2. Une région en détresse

Au début des années 1960, on se moquait des vieux pêcheurs qui se perdaient en mer d'Aral : croyant se diriger vers l'île où était enterré tel de leurs ancêtres, ils se retrouvaient sur un nouvel îlot, tout juste sorti des flots. La baisse s'est peu à peu accélérée : de la côte + 53 mètres au-dessus du niveau des océans en 1957, on est passé à 51,6 en 1970, 49,4 en 1975 et 39 en 1989. Or, une des particularités du grand lac, qu'est en réalité la mer d'Aral, est sa faible profondeur. Cette baisse du niveau a entraîné une diminution spectaculaire de la surface de la mer, qui est passée de 66.085 à 40.400 kilomètres.

Les deux grands ports traditionnels, Aralsk au Nord et Mouinak au Sud, se trouvent aujourd'hui à plus de 30 kilomètres de la mer . Autour de la mer et le long des deux grands fleuves qui s'y jettent, l'Amou Daria et le Syr Daria, les grands damiers verts des champs de coton sont grignotés par des traînées blanches qui révèlent les remontées salines provoquées par une irrigation mal maîtrisée. M. Jean Radvanyc parle de plus d'un million d'hectares de terres ainsi perdues 8( * ) .

Depuis 1988, la mer s'est divisée en deux parties inégales et le taux de salinité des eaux est passé de 9,25 à 30,3 grammes par litre . Ce sel n'est pas du sel marin : il s'agit de carbonates et sulfates de calcium, de chlorures et sulfates de magnésium et autres résidus provenant des défoliants, engrais et pesticides dont sont abondamment pourvues les eaux qui après le drainage des champs de coton, sont déversées dans la mer d'Aral.

Le climat s'est trouvé, en outre, modifié avec une accentuation de la continentalité. Ainsi, alors que la mer d'Aral recevait environ 50 à 60 km3 d'eau par an, on a assisté à son assèchement par une réduction de son alimentation à 10 km3 au milieu des années 1970. Entre 1978 et 1987, la mer n'a plus reçu d'eau, le delta du Syr Daria étant totalement asséché.

Catastrophe écologique, l'agonie de la mer d'Aral provoque celle des populations qui y séjournent . Outre la disparition de la pêche et de toute activité liée à la mer, les riverains ont vu péricliter l'agriculture. La mortalité a cru de façon dramatique. Diarrhées, typhoïdes, néphrites sont fréquentes. La région connaît un taux de mortalité infantile record.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page