourra certainement être opéré à effectifs constants grâce aux gains permis par l'intelligence artificielle du point de vue du tri des actes.
b) Une revalorisation nécessaire des effectifs en charge de l'animation du réseau au niveau central
Le contrôle de légalité est suivi au niveau central au sein du bureau du contrôle de légalité et du conseil juridique de la sous-direction des compétences et des institutions locales de la DGCL. 4 ETP suivent le logiciel @ctes, tandis que 2 ETP sont en charge de l'animation du réseau du contrôle de légalité. La sous-direction ayant obtenu une augmentation du plafond d'emplois d'un ETP, 3 ETP devraient être en charge de l'animation du réseau dans les prochains mois.
Le contrôle budgétaire relève quant à lui du bureau des budgets locaux et de l'analyse financière de la sous-direction des finances locales et de l'action économique de la DGCL, avec 2 ETP en charge du suivi des contrôles pour l'ensemble du territoire.
Au regard des enjeux qui attendent les contrôles de légalité et budgétaires, notamment en termes d'évolutions numériques et de besoins d'animation d'un réseau étendu, 6 ETP au niveau central à l'heure actuelle ne paraissent pas suffisants pour y répondre.
Recommandation n° 1 : Consolider le niveau des effectifs dédiés aux contrôles de légalité et budgétaires en préfectures, mieux répartis sur le territoire et retraçables dans le projet annuel de performances, en accentuant la part des agents de catégorie A, et avec des effectifs suffisants au niveau central pour assurer l'animation du réseau et le développement des projets informatiques - direction du management de l'administration territoriale et de l'encadrement supérieur (DMATES), direction générale des collectivités locales (DGCL) et direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature (DGALN).
2. Accroître l'offre de formation, en professionnalisant les contenus, sous l'égide du PIACL
a) Des formations plus opérationnelles, dès la prise de poste des agents et en présentiel
La professionnalisation des services de contrôles de légalité et budgétaires passe nécessairement par un perfectionnement des formations, même si la rapporteure spéciale relève les nombreux progrès réalisés en la matière par la direction métier, principalement grâce à l'expertise du PIACL, et par la direction des ressources humaines du ministère de l'intérieur. Des marges de progression demeurent toutefois tant du point de vue de la formation initiale que des formations continues.
En ce qui concerne la formation initiale, celle-ci est assurée uniquement dans un premier temps par des formations en distanciel brèves, centrées sur les aspects généraux du contrôle de légalité. Cette formation apparaît insuffisante et en décalage avec les compétences techniques que les agents sur ces postes doivent développer. Les formations en présentiel d'une durée d'une journée et demi à deux jours selon le contrôle de légalité ou le contrôle budgétaire doivent être privilégiées dans un délai de six mois à compter la prise de poste des agents dans tous les territoires. Les cas pratiques, qui sont les exercices les plus utiles pour l'exercice des missions des agents, ne peuvent être réalisés qu'en présentiel et mériteraient de constituer d'ailleurs une part plus importante de la formation initiale.
Les formations continues doivent aussi être plus adaptées à la réalité des contrôles quotidiens effectués par les agents, et particulièrement dans le domaine de l'urbanisme. Outre un perfectionnement des maquettes, les agents des préfectures et des DDT en charge des contrôles pourraient avoir accès plus largement aux formations délivrées par le centre de formation de la juridiction administrative (CFJA). Par ailleurs, les agents sur le terrain ayant relevé l'utilité particulière des webinaires thématiques et d'actualité animés par les agents du PIACL, ce format doit être encouragé et utilisé en cas d'actualités majeures relatives à un domaine de contrôle prioritaire (commande publique, urbanisme et fonction publique territoriale).
Ce renforcement de la formation est également une condition sine qua non pour accroître l'attractivité de ces postes, pour lesquels les prises de postes peuvent être considérées comme délicates, en particulier pour des agents qui n'ont pas été formés à la matière juridique durant leurs études ou lors de leurs premières affectations en préfecture.
Recommandation n° 2 : Rendre plus opérationnelles les formations, en les organisant dès la prise de poste des agents et en présentiel - direction des ressources humaines du ministère de l'intérieur (DRH MI) et services régionaux de formation.
b) Des formations pilotées par le PIACL, dont le rôle en matière de pédagogie et de formation devrait être accru
Au regard de la qualité du travail fourni par le PIACL composé d'experts juridiques et de la satisfaction manifestée par les agents préfectoraux, la rapporteure spéciale estime que la mission de formation du PIACL, telle que prévue par la circulaire du 15 novembre 2002, doit être davantage développée. En ce sens, elle ne saurait que rejoindre la recommandation déjà formulée par la Cour des comptes en 202283(*), visant à confier à ce pôle un rôle de chef de file en matière de formation, notamment à raison du caractère nécessairement interministériel des formations. Ce besoin est patent s'agissant particulièrement du contrôle de légalité des actes d'urbanisme pour les agents en préfecture et ceux des DDT.
La DGCL apparaît peu encline à vouloir confier ce rôle au PIACL, arguant qu'il dispose de compétences et expertises juridiques et non pédagogiques. Au regard de la forte technicité des normes applicables en matière de contrôle de légalité et budgétaire, et des demandes exprimées par les agents en poste de développer des compétences techniques, la rapporteure spéciale considère que le PIACL est l'entité la mieux outillée pour répondre à ces enjeux.
Au regard de la montée en compétences du PIACL en matière de formation, il apparaît a minima nécessaire d'avoir un référent formation au sein du PIACL, en charge du suivi des webinaires et des foires aux questions (FAQ) disponibles après la formation, de l'élaboration de nouvelles grilles de contrôle et d'une veille jurisprudentielle très largement diffusée.
Recommandation n° 3 : Confier au Pôle interrégional d'appui au contrôle de légalité (PIACL) un rôle de chef-de-file en matière de pédagogie et de formation, en instaurant a minima un référent formation au sein du pôle - direction des ressources humaines du ministère de l'intérieur (DRH MI) et PIACL.
* 83 Cour des comptes, Contrôle de légalité et contrôle des actes budgétaires en préfecture, exercices 2015-2021, septembre 2022.