IV. APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

A. LES MODALITÉS D'APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 PAR LA DÉLÉGATION

Le 31 janvier 1996, le Président Jacques Genton a présenté à la délégation une communication sur l'application de l'article 88-4.

M. Jacques Genton :

« L'article 88-4 a été introduit dans la Constitution en juillet 1992.

Compte tenu du délai nécessaire pour mettre en place ses modalités d'application, il est entré effectivement en vigueur en janvier 1993.

En octobre 1993, la Conférence des Présidents du Sénat a constaté que les commissions étaient souvent hésitantes devant ces propositions d'acte communautaire, qui arrivaient en grand nombre. Elle a donc chargé notre délégation de distinguer, parmi toutes ces propositions, celles qui méritaient un examen par le Sénat

Enfin, en juillet 1994, le Premier ministre a défini par circulaire les modalités de la prise en compte par le Gouvernement des positions que le Parlement pouvait être amené à prendre en application de l'article 88-4.

Cette circulaire prévoit notamment que les ministres, avant de participer aux négociations sur une proposition d'acte communautaire, doivent vérifier si l'Assemblée nationale ou le Sénat ont l'intention ou non d'examiner cette proposition.

À cette fin, les délégations de l'Assemblée nationale et du Sénat sont devenues les interlocuteurs naturels du Gouvernement. Si une délégation estime, dans le mois suivant le dépôt d'une proposition, que cette proposition mérite un examen parlementaire, le Gouvernement agit en sorte que le vote sur cette proposition n'intervienne pas avant que le Parlement ait pu s'exprimer. En revanche, si aucune délégation ne se manifeste en ce sens dans ce même délai, le Gouvernement ne s'estime plus tenu d'invoquer une « réserve d'examen parlementaire » devant le Conseil

Depuis cette circulaire, la délégation est donc investie d'une responsabilité particulière puisqu'elle doit faire connaître au Gouvernement, dans le délai d'un mois, si elle estime que le Sénat doit intervenir. C'est ce qui nous a amenés à procéder à un examen régulier et systématique des propositions d'actes communautaires. Nous nous livrons à cet examen depuis l'automne 1994 : je crois donc qu'il est bon aujourd'hui, à partir de cette expérience, de formuler quelques constats et de tirer quelques enseignements.

Depuis octobre 1994, date à laquelle nous avons commencé cet examen systématique, c'est environ 260 propositions d'acte communautaire qui ont été soumises au Sénat.

Pour la seule année 1995, c'est plus de 200 propositions d'acte communautaire qui sont venues devant nous.

Or, sur ces 200 propositions, il n'y en a guère qu'une vingtaine qui ont appelé une proposition de résolution au Sénat.

Le Sénat n'a d'ailleurs pas adopté 20 résolutions, mais seulement la moitié de ce chiffre. Mais c'est une vingtaine de propositions qui ont paru mériter le dépôt d'une proposition de résolution, c'est-à-dire 10 % du total.

Au-delà de ces 10 %, il y a encore une vingtaine de propositions qui ont appelé, de notre part, une certaine forme d'intervention. Ce fut parfois une lettre au ministre compétent afin d'appeler son attention sur un point précis. Ce fut parfois un rapport d'information parce que nous considérions qu'il fallait examiner le problème dans son ensemble. Ce fut parfois une communication devant la délégation nous permettant d'examiner plus au fond la proposition et quelquefois de conclure qu'il n'y avait pas motif à intervenir.

C'est donc à nouveau 10 % de l'ensemble qui ont mérité un examen plus ou moins approfondi.

En revanche, les 80 % restants n'ont manifestement nécessité aucun examen de fond de la part du Sénat.

Tantôt il s'agissait de textes recueillant un assentiment unanime et n'appelant aucune réserve ni remarque.

Tantôt il s'agissait de textes qui concernaient d'autres États membres, mais non la France.

Tantôt il s'agissait de textes ne portant que sur un aspect tout à fait mineur et limité d'une politique.

Tantôt encore il s'agissait de mesures provisoires n'anticipant en rien sur des mesures ultérieures ou de mesures reconduisant des mesures antérieures pour une période limitée.

La grande difficulté que nous pose cette masse de propositions mineures tient à l'exigence du délai. Dans le délai d'un mois, nous devons faire savoir au Gouvernement s'il nous semble que le Sénat doit intervenir ou non sur ces textes.

Cette contrainte nous amène à encombrer notre ordre du jour, à des moments que nous ne maîtrisons pas, sur des sujets qui ne présentent guère d'intérêt.

Or l'important pour la délégation est de se concentrer, le plus rapidement possible, sur les 20 % des textes qui présentent un réel intérêt de fond.

C'est pourquoi je vous suggérerai que nous adoptions désormais la méthode suivante :

- Indépendamment des dates de nos réunions, je vous adresserai périodiquement une analyse des textes qui me paraissent mineurs en indiquant les raisons qui m'amènent à penser qu'il n'est pas nécessaire de procéder à un examen plus approfondi.

- Si aucun membre de la délégation ne fait savoir au secrétariat, dans les huit jours suivants la réception de cette lettre, qu'il souhaite qu'un de ces textes soit évoqué en délégation, il nous sera possible de faire savoir sans tarder au Gouvernement que la délégation n'estime pas nécessaire que le Sénat intervienne sur ces textes.

- En revanche, si un seul membre de la délégation fait connaître son souhait qu'un texte soit évoqué en délégation, ce texte sera réservé jusqu'à la prochaine réunion de la délégation. Et, lors de cette réunion, le sénateur intéressé fera une communication afin d'exposer le sort qu'il propose de réserver à ce texte.

Cette formule devrait nous permettre, tout à la fois, de nous prononcer rapidement sur la masse des textes mineurs, et de nous consacrer plus largement aux 20 % restants qui sont les textes politiquement intéressants.

Pour ces 20 % les plus significatifs, nous garderions la formule actuelle et ils seraient systématiquement examinés en délégation.

*

Je voudrais aborder maintenant le problème de l'urgence.

Tout au long de l'année, certains textes, en nombre très limité, font l'objet de demande d'urgence de la part du Gouvernement. Ceci me paraît relativement raisonnable et fondé. Il n'en va pas de même toutefois pour la situation qui s'est produite en décembre dernier.

À l'occasion de la fin de la présidence espagnole, nous avons été saisis tout à coup d'une dizaine de textes en urgence. C'était déjà beaucoup. Mais, au-delà de ces dix textes, c'est plus d'une vingtaine d'autres textes dont les seuls intitulés m'ont été communiqués la veille de leur adoption par le Conseil.

Une telle situation aboutit à l'évidence à vider l'article 88-4 de sa portée. J'en ai fait part au ministre des Affaires européennes et mon collègue M. Pandraud a fait de même.

Le ministre nous a répondu cependant qu'il n'y pouvait rien. La responsabilité en revient à la Commission qui dépose trop tardivement des textes qui doivent être adoptés de manière urgente.

La solution se trouve sans nul doute à terme dans l'inscription d'un délai minimal dans le texte même des traités.

Mais, en attendant cette inscription, le Gouvernement a souhaité sensibiliser la Commission et le Conseil sur ce point. Il va donc envoyer une mission de fonctionnaires à Bruxelles pour expliquer les raisons qui amènent la France à demander un délai raisonnable entre le dépôt formel d'un texte et son adoption définitive. »

B. L'EXAMEN DES PROPOSITIONS D'ACTES COMMUNAUTAIRES PAR LA DÉLÉGATION

1. Relations extérieures


Politique commerciale

Proposition E 517

(Procédure écrite du 5 mars 1996)

La proposition E 517 concerne l'application d'un arrangement conclu en 1978 dans le cadre de l'Organisation de Coopération et de Développement économiques (OCDE), au sujet des crédits à l'exportation bénéficiant d un soutien public.

Cet arrangement prévoit une discipline internationale en vue de diminuer le niveau des subventions et les distorsions de concurrence dans le domaine des financements et des garanties à l'exportation. Il comporte une annexe spécifique applicable aux crédits à 1 exportation d'aéronefs civils.

La proposition E 517 prévoit d'étendre le champ d'application de cette annexe à l'exportation d'avions d occasion, de pièces détachées et de moteurs de rechange, ainsi que pour les contrats d'entretien d'aéronefs et les contrats de prestation de services.

Ce texte a été examiné par la délégation lors de sa réunion du 13 décembre 1995. Un des membres de la délégation s'étant interrogé sur l'impact de ce texte, j'ai fait demander des informations supplémentaires.

Il s'avère que le secteur aéronautique français considère que les enjeux de ce texte sont mineurs, car il se borne à intégrer les avions d'occasion dans le champ d'application de l'arrangement OCDE ; par ailleurs, les règles qui encadrent le soutien aux opérations à l'export (assiette de la garantie, durée maximale du crédit, taux d intérêt minimum, nature du crédit octroyé) sont jugées tout à fait adaptées aux spécificités des transactions intervenant dans le secteur aéronautique.

La direction de l'aviation civile partage ce point de vue et est donc favorable à ce texte.

Lors de son examen par le groupe du Conseil « Crédits à l'exportation », ce texte n'a rencontré d'objections de fond de la part d'aucun État membre ; il devrait, de ce fait, être adopté rapidement.

*

Ayant considéré que ce texte était de portée réduite et ne posait pas de difficulté ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 517.

Proposition E 528

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition E 528 vise à modifier la procédure communautaire des contingents quantitatifs qui s'applique uniquement aux biens en provenance de Chine. La procédure actuelle prévoit que les quantités non attribuées ou non utilisées de ces contingents doivent être redistribuées aux importateurs avant la fin de la période contingentaire concernée. Or cela se révèle en pratique impossible, car les données relatives à ces quantités ne sont disponibles qu'à l'issue de la période contingentaire. C'est pourquoi la proposition E 528 prévoit d'autoriser la Commission à effectuer la redistribution des contingents au cours de la période contingentaire suivante. Cette décision ne pourra être prise qu'au cas par cas, en tenant compte de la nature des produits, des raisons ayant conduit à l'ouverture des contingents et après consultation d'un comité prévu à cet effet.

*

Ayant considéré :

- que ce texte avait été adopté avant que la délégation n'ait pu se réunir pour l'examiner ;

- que, toutefois, le délai d'un mois prévu pour permettre aux Assemblées de se prononcer était écoulé lors de l'adoption du texte par le Conseil ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 528.

Proposition E 529

(Réunion de la délégation du 17 janvier 1996)

La proposition E 529 organise une procédure permettant de combattre les pratiques de « dumping » dans le secteur de la construction navale, conformément à l'accord OCDE conclu par la Communauté.

En ce sens, le texte prévoit des sanctions. En premier lieu, le Conseil peut infliger une amende au constructeur de navires coupable de pratiques de « dumping ». En second lieu, si le constructeur n'acquitte pas l'amende, le Conseil peut lui interdire les droits de chargement et de déchargement dans les ports de l'Union.

Il faut reconnaître que les possibilités de mettre en oeuvre cette procédure sont parfois réduites, en particulier lorsque l'acheteur n'est pas ressortissant de l'Union.

Mais ce texte a toutefois le mérite de remédier à l'absence, à ce jour, de toute disposition visant à combattre les pratiques de « dumping » dans ce secteur ; à ce titre il ne peut qu'être considéré comme positif.

Comme pour le règlement sur les aides à la construction navale, la France a obtenu que l'entrée en vigueur de la proposition E 529 soit subordonnée à la mise en oeuvre de l'accord OCDE par toutes les parties prenantes.

*

Après les interventions en ce sens de MM. Denis Badré et François Lesein, la délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 529.

Proposition E 544

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition E 544 tend à modifier les accords relatifs à l'importation, dans l'Union européenne, de certains poissons et produits de la mer originaires d'Islande, afin de tenir compte de l'adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède. Les nouveaux contingents tarifaires sont fixés en tenant compte du volume des produits islandais importés par les trois États membres précités.

*

Ayant considéré :

- que ce texte avait été adopté avant que la délégation n'ait pu se réunir pour l'examiner ;

- que le délai d'un mois prévu pour permettre aux Assemblées de se prononcer était écoulé lors de l'adoption du texte par le Conseil ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 544.

Proposition E 549

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

Présentation du texte par M. Jacques GENTON :

La proposition E 549 concerne la conclusion d'arrangements avec l'Inde et le Pakistan, destinés à ouvrir aux produits textiles communautaires les marchés de ces deux pays. Il faut rappeler que l'accès à ces marchés est aujourd'hui rendu impossible par un système de licences à l'importation très restrictif et par des droits de douane excessifs.

En vertu de ces arrangements, l'Inde et le Pakistan s'engagent à réduire progressivement leurs droits d'importation, à supprimer toutes restrictions quantitatives et à faciliter la délivrance de licences d importation pour les produits textiles communautaires.

En contrepartie, la Communauté a accepté de supprimer les restrictions à l'importation de produits tissés à la main et d'apporter plus d'attention aux demandes d'aménagement présentées par l'Inde et le Pakistan, dans le cadre de la gestion des quotas textiles bilatéraux. Elle a également consenti une augmentation des quotas d'importation dans la Communauté pour les produits textiles en provenance d'Inde et du Pakistan, afin de tenir compte de son dernier élargissement.

Les professionnels français du textile et de l'habillement émettent de sérieuses critiques à l'égard de ces arrangements. Ils s'opposent aux concessions faites par la Communauté au motif que les engagements pris par l'Inde et le Pakistan sont insuffisants. Selon eux, les produits textiles communautaires les plus classiques continueront de supporter des droits de douane supérieurs à 35 %. Par ailleurs, ils estiment que la suppression par l'Inde et le Pakistan de tous quotas sera sans conséquence car les exportations communautaires sont pratiquement inexistantes.

L'adoption de ce texte devrait intervenir très rapidement, rendant impossible l'examen en temps utile d'une résolution par le Sénat. Dans ces conditions, la délégation pourrait par courrier faire part au Gouvernement de ses réserves sur ce texte.

*

M. Charles Metzinger a souhaité que cette intervention soit emprunte de fermeté.

La délégation a alors décidé d'attirer, par courrier, l'attention du Gouvernement sur la proposition E 549 (voir lettre ci-après au ministre délégué chargé des Affaires européennes).

SÉNAT

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DÉLÉGATION PARLEMENTAIRE

POUR

L'UNION EUROPÉENNE

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LE PRÉSIDENT

République Française

Paris, le 31 janvier

Monsieur le Ministre.

Lors de sa réunion du 31 janvier 1996, la délégation du Sénat pour l'Union européenne m'a chargé d'attirer votre attention sur la proposition d'acte communautaire E 549, relative à la conclusion d'arrangements avec l'Inde et le Pakistan concernant l'accès au marché des produits textiles.

Il s'avère que les entreprises françaises du textile et de l'habillement - actuellement confrontées à de graves difficultés tenant à la concurrence extra-européenne, aux effets des dévaluations compétitives pratiquées par certains de nos partenaires de 1a Communauté, et au tassement de la consommation en Europe - émettent de sérieuses réserves à l'égard des nouvelles concessions que cette proposition prévoit de consentir sans contrepartie véritable. Ils considèrent que les engagements pris par l'Inde et le Pakistan sont insuffisants, remarquant que les produits textiles communautaires les plus courants continueront à supporter des droits de douane supérieurs à 35 % et que la suppression par les deux pays en cause des quotas d'importation jusque là opposables à la Communauté sera sans conséquence pratique, les exportations communautaires vers ces pays étant actuellement presque inexistantes.

Pour ces raisons, la délégation du Sénat souhaiterait que le Gouvernement fasse preuve d'une particulière vigilance vis-à-vis de ce dossier, et s'efforce en particulier d'obtenir des garanties supplémentaires d'ouverture effective des marchés indien et pakistanais aux exportations communautaires.

Je vous prie de croire. Monsieur le Ministre, à l'assurance de mes sentiments les meilleurs

Monsieur Michel BARNIER
Ministre délégué auprès du Ministre des Affaires étrangères, chargé des affaires européennes
37, quai d'Orsay
75700 PARIS

Proposition E 555

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition d'acte communautaire E 555 tend à reconduire, pour l'année 1996, les dispositions d'un précédent règlement fixant les droits applicables à l'importation, dans la Communauté, de marchandises originaires d'Islande, de Norvège et de Suisse. Ces mesures sont destinées à maintenir les préférences réciproques existantes et ne posaient pas de difficulté pour la France.

*

Ayant considéré que ce texte était de portée réduite et ne posait pas de difficultés pour la France ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 555.

Proposition E 559

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition E 559 officialise la conclusion entre l'Union européenne et l'Israël d'un accord intérimaire sur le commerce et les mesures d'accompagnement. Cet accord vise à mettre en oeuvre dès maintenant le volet commercial de I accord d association UE/Israël signé le 20 novembre 1995, l'entrée en vigueur des autres volets - politique, financier et social - de l'accord d'association étant subordonnée à sa ratification par les États membres.

L'accord intérimaire prévoit :

- le maintien de la zone actuelle de libre échange,

- l'augmentation des concessions réciproques existantes pour le commerce des produits agricoles et des produits agricoles transformés,

- l'établissement de principes communs en matière de concurrence, d'aides d état de propriété intellectuelle, industrielle et commerciale,

- un renforcement de la coopération douanière.

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Ayant considéré :

- que la France avait beaucoup oeuvré, lors de sa présidence de l'Union, pour la conclusion de l'accord d'association UE/Israël ;

- que les dispositions commerciales de l'accord préservent les intérêts des producteurs agricoles européens ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 559.

Proposition E 562

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition E 562 officialise la conclusion de l'accord d'association UE/Maroc paraphé le 15 novembre dernier. Cet accord suit le modèle des accords européens d'association, notamment en ce qui concerne le droit d'établissement, les prestations de services, la circulation des capitaux, la coopération économique, culturelle et financière. Il comporte quatre volets distincts :

- l'instauration d'un dialogue politique entre les parties ;

- le développement d'une coopération économique, scientifique, sociale et culturelle étendue ;

- l'établissement progressif d'une zone de libre échange,

- l'octroi d'une aide financière au Maroc destinée à la modernisation de son économie et dont le montant n'est pas encore connu (on parle cependant d'un soutien de l ordre de 350 millions d'écus).

Dans la mesure où il s'agit d'un accord mixte, son entrée en vigueur est subordonnée à sa ratification par les États membres. Le Sénat sera donc amené à se prononcer sur ce texte.

*

Ayant considéré que les dispositions commerciales de l'accord paraissaient satisfaisantes en ce qu'elles préservaient, en particulier, les intérêts des producteurs agricoles européens,

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 562.

Proposition E 564

(Procédure écrite du 21 février 1996)

La proposition E 564 concerne la conclusion et l'application provisoire, par la Communauté et ses États membres, de l'accord international de 1995 sur le caoutchouc naturel. Cet accord, qui remplace celui de 1987 arrivé à échéance le 28 décembre dernier, vise à maintenir l'organisation internationale du caoutchouc naturel instituée en 1979, et dont les objectifs sont les suivants :

- promouvoir et renforcer la coopération internationale dans tous les secteurs de l'économie mondiale du caoutchouc. Cette coopération est assurée au moyen d'un conseil composé des producteurs et des consommateurs détenant le même nombre de voix ;

- stabiliser les cours de ce produit. Le mécanisme de stabilisation du marché repose sur un stock régulateur de caoutchouc. Lorsque le prix du marché descend au-dessous d'un niveau fixé par l'accord, l'organisme de stockage se parle acquéreur pour soutenir les cours. Inversement, le caoutchouc détenu en stock sera écoulé sur le marché si les cours dépassent une limite supérieure définie par l'accord. Le stock régulateur est financé par tous les États signataires, au prorata des voix qu'ils détiennent au Conseil.

Les nouveautés apportées par l'accord de 1995 par rapport à celui de 1987 sont réduites. Elles portent essentiellement sur les procédures et la périodicité de révision des prix de référence. Il introduit également un article sur les aspects environnementaux.

*

Ayant considéré que l'organisation internationale du caoutchouc naturel favorisait les efforts de développement des pays producteurs, tout en contribuant à l'amélioration des conditions d'approvisionnement des pays consommateurs ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 564.

Proposition E 565

(Procédure écrite du 21 février 1996)

La proposition E 565 tend à modifier le protocole qui permet aux navires de la Communauté de pêcher dans les eaux mauritaniennes. Il prévoit, en effet, d'ouvrir de nouvelles possibilités de pêche aux navires céphalopodiers, pour la période allant du 15 novembre 1995 au 31 juillet 1996.

En contrepartie, la Communauté consent à la Mauritanie une compensation financière de 7,2 millions d'Écus. Les nouvelles possibilités de pêche prévues par ce texte seront réservées aux navires espagnols, afin de compenser les pertes de possibilités subies par ceux-ci dans les eaux marocaines, à la suite du nouvel accord de pêche UE/Maroc.

Toutefois, si les demandes d'obtention de licences introduites par l'Espagne n'épuisent pas toutes les possibilités de pêche, les autres États membres pourront en bénéficier.

*

Ayant considéré que ce texte, qui rééquilibrait les possibilités de pêche offertes aux navires espagnols, ne soulevait pas de difficulté ;

La délégation n'a pas jugé utile d'intervenir sur la proposition E 565.

Proposition E 567

(Procédure écrite du 21 février 1996)

La proposition E 567 consiste en un accord entre la Communauté européenne et Malte, relatif au régime d'exemption de droits de douane dont peuvent bénéficier, en application du système des préférences généralisées, certains produits pétroliers originaires de pays en développement, lors de leur importation dans l'Union.

Afin de bénéficier de ce régime d'exemption, les marchandises doivent être transportées directement depuis leur pays d'origine vers la Communauté.

La proposition E 567 vise à assouplir cette condition à la demande du Gouvernement de Malte. Les marchandises pourraient transiter par Malte lorsque des nécessités commerciales ou de transport l'exigeraient.

*

Ayant considéré que la modification apportée par la proposition E 567 était de portée réduite et sans conséquence financière ;

La délégation n'a pas jugé utile d'intervenir sur ce texte.

Proposition E 571

(Procédure écrite du 21 février 1996)

La proposition E 571 concerne l'importation, dans la Communauté, à prélèvements réduits, d'huile d olive originaire de Tunisie.

Le régime d'importation préférentiel est venu à expiration le 31 octobre 1995. La proposition vise à reconduire ce régime préférentiel jusqu'à l'entrée en vigueur de l'accord d'association euro-méditerranéen signé avec la Tunisie le 17 juillet 1995.

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Ayant considéré :

- que ce texte se limitait à reconduire, à titre provisoire, un régime préférentiel déjà en vigueur ;

- que ce régime préférentiel portait sur des quantités réduites d'huile d'olive qui ne paraissent pas susceptibles de perturber le marché communautaire ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur ce texte.

Proposition E 572

(Procédure écrite du 21 février 1996)

La proposition E 572 concerne l'importation, dans la Communauté, de produits textiles originaires de la République fédérative de Yougoslavie (Serbie et Monténégro).

Depuis la levée, le 9 décembre dernier, de l'embargo à l'égard de cet État, les produits textiles originaires de celui-ci sont importés librement dans la Communauté, tandis que ceux en provenance des autres républiques de l'ex-Yougoslavie (Bosnie-Herzégovine, Croatie et ancienne république yougoslave de Macédoine), sont soumis à des restrictions quantitatives.

La proposition E 572 vise donc à aligner le régime de la république fédérative de Yougoslavie sur celui des autres républiques de l'ex-Yougoslavie, en réintroduisant des restrictions quantitatives pour les produits textiles.

Le volume des contingents envisagés représente un tiers de celui applicable aux trois autres républiques.

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Ayant considéré que ce texte visait à protéger l'industrie textile communautaire ;

La délégation a jugé qu'il n'appelait pas d'intervention de sa part.

Proposition E 575

(Procédure écrite du 5 mars 1996)

La proposition E 575 vise à adapter le volume des contingents tarifaires communautaires existants pour certains produits de la pêche et pour les chevaux vivants originaires d'Islande, afin de tenir compte du dernier élargissement de la Communauté.

Il s agit de prendre en compte les régimes d échanges de ces produits qui existaient entre les trois nouveaux États membres et l'Islande.

Les contingents tarifaires sont ouverts pour une période allant du 1 er janv ier au 31 décembre de chaque année ; ils sont institués pour une période indéterminée.

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Ayant considéré que les conséquences économiques de ce texte seraient réduites puisque les concessions commerciales qu'il prévoyait se limitaient aux flux pré-existants entre l'Islande, d'une part, et l'Autriche, la Finlande et la Suède, d'autre part,

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 575.

Proposition E 577

(Procédure écrite du 5 mars 1996)

La proposition E 577 concerne la signature et l'application provisoire, par la Communauté et ses États membres, de l'accord international de 1994 sur les bois tropicaux. Cet accord, qui remplace celui de 1983, vise à maintenir l'organisation internationale des bois tropicaux, dont le principal objectif est d'offrir un cadre pour la coopération et l'élaboration de politiques entre les pays producteurs et les pays consommateurs, dans tous les secteurs de l'économie mondiale de ces bois.

Les principales nouveautés apportées par l'accord de 1994 sur celui de 1983 sont les suivantes :

- le champ d'application de certaines des dispositions de l'Accord est étendu aux forêts boréales et tempérées. L'objet principal de l'accord reste, néanmoins, les bois tropicaux ;

- un fonds pour l'aménagement durable des forêts productrices de bois tropicaux est institué.

La Communauté a exprimé des réserves sur ces deux points lors de l'adoption de l'accord en janvier 1994, au motif que l'organisation doit se limiter aux bois tropicaux, et que le financement du fonds précité ne peut être assuré qu au moyen de contributions volontaires de la part des États signataires.

La Commission européenne propose donc d'annexer à l'accord, lors de sa signature par la Communauté, une déclaration interprétative précisant que :

- pour la Communauté, l'accord ne s'applique qu'aux bois tropicaux, à l'exclusion des bois des régions tempérées et boréales ;

- mise à part la contribution au budget administratif de l'organisation toutes les autres contributions, et en particulier celles au fonds pour l'aménagement durable des forêts tropicales, ont un caractère purement volontaire.

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Ayant considéré que la proposition de la Commission avait l'agrément de tous les États membres,

La délégation n'a pas jugé utile d'intervenir sur la proposition E 577.

Proposition E 580

(Procédure écrite du 6 mars 1996)

Présentation du texte par M. Jacques GENTON :

En application de l'article XXIV-6 de la Charte du GATT - qui reste en vigueur dans le cadre de l'OMC - la Communauté européenne est tenue, lorsqu'elle accueille de nouveaux États-membres, d'offrir des compensations à ses partenaires commerciaux, dans la mesure où les intérêts de ces derniers sont affectés par cet élargissement. Lorsqu elle a accueilli trois nouveaux États membres, l'Autriche, la Suède et la Finlande, la Communauté a donc été amenée à négocier des compensations avec certains de ses partenaires commerciaux.

Les négociations avec les États-Unis et le Canada ont abouti en décembre dernier ; la délégation a examiné cet accord et l'a jugé globalement acceptable.


• C 'est aujourd'hui l'accord avec l'Argentine qui est soumis au Sénat, sous le numéro E 580.

Deux points sont à souligner :

- les compensations affectent, une fois de plus, le secteur agricole et lui seul ;

- la principale concession de la Communauté consiste en une réduction des droits sur les importations de pommes et poires fraîches ; les autres aspects sont une réduction des droits sur les importations de citrons, l'ouverture d'un contingent tarifaire pour le jus de raisin, et la suppression des droits sur l'importation d'huile d'arachide.


L'impact économique de ces concessions ne sera vraisemblablement pas considérable dans un premier temps. On est néanmoins en présence d un problème de fond :

- une fois de plus, la Commission européenne accepte d'écorner un peu plus la préférence communautaire dans le domaine agricole ;

- les intérêts français sont particulièrement lésés. La France est le plus important exportateur de pommes dans les échanges intra-communautaires ; nos exportations se verront concurrencées par des productions à bas prix qui pourraient, à terme, prendre une part importante du marché communautaire. En 1994, les autres pays de la Communauté ont importé 476.000 tonnes de pommes françaises, et 558.000 tonnes de pommes venant de pays tiers, dont le Chili et l'Argentine : les pays tiers ont donc déjà dépassé la France sur le marché des autres pays de la Communauté ; or, cette tendance s'est fortement accentuée en 1995, si l'on en croit les chiffres partiels dont on peut actuellement disposer. De plus, il est clair que d'autres pays de l'hémisphère sud, et notamment le Chili, se prévaudront des concessions faites à l'Argentine pour obtenir le même régime, conformément aux règles de l'OMC.

- cette situation est d'autant plus inquiétante que la Commission européenne s'est jusqu'à présent refusée à prendre les mesures indispensables pour que la « clause de sauvegarde » prévue par les accords de Marrakech en cas d'augmentation brutale des importations puisse fonctionner. Le Conseil avait demandé en décembre 1994 à la Commission de prendre ces mesures ; cette demande n'ayant pas été suivie d'effet, le Conseil l'a réitérée en novembre 1995 ; la Commission s'est alors engagée à prendre les décisions nécessaires avant la fin 1995, mais cet engagement n'a toujours pas été tenu. La Communauté n'est donc pas en mesure de faire fonctionner, le cas échéant, la clause de sauvegarde que les accords de Marrakech I ont autorisée à mettre en place.

Il parait donc souhaitable que le Sénat invite le Gouvernement à s'opposer à l'adoption de ce texte, du moins aussi longtemps que la clause de sauvegarde ne sera pas en état de fonctionner.

*

M. James Bordas, soutenu par M. Yves Guéna, a approuvé ce point de vue, soulignant l'importance de la production de pommes dans les équilibres agricoles de certains départements.

M. Denis Badré a estimé que ce texte posait un problème de principe, jugeant inopportun que la préférence communautaire soit diminuée dans un secteur en difficulté. MM. Daniel Millaud et Claude Estier se sont associés à cette analyse.

La délégation a alors décidé le dépôt par MM. Jacques Genton, Denis Badré, Jacques Habert, Daniel Millaud, Yves Guéna, Claude Estier, James Bordas, d'une proposition de résolution sur le texte E 580 (voir texte ci-après).

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Le Sénat,

Vu la proposition de décision du Conseil concernant la conclusion des négociations avec certains pays tiers dans le cadre de l'article XXIV-6 du GATT et d'autres questions connexes (proposition d'acte communautaire E 580),

Considérant que ce texte tend à réduire la préférence communautaire dans un secteur agricole actuellement en difficulté, notamment en France ;

Considérant que la Commission européenne, malgré la demande réitérée du Conseil, s'est jusqu'à présent refusée à prendre les mesures nécessaires pour que la clause de sauvegarde spéciale prévue par les accords de Marrakech dans le secteur agricole puisse, le cas échéant, être mise en oeuvre dans ce secteur.

Invite le Gouvernement à s'opposer à l'adoption de la proposition E 580 dans l'attente de la définition des modalités de la clause de sauvegarde spéciale prévue par le volet agricole des accords de Marrakech.

Cette proposition de résolution a été publiée sous le n° 257
(1995-1996).

Elle a été renvoyée à la commission des Affaires
économiques et du Plan.

Proposition E 581

(Procédure écrite du 5 mars 1996)

La proposition E 581 fait suite à la signature, le 20 novembre 1995, de l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre l'Union européenne et l'État d'Israël.

L'entrée en vigueur de cet accord étant subordonnée à sa ratification par les pays signataires, un accord intérimaire sur le commerce et les mesures d'accompagnement a été conclu, le 18 décembre dernier, afin de mettre en oeuvre, dès maintenant, le volet commercial de l'accord d'association. Il prévoit l'augmentation des concessions existantes pour les produits agricoles et les produits agricoles transformés originaires d'Israël.

La proposition E 581 tire les conséquences de cet accord intérimaire en modifiant le volume des contingents tarifaires et les quantités de référence applicables aux produits provenant d'Israël.

*

Ayant considéré :

- qu'elle avait jugé, lors de sa réunion du 31 janvier 1996, que l'accord intérimaire n'appelait pas d'intervention de sa part ;

- que la proposition E 581 se contentait de mettre en oeuvre les mesures prévues par cet accord intérimaire ;

La délégation n'a pas jugé utile d'intervenir sur la proposition E 581.

Proposition E 584

(Procédure écrite du 5 mars 1996)

Ce texte concerne des protocoles aux accords de coopération conclus entre la Communauté européenne et respectivement, l'Algérie, la Jordanie, le Liban, la Syrie et l'Égypte, ainsi qu'un protocole à l'accord conclu entre la Communauté européenne et la principauté d'Andorre.

Ces protocoles font suite au dernier élargissement de l'Union européenne et tendent à faire intervenir l'Autriche, la Finlande et la Suède, en qualité de partie contractante aux accords précités.

*

Ayant considéré que ce texte apportait des modifications purement formelles aux accords précités ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 584.

Proposition E 585

(Procédure écrite du 5 mars 1996)

Ce texte vise à prolonger la durée d'application d'un règlement portant suspension totale ou partielle des droits de douane applicables à certains produits agricoles et pétroliers originaires de Turquie et de Malte.

Ces États se voient appliquer ce régime préférentiel, en vertu d'une décision du Conseil, en date de juin 1973, par laquelle il a été décidé de leur accorder un traitement aussi favorable que celui consenti aux pays bénéficiant du système des préférences généralisées.

*

Ayant considéré que ce texte se limitait à reconduire un régime préférentiel arrivant à échéance ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 585.


Relations avec les Pays Associés d'Europe centrale et orientale

Proposition E 568

(Procédure écrite du 21 février 1996)

La proposition E 568 officialise la conclusion des accords européens d'association entre les Communautés européennes et leurs États membres d'une part, et chacun des États baltes, d'autre part.

Ces accords, signés le 12 juin 1995, remplacent les accords concernant le commerce et la coopération économique et commerciale conclus avec l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie en 1993 et reprennent l'ensemble des dispositions des accords sur la libéralisation des échange signés avec ces États en 1994.

Conclus pour une durée indéterminée, ces accords visent à établir une association durable entre les parties. L'association comprend une période transitoire pour la Lettonie et la Lituanie, qui se termine le 31 décembre 1999. Aucune période de transition n'est prévue pour l'Estonie, compte tenu de l'état avancé de son processus de réforme économique et politique.

Les objectifs de cette association sont les suivants :

- institutionnaliser le dialogue politique entre les parties, tant dans le cadre multilatéral mis en place avec les pays associés d'Europe centrale, que dans le cadre bilatéral au sein du conseil d'association ;

- développer une zone de libre échange ;

- promouvoir l'expansion des échanges et des relations économiques entre les parties ;

- fournir une base pour la coopération économique, financière, culturelle et sociale ;

- soutenir les efforts des États baltes pour développer leur économie ;

- créer un cadre approprié pour 1 intégration progressive des pays baltes dans l'Union européenne.

D'une manière générale, ces accords suivent le modèle des accords européens d'association précédents, notamment en ce qui concerne le droit d'établissement, les prestations de service, la circulation des travailleurs, la circulation des capitaux et la coopération économique, culturelle et financière.

En revanche, pour la première fois, il est question de coopération pour la prévention des activités illégales. Cette coopération vise en particulier la lutte contre l'immigration illégale, la corruption, le trafic illégal de déchets industriels et de produits de contrefaçon, le trafic de drogues ainsi que le crime organisé.

*

Ayant considéré que ces accords d'association ne soulevaient pas de difficulté particulière ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 568.

Proposition E 574

(Procédure écrite du 21 février 1996)

La proposition E 574 tend à adapter les volumes des contingents et plafonds tarifaires existants au profit de certains produits originaires de Pologne et des Pays baltes, pour tenir compte de l'élargissement de la Communauté.

Il s'agit de prendre en compte les régimes des échanges de produits de la pêche et de textiles qui existaient entre les trois nouveaux États membres avant leur adhésion, d'une part, et la Pologne et les Pays baltes, d'autre part.

Ce texte prévoit, par ailleurs, certains ajustements des contingents tarifaires ouverts pour des produits agricoles originaires de Bulgarie et de Roumanie.

Ayant considéré que les conséquences économiques de ce texte seraient réduites ;

La délégation n'a pas jugé utile d'intervenir sur la proposition E 574.


Relations avec la Communauté des États indépendants (CEI)

Proposition E 522

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

Communication de M. Denis Badré :

Ce texte tend à renouveler, pour la période 1996-1999, le programme TACIS d'assistance aux pays membres de la CEI ainsi qu'à la Mongolie. Le montant des crédits prévus pour cette période s'élève à 2,24 milliards d'Écus.


La proposition E 522 est une nouvelle version d'un texte qui avait été soumis au Sénat sous le n° E 415. La délégation avait manifesté certaines réserves sur ce texte ; elle avait notamment regretté l'insuffisance des garanties de bonne gestion de ces crédits d'un montant important. Pour des raisons de procédure, ces réserves avaient fait l'objet, non d'une résolution spécifique, mais d'un paragraphe au sein de la résolution votée par le Sénat sur l'avant-projet de budget communautaire.

Les réserves de la délégation n'étaient sans doute pas sans fondement puisque, en raison des critiques émises par certains États membres dont la France, la Commission européenne a présenté le nouveau projet qui nous est soumis sous le n° 522.

Par rapport à la première version, le nouveau texte présente des progrès sur certains points :

- tout d'abord, le montant des crédits est ramené de 2,7 milliards à 2,24 milliards d'Écus

- ensuite, le programme TACIS pourra financer des actions de coopération entre les États de la CEI et les PECO

- enfin (même s'il s'agit d'une déclaration d'intention), le projet insiste sur la coordination de l'aide communautaire avec celle des institutions financières internationales et avec les actions des États membres.


Faut-il considérer cependant ce texte comme satisfaisant ?

Le programme TACIS existe depuis 1991. La mise en oeuvre a donné lieu à de nombreuses critiques. TACIS a financé uniquement des actions d'assistance technique, c'est-à-dire principalement des travaux d'expertise menés le plus souvent par des cabinets de consultants, pour un prix souvent très élevé ; il est difficile de dire dans quelle mesure ces travaux ont été réellement utiles.

Le nouveau programme TACIS prévoit que, désormais, une partie des crédits pourra être affectée au financement de petits projets d'investissement ; cependant, ce type d'utilisation ne pourra concerner que 10 % au maximum des crédits TACIS. Les neuf dixièmes des crédits resteront donc affectes à l'assistance technique.

Certaines critiques portaient sur le faible nombre des contrats attribués à des intervenants français. Comme nous l'a indiqué M. Barnier lors du débat budgétaire, la situation s'est bien améliorée et parait aujourd'hui acceptable. En revanche, il est clair qu'aucun progrès n'a eu lieu concernant les langues de travail. Un monopole de fait au profit de l'anglais s'est installé dans les programmes financés par TACIS, et l'on ne peut espérer aucune amélioration sur ce point, en raison du faible nombre de francophones dans les administrations des pays bénéficiaires.

D'autres critiques concernaient le manque de coordination entre la Communauté et les États membres. On est en effet dans une situation paradoxale :

- d'un côté, les États membres ont pensé qu'il serait plus efficace de mettre en commun l'essentiel de leurs crédits d'aide extérieure, et de faire gérer ces crédits par la Commission européenne ;

- cependant, sur place, ce sont les États membres, ou plutôt certains d'entre eux, qui sont effectivement présents par leurs représentations diplomatiques, alors que la Commission européenne, quant à elle, attribue les crédits à des organismes privés (les cabinets de consultants) dont les experts repartent une fois leur mission accomplie.

Il pourrait paraître logique, dans ces conditions, que la Commission européenne s'appuie davantage sur les représentations diplomatiques des États membres. Mais cette solution est mal perçue par les « petits » États membres qui, très souvent, ne sont pas représentés « sur le terrain ».

Finalement, l'on devrait s'orienter vers l'implantation d'« antennes » de la Commission dans les pays de la CEI, ce qui permettrait de mettre en oeuvre une coopération sur place avec les représentations des États membres. Cette solution pourrait être judicieuse, à condition qu elle n'absorbe pas une part trop importante des crédits.


Quelle position pourrait adopter la délégation vis-à-vis de ce texte ? Comme je l'ai déjà indiqué, il s'agit de la deuxième version d'un texte en discussion depuis environ neuf mois.

Ce projet n'a cependant pu être adopté durant la présidence espagnoIe, en raisons de divergences concernant les règles à appliquer pour la gestion du programme.

Les États membres ont obtenu (malgré l'opposition du Parlement européen) que la Commission soit contrôlée par un comité de gestion, formule qui permet un contrôle assez étroit du Conseil sur la Commission. Mais une controverse demeurait sur la surveillance des appels d'offre et des clauses des contrats. La Commission demandait dans ce domaine une marge de manoeuvre que certains États membres se refusaient à lui accorder, mettant en avant le fait que la gestion du programme n'avait pas été, jusqu'à présent, satisfaisante.

Finalement, un compromis a été trouvé lundi dernier lors du Conseil « Affaires générales ». La Commission a accepté des règles de surveillance plus contraignantes, mais ces règles figureront dans une annexe qui pourra être modifiée à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission.

La procédure d'examen n'est cependant pas terminée puisqu'il est probable que le Parlement européen sera consulté à nouveau, étant donné le remaniement important qu'a subi le texte par rapport à son état initial. Toutefois, le Parlement européen n'a pas de pouvoir de codécision dans ce domaine et cette nouvelle consultation ne devrait pas entraîner de modification du texte.

En conclusion, compte tenu du compromis intervenu, il ne me semble pas que la délégation puisse aujourd'hui intervenir utilement sur ce texte, d'autant que les modifications apportées par le Conseil constituent un progrès indiscutable par rapport au projet initial. En revanche, nous pourrons, me semble-t-il, revenir sur le sujet au moment des débats budgétaires en demandant au Gouvernement de se montrer vigilant sur la gestion de ce programme.

*

Après avoir entendu cette communication ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 522.

Proposition E 558

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition E 558 prévoit l'octroi par la Communauté, à la Moldavie, d'une aide macrofinancière destinée à soutenir sa balance des paiements. Cette aide de 15 millions d'écus prend la forme d'un prêt remboursable sur 10 ans et complète l'aide de 45 millions d'écus déjà consentie en 1994-1995. Elle s'inscrit dans le cadre d'un programme de redressement de l'économie moldave soutenu par le FMI et représente un tiers de l'enveloppe globale consentie par la communauté internationale.

La Moldavie s'est vu attribuer par le Conseil cette aide supplémentaire en raison, d'une part, de la rigueur avec laquelle sa politique économique est menée et, d'autre part, du remboursement, par cet État, dans les conditions prévues, des prêts déjà consentis par l'Union.

*

Ayant considéré que ce texte présentait un caractère ponctuel et ne soulevait pas de difficultés ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 558.


Coopération au développement

Proposition E 543

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition E 543 vise à ouvrir des contingents tarifaires communautaires à droit nul, pour les produits manufacturés de jute et de coco , pour la période allant du 1 er juillet 1995 au 31 décembre 1998.

Ces contingents sont destinés à maintenir le régime antérieur d'accès de ces produits au marché communautaire.

*

Ayant considéré que cette proposition avait une portée limitée et présentait un caractère consensuel ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 543.

Proposition E 576

(Procédure écrite du 5 mars 1996)

Dans le cadre de la politique de coopération de l'Union européenne avec les pays tiers, la Communauté a autorisé en 1993, pour une période de trois ans, la Banque européenne d'investissement (BEI) à consentir, dans 1a limite de 250 millions d'Écus par an, des prêts destinés à financer des projets d'intérêt commun dans une trentaine de pays d'Asie et d'Amérique Latine (A.L.A.) ( 1 ( * ) ). La Communauté garantit la BEI au cas où celle-ci ne recevrait pas les paiements correspondants aux prêts consentis.

Sont éligibles aux prêts de la BEI, les projets présentés par des co-entreprises associant des partenaires des pays d'Asie ou d'Amérique latine et de l'Union européenne, et qui comportent un transfert de technologie en provenance de l'Europe, ou qui favorisent la protection de l'environnement. Les secteurs de l'énergie, des transports et des télécommunications ont principalement bénéficié de ces prêts depuis leur création et une part croissante de ceux-ci est consacrée à des projets du secteur privé.

Le programme de prêts initial arrive à son terme en février 1996.

La proposition E 576 vise donc à le renouveler pour une durée d'un an et à augmenter fortement le plafond annuel des prêts pouvant être consentis par la BEI, qui passerait de 250 millions d'écus à 410 millions d'écus, soit une hausse de 64 %. Cette augmentation se justifierait, selon la Commission, par le poids démographique des pays ALA en comparaison de celui des autres pays bénéficiant de mesures équivalentes, ainsi que par le nombre de projets susceptibles de bénéficier d'un tel financement.

Lors d'un premier examen de ce texte au sein d'un groupe du Conseil, la plupart des États membres, et en particulier la France, se sont opposés à une telle augmentation. Le montant annuel des prêts devrait donc être revu à la baisse, pour se situer autour des 250 millions d'écus actuels.

*

Ayant pris en compte les travaux du Conseil, ayant considéré, par ailleurs, que les prêts en cause, qui bénéficiaient pour partie à des entreprises européennes, n'avaient donné lieu, depuis qu'ils existaient, à aucun appel en garantie,

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 576.

Proposition E 578

(Procédure écrite du 5 mars 1996)

La proposition E 578 tend à modifier un règlement du Conseil qui prévoit certaines concessions à l'importation pour des produits agricoles originaires des États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP).

Cette proposition vise :

- à prolonger d'un an le régime d'importation de viande bovine désossée en provenance de Namibie, celui-ci étant arrivé à expiration le 31 décembre 1995. Il s'agit uniquement de proroger d'un an le régime antérieur ;

- à augmenter de 600 tonnes le contingent annuel exempté de droits de douane, prévu pour le raisin de table sans pépins originaire de Namibie. Il faut souligner que le raisin namibien ne fait pas de concurrence aux productions communautaires car il est produit à contre-saison.

*

Ayant considéré que les conséquences économiques de ce texte étaient très réduites,

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur ce texte.

Proposition E 579

(Procédure écrite du 5 mars 1996)

La proposition E 579 concerne la conclusion par la Communauté européenne et la Communauté européenne du Charbon et de l'Acier (CECA), de l'accord révisant la quatrième convention de Lomé sur le commerce et l'aide au développement des pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP),signé le 4 novembre 1995.

Cette révision à mi-parcours de la Convention de Lomé avait été prévue dès sa signature en 1989, afin de compléter et corriger le dispositif mis en place. Il convenait, par ailleurs, de déterminer l'enveloppe du huitième Fonds européen de développement (FED), qui est l'instrument financier de la convention.

La révision de la convention de Lomé concerne donc tant les mesures commerciales que l'aide financière consentie par la Communauté aux États ACP.

En ce qui concerne les mesures commerciales, la convention révisée prévoit principalement :

- une réduction de 16 % des droits de douane applicables à l'importation, dans l'Union, des produits agricoles de base originaires des États ACP. Il convient, toutefois, de préciser, que sur les quelques 300 produits concernés par cette mesure, seulement une cinquantaine sont en pratique exportés par les pays ACP et que les olives, le vin et les citrons sont exclus du champ d'application de cette mesure ;

- un assouplissement des règles d'origine : la tolérance est portée de 10 à 15 % en valeur, et joue pour des produits originaires de pays voisins, non ACP, en voie de développement.

En ce qui concerne l'aide financière consentie par l'Union européenne aux États ACP, le protocole financier fixe à 13,3 milliards d'écus le montant du huitième Fonds européen de développement (FED) couvrant la période 1996-2000.

Si ce montant est en progression de 22 % par rapport à celui du FED précédent, il ne fait qu'en maintenir, en valeur réelle, le niveau.

Des dispositions relatives à la programmation de l'aide ont été introduites, afin d'accroître l'efficacité de l'utilisation des fonds alloués. Le principal mécanisme à cet égard est une allocation des fonds en deux étapes, le versement de la deuxième tranche étant subordonné à la bonne utilisation de la première.

Par ailleurs, il est désormais prévu que les aides consenties par la Communauté à un État ACP pourront être suspendues si cet État ne respecte pas les droits de l'homme et les principes de la démocratie.

La révision de la quatrième convention de Lomé n'a pas été à la hauteur des attentes des États ACP, qui ont interprété l'attitude de la Communauté comme la marque d'un certain éloignement à l'égard des anciennes colonies, au profit de l'Europe de l'Est et du bassin méditerranéen.

Les États ACP reconnaissent néanmoins les efforts déployés par la France, sous sa présidence, pour mener à leur terme ces difficiles négociations et aboutir à un résultat acceptable pour l'ensemble des pays signataires. Ces négociations ont d'ailleurs été closes, le 30 juin 1995, à l'extrême fin de la présidence française.

*

Ayant considéré que le compromis obtenu était le moins mauvais possible compte tenu des réticences de beaucoup d'États membres,

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 579.


Aide humanitaire

Proposition E 445

(Réunion de la Délégation du 19 décembre 1995)

Communication de M. Robert Badinter :

L'aide humanitaire de l'Union européenne n'a cessé de croître au cours des dernières années, notamment en raison de la multiplication des conflits. L'Union est ainsi intervenue dans des crises majeures, par exemple dans l'ex-Yougoslavie ou au Rwanda. Le montant de l'aide humanitaire de l'Union est passé de 195 millions d'Écus en 1991 à 764 millions d'Écus en 1994. Ce montant devrait être d'environ 600 millions d'Écus en 1995 et de 645 millions d'Écus en 1996 (l'aide aux États de l'ex-Yougoslavie est désormais exclue de ce montant).

En 1994, l'aide a été répartie entre 63 pays situés dans les régions suivantes : les pays A.C.P. (42,4 %), l'ex-Yougoslavie (35,3 %), l'ex-U.R.S.S. (11,9 %), l'Asie (6,3 %)...

En 1991, les institutions communautaires ont décidé de créer un Office humanitaire de la Communauté européenne afin de renforcer l'efficacité de la gestion des aides. Cet office, baptisé ECHO, est devenu pleinement opérationnel en 1992.

Le 31 mai 1995, la Commission européenne a présenté une proposition de règlement visant à donner un fondement juridique à l'aide humanitaire de la Communauté.

Compte tenu des problèmes de principe que pose l'aide humanitaire et de l'importance des sommes en cause, il est nécessaire d'examiner avec vigilance cette proposition, tant en ce qui concerne ses objectifs que ses modalités de mise en oeuvre.

I. LES PRINCIPES : UNE CONCEPTION LARGE DE L'AIDE HUMANITAIRE

A. Le fondement de l'aide humanitaire

La proposition de règlement pose comme principe de base que « les populations en détresse victimes de catastrophes naturelles, d'événements tels que les guerres ou les conflits ou d'autres circonstances extraordinaires comparables, ont le droit de recevoir une assistance humanitaire internationale lorsqu'il s'avère qu'elles ne peuvent être efficacement secourues par leurs autorités ». Cette définition du fondement de l'aide humanitaire s'accompagne naturellement du refus de toute discrimination nationale, religieuse, sociale ou politique entre les victimes.

Au cours des dernières années, des conflits doctrinaux se sont fait jour sur la question du fondement de l'aide humanitaire. Le terme de « droit d'ingérence humanitaire » parfois évoqué, constitue en fait davantage un slogan qu'une catégorie juridique. La définition donnée par la proposition de règlement, qui n entre pas dans ces débats, semble satisfaisante.

B. Le champ de l'aide humanitaire

En ce qui concerne le champ de l'aide humanitaire, la proposition de règlement retient une conception extensive. Traditionnellement, l'aide humanitaire est considérée comme le secours aux victimes en situation d'urgence. Dans son article 2, la proposition de règlement assigne les objectifs suivants à l'aide humanitaire de la Communauté :

- sauver et préserver des vies dans les situations d'urgence et d'après-urgence immédiate et à l'occasion de catastrophes naturelles ;

- apporter l'assistance et le secours nécessaires aux populations affectées par des crises plus durables découlant particulièrement des conflits ou des guerres ;

- contribuer au financement de l'acheminement de l'aide et de son accès à ses destinataires par tous les moyens logistiques disponibles et par la protection des biens et du personnel humanitaires à l'exclusion des actions ayant des implications de défense ;

- développer les travaux de réhabilitation et de reconstruction, notamment d'infrastructure et d'équipements ;

- faire face aux risques des déplacements de populations consécutifs à des catastrophes naturelles ou causées par l'homme et mener à bien les actions de rapatriement et d'aide à la réinstallation dans leur pays d'origine ;

- garantir une préparation préalable aux risques de catastrophes naturelles ou circonstances exceptionnelles comparables ;

- enfin, appuyer des actions civiles de protection en faveur des victimes de conflits ou circonstances exceptionnelles comparables.

Les articles 3 et 4 de la proposition de règlement définissent le type de dépenses qui pourront être financées par l'aide humanitaire de la Communauté européenne. Il s'agit notamment de l'achat de tout produit ou matériel nécessaire à la mise en oeuvre des actes humanitaires, y compris la construction de logements ou d'abris, des dépenses liées au personnel externe, expatrié ou local, mais aussi des études préparatoires de faisabilité des actions humanitaires, des actions de suivi des projets et plans humanitaires...

La Commission européenne propose donc une conception extensive de l'aide humanitaire qui, outre des actions d'urgence, comprendrait également des actions de prévention et de reconstruction ; cette solution paraît bien adaptée à la diversité des situations auxquelles est confrontée l'Union dans son action humanitaire.

II. LA MISE EN OEUVRE : UNE VOLONTÉ DE TRANSPARENCE ET D'EFFICACITÉ

Compte tenu des sommes engagées chaque année pour l'aide humanitaire, il est tout à fait essentiel que les modalités d octroi des fonds soient définies de manière rigoureuse, afin d'éviter l'inefficacité ou le détournement de cette aide.

A. Des conditions strictes d'attribution de l'aide

L'article 6 de la proposition de règlement prévoit que « les actions d'aide humanitaire financées par la Communauté peuvent être mises en oeuvre soit à la demande d'organismes et organisations internationales ou non gouvernementales, d'un État membre ou du pays bénéficiaire, soit à l'initiative de la Commission. »

À l'origine, la possibilité qu un État membre puisse formuler une demande d'aide n'était pas envisagée. Mais au cours des négociations entre le Conseil, le Parlement européen et la Commission européenne, cette disposition a été ajoutée, ce dont on ne peut que se féliciter. Il est désormais important que cette disposition, qui figure dans la position commune du Conseil, soit maintenue lors de l'adoption définitive du texte.

La proposition de règlement pose un certain nombre de conditions pour que les associations non gouvernementales puissent bénéficier de l'aide de la Communauté (art. 7) :

- elles doivent être constituées en organisations autonomes sans but lucratif dans un État membre de la Communauté européenne selon la législation en vigueur dans cet État ;

- elles doivent avoir leur siège principal dans un État membre de la communauté ou dans les pays bénéficiaires de l'aide de la Communauté, ledit siège devant constituer le centre effectif de toutes les décisions relatives aux actions financées au titre de ce règlement. À titre exceptionnel, ce siège peut se situer dans un autre pays tiers donateur.

En outre, la proposition de règlement prévoit qu'un certain nombre d'éléments doivent être pris en considération pour déterminer si une organisation non gouvernementale peut avoir accès au financement communautaire : capacité de gestion administrative et financière ; capacité technique et logistique par rapport à l'action envisagée ; expérience dans le domaine de l'aide humanitaire...

L'article 10 de la proposition permet à la Commission européenne de prendre toute initiative utile pour promouvoir une étroite coordination entre ses activités et celles des États membres ; un système d'informations réciproques est prévu à cette fin. Enfin, les contrats de financement passés avec des associations non gouvernementales devront prévoir systématiquement que la Commission et la Cour des Comptes peuvent procéder à des contrôles sur place et au siège des partenaires humanitaires.

On peut espérer que ces différentes dispositions permettront une attribution dans des conditions transparentes et homogènes de l'aide humanitaire de la Communauté.

B. Le nécessaire contrôle des États sur les décisions prises par la Commission européenne

La base juridique de la proposition de règlement a donné lieu à des débats au sein du Conseil de l'Union européenne, certains plaidant pour une adoption du texte à la majorité qualifiée, d'autres pour une adoption à l'unanimité. La position commune arrêtée par le Conseil prévoit comme base juridique l'article 130 W du Traité sur l'Union européenne, relatif à la politique de la Communauté dans le domaine de la coopération au développement. Le règlement devrait donc être adopté définitivement à la majorité qualifiée par le Conseil. Il faut signaler que le Parlement européen, dans le rapport qu'il a consacré à la proposition de règlement, a exprimé le souhait que la Conférence intergouvernementale, qui s'ouvrira le 29 mars 1996, se penche sur cette question afin de donner à l'aide humanitaire une base juridique spécifique.

L'un des problèmes les plus difficiles au cours des négociations a été celui des mesures d'exécution du règlement. La Commission européenne, qui est en principe chargée de l'exécution des textes communautaires, avait proposé de s'entourer d'un comité consultatif composé de représentants des États membres. L'avis d'un comité de ce type ne lie pas la Commission, même s'il est toujours précisé qu'elle en tient le plus grand compte. Il est évident que cette formule permet à la Commission européenne de disposer des compétences les plus larges possibles.

Au cours des négociations, une large majorité du Conseil a souhaité remplacer ce comité consultatif par un comité de réglementation ou comité de type III A, beaucoup plus contraignant pour la Commission. Un tel comité est appelé à rendre un avis, à la majorité qualifiée, sur les mesures qu'envisage de prendre la Commission européenne. La Commission arrête alors les mesures. Si elles sont conformes à l'avis du comité, elles entrent en vigueur. Dans le cas contraire, elles sont soumises au Conseil qui dispose d'un certain délai pour arrêter une décision. En l'absence de décision du Conseil, deux variantes A et B sont possibles, la première permettant à la Commission d'arrêter librement les mesures, la seconde ne lui donnant cette possibilité que si le Conseil ne s'y oppose pas à la majorité simple.

Il est évident que les mesures prises en matière d'aide humanitaire sont trop importantes pour être laissées à la discrétion de la Commission européenne. Il est indispensable que celle-ci soit encadrée par des représentants des États membres disposant d'un réel pouvoir de contrôle.

À l'issue des négociations au sein du Conseil, une formule assez complexe a été retenue dans la position commune.

Le comité représentant les États membres disposera de compétences variables, selon la nature des mesures d'exécution que la Commission devra prendre :

- dans certains cas, ce comité sera de type II B (formule intermédiaire entre le comité consultatif et le comité de réglementation) pour l'approbation des plans globaux destinés à fournir un cadre cohérent d'action dans un pays où la crise humanitaire est de nature à perdurer, et pour les projets d'un montant supérieur à deux millions d'Écus ;

- dans d'autres cas, le comité sera de type III A, notamment pour l'adoption des règlements d'application du règlement en discussion, et pour les décisions d'interventions directes de la Commission européenne ou d'interventions des organismes spécialisés des États membres.

Par ailleurs, une procédure particulière est prévue pour les interventions en urgence. La Commission européenne décide de ces interventions lorsque leur montant ne dépasse pas dix millions d'Écus. Toutefois, dès lors que le montant nécessaire à une action d'urgence dépasse deux millions d'Écus, elle est tenue d'informer les États membres dans les 48 heures suivant sa décision et de rendre compte de cette décision lors de la réunion suivante du comité.

Ces dispositions paraissent relativement équilibrées, préservant l'impératif d'un contrôle étroit des États sur l'attribution de l'aide d'une part, la nécessité de procédures efficaces et rapides d'autre part. Plusieurs États membres se sont toutefois opposés lors du vote à ce compromis, certains souhaitant encadrer davantage la Commission européenne, d'autres voulant au contraire lui donner une marge de manoeuvre plus étendue. La Commission européenne a également manifesté ses réserves sur le compromis obtenu.

La proposition de règlement doit encore faire l'objet d'une seconde lecture au Parlement européen avant son adoption définitive par le Conseil. Il est important que les dernières négociations ne remettent pas en cause les possibilités de contrôle reconnues aux États membres en ce qui concerne les mesures d'exécution du règlement.

*

La Délégation a adopté les conclusions suivantes :

La Délégation se félicite que la proposition ait été modifiée lors des négociations au sein du Conseil en sorte que les actions d'aide humanitaire financées par la Communauté puissent être mises en oeuvre, non seulement à l'initiative de la Commission ou à la demande d'organismes internationaux ou d'O.N.C, mais aussi à la demande d'un ou de plusieurs États membres.

Elle appelle le Gouvernement à faire preuve d'une particulière vigilance pour que le texte garantisse aux États membres la place qui leur revient dans le processus de décision communautaire grâce à la mise en place d'un comité de réglementation de type III A au lieu d'un comité consultatif de type I avec, éventuellement, des dispositions spécifiques pour sauvegarder la souplesse et la rapidité des procédures.

2. Régions ultra-périphériques

Proposition E 537

(Réunion de la délégation du 17 janvier 1996)

La proposition E 537 s'inscrit dans le cadre du programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (POSEI) en faveur de Madère et des Açores, qui vise à améliorer la situation économique et sociale de cette région. Il tend à faire bénéficier les zones franches de ces deux archipels d'un traitement tarifaire favorable pour les importations de matières premières et de biens d'équipement.

*

Ayant considéré :

- que ce texte était sans conséquence pour la France ;

- que la France se devait de soutenir ce texte, dans la mesure où ses départements d'outre-mer bénéficiaient d'un programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité équivalent ;

La délégation a décidé, après les interventions en ce sens de MM. Denis Badré et François Lesein, de ne pas intervenir sur la proposition E 537.

Proposition E 561

(Réunion de la délégation du il janvier 1996)

La proposition E 561 entre dans le champ du programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (POSEI) en faveur des Îles Canaries, qui vise à améliorer la situation économique et sociale de cet archipel.

Ce texte proroge d'un an, soit jusqu'au 1 er janvier 1997, l'exemption totale du paiement des droits antidumping dont bénéficie cette région.

*

Ayant considéré :

- que ce texte était sans conséquence pour la France ;

- que la France se devait de soutenir ce texte, dans la mesure où ses départements d'outre-mer bénéficiaient d'un programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité équivalent ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 561.

Proposition E 566

(Procédure écrite du 21 février 1996)

Dans le cadre d'un programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité, les lies Canaries ont bénéficié, jusqu'au 31 décembre 1995, d'une suspension totale des droits du tarif douanier commun applicables à certains produits industriels.

La proposition E 566 vise à réintroduire, de façon progressive, ces droits, en distinguant trois situations :

- une liste de produits pour lesquels les droits resteraient suspendus, afin d'éviter d'introduire des droits qui seraient ultérieurement supprimés en application du protocole de Marrakech ;

- une liste de produits pour lesquels les droits seraient réintroduits par tranche annuelle de 20 %, pour être alignés sur le tarif douanier commun au 1 er janvier 2001 ;

- une liste de produits « sensibles ou ultra-sensibles » pour lesquels la progressivité serait plus lente, afin de permettre l'adaptation des industries concernées.

*

Ayant considéré :

- que ce texte était sans conséquence pour la France ;

- que la France se devait de soutenir ce texte, dans la mesure où ses départements d'outre-mer bénéficiaient d'un programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité équivalent ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 566.

3. Politique agricole commune

Proposition E 541

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition E 541 est relative au financement des contrôles vétérinaires pour les viandes de volaille. Elle vise à proroger le régime actuel de redevances perçues par les États membres au titre des frais d'inspection liés aux opérations d'abattage, ce régime ayant pris fin au 31 décembre 1995.

*

Ayant considéré que ce texte avait une portée très limitée ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 541.

Proposition E 563

(Réunion de la délégation du 14 février 1996)

Présentation du texte par M. Jacques GENTON :

La proposition E 563 concerne le « corn gluten feed », produit de substitution aux céréales utilisé pour l'alimentation animale. Principalement produit par les États-Unis, ce produit bénéficie d'une exemption de droits de douane à l'entrée dans la Communauté. Les États-Unis exportent chaque année vers la Communauté environ 6 millions de tonnes de « corn gluten feed » ; il s'agit là d'une concurrence pour la production céréalière européenne, ce qui est d'autant plus dommageable que le prix du « corn gluten feed » est très bas.

Le statut de ce produit a été un des aspects de la controverse qui a marqué la fin des négociations du cycle d'Uruguay GATT. La France souhaitait un plafonnement des importations de ce produit ainsi qu'une amélioration des contrôles, car il s'avérait que les exportateurs américains mélangeaient parfois au « corn gluten feed » d'autres résidus qui auraient dû, quant à eux, supporter des droits de douane. Le compromis final prévoit que des consultations auront lieu si le niveau des importations de « corn gluten feed » augmente notablement.

Après la conclusion des accords de Marrakech, la controverse a rebondi, mais cette fois entre la France et la Commission européenne. Celle-ci avait en effet décidé d'adopter une nomenclature tarifaire qui aurait permis aux exportateurs américains de mêler en toute légalité d'autres résidus au « corn gluten feed ». La France a attaqué cette décision devant la Cour de justice, qui lui a donné gain de cause. La proposition E 563 tire les conclusions de l'arrêt de la Cour de justice, en retenant une nomenclature tarifaire cette fois satisfaisante. En revanche, rien n'est réglé en ce qui concerne les contrôles, ni en ce qui concerne le plafonnement des importations.

Toutefois des raisons diplomatiques militaient pour l'adoption de ce texte en l'état. En effet, au mois de janvier, lors de la réunion du comité qui traite des questions de nomenclature et de tarif douanier commun, la France a obtenu un engagement de la Commission concernant la surveillance globale des importations de « corn gluten feed » et l'utilisation effective de la procédure de consultation en cas de hausse des importations. Cet engagement a été difficile à obtenir dans la mesure où la Grande-Bretagne et les Pays-Bas s'y opposaient. Compte tenu de l'isolement de la France sur ce dossier, il serait risqué de présenter des exigences supplémentaires dans le contexte actuel. Il paraît préférable d'accepter la proposition assortie de l'engagement de la Commission, de manière à pouvoir ultérieurement mettre l'accent sur le respect de cet engagement de la Commission et sur l'amélioration des contrôles. Le problème concerne au demeurant plus l'avenir que le présent, car, depuis les accords de Marrakech, les importations de « corn gluten feed » semblent s'être stabilisées.

*

M. Denis Badré a souligné l'importance de cette question pour l'équilibre de la PAC réformée. Il a souhaité que soit adoptée une attitude vigilante vis-à-vis des Pays-Bas, favorables au développement des importations de produits de substitution aux céréales, à la fois dans l'intérêt du port de Rotterdam et dans l'optique du développement d'un élevage à bas prix.

M. Jacques Genton a souhaité que la délégation reprenne prochainement ce dossier afin d'observer l'évolution de la situation et d'examiner si les engagements sont tenus.

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 563.

4. Marché intérieur

Proposition E 570

(Procédure écrite du 21 février 1996)

La proposition E 570 tend à modifier la liste des établissements de crédit qui sont exclus du champ d'application des directives bancaires. Il s'agit d'une simple mise à jour de cette liste destinée à éliminer certains établissements (belges, danois, grecs, espagnols, néerlandais, portugais et finlandais) dont l'exclusion ne se justifie plus et à en ajouter un autre, à la demande de l'Autriche.

Ayant considéré que la liste des établissements français restait inchangée ;

La délégation n'a pas jugé utile d'intervenir sur ce texte.

5. Télécommunications

Proposition E 535

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition E 535 vise à établir un cadre commun pour l'attribution des licences dans la perspective de la libéralisation complète des télécommunications en Europe. Ce texte prévoit notamment que, dans toute la mesure du possible, les autorisations générales devront être préférées aux licences individuelles et que les États pourront ne pas subordonner l'accès au marché à un régime d'autorisation.

*

Ayant considéré :

- qu'elle était intervenue en novembre 1995 et avait pris clairement position sur les questions de principe posées par la libéralisation du secteur des télécommunications en Europe ;

- que le Sénat serait appelé à se prononcer sur un projet de loi relatif à la réglementation des télécommunications en France au printemps 1996 ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 535.

Rappel : La délégation a adopté le 22 novembre 1995 un rapport de M. René Trégouët : Préparer la libéralisation des télécommunications en Europe

Ce rapport a été publié sous le n° 90 (1995-1996).

La commission des Affaires économiques et du Plan a adopté le 13 décembre 1995 une résolution relative aux propositions d'actes communautaires E 467, E 508 et E 509.

Cette résolution est devenue résolution du Sénat le 27 décembre 1995
et a été publiée sous le n° 53 (1995-1996)

Proposition E 542

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition de décision E 542 concerne les services de communications personnelles par satellite. Elle vise à permettre une approche européenne dans ce domaine, afin de faire face de manière satisfaisante à la concurrence internationale. La Commission européenne fait valoir qu une telle approche coordonnée permettrait de garantir l'accès des entreprises européennes aux marchés des pays tiers, de renforcer l'influence des technologies et systèmes européens au niveau mondial et d'éviter les solutions ad hoc nationales, qui entraveraient une exploitation à l'échelle mondiale. La proposition E 542 doit permettre de mettre en oeuvre des procédures coordonnées de sélection et d autorisation pour l'introduction de services de communications personnelles par satellite.

*

Ayant considéré :

- qu'elle était intervenue en novembre 1995 et avait pris clairement position sur les questions de principe posées par l'évolution du secteur des télécommunications en Europe ;

- que le Sénat serait appelé à se prononcer sur un projet de loi relatif à la réglementation des télécommunications en France au printemps 1996 ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 535.

Proposition E 560

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition E 560 tend à modifier deux directives de 1990 et 1992, relatives à la fourniture d'un réseau ouvert (ONP) en matière de télécommunications. La première fixait un certain nombre de principes généraux, tandis que la seconde concernait l'application de ces principes au secteur des lignes louées. La proposition E 560 doit permettre d'adapter ces directives pour tenir compte de la libéralisation complète des télécommunications prévue pour 1998. Le texte tend notamment à modifier les dispositions relatives aux autorités réglementaires nationales, afin de formuler explicitement l'exigence d'indépendance de ces autorités. Il se donne en outre comme objectif premier la garantie de la fourniture du service universel.

*

Ayant considéré :

- qu'elle était intervenue en novembre 1995 et avait pris clairement position sur les questions de principe posées par la libéralisation du secteur des télécommunications en Europe ;

- que le Sénat serait appelé à se prononcer sur un projet de loi relatif à la réglementation des télécommunications en France au printemps 1996 ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 560.

Proposition E 573

(Procédure écrite du 21 février 1996)

La proposition E 573 est un texte de codification.

Lors du Conseil européen d'Edimbourg de 1992, il a été décidé qu'il serait précédé périodiquement à des codifications afin d'améliorer la clarté et la compréhension de la législation communautaire.

La proposition E 573 s'inscrit dans ce contexte. Elle vise à codifier les diverses directives applicables aux équipements terminaux de télécommunications et aux équipements de stations terrestres de communications par satellite.

*

Ayant considéré que cette proposition de directive se bornait à regrouper les textes codifiés et qu'elle en respectait les dispositions, en n'apportant que les modifications formelles rendues nécessaires par l'opération même de codification ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 573.

6. Énergie

Proposition E 543

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

Présentation par M. Philippe François d'un rapport d'information :

La Commission a proposé en 1992 une taxe communautaire harmonisée perçue pour moitié sur les émissions de dioxyde de carbone et pour moitié sur les énergies non renouvelables ainsi que sur celles produites par les barrages les plus importants.

Devant l'impossibilité de réunir l'unanimité au Conseil, nécessaire en matière fiscale, la Commission a remplacé cette proposition par une version modifiée publiée le 10 mai 1995.

La Commission propose un cadre harmonisé fixant des objectifs de taux pour la taxe, dont l'institution par les États membres demeurerait facultative jusqu'à l'an 2000. Il n'est plus prévu de suspendre la mise en vigueur de la taxe à l'instauration de mesures équivalentes de la part des autres États membres de l'O.C.D.E.

Les exonérations en faveur des énergies renouvelables sont précisées (solaires, éoliennes, marémotrices, géothermiques ou issues de la biomasse).

La proposition de directive prévoit encore que la taxe serait généralisée à tous les États membres, selon des taux harmonisés à compter du 1 er janvier 2000 et que les États doivent diminuer d'autres prélèvements, à concurrence du produit de la taxe afin que son instauration ne se traduise pas par une augmentation de la charge fiscale globale.

La proposition modifiée ne semble pas plus devoir faire l'unanimité.

Selon les estimations mêmes de la Commission, le produit de la taxe à plein régime devrait avoisiner les 50 milliards d'Écus, soit 325 milliards de francs.

Devant l'importance du prélèvement, et du renchérissement de l'énergie qui s ensuivrait ; devant également la difficulté de dégager des baisses d'impôts compensant la nouvelle taxe, la plupart des États membres maintiennent leurs réserves.

De fait, l institution de la nouvelle taxe ne parait pas l'approche la plus appropriée :

- d'une part, son effet sur les émissions de CO 2 demeure largement incertain ;

- d'autre part, il existe d'autres moyens de parvenir à la stabilisation voire à la réduction des pollutions atmosphériques, moyens plus efficace et plus respectueux du principe de subsidiarité.

Une décision du Conseil du 24 juin 1993 a institué un mécanisme communautaire de surveillance des émissions de CO 2, selon des programmes nationaux comportant des engagements et un calendrier précis.

Compte tenu notamment des performances enregistrées en France par les diverses mesures nationales de réduction de la pollution atmosphérique (taxes sur les carburants, « vignettes » progressives sur les véhicules à moteur, taxes sur la pollution atmosphérique perçues au profit de l'Agence des économies d'énergie ou encore incitations fiscales aux économies d'énergie), il convient d'abord d'encourager ces politiques. Leur efficacité est établie puisque, par exemple, la France a réduit ses émissions totales de CO 2 d'un tiers depuis 1980.

Puisque la réalisation des engagements des États membres par rapport à l'objectif commun de stabilisation des émissions de CO 2 d'ici à l'an 2000 peut être contrôlée au niveau communautaire par le mécanisme de surveillance mis en place et déjà opérationnel, il n'est pas opportun de s'engager, même progressivement, sur le chemin de l'instauration d'une taxe communautaire.

La structure même de la taxe proposée pourrait fournir un cadre tout prêt pour l'instauration d'un prélèvement directement perçu au profit des Communautés européennes, ce qui était l'inspiration initiale de cette taxe.

Enfin, la gestion de la taxe harmonisée selon la procédure du « comité des accises », c'est-à-dire par décisions arrêtées à la majorité qualifiée, selon les pondérations de l'article 148 du Traité, pourrait aboutir à ôter toute autonomie aux États membres dans leurs choix en matière de ressources énergétiques, puisque la modulation des taxes décidées au niveau communautaire orienterait à l'évidence ces choix et de façon décisive.

Aussi, je vous suggère d'inviter le Gouvernement français à maintenir ses réserves vis-à-vis de la proposition de directive modifiée tout en encourageant la réalisation des programmes nationaux de réduction des émissions de CO 2 par le recours aux mesures qui semblent les plus appropriées à chaque État sous le contrôle de la Commission européenne. Parallèlement, il me semble souhaitable de développer, tout en renforçant leur cohérence, les programmes de modernisation du secteur énergétique des pays d'Europe centrale et orientale « responsables » aujourd'hui du quart des émissions mondiales de CO 2 . Il y a là un « gisement » de réduction des pollutions atmosphériques dont l'exploitation est absolument prioritaire.

*

Au cours du débat qui a suivi la présentation par M. Philippe François de son rapport d'information, M. Jacques Oudin a déclaré partager pleinement les observations du rapporteur et a posé deux questions, l'une de fond, l'autre de forme. Il a tout d'abord indiqué qu'il lui semblait complètement inopportun de prendre le risque d'alourdir les taux de prélèvements obligatoires, spécialement en France où ils sont parmi les plus élevés de la Communauté, se demandant si les fonds structurels ne pourraient pas être mis à contribution pour aider les entreprises responsables du plus gros des émissions de dioxyde de carbone à améliorer les processus de production et à renforcer leur « efficacité énergétique ». Ensuite, il a souhaité que dans ses conclusions la délégation ne se borne pas à inviter le Gouvernement « à maintenir ses réserves » vis-à-vis de la proposition de directive mais, plus nettement, à « manifester son opposition ». La délégation a approuvé cette proposition.

M. Xavier de Villepin a également manifesté son approbation à l'égard des observations du rapporteur et s'est interrogé sur l'éventuelle influence de certains secteurs d'activités, tels les chemins de fer, en faveur d'un durcissement de la réglementation antipollution ; il a en outre souligné la nécessité d'éviter de surenchérir les prix européens.

M. Philippe François, rapporteur, a rappelé le climat dans lequel était née la proposition de la Commission : celle-ci a été mise au point pendant la préparation du « sommet de Rio », alors qu'on pouvait escompter un engagement de la part de tous les États de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). Le retrait américain a sans doute déséquilibré la traduction en normes internationales de la prise de conscience générale des risques de modification du climat. Les entreprises de transport ferroviaire ne sont venues que récemment au soutien de ce mouvement.

M. Charles Metzinger s'est déclaré d'accord avec les réserves du rapporteur vis-à-vis de toute proposition qui pourrait entraîner une augmentation des prélèvements obligatoires. Il s'est cependant interrogé sur l'efficacité de mesures nationales pour atteindre à elles seules l'objectif de la taxe, à savoir la stabilisation des émissions de CO 2 . Il s'est demandé s'il ne conviendrait pas d'instituer la taxe communautaire comme une « menace » pour amener les entreprises les plus polluantes à respecter les valeurs limites fixées. Il a indiqué que l'objectif de réduction des pollutions demeurait intrinsèquement souhaitable, pour la France comme pour la Communauté.

M. Philippe François, rapporteur, a indiqué qu'il existait un mécanisme communautaire de surveillance qui, même s'il est dépourvu de pouvoirs de police, peut alerter la Commission et le Conseil sur le non-respect des engagements des États au regard des objectifs souscrits au niveau communautaire.

Le rapporteur s'est encore fait l'avocat du développement des carburants de substitution, rappelant les travaux menés en ce sens par la commission des affaires économiques et du plan du Sénat dont il a conduit une mission aux États-Unis, et exposant que, si l'on intégrait tous les coûts des énergies fossiles, les bio-carburants apparaîtraient comme rentables.

M. Denis Badré ayant rappelé son expérience des conseils « Environnement » sous présidence française au premier semestre de 1995, a souligné que la proposition soulevait des débats de fond tenant à la politique de l'énergie, à la politique des transports, à l'équilibre des relations internationales entre, d'une part, l'Union européenne et le sous-continent Nord-américain ou le Japon et, d'autre part, le Nord et le Sud. Il a indiqué que l'esprit de Rio ne s'était pas complètement dissipé, comme en témoigne l'inscription d'une clause de protection de l'environnement dans le Traité de l'Accord de Libre Échange Nord Américain (ALENA). Les préoccupations environnementales se développent donc, même si le contexte économique et politique est difficile. Le débat existe même entre les États européens, et notamment entre les partisans et les adversaires de l'énergie nucléaire, la France pouvant occuper un rôle de pivot dans plusieurs de ces débats.

M. Denis Badré a alors formulé les trois critères d'appréciation à appliquer aux mesures envisagées en premier lieu, le niveau des prélèvements, qu'il convient non seulement de contenir mais sans doute d'abaisser ; en second lieu, le niveau de la pollution atmosphérique dont la réduction est certainement souhaitable et, enfin, l'effet des mesures choisies, notamment à l'égard de la compétitivité des États-membres et de l'Union européenne en général. Soulignant que le choix entre taxes et normes était lourd de conséquences, il a déclaré sa préférence pour la fixation de valeurs limites par des normes, et a indiqué qu'il convenait d'agir sans relâche pour amener nos principaux partenaires à la prise en compte de ces normes, en particulier dans le cadre de l'organisation mondiale du commerce, plutôt que d'abaisser les normes communautaires.

Au terme de ce débat, la délégation a adopté à l'unanimité le rapport, après en avoir modifié les conclusions dans le sens souhaité par M. Jacques Oudin.

Le rapport de M. Philippe François :

Une écotaxe communautaire : quels effets environnementaux,
économiques et institutionnels ?

a été publié sous le n° 210 (1995-1996)

Proposition E 511

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

Présentation par M. Jacques Oudin d'une proposition de résolution :

Vous m'avez chargé, en décembre dernier, de préparer une proposition de résolution sur la proposition d'acte communautaire E 511, qui concerne le programme communautaire SAVE II.

De quoi s'agit-il ?

Le programme SAVE est destiné à subventionner des actions en matière d'efficacité énergique. SAVE I a porté sur la période 1991-1995 ; SAVE II est appelé à lui succéder pour la période 1996-2000. Ce programme prévoit notamment de financer des actions de normalisation, des études portant sur des thèmes liés à l'efficacité énergétique ou des actions de sensibilisation. Je ne développe pas davantage les différents aspects de ce programme, qui sont détaillés dans le projet de proposition de résolution que notre président vous a fait parvenir.

Ce programme pose, malgré son objectif louable, plusieurs problèmes :

Tout d'abord, la Commission européenne propose d'engager le programme SAVE II, sans qu on ait une idée claire des résultats du programme SAVE I. Dans le texte adressé au Sénat, la Commission évoque une étude réalisée par une équipe d'experts indépendants, mais cette étude, dont la Commission indique qu'elle est annexée à la proposition, ne nous a en fait pas été transmise.

La Commission européenne indique également qu'une conférence tenue à Florence a été un autre élément d'évaluation du programme. Cette conférence réunissait des représentants des États, ainsi que les bénéficiaires du programme SAVE. On ne pouvait attendre de ces derniers qu'ils remettent en cause l'efficacité du programme.

Dans ces conditions, il est difficile pour le Sénat de se faire une idée claire de l'efficacité du précédent programme, au moment où il doit se prononcer sur son renouvellement. Or, le dernier rapport de la Cour des Comptes montre que de nombreux programmes communautaires font l'objet d'une gestion critiquable. C'est pourquoi il me semble que nous devons faire preuve de vigilance.

Par ailleurs, la Commission européenne propose que 150 millions d'Écus soient affectés au programme SAVE II alors que le programme SAVE I ne portait que sur 35 millions d'Écus.

Pour justifier cette augmentation massive, la Commission indique plusieurs raisons qui ne me paraissent pas pleinement convaincantes, comme vous pouvez le voir dans le texte de la proposition de résolution.

Dans une période où les États ont engagé une lutte difficile contre les déficits publics, il est légitime de se demander s'il est indispensable de multiplier par près de cinq les sommes attribuées à ce programme.

En outre, il existe actuellement de multiples programmes communautaires en matière énergétique et je crois qu'avant d'engager de nouvelles actions, on devrait réfléchir à la coordination indispensable entre ces programmes, pour éviter une mauvaise utilisation des fonds communautaires et une dispersion des actions.

Enfin, ce programme pose un problème sérieux de base juridique. Le programme SAVE I avait pour base juridique l'article 235 du traité de Rome. Cet article permet aux institutions communautaires d'agir dans des domaines où elles n'ont pas reçu de compétence de la part des traités, à condition que cette action soit nécessaire pour réaliser l'un des objets de la Communauté. Cet article implique une adoption à l'unanimité. Son utilisation était logique dans le cas du programme SAVE puisque le traité ne contient pas de dispositions en matière de politique énergétique. L'attribution de compétences à l'Union européenne dans ce domaine figure d'ailleurs à l'ordre du jour de la prochaine Conférence intergouvernementale.

Or, la Commission européenne propose aujourd'hui l'article 130 S du traité comme base juridique pour le programme SAVE II. Cet article porte sur la politique de l'environnement. Il s'agit d'une base juridique tout à fait contestable, compte tenu du fait que le programme SAVE, relatif à l'efficacité énergétique n'a pas pour seul objectif la protection de l'environnement. En fait, la Commission européenne souhaite utiliser cet article, parce qu'il implique une adoption au sein du Conseil à la majorité qualifiée et non à l'unanimité comme l'article 235.

C est pour ces raisons que j envisage de déposer, si vous en êtes d'accord, la proposition de résolution qui vous a été envoyée. Il s'agit de demander un audit sur les actions menées par la Communauté dans la domaine énergétique, afin de vérifier la coordination des programmes et la bonne utilisation des fonds. Cette proposition va dans le même sens que celle de la délégation de l'Assemblée nationale, qui a été approuvée par la commission de la Production et des Échanges.

Je propose en outre, que nous nous opposions à une augmentation aussi massive des fonds attribués à ce programme. Je souhaite enfin que la base juridique soit modifiée pour être en conformité avec la véritable nature de ce programme.

*

La délégation a alors décidé le dépôt par M. Jacques Oudin, d'une proposition de résolution sur la proposition E 511 (voir texte ci-après).

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Le Sénat

Vu la proposition d'acte communautaire E 511

Considérant que la proposition d'acte communautaire E 511 a pour objet de renouveler le programme SAVE, dont le but est la promotion de l'efficacité énergétique dans l'Union européenne ;

Considérant que les éléments d'appréciation portés à la connaissance du Sénat sur le programme SAVE I ne permettent pas d'avoir une idée claire de son efficacité ;

Considérant en outre que de nombreux programmes communautaires ont fait récemment l'objet de critiques de la part de la Cour des Comptes européenne ;

Considérant que la Commission européenne propose de multiplier par près de cinq le budget du programme SAVE au moment où les États membres sont engagés dans une action difficile de réduction des déficits ;

Considérant qu'il existe de nombreux programmes communautaires en matière énergétique, sans qu'il soit avéré que leur coordination est pleinement assurée ;

Considérant que la Commission européenne propose une base juridique relative à la politique de l'environnement, alors que le programme SAVE II n'a pas pour seul objectif la protection de l'environnement ;

- s'associe à la demande de la Délégation pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale tendant à ce qu'un audit global soit diligente par le Conseil de l'Union européenne sur l'ensemble des actions menées par la Communauté dans le domaine de l'énergie ;

- s'oppose à l'augmentation massive des fonds consacrés au programme SAVE ;

- demande au Gouvernement d'agir au sein du Conseil afin que la base juridique de la proposition E-511 soit conforme à la nature de ce programme et que l'article 130 S du Traité sur l'Union européenne soit remplacé par l'article 235.

Cette proposition de résolution a été publiée sous le n° 194
(1995-1996).

Elle a été renvoyée à la commission des Affaires
économiques et du Plan.

Proposition E 540

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition E 540 concerne le Traité sur la Charte de l'Énergie et le Protocole sur l'efficacité énergétique, signés en décembre 1994 par 50 parties, dont les Communautés et leurs États membres.

Ce traité a pour objet de développer la coopération entre les pays d'Europe de l'Est - PECO et CEI - qui disposent de ressources naturelles considérables et les pays occidentaux titulaires d'un savoir-faire énergétique important. Il crée un cadre juridique encourageant la coopération à long terme, au moyen de dispositions sur l'investissement, le commerce, le transit, l'environnement, la fiscalité, l'accès aux capitaux et aux technologies.

Le Protocole sur l'efficacité énergétique renforce, pour sa part, les dispositions du traité relatives à la protection de l'environnement.

La proposition E 540 tend à faire approuver par les Communautés européennes ces deux textes sur lesquels le Sénat sera amené à se prononcer ultérieurement en vue de leur ratification.

*

Ayant considéré que les entreprises européennes du secteur énergétique devraient profiter de la mise en oeuvre de ces textes qui contiennent de nombreuses mesures destinées à faciliter le développement de leurs activités à l'Est (protection des investissements réalisés dans ces pays, établissement de règles de concurrence, devoir de transparence des lois et procédures applicables dans les pays signataires, etc.) ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 540.

7. Transports

Proposition E 513

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

Communication de M. Jacques Genton :

La proposition E513 comporte en fait trois propositions distinctes :

- une proposition de directive visant à libéraliser les marchés fluviaux qui ne le sont pas encore ;

- une proposition de règlement destinée à permettre de réduire les surcapacités existant dans le domaine du transport fluvial ;

- enfin, une proposition de règlement visant à favoriser l'investissement dans les terminaux fluviaux.

La proposition de directive sur la libéralisation doit permettre de faire disparaître progressivement le système du « tour de rôle » et des prix fixés par l'État, en vigueur en Belgique, en France et aux Pays-Bas. Ce système s'applique à la fois pour le transport par navigation à l'intérieur de ces pays et pour le trafic entre ces pays.

La notion de « système de tour de rôle » désigne un ensemble de mesures régulatrices du marché dans lequel les prix du fret sont fixés de manière centralisée et obligatoire (le plus souvent par l'autorité publique) et où la cargaison disponible est répartie entre les transporteurs intéressés selon le principe qui veut que le transporteur attendant un affrètement depuis le plus longtemps peut, le premier, choisir la cargaison à transporter.

Ce système serait progressivement supprimé d'ici l'an 2000 afin d'aboutir à une liberté contractuelle sur le marché du transport fluvial.

Cette proposition de directive va dans le même sens que la loi française du 12 juillet 1994, qui a prévu la suppression du système de tour de rôle national en l'an 2000 ; elle est donc approuvée par le Gouvernement français.

La proposition de règlement relative à l'assainissement structurel dans la navigation intérieure vise à remédier aux importantes surcapacités existant dans ce secteur d'activité. Au cours de la dernière décennie, l'offre de cale a en effet, à plusieurs reprises, dépassé la demande. En avril 1989, le Conseil a adopté un règlement pour faire face à ce problème. Des primes sont versées aux propriétaires qui font déchirer (c'est-à-dire font détruire) un de leurs bateaux. De plus, la mise en exploitation de nouvelles capacités est subordonnée à la condition qu'une quantité déterminée d'ancien tonnage soit déchirée (sans versement d'une prime à cet effet). Pour financer ce programme, tous les propriétaires versent à leur fonds de déchirage national des cotisations annuelles, en fonction de la taille et du type de leurs bateaux.

En 1994, une surcapacité substantielle était apparue. Une liste d'attente de plusieurs centaines de bateaux, pour lesquels une prime de déchirage avait été demandée, s'était formée, sans que les fonds de déchirage ne disposent des moyens financiers nécessaires pour pouvoir honorer les demandes. Dans la deuxième moitié de 1994, les États membres concernés ont fait savoir à la Commission qu'ils étaient prêts à financer sur leurs budgets nationaux toutes les demandes de déchirage qui figuraient sur la liste d'attente au 30 juin 1994. Cependant, depuis lors, de nouvelles demandes de primes ont été déposées. Un crédit de 5 millions d'Écus a été inscrit dans le budget 1995 à l'initiative du Parlement européen pour l'assainissement structurel dans la navigation intérieure.

La proposition de règlement vise donc à créer une base juridique claire pour l'emploi de ces 5 millions d'Écus. Elle prévoit aussi la possibilité d'une contribution pluriannuelle de la Communauté à l'action de restructuration pendant la période 1996-1998. Les propriétaires, les États et la Communauté participeront donc ensemble à ces actions visant à résorber les surcapacités, qui sont estimées à environ 15 %, tant dans le secteur de 1a cale sèche que dans celui des citernes (la flotte des pays de la Communauté comprend environ 10 millions de tonnes de bateaux à cargaison sèche et 2 millions de tonnes de bateaux-citernes).

Enfin, le troisième texte est une proposition de règlement sur les aides accordées dans le domaine des transports par voie navigable.

Les transports par voie navigable sont avantageux pour la société en termes de respect de l'environnement, de sécurité, d'économies d'énergie Cependant, si le coût de la tonne-km du transport par bateau n'est pas très élevé, cet avantage risque d'être anéanti par des frais de transbordement élevés. De plus, le montant considérable des investissements souvent nécessaires dans la logistique interne de l'entreprise de chargement constitue un obstacle.

La Commission européenne propose donc d'instaurer un régime de soutien temporaire aux investissements dans les terminaux fluviaux. La demande d'aide à l'investissement devra être accompagnée d'une évaluation prévisionnelle du volume des cargaisons que transportera la voie d'eau à la suite de l'investissement. Si le tonnage nouveau ou supplémentaire de transport sur la voie d'eau n'est pas réalisé, les bénéficiaires des aides devront alors rembourser celles-ci. Le montant de l'aide ne pourra en aucun cas dépasser 50 % de l'investissement correspondant.

En définitive, les deux propositions de règlements visent à favoriser le transport fluvial en aidant à la résorption des surcapacités et en facilitant les investissements dans les terminaux fluviaux. La proposition de directive doit, quant à elle, permettre une harmonisation des conditions de fonctionnement du marché de la navigation intérieure. Après examen, il me semble donc que ces textes ne méritent pas une intervention du Sénat par le biais d'une proposition de résolution. Je crois en revanche que nous devons rester attentifs à l'évolution de ce secteur très important, qui doit être soutenu compte tenu des avantages que présente ce mode de transport de marchandises.

*

Après avoir entendu cette communication, la délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 513.

8. Recherche

Proposition E 547

(Réunion de la délégation du 31 janvier 1996)

La proposition E 547 prévoit la réalisation par le centre commun de recherche pour la Communauté européenne de l'énergie atomique d'un programme de recherche relatif à l'exploitation d'un réacteur à haut flux installé aux Pays-Bas. Ce programme d'une durée de quatre ans sera financé par les Pays-Bas, l'Allemagne et la France. Son coût s'élève à près de 40 millions déçus. La participation de la France est modeste (1,2 millions déçus prélevés sur le budget du CEA), l'essentiel étant financé par les Pays-Bas.

La France, en s'associant à ce programme, poursuit un double objectif : influer sur la gestion et l'exploitation de ce réacteur, mais surtout rompre l'isolement dans lequel elle se trouve au sein de l'Union en matière nucléaire.

*

Ayant considéré que ce texte répondait à un voeu français ;

La délégation a décidé de ne pas intervenir sur la proposition E 547.

9. Politique sociale

Propositions E 582 et E 583

(Réunion de la délégation du 6 mars 1996)

Présentation par M. Jacques Genton d'une proposition de résolution :

Les propositions E 582 et E 583 visent toutes deux à modifier le règlement de 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté (Règlement n° 1408/71).

Ces propositions font suite à un premier projet présenté par la Commission européenne en 1980, qui n a pas été adopté par le Conseil. Dans ces domaines, le Conseil de l'Union européenne statue à l'unanimité. La Commission européenne, estimant que cet échec était lié au mélange de deux problèmes dans une même proposition, a décidé de scinder en deux propositions son projet de 1980 : l'une des propositions porte sur les prestations de chômage, l'autre sur les prestations de préretraite.

I - LES PRESTATIONS DE CHÔMAGE (proposition E 582)

a) Les prestations de chômage accordées aux personnes migrant à l'intérieur de la Communauté

Actuellement, lorsqu'un travailleur se trouve en situation de chômage dans un État membre et décide d'aller chercher du travail dans un autre État membre, il continue à percevoir des prestations de chômage pendant une durée de trois mois.

La Commission européenne estime que ce dispositif, conçu en période de plein emploi, est aujourd'hui inadapté, compte tenu de l'état du marché du travail. Elle propose donc de permettre le maintien, au-delà de la période de trois mois, des droits aux prestations de chômage, lorsqu'un chômeur se rend dans un autre État membre pour y chercher un travail.

Pour éviter une certaine forme de « tourisme social » entre deux États, la Commission propose qu'après une période de trois mois, le droit aux prestations soit maintenu, mais avec le régime le moins favorable des deux. Si un travailleur se rend dans un État membre où l'indemnisation du chômage est plus favorable, on lui appliquera les règles d'indemnisation du pays d'ou il vient. Si, au contraire, il se rend dans un État où l'indemnisation est moins favorable, ce sont les règles du pays d'accueil qui s'appliqueront.

Autrement dit, les travailleurs concernés n'auront droit qu'au montant le moins élevé prévu par la législation des deux États membres concernés ainsi qu'à la durée la plus courte.

En ce qui concerne le versement des prestations, la Commission propose que ces dernières soient versées par l'institution de l'État dans lequel le travailleur cherche un emploi ; celle-ci agirait pour le compte de l'institution de l'État dans lequel le travailleur a acquis des droits à prestations et se ferait donc rembourser par cette dernière.

Quant au contrôle, la Commission européenne propose qu'il soit fait par l'institution de l'État dans le quel le chômeur cherche un emploi et conformément à la législation de cet État membre, avec la collaboration des institutions des États membres qui sont compétentes pour servir les prestations.

Appréciation :

Cette proposition est louable quant à ses objectifs. La Commission européenne estime :

- qu'elle permettra d offrir aux chômeurs de meilleures chances de trouver un emploi dans un autre État membre ;

- qu'elle répond aux besoins d'un chômeur amené à transférer sa résidence dans un autre État membre en cas de mutation d'emploi du conjoint ;

- qu'elle répond aux besoins d'un chômeur qui souhaite pouvoir retourner dans un État membre dans lequel il a acquis ou conservé des liens d'attache particuliers.

Mais on peut avoir de sérieux doutes sur les solutions proposées :

- un dispositif dans lequel l'institution qui exerce en principe le contrôle n'est pas l'institution qui paye les prestations, risque de favoriser la fraude ;

- la mise en oeuvre du dispositif posera des problèmes pratiques d'une certaine complexité, car les organismes sociaux auront à comparer les différents régimes d'indemnisation, tant du point de vue de la durée que du montant des prestations, et à tenir compte des changements de ces régimes et, le cas échéant, des fluctuations monétaires ;

- des difficultés risquent d'apparaître dans les rapports entre organismes sociaux. Par exemple, lorsqu'un travailleur migrant, indemnisé en Grèce, souhaitera transférer ses droits en France, l'ASSEDIC devra déterminer ses droits à indemnisation en fonction du droit social grec, verser les prestations correspondantes, puis tenter de se faire rembourser auprès de l'organisme social chargé en Grèce de verser les prestations. Les divergences d'interprétation, les difficultés de communication, les lenteurs de remboursement risquent de conduite à une gestion d'une rare lourdeur ;

- on peut se demander si l'importance du problème est à la mesure de la complexité du système proposé. En effet, à l'exception des cas particuliers évoqués par la Commission européenne, un travailleur qui quitte un État membre pour chercher du travail dans un autre, le fait, dans la majorité des cas, parce qu'il a une perspective assez précise d'emploi.

b) Les prestations de chômage accordées aux travailleurs frontaliers

La proposition E 582 contient également des propositions relatives aux travailleurs frontaliers. La Commission européenne propose en effet que les travailleurs frontaliers connaissant une situation de chômage complet puissent se mettre à la disposition soit des services de l'emploi de l'État dans lequel ils résident, soit des services de l'emploi de l'État dans lequel ils ont exercé leur dernier emploi. Dans ces conditions, le versement des prestations serait assuré par l'institution de l'un ou l'autre État, selon le choix du travailleur (actuellement, les prestations de chômage versées à un travailleur frontalier en situation de chômage complet sont prises en charge par l'institution de l'État de résidence). La Commission européenne envisage une dérogation pendant une période de dix ans pour le Luxembourg, qui compte un grand nombre de travailleurs frontaliers.

Appréciation :

Cet aspect de la proposition E 582 ne soulève pas d'autre difficulté que celle du contrôle sur d'éventuelles doubles inscriptions.

II - LES PRESTATIONS DE PRÉRETRAITE (proposition E 583)

La proposition E 583 vise, en premier lieu, à permettre à un travailleur bénéficiant d'une convention de préretraite de continuer à bénéficier de ces prestations lorsqu'il s'installe sur le territoire d'un autre État membre de la Communauté. Cette disposition est déjà mise en oeuvre dans la réglementation française. La Commission européenne propose que les clauses nationales anti-cumul soient appliquées dans le cas où le titulaire d'une convention de préretraite exerce une activité professionnelle sur le territoire d'un autre État membre. L'organisme social compétent du nouveau lieu de résidence serait chargé de procéder aux contrôles permettant de vérifier si le bénéficiaire de prestations de préretraite continue à remplir les conditions du maintien du droit aux prestations prévues par la législation de l'État dans lequel la convention a été passée.

La proposition E 583 contient également des dispositions relatives aux travailleurs frontaliers. Ainsi, le travailleur exerçant une activité dans un État autre que celui de sa résidence, pourrait bénéficier des prestations de préretraite comme s'il résidait dans l'État membre où il travaille. L'organisme social compétent du lieu de résidence de ce travailleur serait tenu de rembourser ces prestations à celui de l'État où le travailleur a exercé son dernier emploi, dans la limite du montant des prestations de chômage qu'il aurait dû servir à l'intéressé si ce dernier s'était mis à la disposition des services de l'emploi de son lieu de résidence.

Appréciation :

Le maintien des prestations de préretraite en cas de changement d'État de résidence ne pose pas de problème pour la France qui applique déjà cette règle. Toutefois, on peut exprimer les mêmes craintes que pour la proposition sur les prestations de chômage, en ce qui concerne la réalité des contrôles sur le respect des conditions du maintien du droit aux prestations de préretraite.

Le régime proposé pour les travailleurs frontaliers paraît contestable. En effet, les conventions de préretraite ont pour premier objectif de libérer des emplois. Dans le cas de travailleurs frontaliers, les emplois libérés le sont dans le pays où le travailleur a exercé son dernier emploi. Il ne paraît donc pas logique de mettre les indemnités de préretraite, même partiellement, à la charge de l'État dans lequel le travailleur réside.

D'une manière générale, les prestations de préretraite relèvent de la politique de l'emploi qui, en l'état actuel des traités, ne relève pas de la compétence de la Communauté. Au demeurant, le régime français de préretraite étant plus favorable que celui de la plupart des autres États membres, une harmonisation européenne ne se traduirait pas, pour la France, par une avancée sociale.

En conclusion, il ne semble pas que les propositions d'actes communautaires E 582 et E 583 avancent des réponses pleinement adaptées aux problèmes qu'elles entendent résoudre.

La complexité des solutions proposées, l'absence de formule satisfaisante pour le contrôle, les risques de contentieux, ne plaident pas pour que les solutions proposées soient retenues.

Il paraît donc souhaitable que le Sénat invite le Gouvernement à s'opposer à l'adoption en l'état de ces textes, et à suggérer à la Commission européenne de procéder à une large concertation en vue de dégager des solutions mieux adaptées.

*

MM. Denis Badré et Yves Guéna ont critiqué la complexité et la lourdeur des solutions retenues par la Commission européenne et ont souhaité que la délégation manifeste son opposition.

M. Claude Estier, tout en soulignant la nécessité de renforcer les droits des préretraités et des chômeurs, a souhaité que ces questions soient abordées dans un esprit de subsidiarité. Il est difficile de dégager des solutions uniformes dans de tels domaines : mieux vaut privilégier des solutions plus simples, définies dans des cadres plus restreints.

La délégation a alors décidé le dépôt par MM. Jacques Genton, Denis Badré, Jacques Habert, Daniel Millaud, Yves Guéna, Claude Estier et Jacques Oudin, d'une proposition de résolution portant conjointement sur les textes E 582 et E 583 (voir texte ci-après).

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Le Sénat,

Vu les propositions d actes communautaires E 582 et E 583,

Considérant que ces textes ont pour objet l'amélioration des conditions d'octroi des prestations de chômage et de préretraite aux travailleurs migrant à l'intérieur de la Communauté et aux travailleurs frontaliers ;

Considérant que la solution retenue pour les prestations de chômage des travailleurs migrants, complexe et lourde à gérer, risque de permettre des fraudes et de provoquer des contentieux ;

Considérant que la solution retenue pour les prestations de préretraite des travailleurs frontaliers est inéquitable ;

Considérant que les solutions retenues tant pour les prestations de chômage que pour les prestations de préretraite n'apportent pas de garanties suffisantes en matière de contrôle ;

Considérant que les contraintes supplémentaires et uniformes que les propositions E 582 et E 583 entendent introduire dans les régimes sociaux des États membres ne paraissent pas conformes au principe de subsidiarité ;

Invite le Gouvernement à s'opposer à l'adoption des propositions E 582 et E 583.

Cette proposition de résolution a été publiée sous le n° 258
(1995-1996).

Elle a été renvoyée à la commission des Affaires sociales.

* 1 En Asie : Bangladesh, Brunei, Chine, Inde, Indonésie, Macao, Malaisie, Mongolie, Pakistan, Philippines, Singapour, Sri Lanka, et Thaïlande.

En Amérique Latine : Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, Colombie, Costa Rica, Équateur, Salvador, Guatemala, Honduras, Mexique, Nicaragua, Panama, Paraguay, Pérou, Uruguay et Venezuela.

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