LES VULNÉRABILITÉS NÉES DU PASSÉ

On ne demeure pas, pendant plus d'un siècle, administration d'Etat sans connaître un certain décalage avec les réalités du marché quand on commence à devenir une entreprise. France Télécom en a fait l'expérience depuis qu'elle est devenue, le 1er janvier 1991, un exploitant autonome de droit public.

Elle s'est d'ailleurs résolument attaquée à la correction de cette distorsion. Marcel Roulet l'a propulsée vers le marché international et a amorcé la substitution d'une " culture de clientèle " à une " culture de l'usager ". Michel Bon, son nouveau Président, tend à accentuer cette dernière orientation en remodelant les structures internes.

Cependant, on ne transforme pas l'héritage de cent ans de comportements administratifs en cinq ans. France Télécom, si elle est riche de ses traditions de service public, est encore handicapée par certaines conséquences des politiques et des pratiques antérieures. En ce domaine, votre commission distingue quatre vulnérabilités : l'importance de la dette, le poids des réflexes réglementaires, des charges de retraite asphyxiantes, une grille tarifaire déconnectée de la réalité des coûts.

L'IMPORTANCE DE LA DETTE

En 1990, au moment de sa transformation en exploitant autonome, France Télécom traînait une dette dont le montant atteignait 120,7 milliards de francs.Celle-ci dépassait largement son chiffre d'affaires (103 milliards de francs). Le poids des frais financiers (11 milliards de francs) représentait le pourcentage très élevé de 11 % du chiffre d'affaires (3 fois supérieur à celui de BT).

Cette situation très dégradée s'expliquait, essentiellement, par l'obligation faite, depuis 1982, à l'ancienne direction générale des télécommunications, de reverser à l'Etat une partie des bénéfices inscrits au budget annexe des P et T. Ce prélèvement -qui a culminé à 18,3 milliards de francs en 1986- avait naturellement suscité de coûteux recours au marché financier pour assurer les investissements. En outre, il convient de rappeler que dans le cadre de la réforme de 1990, France Télécom s'est trouvé substituée à la Caisse nationale des Télécommunications pour le remboursement de ses financements obligataires.

Dans le cadre des engagements pris dans son contrat de plan 1991-1994, l'opérateur a réussi à faire baisser cette dette colossale à 95 milliards de francs fin 1994.

Son nouveau contrat de plan (1995-1998) lui impose un objectif de 45 milliards de francs de dette fin 1998, soit un effort 1,7 fois supérieur à celui consenti antérieurement. Il s'agit d'abaisser le ratio frais financiers sur chiffres d'affaires -qui est un important ratio de productivité- pour l'amener au niveau de celui de ses meilleurs concurrents, c'est-à-dire 2 % ou moins. Fin 1994, ce ratio était de 5,6 % à France Télécom.

En 1995, en raison notamment du report sur 1996 de l'investissemennt prévu pour l'entrée au capital de l'allié américain Sprint, l'entreprise a consacré 16,8 milliards de francs à son désendettement au lieu des 3,5 milliards initialement prévus. Il a ainsi ramené sa dette à 78,5 milliards de francs.

Cependant la crainte qu'on peut avoir face à l'ampleur du rétablissement financier -certes indispensable- demandé à l'entreprise publique, c'est que celui-ci soit réalisé au détriment de l'investissement, surtout si les bénéfices ne demeurent pas au niveau de ceux réalisés ces deux dernières années.

D'ores et déjà, l'enveloppe des investissements programmée par le nouveau contrat de plan est de 132 milliards de francs sur la période 1995-1998, contre 150 milliards de francs pour le précédent contrat de plan.

L'importance de sa dette financière entrave donc assez sensiblement les mouvements de l'entreprise.

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