II. LE SCÉNARIO DE LA CROISSANCE DÉCARBONÉE ET CONTRÔLÉE

La croissance économique reste l'objectif central mais elle s'inscrit dans une trajectoire de prospérité bas carbone fondée sur des technologies dites propres. Le PIB demeure l'indicateur phare mais il est ajusté pour prendre en compte le budget carbone des entités publiques, leur empreinte sur la biodiversité et la dette écologique laissée aux générations futures.

La concurrence et l'innovation technologique, visant à concilier croissance et protection des écosystèmes, sont le moteur du changement : des efforts de recherche et développement massifs sont mis en oeuvre par le secteur privé pour développer des systèmes d'intelligence artificielle mis au service de l'environnement, des techniques de stockage du CO2 à grande échelle, l'hydrogène propre ou encore les biotechnologies.

Les écosystèmes sont protégés via leur intégration dans des marchés régulés : fiscalité verte appliquée à l'échelle mondiale, quotas carbone généralisés, mise en place de crédits biodiversité.

Dans l'espace public, la qualité de l'environnement est surveillée par des drones tandis que des informations sont affichées en temps réel sur les émissions de CO2 ou la biodiversité. Les citoyens sont connectés pour suivre leurs consommations personnelles et reçoivent des conseils personnalisés en vue d'une consommation plus durable et responsable.

L'intelligence artificielle est massivement utilisée dans la conception des politiques publiques : en matière de fiscalité, elle contribue à une redistribution ciblée, visant à réduire les inégalités sans ralentir la dynamique économique ; dans le champ social, elle permet de proposer une couverture sociale automatisée et adaptative selon les chiffres de la croissance. L'analyse de données permet d'anticiper les besoins, s'agissant en particulier des aides sociales et des pensions, et permet de prendre en compte le futur pour viser la soutenabilité intergénérationnelle.

Adoptée sur une base volontaire, la comptabilité environnementale constitue un élément de différenciation. Moyennant une révision en profondeur de leur modèle d'affaires et des investissements importants, une partie des entreprises vont au-delà des obligations qui leur sont imposées en matière de responsable sociale et environnementale (RSE) en adoptant une comptabilité socio-environnementale. Elles bénéficient de mesures d'accompagnement (subventions, prêts) de la part des pouvoirs publics et se voient plus facilement accorder des fonds « verts » par les banques.

À l'inverse, les entreprises les moins volontaires se limitent à produire les informations extra-financières. Certains consommateurs se détournent de celles qui sont dénoncées pour leurs atteintes à l'environnement. Les entreprises qui souhaitent mener des actions de RSE favorables à l'environnement et qui mobilisent des fonds en ce sens peuvent toutefois être considérées comme n'optimisant pas les bénéfices des actionnaires à court terme. C'est pourquoi leurs efforts restent contraints.

Si des indicateurs de bien-être sont utilisés, en particulier en matière de santé, d'éducation ou encore de logement, ils demeurent périphériques et ne supplantent pas la logique de croissance.

Des améliorations environnementales ont été enregistrées, en particulier dans les villes, où l'air est moins pollué et les effets du changement climatique atténués par le verdissement des infrastructures urbaines.

Cependant, les écosystèmes sont devenus des actifs financiers et la marchandisation de la nature suscite des critiques.

D'aucuns considèrent que l'ambition d'une « croissance verte » n'a pas permis une transformation en profondeur du système économique pour répondre aux enjeux environnementaux et sociaux sur l'ensemble du territoire. Ils estiment que la société est restée « au milieu du gué ».

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