EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 9 juillet 2025 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a entendu une communication de Mme Florence Blatrix Contat, rapporteure spéciale, sur le contrôle de légalité et budgétaire des actes des collectivités territoriales.

M. Claude Raynal, président. - Nous passons à la communication de notre collègue Florence Blatrix Contat, rapporteure spéciale de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », sur le contrôle de légalité et budgétaire des actes des collectivités territoriales.

Mme Florence Blatrix Contat, rapporteure spéciale. - Dans le cadre de la nouvelle réforme de l'administration territoriale de l'État présentée hier à Chartres, le Premier ministre a annoncé vouloir confier aux préfets de nouvelles missions : leurs prérogatives « managériales » devraient être accrues ; ils auraient vocation à devenir les délégués territoriaux de tous les opérateurs et ils pourraient aussi donner un avis préalable sur toutes les implantations de nouveaux services au public sur leur territoire.

Dans ce contexte de renouveau, qu'en est-il des missions traditionnelles des préfets, et en particulier de la mission constitutionnelle de contrôle de la légalité des actes et des budgets des collectivités territoriales, prévue à l'article 72 de la Constitution et visant à garantir le caractère unitaire de notre République et l'égalité des citoyens devant la loi ?

J'ai souhaité conduire un contrôle budgétaire cette année sur ce sujet à partir du constat d'un paradoxe et d'une nécessité, à la suite de déplacements dans les préfectures.

Une nécessité, tout d'abord. Si la transformation partenariale du contrôle de légalité et la valorisation de la fonction de conseil des préfectures aux collectivités résultent d'une décentralisation heureuse, des contrôles, au moins ciblés sur les actes les plus importants, doivent être préservés. Ils constituent des outils de sécurisation de l'action des collectivités et de gestion saine des finances publiques.

Un paradoxe, ensuite. Alors que les contrôles de légalité et budgétaire sont sans cesse affichés comme prioritaires par le ministère de l'intérieur - ils devaient d'ailleurs être modernisés par le recours à l'intelligence artificielle (IA) dans le cadre du plan Missions prioritaires des préfectures 2022-2025 -, force est de constater une attrition constante des moyens dédiés au contrôle de légalité.

En effet, les effectifs dédiés aux contrôles de légalité et budgétaires ont connu une évolution antagonique avec le nombre d'actes transmis aux préfectures.

De 2012 à 2020, les effectifs des préfectures ont été réduits de 14 %, ce qui a eu des effets sur les services en charge du contrôle de légalité et du contrôle budgétaire. Les effectifs sont passés de 1 019 équivalents temps plein (ETP) en 2010 à 868 ETP en 2024 s'agissant du seul contrôle de légalité, ce qui représente une baisse de l'ordre de 15 % des emplois sur la période. Pour le contrôle budgétaire, la contraction des effectifs est encore plus intense, de l'ordre de -26,5 %. En près de quinze ans, ces services ont perdu en moyenne 1,1 % de leurs effectifs tous les ans, et n'ont pas été renforcés malgré les créations de postes intervenues à partir de 2023 dans le cadre de la loi du 24 janvier 2023 d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi).

En parallèle sur la même période, le nombre d'actes transmis annuellement au niveau national, quant à lui, est passé de 5,15 millions d'actes à 7,72 millions d'actes, dont plus de la moitié concerne les trois domaines prioritaires que sont la commande publique, l'urbanisme et la fonction publique territoriale. Cela représente une augmentation de l'ordre de 50 % du nombre d'actes reçus, et ce malgré la réduction de la liste des actes devant être obligatoirement transmis.

Avec une baisse de 15 % à 26 % des emplois pour une augmentation de 50 % des actes, le contrôle s'est nécessairement affaibli, au point même que la Cour des comptes a évoqué en 2022 une qualité du contrôle de légalité qui « n'est plus suffisante au regard des obligations constitutionnelles de l'État ». Alors que le taux de contrôle des actes était de 20,6 % en 2015, il n'est plus que de 17,8 % en 2023. Même le taux de contrôle des actes prioritaires a diminué : alors qu'il était de 89 % en 2015, il n'est plus que de l'ordre de 83 % en 2024, pour une cible à 90 % dans le projet annuel de performances (PAP).

Des disparités territoriales sont également observées, avec un taux de contrôle qui peut varier de 33 % à 99 % en fonction des départements du territoire métropolitain. Plusieurs départements, comme le Jura, le Rhône, la Sarthe ou encore la Lozère, affichent des taux de contrôle des actes prioritaires particulièrement faibles - de l'ordre de 30 % -, si bien que l'expression de « passoire à géométrie variable », utilisée par notre collègue Jacques Mézard pour caractériser le contrôle de légalité dans son rapport d'information de 2012 fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, est malheureusement encore d'actualité. Par ailleurs, plus de 35 % des actes irréguliers détectés par le contrôle de légalité et signalés par un recours gracieux ne sont ni retirés ni déférés pour autant.

Si ces disparités territoriales s'expliquent par des causes profondes et multifactorielles, les effectifs peuvent toutefois avoir une incidence sur le taux de contrôle et le nombre de déférés : les départements les mieux dotés en effectifs sont souvent ceux où le nombre de déférés est le plus dynamique.

Je tiens également à évoquer une zone grise du contrôle de légalité, c'est-à-dire celle des entreprises publiques « satellites » des collectivités territoriales, telles que les sociétés d'économie mixte (SEM) ou les sociétés publiques locales (SPL). À raison de leur soumission aux règles du code de commerce, elles sont très peu contrôlées par les préfectures, mais n'en demeurent pas moins constitutives de risques financiers croissants pour les collectivités et de risques pénaux pour les élus, comme le révèlent les contrôles effectués par les chambres régionales des comptes.

Considérable, la contraction des effectifs préfectoraux a été insuffisamment compensée par une professionnalisation des services et par l'adaptation des logiciels de contrôle, qui restent datés.

Un repyramidage des effectifs chargés des contrôles a été progressivement opéré, si bien que les services sont aujourd'hui composés à 23 % d'agents de catégorie A. Si ce pyramidage peut être adapté à l'échelle de l'ensemble des missions des préfectures, il demeure peu adapté à la complexité du droit à appliquer.

Les formations, qui se sont intensifiées seulement à partir de 2024, demeurent largement tributaires de la bonne volonté des agents à leur prise de poste, dès lors qu'ils ne bénéficient que de formations distancielles au départ. Les formations présentielles interviennent en général jusqu'à un an et demi après la prise de poste, ce qui est tardif. Par ailleurs, les agents rencontrés lors de mes déplacements ont unanimement reconnu le manque de caractère opérationnel des formations, en particulier en matière d'urbanisme.

Les outils numériques, qui datent de 2005 pour le contrôle de légalité et de 2011 pour le contrôle budgétaire, ont peu évolué depuis lors. Ils accusent aujourd'hui une dette technique bloquant l'intégration de l'IA et sont une source de crispation quotidienne pour les agents, du fait d'un manque d'ergonomie et de fiabilité. De nombreuses préfectures ont signalé devoir faire des statistiques des actes reçus et contrôlés sur des fichiers Excel, en parallèle du logiciel. Le coût de ces logiciels est également grandissant, notamment du fait du recours à l'assistance à maîtrise d'ouvrage par la direction générale des collectivités locales (DGCL), assistance confiée à un prestataire extérieur privé, en l'absence même de refonte d'ampleur de ces logiciels.

Afin de pallier les lacunes des contrôles en préfecture, ceux-ci ont été réorganisés en ayant recours à d'autres institutions, afin de délocaliser les contrôles là où se situe l'expertise.

Ainsi, le contrôle des actes de légalité des actes d'urbanisme est confié dans la moitié des départements aux directions départementales des territoires (DDT), avec un partenariat plus ou moins poussé, principalement en fonction des effectifs disponibles. Les DDT ont d'ailleurs, elles aussi, connu une contraction de leurs effectifs à la suite de la révision générale des politiques publiques (RGPP).

Sur le même modèle, les préfectures peuvent également développer des partenariats avec les directions départementales et régionales des finances publiques pour le contrôle budgétaire, en vertu d'une convention entre la direction générale des finances publiques (DGFiP) et la DGCL qui s'étend même parfois au contrôle de légalité des délibérations fiscales dans certains territoires, au-delà donc de ce qui est prévu par la convention nationale.

En effet, un certain nombre de contrôles réalisés par les comptables sur les documents budgétaires permettent d'identifier et de corriger des anomalies. La DGFiP - plutôt en avance par rapport aux préfectures - développe actuellement des contrôles automatisés via l'IA, dont les apports pourraient être très utiles aux services préfectoraux.

Il apparaît toutefois que seulement treize préfectures ont formalisé un tel partenariat par une convention ou un protocole d'accord, selon les données de la DGCL pour la période 2019-2021.

Enfin, les préfectures peuvent saisir le pôle interrégional d'appui au contrôle de légalité (Piacl), basé à Lyon et rattaché à la DGCL depuis 2006. Composé d'une vingtaine d'experts juridiques répartis en cinq chambres spécialisées, il transmet des avis très étoffés aux préfectures, qui reconnaissent unanimement son utilité.

Au regard de ces éléments, je souhaite faire un certain nombre de propositions. Mes recommandations sont au nombre de huit et concernent les effectifs, les partenariats et l'environnement numérique.

En ce qui concerne les effectifs, ils doivent être consolidés au niveau central. Seulement six ETP suivent actuellement, au sein de la DGCL, l'aspect numérique et l'animation du réseau du contrôle de légalité et budgétaire : c'est trop peu. Pour les préfectures, les effectifs doivent être adaptés au regard des besoins selon les territoires, avec des services davantage professionnalisés. Le Piacl pourrait à ce titre avoir un rôle accru en matière de formation. C'est le sens de mes recommandations nos 1 à 3.

Mes recommandations nos 4 et 5 portent sur les partenariats, qui pourraient être mieux exploités et développés sur le territoire, en particulier celui qui a été noué avec la DGFiP dans le cadre de la refonte en cours de la convention nationale avec la DGCL, et au regard des avancées numériques prometteuses portées par la DGFiP.

Enfin, l'environnement numérique des contrôles doit impérativement être adapté à l'inflation du nombre d'actes transmis. C'est le sens de mes recommandations nos 6 à 8. Pour cela, l'IA doit être intégrée dans la refonte des logiciels @CTES et @CTES budgétaires afin d'améliorer le traitement quantitatif des actes, en permettant aux agents de se concentrer sur les questions afférentes à la légalité interne des actes, c'est-à-dire au fond.

Ces logiciels devraient également permettre de quantifier la part de conseil aux collectivités, qui peut représenter près de 50 % de l'activité de ces services s'agissant du contrôle de légalité. Les agents ont également besoin d'une plateforme numérique pilotée au niveau national afin de favoriser la coopération départementale, objectif qui était d'ailleurs porté par le plan Missions prioritaires des préfectures 2022-2025, mais qui n'a pas été véritablement atteint.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. -Il me semble avoir compris que certains envisageaient une suppression du contrôle de légalité dans les préfectures au regard du taux relativement faible de réalisation des contrôles, mais je pense que cette perspective n'est guère souhaitable.

Un exemple cité par la rapporteure spéciale a particulièrement retenu mon attention, à savoir celui des organismes nouveaux rattachés aux collectivités territoriales : brassant des sommes considérables, ces derniers sont en quelque sorte une extension des collectivités, tout en modifiant les conditions des contrôles. Il convient donc de maintenir les vérifications, même s'il faut sans doute supprimer les contrôles de faible portée qui nuisent à la qualité de la démarche. Plusieurs leviers - tri, mutualisation ou encore recours à l'IA - pourraient être actionnés à cet effet.

Les services de l'État ont-ils conscience de la situation ? Portent-ils des recommandations particulières ?

M. Vincent Delahaye. - L'échelon local s'interroge souvent sur la pertinence du contrôle de légalité, qui est parfois incomplet ou insuffisant. Un problème de formation des agents semble être en cause, et il conviendrait de prioriser les contrôles, de manière à en améliorer l'efficacité.

Qu'entendez-vous par la formule « consolider le niveau des effectifs » ? S'il est question de les renforcer, je ne voterai pas en faveur du rapport, car la situation des finances publiques est trop grave.

M. Michel Canévet. - Je félicite également la rapporteure spéciale pour avoir attiré notre attention sur cette activité importante pour le bon fonctionnement des institutions. À l'instar du rapporteur général, je pense que l'État doit continuer à assumer ce contrôle de légalité.

J'ai été surpris par le fonctionnement en silos de l'État décrit par le rapport : en particulier, le fait que les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM) ne soient pas organisées afin de favoriser la mutualisation des moyens m'étonne. De la même manière, le faible nombre de départements ayant mis en place une organisation fluide interpelle et montre bien que les annonces faites hier par le Premier ministre sont absolument nécessaires : il faut que le préfet soit le véritable représentant de l'ensemble des services de l'État et mette en oeuvre une mutualisation des moyens.

Enfin, des expérimentations impliquant le recours à l'IA ont-elles d'ores et déjà été lancées ? S'il est question de placer la France à la pointe de la tech, l'État se doit d'être exemplaire.

M. Jean-Raymond Hugonet. - Je remercie à mon tour la rapporteure spéciale, dont le travail nous est présenté fort à propos, au lendemain de la visite de François Bayrou à Chartres, au cours de laquelle il a annoncé son intention de replacer les préfets au centre du dispositif.

L'autre élément de contexte a un caractère plus tragique, puisqu'il s'agit de l'article du Monde publié le 8 juillet et qui décrit la vague de suicides qui secoue la DGFiP : en l'espace de six mois, douze agents de cette administration du ministère de l'économie et des finances se sont donné la mort et huit agents ont tenté de le faire. Ces chiffres très élevés préoccupent Bercy, qui organise une réunion spéciale aujourd'hui.

Une critique récurrente a consisté à rappeler que les services locaux de l'État ont été déstabilisés par la réduction des effectifs dans les départements, alors que l'administration centrale était restée pléthorique. Dans la mesure où les limites sont désormais atteintes de tous les côtés, comment peut-on consolider les effectifs dédiés au contrôle de légalité sans augmenter la part des fonctionnaires ?

Mme Ghislaine Senée. - Le sujet est effectivement d'actualité, le récent vote d'une proposition de loi visant à renforcer et sécuriser le pouvoir préfectoral de dérogation afin d'adapter les normes aux territoires n'ayant rien d'anodin. Le contrôle de légalité doit être assuré, et un suivi des dérogations devrait pouvoir être effectué.

Les territoires ont pâti de la réduction du nombre d'agents opérée à partir de 2008, les maires élus à cette période ayant pu constater les conséquences du laminage des effectifs préfectoraux, en termes tant de contrôle de légalité que de présence des DDT.

Selon moi, la consolidation des effectifs s'impose d'autant plus que les attributions des préfets s'apprêtent à être renforcées, avec, en parallèle, la mise en place d'un guichet unique. Une présence accrue sur les territoires est nécessaire et l'IA n'est pas suffisamment fiable pour remplacer les humains. Il importe d'accorder des moyens à la hauteur des engagements et des choix qui sont faits.

M. Thomas Dossus. - Ce rapport très utile montre le caractère « hors sol » de certaines propositions budgétaires, certaines fonctions régaliennes très concrètes étant mises en péril par le dogme de la réduction du nombre d'emplois publics.

Par conséquent, la recommandation n° 1 est-elle compatible avec les propositions portées à l'heure actuelle par la majorité sénatoriale, qu'il s'agisse de l'« année blanche » ou du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux ? Faudra-t-il renoncer à assurer cette fonction régalienne du contrôle de légalité au regard de nos difficultés budgétaires et de la politique souhaitée par le « bloc central » ?

M. Laurent Somon. - J'ai été surpris, pour ma part, par le nombre d'actes irréguliers gracieux qui ne sont ni retirés ni déférés. La rapporteure spéciale a mentionné une corrélation avec les effectifs, ce qui n'est pas tout à fait exact si j'en crois la carte jointe au rapport : en Corse, en Gironde et dans le Nord, le nombre de déférés est élevé, mais avec des effectifs qui peuvent être plus ou moins fournis.

Par ailleurs, l'évocation de « la frilosité du corps préfectoral à déférer, en particulier lorsqu'il s'agit de grosses collectivités », appelle des précisions.

Mme Florence Blatrix Contat, rapporteure spéciale. - J'estime que nous devons maintenir le contrôle de légalité. J'ai été surprise de constater que certaines régions disposaient d'une quarantaine d'agents pour s'assurer de la légalité de leurs actes et qu'elles recouraient aussi, assez fréquemment, à des cabinets d'avocats à cet effet. Il est donc crucial de garder cette compétence au niveau des préfectures afin que toutes les collectivités aient accès à des conseils juridiques, et en particulier les plus petites communes qui n'ont pas les moyens de se doter de directions juridiques pour rédiger leurs actes. Malheureusement, des disparités territoriales sont constatées entre départements. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui a motivé ce contrôle budgétaire. J'ai effectué un déplacement à l'automne au sein d'une préfecture qui avait complètement abandonné le contrôle de légalité en matière de commande publique, faute d'effectifs suffisamment formés, et alors même qu'il s'agit d'un domaine prioritaire du contrôle de légalité.

Sur le terme « consolider les effectifs », j'ai bien conscience du contexte budgétaire auquel nous sommes confrontés et qu'il sera délicat de renforcer les effectifs. Toutefois, la Lopmi prévoit 350 créations de postes pour les préfectures jusqu'en 2027 : il faudrait donc qu'une partie d'entre eux soient affectés au contrôle de légalité, car il est tout à fait regrettable que des pans entiers de cette mission soient abandonnés. Par ailleurs, 20% des effectifs sont aujourd'hui dédiés au tri des actes. À moyen terme, et grâce aux progrès permis par l'IA, il est possible d'imaginer que ces effectifs pourront être rebasculés vers le contrôle stricto sensu et le conseil aux collectivités.

Les SPL, quant à elles, sont trop peu concernées par le contrôle de légalité, une vérification a posteriori étant néanmoins effectuée par les chambres régionales des comptes.

S'agissant du nombre important d'actes irréguliers qui ne sont pas déférés, des disparités existent là encore entre préfectures. Même s'il n'existe pas de causalité certaine entre les déférés et le niveau des effectifs, je maintiens qu'il existe toutefois des corrélations. En ce qui concerne « la frilosité » du corps préfectoral, il s'agit d'une expression de la Cour des comptes utilisée dans un rapport de 2022 sur le contrôle de légalité. Il est vrai que certains préfets sont plus allants à déférer tandis que d'autres préfèrent des lettres d'observation valant pour l'avenir en cas d'irrégularités. Ne pas déférer, c'est aussi prendre le risque de recours croissant des oppositions, qui agissent en lieu et place du préfet. Toutefois, elles ne sont pas présentes dans toutes les communes et il est indispensable de maintenir un contrôle de légalité en préfectures.

Monsieur Canévet, je souscris à votre critique du fonctionnement en silos, les conventionnements restant peu nombreux et disparates. Dans les Bouches-du-Rhône par exemple, la DDT se charge de l'intégralité du contrôle de légalité ; dans d'autres départements, un ou deux agents de cette direction sont détachés auprès de la préfecture. Je pense donc qu'une meilleure coopération entre services est nécessaire afin de gagner en efficience.

M. Hugonet a évoqué les drames survenus au sein de la DGFiP, administration qui a perdu près de 30 000 agents tout en remplissant - avec efficacité, comme nous le relevons régulièrement - des missions de plus en plus nombreuses. Qu'il s'agisse de cette entité ou des préfectures, les contractions d'effectifs ont bien leurs limites, et les outils informatiques ne les compensent que partiellement.

Le logiciel @CTES date ainsi de 2005 et n'est pas du tout conçu pour intégrer un recours à l'IA. Une première expérimentation basée sur l'IA a été lancée en 2020, mais a complètement échoué, et la DGCL s'est fixé l'échéance de 2027 pour faire évoluer le logiciel, ce qui ne permet d'envisager une utilisation de l'IA qu'à l'horizon 2029 : nous avons perdu beaucoup de temps dans ce domaine, alors que de meilleurs outils permettraient aux services de se concentrer sur la légalité interne des actes plutôt que sur la légalité externe.

Je partage, enfin, le souhait de Mme Senée de renforcer les effectifs. La consolidation paraît a priori difficilement compatible avec le principe d'une année blanche, mais, une fois encore, il est possible d'allouer une partie des moyens prévus par la Lopmi au contrôle de légalité.

La commission a adopté les recommandations de la rapporteure spéciale et autorisé la publication de sa communication sous la forme d'un rapport d'information.

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