1.2 Un dosage des missions de service public ou de puissance publique difficile à établir
La description des tutelles et les financements de l'État délimitent le domaine des prérogatives de puissance publique gardées par l'État directement pour les ports principaux (ports autonomes et ports d'intérêt national) et par les départements pour les ports locaux.
Ce domaine concerne principalement la sécurité des hommes et des biens. On a vu que l'État finance majoritairement (80%) les chenaux d'accès maritimes, les écluses maritimes et digues de protection extérieures, à un degré moindre (60 %) les darses, quais et terrains endigués. Il couvre en principe intégralement les dépenses d'entretien de ces infrastructures.
Cependant, les pourcentages indiqués pour les ports autonomes et les PIN sont devenus à l'usage assez théoriques et les autorités portuaires, d'un côté, comme les CCI de l'autre, contribuent fréquemment pour un niveau supérieur aux pourcentages et sont mêmes parfois appelés à participer au financement de l'entretien.
La participation partielle aux dépenses de sécurité des autorités portuaires déléguées n'est pas en soi critiquable (d'autant plus que les infrastructures concernées ont également un intérêt pour l'exploitation) et signifie que, par l'intermédiaire des droits de port et redevances versés à celles-ci, l'usager contribue au financement d'une partie de sa sécurité, qui correspond effectivement à un service rendu. Quelques observations peuvent néanmoins être avancées :
- la participation de l'usager qui gonfle les droits de port pose problème lorsqu'elle s'inscrit dans un secteur concurrentiel où les autres ports européens ne sont pas soumis au même régime financier ; il y a donc là un exemple de déséquilibre concurrentiel au détriment des usagers utilisant les ports français, lorsque le surcoût n'est pas justifié par un gain de sécurité ;
- les pourcentages de participation de l'État ont été définis à une époque où un rattrapage en matière d'équipement portuaire était à l'ordre du jour ; maintenant beaucoup d'installations sont amorties et une révision à la baisse du barème pourrait être envisagée, même si les niveaux initiaux ne sont pas particulièrement prohibitifs pour les usagers ;
- enfin et surtout, les règles établies ne sont pas intégralement respectées par l'État lui-même, en raison principalement des contraintes budgétaires.
L'État a plusieurs missions en matière portuaire. Tout d'abord, il a pour rôle de définir la vocation des places portuaires au mieux de l'intérêt économique du pays et on verra qu'il est sur ce point grandement contraint par les acteurs économiques mondiaux qui, en dernier ressort, décident de l'importance internationale des places portuaires. L'État doit donc coordonner au niveau national la réalisation des infrastructures lourdes, veiller à ce que les actions locales ne conduisent pas à des équipements superfétatoires synonymes de mauvaise utilisation de l'argent public et définir des infrastructures pertinentes de transport terrestre nécessaires et suffisantes à la desserte des ports. L'équilibre est délicat à trouver pour ne pas risquer de tomber dans un dirigisme excessif qui serait nuisible à l'initiative locale et à l'émulation entre les places portuaires.
Par ailleurs, l'État est également garant de la sécurité du territoire et maître d'oeuvre de la politique d'aménagement du territoire pour laquelle les ports peuvent constituer un outil efficace et intéressant (voir ci-après). Enfin, comme pour tous les secteurs de l'économie, le niveau de l'emploi est au premier chef des préoccupations de l'État qui peut y contribuer directement et indirectement, par une politique d'investissements publics.