2. Une condition : une stratégie ambitieuse d'alliances

A l'instar d'un certain nombre de ses concurrents, La Poste devra envisager de développer sa présence commerciale à l'étranger. Royal Mail prépare la conquête du marché français et dispose d'agents commerciaux à Paris. La poste suisse vient de s'implanter à Lyon. L'opérateur français ne doit pas être à la traîne de ce mouvement.

Mais, La Poste ne peut compter s'aventurer seule si elle veut réellement conquérir les marchés internationaux, tant dans le domaine du courrier que dans celui de la messagerie. Elle devra nouer des alliances avec des partenaires étrangers.

La Poste ne ménage d'ores et déjà pas ses efforts pour développer et améliorer son offre de services à l'international avec, notamment, le lancement d'une gamme de produits courrier spécifique 140( * ) .

Le succès de ces prestations dépendra cependant largement de sa capacité à passer des partenariats avec des sociétés étrangères disposant de compétences complémentaires aux siennes.

Cette stratégie d'alliances s'impose plus encore sur le marché de la messagerie.

On l'a vu précédemment 141( * ) , les accords commerciaux qui lient encore le groupe Poste à TNT arriveront à leur terme en 2001. En outre, cet intégrateur n'apparaît pas le plus performant sur les marchés américains et asiatiques. Surtout, TNT étant le fer de lance du plus grand puissant compétiteur de La Poste sur le marché de la messagerie internationale et du plus grand " reposteur " européen : la poste néerlandaise, qui peut raisonnablement penser que leurs intérêts respectifs auront toujours vocation à se concilier ?

Dès lors, il est urgent de préparer l'après 2001. Soyons réalistes : La Poste ne peut, à elle seule, devenir un grand intégrateur mondial dans un proche avenir. Elle peut cependant se ménager un accès plus large au marché porteur de la messagerie internationale en contractant de nouvelles alliances.

Deux voies non exclusives semblent pouvoir être ouvertes pour une telle stratégie :


- afin de rester un opérateur digne de ce nom sur le marché européen, dominé par les flux franco-allemands, La Poste ne pourrait-elle pas envisager une alliance avec la poste allemande , à l'instar des relations que France Télécom et Deutsche Telekom ont noué et semblent ambitionner de renforcer, sous une autre forme, dans le secteur des télécommunications ? Serait ainsi valorisée et concrétisée la solidarité entre les deux grandes postes historiques européennes ;

- mais on ne peut ignorer que le marché de la messagerie internationale fait de plus en plus l'objet de la conquête -assidue et victorieuse- des grands intégrateurs mondiaux . Dès lors, un rapprochement stratégique avec l'un de ces géants mondiaux ne serait-il pas nécessaire , pour prendre pied sur les marchés extra-européens, notamment américains et asiatiques ?

Dans cette perspective, l'alliance franco-allemande permettrait, dans un premier temps, de constituer un pôle de messagerie très fort en Europe. Dès lors, il serait possible d'envisager, pour conquérir les autres marchés mondiaux en croissance, d'adopter une stratégie similaire à celle qui a conduit France Télécom et Deutsche Telekom à s'associer, puis à s'allier à un opérateur américain Sprint pour constituer Global One.

On voit bien que pour toutes les industries de réseau (qu'il s'agisse de télécommunications, de transports aériens, etc.), la politique en matière d'alliances internationales devient primordiale et supporte difficilement les atermoiements.

La France ne doit pas être la lanterne rouge en la matière. Prenons garde : Royal Mail a pris pour partenaires plusieurs sociétés américaines spécialisées dans le marketing direct et le transport ainsi que des transporteurs européens (la société française Extand, par exemple). Parcel force a noué des partenariats avec d'autres administrations postales et n'hésite pas à s'allier avec des opérateurs privés (tel que le réseau français Jet).

On peut d'ailleurs se demander si de telles alliances internationales n'ont pas vocation à déboucher, à terme, sur des partenariats capitalistiques.

De même, faut-il avoir conscience qu'une des voies de développement pour les postes les plus avancées passera par la participation à des opérations de privatisation d'opérateurs postaux. La Poste française est sollicitée régulièrement pour y participer.

Peut-on, dans ces conditions, ne pas laisser ouvert le débat sur une éventuelle capitalisation, à terme, de notre opérateur public ?

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