VI. ASSURONS LES CONDITIONS D'UNE CONCURRENCE À ARMES ÉGALES EN AIDANT LA POSTE À S'ALLÉGER DU POIDS DE SES HANDICAPS DE COMPÉTITIVITÉ

Nous avons proposé que dans le cadre d'un engagement collectif, l'État -et derrière lui, la Nation- aide La Poste à s'alléger du poids de ses handicaps de compétitivité. Il importe de mettre La Poste dans la situation d'une entreprise publique en mesure d'exercer ses métiers sur des marchés soumis à forte concurrence, tout en lui donnant les moyens d'assurer ses importantes missions de service public.

Cet engagement passe nécessairement par la clarification des relations financières entre l'État et La Poste qui apparaissent anormalement complexes et déséquilibrées. Il passe non moins impérativement par la recherche rapide d'une solution durable à la dérive des retraites.

A. CLARIFIONS LES RELATIONS FINANCIÈRES ENTRE L'ÉTAT ET LA POSTE

Une telle clarification s'impose. Elle concerne, en premier lieu, le coût des missions d'intérêt général confiées à La Poste, qu'il s'agisse de son rôle dans l'aménagement du territoire ou dans le transport de la presse ; ces deux sujets essentiels ont fait l'objet de développements spécifiques précédemment 224( * ) .

Elle concerne, en deuxième lieu, les modes de rémunération des produits financiers. Elle pose enfin le problème du non-assujettissement de La Poste à la TVA et de l'existence du droit de timbre. Ces trois derniers points se trouvent examinés ci-après.

1. C'est une nécessité absolue

Si La Poste est passée du statut d'administration à celui d'établissement public, acquérant ainsi une certaine autonomie, elle n'en reste pas moins sous la tutelle d'un État qui a continué de la " couver " d'un oeil protecteur, mais parfois possessif et intéressé.

Aujourd'hui, on l'a vu précédemment 225( * ) , la situation financière de La Poste résulte partiellement d'un jeu subtil et complexe où interviennent des handicaps de compétitivité -liés aux obligations de service public, aux modes et au niveau de rémunération de ses activités, aux charges de retraite- et d'avantages, financiers et fiscaux notamment.

Au total, les charges résultant des missions de service public confiées par l'État à l'opérateur s'avèrent délicates à évaluer, mais en tout état de cause insuffisamment compensées par certains avantages qui suscitent de plus l'opprobre de ses concurrents.

La complexité des relations ainsi inextricablement, mais subtilement, nouées entre l'État et La Poste fait penser à une sorte de " boîte noire ", dont le contenu est savamment rendu hermétique pour le commun des mortels, mais dont les protagonistes se sont longtemps satisfaits.

On ne peut pas dire que cette situation soit très saine ! En tout état de cause, on ne peut envisager qu'elle puisse perdurer sous la pression à la fois de la concurrence -qui réclame à cor et à cri la transparence- et de la nécessité de préserver l'équilibre financier de La Poste
.

Il faut d'ailleurs souligner que, dans son avis du 25 juin 1996, le Conseil de la Concurrence évoque la clarification des relations entre l'État et La Poste comme une " mesure propre à faciliter le contrôle du respect des règles de concurrence ". Au demeurant, le citoyen, à la fois usager de La Poste et contribuable, n'est-il pas fondé à vouloir voir clarifiées les règles d'un jeu dont on a, au total, du mal à départir le gagnant du perdant, selon les domaines concernés ?

Une clarification des relations financières entre l'État et La Poste apparaît désormais nécessaire. Cet important chantier a été engagé mais, à chaque fois, ses progrès ont pour la plupart été réalisés au détriment de La Poste :

- en matière de fiscalité, avec l'assujettissement de La Poste à la fiscalité de droit commun depuis le 1er janvier 1994 et le paiement de la taxe sur les salaires au taux normal depuis 1994 ;

- pour la rémunération du transport du courrier des administrations, après la suppression de la franchise postale intervenue le 1er janvier 1996 ;

- pour la rémunération de la gestion des livrets A, pour laquelle on est passé d'une logique de marge à une logique de rémunération à la commission.

En revanche, le processus de normalisation n'a été au mieux qu'amorcé dans d'autres domaines (presse et aménagement du territoire -on l'a vu-, rémunération des CCP et rémunération de la gestion des comptes des comptables publics 226( * ) ) et les relations financières de l'entreprise publique avec l'État sur ces sujets ne sont pas, pour l'instant, totalement conformes au cadre fixé par la loi de 1990 et le cahier des charges.

Le chantier n'est donc pas achevé. En outre, il convient d'insister sur ce point, la normalisation jusqu'ici opérée entre l'État et La Poste a avancé selon un rythme fortement déséquilibré : la plupart des évolutions ayant un impact négatif sur les comptes de La Poste sont intervenues, alors que les questions relatives à la compensation financière des contraintes de service public et la rémunération des CCP n'ont reçu qu'une réponse partielle.


N'est-il pas pour le moins paradoxal, alors que la normalisation des relations financières avec l'État apparaît indispensable pour mettre La Poste en situation de faire face économiquement et juridiquement à une concurrence de plus en plus vive, que l'on ait jusqu'ici abouti à une aggravation de ses handicaps de compétitivité ?

Cette situation ne peut durer plus longtemps. L'État et, derrière lui, la Nation, doivent prendre leurs responsabilités.

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