3. L'élaboration de la directive sur la protection des inventions biotechnologiques

Depuis 1988, date de la première proposition de la Commission sur le sujet, l'Union européenne tente de mettre en place un système communautaire de protection juridique des inventions biotechnologiques. Malgré l'urgence de parvenir, dans ce domaine essentiel, à une législation européenne, les débats n'ont toujours pas abouti.

Après un premier rejet par le Parlement européen, pour la première fois dans l'histoire des institutions européennes, dans le cadre de la procédure de codécision, instituée par le Traité de Maastricht, du projet de directive en mars 1995, la discussion avait été relancée par une conférence inter-institutionnelle le 11 janvier 1996. A l'issue d'une longue procédure, au cours de laquelle un vote favorable au Parlement est intervenu en juillet 1997, la position commune du Conseil des ministres de l'Union européenne a finalement été adoptée le 26 février dernier, à la majorité qualifiée.

Le texte a refait l'objet d'une nouvelle lecture au Parlement européen en séance plénière le 12 mai. Il doit encore être formellement adopté par les Quinze, puis être ensuite transposé en droit national, avant d'entrer en vigueur dans deux ans au plus tôt.

Dix ans après le début des négociations, on ne dispose donc toujours pas d'un texte applicable.


Ce projet de directive vise à l'instauration d'une procédure harmonisée de brevetabilité des inventions biotechnologiques :

PRINCIPALES DISPOSITIONS DE LA POSITION COMMUNE DU CONSEIL SUR LA PROPOSITION DE DIRECTIVE  " PROTECTION JURIDIQUE DES INVENTIONS BIOTECHNOLOGIQUES "

Selon les termes de la position commune du Conseil, les Etats membres devront protéger les inventions biotechnologiques, et adapter si nécessaire leur droit national des brevets à cet effet. Les critères liés à la brevetabilité sont les mêmes que pour les autres domaines technologiques, à savoir : nouveauté, activité inventive et application industrielle.

Selon le texte approuvé par les Quinze, ne sont pas brevetables :

- les variétés végétales et les races animales ;

- les procédés essentiellement biologiques pour l'obtention de végétaux ou d'animaux ;

- le corps humain aux différents stades de la constitution et de son développement, ainsi que la simple découverte d'un de ses éléments, y compris la séquence ou la séquence partielle d'un gène ;

- les inventions dont l'exploitation commerciale serait contraire à l'ordre public ou aux bonnes moeurs, et notamment : les procédés de clonage des êtres humains ; les procédés de modification de l'identité génétique des animaux de nature à provoquer chez eux des souffrances sans utilité médicale pour l'homme ou l'animal ainsi que les animaux issus de tels procédés.

En revanche, les inventions portant sur des végétaux ou des animaux sont brevetables si la faisabilité technique de l'invention n'est pas limitée à une variété végétale ni à une race animale déterminée. Sont donc brevetables :

- les inventions impliquant une activité inventive et susceptible d'application industrielle, même lorsqu'elles portent sur un produit composé de matière biologique ou en contenant, ou sur un procédé permettant de produire, de traiter ou d'utiliser de la matière biologique ;

- une matière biologique isolée de son environnement naturel ou produite à l'aide d'un procédé technique peut être l'objet d'une invention, même lorsqu'elle préexistait à l'état naturel. Un élément isolé du corps humain, ou produit par un procédé technique, peut donc constituer une invention brevetable, pour autant que l'application industrielle soit clairement exposée dans la demande du brevet.

Autre élément important : si l'invention a pour objet une matière biologique d'origine humaine, ou si elle utilise cette matière, la personne sur laquelle le prélèvement est effectué doit pouvoir exprimer son consentement.

Enfin, le texte prévoit la création d'un Comité d'éthique indépendant chargé d'examiner tous les aspects éthiques de la biotechnologie et de son utilisation.

Source : revue " europolitique ", n° 2295, Février 1998.

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La complexité de toute cette réglementation communautaire et son caractère très rapidement évolutif reflètent, certes, la crise des institutions européennes dans un contexte d'après ESB, mais illustrent également la perplexité des sociétés européennes face aux biotechnologies.

Nulle part ailleurs dans le monde ne sont aussi fortes les réactions, violentes les oppositions, vives les passions sur le sujet des OGM qu'en Europe.

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