Art. 1er
Dossier législatif : projet de loi relatif au développement des services à la personne et à diverses mesures en faveur de la cohésion sociale
Art. additionnels avant l'art. 1er (précédemment réservés) (interruption de la discussion)

Articles additionnels avant l'article 1er (précédemment réservés)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 23 est présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.

L'amendement n° 121 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Avant l'article L. 129-1 du code du travail, il est ajouté un article ainsi rédigé :

« Art. L. ...  - Les services à la personne regroupent les services contribuant à l'autonomie des personnes ou assurant la garde ou l'accompagnement des enfants. »

La parole est à M. Jean Desessard, pour défendre l'amendement n° 23.

M. Jean Desessard. Cet amendement a pour objet de préciser la notion de services à la personne.

M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° 121.

M. Roland Muzeau. Nous souhaitons faire figurer dans la loi une définition des services à la personne afin de leur donner un cadre strict.

Le projet de loi que nous examinons ne précise en rien ce que sont réellement les services à la personne, mais ne fait que tracer des contours flous et leur donner une géométrie variable. En se contentant de faire référence à la convention qui a été signée entre l'Etat et les acteurs intervenant dans le secteur, le Gouvernement fait un amalgame entre des services très diversifiés, qui répondent à des demandes et à des bénéficiaires extrêmement variés.

Or le projet de loi, s'il est adopté, multipliera la possibilité d'embauches directes par des particuliers, dans le cadre d'emplois à temps partiel peu payés et sans garantie de formation, et introduira de nouvelles et nombreuses exonérations sociales et fiscales, voire des crédits d'impôt. L'argent public étant utilisé pour le développement de tels emplois, ces derniers devraient, en échange, faire l'objet d'un contrôle.

La convention nationale pour le développement des services à la personne a regroupé ces services en cinq catégories. Les deux premières catégories, qui regroupent les services à la famille et les services de santé à domicile, font l'objet d'un consensus. Mais cette convention inclut également les services concernant la vie quotidienne, le logement ou encore la médiation.

Pourtant, l'acception très large de la définition des services à la personne présente de nombreux risques. Il s'agit dès lors de s'interroger sur ce que constitue réellement un service à la personne. Il s'agit également de tracer la limite entre ce qui reste dans le cadre normal des services de droit commun et ce qui caractérise les services voués à rendre un service spécial à la personne, dans le cadre d'une aide familiale ou d'une aide aux personnes en manque de mobilité.

Dans notre économie, largement dominée par le secteur tertiaire, les services représentent plus de 70 % du produit intérieur brut et une grande partie est réalisée au profit des particuliers, notamment par des artisans. Comment ne pas penser alors que les services à la personne, soumis à des exonérations de charges sociales et à des réductions d'impôt, ne vont pas entrer en concurrence avec notre artisanat et faire peser sur lui une charge très lourde ?

Les salariés qui peuvent être employés directement par des particuliers désirant faire appel à leurs services bénéficient, aux yeux de leurs employeurs, d'une meilleure attractivité que l'artisanat classique, mais, du même coup, agitent le spectre d'une concurrence insoutenable pour nombre de petits artisans.

De plus, les services à la personne ont pour vocation à profiter aux personnes malades ou à ceux dont la mobilité est réduite, c'est-à-dire les personnes âgées ou en situation de handicap. Comment, dans ce cas, peut-on accepter que des services de conciergerie en entreprise, de gardiennage, ou de jardinage bénéficient du même statut ?

Ces domaines n'ayant pas de lien direct avec la définition stricte des services à la personne, ils peuvent être multipliés à loisir. Certains amendements, tels que l'amendement de Raincourt examiné tout à l'heure, ont même pour vocation d'étendre davantage encore le champ des services à la personne.

Sous prétexte de faciliter la tâche de nos concitoyens, vous créez un statut d'emplois précaires que vous souhaitez amender le plus largement possible. Cela n'est pas acceptable.

A l'Assemblée nationale, le rapporteur a affirmé que le champ de l'agrément des associations et entreprises fournissant des services à la personne était suffisamment restreint. Mais la coiffure, le jardinage ou le bricolage étant déjà inclus dans les services bénéficiant d'exonérations fiscales ou d'exonérations de cotisations sociales, nous pensons le contraire. Vous comprenez aisément les risques de dérives qui pèsent sur ce dispositif, s'il n'est pas mieux encadré.

Limiter le champ des services concernés à ceux qui contribuent réellement à l'autonomie des personnes, notamment les personnes âgées ou en situation de handicap, ou à ceux qui assurent la garde ou l'accompagnement des enfants est donc absolument nécessaire.

C'est pourquoi le groupe communiste vous propose cet amendement visant à clarifier la situation des services à la personne. Rester dans le flou ne servira ni les prestataires ni les bénéficiaires de tels services, ni même nos concitoyens, qui sont en droit d'exiger qu'une mesure aussi dispendieuse en argent public soit strictement encadrée et limitée à son objet initial.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Bien que les amendements nos 23 et 121 soient identiques, les argumentaires développés sont assez différents.

En tout état de cause, il me paraît inconcevable de vouloir restreindre à ce point les services à la personne, alors que nous souhaitons justement étendre au maximum le champ de tous ces services, dans un cadre, certes, bien défini.

A cet égard, chers collègues de l'opposition, vous l'aurez sûrement constaté vous-mêmes, le projet de loi contient une présentation très précise de ces services, en cinq grandes catégories. Au-delà du champ médico-social, tous les services concernés constituent une opportunité extraordinaire pour contribuer à une meilleure qualité de vie de nos concitoyens.

D'ailleurs, lorsque nous avons examiné tout à l'heure un amendement dont l'objet échappait justement à cette notion de services à la personne à domicile, nous avons été unanimes pour en demander le retrait. En définitive, ce fut un amendement d'appel dont la discussion nous a permis d'encadrer la définition des services à la personne à domicile. Avec bon sens et rigueur, nous avons décidé de ne pas retenir ce service accessoire.

Par conséquent, vouloir imposer, dans un article additionnel avant l'article 1er, une telle restriction dans la définition des services à la personne est totalement contraire à la finalité première du projet de loi, à savoir l'amélioration de la qualité de vie de nos concitoyens. Corrélativement, le Gouvernement entend développer l'emploi, ce qui est, vous en conviendrez, une ambition fort louable par les temps qui courent.

La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements identiques nos 23 et 121.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Même avis que la commission.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. De même que j'avais été moins long que M. Muzeau pour défendre le même amendement, Mme la ministre a été moins longue que M. le rapporteur pour le contrer !

Malgré tout, M. le rapporteur en est resté aux aspects prétendument positifs : il s'agirait d'une « mesure phare », qui favoriserait la création d'emplois. Néanmoins, il n'a pas répondu à l'objection de M. Muzeau sur la concurrence que les artisans risqueraient de subir à la suite des exonérations de charges et des déductions fiscales prévues dans le projet de loi.

Si nous pouvons comprendre des exonérations décidées dans le cadre des missions de service public, nous n'acceptons pas la philosophie du Gouvernement, qui va en fait favoriser la concurrence au détriment des artisans, ce qui ne manquera pas de poser problème.

En conséquence, nous aurons du mal à voter le projet de loi si notre amendement n'est pas adopté.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 23 et 121.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L'amendement n° 164, présenté par Mme Létard et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :

Un rapport du Gouvernement au Parlement présente un état des lieux précis de la répartition des crédits d'action sociale du Fonds national d'action sanitaire et sociale en faveur des personnes âgées (FNASSPA) entre les caisses régionales, analyse les difficultés rencontrées au regard des nouvelles orientations de la branche et prévoit, le cas échéant, des mesures de rééquilibrage. Il examine notamment la possibilité de conclure un avenant à la convention d'objectifs et de gestion de la Caisse nationale d'assurance vieillesse afin de rééquilibrer la répartition de la dotation de façon à permettre le maintien des heures d'aide ménagère destinées aux personnes âgées.

La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. Si chacun s'accorde pour reconnaître la nécessité de développer les services à la personne, notre action dans ce domaine doit être cohérente.

Le présent projet de loi comporte des avancées non négligeables, mais quelle sera sa valeur si, dans le même temps, les crédits d'action sociale destinés à financer l'aide ménagère au profit des personnes âgées sont fortement diminués ?

La question se pose en effet puisque la Caisse nationale d'assurance vieillesse vient de décider de diminuer, pour 2005, la dotation attribuée aux caisses régionales pour ces aides ménagères, décision en contradiction avec la convention d'orientation qu'elle vient d'adopter et dans laquelle elle se fixait pour objectif de favoriser le maintien à domicile des personnes âgées.

C'est pour assurer la cohérence de nos politiques en faveur des services à la personne et des services d'accompagnement des personnes âgées que le présent amendement prévoit le dépôt par le Gouvernement devant le Parlement d'un rapport présentant un état des lieux précis de la répartition des crédits d'action sociale du Fonds national d'action sanitaire et sociale en faveur des personnes âgées entre les caisses régionales, analysant les difficultés rencontrées au regard des nouvelles orientations de la branche et prévoyant, le cas échéant, des mesures de rééquilibrage.

Dans ce rapport, le Gouvernement examinera notamment la possibilité de conclure un avenant à la convention d'objectifs et de gestion de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, afin de rééquilibrer la répartition de la dotation de façon à permettre le maintien des heures d'aide ménagère destinées aux personnes âgées.

Madame la ministre, je sais bien que le présent texte ne concerne pas directement une telle mesure, mais le maintien à domicile et les services à la personne sont bien au coeur de votre dispositif.

Nous attaquons la période estivale : les températures que nous connaissons depuis quelques jours sont tout de même de nature à nous alerter sur la nécessité de maintenir le quota d'heures d'aide ménagère à son niveau du début de l'année.

Or ce n'est pas ce que fait apparaître le montant de la dotation qui est actuellement affectée aux centres communaux d'action sociale, les CCAS, par les caisses régionales d'assurance maladie, les CRAM. Des courriers m'ont d'ailleurs été transmis sur ce sujet par toutes les communes du Nord-Pas-de-Calais et de Picardie, mais je sais qu'il en est de même dans les autres CRAM.

MM. Jean-Pierre Godefroy et Roland Muzeau. En effet !

Mme Valérie Létard. Selon ces courriers, la dotation représente 73 % de l'enveloppe de 2004, plus précisément de l'enveloppe consommée jusqu'au 31 décembre 2004. En effet, il ne s'agit pas de l'enveloppe réellement utilisée puisque tout est décalé dans le temps.

Concrètement, les personnes âgées reçoivent un courrier les informant de la diminution du nombre d'heures d'aide ménagère qui leur sont attribuées. Etant donné qu'une telle diminution est plus que drastique, cela entraînera une diminution des emplois concernés, comme j'ai d'ailleurs pu le constater moi-même dans le CCAS de ma commune.

Aussi, si nous voulons permettre aux CRAM et aux CCAS, pendant cette période de vacances estivales, de s'engager sur leurs propres budgets 2005, sans attendre une réévaluation de leurs enveloppes, il faut leur garantir qu'un avenant pourra éventuellement être présenté devant le Parlement pour réajuster ces subventions.

Si ces instances n'obtiennent pas l'assurance de pouvoir réajuster leurs enveloppes à l'automne, elles ne pourront pas s'engager à maintenir un quota d'heures d'aide ménagère suffisant pendant l'été, qui risque pourtant d'être encore très chaud. Or il importe de ne prendre aucun risque vis-à-vis des personnes âgées. Nous ne pouvons pas accepter qu'elles subissent une réduction par deux des heures qui leur sont accordées, eu égard à la canicule que nous avons connue et qui a laissé des traces que personne n'a oubliées.

Mes chers collègues, je compte donc sur chacun d'entre vous pour adopter une telle mesure, qui n'a d'ailleurs pas réellement de coût. Il s'agit simplement de permettre un réajustement dans l'enveloppe de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, pour affecter les montants nécessaires aux CRAM, qui en ont réellement besoin.

Le fait de prévoir la possibilité d'un avenant à la convention constitue effectivement le seul moyen de « sécuriser » ceux qui vont devoir appliquer les mesures d'aide en faveur des personnes dépendantes.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Ma chère collègue, sachez que nous partageons votre préoccupation ;  vous l'aviez évoquée en commission et devant le ministre chargé de la sécurité sociale qui, dans un premier temps, a essayé de vous apporter quelques assurances dans la mesure où, vous l'avez bien dit, il s'agit d'enveloppes nationales avec des répartitions locales, qui sont uniquement du ressort de chaque CRAM.

Bien souvent, les uns et les autres se réfugient derrière les conventions d'objectifs et de gestion. Il faudrait examiner ces dernières, sachant qu'il serait tout de même préjudiciable que les prestations passent au second plan, derrière, notamment, des objectifs de fonctionnement.

Aujourd'hui, madame Létard, vous soulevez une réelle question, qui va au-delà des problèmes circonstanciels liés à la canicule qui semble s'installer dans notre pays. La diminution, la restriction du nombre d'heures d'aide ménagère est insupportable, et ce pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, une telle diminution va à l'encontre du mieux-vivre que nous évoquions tout à l'heure. Ensuite, si cela aboutissait à une certaine dégradation en termes d'emplois, ce serait totalement contraire à la volonté politique exprimée au travers de ce projet de loi.

Pour ma part, vous le savez très bien, au terme des discussions que nous avons eues en commission, je partage totalement votre préoccupation. Nous ne pouvons pas non plus supporter un tel déplacement d'heures. Il est donc très important, d'une part, d'effectuer un « flash » sur la répartition de l'ensemble de ces crédits et, d'autre part, de rédiger un rapport établissant la vérité.

Par conséquent, au nom de la commission, je souhaite connaître l'avis du Gouvernement sur cet amendement, qui soulève un problème particulièrement sensible.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, les personnes âgées sont au nombre de nos préoccupations majeures.

Mme Létard a fait allusion à la canicule. Pour ma part, pour avoir été chargée de ce dossier au Gouvernement, je puis vous dire qu'il s'agit de prendre en compte la situation des personnes âgées et de les accompagner tout au long de l'année, ce qui nécessite un nombre d'heures suffisant.

La nouvelle convention d'objectifs et de gestion, la COG, se traduit par des crédits. Or Xavier Bertrand - c'était tout le sens de la réponse qu'il vous a faite le jeudi 16 juin, lors de la séance des questions d'actualité - a repris le travail de la CNAV, en lui demandant un réexamen de la COG, afin d'examiner ce dispositif au profit de l'aide à domicile, et tout particulièrement du maintien en volume du nombre d'heures financées en 2005 par rapport à 2004.

En d'autres termes, au lieu d'avoir une approche en termes de budget, il s'agit d'une approche en nombre d'heures, afin d'éviter une diminution du nombre d'heures au profit des personnes âgées.

Le tableau chiffré ou les lettres que vous souhaitez me montrer, madame Létard, je les connais déjà. Xavier Bertrand vient de demander à la CNAV de reprendre le dispositif, afin de l'examiner en fonction du nombre d'heures. Il y aura encore des réunions sur ce sujet cette semaine.

Ainsi, conscient des difficultés qui apparaissent, le Gouvernement réagit immédiatement avec la volonté de conserver, je vous le répète, le même nombre d'heures au profit des GIR 5 et 6, puisqu'il s'agit de personnes relevant de cette catégorie.

M. Roland Muzeau. Il faut de l'argent !

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Dans ce contexte, le Gouvernement est défavorable à cet amendement dont l'objet, par ailleurs, ne se rapporte pas directement au projet de loi, même si celui-ci, dans sa globalité, est relatif aux services à la personne. Vous savez très bien que les conventions d'objectifs et de gestion avec la CNAV relèvent du ministère de la santé. J'entends bien, néanmoins, votre amendement d'appel. C'est bien parce que nous partageons tous votre préoccupation que le Gouvernement poursuit actuellement une telle discussion avec la CNAV.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. Notre collègue, à la faveur de la question d'actualité qu'elle a posée au ministre le jeudi 16 juin et encore aujourd'hui grâce à cet amendement, pose un véritable problème. Or Mme la ministre vient de faire une réponse dilatoire.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Oh !

M. Guy Fischer. Mais si, madame la ministre ! Vous avez en effet répondu qu'il fallait conserver le même nombre d'heures. Mais n'oublions pas que, pratiquement, pour la première fois, la branche vieillesse et la branche famille viennent de basculer dans le rouge.

Par conséquent, par le biais de la convention d'objectifs et de gestion qui est négociée, l'objectif impératif du Gouvernement est de faire des économies. Aujourd'hui, cette volonté s'applique, sans même qu'il soit possible de discuter avec les différentes caisses, toutes les répartitions de crédits ayant été faites.

Pour ma part, en tant que conseiller général du canton des Minguettes, j'ai tenté de négocier les crédits consacrés à la politique de la ville. Or il a été annoncé d'emblée qu'il ne s'agirait que de 73 % du montant initialement prévu.

Par ailleurs, l'objectif de « serrer les budgets », c'est-à-dire de garder un certain nombre de disponibilités, est également très présent. Vous êtes donc en pleine contradiction : au moment où vous incitez au développement des services, le département du Rhône, que je prends pour exemple et qui est confronté au niveau 3 d'alerte du plan Canicule, est touché de plein fouet par les mesures du Gouvernement, comme je peux le constater au sein du centre communal d'action sociale de Vénissieux.

Par conséquent, nous soutiendrons l'amendement n° 164 de Mme Létard.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Godefroy. Madame la ministre, vous venez de reconnaître implicitement qu'il y a un vrai problème.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Personne ne dit le contraire !

M. Jean-Pierre Godefroy. A mon avis, il est fort heureux que Mme Létard ait pris l'initiative de cet amendement, qui nous alerte sur un sujet sensible. Je ne comprends donc pas pourquoi, madame la ministre, vous vous opposez à la proposition de Mme Létard sur la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement. Il s'agit en effet d'un sujet tout à fait important qui nous interpelle quotidiennement et qui peut avoir des incidences graves.

Puisque vous prenez actuellement des mesures dans ce domaine, madame la ministre, pourquoi refuser un rapport qui nous rassurerait et qui, le cas échéant, nous permettrait de faire valoir nos observations ? Une telle disposition me paraît la moindre des choses s'agissant d'une situation aussi difficile.

Par conséquent, le groupe socialiste votera l'amendement n° 164.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Il est dommage que M. le rapporteur n'ait pas finalement donné son avis, lui qui se vante des aspects novateurs de ce projet de loi ! J'aurais aimé qu'il commente le point de vue de Mme la ministre, pour laquelle il s'agit d'un problème non pas de budget, mais de volume d'heures. Cette assertion semble explicite pour tout le monde. Pour ma part, j'ai du mal à la comprendre.

Si l'on dispose de plus d'heures, le budget, me semble-t-il, est plus important. Si l'on réduit le budget, on réduit les heures, ou bien on ne paie pas certaines heures, ce qui, effectivement, serait novateur, et M. le rapporteur nous expliquerait sans doute pourquoi. Par ailleurs, il n'est pas non plus question de changer le tarif horaire. J'ai donc vraiment du mal à comprendre la différence entre un volume budgétaire et un volume d'heures, et j'aurais vraiment besoin d'explications. Si Mme la ministre ou M. le rapporteur pouvaient nous en donner, ce serait très intéressant.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.

Mme Valérie Létard. Madame la ministre, j'ai bien entendu vos explications, mais je dois préciser que cet amendement concerne non pas directement votre ministère, mais bien l'ensemble du Gouvernement. En outre, la question posée n'est pas sans lien avec l'objet même du présent projet de loi. Il est donc urgent de nous donner des assurances.

Oui le nombre d'heures est minoré. Il est vrai que M. Bertrand s'est engagé à examiner ce qu'il en est dans les faits. Or, dans cet amendement, il est prévu de systématiser la possibilité de réajuster une situation en fonction de la réalité du terrain, lors des périodes sensibles comme celles que nous allons vivre, avec un nombre d'heures envisagé le plus justement possible, grâce à une évaluation qui tiendra compte des réalités de chaque CRAM, dans une logique non pas d'expansion, mais de rationalisation.

Selon moi, l'adoption de cet amendement permettrait d'éviter les situations dramatiques dans lesquelles les services, qu'ils dépendent des centres communaux d'action sociale ou qu'ils soient associatifs, se trouvent plongés chaque année. En effet, en milieu d'année, alors qu'ils ont déjà consommé une bonne partie de l'enveloppe qui leur est attribuée, on leur annonce que leur budget sera réduit de 25 %, voire de 30 %. Quand vient s'ajouter à cela une augmentation du nombre des demandes par rapport à l'année précédente, on atteint un niveau d'amputation des budgets proche de 40 % ou de 50 % ! Que reste-t-il alors pour terminer l'année et attaquer la période d'été ? L'avenant proposé permettra, le cas échéant, de ne pas se retrouver devant cet obstacle insurmontable.

C'est la raison pour laquelle je maintiens cet amendement. S'il le faut, je continuerai à le défendre avec conviction, car il y va de l'intérêt général, de l'intérêt des personnes en situation de fragilité. A mes yeux, il n'est donc pas possible de ne pas voter un tel amendement de bon sens.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Dominique Leclerc, rapporteur. Je voudrais tout d'abord rassurer notre collègue Jean Desessard.

Mme Létard a effectivement interpellé la commission à deux reprises, et à juste titre. Toutefois, la discussion qui a suivi pourrait être source de confusion.

Sur le fond, en effet, nous partageons tous la même préoccupation, à savoir la nécessité d'apporter un soutien aux personnes âgées, et nous reconnaissons qu'en l'espèce des répercussions sur la vie quotidienne des personnes âgées sont prévisibles. Reste que, comme Mme Létard vient de le reconnaître elle-même, cette mesure a peu à voir avec le projet de loi dont nous discutons ce soir.

Au surplus, même si ma position n'est pas facile, je me dois de donner l'avis de la commission, qui a longuement délibéré sur ce sujet sensible, mais à aucun moment ne s'est prononcée en faveur du dispositif proposé : elle a mandaté son rapporteur pour s'en remettre à l'avis du Gouvernement.

M. le ministre a récemment répondu à notre préoccupation, en nous assurant de sa volonté de faire réexaminer par la CRAM la convention d'objectifs et de gestion et la répartition des enveloppes.

Quant à Mme la ministre déléguée, elle n'est pas en reste, puisqu'elle travaille depuis plusieurs mois avec pragmatisme et réalisme sur cette question du soutien aux personnes âgées.

La commission souhaitait ce soir que Mme le ministre s'exprime, ce qui est fait.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, votre préoccupation concernant les personnes âgées est bien évidemment partagée par le Gouvernement : depuis plus de deux ans, celui-ci a manifesté une réelle volonté d'agir sans se contenter de rapports, comme certains, et il a avancé en ce domaine. Oui, il est urgent d'obtenir un nombre d'heures plus important, et l'engagement du Gouvernement n'a pas d'autre sens : M. Xavier Bertrand sait qu'il doit agir dès maintenant pour renégocier, bien en amont d'un éventuel rapport.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement reste défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.

M. Roland Muzeau. Franchement, on nage dans des explications aussi insatisfaisantes les unes que les autres !

Madame la ministre, vous avez du mal à vous en sortir ; je vous comprends, et je n'aimerais pas être à votre place.

Il est vrai - notre collègue Desessard nous en a fait la démonstration - que le débat entre les enveloppes et le nombre d'heures n'a pas de sens. Ce qui est heure est budget, et ce qui est budget est déclinable en heures !

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Tout dépend de ce que l'on fait d'un budget !

M. Roland Muzeau. Considérons plutôt ce que propose notre collègue Valérie Létard : vraiment, ce n'est pas la révolution pour demain matin !

M. Guy Fischer. Evidemment non !

Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. D'autant moins que cet amendement ne changera rien au problème !

M. Roland Muzeau. Il s'agit du dépôt d'un rapport et de la « possibilité », le cas échéant, de l'ouverture d'enveloppes complémentaires. Si cela suffit à effrayer la majorité, je n'y comprends plus rien !

Je voterai cet amendement si Mme Létard ne le retire pas. Cela étant, sur ce point au moins je suis d'accord avec vous, l'urgence est ailleurs, je veux parler des enveloppes qui ont été distribuées en avril. Maintenant, le mal est fait et certains ont la rage au coeur, ce qui rend d'autant plus difficiles à entendre les réactions des uns et des autres. Au mois de septembre, le mal aura encore progressé et vous pourrez constater les dégâts.

La meilleure mesure serait de rétablir immédiatement les enveloppes. Le Gouvernement y est opposé tout simplement pour des raisons d'économies budgétaires. C'est exactement la même philosophie que pour la politique de la ville, et Guy Fischer a eu raison tout à l'heure d'établir le parallèle, qui n'a rien d'outrancier : c'est au milieu de l'année, alors que l'exercice est à demi écoulé, que l'on ampute de 25 % les enveloppes de la politique de la ville, en invitant chacun à se débrouiller et à faire au mieux !

La situation est donc particulièrement difficile. Si cet amendement n'est pas adopté, cela signifie clairement que le Gouvernement ne veut pas revenir sur ces enveloppes.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 164.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

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