B. UN MODE DE GESTION COMPLEXE À METTRE EN OEUVRE

Même dans la jungle, il faut des lois ou, du moins, des règles du jeu. Et les États ne sont pas dépourvus de moyens d'action. On peut donc - c'est une question de volonté politique - envisager de renforcer les pouvoirs de l'autorité de régulation, dès lors qu'il est entendu que l'on saura trouver un équilibre entre négociation et coercition. Cependant, compte tenu de nos traditions juridiques, cela peut demander un certain temps...

Dans un monde audiovisuel en mutation, la régulation, pour reprendre les formules exprimées par M. Hervé Bourges est " la forme moderne de l'intervention de l'Etat dans un secteur économique. C'est une intervention qui, préservant un certain nombre de principes intangibles, qui ne doivent pas pouvoir être remis en cause par les lois du marché, permet néanmoins de laisser la plus grande liberté et la plus grande autonomie aux acteurs professionnels. C'est en cela que la régulation est un choix moderne, libéral, raisonnable. Développer la régulation, c'est se donner un cadre dans lequel il est possible, progressivement, d'abandonner des réglementations trop contraignantes ". Le principe est simple, effectivement raisonnable, mais la réalité est plus compliquée .. .

1. Une technique difficile à acclimater en fonction de la tradition d'intervention administrative

Indépendance :

La régulation ne peut être correctement gérée que si l'autorité responsable présente toutes les caractéristiques d'indépendance, tant vis-à-vis du pouvoir politique que du pouvoir économique.

La question revient alors à s'efforcer non de se réfugier dans les réglementations ou les lois, mais de choisir des hommes qui - dans toutes les situations - feront en toute indépendance des choix conformes à l'intérêt public.

En définitive, la solution pour faire évoluer le système français semble être de nature structurelle. Comment passer du modèle juridique français où tout doit être défini dans les textes, où, d'un côté, existe le règlement et, de l'autre, les autorités chargées de l'appliquer, à un mode de régulation souple à l'anglo-saxonne, où le magistrat a plus de latitude pour adapter le droit à chaque cas d'espèce et rechercher, à partir d'éléments de fait, une solution en équité sinon en opportunité.

Partage et clarification des responsabilités :
Il s'agit bien de clarifier les responsabilités entre les différents opérateurs :
- le Conseil supérieur de l'audiovisuel, qui fixe les règles du jeu mais choisit aussi certains " pilotes ",

- l'État, qui, quoi qu'on en dise, conserve à côté de son pouvoir d'actionnaire celui de déterminer directement ou indirectement des choix techniques et économiques,

- les entreprises privées, enfin, qu'il faut accompagner dans leur développement sans les entraver par des modifications incessantes de déréglementation ou de stratégie.
On doit encore souhaiter - parce qu'il faudra bien le faire - de modifier la procédure de nomination des présidents des chaînes publiques de radio et de télévision (en toute clarté et légitimité par une décision prise en Conseil des Ministres).

Or, les dispositions de la loi du 30 septembre 1986 ne fixent aucune condition pour révoquer un président d'une société nationale de programme.

L'État, unique actionnaire, se trouve dans la situation paradoxale de devoir contrôler la gestion d'un président d'une entreprise publique qu'il ne peut ni nommer ni révoquer, tandis que l'instance qui le nomme et peut le révoquer, ne peut contrôler sa gestion.

L'État fixe déjà les statuts, approuve les comptes, joue un rôle prépondérant au sein du conseil d'administration de France 2 et de France 3, et contrôle étroitement, via le contrôleur d'État et la direction du Budget, la gestion de ces deux entreprises. Il détermine le montant des ressources publiques, approuvées par le Parlement, et établit les charges et les missions de chaque chaîne.

En définitive, le choix économique devrait revenir à l'État actionnaire, et seule la sanction déontologique incomberait dans cette perspective à l'autorité de régulation.

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