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CONVOCATION DU PARLEMENT EN CONGRÈS
M. le président. J'ai reçu de M. le Président de la République la lettre suivante :
« Paris, le 27 février 2003.
« Monsieur le président,
« Le projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de la république a été voté en termes identiques par l'Assemblée nationale le 4 décembre 2002 et par le Sénat le 11 décembre 2002. De même, le projet de loi constitutionnelle relatif au mandat d'arrêt européen a été adopté par l'Assemblée nationale le 17 décembre 2002 et par le Sénat le 22 janvier 2003.
« J'ai décidé de soumettre ces deux projets de loi constitutionnelle au Congrès en vue de leur approbation définitive dans les conditions prévues par l'article 89 de la Constitution.
« Je vous adresse, ci-joint, avant sa publication au Journal officiel, le décret de convocation du Congrès auquel sont annexés les textes que cette assemblée aura à examiner le 17 mars 2003.
« Veuillez croire, monsieur le président, à l'assurance de ma haute considération.
« Signé : Jacques Chirac. »
Je vais vous donner lecture de l'article 2 du décret :
« Art. 2. - L'ordre du jour du Congrès est fixé ainsi qu'il suit :
« 1. Vote sur le projet de loi constitutionnelle relatif au mandat d'arrêt européen ;
« 2. Vote sur le projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de la République. »
Acte est donné de cette communication. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Daniel Hoeffel.)
PRÉSIDENCE DE M. DANIEL HOEFFEL
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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CANDIDATURE A` UNE COMMISSION
M. le président. J'informe le Sénat que le groupe socialiste a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu'il propose pour siéger à la commission des affaires sociales, à la place laissée vacante.
Cette candidature va être affichée et la nomination aura lieu conformément à l'article 8 du règlement.
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ALLOCATION PERSONNALISÉE D'AUTONOMIE
Adoption des conclusions modifiées
du rapport d'une commission
- Dossier législatif : proposition de loi relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie
- Question préalable
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport (n° 186, 2002-2003) de M. André Lardeux, fait au nom de la commission des affaires sociales sur :
- la proposition de loi de MM. Louis de Broissia, Philippe Adnot, Gérard Bailly, Claude Belot, Gérard Dériot, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Jean-Claude Gaudin, André Geoffroy, Charles Ginésy, André Lardeux, Dominique Leclerc, Jacques Oudin, Michel Pelchat, Charles Revet, Philippe Richert, Bruno Sido et Jean-Pierre Vial, modifiant la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie (n° 169, 2002-2003) ;
- et la proposition de loi de M. Michel Moreigne portant modification de la loi n° 2001-647 du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie (n° 178, 2002-2003).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. André Lardeux, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, depuis plusieurs mois, l'actualité rend compte des difficultés de mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA, en passe de réaliser le sinistre financier qui lui fut prédit lors de sa création.
Cette situation de crise financière rappelle que, jusqu'à présent, aucun gouvernement ne fut en mesure de proposer pour la dépendance un cadre de prise en charge véritablement pérenne.
Elle rappelle en outre cruellement que le précédent gouvernement, en refusant alors d'écouter les avertissements du Sénat, fut l'instigateur d'une fuite en avant dont le coût se précise, semaine après semaine.
Notre Haute Assemblée pouvait pourtant légitimement faire valoir son expérience, notamment la commission des affaires sociales qui, sous la présidence de M. Fourcade, avait été à l'origine de la plupart des avancées en la matière.
Je ne rappellerai pas l'intégralité des travaux accomplis qui, depuis la proposition de loi déposée par notre ancien collègue Lucien Neuwirth en 1990 jusqu'au vote de la PSD, la prestation spécifique dépendance, ont permis l'amélioration de la situation des personnes âgées dépendantes.
Le bilan de la PSD qui a pu être fait ici et là ne fut pas équitable. Dispositif résolument modeste, la PSD a permis d'améliorer la prise en charge des personnes les plus modestes et les plus dépendantes. Cette prestation fut injustement décriée pour n'avoir pas été l'avancée que beaucoup d'associations appelaient de leurs voeux.
La limite rencontrée par le législateur de 1997 était d'ordre financier. Il n'avait pas voulu s'affranchir d'une réalité pour reporter sur les collectivités locales une charge qu'il savait impossible à assumer. La PSD n'était qu'une étape modeste, dans l'attente d'une prestation plus généreuse.
L'APA s'est greffée sur celle-ci pour l'élargir. Son succès était donc prévisible. Il n'est pas contestable. En 2002, plus de 750 000 personnes auront bénéficié de la prestation.
Mais ce succès prend une tournure particulière du fait de l'absence de plan de financement initial cohérent.
Le précédent gouvernement avait prévu, pour les deux premières années, un nombre de bénéficiaires inférieur à 600 000. Ce nombre approchera en 2003 près de 800 000. Le surcoût qui résulte de cet écart pour l'année 2003 est estimé entre 1 millard et 1,2 milliard d'euros.
L'application des règles de droit met à la charge des seuls départements la facture complémentaire. Effort important pour la plupart, charge écrasante pour certains, asphyxie financière pour quelques-uns, les dépenses au titre de l'APA représenteraient en 2003, si rien n'était fait, plus d'un tiers du potentiel fiscal de nombreux départements. Pour certains d'entre eux - la Creuse, le Gers -, cette proportion approche ou dépasse la moitié de leurs ressources.
En conséquence, moins de deux ans après sa création, c'est l'avenir de l'APA qui est aujourd'hui en question.
Certains font référence à une vitesse de croisière. Cette notion est une impropriété. Sans brosser un tableau des perspectives démographiques de la France, je rappellerai seulement que le nombre des personnes âgées de plus de quatre-vingts ans devrait doubler d'ici à 2020. L'augmentation de l'espérance de vie autonome, c'est-à-dire la diminution de la prévalence de la dépendance, ne pourra contrecarrer « l'effet masse » dû au vieillissement.
Le dispositif lui-même est perfectible. Il est démontré que certains aspects de la prestation ne donnent pas satisfaction. L'évaluation du besoin d'aide à domicile repose sur des outils perfectibles - notamment la grille AGGIR, ou grille autonomie gérontologique - groupes iso-ressources -, et la pertinence de l'aide apportée aux personnes en situation de GIR 4 est sujette à caution.
Pour autant, les principes généraux de l'APA, et notamment d'une aide en nature gérée de manière décentralisée, restent bons.
Certes, des dispositifs alternatifs existent ; on parle souvent d'un cinquième risque géré par la sécurité sociale.
Aujourd'hui, le coût d'un changement complet de système reste dissuasif pour autant que la situation des finances sociales permette une telle création. Les collectivités ont investi en moyens matériels et humains pour gérer l'APA, les bénéficiaires étant, quant à eux, habitués à l'interlocuteur départemental.
Un bilan complet de l'APA est prévu pour la fin du premier semestre de cette année. Il sera l'occasion de corriger les défauts révélés et de préciser les contours d'un financement pérenne.
Pour l'heure, l'objectif est de sauver une prestation qui, pour 2003, n'est pas financée. Ce fut l'objet de plusieurs rencontres entre le Gouvernement et des présidents de conseils généraux à la fin de l'année 2002.
Lors de ces rencontres, un accord fut trouvé permettant le partage du surcoût selon trois tiers : un tiers supporté par les départements, un tiers supporté par l'Etat qui remboursera un prêt destiné à financer l'allocation, un tiers supporté par les bénéficiaires les plus aisés, c'est-à-dire les plus à même de le supporter.
L'objet de la proposition de loi déposée par M. de Broissia et plusieurs de ses collègues est, en coordination avec un projet de décret soumis au comité des finances locales, de mettre en oeuvre les dispositions de ce plan de sauvegarde de l'APA en 2003.
Le 4 février dernier, le comité des finances locales a rendu son avis sur un projet de décret visant à modifier les conditions de calcul de l'APA à domicile. Je ne doute pas que M. le secrétaire d'Etat aura à coeur de nous dire un mot de son contenu.
Ce décret ne dénature pas la prestation, mais il permet de mieux répartir l'effort en appréciant, à son juste potentiel, les capacités contributives de chaque bénéficiaire.
La proposition de loi de M. de Broissia et plusieurs de ses collègues complète la mise en oeuvre du plan en prévoyant trois mesures. Elle modifie le fait générateur de l'ouverture du droit à l'APA. Elle vise à mieux assurer le contrôle de l'effectivité de l'aide versée. Elle permet au fonds de financement de l'APA, le FFAPA, de recourir à l'emprunt qui permettra de financer l'APA à hauteur de 400 millions supplémentaires.
Les conclusions de la commission ne bouleversent pas fondamentalement cette proposition.
L'article 1er propose de modifier le fait générateur de l'ouverture du droit qui sera donc acquis non plus au moment du dépôt du dossier complet de demande, mais au moment où l'attribution de l'aide sera notifiée au bénéficiaire.
Cette proposition part du constat que la plupart des personnes attendent la notification de l'aide, c'est-à-dire la certitude du bénéfice de la prestation, pour recourir à un service. Les deux premiers mois étaient en conséquence souvent versés sans être dépensés. Cette pratique, qui rappelle les dérives constatées du temps de l'allocation compensatrice pour tierce personne, doit être corrigée.
Une difficulté survient toutefois pour les bénéficiaires de l'APA en établissement qui déposent leur demande une fois installés dans ces structures, et donc pour lesquels l'effectivité de l'aide se trouve vérifiée.
Pour ces derniers, en effet, cette modification introduit une sorte de « délai de carence » qui ne porte pas son nom. Faut-il, en conséquence, le leur appliquer ? Que se passe-t-il pour les personnes les plus modestes ne pouvant acquitter leur forfait dépendance ?
Dans un premier temps, la commission des affaires sociales n'a pas souhaité introduire un distingo entre bénéficiaires de l'APA en établissement et bénéficiaires de l'APA à domicile, tout en constatant les difficultés posées par cette modification au régime de l'APA en établissement. Mais le Gouvernement a déposé un amendement introduisant ce distingo , amendement auquel la commission s'est déclarée favorable.
L'article 2 prévoit la possibilité, pour les présidents de conseils généraux, de demander aux bénéficiaires de l'aide de fournir tous les justificatifs de dépenses concernant l'aide reçue et attestant du versement de leur participation. Cette disposition assurera non seulement que l'APA est utilisée à bon escient, mais également que la participation du bénéficiaire, qui peut atteindre 90 % du plan d'aide, est bien assurée.
La commission a bien évidemment souscrit à cette proposition qu'elle n'a modifiée que sur deux points mineurs.
Il n'était en effet pas nécessaire de faire figurer de manière cumulative la référence « aux bulletins de salaire » et « à tout justificatif de dépenses ». Les bulletins de salaire constituent des justificatifs de dépenses, les textes d'application le préciseront si besoin est.
En outre, les bénéficiaires de l'aide à domicile ayant recours à des services prestataires ne peuvent produire de bulletins de salaire, n'étant pas eux-mêmes employeurs légaux.
Toutefois, l'application de ce dispositif restait problématique puisque son non-respect se trouvait dépourvu de toute sanction.
Il est donc proposé de préciser que l'absence de production des justificatifs par le bénéficiaire dans un délai d'un mois entraîne la suspension du versement de l'aide.
Certains de nos collègues socialistes se sont, en commission, émus d'une telle possibilité. Je rappellerai simplement que les présidents de conseil général sont responsables du bon usage des deniers publics et qu'il leur appartient de garantir que la solidarité départementale n'est pas détournée de son objet.
L'article 3 de la proposition de loi prévoit simplement, par coordination, de préciser que les diverses administrations publiques mettront à la disposition des services chargés de ce contrôle d'effectivité les informations dont elles disposent.
Le dernier article de la proposition de loi de M. de Broissia et de plusieurs de ses collègues tend à prévoir plusieurs modifications quant aux modalités de fonctionnement et de financement du fonds de financement de l'APA.
Les auteurs de la proposition de loi proposent d'élever à au moins 90 % des disponibilités du fonds le montant des avances que celui-ci peut verser aux départements.
Ils prévoient, en outre, les conditions de réalisation de l'emprunt exceptionnel que le FFAPA pourra contracter pour aider les départements à supporter le dépassement des prévisions initiales. Le montant annoncé est de 400 millions d'euros et le prêteur probable, la Caisse des dépôts et consignations.
La commission des affaires sociales est bien évidemment réservée sur les modalités de ce montage qui n'est, reconnaissons-le, qu'un expédient.
Le principe de la règle d'or budgétaire voudrait que l'usage de l'emprunt soit réservé à des opérations d'investissement, dont profitent les générations futures qui remboursent elles-mêmes tout ou partie du prêt.
Les membres de la commission des finances, dont notre excellent collègue Michel Mercier présentera l'avis tout à l'heure, connaissent bien ce principe même s'ils sont rarement confrontés à des transgressions aussi abruptes : le principe d'unité régissant le budget de l'Etat permettant d'entretenir, en loi de finances, la fiction que les dépenses de fonctionnement ne sont pas financées par l'emprunt.
Le principe de ce prêt, chacun en conviendra, n'est pas d'une orthodoxie financière irréprochable. Mais, ainsi que notre collègue Bernard Cazeau l'a dit en commission, ce texte est de circonstance et ne vise, en l'absence d'autre possibilité, qu'à trouver une solution pour le financement de l'APA pour 2003.
La rédaction initiale proposait que le remboursement soit effectué par le fonds lui-même. Une telle hypothèse minorerait bien évidemment les concours du fonds aux départements les années suivantes et répercuterait donc le remboursement de l'emprunt sur les conseils généraux.
Ce dispositif ne traduisait pas l'engagement fort pris par le Gouvernement lors de ses entretiens avec plusieurs présidents de conseil général de prendre à sa charge le coût de cet emprunt.
Il nourrissait même l'impression, à tort, d'être un nouvel exemple de la fuite en avant que j'ai déjà précédemment dénoncée. Il doit être évident que le plan de financement pérenne qui sera décidé par le Gouvernement dans les prochains mois disposera pour le futur. Rien ne serait plus préjudiciable à ce plan, censé fonder l'APA sur un socle nouveau, que de se trouver confronté aux dettes du passé.
Et, pour leur part, les départements ne souhaitent pas pratiquer l'escompte de leurs recettes futures.
Aussi la commission des affaires sociales a-t-elle précisé que la charge et le remboursement de l'emprunt souscrit par le FFAPA seront assurés dans les conditions prévues par le plus prochain projet de loi de finances. Elle fait bien entendu toute confiance au Gouvernement pour choisir la voie qui lui semble la plus judicieuse, en tranchant notamment entre l'inscription d'une dotation au profit du FFAPA, destinée à couvrir le remboursement, et la consolidation du montant de l'emprunt avec la dette du Trésor.
Les auteurs de la proposition de loi ont, en outre, prévu qu'une fraction de l'emprunt contracté par le FFAPA soit consacrée aux départements particulièrement affectés. Le montant de cette fraction est fixé par décret dans la limite d'un plafond s'élevant à 20 % du total de l'emprunt, soit au maximum 80 millions d'euros.
Nécessaire, cette disposition met en relief les limites des règles de fonctionnement du fonds de financement de l'APA. La mise en place d'un dispositif pérenne de plafonnement de l'effort ne pourra sans doute être évitée.
La proposition de loi, qui ne dispose que pour 2003, prévoit la répartition de cette fraction entre les différents départements éligibles, en proportion de leur taux d'effort fiscal. Les simulations, dont j'ai pu, en tant que rapporteur, avoir connaissance mettent en évidence certains effets pervers potentiels de la répartition.
Après répartition, certains départements pourraient se trouver dans une situation plus favorable que d'autres qui n'auraient pas été éligibles à cette aide.
Aussi serait-il utile que le décret d'application s'attache à ce que les conditions de la répartition permettent de faire converger l'ensemble des départements affectés au-delà d'un certain degré vers un taux d'effort maximal.
La commission des affaires sociales a enfin décidé d'ajouter un article à ses conclusions afin que figure, au sein du bilan de la prestation remis au Parlement d'ici à la fin du prochain semestre, une liste de pistes argumentées permettant d'assurer une meilleure adéquation de l'aide distribuée aux personnes affectées par la perte d'autonomie.
Cette ultime conclusion de la commission des affaires sociales doit permettre à chacun de garder en mémoire la clause de rendez-vous du bilan définitif de l'APA, que le Gouvernement présentera au Parlement d'ici au 30 juin, et qui témoigne, si besoin en était, du caractère conjoncturel des réponses apportées par la proposition de loi qu'examine aujourd'hui la Haute Assemblée. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Michel Mercier, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la commission des finances s'est saisie tardivement de cette proposition de loi, et elle n'est donc pas en mesure de fournir un avis écrit à la Haute Assemblée,...
M. Guy Fischer. Ce n'est pas très grave !
M. Michel Mercier, rapporteur pour avis. ... afin de l'éclairer.
Néanmoins, la commission des finances a discuté du problème du financement de l'APA, abordé par la proposition de loi de M. de Broissia et de ses collègues, pendant une longue séance, et je peux donc vous faire part de ses conclusions.
Si la commission des finances s'est saisie en urgence et si elle a dû travailler aussi rapidement, c'est que la situation est celle d'une maison qui brûle.
M. Charles Revet. Exactement !
M. Michel Mercier, rapporteur pour avis. Il s'agit en effet avant tout de sauver l'APA. Il faut le dire très clairement : les choses en sont là !
Les départements ont consenti l'année dernière d'énormes efforts pour pouvoir financer l'APA alors que le nombre de demandes excédait de beaucoup les prévisions. Un certain nombre de départements sont de nouveau fiscalement sollicités pour des montants particulièrement importants. Il est donc très urgent de trouver des solutions car, dans certains départements, la situation est si grave que l'APA risque de ne pas être versée.
Ces solutions, nous le savons, ne seront valables que pour l'année 2003, mais elles nous permettront de trouver tous ensemble un financement pérenne assurant à cette allocation le financement nécessaire pour que toutes les personnes âgées dépendantes dans ce pays puissent voir leur dépendance prise en charge dans de bonnes conditions.
La situation actuelle ne nous étonne pas : c'est celle que nous avions annoncée au moment du vote de la loi sur l'APA (M. Louis de Broissia applaudit), loi dont le mécanisme nous convenait parfaitement puisqu'il était largement inspiré de celui de la prestation spécifique dépendance, ou PSD. Je rappelle qu'il s'agit d'une allocation personnalisée visant à l'intervention de personnes aidantes auprès de la personne âgée dépendante, après le passage d'une équipe médico-sociale au domicile de cette dernière. Ce sont là des apports fondamentaux.
Le fait qu'aucune condition de ressources ne soit exigée pour l'attribution de cette prestation devait très naturellement entraîner une très forte demande.
Au nom de la commission des finances, je veux saluer la réactivité des départements dans ce dossier de l'APA. Les conseils généraux ont su faire face à un afflux jamais prévu de demandes d'allocations : probablement un million de dossiers ont-il été retirés auprès de l'ensemble des conseils généraux de France. Aujourd'hui, 700 000 personnes environ perçoivent l'APA. C'est, de la part des départements, une réponse concrète et claire qui montre l'efficacité de la décentralisation et le savoir-faire de ces collectivités locales dans ce domaine.
Les départements sont souvent critiqués. Mais, dans cette affaire, bien que le gouvernement précédent ne leur en ait pas donné les moyens, ils ont su faire face à la situation,...
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Michel Mercier, rapporteur pour avis. ... traiter les dossiers, les demandes, y répondre, et parfois même trouver le courage d'aller devant les contribuables pour leur demander de faire un gros effort alors que d'autres se contentaient d'acheter des pages dans les journaux ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)
M. Louis de Broissia. Il faudrait préciser qui étaient les « autres » !
M. Michel Mercier, rapporteur pour avis. Cela mérite d'être dit de façon claire, sereine, parce que c'est ce qui s'est passé.
Il nous appartient désormais de faire l'essentiel. En effet, il ne suffit pas de créer des systèmes ou des allocations, il faut aussi et surtout les faire vivre, ce qui est une autre affaire : l'APA est à recréer tous les jours ! M. Louis de Broissia et plusieurs de ses collègues ont fait des propositions que l'excellent rapporteur de la commission des affaires sociales, M. Lardeux, cadrant bien la question, a rappelées. Par ailleurs, le Gouvernement, par la voie d'un décret, va prendre un certain nombre de mesures.
La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui vise à donner aux départements, pour 2003, les moyens de contrôler la bonne utilisation de l'argent public et d'assurer un financement en urgence de l'APA, en vue de son sauvetage.
Les dispositions relatives aux pouvoirs du président du conseil général relèvent de l'unique compétence de la commission des affaires sociales, et nous soutenons très naturellement la position adoptée par cette dernière sur ce point.
S'agissant des dispositions d'ordre financier, notre collègue M. Lardeux a rappelé que le fait d'autoriser le FFAPA à procéder à un emprunt n'est pas d'une orthodoxie financière qui restera dans les annales, et il est probable que les historiens des finances publiques ne le citeront pas comme le meilleur exemple de financement que l'on puisse trouver. (Sourires.)
Néanmoins, à l'époque où nous sommes, rien n'étant prévu dans la loi de finances, il nous faut trouver une solution, et c'est la seule à notre disposition. Un état de nécessité peut donc justifier la mesure que nos collègues auteurs de la proposition de loi nous proposent aujourd'hui de retenir.
C'est la raison pour laquelle la commission des finances émet un avis favorable à l'adoption des conclusions de la commission des affaires sociales qui, pour sa part, soutient la proposition de loi.
La commission des finances a fait cependant un certain nombre d'observations.
Tout d'abord - mais nous sommes tous d'accord sur ce point -, le problème de financement de l'APA se posera à nouveau dès 2004. Il nous reste donc peu de temps pour y travailler, et seul un financement pérenne nous permettra de régler la question. Seul le transfert de fiscalité, que le projet de loi constitutionnelle que nous voterons le 17 mars prochain à Versailles ne manquera pas d'entraîner, nous permettra de trouver les moyens d'assurer la pérennité de l'APA.
Par ailleurs, la commission des finances émet un certain nombre de réserves quant au mode de financement de la part du surcoût à la charge de l'Etat par le biais d'un emprunt - je viens d'y faire allusion - et souhaite que le Gouvernement s'engage, au cours du débat, à financer par les moyens de son choix, à l'exception des ressources du FFAPA, l'intégralité des charges de remboursement de l'emprunt contracté pour le financement de sa part pour 2003. Elle souhaite également que le Gouvernement garantisse qu'il prendra à sa charge la part des économies annoncées pour un montant de 400 millions d'euros, et qu'il s'engage clairement, pour le cas où ce montant ne serait pas atteint, à aider les départements, afin que ces derniers n'aient à prendre en charge, au titre de l'année 2003, « qu'un » surcoût de tout de même 400 millions d'euros.
Pour conclure, je veux simplement ajouter que la proposition de loi de M. de Broissia et de plusieurs de ses collègues présente deux grands avantages : d'une part, elle résout le problème du financement de l'APA pour cette année ; d'autre part - et cela doit être souligné -, elle ne remet aucunement en cause le mécanisme de fond de l'APA.
M. Guy Fischer. C'est ce qu'on dit !
M. Michel Mercier, rapporteur pour avis. En effet, comme nous l'avions dit au moment de la discussion du projet de loi, nous sommes d'accord sur le mécanisme de l'APA. Nous avions simplement critiqué le fait que le gouvernement de l'époque n'ait pas prévu son financement. Nous essayons aujourd'hui de trouver une solution pour 2003 et, demain, pour 2004. Nous pourrons alors revendiquer d'être les véritables créateurs et sauveteurs de l'APA. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat aux personnes âgées. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à adresser mes vifs remerciements à mes anciens collègues sénateurs - car je n'oublie pas qu'il y a quelques mois je siégeais à leur côté - qui ont bien voulu prendre l'initiative de cette proposition de loi pour adapter la loi du 20 juillet 2001 relative à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA. Je salue également le travail remarquable de M. le rapporteur, André Lardeux, qui a rédigé un rapport très argumenté malgré le temps très court dont il a disposé. Je tiens aussi à remercier le président de la commission des affaires sociales, Nicolas About, pour son implication active dans cette démarche.
Nombre d'entre vous - j'étais l'un de ceux-là voilà quelques mois - présidez des exécutifs départementaux. Vous êtes tous très proches des collectivités locales. Vous connaissez donc bien les difficultés que les départements ont rencontrées au cours de la première année d'application de l'APA, difficultés qui sont dues à la légèreté, à l'imprévoyance de nos prédécesseurs, qui avaient tout simplement omis les financements correspondants.
M. Dominique Braye. Tout simplement !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Vous savez également l'urgence avec laquelle il nous faut agir si nous voulons sauver cette prestation.
Les enjeux auxquels nous sommes confrontés sont d'importance.
Il s'agit d'un enjeu humain, tout d'abord : on ne peut rester insensible à l'isolement, à la détresse, au sentiment de dignité perdue qui frappent plus d'un million de personnes fragilisées par l'âge, la maladie et confrontées à la perte progressive de leur autonomie. Nous devons les entourer de soins, de présence, d'affection, les accompagner, les soutenir.
Il s'agit d'un enjeu social, ensuite, car non seulement la personne âgée est concernée mais encore sa famille, et l'on sait la place éminente qu'ont les familles dans la prise en charge des personnes âgées dépendantes. A cela s'ajoutent une multiplicité d'intervenants, d'associations, d'établissements et de services qui viennent en aide à ces personnes.
C'est dire que l'enjeu est économique également : chacun sait l'impact de cette politique pour l'emploi. Nous n'aurons de cesse de rendre hommage aux personnels qui travaillent dans les maisons de retraite ou à domicile au service des personnes âgées, bien souvent dans des conditions difficiles.
L'enjeu est financier, bien sûr ; j'y reviendrai dans un instant.
Enfin, l'enjeu est politique, je dirai même philosophique, car notre humanité se mesure à la qualité de la prise en charge de nos aînés les plus fragiles.
Mes chers collègues, notre société, celle du pays des droits de l'homme doit se préoccuper plus que d'autres des plus faibles : les enfants, les personnes handicapées mais aussi les anciens.
Notre société est confrontée à l'allongement de la vie. On peut s'en inquiéter ; pour ma part, je m'en réjouis car le vieillissement sans dépendance n'est pas une maladie. C'est une chance, une victoire sur la nature. Encore faut-il anticiper et accompagner cette évolution pour permettre à chacun de vivre au mieux son avancée en âge.
Quand on traite de l'impact du vieillissement progressif de la population française, on insiste, en général, sur les déséquilibres qu'il génère pour nos systèmes de retraite et de santé. On oublie trop souvent de souligner l'augmentation importante du nombre des personnes très âgées avec ses conséquences : d'ici à 2040, le nombre des personnes âgées de plus de quatre-vingt-cinq ans passera de 1,2 million à 2,4 millions, il doublera. Or le grand âge est facteur de dépendance. Celle-ci concerne une personne sur dix de plus de quatre-vingts ans, une sur quatre de plus de quatre-vingt-cinq ans et une sur trois parmi les plus de quatre-vingt-dix ans.
Malgré les gains d'espérance de vie sans incapacité, tous les scénarios montrent que le nombre de personnes âgées dépendantes augmentera de manière importante dans les années à venir : de 25 % environ d'ici à 2020 et de 55 % d'ici à 2040.
Pour relever ce défi et faire face à une demande croissante, les politiques publiques présentent de nombreuses faiblesses.
Les politiques du logement, des transports, de la culture, de la santé n'ont pas encore vraiment intégré les conséquences du vieillissement. L'offre de services spécialisés n'est pas suffisamment développée ni toujours adaptée. Les services d'aide à domicile sont insuffisamment organisés et les effectifs ne sont pas assez qualifiés et professionnalisés. Les structures d'accueil sont insuffisamment diversifiées et intégrées. Un important effort de rénovation des établissements reste à conduire et leurs moyens en personnel doivent être renforcés.
C'est dans ce contexte général difficile que s'inscrit la montée en charge de l'APA, qui a été bien plus rapide que prévue et largement sous-estimée par nos prédécesseurs.
M. le rapporteur a déjà rappelé les principales données chiffrées : on comptait 670 000 bénéficiaires à la fin de l'année 2002 et on en prévoit 800 000 en 2003 alors que nos prédécesseurs calaient leurs perspectives financières sur le chiffre de 500 000 à 550 000 bénéficaires en 2002-2003. Ils avaient prévu le chiffre de 800 000 à l'horizon 2005-2006 ; il est déjà atteint aujourd'hui.
Cette rapide progression du nombre de bénéficaires traduit, bien sûr, un réel besoin. Mais il est aussi la conséquence de conditions d'ouverture des droits insuffisamment maîtrisées. Face à cet afflux de demandes, je tiens à saluer la très forte mobilisation des départements, la réactivité de leurs personnels et de leurs équipes, qui ont permis, en règle générale, de faire face avec efficacité à cette situation.
En 2002, les dépenses consenties pour l'APA à l'échelon national se sont élevées à près de 1,850 milliard d'euros. Certes, ce montant est globalement inférieur au plan de financement prévisionnel de 2,5 milliards d'euros, mais il est sans doute minoré en raison de l'incidence des demandes en instance dans nos départements.
En 2003, les dépenses feront un bond en avant, puisque la prévision est de l'ordre de 3,7 milliard d'euros, ce qui dépasse de 1,2 milliard d'euros, soit d'un tiers, le montant initialement prévu par l'ancien gouvernement.
Sans attendre, dans une situation budgétaire particulièrement tendue puisque nous sommes confrontés à la plus faible croissance de ces vingt dernières années, alors que d'autres n'ont pas su profiter de la croissance, que nous avons le vent de face alors qu'ils avaient le vent de dos (Applaudissements sur les travées de l'UMP) , il convenait de faire face à ce besoin de financement important. Une concertation a été engagée dès l'été avec l'Assemblée des départements de France et avec les parlementaires. A la demande de M. le Premier ministre, elle a été organisée au cours des mois de novembre et décembre dernier.
A l'issue de cette concertation, le principe d'un effort partagé pour couvrir le besoin de financement de 1,2 milliard d'euros a été retenu.
L'Etat apportera une contribution complémentaire de 400 millions d'euros par l'intermédiaire du FFAPA, le fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie. Les départements seront sollicités pour un montant équivalent. Des aménagements seront mis en oeuvre, qui seront sources d'économies : il s'agit d'instaurer un lien plus marqué entre le versement de la prestation et l'effectivité de l'aide, mais aussi d'ajuster le barème de participation.
Il s'agit, tout d'abord, d'établir un meilleur équilibre entre l'APA versée à domicile et l'APA versée en établissement : à domicile, la participation moyenne actuelle est de 5 % pour un total de 500 euros globalement ; en établissement, elle est proche de 30 % pour un total de 1 500 euros. Le nouveau barème portera la participation moyenne à domicile à 12 %.
Il s'agit ensuite de contribuer à l'équilibre indispensable du plan de financement, que nos prédécesseurs avaient largement sous-évalué. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) Eh oui, mes chers collègues !
M. Serge Lagauche. Oh, ça va !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. L'effort demandé préserve les revenus les plus faibles.
Près de 40 % des bénéficiaires dont le revenu mensuel déclaré est inférieur à 623 euros continueront à ne verser aucune participation.
Je précise que les mesures que nous prenons ne sont pas rétroactives.
Près de 30 % des bénéficiaires dont le revenu mensuel se situe entre 624 et 800 euros verseront une participation variant de 1 % à 8,5 % du plan d'aide.
La participation des personnes disposant des revenus les plus élevés passera de 80 % à 90 %.
La base des ressources qui est prise en compte pour le calcul de la participation exclut certains revenus tels que le minimum vieillesse, les revenus de l'épargne - livret A, codevi, PEP - l'allocation logement, les retraites d'ancien combattant ou de veuve de guerre.
Je rappelle enfin que la participation résultant de ce nouveau barème restera, dans la majorité des cas, inférieure à celle qui est appliquée de longue date en matière d'aide ménagère.
Les autres mesures de l'accord sont mises en oeuvre par la proposition de loi dont nous discutons aujourd'hui et que l'assemblée des présidents de conseils généraux a appelé de ses voeux lors de sa dernière assemblée générale, qui s'est tenue le 13 février.
Le Gouvernement souscrit aux objectifs de ce texte.
Le premier vise à renforcer le caractère de prestation en nature et affecté de l'APA tout en préservant le libre choix de la personne âgée. L'APA étant une prestation en nature, elle doit être intégralement utilisée pour couvrir les dépenses prédéfinies dans le plan d'aide. Le versement en espèces n'est là que pour garantir à la personne âgée le libre choix, selon qu'elle souhaite procéder de gré à gré ou recourir à un service mandataire ou prestataire.
Le texte renforce les moyens dont les départements disposent pour garantir l'effectivité de la prestation. Vouloir que la prestation soit véritablement destinée au service rendu à la personne âgée, n'est-ce pas, là aussi, faire du social.
Le deuxième objectif du texte auquel le Gouvernement souscrit est d'organiser une prise en charge partagée du financement complémentaire pour 2003 évalué à 1,2 milliard d'euros. L'Etat a, pour sa part, fait le choix de l'emprunt et s'engage à le rembourser en temps voulu. Que les choses soient claires !
M. Paul Blanc. Très bien !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Enfin, le troisième objectif de la proposition de loi consiste à apporter une aide spécifique aux départements les plus en difficulté du fait du poids de leur population âgée et de la faiblesse de leur potentiel fiscal.
Pour conclure, mesdames et messieurs les sénateurs, avant d'écouter les interventions que vous ferez dans la discussion générale et auxquelles je répondrai bien sûr, je tiens à rappeler les progrès de l'effort consenti par la nation en faveur des personnes âgées dépendantes.
Il se traduit par une progression des dépenses publiques en faveur de l'autonomie - elles atteignaient 1 milliard d'euros en 2001 et 1,9 milliard d'euros en 2002 ; elles dépasseront 3 milliards d'euros en 2003 - mais aussi par la promotion d'une offre de services de qualité à domicile grâce au récent agrément de l'accord salarial de la branche aide à domicile. Cet agrément va permettre à plus de 80 000 personnes d'obtenir en quatre ans une amélioration très significative de leur situation salariale, de plus de 20 %. L'emploi dans ce secteur sera développé, avec la création de 40 000 emplois, grâce à de meilleures formations et de réelles perspectives de carrière. C'est toute une profession qui se voit ainsi reconnue.
Notre ambition est donc de répondre aux réels besoins tout en veillant à une meilleure maîtrise de la dépense et en réaffirmant le principe d'une gestion décentralisée et de proximité pour ajuster au mieux les réponses aux besoins des personnes.
Notre objectif est clair : poursuivre la construction d'une réelle politique en faveur des personnes âgées ; les chiffres que je viens de citer l'attestent. Mais il nous faut construire cette politique sur des bases solides, notamment sur la responsabilité : nous ne pouvons accepter les dérives financières qui nous ont été léguées ;...
M. Paul Blanc. Oui !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. ... nous ne pouvons accepter l'alourdissement excessif de la fiscalité locale qui pèse, notamment, sur les personnes âgées et que supportent donc lourdement les départements.
M. Louis de Broissia. Absolument !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. C'est pourquoi le Gouvernement soutient la proposition de loi qui est soumise à la discussion de la Haute Assemblée aujourd'hui.
Tels sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les commentaires dont je souhaitais vous faire part en préambule à notre discussion. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe de l'Union pour un mouvement populaire : 52 minutes ;
Groupe socialiste : 28 minutes ;
Groupe de l'Union centriste : 13 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen : 11 minutes ;
Groupe du Rassemblement démocratique et social européen : 10 minutes ;
Réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe : 6 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, l'examen de cette proposition de loi mérite que l'on rappelle dans quel contexte elle a été élaborée, puis déposée.
La mise en place du texte de loi sur l'allocation personnalisée d'autonomie, malgré les indéniables qualités de celle-ci, s'est faite dès l'origine dans des conditions que le Sénat avait très lucidement analysées et qui ne pouvaient que conduire à une impasse.
M. Paul Blanc. Tout à fait !
M. Philippe Adnot. Car il y manquait en effet des éléments essentiels : un financement suffisant ; une prise en compte des déséquilibres de la capacité financière des territoires ; une évolution contrôlée de la dépense.
Dès lors, il était légitime que l'Assemblée des départements de France, face à l'explosion des dépenses qui incombaient aux départements, saisisse le Gouvernement de ce problème et lui donne un caractère prioritaire : comment imaginer que l'on puisse mettre en place un nouveau volet de la décentralisation sans qu'ait été d'abord réglée la question de l'APA ? (Très bien ! et applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP.)
Je suis sensible à l'écoute que nous a manifestée le Gouvernement : dans une situation financière dont il n'est pas responsable, il a accepté de prendre en compte ce dossier et, au cours de réunions de concertation qui ont permis d'échanger véritablement des arguments - ce qui n'avait pas été le cas lors de l'instauration de l'APA -, il a mis au point un certain nombre de mesures qui trouvent leur traduction dans un décret et dans ce texte.
Qu'on ne s'y trompe pas : seule l'urgence nous a conduits à utiliser cette procédure de proposition parlementaire. Si, personnellement, j'ai accepté, comme certains de mes collègues, de cosigner ce texte, c'est bien pour que le débat ait lieu, pour que les premières mesures puissent être appliquées rapidement et pour que nous soyons en mesure de jouer pleinement notre rôle de législateur en améliorant ce texte par des amendements.
En effet, le texte initial relatif à l'APA n'est pas seulement imparfait en raison d'un financement insuffisant, il l'est aussi du fait de son manque d'équité - la différence de traitement entre les intéressés, selon qu'ils sont placés en établissement ou à domicile, est, par exemple, flagrante - et parce que le souci de maîtrise de la dépense publique en est absent.
Car la folie qui consiste à charger sans cesse la « barque » de la dépense publique trouve son corollaire dans la perte de compétitivité de nos entreprises ; je rappelle à ce propos que la moitié de la ressource fiscale des départements vient des entreprises.
Chacun doit le comprendre, l'emploi dépend de la capacité de nos entreprises à gagner des parts de marché, donc à être compétitives. Que dire de plus à ceux de nos concitoyens qui peinent à maîtriser leur budget et qui voient régulièrement leur pouvoir d'achat diminuer ?
Il est, en outre, essentiel que la solidarité nationale puisse jouer son rôle. Or le texte initial relatifs à l'APA a mis en place des mécanismes qui aggravent la situation des territoires les plus défavorisés. Il faut donc le corriger.
C'est en ayant présents à l'esprit ces impératifs que j'aurai l'occasion de vous proposer des amendements sur ce texte, qui va, selon moi, dans le bon sens mais qui mérite que l'on jette les bases d'une amélioration sur le fondement du triptyque que je viens de développer : rétablissement de l'équité entre les personnes et les territoires ; maîtrise de la dépense publique ; plus juste participation de la solidarité nationale. Mes propositions s'articuleront donc autour de ces trois axes.
Il est important que la participation de l'Etat soit réévaluée : 400 millions d'euros supplémentaires sont à ce titre prévus par ce texte. On peut discuter le bien-fondé d'un recours, à cette fin, à l'emprunt en 2003. L'important n'est pas là, mais bien dans l'engagement que le Gouvernement doit prendre - j'espère qu'il nous le confirmera - de mettre en place, dès l'an prochain, un financement pérenne, tenant compte non seulement des besoins nouveaux, mais aussi des frais financiers et de l'amortissement de la dette ainsi créée.
Il s'agit d'un enjeu de solidarité nationale. Cette solidarité doit s'accompagner d'une modification, d'une part, des méthodes de péréquation qui ont été mises en oeuvre dans le cadre du système actuel et, d'autre part, de celles qui vont résulter de l'application du décret. J'aurai l'occasion de revenir sur ce sujet lors de l'examen des articles.
S'agissant de l'équité dans le traitement des personnes, nous devons être conscients du fait que le texte actuel a créé des distorsions graves selon que ces personnes sont prises en charge en établissement ou à domicile.
Il faut savoir que, aujourd'hui, un talon modérateur est demandé, quel que soit son niveau de revenu ou de dépendance, à toute personne relevant de l'APA en établissement. Le décret tend à rapprocher la situation des uns et des autres. Il va donc dans le bon sens, mais une amélioration est encore nécessaire car, à l'heure actuelle, on demande plus aux personnes les plus dépendantes qu'aux personnes classées en GIR 4.
Ainsi, dans mon département, à revenu égal, par exemple 940 euros, un personne classée en GIR 1 bénéficie de 1 000 euros de plan d'aide, pour une participation de 150 euros ; une personne classée en GIR 2 ou 3 bénéficie de 700 euros de plan d'aide, pour une participation de 100 euros ; mais une personne classée en GIR 4 bénéficie, elle, de 300 euros de plan d'aide pour une participation de 45 euros.
Est-il légitime que la participation en masse soit plus faible quand on est peu handicapé et qu'elle soit plus forte quand on est très handicapé ?
Je présenterai donc un amendement sur ce sujet, afin que, à domicile comme en établissement, un talon modérateur permette de rééquilibrer un peu cette situation.
Enfin, il me paraît important que chacun d'entre nous ait à l'esprit la nécessité de la maîtrise de la dépense publique, non seulement dans le cadre de l'APA, mais dans tous les domaines, car les pays sont, comme les entreprises, en compétition au regard de l'attractivité.
C'est la raison qui me conduit à penser que le problème essentiel est non pas celui du partage du financement, même s'il est important, mais bien celui de la maîtrise globale de la dépense.
Cette maîtrise sera impossible si est mis en place le cinquième risque, comme certains le préconisent, car il impliquerait la constitution d'un guichet de plus, alors qu'il nous faut au contraire en appeler à la responsabilité individuelle et familiale pour pouvoir vraiment faire jouer la solidarité au bénéfice de ceux qui en ont le plus besoin.
C'est dans cet esprit que je présenterai, concernant le recours sur succession,...
M. Guy Fischer. Ah !
M. Philippe Adnot. ... un amendement qui modifiera les plafonds existants et mettra fin aux dysfonctionnements qui existent, notamment pour les personnes placées en établissement. Je rappelle que, pour ces dernières, actuellement, le recours sur succession est possible et sans plafond. Il y a tout de même là une injustice flagrante, et elle a été mise en place par vous, chers collègues de gauche !
M. Jean-Claude Peyronnet. Allons, du calme !
M. Philippe Adnot. C'est la vérité !
Je n'ignore rien des préventions des uns et des autres sur ce sujet. Il s'agit pourtant d'une question de justice sociale car, je le répète, aujourd'hui, le recours sur succession existe, mais seulement pour les personnes les plus pauvres.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Absolument !
M. Philippe Adnot. Le Gouvernement a prévu de prendre en charge le déficit de financement de l'APA au titre de 2003, estimé à 1,2 milliard d'euros, par des mesures réparties en trois volets, à savoir : 400 millions d'euros de participation supplémentaire de l'Etat ; 400 millions d'euros de participation supplémentaire des conseils généraux ; 400 millions d'euros d'économies par la maîtrise de la dépense.
Je doute que les mesures d'économie qui nous sont proposées soient à même de dégager ces 400 millions d'euros. Je rappelle qu'elles ne s'appliqueront que sur le flux entrant, et non sur le stock. C'est pourquoi j'ai déposé un amendement visant à faire sorte que le Gouvernement s'engage à prendre en charge les économies qui ne seraient pas réalisées. Si vous nous apportez, monsieur le secrétaire d'Etat, des garanties précises à ce sujet, je retirerai mon amendement.
Je note par ailleurs que la première mesure d'économie présentée par le décret, qui porte sur 73 millions d'euros, sera très inégalement réalisée, en fonction du pouvoir d'achat des retraités de chaque département. Il faut qu'une nouvelle méthode de répartition du fonds de financement de l'allocation personnalisée d'autonomie, le FAPA, soit mise en place pour tenir compte de ce problème. Je vous demande donc, monsieur le secrétaire d'Etat, de donner mission à un groupe de travail de faire des propositions en la matière.
Je rappelle que le projet de décret prévoit, pour le titulaire d'un montant de ressources s'élévant par exemple à 940 euros, une participation supplémentaire de 15,8 %. Or, dans mon département, les ressources de 65 % des retraités se situent entre 620 et 940 euros.
Autrement dit, un département réalisera des économies d'autant plus importantes que le niveau de ressources des retraités y résidant sera élevé ! Cela signifie bien que les 73 millions d'économies ne seront pas répartis équitablement.
Il faudra donc, dans la prochaine répartition du FAPA, lorsqu'on aura pris connaissance de la dépense exacte, prendre en compte cettre réalité pour définir une nouvelle grille de répartition.
Tel est, mes chers collègues, l'esprit dans lequel j'aborde cette proposition de loi. Peu importe qui en est à l'origine : nous avons besoin de mesures rapides pour rétablir l'équité, pour maîtriser la dépense, pour permettre à l'Etat d'assumer sa part et, surtout, pour améliorer la loi afin de prendre vraiment en charge, d'une manière durable et dans de bonnes conditions, ceux qui en ont besoin. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le secrétaire, mes chers collègues, vous récidivez et m'obligez ainsi à m'élever une fois contre vos méthodes ! Ce fut le cas lors de l'examen du projet de loi relatif à la bioéthique, et c'est à nouveau le cas aujourd'hui avec cette proposition de loi sortie du chapeau de nos collègues présidents de conseils généraux !
Une inscription tardive à l'ordre du jour du Sénat ; une saisine pour avis de la commission des finances pour avis qui ne se traduit même pas par la présentation d'un avis, alors qu'en 2001, lors de l'examen du texte instaurant l'APA, ladite commission avait vraiment été chargée de la question du financement, proposant à l'occasion des amendements afin d'équilibrer davantage la participation de l'Etat et celle des départements et, maintenant, le retour de la récupération sur succession ! Voilà bien des marques de précipitation pour démanteler l'APA et trouver une solution aux difficultés financières des conseils généraux !
Ma collègue Michelle Demessine reviendra tout à l'heure sur les conséquences de ces méthodes de travail à l'égard de choix de société aussi fondamentaux, mais je tenais, dès à présent, à vous faire part une nouvelle fois du profond mécontentement de notre groupe.
Est-il besoin de rappeler que l'APA a été unanimement saluée lors de sa mise en place, en remplacement de la PSD, au 1er janvier 2002 ?
C'est d'abord sa vocation universelle qui a constitué la différence fondamentale. Enfin était reconnu le droit à une prise en charge adaptée, individualisée par le biais d'un plan d'aide, mais selon un barème national. Le relèvement significatif du montant de l'aide pouvait désormais couvrir les dépenses autres que de personnel. L'abandon du recours sur succession, la suppression du plafond de ressources et l'intégration au dispositif des personnes moyennement dépendantes - celles qui sont classées en GIR 4 - ont également contribué à faire passer le nombre de bénéficiaires de 135 000 à 800 000 personnes.
Cette réforme a indiscutablement permis de rompre l'isolement d'un grand nombre de personnes en mettant en lumière des besoins réels, besoins énormes en termes de prise en charge, dont l'ampleur était jusqu'alors ignorée.
Il ne faut donc pas s'étonner de ce que la montée en charge du dispositif ait été beaucoup plus rapide que prévu. En conséquence, les crédits inscrits pour financer l'APA se sont révélés insuffisants, plaçant certains départements, il faut le reconnaître, dans une situation financière difficile.
Mettant en avant le surcoût de 1,2 milliard d'euros, le Gouvernement, en concertation avec les seuls conseils généraux, a fait le choix de réduire les dépenses, quitte à dénaturer, voire à remettre entièrement en cause les principes qui ont présidé à la création de l'APA.
Ainsi avec la proposition de loi qui nous est présentée, vous poursuivez méthodiquement votre plan de démantèlement de l'APA, dans la droite ligne du décret qui vise à porter de 5 % à 12 % environ la participation des personnes âgées maintenues à domicile.
Je veux dire un mot de ce décret. En abaissant le plafond de ressources pour l'application du ticket modérateur de 935 euros à 623 euros, le Gouvernement considère qu'une personne vivant juste au-dessus du seuil de pauvreté doit « partager l'effort » de financement de l'APA - comme le dit joliment le communiqué de presse de la commission des affaires sociales - avec l'Etat et les conseils généraux.
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. C'est faux !
M. Guy Fischer. Belle conception de la solidarité nationale que vous avez là !
Aujourd'hui, vous proposez, avec l'article 1er, de repousser l'ouverture des droits - qui intervient actuellement au dépôt du dossier complet - à la notification de la décision d'attribution par le président du conseil général.
Les personnes âgées qui attendent leur aide, leurs familles et les associations apprécieront le cynisme avec lequel vous justifiez ce recul ! « La conjugaison pratique des deux principes de rétroactivité et d'effectivité suscite des incompréhensions de la part des usagers. », dites-vous. Que n'avez-vous carrément avoué que vous économisiez entre deux et six mois d'allocation sur chaque bénéficiaire ? Vous auriez au moins eu le mérite de la clarté !
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Guy Fischer. Les articles 2 et 3 visent à renforcer le contrôle d'effectivité de l'aide.
Considérant que le code de l'action sociale et des familles prévoit déjà des modalités de contrôle, constatant que vous recherchez encore de petites économies sur des personnes fragiles, modestes, par d'inutiles tracasseries administratives, nous proposons de supprimer ces articles, tout comme l'article 1er.
L'article 4 autorisant le recours à l'emprunt du fonds de financement de l'APA ne nous satisfait pas non plus. C'est là une fausse solution, d'autant plus choquante que vous n'avez cessé de reprocher au gouvernement précédent son absence de prévision de financement à long terme.
En attribuant 400 millions d'euros de ressources supplémentaires à ce fonds, vous permettez, certes, de faire face aux besoins réels des départements pour 2003, bien que la formulation on en peut plus vague et le renvoi à un décret ne permettent pas de savoir selon quels critères les départements seront éligibles à ce concours financier exceptionnel. Cependant, vous ne proposez aucune solution pérenne pour financer l'allocation !
L'unique initiative de la commission des affaires sociales, qui consiste à préciser que la charge et le remboursement de l'emprunt souscrit par le FFAPA seront assurés par la prochaine loi de finances, ne change pas fondamentalement le problème.
Concernant l'approche générale de la prise en charge de la perte d'autonomie, vous êtes, chers collègues de la majorité, en pleine contradiction. C'est ce qui arrive forcément lorsqu'on multiplie les promesses, les effets d'annonce ... et que l'on fait le contraire.
M. Louis de Broissia. Cela vous va bien !
M. Jean-Pierre Fourcade. Dont acte !
M. Guy Fischer. Si M. Mercier avait été là, je lui aurais demandé comment il est possible que lui, qui a par deux fois pris des mesures dans notre département pour corriger les effets inégalitaires de la PSD, ait été dans un premier temps présenté comme signataire d'une proposition de loi qui nous ramène de fait, je le pense, à cette prestation injuste ? (Murmures de protestations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Pas du tout !
M. Guy Fischer. Et vous, monsieur de Broissia, rappelez-vous, vous n'avez eu de cesse de dénoncer le fait que l'APA n'était qu'une sorte de PSD bis !
M. Louis de Broissia. Je n'ai jamais dit cela !
M. Guy Fischer. Si, si !
M. Louis de Broissia. Je n'ai jamais dit cela, mais citez-moi si cela vous fait plaisir !
M. Guy Fischer. En tout cas, tous vos collègues l'ont dit ! (Rires et exclamations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.) Et là, vous parlez au nom des présidents de conseils généraux !
M. Jean-Pierre Fourcade. Si ce n'est toi, c'est donc ton frère !
M. Guy Fischer. Monsieur le secrétaire d'Etat aux personnes âgées, expliquez-moi donc comment vous pouvez, dans le même temps, créer un comité de vigilance sur la maltraitance à l'encontre des personnes âgées et accepter qu'on leur fasse subir les conséquences d'un tel retour en arrière !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. C'est faux !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous leur assurons le maintien du service !
M. Guy Fischer. Je voudrais évoquer également la suppression, parfaitement arbitraire, des crédits que nous avions pourtant votés dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 et qui étaient destinés à favoriser la signature de conventions tripartites avec les établissements ainsi qu'à améliorer les conditions d'hébergement et de soins des personnes âgées. Car tout se tient en la matière.
La suppression de ces 183 millions d'euros est un mauvais coup porté non seulement aux personnes accueillies en établissement, mais également aux responsables d'établissement et aux personnels, qui s'étaient, pour la plupart, engagés résolument dans une « démarche qualité » appelée à s'accompagner d'embauches : 70 000 emplois auraient au total pu être ainsi créés.
Les personnes qui n'auront plus les moyens de rester à leur domicile avec une APA convenable viendront intégrer des établissements sous-dotés, notamment en personnel, alors même que les listes d'attente sont déjà pléthoriques. Or la première des maltraitances n'est-elle pas la « non-traitance » par manque de moyens ?
M. Robert Bret. Absolument !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous auriez dû dire cela lorsque l'APA a été instaurée !
M. Guy Fischer. Mais je l'ai dit ! Relisez le compte rendu des débats !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Le Journal officiel en témoigne !
M. Robert Bret. Vous n'étiez pas encore président de la commission des affaires sociales, monsieur About, c'est pour cela que vous ne vous en souvenez pas !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il y avait à l'époque un excellent président !
Monsieur Fischer, vous accusez votre gouvernement d'avoir fait adopter cette mesure !
M. Guy Fischer. Je n'ai pas le coeur à rire, monsieur le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais moi non plus !
M. Guy Fischer. Je suis profondément révolté ! Ce n'est pas être caricatural que de dire que vous porterez la responsabilité d'avoir pris l'argent dans la poche des personnes âgées dépendantes.
M. André Lardeux, rapporteur. Pas du tout !
M. Louis de Broissia. C'est scandaleux !
M. Guy Fischer. Mais si, vous prendrez cet argent d'une manière ou d'une autre en faisant des économies !
Voyez les 500 millions d'euros d'allégement de l'ISF que vous venez de faire voter par l'Assemblée nationale. Ce n'est pas scandaleux de le dire !
M. Louis de Broissia. C'est scandaleux de mentir effrontément !
M. Guy Fischer. Aujourd'hui, l'APA vit une journée noire ! Et vous verrez la réaction des personnels des établissements, monsieur de Broissia !
M. Louis de Broissia. Vous verrez la réaction de l'opinion !
M. Guy Fischer. Dès lors, à quand la récupération sur succession au premier franc ? Cela ne devrait pas vous faire reculer !
A quand l'exclusion de l'APA des GIR 4 qui devront recommencer à se débrouiller comme ils le peuvent...
M. Dominique Braye. Pas de provocation, monsieur Fischer !
M. Guy Fischer. ... avec un début de perte d'autonomie, avec une maladie d'Alzheimer qui laisse l'entourage impuissant ?
Et je ne parlerai pas du manque flagrant d'établissements.
M. Dominique Braye. Tout excès est dérisoire, monsieur Fischer !
M. Robert Bret. Vous en savez quelque chose, n'est-ce pas, cher collègue ! (Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Guy Fischer. Vous ne vous êtes pourtant pas privés de critiquer et de caricaturer la politique précédente !
M. le président. Monsieur Fischer, veuillez continuer, je vous prie, ne vous laissez pas distraire !
M. Guy Fischer. Votre action est, à mon sens, de courte vue ; elle remet en cause toute politique de prévention, source d'économie pour la sécurité sociale.
Nous avons auditionné des représentants des organisations représentatives des personnes âgées, les directeurs d'établissement, les services d'aide à domicile. J'ai rencontré des retraités aux revenus modestes devant assumer la charge de deux parents qui sont en établissement, et qui bénéficient d'une APA dérisoire, et je ne parle pas des frais de transport ni des frais annexes.
Imaginez les tourments que ces personnes qui n'y arrivaient déjà pas vont endurer après votre réforme. Les parents qui possédaient un petit pécule ou un petit appartement vont devoir s'en servir, et il sera vite englouti par les dépenses auxquelles ils devront faire face.
Cette détestable réforme de l'APA ne constitue bien sûr qu'une première étape ; vous en avez d'ailleurs annoncé une nouvelle. S'agira-t-il d'une privatisation du risque dépendance, comme certains collègues le prônent ? Ajoutée à une situation déjà marquée par le manque de moyens humains et financiers, cela conduira très rapidement et inéluctablement au désespoir des personnes âgées et de leurs familles.
Voilà ce que je tenais à vous dire. Quant à nous, au cours de ce débat, nous ferons des propositions constructives et raisonnables, afin d'améliorer et de financer une allocation universelle indispensable pour assurer à nos anciens la vie quotidienne digne et sereine à laquelle ils ont droit. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Dominique Braye. Nous y tenons autant que vous aux anciens !
M. le président. La parole est à M. Louis de Broissia.
M. Louis de Broissia. Monsieur le président, je me félicite de ce que la conférence des présidents ait bien voulu inscrire à l'ordre du jour et en urgence l'examen des conclusions de la commission des affaires sociales sur la question de la sauvegarde de l'allocation personnalisée d'autonomie, laquelle est destinée à assister toutes les personnes âgées de plus de soixante ans.
Il est légitime que, au sein du Sénat, nous passions exeptionnellement quelques heures à débattre d'un vrai problème de société, celui du vieillissement de la population. Les chiffres ont été rappelés dans l'excellent rapport de notre ami M. Lardeux. La dépendance risque de frapper toutes les personnes âgées, non seulement celles qui ont plus de soixante ans, mais aussi celles qui ont plus de quatre-vingts ans, et dont le nombre va doubler dans les quinze à vingt prochaines années.
Je vous rappelle que tous les gouvernements successifs se sont attaqués à ce problème. Un processus expérimental a été mis en place dans douze départements, il a été suivi de la prestation spécifique dépendance et d'une allocation universelle, l'APA...
M. Gilbert Chabroux. Tout à fait !
M. Louis de Broissia. ... instantanée par le gouvernement précédent sans récupération sur succession, alors que c'était prévu dans le projet de loi initial - j'y reviendrai -, sans mesure préalable de l'aide effective à l'autonomie, puisque les départements sont tenus de la verser automatiquement, sans contribution financière nationale majeure - c'est une des raisons du dépôt de cette proposition de loi - sans prévision sincère et - on peut le dire - sans financement assuré.
La majorité d'aujourd'hui soutient le Gouvernement, monsieur le secrétaire d'Etat, qui veut sauver l'APA pour les personnes agées.
Ces dernières, mes chers collègues de tous bords, ont droit à notre respect. En particulier, nous devons relever le défi, monsieur Fisher, de tenir les promesses faites à compte d'autrui.
Aujourd'hui, cela s'appelle, soit l'héritage, expression que je n'emploie pas, soit, selon moi, la continuité républicaine. (Très bien ! sur les travées de l'UMP.)
Seize mois après la parution des décrets mettant en place l'APA, nous constatons tous une demande forte, légitime, pour une prestation généreuse et facile à obtenir et nous constatons aussi que les départements ont mis en place un mécanisme d'instruction remarquable, M. Lardeux et M. le secrétaire d'Etat ont eu raison de le souligner. A cet égard, je signale qu'aucun chiffrage des coûts de l'APA ne tient compte des effectifs que les conseils généraux affectent à cette allocation.
Nous avons constaté également des inéquités entre l'aide à domicile et l'aide dans les établissements, ainsi que des transferts acceptés ou subis, monsieur Fisher, du fonds de solidarité vieillesse : 0,1 point de CSG affecté du FSV au financement de l'APA. Toutefois, il faut dire que c'était à l'époque du FOREC, le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de la sécurité sociale. c'est-à-dire du financement des 35 heures, et d'un mécanisme un peu complexe...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ils ont « piqué » l'argent des retraites !
M. Louis de Broissia. ... dans lequel, d'ailleurs, les rapporteurs les plus éminents de cette assemblée se perdaient.
Nous avons encore constaté une forte hausse obligatoire et mécanique de la fiscalité imposée aux contribuables départementaux au moment même où pesaient sur nous, employeurs de main-d'oeuvre, les effets de la loi sur la réduction du temps de travail et ceux de la loi relative à la démocratie de proximité et au financement des SDIS.
Cette augmentation insupportable de la fiscalité a pour conséquence aujourd'hui d'opposer dans chaque département - nous l'avons constaté - les générations les unes aux autres.
Je constate enfin un immense défaut de transparence et de communication, comme cela a été souligné avant moi. Cette transparence est requise pour que l'action publique soit bien perçue, et cela n'a jamais été le cas pour l'APA.
Aujourd'hui, nous voulons tous ensemble, avec ceux qui voteront ce texte et avec ceux qui ne le voteront pas - c'est la logique de nos discussions républicaines -, garantir la survie de l'APA en 2003.
C'est le seul objet de cette proposition de loi. Son objet est volontairement limité, mais c'est une proposition responsable.
Je glisserai rapidement, mais je ne l'esquiverai pas - j'ai failli le faire, mais après avoir entendu M. Fischer je ne me gênerai pas pour m'exprimer -, sur l'exploitation politique, politicienne, partiale, mesquine et mensongère faite par les ténors du précédent gouvernement.
Il y a, mes chers collègues, une très grande malhonnêteté à dire ici le contraire de ce qu'on demande dans chacun de nos conseils généraux. En effet, nous avons eu l'occassion, avec les 102 présidents de conseil général et les 4 214 conseillers généraux de France, d'aborder ce sujet de façon publique.
Il ne faut pas faire peur aux personnes âgées, monsieur Fischer. Mon père m'a enseigné qu'il n'était pas digne d'exploiter les peurs des enfants ou les angoisses des personnes en difficulté, en inquiétude ou en voie de dépendance.
M. Dominique Braye. Absolument !
M. Louis de Broissia. Je vais d'ailleurs vous montrer où peut mener ce travers, monsieur Fischer.
J'ai lu dans Libération, il y a quelques jours - voyez comme la malhonnêteté peut conduire à l'hystérie - que cette proposition de loi pouvait mener à une « euthanasie programmée des vieux » ! « Tout ce qui est excessif est insignifiant », disait M. de Talleyrand.
M. Guy Fischer. Ce n'est pas moi qui l'ai dit !
M. Louis de Broissia. Certes ! C'est la FNALPA, la Fédération d'aide au logement des personnes âgées. Je tiens à votre disposition l'article de Libération.
Pour ma part, je dirais simplement : tout ce qui est ignoble reste ignominieux.
D'ailleurs, monsieur Fischer, lorsque vous avez été interpellé tout à l'heure par M. Braye, vous avez eu une réaction « freudiennement » intéressante en déclarant : « Vous ne vous êtes pas gêné pour caricaturer le précédent gouvernement ! »
M. Guy Fischer. C'est sûr !
M. Louis de Broissia. Or vous vous autorisez aujourd'hui à caricaturer l'objet de cette proposition de loi. (M. Guy Fischer s'esclaffe.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait ! C'est révélateur !
M. Louis de Broissia. Mes chers collègues, cette proposition de loi a été déposée après d'innombrables réflexions et de solides concertations qui ont été engagées entre l'Assemblée des départements de France, le Gouvernement et les associations. Hier encore, j'ai reçu un communiqué de la Fédération de la mutualité française qui déclare ne pas s'opposer à l'objet même de cette proposition de loi.
Comme vous pouvez en témoigner, monsieur le secrétaire d'Etat, nous avons exercé en permanence une forte pression, qui ne cessera pas puisque cette proposition de loi ne répond que partiellement et provisoirement aux dysfonctionnements d'un dispositif que nous voulons maintenir. Notre souci a été de sauver l'APA dans son mécanisme initial, mais en éliminant ses faiblesses « congénitales ».
Il est vrai que la mise en oeuvre de l'APA a été frappée du sceau de la précipitation : la loi a été promulguée le 20 juillet 2001 ; les décrets sont sortis fin novembre ; l'application de cette mesure devait se faire dans les conseils généraux début décembre. Permettez-moi de constater une certaine coïncidence entre cette mesure et le vrai besoin de société, et puis peut-être quand même des échéances électorales qui, à l'époque, se profilaient à l'horizon...
M. Guy Fischer. Oh !
M. Dominique Braye. Mais c'est vrai !
M. Louis de Broissia. Notre exigence pour demain, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, c'est que la solidarité nationale joue. Or l'augmentation des impôts départementaux n'est pas la bonne solution pour exercer définitivement la solidarité nationale. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.) C'est pourtant celle que le Gouvernement et la majorité précédente avaient choisi nolens volens, le voulant ou ne le voulant pas. Cela a été la solution inexorable.
Cette proposition de loi, et je m'exprime bien sûr au nom de l'UMP, sera soutenue par la majorité des sénateurs et des sénatrices qui tiennent le même langage ici et ailleurs. Elle sera aussi calibrée pour éviter toute polémique.
Pour ma part, je le dis tout net, j'ai écarté le mécanisme de la récupération sur succession auquel pourtant je m'accrochais encore voilà quelques mois, car je pense que le profit financier serait faible et le profit politique très incertain.
Mme Michelle Demessine. Voilà qui est intéressant !
M. Louis de Broissia. Et clairement dit !
Je soutiendrai en revanche tout amendement qui permettra à une personne âgée dépendante de percevoir rapidement la prestation effective à laquelle elle a droit lorsque, par exemple, elle sera accueillie dans un établissement en urgence.
Cette fois-ci, avec vous, monsieur le secrétaire d'Etat, et grâce à la compréhension du Gouvernement, nous allons faire face à notre responsabilité républicaine.
L'opposition s'est très longtemps, très fortement, très violemment vantée de cette nouvelle prestation. Cette nouvelle allocation « personnes âgées dépendantes », « personnes âgées en perte d'autonomie », c'est nous qui la mettrons en place, en la consolidant définitivement.
Vous pourrez toujours pousser les hauts cris, essayer de désinformer ou de mentir, l'opinion ne s'y trompera pas. Nous savons et nous saurons dire à l'opinion (Mme Marie-Claude Beaudeau proteste) qui aura effectivement permis de sauver cette prestation.
Avec cette majorité, nous ferons en sorte que l'allocation personnalisée d'autonomie en 2003 soit pérennisée et nous reviendrons devant l'opinion, monsieur le secrétaire d'Etat : rendez-vous sera pris avant la fin de l'année, pour soutenir un système assurant définitivement la prestation universelle d'autonomie pour les personnes âgées. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.
M. Jean Boyer. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, personne ne connaît l'heure à laquelle sa perte d'autonomie nécessitera la présence d'une tierce personne pour accomplir ce qu'on appelle les actes essentiels de la vie. L'APA sera là pour y remédier, c'est l'essentiel.
Cela a déjà été dit, particulièrement par vous, monsieur le secrétaire d'Etat, mais quand on parle après d'autres, on est obligé de répéter : si les progrès de la médecine ont généré une plus grande espérance de vie, ils n'ont pas résolu le problème de la dépendance.
La vie est plus longue, d'où l'augmentation importante du nombre des personnes âgées, de ceux que la société appelle souvent « les aînés ». Souvent seuls ils ont le temps de penser, d'envisager, de redouter, mais ils doivent avoir aussi le droit d'espérer. Pour eux, c'est primordial.
Le besoin d'un accompagnement est essentiel pour espérer finir sa vie dans des conditions de dignité et ne pas redouter une vie sans espoir.
Cette avancée sociale n'a pas été obtenue par des manifestations, des diversions, des revendications. Nos aînés sont silencieux et ils apprécient que la France active d'aujourd'hui ait voulu apporter à celle d'hier la garantie d'être sécurisée dans cette dernière étape de la vie.
Pouvoir rester chez soi, dans sa maison, son logement, là où même le bruit de la fermeture ou de l'ouverture d'une porte est sécurisant, là où on ne fait qu'un avec son appartement, là où se crée avec celui-ci une sorte de complicité indiscutable est primordial.
L'aide ménagère est devenue, pour les personnes âgées particulièrement dépendantes, une associée de vie. Elle est attendue, désirée. Elle ne vient pas seulement pour le lever ou le coucher ni pour laver la vaisselle, ranger le lit ou nettoyer le sol. Elle vient apporter une présence afin de rompre la solitude et transmettre un message de la vie extérieure, celle du village, celle du quartier ou celle des amis.
L'APA, c'est la solidarité. Ce n'est pas un privilège. C'est un investissement en faveur de ceux qui, pendant des décennies, ont connu des conditions de vie parfois difficiles. Personne parmi nous n'a le droit de s'approprier cette avancée, mais certains pourront dire qu'ils ont eu le mérite de la financer.
Faire le point aujourd'hui, c'est reconnaître que cette aide répond à un besoin. Je ne reprendrai pas les chiffres qui ont été évoqués. Il est facile de dire qu'il faut prévoir 1,2 milliard d'euros supplémentaires. Il était sans aucun doute très difficile d'y parvenir. Merci et bravo d'avoir pu le réaliser en abondant les crédits de l'APA, monsieur le ministre.
Faire le point, c'est aussi tirer des enseignements des réponses qui ont été apportées par l'analyse de la cohérence entre la grille AGGIR et les besoins.
Je crois très sincèrement qu'une réflexion s'impose dans ce domaine. Je pense pouvoir dire, et je sais que vous partagerez mon constat, que les handicaps physiques, ceux qui empêchent de réaliser les « actes essentiels de l'existence » sont mieux pris en compte que les handicaps psychologiques ou la maladie d'Alzheimer quand elle est dans sa phase embryonnaire. Je crois donc qu'il faudra davantage prendre en compte dans le GIR 4 cette partie de la vie où l'on devient une personne « désorientée ».
Une mise en place plus approfondie du plan d'aide avec un support plus adapté à la nature du handicap est également envisagée. Ce ne sont pas obligatoirement certains handicaps physiques qui nécessitent le plus de présence et qui évitent l'hospitalisation. Il faut écouter la personne handicapée, la comprendre et répondre à ses aspirations, à ses besoins prioritaires. Il ne faut pas qu'une aide ménagère vienne pour « faire des heures » ; il faut qu'elle vienne aussi pour que la solitude de la personne aidée soit plus courte ! N'oublions pas que ce soutien à nos personnes âgées génère d'importantes heures de travail et qu'en aidant les personnes âgées on combat également le chômage.
Il faut faire plus ; il faut que nos aides ménagères aient une tâche, une mission particulière. Pour cela, il convient de leur donner une formation non seulement technique, mais également psychologique, sociale et humaine. Ainsi, ces aides ménagères pourront apporter à ceux qui en ont besoin une aide qui leur évitera d'aller dans une maison de retraite ou de connaître la solitude.
Un projet de décret réduira pour certains le service gratuit, mais il sensibilisera encore plus sur cette impérative nécessité d'apporter une aide à ceux qui doivent la recevoir. Il donnera une garantie pour l'avenir en ouvrant un partenariat avec d'autres reponsables.
Je conclurai en disant ce que beaucoup d'entre nous pensent, à savoir que l'APA constitue une avancée sociale dont nous devons nous réjouir. Si nous voulons garantir son avenir, nous devons agir en responsables : c'est ce qui va être fait, c'est aussi ce qu'il faut faire ! (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau.
M. Bernard Cazeau. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, parmi les nombreuses remises en cause dont a fait l'objet jusqu'à présent la politique du précédent gouvernement, celle qui est aujourd'hui soumise à nos débats me paraît d'une gravité toute particulière. Le succès avéré de l'allocation personnalisée à l'autonomie lui donne une profonde légitimité populaire ; la déprécier équivaut à faire peu de cas de l'attachement que les Français lui portent.
M. Michel Moreigne. Très bien !
M. Bernard Cazeau. Voulue par le gouvernement de Lionel Jospin pour répondre à la question sociale de la dépendance des personnes âgées, l'APA a été adoptée par nos concitoyens. Ils ont ainsi attesté de leur adhésion au principe fondateur de l'APA, à savoir l'instauration d'une véritable sécurité sociale devant la dépendance.
Qu'il soit dès aujourd'hui question de réviser l'APA ne manquera pas de susciter incompréhension et regret. La méthode employée ne manquera pas non plus d'étonner. Comme beaucoup d'autres, je suis choqué tant par la méthode du décret, qui soustrait cette révision au débat démocratique, que par l'émergence soudaine de la présente proposition de loi, alors même qu'une mission d'inspection parcourt un certain nombre de départements français en vue d'évaluer les effets de l'APA. Un rapport d'évaluation des différents partenaires était en outre prévu par la loi avant le 30 juin 2003.
L'APA coûtera cette année 3,7 milliards d'euros. Par rapport à 2002, environ 1,2 milliard d'euros de dépenses supplémentaires - même si ce chiffre fait l'objet de controverses - est envisagé cette année. Etat et départments sont appelés à pourvoir cette somme aux deux tiers, le Gouvernement ayant fait le choix de reporter 400 millions d'euros à la charge des bénéficiaires et d'emprunter les 400 millions manquants.
L'objet du texte qui nous est soumis est donc de définir par quels moyens ces 400 millions d'euros vont être confisqués aux allocataires de l'APA.
Les mesures techniques que vous envisagez, ajoutées aux mesures prises par décret, contribueront à ce que soient modifiées l'intention et la forme de l'APA. Votre propositon est claire : la modification de l'APA passe par sa réduction pure et simple.
A notre avis, on ne peut pas justifier la remise en cause d'une allocation de ce type au seul motif que sa montée en charge a été plus rapide que prévu. Dire que le coût exact de l'APA en 2003 était prévisible dès 2001 relève, monsieur le secrétaire d'Etat, de l'insincérité, sinon de l'immodestie.
Je vous rappelle en outre la clause de rendez-vous énoncée par Daniel Vaillant à l'occasion des assises des présidents de conseils généraux de Rodez en 2001, qui prévoyait une rencontre institutionnelle officielle dès 2002 pour constater les effets de la montée en charge de l'APA sur les financements.
La proposition qui nous est soumise n'est pas sans rappeler la sujétion des objectifs sociaux aux objectifs comptables, à laquelle le Gouvernement s'adonne en tous domaines. La logique de sauvegarde que vous revendiquez n'est pas crédible. C'est bel et bien au choix d'un début de démantèlement que vous nous invitez.
Avant d'en venir à l'examen du texte qui nous est proposé, je veux apporter une clarification d'importance quant à son origine. Je ne peux pas laisser dire, comme cela est pourtant suggéré par la rédaction de votre exposé des motifs, que la révision que vous proposez est le fruit d'un compromis unanime avec les présidents de conseils généraux. Si une concertation a effectivement eu lieu, elle n'a produit aucun consensus, ni entre le Gouvernement et l'Assemblée des départements de France ni entre les présidents de conseils généraux eux-mêmes. Les réformes envisagées ne peuvent se réclamer d'une quelconque unanimité entre représentants des départements et représentants du Gouvernement.
Les conclusions retenues sont les conclusions de quelques-uns...
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. De la majorité !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Peut-être la Dordogne ne veut-elle rien ?
M. Bernard Cazeau. De la majorité certes, mais pas de l'unanimité !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. La démocratie, c'est la majorité !
M. Bernard Cazeau. Ce sont les conclusions de la majorité !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On a bien du mal à corriger toutes les erreurs du passé !
M. Bernard Cazeau. Je ne m'offusquerai donc pas de remarquer que les conclusions retenues reprennent avec une étonnante fidélité les projets d'inspiration gouvernementale qui nous sont distillés depuis quelques mois.
M. Jean-Pierre Sueur. Eh oui !
M. Roland Courteau. C'est clair !
M. Bernard Cazeau. Les objectifs affichés par la proposition de loi de M. de Brossia et de quelques-uns de ses collègues sont triples : restreindre la dépense d'APA aux dépens de ses bénéficiaires, renforcer à des fins dissuasives les règles d'utilisation des allocations versées et satisfaire à l'engagement de l'Etat de financer un tiers de la dépense nouvelle rencontrée en 2002 par le recours à l'emprunt. Il ne l'a pas dit comme cela, mais c'est la vérité. Ces intentions ne soulèvent aucun assentiment de notre part. Elles s'apparentent, selon nous, à des mesures ambiguës, régressives et, en ce qui concerne l'emprunt, je dirais, précaires.
Analysons les quatre principaux articles.
L'article 1er de la proposition de loi vise à redéfinir la date d'ouverture des droits à l'APA. Ces mesures ne sont pas, comme l'affirment pourtant leurs auteurs, des simplifications ; elles sont bel et bien des coupes claires. Renvoyer le versement de l'aide à la date de notification par le président du conseil général revient à faire perdre d'emblée, au minimum, deux mois d'allocation aux bénéficiaires - Guy Fischer l'a d'ailleurs dit - car il est peu probable que le traitement administratif et médical de ces dossiers soit inférieur à ce délai. La perte sera d'autant plus importante - surtout si j'en crois la proposition de M. Adnot, qui envisageait de moins pénaliser les GIR 1 que les GIR 4 - que la dépendance sera plus forte.
Il est vraisemblable que l'usage fait de cette prétendue « souplesse administrative » sera différent selon les départements, ce qui placera les allocataires dans des situations dissemblables. C'est le principe même de la continuité territoriale de l'APA qui se trouve ainsi reconsidéré.
Les articles 2 et 3 contiennent aussi les germes d'un traitement différencié des bénéficiaires de l'APA. Leur rédaction laisse en effet entrevoir la possibilité d'interprétations diverses variant selon les velléités de contrôle des administrations départementales et selon les objectifs des conseils généraux. Personne n'est dupe de cette démarche, qui vise à la réduction tendancielle, sous l'effet du contrôle, du niveau des plans d'aide sollicités par les personnes dépendantes.
Contrôler est chose normale.
M. Philippe Nogrix. Bien sûr !
M. Bernard Cazeau. Mais contrôler pour dissuader, en la matière, est pernicieux. (M. Philippe Nogrix proteste.)
Je ne néglige pas l'importance de la bonne utilisation de l'argent public, loin s'en faut ; je crains néanmoins que le signal que vous souhaitez donner, monsieur le secrétaire d'Etat, ne soit un signal négatif. Rappelons tout de même que l'utilisation des plans d'aide est d'ores et déjà soumise à la production de justificatifs et fait l'objet d'un examen attentif par les services sociaux des départements. Je doute d'ailleurs, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous trouviez là les millions d'euros que vous espérez économiser. Et si vous acceptez de calculer la différence, vous pouvez dès maintenant rechercher cet argent dans votre budget pour l'année prochaine, ou dans celui du ministère des finances.
M. Dominique Braye. Avec ce que vous nous avez laissé !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Nous n'avons pas eu la croissance, nous !
M. Bernard Cazeau. L'article 4 de la proposition de loi ne va pas sans soulever quelques inquiétudes, monsieur le secrétaire d'Etat.
Vous proposez que la participation de l'Etat au financement de l'APA pour 2003 s'effectue grâce aux ressources provenant d'un emprunt. Cette idée témoigne de l'urgence des mesures qu'il vous faut aujourd'hui prendre en raison de votre inaction d'hier. Car vous n'êtes pas arrivé au gouvernement il y a trois mois !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Non, il y a six mois !
M. Bernard Cazeau. N'aurait-il pas mieux valu proposer dès 2002 un abondement du FFAPA qui aurait été de nature à couvrir les dépenses de 2003, dont nous savions tous pertinemment qu'elles progresseraient avec vigueur ? Vous ne pouvez continuer de vous défausser lourdement sur le gouvernement précédent du reproche d'imprévision !
M. Dominique Braye. Vous n'aviez même pas prévu le financement !
M. Bernard Cazeau. L'empressement conduit aujourd'hui le Gouvernement à emprunter pour financer une allocation sociale, ce qui, comme l'a très justement dit M. Mercier, rapporteur pour avis de la commission des finances, est loin d'être recommandé par les critères orthodoxes de la gestion des finances publiques.
Mais le plus grave est bien entendu que les charges liées à l'emprunt soient inscrites au titre des dépenses du FFAPA. Soit le FFAPA aura à en assurer le remboursement annuel au détriment des dotations versées au département, soit, comme vous le préconisez, c'est le budget de l'Etat qui en assurera, d'une manière ou d'une autre, les annuités. Sur cette dernière affirmation, nous ne sommes aujourd'hui qu'au stade des effets d'annonces.
En fait, la dotation du FFAPA par l'emprunt est une mesure imprécise, voire précaire.
Enfin, en ce qui concerne les mesures de réduction que vous souhaitez prendre par décret, je veux affirmer ici à quel point elles me paraissent injustes et cyniques.
L'élévation du ticket modérateur à son sommet n'est pas un inconvénient, c'est son extension à sa base qui pose un grave problème de justice sociale.
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !
M. Bernard Cazeau. Est-on trop riche, monsieur le ministre, lorsqu'on touche une retraite comprise entre 623 et 949 euros par mois, pour bénéficier d'une APA complète ? La collectivité nationale est-elle à ce point appauvrie depuis votre entrée en fonction (Protestations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste)...
M. Louis de Broissia. Oui, par vous !
M. Bernard Cazeau. ... qu'il lui faut supprimer l'exonération de participation aux dépenses dont bénéficiaient jusqu'alors les petits retraités ?
M. Dominique Braye. Il ose tout !
M. Bernard Cazeau. Laissez-moi poursuivre, messieurs !
Je ne le crois pas. J'en veux pour preuve les centaines de millions d'euros de cadeau fiscal que le Gouvernement auquel vous appartenez vient de consentir aux contribuables assujettis à l'impôt de solidarité sur la fortune et qui sont autant de carences pour les finances publiques. On ne peut dignement pas, monsieur le secrétaire d'Etat, crier à la faillite lorsqu'il s'agit de financer une mesure sociale et alléger en toute candeur l'impôt des privilégiés. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
N'avez-vous pas, messieurs de la majorité, l'impression de faire payer aux vieux ce que vous consentez aux riches ? (Protestations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. Michel Moreigne. Très bien.
M. Dominique Braye. Facile !
M. Charles Revet. Quelle démagogie !
M. Dominique Braye. Pour une caricature, c'est fort !
M. Robert Bret. C'est la vérité !
M. le président. Mes chers collègues, ne vous laissez pas impressionner par des formules. Ecoutons en toute quiétude.
M. Jean-Pierre Sueur. Excellente formule !
M. Jean-Pierre Fourcade. Je la reprendrai.
M. Bernard Cazeau. Moi non plus, je ne me laisserai pas impressionner par les cris que j'entends venant du fond de cet hémicycle !
Pour terminer sur ce point précis, je veux enfin souligner le caractère pernicieux de la logique du Gouvernement : décréter que les allocataires devront en moyenne s'acquitter de 12 % du montant de l'APA contre 5 % auparavant poursuit un objectif non avoué.
Vous postulez, sans le formuler comme tel, que le renchérissement du coût des plans d'aide permettra de diminuer la consommation de soins. Au fond, votre souhait est que les bénéficiaires de l'APA revoient leurs besoins à la baisse. En cela, vous contestez l'utilité sociale de l'allocation et vous l'assimilez à une dispendieuse libéralité publique.
De mon point de vue, l'APA n'est ni trop, ni pas assez généreuse. Elle est tout simplement juste et c'est à cette justice-là que vous vous en prenez aujourd'hui.
Je vous mets, de plus, en garde contre les effets pervers de cette décision : moins d'APA aujourd'hui, c'est dès à présent moins de prévention en matière de dépendance. C'est moins d'emplois d'aide à domicile demain et c'est plus de dépenses de santé, notamment hospitalières, après-demain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Bernard Cazeau. Pour conclure, nous sommes persuadés que cette proposition de loi est le premier acte du démantèlement de l'APA.
L'allocation revue et corrigée par vos soins sera moins généreuse. Elle sera socialement moins juste. Elle introduira l'iniquité entre les citoyens qui en bénéficient.
En fait, la proposition de loi que vous nous soumettez aujourd'hui, vous l'avez dit, monsieur le rapporteur, est un texte de circonstance. Elle n'est destinée qu'à trouver les financements permettant de passer l'année - un certain nombre d'entre vous l'ont dit - et non à régler le problème.
Au-delà, vous avez déjà en tête la révision complète de l'APA, qui achèvera de la démanteler totalement. Certains n'en font pas mystère et tracent déjà des pistes, les uns vers une assurance dépendance, les autres vers l'impôt. Bref, il vous reste encore à vous mettre d'accord et à affiner une loi sur la dépendance selon vos critères habituels, qui tournent souvent le dos à la solidarité intergénérationnelle, laquelle fonde, pour nous, le pacte républicain.
M. Dominique Braye. Qu'ont-ils fait !
M. Bernard Cazeau. Vous avez compris que nous nous opposerons, avec la plus grande fermeté, à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous vous étiez mis d'accord sur rien !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, n'étant pas président de conseil général, je me demande si je peux intervenir dans ce débat !
Plusieurs sénateurs de l'UMP. Oui !
M. Emmanuel Hamel. La sagesse va parler !
M. Jean-Pierre Fourcade. Mais s'agissant d'une prestation sociale qui est une avancée certaine, dont le financement repose presque entièrement sur une augmentation continue de la fiscalité locale, je me dois de le faire pour rétablir quelques vérités sur le sujet !
Lorsque nous avons débattu de l'APA - que de critiques avons-nous entendues sur la PSD que la commission des affaires sociales du Sénat avait mise en oeuvre parce qu'il fallait bien, puisque rien n'existait alors, s'occuper des problèmes de financement de la dépendance -, ...
M. Philippe Nogrix. C'est exact !
M. Charles Revet. Il faut le rappeler !
M. Jean-Pierre Fourcade. ... j'ai parfaitement compris que l'affectation de crédits du fonds de solidarité vieillesse au financement de l'APA, l'absence de règles précises pour le calcul et le reversement de cette allocation, l'absence de récupération sur succession et l'absence de critères suffisamment précis et clairs ne pourraient se traduire que par une augmentation différenciée de la fiscalité locale de chacun des départements en fonction du nombre de personnes âgées qui y résident et de leur état de richesse relative.
Tous les mécanismes de péréquation destinés à compenser les disparités de situation entre les départements - je pense au prélèvement opéré sur les départements considérés comme riches qui s'ajoute à la dotation globale de fonctionnement normale des départements considérés comme pauvres - sont, force est de le constater, bouleversés par l'institution et le développement de l'allocation personnalisée d'autonomie.
J'ai apprécié votre discours, monsieur le secrétaire d'Etat, et j'ai parfaitement suivi l'excellent rapport de M. Lardeux. Mais il faut savoir que le texte dont nous débattons est provisoire, car il ne vaut que pour l'année 2003. Le problème reste donc entier.
M. Guy Fischer. Voilà le langage de la vérité !
M. Bernard Cazeau. Très bien ! Tout à fait !
M. Jean-Pierre Fourcade. Ce texte provisoire prévoit un partage par tiers du surcoût de 1,2 milliard d'euros - excusez du peu ! -, entre l'Etat qui, du fait de ses contingences propres, ne peut que recourir à un emprunt au moins, il n'augmente pas le déficit pour l'instant et il ne touche qu'à l'autre critère de Maastricht, celui de la dette,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Absolument !
M. Jean-Claude Peyronnet. Plus tard !
M. Jean-Pierre Fourcade. ... les départements, qui feront un nouvel effort, lequel aura des conséquences sur les contribuables, le dernier tiers provenant d'économies réalisées prévues par le texte qui nous est soumis, mais qui, à mon avis, n'atteindront pas les 400 millions d'euros fixés. C'est pourquoi M. Adnot vous présentera un amendement prévoyant un abondement du Gouvernement. On verra quelle sera votre position, monsieur le secrétaire d'Etat.
Ces économies concernent, d'abord, le délai de deux mois, fusil à un coup, dont l'application ne sera que progressive et qui ne représentera pas une économie à long terme ; ensuite, le décret que nous avons examiné au comité des finances locales et qu'avaient présenté vos collaborateurs, monsieur le secretaire d'état, et dont l'application sera également progressive, puisqu'il ne concernera que les nouveaux entrants ; enfin, le contrôle de l'effectivité de l'aide, car nous savons tous qu'entraînés par la virtuosité de nos services sociaux, qu'il s'agisse des départements ou des grandes villes, de temps en temps, il faut remettre les choses en place pour éviter les dérapages.
Sur le fond, trois problèmes réels se posent et c'est en fonction des réponses que l'on y apportera que l'on verra si l'on peut soit modifier l'APA pour la conserver, soit changer de système.
Le premier de ces problèmes, c'est que la grille AGGIR, qui a été établie par des médecins et des gériatres tout à fait sérieux, est parfaitement claire quand on compare le GIR 1 et le GIR 6. Mais, bien évidemment, les GIR 3, 4 ou 5 soulèvent un certain nombre de difficultés, puisque la faculté d'appréciation du médecin et des travailleurs sociaux à l'échelon local peut très bien varier entre un GIR 3 et un GIR 4 et il est extrêmement difficile de vérifier quelle est la réalité de la situation de la personne âgée dépendante.
C'est la raison pour laquelle il me paraît urgent, monsieur le secrétaire d'Etat, de mettre en place de nouvelles études concernant la grille AGGIR. Mais je n'oublie pas que nous sommes en France et que, chaque fois qu'on peut faire compliqué, on préfère cela au fait de faire simple !
Cela dit, je crois que six classes, c'est trop. Il y a des personnes très dépendantes qui sont dans les établissements de long séjour, où nous trouvons vraiment des GIR 1, 2 et 3, et il y a des gens gênés dans leurs activités. Or le même système de prestation ne peut pas convenir à l'ensemble de cette graduation.
Par conséquent, il me semble que, dans l'avenir, en ce qui concerne ce premier problème de la grille AGGIR, il vaudrait mieux développer l'aide à domicile par l'aide ménagère en impliquant davantage les différents régimes de retraite, qui - personne ne l'a remarqué ici - se sont gentiment retirés du financement de l'opération. En effet, après avoir vu que c'était l'Etat et les départements qui allaient financer l'opération, les régimes de retraite, discrètement, n'ont plus participé au financement.
M. Dominique Braye. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Fourcade. Par conséquent, il faut renforcer l'aide ménagère et modifier la grille AGGIR, qui me paraît à l'heure actuelle présenter quelques difficultés.
Tout le monde connaît les problèmes des amblyopes, des aveugles, des gens qui souffrent de la maladie de Parkinson, etc. Par conséquent, monsieur le secrétaire d'Etat, il faut que vous mettiez en place un nouveau groupe médical, sérieux, qui définisse une différente grille.
Le deuxième problème, qui est encore plus complexe, concerne la distinction entre le plan d'aide aux personnes à domicile et le plan d'aide aux personnes en établissement.
Il est clair que ce qui a compliqué le système, parce qu'il a été très difficile, là aussi, de trouver des solutions simples et claires compte tenu du point de départ et de l'innombrable complexité des tarifs, c'est le fait que, en s'en tenant à la tarification en trois parties dans les établissements - hébergement, soins et dépendance -, on a créé une complication effroyable. A l'heure actuelle, on ne peut plus comparer le coût du maintien à domicile et celui de l'hébergement en établissement.
La question que je me pose est de savoir si, lorsqu'on examinera le problème au fond, à la fin de cette année ou l'année prochaine, il ne faudra pas arriver à instaurer deux sortes d'aide pour financer les plans d'aide à la dépendance.
Pour ma part, je souhaite que les personnes âgées restent le plus longtemps possible à domicile. D'ailleurs, concrètement, dans nos villes, nous voyons bien que les gens restent à domicile jusqu'à quatre-vingt-cinq, quatre-vingt-six, quatre-vingt-sept ans. Dans l'établissement dont j'ai la responsabilité, l'entrée se fait à quatre-vingt-huit ans. Dans les maisons de retraite médicalisées, elle a lieu à quatre-vingt-trois, quatre-vingt-quatre ans. Il nous faut donc renforcer l'aide à domicile pour que les gens puissent rester chez eux et soutenir les familles qui ont à supporter les premiers effets de la dépendance.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la tarification à trois niveaux - hébergement, soins et dépendance - est un mauvais système, qui ne correspond pas à la réalité. On doit s'orienter vers un système plus simple qui comporterait, d'une part, la tarification de l'hébergement et, d'autre part, celle des soins nécessités par la dépendance réelle. C'est dans ce domaine que nous devons accomplir un certain nombre de progrès.
Le système, qui avait déjà fortement compliqué la mise en place de la PSD, a échoué surtout en établissement, car la tarification tripartite n'était pas adaptée ; tout le monde a pu le constater. C'est un sujet sur lequel nous devons réfléchir.
Le troisième problème a trait au fameux recours sur succession. Je trouve absurde que le recours sur succession pour l'aide sociale concerne les personnes à très faibles revenus, et non pas les gens qui, aux termes du nouveau décret, se situeront au-dessus de 14 000 ou 15 000 euros, et qui continueront de recevoir l'aide de 10 % prévue dans ce mécanisme.
Je trouve que nous faisons de l'antisocial.
En revanche, rétablir un prélèvement sur succession uniquement pour l'APA ne permettrait pas de régler la question, parce qu'il faudrait remettre en cause la totalité du système de récupération chaque fois que l'on verserait une aide sociale ou que l'on donnerait une prestation.
Je suggère de poser un principe simple : lorsque les gens ont versé une cotisation, par exemple pour l'assurance maladie, il ne faut pas mettre en place de système de récupération, au contraire, lorsqu'une prestation est attribuée sans aucune participation préalable, un système de recours sur succession doit être prévu. Il doit être d'un niveau relativement élevé, mais identique, qu'il s'agisse d'aide sociale à l'échelon départemental ou de prestation nationale, telle que l'APA. C'est une affaire compliquée, qui mérite réflexion ; M. Lardeux m'a fait cette réponse en commission et je l'en remercie.
Tels sont, me semble-t-il, les trois sujets importants qu'il importe d'étudier. Si nous n'arrivons pas à restructurer cette allocation après le dispositif transitoire que, bien entendu, je vais voter, parce que je crois qu'il y a le feu à la maison - 1,2 milliard d'euros, c'est quand même un montant sur lequel on ne peut pas faire l'impasse - nous serons obligés d'évoluer vers un système à l'allemande, avec un compte spécial, soit au niveau de l'assurance vieillesse, soit au niveau de l'assurance maladie. Il me paraît en effet inutile de créer un cinquième risque. (M. le secrétaire d'Etat fait un signe d'approbation.)
Pour moi, le bon système, c'est une cotisation généralisée à partir de cinquante ans pour tout le monde, quel que soit le régime et quelle que soit l'opération.
On pourrait ne pas verser la cotisation si l'on apportait la preuve que l'on est assuré par un régime spécifique dépendance.
Cela laisserait la liberté de choix, conformément à ce principe de responsabilité que nous voulons développer, car il faut sortir de la société d'assistance dont l'APA est vraiment une caractéristique. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Un système dans lequel existerait, au niveau de la caisse de retraite ou de la caisse d'assurance maladie, un compte spécial, alimenté par une cotisation à partir de cinquante ans, dont on pourrait être exonéré si l'on apportait la preuve de l'affiliation à un système d'assurance personnelle ou collective (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)...
Mme Michelle Demessine. Là, c'est clair !
M. Jean-Pierre Fourcade. ... me paraîtrait être une autre piste d'évolution si nous n'arrivions pas à règler les trois problèmes que j'ai évoqués.
Nous discutons aujourd'hui d'une avancée sociale incontestable, mais qui n'a pas été financée.
M. Philippe Nogrix. Voilà !
M. Jean-Pierre Fourcade. Or, dans un pays qui se trouve confronté, comme l'ont dit tout à l'heure nos collègues Philippe Adnot et Michel Mercier, à toute une série de défis extérieurs, une avancée sociale non financée appelle forcément des mesures de correction. Je souhaite que ces mesures de correction soient le plus limitées possible et que l'on réfléchisse aux trois vrais problèmes pour savoir si l'on conserve le mécanisme actuel ou si l'on change de système.
Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, c'est un dispositif provisoire que nous mettons en place, lequel est rendu nécessaire par l'imprévision de ceux qui ont instauré le système actuel. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste).
M. Dominique Braye. Absolument ! Bravo !
M. le président. La parole est à M. Philippe Nogrix.
M. Philippe Nogrix. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, que de débats, que de récriminations, que de positions diamétralement opposées a suscités l'APA !
L'APA, chacun le reconnaît - notre excellent rapporteur nous l'a rappellé -, a été trop rapidement proposée, mal étudiée, sans prendre le temps, notamment, de tirer les enseignements de la PED, puis de la PSD.
La conclusion ne s'est pas fait attendre, en particulier pour ce qui est du financement. Quelle imprévoyance, quelle aventure, quelles charges imposées aux conseils généraux ! Et pourtant, que constate-t-on sur le terrain ? Une formidable mobilisation des conseil généraux et leur grande capacité d'adaptation.
Mme Hélène Luc. Eh oui ! Mais ils ne sont pas recompensés !
M. Philippe Nogrix. Dès le 1er janvier 2002, ils ont répondu de façon très responsable et efficace.
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Philippe Nogrix. Les équipes médico-sociales ont instruit très rapidement les demandes déposées par les bénéficiaires potentiels. Elles ont élaboré les plans d'aide.
Mais la très mauvaise évaluation du coût effectuée par le précédent gouvernement a anéanti les chances de succès de cette allocation, qui était pourtant nécessaire car la solidarité entre les générations doit rester l'un des piliers de notre société.
Mais, pour autant, l'APA ne devait pas déséquilibrer les moyens de financement des conseils généraux, auxquels on avait déjà supprimé la vignette, les droits de mutation et une partie de la taxe professionnelle, sans leur avoir demandé leur avis.
Mme Hélène Luc. Il faut leur donner des moyens !
M. Jean-Claude Peyronnet. Il y a eu compensation !
M. Dominique Braye. A quelle hauteur ?
M. Philippe Nogrix. Comment compenser ? A quelle hauteur ? Pour ensuite bloquer définitivement le système, alors que les choses continuaient à évoluer sur les territoires ?
Comment, dans ces conditions, laisser quelques marges de manoeuvre aux présidents de conseils généraux pour assurer le développement de leur territoire ? Que de temps perdu pour essayer de réformer la tarification ! Quel échafaudage polytechnicien difficile à mettre en oeuvre de façon compréhensible pour, finalement, n'aboutir à rien !
M. Gilbert Chabroux. C'est trop !
M. Philippe Nogrix. N'aurait-on pas mieux fait d'utiliser les compétences afin de prévoir les conséquences financières de la réforme proposée ?
Mme Hélène Luc. Vous ne l'assumez pas !
M. Philippe Nogrix. C'était là le devoir d'un gouvernement responsable, qui créait un droit universel, laissant à une collectivité locale le soin de le financer. C'était une première !
Faire des avancées sociales, oui, nous le voulons tous, mais il faut en prévoir les retombées et savoir si le financement pourra en être assuré. Est-il besoin, à cette occasion, de rappeler, dans cet hémicycle, le coût exorbitant de la mise en place des 35 heures,...
M. Roland Courteau. On l'attendait !
M. Philippe Nogrix. ... dont on n'a pas fini de voir les résultats négatifs sur l'emploi : 30 milliards de francs, c'est autre chose que 400 millions de francs !
M. Roland Courteau. L'impôt sur la fortune, vous n'en parlez pas !
Mme Hélène Luc. Le problème est de savoir si vous voulez l'APA ou non !
M. Philippe Nogrix. Bref, l'APA de janvier 2002 est un grand gâchis face à ce qui aurait dû être une grande réforme bien engagée dans les dix-neuf départements expérimentaux de la PED et vu les premiers résultats de la PSD.
L'APA actuelle, c'est une accumulation de mécontentements. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Roland Courteau. C'est le contraire !
M. Philippe Nogrix. Mécontement dans les conseils généraux, qui ne peuvent répondre à la demande qu'en augmentant démesurément les impôts et en abandonnant certaines politiques facultatives.
Mme Hélène Luc. Il faut leur donner des ressources fiscales !
M. Philippe Nogrix. Mécontentement dans les associations prestataires, car le rythme de lancement de l'APA ne leur permet pas de répondre à la demande, notamment en raison du manque de professionnels formés et diplômés.
Mécontement chez les personnes âgées (Exclamations amusées sur les travées du groupe socialiste.),...
M. Roland Courteau. N'importe quoi !
M. Dominique Braye. Eh oui !
M. Philippe Nogrix. ... qui ne comprennent pas les réticences à mettre en oeuvre la loi et qui ne trouvent pas sur place les prestataires susceptibles de leur apporter une réponse aux plans d'aide. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Hélène Luc. Vous vous moquez du monde !
M. le président. Monsieur Nogrix, ne vous laissez pas détourner de votre propos !
M. Philippe Nogrix. Il aurait fallu provoquer un débat. Il aurait fallu prendre en compte les résultats des expérimentations en cours. Il aurait fallu prévoir la mise en place des plans de formation nécessaires. Il aurait fallu réformer de façon simple la tarification dans les établissements.
Mme Hélène Luc. Bien sûr ! Il faut le faire !
M. Philippe Nogrix. Rien de cela n'a été fait !
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Louis de Broissia. De façon très modérée !
Mme Hélène Luc. C'est à votre gouvernement de le faire ! C'est incroyable !
M. Philippe Nogrix. La proposition de loi qui nous est aujourd'hui présentée va permettre de ne pas assister à la mort programmée de l'APA. C'est une chance !
M. Roland Courteau. Vive la PSD !
M. Philippe Nogrix. Et j'en remercie les auteurs de la proposition de loi.
Je voterai, bien sûr, le texte (Ah ! sur les travées du groupe socialiste) , mais je reste sur ma faim.
Je vous sollicite, monsieur le secrétaire d'Etat, pour que, en prenant le temps, vous fassiez évoluer les textes, afin de transformer en positif ce qui risquait de s'inscrire définitivement dans le négatif.
Mme Michelle Demessine. Pas pour les personnes âgées !
M. Philippe Nogrix. Merci, monsieur le secrétaire d'Etat, de ne pas être revenu sur le non-recours sur succession. Merci d'avoir pris votre part de financement des surcoût non prévus. Merci d'avoir gardé le GIR 4,...
Mme Michelle Demessine. Ne parlez pas trop vite !
M. Philippe Nogrix. ... car, pour une fois, dans le domaine médico-social, on peut faire de la prévention en retardant efficacement l'entrée dans une dépendance trop forte. Mais il faudra sans doute définir deux stades dans le GIR 4.
Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, il vous reste à être innovant, inventif et persuasif. Je suis sûr que vous saurez l'être. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, il existe des avancées sociales sur lesquelles on ne peut revenir sans vouloir faire acte de régression. C'est singulièrement le sentiment que me laisse cette proposition de loi relative à la réforme de l'allocation personnalisée d'autonomie, réforme lancée dans la précipitation.
C'est une proposition de loi d'opportunité, en réponse aux demandes pressantes de certains conseil généraux. De plus, elle s'appuie sur une absence de bilan concret, et nous avons l'impression qu'on aurait souhaité que ce texte passe inaperçu.
Je crains que telle soit l'intention du Gouvernement, bien conscient qu'il s'attaque là à un fondement de notre société : la solidarité intergénérationnelle, une valeur plébiscitée par les Français lorsque le gouvernement de Lionel Jospin, s'appuyant sur le rapport Vieillir en France de Mme Paulette Guinchard-Kunstler, alors députée de la 2e circonscription du Doubs, avait présenté ce projet d'allocation visant à réformer la prestation spécifique dépendance, trop restrictive quant à ses destinataires en raison de la multiplication de conditions d'accès dissuasives.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Elle n'a pas été financée !
Mme Claire-Lise Campion. La création d'une allocation personnalisée permettant la prise en charge des personnes âgées n'a jamais eu votre faveur, mes chers collègues.
Alors qu'en 1991 le rapport parlementaire de Jean-Claude Boulard prônait le financement d'une allocation d'autonomie et de dépendance, il aura fallu attendre dix ans, durant lesquels se sont succédé de nombreux textes : le projet de loi de Pierre Bérégovoy en 1992, la proposition de loi de René Teulade et de Laurent Cathala, fin 1992, le projet de loi de Colette Codaccioni en 1995, abandonné en 1996 avec la présentation du plan Juppé sur la sécurité sociale, pour aboutir, en 1997, au Sénat, à la loi instaurant la PSD, dispositif créé par et pour les conseils généraux, mesure dont nous savions déjà, à l'époque, qu'elle serait vécue comme un recul.
Ce système, plus économique pour les départements, mettait fin à l'allocation compensatrice pour tierce personne et instituait le recours sur succession.
Personne ne regretta donc la disparition de la PSD, qui n'avait su engendrer que déception et insatisfaction. Les chiffres sont là pour nous en convaincre, si besoin était : 135 000 personnes percevaient la PSD, 40 000 l'allocation compensatrice pour tierce personne, alors que le nombre de personnes âgées en perte d'autonomie, nécessitant une assistance permanente ou régulière, est estimé à environ 800 000.
L'allocation personnalisée d'autonomie a le mérite de faciliter la vie au quotidien de plus de 460 000 personnes âgées, là où la PSD ne profitait qu'à 135 000 d'entre elles.
La loi de 2001 a engagé, de plus, une véritable modernisation des services aux personnes âgées dépendantes, résidant chez elles ou en établissements, pour que ces personnes bénéficient d'une meilleure qualité de prise en charge. Elle a ainsi révélé l'existence d'un véritable « corps social » pourvoyeur d'emplois dans le domaine de l'aide à domicile, à la limite - ou à la veille - de l'économie marchande.
Or les auteurs de la proposition de loi qui nous est soumise aujourd'hui ne semblent s'attacher qu'à des données comptables, refusant d'admettre l'amélioration de la vie des personnes âgées dépendantes qu'a permise l'APA. Quant à ces données comptables, leur véracité est largement discutable.
Bien sûr, cette prestation a un coût. Vous nous reprochez, à tort, le manque de financement et l'imprévoyance du précédent gouvernement.
M. Jean-Pierre Fourcade. A juste titre !
Mme Claire-Lise Campion. Avant tout, permettez-moi de me réjouir du succès que remporte cette allocation.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Combien d'argent le précédent gouvernement y a-t-il consacré ?
Mme Claire-Lise Campion. C'est bien la preuve qu'un réel besoin existait. Et l'ancien gouvernement n'a jamais caché que des ajustements financiers seraient nécessaires.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Combien ?
Mme Claire-Lise Campion. Lors des débats, en 2001, le Gouvernement précisait : « Les chiffres valent pour les deux premières années. Le Gouvernement est conscient que les estimations sur lesquelles il s'est fondé mériteront d'être affinées, en fonction du nombre de personnes qui auront effectivement accès à l'allocation d'autonomie, et la loi prévoit donc un bilan en juin 2003. »
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. A cette échelle, ce n'est plus de l'affichage !
Mme Claire-Lise Campion. « Nous avons l'honnêteté, était-il dit ailleurs, de reconnaître que nous nous situons dans une fourchette ; au moins nous sommes sincères avec le Parlement. En juin 2003, il s'agira, en fonction du bilan, de l'adapter au vu des évolutions ».
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat De 2,5 milliards d'euros à 4 milliards d'euros, quelle fourchette !
Mme Claire-Lise Campion. L'APA a répondu à une attente forte. Son coût est simplement proportionnel à son succès.
Il est donc bien clair, ainsi, que la proposition de loi qu'on nous présente aujourd'hui ne vient pas pallier un manque d'appréciation du gouvernement de gauche, comme on tente de nous le faire croire. Tout au plus répond-elle aux exigences de l'article 15 de la loi en vigueur !
En fait, la réforme de l'APA engagée a uniquement pour but de réaliser des économies au détriment des personnes âgées dépendantes.
Je m'étonne, en effet, de la précipitation avec laquelle on procède. Vous nous annoncez un besoin de 1,2 milliard d'euros en vous référant aux seuls chiffres et aux seuls dires de l'Assemblée des départements de France. C'est un peu léger ! (M. le secrétaire d'Etat s'exclame.) Vous faites peu de cas du rapport d'évaluation quantitative, qualitative et financière programmé dans la loi. Or ce rapport doit être rendu avant le 30 juin 2003.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Les budgets sont votés avant la fin du mois de mars !
Mme Claire-Lise Campion. Ce rapport aurait pu nous indiquer de façon très précise les mesures qu'il était nécessaire de prendre.
De la même manière, vous laissez planer l'ambiguïté sur le différentiel entre le nombre de demandes d'APA comptabilisées à ce jour, qui est, en effet, de l'ordre de 800 000, et le nombre d'allocations effectivement servies. Or, selon les dernières statistiques du ministère, le nombre d'allocations effectivement versées était de 469 000 à la fin de l'année dernière.
Les flux de demandes se sont évidemment fortement réduits au cours du dernier trimestre 2002, ce qui n'a pas empêché l'ODAS, l'Observatoire national de l'action sociale, de publier récemment des prévisions dans lesquelles il estime à 950 000 le nombre de bénéficiaires potentiels en 2003. Il ne faut pas jouer impunément avec les chiffres ! Il faut être juste !
Le but du Gouvernement est de faire des économies. Ainsi, d'un côté le Gouvernement réforme à coup de décrets. Introduit lors du comité des finances locales qui s'est tenu début février, ce texte règlementaire prévoit une participation des personnes âgées revue à la hausse, notamment pour celles qui, parfois isolées, veulent légitimement rester chez elles plutôt que vivre en établissement. Cette contribution sera demandée à partir de 623 euros mensuels et non plus 949 euros, comme c'était prévu dans la loi, elle sera au maximum de 90 % du montant de l'aide, contre 80 % jusqu'à présent.
En parallèle, et je tiens à le redire après mon collègue Bernard Cazeau, l'aide aux établissements, prévue par la précédente loi, n'est pas reconduite par le gouvernement actuel. La suppression des crédits d'assurance maladie en 2003, votée par le Parlement à hauteur de 183 millions d'euros, remet en cause l'existence même des conventions tripartites,...
M. Guy Fischer. Eh oui !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce n'est pas le débat !
Mme Claire-Lise Campion. ... dont l'objectif essentiel était d'assurer l'amélioration de la qualité des prestations de soins et la prise en charge des personnes âgées par un personnel formé et diplômé.
D'un autre côté, nous est soumise cette proposition de loi dont le montage financier est vraiment très flou.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Moins flou que le financement de l'APA...
Mme Claire-Lise Campion. Ces réponses ne sont vraiment pas à la hauteur des enjeux et de l'ambition que notre pays s'est donnée, à savoir faire de la solidarité intergénérationnelle une valeur fondatrice.
Avec cette réforme, les personnes âgées seront condamnées à financer davantage leur dépendance qui, sauf preuve contraire, n'est pas le résultat de choix personnels. C'est donc bien à la solidarité nationale et, plus justement, départementale, de répondre.
Alors, comment ne pas être choqué par les choix du Gouvernement et des parlementaires de la majorité, qui rapportent tout à une vision comptable ?
M. Dominique Braye. Ce n'est pas votre cas ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On sait qu'au PS on rase toujours gratis !
Mme Claire-Lise Campion. Dès l'article 1er, le ton est donné. En modifiant la date d'ouverture des droits à l'allocation, le texte retarde, de fait, le moment où la personne âgée pourra bénéficier de l'APA. Deux mois de délai supplémentaires, ce sont des centaines d'euros d'économies. Voilà une judicieuse manoeuvre pour faire des économies au détriment d'éventuels bénéficiaires, et une subtile réponse aux pressions de conseils généraux « amis ».
Ensuite, avec les articles 2 et 3, c'est la suspicion jetée sur les bénéficiaires que l'on prône. Cette notion de contrôle a posteriori est purement gratuite, puisque le texte précédent prévoyait déjà un suivi des dossiers et un ajustement de l'aide selon l'évolution des situations.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est la justice et l'équité !
Mme Claire-Lise Campion. Quant aux contrôles auprès des services et des administrations, ils reprennent les bonnes vieilles méthodes en vigueur avec la prestation spécifique dépendance : un vrai retour en arrière, loin des valeurs modernes et progressistes véhiculées par l'APA en 2001 !
Au total, je le répète, par ces mesures, le Gouvernement met la main sur plusieurs centaines de millions d'euros d'économies.
L'article 4, lui, prévoit un emprunt à hauteur de 400 millions d'euros. Or le recours à l'emprunt est une méthode discutable.
Comment nous faire croire à une prise en charge, à parts égales, du coût de l'APA entre l'Etat, les départements et les bénéficiaires ? Seuls ces derniers ont, actuellement, dans le cadre de cette proposition de loi, le couteau sous la gorge. L'effort de l'Etat est invisible, celui des conseils généraux difficilement vérifiable.
Et que dire de la pérennité du financement qui nous est proposé ? Il s'agit, je vous le rappelle, d'un emprunt exceptionnel dont le remboursement reste flou. Vous arguez d'une augmentation des ressources de ce fonds, mais, là encore, ce ne sont que supputations et renvois à des décrets ou à un débat ultérieur.
Avec cette proposition de loi, nous faisons un saut dans le passé. En 1996 et en 1997, l'opposition de l'époque n'a eu de cesse de dénoncer les graves imperfections de la PSD. En 2003, nous avons, nous, le devoir de fustiger un projet qui y revient de façon masquée : nous le devons aux personnes âgées et aux familles qui les entourent, qui ont pu, grâce à l'APA, améliorer leur quotidien.
L'APA a été voulue comme un droit universel, objectif et personnalisé, dans l'intention de remédier aux disparités et aux inégalités départementales. Vous en faites une mesure discriminatoire. Nul doute, alors, que vous obtiendrez un « retour sur investissement ».
Confrontées à ces nouvelles directives, les personnes âgées et leur famille hésiteront à faire une demande d'APA. Comme avec la PSD ! Il ne vous reste plus, alors, qu'à revenir sur le recours sur succession - nous y arrivons aujourd'hui - et à priver du bénéfice de l'APA les personnes en GIR 4 !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous voulez protéger les riches ?
Mme Claire-Lise Campion. Cela consisterait tout simplement à réduire à néant toute politique de prévention et à interdire à une personne âgée, au motif qu'elle est dépendante, de transmettre son patrimoine.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure lors des questions d'actualité, le Gouvernement et sa majorité rognent un droit social universel pour le ramener aux dimensions d'une simple prestation sociale. Ce n'est pas acceptable ! Vous hésitez à substituer une solidarité nationale à des liens familiaux, ou à des relations de bon voisinage, pourtant de moins en moins fréquents.
Alors que l'APA était source de progrès social, votre réforme sera source de désillusion. De fait, nous ne pouvons nous rejoindre sur cette vision de l'aide aux personnes âgées dépendantes.
Vos choix confirment de nouveau votre volonté de mettre à bas toute l'avancée sociale mise en place par le gouvernement de gauche. Après les emplois-jeunes, la loi de modernisation sociale, la CMU, c'est l'APA qui est la cible de votre politique passéiste. Je le regrette ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Michel Moreigne.
M. Michel Moreigne. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, si le rapporteur général du budget était là, il nous dirait que nous examinons un texte puisé « à bonne source » : le premier signataire est notre excellent collègue de Côte-d'Or !
Force est de constater que le Gouvernement n'a pas pu, ou n'a pas voulu - jusqu'à présent - résoudre le problème de financement de l'APA résultant, pour une large part, du succès de la mesure. Il faut rappeler qu'il a déjà eu plus de neuf mois pour s'attacher à un chantier de cette importance.
Il n'est pas possible non plus de soutenir trop fort que l'actuelle majorité ignorait que la loi prévoyait, au-delà de 2002, la révision d'un financement qui, initialement, ne valait que jusqu'en 2002.
Il n'est pas possible de gommer le fait que Daniel Vaillant, alors ministre de l'intérieur, avait, en 2001, annoncé aux présidents de conseils généraux la clause de revoyure, confirmée par Mme Florence Parly, ici-même, à ma demande, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2002, sur la base des dépenses constatées à la fin de l'exercice pour le financement de l'APA.
Pour chaque sénateur de bonne foi, il paraissait évident que, pour 2003, l'abondement du fonds de financement de l'APA serait nécessaire, sur la base d'un passage de 0,10 à 0,16 point de CSG.
Or, que nous propose-t-on aujourd'hui ? Des économies ! Chacun a pu s'exprimer, le groupe socialiste a donné son sentiment.
Nul n'ignore que les dépenses à la charge des conseils généraux courent jusqu'à l'expiration des contrats triennaux déjà signés et que, ainsi, les freins ne se révéleront efficaces que sur les seuls nouveaux contrats. En définitive, vous me l'accorderez, la probabilité est forte que ces « économies » soient répercutées sur l'aide sociale. Sans doute le caractère « récupérable » peut-il être attractif pour certains d'entre vous...
Quant à la recette, jugez-en : formellement interdite aux collectivités, qui ne peuvent emprunter pour fonctionner, elle est permise au fonds de financement de l'APA sous la forme d'un emprunt de 400 millions d'euros dont on ne peut que souhaiter, comme beaucoup et la plupart d'entre nous ici, que la charge soit financée par l'Etat, et donc incluse dans une prochaine loi de finances. A défaut, vous me l'accorderez tous, mes chers collègues, cette mesure signifierait réellement la fin du fonds de financement de l'APA.
Je veux bien percevoir un aspect nettement péréquateur à l'intérieur de l'article 4, et le fait, monsieur le secrétaire d'Etat, que ce soit un décret qui en limite le volume et qui fixe le curseur constitué par le ratio du taux d'effort - dépenses nettes d'APA sur potentiel fiscal - prêterait certes à l'optimisme pour les départements à faible potentiel fiscal et à pourcentage de personnes âgées élevé, comme le mien.
On ne peut néanmoins qu'être sensible, par ailleurs, à la préoccupation de la commission des affaires sociales - j'en rends hommage à M. Lardeux - qui ne souhaite pas modifier, pour le moment, en tout cas, le dispositif du GIR 4. Le GIR 4, je le rappelle, comporte dix critères et trois variables, ce qui fait un nombre de combinaisons mathématiques que je vous laisse calculer, mais c'est à la portée du mathématicien moyen que je suis !
Aussi, mes chers collègues, pouvez-vous comprendre sans difficulté que mon appréciation finale sera fonction de la réelle volonté de solidarité et de péréquation qui ressortira en définitive de ce texte.
Je suis certes sénateur de la Creuse depuis un certain temps - bientôt trente ans ! - et je suis aussi soucieux des intérêts de mon pays que de ceux de mon département. Je ne puis à l'évidence, vous l'avez compris, être totalement insensible au mécanisme de solidarité, que je prône moi-même depuis longtemps avec un certain degré d'obstination. Cependant, je regrette, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, qu'il ne soit prévu que pour cette seule année 2003, ce qui n'est pas encourageant pour la suite !
De plus, la simulation qui figure dans le rapport de notre collègue André Lardeux indique que mon département pourrait largement bénéficier de ce concours de solidarité. Certes, il s'agit d'un point positif. Cependant, je souscris complètement aux propos qu'ont tenus mes collègues du groupe socialiste et je constate avec eux, pour le déplorer, que c'est aujourd'hui le premier acte du démantèlement de l'APA. C'est inacceptable, et je ne puis y souscrire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais non !
M. Louis de Broissia. C'est un procès d'intention !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, il est important que je puisse apporter aux différents orateurs les réponses qu'ils attendent.
Je tiens, au préalable, à les remercier de leurs contributions et des éclairages souvent très intéressants qu'ils apportent au débat, en essayant de tracer devant nous des pistes pour l'APA.
Permettez-moi, tout d'abord, de préciser le cadre dans lequel le Gouvernement conçoit cette discussion. Comme je l'ai indiqué dans mon intervention liminaire, ce texte est issu d'une concertation avec des représentants des conseils généraux qui visait à remédier aux difficultés actuelles rencontrées pour le financement de l'APA.
Cette concertation a été remise en cause par certains. Or, que je sache, les conseils généraux participent pour les deux tiers au financement de cette allocation, le tiers restant étant financé par l'Etat par le biais du fonds de financement de l'APA, le FFAPA. Il est tout de même important que ceux qui contribuent à hauteur des deux tiers du financement puissent participer pleinement à la concertation !
Je précise que cette concertation a eu lieu avec l'ensemble des présidents de conseils généraux.
Ce texte ne peut manifestement pas avoir la prétention de tout régler ni celle de garantir définitivement le financement de la prestation. Nous l'avons tous souligné et, je le répète, il s'agit d'un texte d'urgence destiné à venir en aide - oui, à venir en aide - aux collectivités départementales, qui assurent aujourd'hui en moyenne les deux tiers du financement du dispositif.
L'urgence est d'autant plus grande que l'efficacité des mesures prévues dépend, pour 2003, de la rapidité de leur mise en oeuvre.
Réunis pour apporter une réponse immédiate à une situation urgente, ceux qui ont participé à la concertation de l'automne dernier ont souhaité privilégier une démarche en deux temps. Ils ont choisi de consacrer le premier temps à la recherche d'un financement complémentaire et d'aménagements générateurs d'économies et le second à un examen plus approfondi de la loi, conformément, d'ailleurs, au calendrier qu'elle prévoyait elle-même. Cet examen ne peut être efficace que s'il s'appuie sur une durée d'application suffisamment longue de la loi. Il nous faut du recul pour être en mesure d'apprécier les correctifs indispensables.
L'inspection générale des affaires sociales, l'inspection générale de l'administration et l'inspection générale des finances effectuent actuellement une évaluation d'ensemble du dispositif. Parallèlement, un comité scientifique procède à une expertise de la grille AGGIR.
Le Gouvernement pense qu'il est nécessaire d'attendre que l'ensemble de ces évaluations lui soit remis avant d'engager un débat plus approfondi sur le dispositif de l'APA. C'est la raison pour laquelle nous nous félicitons que le texte proposé ne bouleverse pas les équilibres actuels.
L'ambition est très forte puisque, avec le projet de décret sur le barème, il s'agit de sauvegarder l'APA en en garantissant le financement pour 2003, sans attendre le débat ultérieur sur le bilan global de la loi. Et vous savez très bien, mesdames, messieurs les sénateurs, vous qui avez voté cette loi, que son évaluation était prévue pour la fin de l'été. Nous allons y procéder. (Vives exclamations sur les travées socialistes.)
M. Gilbert Chabroux. C'est ce que nous réclamons !
M. Claude Estier. Nous n'arrêtons pas de vous le dire !
M. Bernard Cazeau. Nous ne cessons de vous demander cette évaluation !
M. Paul Blanc. Oui, mais il faut trouver l'argent !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Monsieur Cazeau, vous connaissez parfaitement les assemblées départementales, vous savez très bien qu'elles votent leur budget au plus tard le 31 mars et qu'il était donc indispensable de donner des assurances et de proposer des solutions à l'ensemble des présidents de conseils généraux avant cette date, sans attendre la réévaluation de la loi. Telle est la raison pour laquelle mes amis ont déposé ce correctif.
M. Louis de Broissia. Il le sait bien ! Il fait semblant !
M. Charles Revet. Ils sont incohérents !
M. le président. Mes chers collègues, laissons parler M. le secrétaire d'Etat ; tout à l'heure, vous aurez l'occasion de vous exprimer.
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Nous devons sauvegarder l'APA en conciliant une double exigence : permettre aux départements de maîtriser leurs dépenses et leur fiscalité, et répondre aux besoins réels.
Pour l'avenir, le Gouvernement s'engage, dans le cadre du groupe de travail qui réunit des représentants de l'Etat et de l'Assemblée des départements de France - et je réponds en partie à une préoccupation exprimée par MM. Adnot et Fourcade -, à réaliser d'ici à quelques mois un bilan des économies qui résulteront du dispositif dont nous discutons et du décret en cours d'élaboration ; à arrêter de nouvelles économies si ce dispositif devait ne pas permettre d'assurer celles qui sont prévues par l'accord, soit 400 millions d'euros en année pleine ; à tirer les conséquences du groupe de travail sur le GIR 4, dont les conclusions doivent être remises prochainement ; enfin, à examiner les modalités de facturation de l'APA en établissement ainsi que les relations avec l'assurance maladie.
M. Paul Blanc. Absolument !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Compte tenu du calendrier dans lequel s'inscrit ce texte et des engagements auxquels je viens de souscrire, je souhaiterais répondre plus particulièrement aux points que chacun d'entre vous a évoqués.
Je tiens, en premier lieu, à revenir sur les interventions de Mmes et MM. les sénateurs de l'opposition. Je suis étonné de voir avec quelle facilité la gauche se décharge - je vous l'ai déjà dit, madame Campion, à l'occasion des questions d'actualité - de la lourde responsabilité qui est la sienne, compte tenu de la situation dans laquelle elle a laissé plus particulièrement ce secteur.
M. Guy Fischer. Il ne fallait pas réduire l'ISF !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Je suis étonné par votre mauvaise foi. Vous pouvez vous cacher, monsieur Fischer, derrière des faux-semblants, singer la fausse vertu - vous en êtes maître - ou chercher à manipuler l'opinion publique (Absolument ! sur les travées de l'UMP), vous ne ferez pas oublier votre responsabilité, ni endosser par le Gouvernement actuel la situation regrettable que vous avez vous-même, par cette loi que vous avez adoptée sans en prévoir les financements, contribué à créer.
M. Claude Estier. Vous allez dire cela pendant combien de temps ?
M. Louis de Boissia. Cinq ans au moins !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Mesdames et messieurs, la démagogie à la petite semaine, les fausses annonces sont les ennemis les plus redoutables de la démocratie. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Bernard Cazeau. Quel argument méprisant !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Aristote disait de cette démagogie qu'elle est la forme la plus pervertie de la démocratie. Vous devriez en tirer la leçon.
M. Claude Estier. Aristote du pauvre ! (Sourires.)
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Les Françaises et les Français ne sont pas dupes. On ne peut impunément leur raconter n'importe quoi, leur vendre des raccourcis simplistes, inquiéter les personnes âgées, les tromper sur les mesures que nous prenons à leur égard.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Quand elles vont payer, elles vont comprendre ! Ce n'est pas la peine de le leur dire !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. C'est leur faire injure. Qu'auraient-elles payé si l'on n'avait pas pris ces mesures aujourd'hui ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. C'est vous qui allez les faire payer !
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. L'ISF !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Avec les financements que vous avez mis en place, madame, c'est leur faire injure et, avec elles, faire injure à tous les partenaires sociaux comme à tous les professionnels qui se sont associés à nos travaux !
Nous renforçons la lutte contre la maltraitance de nos aînés. Nous avons lancé un programme visant à mieux accompagner les personnes âgées atteintes de la maladie d'Alzheimer et leurs familles. Nous promouvons la solidarité entre les générations. Nous développons les droits des personnes âgées, en préservant leur liberté de choix et en adaptant au mieux les réponses à leurs besoins. Notre programme « Bien vieillir » va donner à chacun de meilleurs moyens de réussir son avancée en âge. Nous venons de revaloriser fortement le salaire des aides à domicile, pour des raisons de justice sociale et pour rendre ces métiers, qui sont essentiels, plus attractifs.
Tels sont quelques uns de nos axes d'action que vous avez trop vite oubliés. On a coutume de dire que, quand on a du culot, tout est permis !
M. Louis de Broissia. Très bien !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. En l'occurrence, vous faites preuve d'une montagne, d'un Himalaya de culot ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste. - Rires sur plusieurs travées de l'UMP.)
Ainsi, vous dites que nous provoquons la régression sociale.
M. Guy Fischer. C'est vrai !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Nous favoriserions les riches en réformant l'impôt de solidarité sur la fortune et nous reviendrions sur les prestations en faveur des plus humbles !
Mais laisser filer les déficits publics pour en reporter la charge sur nos enfants et nos petits-enfants, est-ce cela le progrès social ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Vous pouvez parler des déficits publics !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Contraindre les personnes qui créent de l'emploi à s'expatrier, est-ce cela le progrès social ?
Et l'APA, mesure sociale s'il en est, qui est en train de la sauver ? C'est nous, et ce n'est pas vous !
M. Bernard Cazeau. En prenant dans la poche !
M. Dominique Braye. Heureusement que le culot ne tue pas, vous seriez tous morts !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Voilà, mesdames, messieurs de l'opposition, ce que je souhaitais vous répondre. Vous dites que nous nous attaquons aux plus pauvres, mais les mesures annoncées - nous l'avons répété à plusieurs reprises - ne les touchent pas. Près de 40 % des bénéficaires de l'APA, dont le revenu mensuel est inférieur à 623 euros, ne verseront demain, comme aujourd'hui, aucune participation...
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Et les autres ?
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. ... et 23 % verseront une participation de 1 % à 8,5 %. Telles sont les mesures que nous allons prendre !
M. Bernard Cazeau. Avec 4 000 francs, on est riche ?
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Alors, oublions nos critiques démagogiques et contradictoires. (Oh ! sur les travées du groupe socialiste.) Nous devons faire preuve de responsabilité, tous ensemble.
M. Guy Fischer. On vous le rappellera !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Les personnes en difficulté doivent être aidées.
Je souhaite maintenant revenir sur ce qu'ont dit plusieurs d'entre vous.
Monsieur Adnot, s'agissant du ticket modérateur, vous avez à juste titre souligné les inégalités qui subsistent entre les personnes âgées selon qu'elles vivent à domicile ou en établissement. Nous en avons conscience. Dans ce contexte, l'un des objectifs de la modification du barème de participation vise à rééquilibrer celle-ci.
Pour étayer vos propos, vous avez souligné, à revenus identiques, les écarts de participation selon les niveaux de dépendance. Pour un revenu de 940 euros, la participation du bénéficiaire de l'APA s'élève à 150 euros dans le groupe GIR 1, à 100 euros dans le groupe GIR 2 et à 45 euros dans le groupe GIR 4. Vous le savez, monsieur le sénateur, cette situation est liée avant tout à la différence des montants des plans d'aide.
Nous partageons votre souci d'équité.
Selon les conclusions de l'évaluation en cours, nous examinerons l'opportunité de faire évoluer si nécessaire le système, tout en veillant à mettre en place un dispositif lisible, simple et équitable.
Monsieur Fourcade, vous avez, à juste titre, posé les termes de la réflexion que nous devons poursuivre sur le financement des établissements. Trois sections sont aujourd'hui différenciées : l'hébergement, le soin, la dépendance. Certes, vous l'avez dit, c'est un système complexe.
M. Charles Revet. Très complexe !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Nous aurons deux rendez-vous afin de faire évoluer, si nécessaire, le dispositif. Une évaluation de l'APA à domicile et en établissement est actuellement en cours. Votre assemblée en sera saisie au second semestre et il conviendra d'en tirer les enseignements.
Le second rendez-vous est celui de la décentralisation, pour saisir peut-être l'opportunité de simplifier les rôles des différents acteurs.
Monsieur Cazeau, contrairement à votre affirmation, notre ambition n'est pas de démanteler l'APA, et vous le savez. J'ai noté que vous contestiez une méthode de concertation à laquelle vous avez pourtant participé. L'une de vos critiques m'a plus particulièrement surpris, parce qu'elle témoigne d'une certaine défiance à l'égard de la décentralisation. Pour notre part, nous faisons confiance aux départements pour organiser le contrôle de l'effectivité. Nous entendons simplement leur donner les outils nécessaires à l'exercice de leur mission.
Monsieur Cazeau, vous avez dit que nous étions là depuis neuf mois,...
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat ... et c'est très bien pour les Français ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
Vous vous êtes demandé pourquoi j'attendais pour accepter les propositions de correctifs faites par certains de vos collègues. Mais, monsieur Cazeau, comment aurions-nous pu faire des évaluations autrement qu'à la fin de l'année 2002 ? Vous savez très bien que nous avons dû attendre le compte administratif des départements.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il faut souvent neuf mois pour concevoir quelque chose...
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. C'était en décembre et nous sommes au mois de février. Nous n'avons pas perdu trop de temps ! Je pense donc que cette critique était un peu déplacée.
MM. Dominique Braye et Louis de Broissia. Légère, comme le reste !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Monsieur Jean Boyer, votre intervention était empreinte de beaucoup de sensibilité et d'humanité. Vous avez souligné combien l'accompagnement personnalisé des personnes âgées était important, notamment pour rompre leur isolement. A juste titre, vous avez relevé l'importance de la formation du personnel ; j'y souscris pleinement.
Je voudrais remercier mon ami Louis de Broissia et les collègues cosignataires de cette proposition de loi, car ils ont fait preuve de pragmatisme. Oui, c'est cette loi qui, une fois adoptée, permettra de sauver l'APA en sauvegardant la mesure sociale et en conservant le caractère universel de celle-ci.
Madame Campion, oui, nous conserverons le caractère universel de cette loi.
Monsieur Adnot, concernant l'aide aux départements les plus en difficulté, les règles actuelles de répartition du FFAPA répondent à trois objectifs.
Le premier objectif est de compenser une partie du coût de l'APA, justifiant le critère de répartition fondé sur le besoin évalué par le nombre de personnes âgées de plus de soixante-quinze ans pour 2002-2003, puis les dépenses mandatées d'APA.
Le deuxième objectif est d'obtenir un effet péréquateur, d'où la prise en compte du critère de capacité contributive, c'est-à-dire le potentiel fiscal et le critère des charges à caractère social symbolisé par le nombre de bénéficiaires du RMI.
Le dernier objectif vise à tenir compte des différences éventuelles de montée en charge selon les départements, d'où le critère de majoration de la participation pour les départements qui ont une dépense par personne âgée de plus de soixante-quinze ans supérieure de 30 % à la moyenne nationale et la fixation d'une limite à la participation du FFAPA égale à 50 % de la dépense totale d'APA.
Malgré un système complexe et d'ores et déjà fortement péréquateur, la charge nette et résiduelle d'APA rapportée au potentiel fiscal des départements les plus pauvres reste élevée. Quelques données de synthèse en attestent.
Les critères actuels ont un effet péréquateur. Le concours par habitant du FFAPA en 2002 s'élève en moyenne à 16,31 euros. Il varie de 3,19 euros pour les Hauts-de-Seine à 39,05 euros pour la Creuse, monsieur le sénateur.
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Pour autant, la charge résiduelle nette d'APA, déduction faite du concours du FFAPA rapporté au potentiel fiscal de chaque département, présente des écarts importants. Alors que le taux moyen national pour 2003 est de 12,02 %, il varie de 3,50 % dans les Hauts-de-Seine à 51 % pour la Creuse.
C'est la raison pour laquelle, pour aider les départements les plus en difficulté à faire face à la montée en charge de l'APA en 2003, nous préconisons l'octroi d'un concours spécifique et exceptionnel qui ne pourrait excéder 20 % de l'emprunt. Il pourrait être envisagé en faveur des collectivités dont le taux d'effort fiscal serait supérieur à un seuil réglementairement fixé.
Une simulation a été réalisée sur la base des données suivantes : dotation à répartir, 40 millions d'euros ; seuil d'effort fiscal théorique, charge nette d'APA à rapporter au potentiel fiscal ou ouvrant droit au concours exceptionnel de 21 %. Avec ce critère, vingt-cinq départements bénéficieraient d'une dotation qui leur permettrait de faire face à leurs charges. Ce serait une mesure de solidarité.
Je n'ai pas éludé la question du recours sur succession, car il est important que nous en parlions, et je réponds, là aussi, à une préoccupation de M. Philippe Adnot.
Cette question difficile pose le problème du partage entre la solidarité familiale et la solidarité nationale. Elle traverse, mes chers collègues, les différentes sensibilités politiques. En effet, lorsque vous avez débattu de cette loi, vous y aviez songé.
M. Paul Blanc. Tout à fait !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Des députés, des sénateurs étaient favorables au recours sur succession.
M. Henri de Raincourt. Il était prévu dans le texte !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Tous les choix sont respectables. Pour ceux qui y sont favorables, le recours sur succession est nécessaire, car il permet de placer la solidarité familiale au premier plan. La récupération sur succession responsabiliserait les familles en introduisant un arbitrage entre la solidarité familiale et la solidarité nationale.
Pour d'autres - de droite comme de gauche - l'argument avancé est celui de la justice sociale.
M. Paul Blanc. Tout à fait !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Compte tenu de sa construction, l'APA peut créer des inégalités entre un bénéficiaire disposant d'une pension de retraite élevée et d'un faible patrimoine, d'une part, et un bénéficiaire disposant d'une pension faible et d'un patrimoine important, d'autre part.
M. Adnot avance également l'argument d'égalité entre les bénéficiaires de l'APA à domicile et les personnes âgées accueillies en établissement. Ces dernières sont en effet soumises au recours sur succession dans le cadre de l'aide sociale à l'hébergement.
On entend aussi un argument de responsabilisation : l'automaticité de la prise en charge en fonction d'un niveau de dépendance et de ressources risque, pour certains, d'amoindrir les efforts de prévention de cette dépendance.
Je tiens pour ma part à évoquer quelques arguments défavorables à la réintroduction du recours.
M. Jean-Claude Peyronnet. C'est la question !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. C'est en effet une question importante et qui mérite discussion.
M. Bernard Cazeau. Oui, mais quelle est la réponse ?
MM. Claude Estier et Jean-Claude Peyronnet. Eh oui ! On attend la réponse !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. La réponse, messieurs les sénateurs, je vais vous la donner. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Patience !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Je voudrais pour ma part avancer quelques arguments contre la réintroduction du recours, après avoir - et c'était normal - pris en compte les arguments en sa faveur développés par d'autres.
Tout d'abord, le recours sur succession ne serait que d'un très faible rapport financier. D'une part, les 800 000 bénéficiaires actuels seraient exclus du champ de la mesure ; d'autre part, tout président de conseil général - je l'ai été pendant près de dix ans, et je l'étais encore il y a quelques mois - connaît les difficultés pratiques que soulève la récupération des sommes en cause.
L'argument de la solidarité familiale peut également être invoqué pour contester la réintroduction du recours. Cette solidarité se manifeste en effet déjà très fortement dans la prise en charge des personnes âgées dépendantes : 75 % des bénéficiaires sont à domicile et reçoivent une aide, au moins partielle, de leur famille, aide qui reste nécessaire malgré l'obtention de l'APA.
Pour justifier la réintroduction du recours sur succession, certains invoquent la situation de personnes très fortunées, dont le patrimoine est estimé à plusieurs millions d'euros, qui ont déposé une demande d'APA. Je ne suis pas insensible à cet argument, qui a souvent été invoqué, mais à côté de cela on préconise la fixation du seuil de recours à 100 000 ou à 150 000 euros, sommes sans rapport avec les patrimoines des plus fortunés.
A mes yeux, on ne se sert de cet argument que pour réintroduire le recours. En réalité, on cherche à créer un effet psychologique : on veut, par le biais du recours sur succession, dissuader ceux qui craignent pour leur modeste patrimoine de recourir à l'APA alors même qu'ils en auraient grandement besoin.
M. Dominique Braye. C'est du social, du vrai !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Je le dis haut et fort : une politique sociale qui tend à écarter de manière artificielle et infondée ceux qui en ont le plus besoin est une mauvaise politique, car elle ne respecte pas le principe d'égalité qui fonde notre République. (M. Louis de Broissia applaudit.)
L'argument de la responsabilité peut également être retenu pour contester l'opportunité de recours sur succession. L'instauration d'un recours ne manquerait pas de pénaliser les comportements d'épargne - l'acquisition d'un bien immobilier, par exemple - et favoriserait les cigales plutôt que les fourmis !
L'argument de la faible acceptabilité collective doit également être entendu. Le recours sur succession symbolise la prestation d'aide sociale. Dans l'opinion, il sera assimilé à un retour en arrière.
Enfin, une telle mesure ne traduirait pas la volonté d'une approche prospective de la prise en charge de la dépendance alors que celle-ci constituera un enjeu de société central dans le demi-siècle à venir du fait du vieillissement de la population.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Hubert Falco, secrétaire d'Etat. Pour toutes ces raisons, je ne suis pas favorable à la réintroduction du recours sur succession. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.