IV. REDÉFINIR LE MODE DE PARTICIPATION DE L'UNION EUROPÉENNE À LA RÉGULATION DES ÉCHANGES INTERNATIONAUX

Le projet alternatif de réforme de la PAC préconisée par la mission d'information ne peut guère s'affranchir des contraintes internationales. Il doit donc utiliser au profit de l'ensemble de la Communauté Européenne les opportunités offertes par les marchés agricoles internationaux.

Le délai qui nous sépare de la prochaine échéance des nouvelles négociations au sein de l'OMC doit être mis à profit pour redéfinir le mode de participation de l'Union Européenne dans les échanges internationaux, notamment dans le domaine agricole.

La Communauté Européenne doit, avant toute chose, en finir avec l'exemple du soi disant modèle américain dans le domaine agricole . En effet, présenté à tort comme une réforme totalement " libérale ", le Fair Act américain de 1996 laisse aujourd'hui entrevoir plusieurs faiblesses que l'Europe doit savoir utiliser à bon escient : ainsi comment ne par remarquer que le soja, production qui, il y a trois ans, ne percevait aucune aide, a été intégré dans le mécanisme du Fair Act ? Le gouvernement américain n'a-t-il pas récemment décidé d'apporter une aide financière aux secteurs agricoles " en difficulté ", notamment les producteurs de blé. Un plan de relance des exportations et une aide à la consolidation des trésoreries des agriculteurs ont par ailleurs été mis en place. Ces aides sont-elles à intégrer dans la boîte bleue ou verte ? Par ailleurs, est-il logique que des soutiens mis en place en 1996 aient conduit à aider des productions qui, en raison des prix élevés des marchés mondiaux, n'y auraient pas eu droit dans l'ancien dispositif législatif ?

L'Europe doit désormais ne pas craindre, à tout moment, de défendre, ses intérêts, au premier rang desquels ses intérêts agricoles dans les négociations internationales notamment avec nos voisins d'outre-Atlantique. C'est pourquoi la mission d'information souhaite que la Communauté redéfinisse son mode de participation aux échanges internationaux en affirmant sa volonté de se préparer et de négocier au sein d'une enceinte clairement définie sur les bases d'une concurrence loyale dans un domaine spécifique que constitue l'agriculture.

Un tel souhait ne peut rencontrer que l'adhésion de nos partenaires. La Communauté doit enfin mesurer l'importance de l'agriculture dans le cadre d'une Europe future élargie à l'Est et au sud, sans négliger, en outre, l'image que revêt " l'Europe verte " au sein de la coopération internationale.

A. AFFIRMER LA VOLONTÉ DE LA COMMUNAUTÉ EUROPÉENNE DE SE PRÉPARER AUX PROCHAINES ÉCHÉANCES INTERNATIONALES TOUT EN RAPPELANT LES SPÉCIFICITÉS DE L'AGRICULTURE

1. De la naissance de la politique communautaire aux accords de Maastricht

Lors du " Dillon Round " de 1961, les Etats-Unis avaient envisagé d'inclure l'agriculture dans les négociations, dans la crainte -justifiée- que l'instauration du Marché commun ne vienne réduire leurs exportations agricoles vers l'Europe.

Les membres de la Communauté Européenne avaient, à l'époque, refusé, au motif -tout aussi justifié- qu'il était prématuré de troubler l'application du Traité de Rome avant même sa mise en place.

D'ailleurs les Européens ont souvent considéré que l'agriculture était un sujet trop compliqué et trop sensible pour en parler dans ce type de négociations vouées à l'abaissement des barrières douanières et à l'uniformisation de la concurrence.

L'Uruguay Round a donc innové en incluant explicitement le commerce agro-alimentaire dans l'agenda des négociations. Si cette innovation est restée prudente -le commerce agricole étant bien loi d'être libre-, elle est néanmoins déterminante car il a été admis que " les produits agricoles sont comme les autres ", et donc, devraient être soumis aux lois de la concurrence et à la régulation par le marché.

La mission d'information considère qu'il est difficile de considérer les produits agricoles comme n'importe quel produit de base en raison non seulement des caractéristiques des facteurs de production inhérents à l'agriculture mais aussi de l'importance de l'enjeu que constitue la sécurité alimentaire de la planète.

Cependant, il faut s'attendre à une nouvelle offensive sur la libéralisation des produits agricoles dans la prochaine négociation, l'agriculture étant considérée comme le dernier bastion " massif " de protectionnisme 55( * ) .

Rappelons que l'insistance des USA à conclure un accord agricole vient de deux sortes de préoccupations bien distinctes. La première est celle de la tendance permanente de l'agriculture américaine à produite des excédents difficiles et coûteux à résorber. La seconde est la confiance des américains dans la capacité du marché à assurer un équilibre durable et harmonieux entre l'offre et la demande de tous les produits, y compris les produits agricoles. La mission d'information note là une vision quasi philosophique de l'organisation économique dont elle a pu mesurer l'ampleur lors de son déplacement aux Etats-Unis.

Les Américains considèrent que les " avancées " de la Communauté Européenne en 1992 ont répondu plus à la première préoccupation des négociateurs américains, celle de résorber les excédents, qu'à la seconde, celle d'organiser durablement les échanges. Aussi, la Communauté a-t-elle calqué son nouveau système sur celui en usage aux Etats-Unis à l'époque. Mais, la mission d'information a très bien perçu que les Américains ne se contenteraient pas de la réforme de 1992. Ces derniers jugent d'ailleurs que si les propositions du Paquet " Santer " vont dans le bon sens, elles doivent être élargies. Ils estiment que l'Uruguay Round est loin du retrait annoncé des Etats dans la gestion de l'agriculture, et de la régulation du marché mondial par les prix uniquement.

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