PRÉSIDENCE DE M. SERGE VINÇON
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le président du Conseil constitutionnel, par lettre en date de ce jour, le texte de la décision rendue par le Conseil constitutionnel sur la loi de programme pour l'outre-mer.
Acte est donné de cette communication.
Cette décision du Conseil constitutionnel sera publiée au Journal officiel , édition des lois et décrets.
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RAPPELS AU RÈGLEMENT
M. le président. La parole est à M. Paul Loridant, pour un rappel au règlement.
M. Paul Loridant. Monsieur le président, lors de la séance d'hier soir, nous avons eu un débat avec M. Gélard à propos de la position du Sénat relative au droit de vote des femmes. Je rappelle que ce débat avait lieu à propos de la retraite des personnes bénéficiant du PACS.
M. Jean Chérioux. C'est un rappel historique !
M. Paul Loridant. Sur ce sujet, le Sénat, hélas ! a toujours adopté une position conservatrice. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Après avoir effectué une recherche, je voudrais rappeler au doyen Gélard et à la majorité sénatoriale que le Sénat, chaque fois qu'il a été appelé à prendre position sur le droit de vote des femmes, a soit voté contre, soit décidé que cette question ne devait pas figurer à l'ordre du jour.
M. Jean Chérioux. C'était sous la IIIe République !
M. Paul Loridant. Le premier vote est intervenu en 1929,...
M. Bernard Murat. Non, en 1916 !
M. Paul Loridant. ... et le refus d'inscrire cette question à l'ordre du jour en 1936 !
(Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
M. Jean Chérioux. C'était le Front Populaire !
M. Paul Loridant. En 1936, la majorité du Sénat, je vous le rappelle, était conservatrice !
M. Jean Chérioux. Ah non !
M. Paul Loridant. Je rappelle donc, mes chers collègues, pour faire plaisir à notre éminent collègue M. Chérioux, qu'effectivement l'Assemblée consultative provisoire, en 1944, sur un amendement de M. Fernand Grenier, qui était au demeurant communiste (M. Guy Fischer opine), et à l'instigation du général de Gaulle, a instauré le droit de vote des femmes (MM. Alain Gournac et Laurent Béteille s'exclament) ...
M. Jean Chérioux. Elle n'a pas pu l'instaurer puisque c'était une assemblée consultative !
M. Paul Loridant. ... par cinquante et une voix contre seize et contre la majorité du Sénat conservateur !
M. Roger Karoutchi. Vive de Gaulle !
M. Dominique Braye. Maintenant, ce sont vous les conservateurs ! Vous ne voulez pas de réforme !
M. le président. La parole est à Mme Nelly Olin, pour un rappel au règlement.
Mme Nelly Olin. Quand j'entends les discours de mes collègues qui siègent sur les travées de gauche, particulièrement en ce qui concerne la défense des femmes, sincèrement, je le dis une nouvelle fois, je ne me reconnais pas dans ces propos.
Au Sénat, celles qui le veulent peuvent tout à fait trouver leur place en tant que femme. D'ailleurs, les femmes de gauche me semblent occuper une place confortable dans cet hémicycle.
Mme Nicole Borvo. Heureusement !
Mme Nelly Olin. Les femmes ont un rôle à jouer : quand on est capable de l'assumer, on le joue pleinement !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bien sûr !
Mme Nelly Olin. Je n'entends donc pas être défendue en tant que femme par ceux qui tiennent des discours tels que celui que je viens d'entendre ou que l'on entend depuis quinze jours. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. François Trucy, pour un rappel au règlement.
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste et du groupe CRC. Article 40 ! (Sourires.)
M. François Trucy. Monsieur le président, c'est le premier rappel au règlement que je fais en deux mandats ! (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.) Mais je pense que l'intervention de notre honorable collègue Paul Loridant tombe sous le coup de l'article 40 dans la mesure où, en prolongeant de manière oiseuse les débats, il coûte de l'argent à l'Etat. (Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
Mme Nicole Borvo. Quel niveau !
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RÉFORME DES RETRAITES
Suite de la discussion d'un projet de loi
déclaré d'urgence
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, portant réforme des retraites.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 71.
Chapitre III
Dispositions relatives au régime de base
des exploitants agricoles
- Art. additionnel après l'art. 70 (interruption de la discussion)
- Dossier législatif : projet de loi portant réforme des retraites
- Art. additionnel après l'art. 71
Article 71
M. le président. « Art. 71. - I. - L'article L. 731-42 du code rural est ainsi modifié :
« 1° Au 1°, les mots : "dix-huit ans" sont remplacés par les mots : "seize ans" ;
« 1° bis Le a du 2° est ainsi rédigé :
« a) Une cotisation due pour chaque chef d'exploitation ou d'entreprise, calculée dans les conditions définies au 1° ; »
« 2° Au b du 2°, les mots : "la majorité" sont remplacés par les mots : "seize ans". »
« II. - A l'article L. 732-34 du même code, les mots : "dix-huit ans" sont remplacés par les mots : "seize ans". »
« III. - Les dispositions du I et du II sont applicables à compter du 1er janvier 2004. »
La parole est à M. Gérard Le Cam, sur l'article.
M. Gérard Le Cam. L'article 71 traite de l'affiliation des aides familiaux dès l'âge de 16 ans au lieu de 18 ans au régime de base des exploitants agricoles, ce qui est plutôt une bonne mesure dans l'absolu, et que je tiens à souligner.
Naturellement, cette affiliation appelle de nouvelles cotisations à la charge du chef d'exploitation pour le compte de l'aide familial, cotisations nécessaires pour ouvrir des droits à pension proportionnelle et forfaitaire. Cela pose naturellement la question du revenu agricole et la capacité de cotisation dans le contexte actuel de l'agriculture.
Cette bonne mesure est malheureusement noyée dans la théorie générale de cette réforme des retraites que nous combattons, réforme qui va allonger la durée de cotisation des agriculteurs et augmenter le niveau de leurs cotisations, sans leur permettre une retraite décente, comparable - jusqu'à aujourd'hui - à celles du régime général, même si le pouvoir d'achat de celles-ci a déjà été largement amputé.
Pour positive qu'elle soit, cette mesure n'est pas à la hauteur des exigences et des attentes de la profession en matière de revalorisation des pensions de retraite. Il serait nécessaire de porter le niveau des retraites agricoles au moins à 85 % du SMIC. J'y reviendrai tout à l'heure. C'est une question d'équité et de justice sociales à l'égard de nos agriculteurs. La faiblesse de leurs régimes justifierait une revalorisation à l'égard des catégories à bas revenus qui bénéficient du minimum contributif.
Vous alignez donc le régime de base des exploitants agricoles sur le régime général, ce qui allongera la durée de cotisation des agriculteurs, qui exercent une activité dont on connaît pourtant le caractère pénible. Dans le même temps, vous les excluez de la possibilité de bénéficier d'une pension égale à 85 % du SMIC.
Le monde agricole ne sera pas dupe et saura faire la part des choses entre les quelques mesures positives contenues dans ce texte et la régression sociale qu'il implique.
C'est donc pour ne cautionner en rien cette réforme que nous demandons la suppression des différentes dispositions de cet article.
M. le président. Sur l'article 71, trois amendements restent en discussion commune, l'amendement n° 21, déposé par M. Michel Mercier, ayant été précédemment déclaré irrecevable.
L'amendement n° 706, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le I de cet article. »
L'amendement n° 707, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le 1° du I de cet article. »
L'amendement n° 708, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le 2° du I de cet article. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Ils ont été défendus.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Les amendements n°s 706, 707 et 708 visent à supprimer tout ou partie des dispositions du I de l'article 71 dont l'objet consiste à permettre, dès l'âge de 16 ans au lieu de 18 ans à l'heure actuelle, l'affiliation des aides familiaux au régime de base des exploitants agricoles.
Or cette mesure nous semble indispensable et elle est perçue comme un progrès dans le monde agricole. La commission est donc défavorable à ces trois amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Au début de l'examen de ce chapitre III, permettez-moi de rappeler dans quel esprit le Gouvernement vous présente les mesures concernant la profession agricole.
Tout d'abord, après une longue concertation avec les organisations agricoles, nous sommes tombés d'accord pour dire que l'agriculture ne pouvait pas rester à l'écart de la réforme des retraites, notamment de l'allongement de la durée de cotisation.
Les agriculteurs pourront ainsi bénéficier de nouveaux droits : le droit au départ à la retraite anticipée pour ceux qui ont commencé à travailler à l'âge de 14, 15 ou 16 ans, la mensualisation des pensions, initialement prévue au 1er janvier 2005 et ramenée par l'Assemblée nationale au 1er janvier 2004, la possibilité de rachat des années au profit d'une aide familiale. C'est donc un ensemble équilibré qui est présenté.
Les retraités agricoles disposent de pensions très modestes, en raison des choix opérés par le passé et, jusqu'au début des années quatre-vingt-dix, d'une assiette de cotisation qui ne correspondait pas à la réalité des revenus. Depuis 1994, un effort important de revalorisation des pensions a été conduit, qui a permis de porter la retraite minimale de base des exploitants ayant une carrière complète au montant du minimum vieillesse. En 2002, une des dernières lois de la législature précédente, adoptée à l'unanimité par les deux assemblées, a créé un régime complémentaire obligatoire.
Tout à l'heure, dans une présentation pour le moins partiale, Mme Pourtaud m'a demandé pourquoi le Gouvernement auquel j'appartiens avait repoussé d'un an la mise en oeuvre de la réforme de cette retraite complémentaire.
Chacun sait qu'elle a été repoussée non pas d'un an mais seulement de quelques mois. En effet, elle devait entrer en vigueur le 1er janvier 2003, et les premiers versements ont commencé à partir d'avril.
Deux raisons expliquent ce léger décalage. D'abord, lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, il a fallu prendre les décrets d'application de cette réforme, ce qui n'avait pas été fait. Par ailleurs, le BAPSA était dans un tel état qu'il a fallu trouver plus de 700 millions d'euros (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.) de financement supplémentaire en 2002 pour assurer l'équilibre de ce budget. Chacun comprendra que, dans ces conditions, le Gouvernement ait dû décaler de quelques mois la mise en oeuvre de cette réforme instituant une retraite complémentaire.
Le montant minimal de retraite globale incluant le régime de base et le régime complémentaire est désormais fixé à 75 % du SMIC. J'attire votre attention sur le fait que les retraités actuels ont bénéficié de cette mesure. En revanche, ainsi que l'avait décidé le législateur en 2002, un certain nombre de catégories ont été exclues du bénéfice du régime complémentaire. Ces catégories sont les conjoints et les aides familiaux. Une mission d'évaluation a été confiée au Conseil supérieur des prestations sociales agricoles en vertu de l'article 5 de la loi de 2002.
J'attire votre attention sur le fait que les exploitants agricoles souhaitent que la charge qui leur incombe au titre du régime complémentaire soit limitée à moins de 3 % de leur revenu. L'Etat, qui participe déjà, à titre exceptionnel, au financement de ce régime complémentaire - c'est le seul auquel il participe -, ne peut apporter qu'une contribution limitée. En conséquence, nous ne pouvons pas, dans le cadre de cette réforme, aller au-delà de ce qui a déjà été mis en oeuvre par les gouvernements précédents, mais nous consolidons les acquis.
Ces explications vaudront pour l'essentiel du débat que nous allons maintenant avoir sur la retraite des agriculteurs. Le Gouvernement est donc hostile aux trois amendements qui viennent d'être présentés.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 706.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 707.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 708.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 709, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le II de cet article. »
Cet amendement a été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission émet un avis défavorable par coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 709.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 710, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le III de cet article. »
Cet amendement a été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 710.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 71.
(L'article 71 est adopté.)
Article additionnel après l'article 71
M. le président. Je rappelle que l'amendement n° 22, déposé par M. Jean Boyer, a été déclaré irrecevable.
- Art. additionnel après l'art. 71
- Dossier législatif : projet de loi portant réforme des retraites
- Art. 73
Article 72
M. le président. « Art. 72. - I. - Après l'article L. 732-18 du code rural, il est inséré un article L. 732-18-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 732-18-1. - L'âge prévu à l'article L. 732-18 est abaissé pour les personnes ayant exercé une activité non salariée agricole qui ont commencé leur activité avant un âge et dans des conditions déterminées par décret et ont accompli une durée totale d'assurance et de périodes reconnues équivalentes dans le régime d'assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles et, le cas échéant, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, au moins égale à un seuil défini par décret, tout ou partie de cette durée totale ayant donné lieu à cotisations à la charge de l'assuré. Un décret précise les modalités d'application du présent article. »
« II. - Après l'article L. 732-25 du même code, il est inséré un article L. 732-25-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 732-25-1. - La durée d'assurance ayant donné lieu à cotisations à la charge du chef d'exploitation ou d'entreprise agricole dans le régime d'assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles et à la charge de l'assuré dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, accomplie après l'âge prévu à l'article L. 732-18 et au-delà de la durée minimale prévue à l'article L. 732-25, donne lieu à une majoration de la pension dans des conditions fixées par décret. »
« III. - Dans la première phrase du premier alinéa du II de l'article L. 732-54-1, dans le deuxième alinéa de l'article L. 732-54-5 et dans le I de l'article L. 732-54-8 du même code, après les mots : "article L. 351-1 du code de la sécurité sociale", sont insérés les mots : "à la date d'effet de la pension de retraite". »
« IV. - Les dispositions du I sont applicables à compter du 1er janvier 2004.
« Les dispositions du II sont applicables aux périodes accomplies à compter du 1er janvier 2004. »
La parole est à M. Gérard Le Cam, sur l'article.
M. Gérard Le Cam. L'article 72 relève de la même démarche que le précédent. Il permet d'abaisser l'âge du départ à la retraite pour les personnes ayant exercé une activité non salariée agricole très jeunes, ce que nous ne pouvons qu'approuver sur le principe. Il s'agit donc d'une transposition de mesures du régime général vers le régime agricole.
Je vous rappelle que, sous le précédent gouvernement, ce sont les communistes qui avaient proposé la possibilité de partir avec une retraite complète après quarante annuités, et ce avant l'âge de 60 ans.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. C'est vrai !
M. Gérard Le Cam. Cette proposition de loi, qui concernait plus de 800 000 personnes, n'a malheureusement pas été adoptée.
M. Dominique Braye. Mme Demessine était secrétaire d'Etat !
M. Gérard Le Cam. Elle aurait pourtant fait le plus grand bien à l'emploi en France et à la gauche plurielle sur le plan politique !
Bien que positive, cette mesure s'intègre elle aussi dans votre projet de loi. Elle appelle à cotisation nouvelle dans un contexte agricole incertain où le revenu baisse et où les mesures récentes adoptées pour la politique agricole commune et les mesures à venir dans le cadre de l'OMC n'augurent rien de bon pour l'agriculture française, et encore moins pour la petite et la moyenne paysannerie, qui va disparaître à une vitesse vertigineuse dans les dix années à venir.
Alors qu'il faudrait inviter de jeunes agriculteurs à s'installer ou à reprendre l'activité de leurs parents, les nouvelles dispositions que vous introduisez ne permettront pas de redynamiser l'emploi agricole, notamment à travers le maintien des petites exploitations agricoles, pourtant indispensables sur le plan de l'aménagement du territoire et du développement durable. C'est au détriment de nos jeunes que vous incitez, voire obligez, nos agriculteurs à poursuivre leur activité afin de pouvoir bénéficier d'une retraite décente.
Après une vie active d'un dur labeur, la plupart d'entre eux devront se contenter d'une maigre retraite. Nous savons aussi que certains se retrouveront dans une situation proche du seuil de pauvreté.
MM. Dominique Braye et Jean Chérioux. Qu'avez-vous fait lorsque vous étiez au pouvoir ?
M. Guy Fischer. Nous l'avons fait progresser d'une manière sans précédent !
M. le président. Monsieur Le Cam, ne vous laissez pas interrompre !
M. Gérard Le Cam. Nous l'avons fait progresser, c'est vrai, sous le gouvernement de la gauche. Elle n'est pas encore suffisamment élevée, mais au moins ce gouvernement avait-il tenu parole dans ce domaine.
MM. Jean Chérioux et Adrien Gouteyron, rapporteur pour avis. Uniquement dans ce domaine !
M. Gérard Le Cam. J'ai déjà eu l'occasion de faire référence à une enquête récente de l'INRA qui soulignait la dégradation du revenu agricole et l'accroissement des inégalités sociales à l'intérieur même de la profession.
Ce dont le monde agricole a besoin aujourd'hui, c'est de prix rémunérateurs de leur activité permettant de tirer vers le haut les revenus. Car n'est-ce pas, là aussi, la condition pour s'assurer les meilleures retraites ? Cela suppose de rompre avec le modèle libéral et productiviste qui perdure à l'échelle européenne et mondiale dans le cadre de l'OMC.
Telle n'est manifestement pas la voie que le Gouvernement a choisie, allant même jusqu'à sacrifier nos petites exploitations.
M. Alain Gournac. La voie que vous avez choisie est une voie de garage !
Mme Nelly Olin. C'est une impasse !
M. Gérard Le Cam. C'est pourquoi nous demandons la suppression des dispositions de cet article.
M. le président. L'amendement n° 711, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 732-18-1 du code rural. »
Cet amendement a été défendu.
L'amendement n° 712 a été déclaré irrecevable.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 711.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 713, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le II de cet article. »
Cet amendement a été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 713.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 714, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le III de cet article. »
Cet amendement a été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 714.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 715, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le IV de cet article. »
Cet amendement a été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 715.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Charles Gautier, pour explication de vote sur l'article 72.
M. Charles Gautier. Cet article vise à transposer au régime de base des exploitants agricoles les nouvelles dispositions applicables au régime général, en particulier l'allongement de 37,5 ans à 42 ans de la durée de cotisation.
Ces mesures vont pénaliser fortement certains exploitants agricoles qui pensaient pouvoir disposer de celles-ci dans les mois qui viennent. Il n'en sera rien et ces mesures, vous le savez, vont à l'encontre même de l'intérêt des agriculteurs qui demandaient la mise en place de retraites progressives.
Vous tenez envers les agriculteurs le double langage que vous avez tenu tout au long de ce texte : vous vous persuadez du bien-fondé de ces nouvelles mesures très pénalisantes pour les intéressés en les médiatisant au maximum. Dans le même temps, vous constatez le manque notable d'enthousiasme des principaux intéréssés, quelquefois leur colère. Le Président de la République ne s'y trompe pas quand il évoque la nécessité d'une « pédagogie explicative ».
M. Roger Karoutchi. Il ne se trompe jamais !
M. Alain Gournac. Un bon président !
Mme Nelly Olin. Excellent !
M. Charles Gautier. En fait, vous prenez quelques « mesurettes » comme celles qui sont prévues à l'article 71, notamment la prise en compte, pour les aides familiaux, des années travaillées avant leur majorité, dès l'âge de 16 ans, au lieu de 18 ans.
Certains de vos collègues à l'Assemblée nationale ont d'ailleurs exprimé leur déception en demandant que ces mesures puissent s'appliquer dès l'âge de 14 ans.
Les règles spécifiques devraient donc s'appliquer pour les agriculteurs. En fait, vous refusez d'entrer dans la complexité de leur carrière et nombre d'entre eux le paieront au moment de la liquidation de leur retraite par une diminution de celle-ci. (Mme Nelly Olin s'exclame.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon ministre. Monsieur Gautier, je vous rassure, les agriculteurs qui prendront leur retraite dans quelques mois ne seront pas concernés par l'allongement de la durée de cotisation.
Pardonnez-moi de vous renvoyer à la lecture du texte, mais l'allongement de la durée de cotisation à 41 ans n'est prévue qu'en 2012 et ne serait éventuellement portée à 42 ans qu'en 2020. Par conséquent, ceux qui prévoient de partir à la retraite dans quelques mois pourront partir au même âge.
M. le président. Je mets aux voix l'article 72.
(L'article 72 est adopté.)
- Art. 72
- Dossier législatif : projet de loi portant réforme des retraites
- Art. additionnel après l'art. 73
Article 73
M. le président. « Art. 73. - Après l'article L. 732-35 du code rural, il est inséré un article L. 732-35-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 732-35-1 . - Les personnes dont la pension de retraite de base prend effet postérieurement au 31 décembre 2003 peuvent demander la prise en compte, par le régime d'assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles, de périodes d'activité accomplies en qualité d'aide familial défini au 2° de l'article L. 722-10.
« Un décret détermine les conditions d'application du présent article, et notamment le mode de calcul des cotisations et les modalités selon lesquelles les demandes de versement de cotisations correspondant à ces périodes doivent être présentées. »
La parole est à M. Gérard Le Cam, sur l'article.
M. Gérard Le Cam. L'article 73 introduit la possibilité de rachat de périodes d'activité accomplies en qualité d'aide familial, ce qui pose à nouveau la question du revenu agricole, alors que celui-ci est en moyenne de 23 813 euros par an, avec des disparités énormes selon les régions et les départements.
J'avais d'ailleurs eu l'occasion, lors du vote du budget de l'agriculture pour 2003, d'évoquer la situation de ces nouveaux pauvres dans le monde agricole.
La baisse des prix des produits agricoles et l'alourdissement des charges créent un effet de ciseaux redoutable. Le revenu global de la ferme France a baissé de 6,4 % en 2002. Entre le rachat quasi impossible à une extrémité de la carrière et l'allongement du travail à l'autre extrémité, il faut reconnaître que l'équation est difficile.
C'est pourquoi nous sollicitons la suppression de cet article.
M. Jean-Jacques Hyest. C'est un comble !
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 716, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 717, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 732-35-1 du code rural. »
L'amendement n° 289, présenté par MM. Flandre, Vasselle et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
« Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 732-35-1 du code rural, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du 2° de l'article L. 722-10, les périodes d'activité accomplies en tant qu'aide familial à compter de l'âge de quatorze ans peuvent être prises en compte par le régime d'assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles. »
L'amendement n° 718, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 732-35-1 du code rural. »
Les amendements n°s 716 et 717 ont été défendus.
La parole est à M. Dominique Braye, pour présenter l'amendement n° 289.
M. Dominique Braye. Dans les années soixante, des personnes ont été déclarées en tant qu'aide familial dans le régime de protection sociale agricole et ont travaillé dans une exploitation dès l'âge de 14 ans. Cette disposition permet, pour les personnes liquidant une retraite de base au titre du régime d'assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles, après le 31 décembre 2003, de pouvoir racheter et de valider, dans ce même régime, des périodes accomplies en tant qu'aide familial dès l'âge de 14 ans.
Cette mesure étend la possibilité de rachat de périodes accomplies en tant qu'aide familial, initialement prévue par l'article 73 à partir de 16 ans, aux personnes ayant débuté leur activité dès l'âge de 14 ans.
M. le président. L'amendement n° 718 a été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 716, qui tend à supprimer la transposition, de même qu'à l'amendement n° 717, par coordination.
L'amendement n° 289, qui vise à étendre la possibilité de racheter les périodes accomplies en tant qu'aide familial aux personnes ayant travaillé dès l'âge de quatorze ans, pose un problème de coordination avec la position de la commission sur l'amendement n° 36, présenté à l'article 16. Aussi la commission souhaiterait-elle entendre l'avis du Gouvernement.
Toujours dans un souci de coordination, la commission est défavorable à l'amendement n° 718.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements n°s 716, 717 et 718, dans la mesure où ils remettent en cause une possibilité nouvelle offerte par le projet de loi aux agriculteurs.
En revanche, il est favorable à l'amendement n° 289.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 716.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 717.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 289.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 718.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 73, modifié.
(L'article 73 est adopté.)
Article additionnel après l'article 73
M. le président. Je rappelle que l'amendement n° 23, présenté par Mme Valérie Létard, a été déclaré irrecevable.
- Art. additionnel après l'art. 73
- Dossier législatif : projet de loi portant réforme des retraites
- Art. 75
Article 74
M. le président. « Art. 74. - I. - Après l'article L. 732-27 du code rural, il est inséré un article L. 732-27-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 732-27-1 . - Sont prises en compte par le régime d'assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles, pour l'assurance vieillesse, sous réserve du versement de cotisations fixées dans des conditions définies par décret garantissant la neutralité actuarielle et dans la limite de douze trimestres d'assurance, les périodes d'études accomplies dans les établissements, écoles et classes mentionnés à l'article L. 381-4 du code de la sécurité sociale et n'ayant pas donné lieu à affiliation à un régime d'assurance vieillesse, lorsque le régime d'assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles est le premier régime d'affiliation à l'assurance vieillesse après lesdites études. »
« II. - Les dispositions du I sont applicables à compter du 1er janvier 2004. »
La parole est à M. Gérard Le Cam, sur l'article.
M. Gérard Le Cam. L'article 74 traite en miroir, avec les mesures applicables au régime général, de la possibilité - je devrais dire de l'impossibilité - de rachat de douze trimestres d'études. Le coût estimé de ce rachat en début de carrière, d'après nos renseignements, serait de 5 000 euros par an. Qui, sinon quelques fils ou filles de grands céréaliers, betteraviers ou éleveurs industriels, pourra effectivement réaliser ce rachat ?
Le niveau d'études aujourd'hui exigé pour bénéficier de la dotation aux jeunes agriculteurs, la DJA, est le baccalauréat professionnel ou le brevet de technicien agricole, le BTA. L'âge moyen d'installation est de 28 ans et demi. Faites le calcul, 28 ans et demi plus 42 ans égalent à 70 ans et demi : « Bonjour l'avenir pour les agriculteurs » !
Quant aux jeunes qui s'installent sans DJA, faute d'avoir réussi leurs examens mais en ayant pour autant suivi des études, je n'ose imaginer leur capacité de rachat, notamment en début de carrière. Je rappelle chaque année, au moment de l'examen du budget de l'agriculture, que ces jeunes devraient bénéficier au moins d'une DJA partielle. Ils sont pratiquement un sur deux - 7 000 à 8 000, à comparer aux 8 000 qui s'installent avec dotation - à s'installer malgré tout, sans aide.
M. Alain Gournac. Là, il y a un problème !
M. Gérard Le Cam. Je pourrais également évoquer le stage obligatoire de six mois non rémunéré qu'il faudra racheter. Tout cela montre bien qu'il s'agit d'une mesure de façade peu efficace, donc peu crédible.
La proposition de loi communiste d'établir un contrat emploi-formation tout au long de la carrière mériterait d'être remise à l'ordre du jour afin d'assurer à toute personne une sérénité indispensable tout au long de sa vie active et, ensuite, de sa retraite. Tout le monde en parle, mais nous attendons toujours des actes concrets allant dans ce sens.
Mme Nelly Olin. Vous avez attendu pendant cinq ans !
Mme Nicole Borvo. Le Président de la République nous l'a annoncé !
M. Dominique Braye. Vous êtes de vrais chiraquiens !
M. Gérard Le Cam. Eh oui ! Nous attendons ! Derrière les mots, il faut mettre un contenu.
Mme Nicole Borvo. Prise en charge de la formation tout au long de la vie !
M. Gérard Le Cam. Nous avons de bonnes idées. Elles sont souvent reprises, mais déformées malheureusement.
M. le président. Ne vous laissez pas interrompre, monsieur Le Cam !
M. Gérard Le Cam. C'est la faute de M. Braye ! A force de s'envoyer des décharges d'adrénaline, il va se faire du mal !
M. Dominique Braye. C'est le calme plat ! (Sourires.)
M. Gérard Le Cam. Toutes ces mesures sous forme de baume qui sont intégrées dans les mesures de fond que nous dénonçons me font penser aux courriers que nous recevons trop souvent dans nos boîtes à lettres indiquant qu'on a gagné. C'est écrit en grand. En revanche, quand on lit les petites lignes, on s'aperçoit qu'on est obligés d'acheter pour gagner peut-être, et pour perdre surtout.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cent pour cent de ceux qui gagnent ont tenté leur chance ! (Sourires.)
M. Dominique Braye. Des gagneurs comme vous !
M. Guy Fischer. On en reparlera des gagnants !
M. Gérard Le Cam. Voila pourquoi nous proposons la suppression de l'article 74 et nous vous invitons à nous suivre.
M. le président. Je rappelle que les amendements n°s 722, déposé par Mme Demessine, 24, déposé par M. Mercier, et 288, déposé par M. Gélard, ont été déclarés irrecevables.
Je suis saisi de quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 719, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 720, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le I de cet article. »
L'amendement n° 1116, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
« A. - Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 732-27-1 du code rural par une phrase ainsi rédigée :
« Peuvent en outre être prises en compte dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, les périodes d'études accomplies dans les établissements d'enseignement supérieur de pays tiers de l'Union européenne. La liste de ces établissements est établie par arrêté.
« B. - Compléter le même texte par un alinéa ainsi rédigé :
« Les périodes mentionnées ci-dessus doivent avoir donné lieu à l'obtention d'un diplôme, à l'exception des périodes d'études dans les classes préparatoires aux grandes écoles. »
L'amendement n° 721, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
« Supprimer le II de cet article. »
Les amendements n°s 719 et 720 ont été défendus.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 1116.
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission retire cet amendement pour être en accord avec l'article 20, précédemment adopté.
M. le président. L'amendement n° 1116 est retiré.
L'amendement n° 721 a été défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 719, ainsi que sur les amendements n°s 720 et 721, par coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Si nous avons introduit cette disposition dans le texte, c'est pour assurer l'équité entre les régimes, à la demande de la profession. Chacun comprendra donc que le Gouvernement ne souhaite pas que ces amendements soient adoptés.
J'ajoute que, pour être complètement crédible, il ne faut pas caricaturer, comme le fait trop souvent le groupe communiste républicain et citoyen, la réalité de la situation des Français. Nous venons d'entendre expliquer que les agriculteurs, pour l'essentiel, commençaient leur carrière à vingt-huit ans et demi ! Il suffit de regarder autour de soi pour constater que la quasi-totalité des chefs d'exploitation ont été d'abord soit des aides familiaux, soit salariés dans un autre régime, et ont naturellement commencé à cotiser beaucoup plus tôt. Il est par conséquent tout à fait absurde de prétendre que les agriculteurs devront travailler au-delà de soixante-dix ans sous prétexte qu'ils ne se sont installés comme chefs d'exploitation qu'à vingt-huit ans et demi.
Si j'insiste sur ce sujet, c'est pour montrer que l'on ne saurait avoir un débat dans ces conditions ! On ne peut débattre que de situations qui correspondent à la réalité. On a entendu, depuis le début de ce débat sur les retraites, que les enseignants allaient enseigner à soixante-quinze ans, les agriculteurs labourer à soixante-dix-huit ans ! Tout cela évidemment est absurde et enlève beaucoup de force à la critique de l'opposition. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 719.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 720.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 721.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote sur l'article 74.
Mme Nicole Borvo. M. le ministre vient de dire que nous caricaturions la réalité. Ce discours est habituel !
M. Dominique Braye. Vous êtes communiste : c'est un pléonasme ! (Protestations sur les travées du groupe RDC.)
Mme Nicole Borvo. Monsieur Braye, excusez-moi, mais je vais finir par être triviale ! A force de vous entendre hurler, je vais en arriver, moi aussi, à faire quelques plaisanteries douteuses ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Dominique Braye. Ne changez rien : vous serez naturelle !
Mme Nicole Borvo. Si vous voulez la parole, monsieur Braye, demandez-là ! Peut-être caricaturons-nous, et peut-être êtes-vous les seuls à connaître la réalité, mais nous connaissons quelques réalités.
Il faut quand même bien prendre en compte le fait que ce sont les mêmes personnes qui devront cotiser normalement pour payer leur retraite, qui auront une retraite moindre, qui devront épargner pour avoir un complément de retraite et qui devront racheter leurs cotisations.
Je crois savoir que nombre d'agriculteurs sont particulièrement en difficulté. D'ailleurs, les élus de la France profonde, qui défendent toujours les agriculteurs, sont bien placés pour le savoir. Moi qui suis élue de Paris, bien entendu, je n'en sais rien ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Dominique Braye. C'est bien de le reconnaître !
Mme Nicole Borvo. Vous leur expliquerez comment il faut faire pour payer tout cela !
J'ajoute, puisque vous ne l'avez pas bien entendu, qu'effectivement le Président de la République, que j'ai écouté attentivement le 14 juillet,...
M. Alain Gournac. Vive Chirac !
Mme Nelly Olin. Au moins, vous n'avez pas perdu votre temps !
M. Dominique Braye. Vous vous rappelez par qui a été élu Chirac ?
Mme Nicole Borvo. N'en faites pas trop, monsieur Braye ! Le Président de la République a obtenu moins de 20 % des suffrages et vous savez très bien qu'il a été élu...
M. Dominique Braye. Vous avez eu 3,6 % !
M. le président. Mes chers collègues, laissez Mme Borvo s'exprimer !
Mme Nicole Borvo. Je n'ai pas une aussi grosse voix que M. Braye ; je ne peux pas crier comme lui !
Je voudrais quand même vous citer, parce qu'il me semble que vous l'avez mal entendu, le Président de la République : il nous a expliqué que la grande oeuvre à venir était la formation continue tout au long de la vie. Mais je suppose que les salariés - qu'ils soient de la ville ou des champs - devront se la payer. Donc, cela fera encore quelque chose à payer !
M. Guy Fischer. Et ce sera hors du temps de travail !
M. le président. La parole est à M. Charles Gautier, pour explication de vote.
M. Charles Gautier. L'article 74 ouvre une possibilité de rachat des périodes d'études au titre du régime de base des exploitants agricoles. Dans nos interventions générales, nous avons classé cette mesure au chapitre des « trompe-l'oeil ».
Qui pourra réellement prétendre à ce dispositif ? Ceux qui en auront les moyens financiers et ceux qui auront la chance d'accéder à un emploi au lendemain de l'obtention d'un diplôme. Tout à l'heure, des chiffres ont été cités s'agissant de l'âge de démarrage de la carrière.
M. Jean-Jacques Hyest. De l'installation !
M. Charles Gautier. Effectivement ! Le diplôme requis, c'est le baccalauréat professionnel ou le brevet de technicien agricole, le BTA. Mais, entre le moment où une personne obtient son diplôme et celui où elle peut commencer sa carrière, un temps très important s'écoule.
On ne peut donc trouver mieux comme mesure sélective et inégalitaire. C'est une fois de plus un leurre. D'ailleurs, c'est encore une mesure plus ou moins critiquée par votre propre majorité, monsieur le ministre, et je crois savoir que le Gouvernement lui-même a reconnu qu'un tel dispositif ne présentait d'intérêt que s'il était appliqué en début de carrière. En effet, au fil du temps, son coût deviendra prohibitif.
On a de nouveau le sentiment que vous voulez ignorer les lourdes contraintes de tous ordres qui pèsent sur les jeunes agriculteurs qui s'installent en proposant cette mesure tout à fait décalée et injuste. (M. Claude Estier applaudit.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 74.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n°
223
:
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 316 |
Pour | 204 |
Contre | 112 |