3. Le flux des expatriations n'a été ni arrêté, ni freiné

Le Groupe de Travail a constaté, tant aux Etats-Unis qu'en Grande-Bretagne, que les dispositions fiscales nouvelles édictées par les pouvoirs publics français en faveur des créations d'entreprises innovantes n'avaient pas ralenti le flux des expatriations. Tout au plus en ont-elles quelque peu modifié la composition.

Les mesures prises et l'intérêt qui s'est développé en France comme ailleurs pour la nouvelle économie ont sensiblement facilité la tâche des créateurs d'entreprise. Ils trouvent, depuis deux ou trois ans, beaucoup plus facilement les financements qui leur sont nécessaires ainsi que les collaborateurs dont ils ont besoin et que la réglementation sur les stock-options, dès lors qu'il s'agit d'entreprises naissantes, permet désormais de retenir. De sorte que le nombre des start-ups qui voient le jour en France dans les nouvelles techniques de l'information a considérablement augmenté. Les délocalisations auxquelles ont assiste désormais concernent au moins autant des entreprises qui ont déjà réussi et que leurs créateurs se préoccupent de développer ou de revendre, que des entreprises naissantes.

Celles qui s'expatrient pour être revendues le font pour échapper à la fiscalité française sur les plus values et sur le patrimoine. D'autres, après avoir implanté à l'étranger des filiales, y déplacent peu à peu leur centre de gravité pour profiter d'un environnement fiscal et administratif, dont on sait qu'il est en général plus favorable qu'en France. Le Groupe de Travail a rencontré des entreprises qui n'avaient gardé en France que des fonctions liées à la recherche et au développement, afin de profiter de l'excellente qualité des ingénieurs français, la valorisation de la recherche ainsi que les autres fonctions de la société étant délocalisées aux Etats-Unis.

Ce processus ne touche pas seulement les grands groupes habitués à effectuer ce genre d'arbitrage. Il concerne également les PME qui, dans le secteur des nouvelles technologies, s'internationalisent beaucoup plus rapidement que dans les secteurs traditionnels et qui sont, de ce fait, en mesure de comparer les situations françaises et étrangères, et de prendre les décisions de délocalisation qui en découlent.

Leurs motivations sont connues. Dès lors que les entreprises atteignent une certaine taille, le poids de la fiscalité, des charges sociales ainsi que la qualité de l'environnement financier et administratif deviennent déterminantes et augmente l'intérêt d'une délocalisation. L'ISF, l'impôt sur les plus values, les charges sociales ou les 35 heures atteignent les entreprises qui, après quelques années, réussissent, créent richesses et emplois et dégagent des bénéfices, plus qu'ils ne pénalisent les entreprises qui viennent de naître. Celles-ci profitent à plein des dégrèvements récemment adoptés alors que les autres, arrivées à maturité, subissent de plein fouet l'impact de l'environnement fiscal et réglementaire.

Le phénomène est d'autant plus préoccupant qu'il concerne non pas des créateurs d'entreprises dont les chances de réussite sont aléatoires, mais des jeunes entreprises déjà prospères. Tout ce passe comme si les dispositions prises par les pouvoirs publics avaient réussi à retenir bon nombre d'entreprises innovantes, mais que celles qui réussissent et dont l'apport à la collectivité est potentiellement le plus grand, choisissent soit de se développer à l'étranger, soit de se délocaliser purement et simplement. Après s'être penchés sur la création d'entreprises, les pouvoirs publics doivent donc aborder avec réalisme les problèmes liés à la création de richesse.

CHAPITRE IV -

UNE HÉMORRAGIE QU'IL EST ESSENTIEL D'ARRÊTER PARCE QU'ELLE PÉNALISE GRAVEMENT UN SECTEUR STRATÉGIQUE DE L'ÉCONOMIE

Toutes les indications recueillies montrent qu'en dépit des mesures prises par les pouvoirs publics depuis trois ans, l'exode de cadre et de créateurs d'entreprise, loin d'avoir cessé, s'est accéléré.

Il importe en premier lieu de porter sur ce phénomène un jugement objectif et sans complaisance. Il convient ensuite de définir les mesures qui pourraient en ralentir le rythme et en limiter l'ampleur. Le Groupe de Travail s'est efforcé dans les pages qui suivent de conduire ce double exercice.

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