Article 75

M. le président. « Art. 75. - I. - L'article L. 732-41 du code rural est ainsi modifié :

« 1° Au premier alinéa, les mots : "s'il satisfait à des conditions de ressources personnelles, de durée de mariage et d'âge définies par décret. Toutefois, lorsqu'au moins un enfant est issu du mariage, aucune condition de durée de mariage n'est exigée" sont remplacés par les mots : "si ses ressources personnelles ou celles du ménage n'excèdent pas des plafonds fixés par décret" ;

« 2° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Lorsque son montant majoré des ressources mentionnées au premier alinéa excède les plafonds prévus, la pension de réversion est réduite à due concurrence du dépassement. »

« II. - L'article L. 732-50 du même code est ainsi modifié :

« 1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Elle est revalorisée suivant les modalités prévues par l'article L. 351-11 du code de la sécurité sociale. » ;

« 2° Au quatrième alinéa, les mots : "en cas de remariage, de vie maritale ou" sont supprimés.

« III. - 1. Au 3° de l'article L. 722-8 du même code, les mots : "et veuvage" sont supprimés.

« 1 bis. L'intitulé du paragraphe 3 de la sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre II du livre VII du même code est ainsi rédigé : "Assurance vieillesse".

« 2. L'article L. 722-16 du même code est abrogé.

« 3. Au 3° de l'article L. 723-3 du même code, les mots : "et assurance veuvage" sont supprimés.

« 3 bis. Dans la dernière phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 723-39 du même code, la référence : ", L. 731-43" est supprimée.

« 3 ter. Dans le premier alinéa de l'article L. 725-18 du même code, les mots : "et à l'assurance veuvage" sont supprimés.

« 3 quater. Le II de l'article L. 731-6 du même code et l'article 53 de la loi de finances pour 1991 (n° 90-1168 du 29 décembre 1990) sont abrogés.

« 4. Au premier alinéa de l'article L. 731-10 du même code, les mots : "maternité, vieillesse et veuvage" sont remplacés par les mots : "maternité et vieillesse".

« 5. Le paragraphe 4 de la sous-section 2 de la section 2 du chapitre 1er du titre III du livre VII du même code est abrogé.

« 6. L'intitulé de la section 3 du chapitre II du titre III du livre VII du même code est ainsi rédigé : "Assurance vieillesse".

« 7. Supprimé.

« 8. A l'article L. 741-9 du même code, le b du II est complété par les mots : "et des salariés" et le III est abrogé.

« 9. Dans le premier alinéa de l'article L. 742-3 du même code, les mots : "de veuvage" sont supprimés.

« 10. Dans le premier alinéa de l'article L. 762-26 du même code, la référence "L. 722-16" est supprimée.

« IV. - Les dispositions des I et II sont applicables à compter du 1er juillet 2004 sous les réserves ci-après :

« 1° Les personnes bénéficiant à cette date de l'allocation instituée par l'article L. 722-16 du code rural continuent à la percevoir, dans des conditions fixées par décret ;

« 2° La condition de ressources instituée par le I n'est opposable aux titulaires d'une pension de réversion lors de son entrée en vigueur qu'en cas d'attribution d'un autre avantage personnel de vieillesse ou d'invalidité ;

« 3° Les conditions de suppression progressive de la condition d'âge prévue par le premier alinéa de l'article L. 732-41 du même code sont déterminées par décret ; les personnes qui ne remplissent pas cette condition d'âge peuvent bénéficier de l'assurance veuvage dans les conditions en vigueur à la date de publication de la présente loi ;

4° Les allocations veuvage versées en application du 1° et du 3° sont à la charge de l'assurance vieillesse régie par le titre III du livre VII du code rural. »

La parole est à M. le ministre.

M. François Fillon, ministre. Tout d'abord, je tiens à dire combien je suis étonné par le vote qui vient d'intervenir. Autant je comprends que l'on puisse être critique à l'égard d'une mesure comme celle qui est proposée, estimant qu'elle sera peu utilisée par les agriculteurs - encore que le nombre d'agriculteurs qui suivent des études supérieures est de plus en plus important - autant je m'interroge sur le fait de priver la profession agricole de cette possibilité. Il s'agit non pas d'une obligation, mais d'une faculté qui est offerte. Il est assez étonnant...

M. Alain Gournac. C'est bizarre !

M. François Fillon, ministre. ... de voter contre une liberté nouvelle offerte à une profession.

M. Dominique Braye. A moins qu'ils n'aiment pas la liberté !

M. François Fillon, ministre. Mais c'est évidemment un jugement personnel.

Par ailleurs, monsieur le président, j'invoque l'article 40 de la Constitution sur les amendements n°s 727 rectifié et 726.

M. le président. L'article 40 de la Constitution est-il applicable, monsieur Trucy ?

M. François Trucy, au nom de la commission des finances. Il l'est monsieur le président.

M. le président. L'article 40 étant applicable, les amendements n°s 727 rectifié et 726, déposés par Mme Demessine, ne sont pas recevables.

La parole est à M. Gérard Le Cam, sur l'article.

M. Gérard Le Cam. Je tiens à clarifier les choses à l'intention de M. le ministre.

Les agriculteurs comprendront, me semble-t-il, notre position : nous avons l'honnêteté intellectuelle de reconnaître que certaines mesures peuvent être bonnes dans l'absolu, mais nous ne pouvons les voter dans la mesure où elles ne s'appliquent qu'à une ultra-minorité d'agriculteurs, où elles posent des problèmes énormes de financement compte tenu des revenus des agriculteurs, et où, de plus, elles s'intègrent dans un projet de loi que nous rejetons totalement. Ainsi, les choses sont claires !

J'en viens à l'article 75. Il constitue une transposition, pour le régime agricole de base, des règles applicables aux pensions de réversion prévues à l'article 22 de ce projet de loi pour le régime de base.

Nous avons déjà eu l'occasion, au cours de la discussion de l'article 22, de souligner les raisons pour lesquelles nous nous opposions à la mise en place de ces nouveaux dispositifs. Je tiens cependant à nouveau à insister sur les risques que comportent certaines dispositions de cet article pour la profession agricole et la rupture radicale qu'elles introduisent dans notre droit.

En effet, ces mesures auront pour conséquence la création d'une allocation différentielle par rapport au plafond de ressources. La suppression du régime de l'assurance veuvage aura des incidences importantes. Nous nous opposons donc fermement à cet article puisqu'il supprime le droit à pension de réversion assuré par les cotisations sociales.

Le dispositif que vous mettez en place s'apparente plus à de l'assistance sociale, variable en fonction des ressources du conjoint survivant, qu'à un véritable droit universel à bénéficier de la pension de réversion.

Actuellement, pour qu'il puisse prétendre à la pension de réversion, le conjoint survivant doit remplir plusieurs conditions, il est vrai, assez complexes : ses propres ressources ne doivent pas être supérieures au montant du salaire minimum de croissance annuelle lors de la liquidation des droits à moins qu'un enfant ne soit issu du mariage ; il doit avoir été marié au moins deux ans à l'assuré décédé ; il ne doit pas s'être remarié ; il doit avoir atteint 55 ans. A défaut de répondre au dernier critère, mais moyennant certaines conditions, au rang desquelles figurent celles de résidence et de ressources, le conjoint survivant a droit à l'assurance veuvage.

Par ailleurs, le cumul d'une pension de réversion avec des avantages vieillesse ou d'invalidité est soumis à de strictes limites.

S'il est voté, cet article supprimera ces conditions pour le régime agricole. Le conjoint survivant ne devra plus satisfaire qu'à des conditions de ressources.

Nous ne pouvons que condamner des dispositions qui engagent une rupture avec le droit universel, rupture qui permettra de traiter de façon identique des personnes qui perçoivent ou non un autre avantage de vieillesse ou d'invalidité.

Vous opérez ici un changement radical auquel nous sommes fondamentalement opposés. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé des amendements de suppression et d'amélioration de la rédaction de ce texte.

M. le président. Je suis saisi de six amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 723, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer cet article. »

L'amendement n° 724, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer le I de cet article. »

L'amendement n° 725, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer le II de cet article. »

Je rappelle que les amendements n°s 727 rectifié et 726, déposés par Mme Demessine, ont été déclarés irrecevables.

L'amendement n° 728, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer le III de cet article. »

L'amendement n° 729, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer le IV de cet article. »

L'amendement n° 1153, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Dans le premier alinéa du IV de cet article, remplacer les mots : "des I et II" par les mots : "des I à III". »

Les amendements n°s 723, 724, 725, 728 et 729 ont été défendus.

La parole est à M. le ministre, pour présenter l'amendement n° 1153.

M. François Fillon, ministre. Cet amendement a pour objet de corriger une erreur matérielle.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur les amendements n°s 723, 724, 725, 728 et 729 qui tendent à supprimer la transposition et l'alignement sur les règles du régime général de la mesure relative à la pension de réversion.

En revanche, elle émet un avis favorable sur l'amendement n° 1153, qui concerne une disposition d'ordre technique.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Fillon, ministre. Défavorable .

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 723.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 724.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 725.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 728.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 729.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1153.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Charles Gautier, pour explication de vote sur l'article 75.

M. Charles Gautier. Avec cet article 75, monsieur le ministre, vous transposez dans le régime d'assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles les dispositions relatives à l'ouverture du droit, la liquidation et le calcul des pensions de réversion prévues pour les salariés du régime général.

S'agissant de l'assurance veuvage, qui sera supprimée, nous pensons qu'elle va pénaliser les veuves ou les veufs. Il serait judicieux de maintenir l'assurance veuvage dans le cas où la pension de réversion du conjoint décédé serait inférieure à celle-ci. Il s'agit, à nos yeux, d'un filet de sécurité, car les régimes de retraite de base et complémentaires sont encore très défavorables pour les conjoints survivants, et plus particulièrement pour les agriculteurs.

Rappelons que c'est sous le gouvernement de Lionel Jospin que les pensions des veuves ont été fortement revalorisées pour passer de 1 200 francs au niveau du minimum vieillesse.

Les dispositions que vous proposez ne nous conviennent donc pas. En les examinant de plus près, nous réalisons que ces mesures seront pénalisantes pour les futurs bénéficiaires : création d'une nouvelle allocation différentielle, qui pourra être revue éventuellement à la baisse, et suppression totale de l'assurance veuvage. De plus, sur quelle base sera calculé le montant de la pension de réversion ?

Les nombreuses interrogations qui subsistent nous conduisent à dire que nous ne voterons pas cet article.

M. le président. Je mets aux voix l'article 75, modifié.

(L'article 75 est adopté.)

Article 76

M. le président. « Art. 76. - L'article L. 732-39 du code rural est ainsi modifié :

« 1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :

« Le service d'une pension de retraite, prenant effet postérieurement au 1er janvier 1986, liquidée par le régime d'assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles et dont l'entrée en jouissance intervient à compter du soixantième anniversaire de l'intéressé ou ultérieurement est subordonné à la cessation définitive de l'activité non salariée agricole. » ;

« 2° Au deuxième alinéa, les mots : "ou allocation" sont supprimés. »

La parole est à M. le ministre.

M. François Fillon, ministre. Monsieur le président, afin de ne pas surprendre le Sénat, j'indique d'ores et déjà que le Gouvernement invoque l'article 40 de la Constitution sur l'amendement n° 732 rectifié, qui tend à insérer des articles additionnels après l'article 76, ainsi que sur les amendements n°s 731 rectifié, 733, 734, 735, 736, 737, 738, 739 rectifié, 740 rectifié, 741 rectifié, 742 rectifié, 743 et 744 rectifié visant à insérer des articles additionnels après l'article 76.

M. le président. L'article 40 de la Constitution est-il applicable, monsieur Trucy ?

M. François Trucy, au nom de la commission des finances. Il l'est, monsieur le président.

M. le président. L'article 40 étant applicable, les amendements n°s 732 rectifié, 731 rectifié, 733, 734, 735, 736, 737, 738, 739 rectifié, 740 rectifié, 741 rectifié, 742 rectifié, 743 et 744 rectifié, déposés par Mme Demessine, ne sont pas recevables.

Sur l'article 76, la parole est à M. Gérard Le Cam.

M. Gérard Le Cam. Cet article vise à interdire toute activité agricole non salariée aux personnes ayant liquidé leur retraite après le 1er janvier 1986. Les surfaces aujourd'hui autorisées pour une activité agricole aux retraités sont souvent de l'ordre d'un hectare, ce qui leur permet un passage progressif de l'activité pleine à la retraite totale et leur assure, certes un revenu modeste, mais, surtout, un grand réconfort psychologique, bénéfique pour leur santé. Il est vrai qu'un passage brutal à l'inactivité, pour des gens qui ont été particulièrement actifs tout au long de leur vie, peut être du plus mauvais effet.

M. Jean Chérioux. Vous voyez que le travail est une bonne chose !

M. Gérard Le Cam. Je connais bien le monde agricole !

Compte tenu de l'évolution de l'agriculture, de la politique agricole commune et du très mauvais accord que vient d'accepter la France (Exclamations sur les travées de l'UMP.), compte tenu également des menaces qui pèsent encore sur les négociations de l'OMC à Cancún en septembre prochain, compte tenu enfin de l'abandon des terres moins rentables et du développement des friches dans certaines régions, il serait, me semble-t-il, plus judicieux d'imaginer, pour les retraités qui le souhaitent, la possibilité de contribuer à l'entretien de l'espace. Il faut à cette fin assouplir les mesures existantes. Cela ne portera pas préjudice aux jeunes futurs agriculteurs, qui sont contraints par le système en place de se tourner d'abord vers les terres les plus rentables.

Par conséquent, nous ne voterons pas l'article 76.

M. le président. L'amendement n° 730, présenté par Mme Demessine, MM. Fischer, Muzeau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer cet article. »

Cet amendement a été défendu.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Cependant, je ne voudrais pas qu'il y ait de malentendu : l'article 76 ne modifie en rien la possibilité qui est offerte aujourd'hui aux agriculteurs de conserver un espace dont la superficie est fixée département par département. Le seul objet de cet article est d'autoriser le cumul d'une retraite avec une activité non agricole.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 730.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 76.

(L'article 76 est adopté.)

Article additionnel après l'article 76

ou après l'article 77 bis

M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. J. Boyer et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :

« Après l'article 77 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

« I. - Au premier alinéa du I de l'article L. 732-56 du code rural, à la suite des mots : "en qualité de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole" sont insérés les mots : ", de conjoint collaborateur ou d'aide familial,". »

« II. - La dépense résultant du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus par les articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

Je rappelle que l'amendement n° 732 rectifié, présenté par Mme Demessine, et qui tend à insérer un article additionnel après l'article 76, a été déclaré irrecevable.

La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter l'amendement n° 30.

M. Yves Détraigne. Comme chacun le sait, en matière de retraites, les exploitants agricoles sont défavorisés.

La création du statut de conjoint collaborateur a représenté une réelle avancée. Il permet en effet aux conjoints d'exploitants de se constituer eux-mêmes des droits à la retraite qui leur seront propres et d'avoir droit, en cas de besoin, à l'allocation invalidité.

Cependant, ce statut reste incomplet. En effet, les conjoints exploitants ne bénéficient pas de l'assurance vieillesse complémentaire obligatoire créée par la récente loi du 4 mars 2002.

L'objet de cet amendement est donc d'ouvrir aux conjoints collaborateurs et aux aides familiaux le bénéfice de l'assurance complémentaire obligatoire.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission partage bien évidemment le souci de M. Détraigne d'améliorer la situation, en matière de retraites, des non-salariés agricoles, et l'ouverture du bénéfice de la retraite complémentaire obligatoire aux conjoints, aux collaborateurs et aux aides familiaux est assurément un problème qui s'imposera à notre réflexion.

Cependant, aujourd'hui, la commission n'entrevoit pas de solution. Elle émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Fillon, ministre. La position du Gouvernement est identique, monsieur le président.

L'extension du champ des bénéficiaires de la retraite complémentaire obligatoire à toutes les catégories de personnes emporte un coût de plus de 500 millions d'euros, ce qui représente une charge insupportable en l'état actuel des choses pour ce nouveau régime. Son financement passerait soit par une hausse des cotisations, dont j'ai indiqué tout à l'heure à quel point elle n'était pas souhaitée par la profession, soit par une augmentation de la subvention de l'Etat, solution qui, aujourd'hui, paraît peu réaliste.

Cela étant, rien ne nous interdit de réfléchir à ce sujet et de continuer, étape après étape, d'améliorer les retraites agricoles et non agricoles.

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.

M. Yves Détraigne. J'avais été surpris que l'article 40 de la Constitution ne soit pas invoqué sur cet amendement comme il l'a été sur les amendements précédents du groupe de l'Union centriste, à l'exception d'un seul.

Mais deux avis défavorables ont été émis sur cet amendement. Les choses rentrent donc dans l'ordre, si je puis dire, et je retire cet amendement. (Sourires.)

M. le président. L'amendement n° 30 est retiré.

Articles additionnels après l'article 76

M. le président. Les amendements n°s 731 rectifié, 733 à 738, 739 rectifié, 740 rectifié, 741 rectifié, 742 rectifié, 743 et 744 rectifié ont été déclarés irrecevables.

Article 76 bis

M. le président. « Art. 76 bis . - Après le premier alinéa de l'article L. 732-54-5 du code rural, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La majoration et la condition de durée d'assurance définies à l'alinéa précédent s'appliquent également aux conjoints en activité au 1er janvier 1999 qui ont opté pour la qualité de collaborateur d'exploitation ou d'entreprise visés à l'article L. 732-35 et dont la retraite a pris effet postérieurement au 31 décembre 2001. »

L'amendement n° 1105, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

« Dans le texte proposé par cet article pour insérer un alinéa après le premier alinéa de l'article L. 732-54-5 du code rural, après les mots : "visés à l'article L. 732-35", insérer les mots : "qui ne justifient pas de la durée d'assurance et de périodes équivalentes définies au I de l'article L. 732-54-8 du code rural". »

La parole est à M. le ministre.

M. François Fillon, ministre. L'amendement adopté par l'Assemblée nationale permet aux conjointes qui n'ont pas 40 années de cotisation d'accéder aux revalorisations en justifiant d'au moins 32,5 années d'activité en tant que non salariées agricoles ou, pour les monopensionnées, de 27,5 années.

Cet amendement de précision rédactionnelle vise à permettre aux personnes intéressées soit de bénéficier de ces dispositions, soit de justifier de 40 ans de cotisations, dont 17,5 ans en tant que non-salarié agricole, si cette disposition de la législation actuelle leur est plus favorable que les dispositions nouvelles.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Favorable.

M. le président. La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote.

M. Gérard Le Cam. Notre amendement n° 732 rectifié tendant à insérer un article additionnel après l'article 76 est tombé sous le feu nourri de l'article 40. Je voudrais néanmoins y revenir brièvement,...

M. Roger Karoutchi. Non !

M. Gérard Le Cam. ... dans la mesure où l'amendement n° 30 a été épargné, alors qu'il relève exactement de la même logique que nos amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 76. C'est surprenant !

Ces amendements visaient à étendre le bénéfice de la retraite complémentaire obligatoire agricole aux conjoints et aides familiaux des chefs d'exploitation, et j'avais déjà l'occasion de soutenir cette proposition lors de la discussion du projet de loi relatif à la retraite complémentaire agricole.

En effet, bien que revalorisées, les retraites des conjoints restent très basses : environ 460 euros en moyenne, dans le meilleur des cas, c'est-à-dire pour celles qui bénéficient de la revalorisation ; moins de 300 euros pour les autres, voire moins de 200 euros pour les carrières incomplètes. C'est vous dire à quel point il était nécessaire d'adopter ces amendements, au nom de l'égalité de traitement et de la solidarité nationale, et à tout le moins de prévoir un dispositif permettant de résoudre ce problème ! Les agricultrices et les aides familiaux ont travaillé dur toute leur vie et méritent toute notre considération et toute notre reconnaissance.

Naturellement, le coût de cette mesure est élevé. Mais une réelle politique de prix rémunérateurs et une taxation effective des grands groupes de l'agroalimentaire et de la grande distribution, qui captent les bénéfices du travail agricole, devraient permettre de faire évoluer le dossier dans le bon sens. Il faudra en avoir le courage politique, messieurs !

Le taux de l'impôt sur les sociétés mentionné dans notre première série d'amendements méritait d'être retenu, et même des parlementaires de la majorité - nous venons encore de le constater - y songent ou y ont songé. Il est vrai qu'il est impossible à la fois de baisser les impôts et de prétendre à une quelconque politique sociale dans le pays ! Tout le problème est là !

M. Dominique Braye. Quand la croissance était là, c'était possible !

M. Gérard Le Cam. Le texte de l'amendement n° 738 mettait en évidence l'injustice faite aux agriculteurs, comparés au monde salarié, car la garantie de 85 % du SMIC ne les concerne pas. C'est pourquoi cet amendement visait à revaloriser « le montant des retraites agricoles de base complémentaires [...] à un niveau au moins égal à 85 % du SMIC mensuel brut », comme pour la retraite complémentaire agricole. Un plan pluriannuel pourrait permettre d'y parvenir d'ici quatre ou cinq ans.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1105.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 76 bis, modifié.

(L'article 76 bis est adopté.)

Article 77

M. le président. « Art. 77. - La sous-section 2 de la section 3 du chapitre II du titre III du livre VII du code rural est ainsi rédigée :

« Sous-section 2

« Paiement des pensions

« Art. L. 732-55. - Les pensions de retraite mentionnées à la sous-section 1 de la présente section ainsi que leurs majorations et accessoires sont payables mensuellement et à terme échu dans des conditions fixées par décret et à compter du 1er janvier 2004. »

La parole est à M. le ministre.

M. François Fillon, ministre. J'invoque l'article 40 de la Constitution sur l'amendement n° 745 rectifié, ainsi que sur les amendements n°s 1005, 1008 et 1006 tendant à insérer des articles additionnels après l'article 77.

M. le président. L'article 40 de la Constitution est-il applicable, monsieur Trucy ?

M. François Trucy, au nom de la commission des finances. Oui, monsieur le président, il l'est.

M. le président. L'article 40 étant applicable, l'amendement n° 745 rectifié, déposé par Mme Michelle Demessine, ainsi que les amendements n°s 1005, 1008 et 1006, déposés par M. Claude Estier, ne sont pas recevables.

La parole est à M. Gérard Le Cam, pour explication de vote sur l'article 77.

M. Gérard Le Cam. Cet article prévoit - je devrais dire « prévoyait » -...

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Pourquoi « prévoyait » ?

M. Gérard Le Cam. ... le paiement mensuel des pensions servies par le régime de base des exploitant agricoles, répondant ainsi à la fois à une demande de longue date de la profession et, a priori, au souhait des élus de tous bords politiques.

Si le financement de l'opération, d'un coût de 1,3 milliard d'euros, n'est pas prévu, la date d'effet de la mesure est bien fixée au 1er janvier 2005.

Ce qui m'inquiète, c'est donc que le financement de l'opération ne soit pas trouvé. Où allez-vous prendre cet argent, monsieur le ministre ? Est-ce dans les réserves des caisses de la Mutualité sociale agricole, comme votre prédécesseur l'a fait l'année dernière en ponctionnant 28 millions d'euros sur ces fonds, qui sont destinés à financer sur le terrain de multiples opérations sociales à l'échelon local ? Non seulement cela reviendrait à faire payer la mensualisation aux agriculteurs, mais je doute de toute façon que ces réserves y suffisent ! Ou bien allez-vous vous tourner du côté des grandes sociétés et des grandes surfaces qui s'engraissent sur le dos du monde agricole ?

Je ne répondrai naturellement pas à votre place, mais j'ai ma petite idée sur la question ! (Sourires.)

M. Dominique Braye. Petit cachottier !

M. le président. La parole est à M. Charles Gautier, pour explication de vote.

M. Charles Gautier. L'article 77 institue donc la mensualisation des pensions agricoles servies par le régime de base.

Les socialistes ont toujours défendu cette mesure, qui devait être mise en chantier à la suite de la réalisation des différents plans proposés, pour être totalement réalisée sous le gouvernement de Lionel Jospin. (Exclamations indignées sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. C'est cela !

M. Jean Chérioux. Demain, on rase gratis !

M. Charles Gautier. Nous pouvons cependant regretter le caractère très décevant de la mesure qu'aujourd'hui vous proposez.

En effet, après avoir annoncé qu'elle prendrait effet au 1er janvier 2004, vous en avez repoussé la mise en application en arguant de divers aménagements techniques. Les agriculteurs apprécieront ces arguments à leur juste mesure, comme ils apprécieront le peu d'imagination dont fait preuve le Gouvernement quand il s'agit d'accélérer la mise en place d'un dispositif depuis trop longtemps réclamé !

Rappelons également que nous avons demandé à plusieurs reprises, au cours de ce débat sur les retraites, que le Gouvernement, comme l'avait fait celui de Lionel Jospin, s'engage dans un plan pluriannuel en faveur des agriculteurs et de leurs ayants droit. (Vives protestations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Claude Estier. Cela vous gêne, quand on parle du gouvernement de Lionel Jospin !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Fillon, ministre. Nous sommes en plein délire ! (Rires sur les mêmes travées.)

M. Gautier faisait valoir tout à l'heure que les agriculteurs qui prendront leur retraite dans quelques mois devront travailler 42 ans et reproche maintenant au Gouvernement de repousser à 2005 la date d'application de la mesure en discussion après avoir proposé de la fixer à 2004, alors que c'est exactement le contraire !

C'est le contraire, monsieur Gautier ! Nous avions prévu que la disposition entrerait en vigueur en 2005 ; mais, pressés par l'Assemblée nationale, en particulier, nous avons décidé d'avancer cette date au 1er janvier 2004 !

Vous aviez effectivement promis cette mesure ; nous, nous la mettons en oeuvre ! (Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Roger Karoutchi. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo. Tout à l'heure, M. le ministre nous a reproché de proposer la suppression de mesures qu'il considère comme des avancées, même si elles concernent un faible nombre de personnes.

Ce n'est pas notre genre,...

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non, certes !

Mme Nicole Borvo. ... parce que toute avancée est bien évidemment bonne à prendre.

M. Dominique Braye. Avec vous, c'est le kolkhoze ou personne ! (Vives protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)

M. Gérard Le Cam. Caricature !

Mme Nicole Borvo. Monsieur Braye, si vous continuez, je demande une suspension de séance, et elle sera de droit ! (Exclamations sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Tout à l'heure, vous avez tenu des propos que vous n'auriez jamais dû prononcer dans cette enceinte ! « Certains n'aiment pas la liberté », avez-vous dit ! Monsieur, je vous rappelle que beaucoup des nôtres sont morts pour votre liberté ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste. - M. Dominique Braye s'esclaffe.)

Monsieur le président, je demande une suspension de séance.

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-trois heures.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote sur l'article 77.

Mme Nicole Borvo. Certes, nous déposons des amendements de suppression, mais vous aurez remarqué que nous avons présenté aussi des amendements qui tendaient à améliorer le projet de loi : ils ne sont jamais discutés sous prétexte qu'ils tombent sous le coup de l'article 40 de la Constitution !

Vous proposez des mesures qui ne sont pas financées, vous refusez de discuter de mesures qui, certes, ne le sont pas davantage, mais qui auraient au moins le mérite de permettre un débat sur la réalité des avancées que vous nous présentez

C'est la raison pour laquelle nous sommes contraints de demander la suppression de l'article 77.

M. le président. Je mets aux voix l'article 77.

(L'article 77 est adopté.)