M. le président. Le débat est clos.

Acte est donné de la déclaration du Gouvernement, qui sera imprimée sous le n° 120 et distribuée.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à quinze heures cinq, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.)

PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

3

Hommage aux victimes d'attentats en Algérie et au Liban

M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, vous le savez, dans la journée d'hier, deux attentats ont à nouveau frappé cruellement l'Algérie.

Conformément au souhait de M. Christian Poncelet, président du Sénat, et à la demande de M. Claude Domeizel, président du groupe interparlementaire d'amitié France- Algérie, je tiens à saluer la mémoire des nombreuses victimes de ces actes terribles et odieux qui ont touché un pays ami et ont pris pour cible le Haut commissariat aux réfugiés.

Vous comprendrez, par ailleurs que le président du groupe d'amitié France-Liban exprime également son émotion et, j'en suis sûr, celle de l'ensemble de notre Assemblée, après l'odieux attentat qui a aussi frappé ce pays.

Au nom du Sénat tout entier, j'assure le peuple algérien, tout comme le peuple libanais, de notre solidarité dans cette nouvelle épreuve et de notre volonté de combattre sans relâche le terrorisme international.

Mes chers collègues, je vous invite à observer un instant de recueillement.

(Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et observent une minute de silence.)

4

Demande d'autorisation d'une mission d'information commune

M. le président. M. le président du Sénat été saisi par M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales, M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles, et M. Jean-Paul Emorine, président de la commission des affaires économiques, d'une demande tendant à obtenir du Sénat l'autorisation de désigner une mission d'information commune sur les politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion.

Le Sénat sera appelé à statuer sur cette demande dans les formes fixées par l'article 21 du règlement.

5

Demande d'examen de projets de loi en procédure simplifiée

M. le président. Mes chers collègues, la commission des affaires étrangères a fait connaître qu'elle demandait l'examen en procédure simplifiée de cinq conventions inscrites à l'ordre du jour de notre séance du mercredi 19 décembre, à quinze heures :

- Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Turquie sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (n° 78, 2007-2008) ;

- Projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Corée (n° 456, 2006-2007) ;

- Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine sur le transfèrement des personnes condamnées (n° 457, 2006-2007) ;

- Projet de loi autorisant l'approbation de l'accord-cadre entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des États-Unis d'Amérique relatif à la coopération dans le domaine de l'exploration et de l'utilisation de l'espace extra atmosphérique à des fins pacifiques (n° 77, 2007-2008) ;

- Sous réserve de son dépôt sur le bureau du Sénat, projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Surinam relatif à la coopération transfrontalière en matière policière, signé à Saint-Laurent-du-Maroni le 29 juin 2006.

Ces cinq projets de loi s'ajouteraient au projet de loi autorisant l'approbation de l'accord européen relatif au transport international des marchandises dangereuses par voies de navigation intérieures (ADN) (n° 270, 2006-2007) pour lequel la conférence des présidents avait déjà décidé de recourir à la procédure simplifiée.

En conséquence, sur les sept conventions inscrites ce jour-là, seul le projet de loi autorisant la ratification d'une convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme sera examiné selon la procédure habituelle, sauf si un groupe politique demandait le retour à cette procédure pour l'une des six autres conventions au plus tard le lundi 17  décembre, à dix-sept heures.

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Dossier législatif : proposition de loi relative aux personnels enseignants de médecine générale
Discussion générale (suite)

Personnels enseignants de médecine générale

Adoption des conclusions du rapport d'une commission

(Ordre du jour réservé)

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi relative aux personnels enseignants de médecine générale
Article 1er

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Francis Giraud et plusieurs de ses collègues relative aux personnels enseignants de médecine générale (nos 70, 114).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Francis Giraud, auteur de la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Francis Giraud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui une proposition de loi que j'ai déposée avec nombre de mes collègues, relative aux personnels enseignants de médecine générale.

Ce texte s'inscrit dans la continuité de certaines dispositions que nous avons votées, voilà cinq ans, et que je vais rappeler.

La loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, et plus précisément son article 60 portant réforme du troisième cycle des études médicales, a érigé la médecine générale au rang de spécialité médicale.

Dans un objectif de revalorisation et d'amélioration de la formation, la médecine générale est, depuis lors, considérée comme une spécialité à part entière et une discipline universitaire à laquelle on accède via l'internat, mettant ainsi fin au régime du résidanat.

Sans doute, d'ailleurs, cette disposition trouve-t-elle son origine dans un rapport des professeurs Jean-François Mattei et Jean-Claude Etienne, alors députés, recommandant, dès 1997, la création d'une filière de médecine générale à l'internat.

L'objectif de la réforme de 2002 était triple : il s'agissait, d'une part, de donner à l'ensemble des médecins la meilleure formation possible, d'autre part, de mettre fin à la marginalisation des médecins généralistes trop souvent sélectionnés par l'échec et, enfin, de les hisser au rang de leurs collègues spécialistes.

Le système antérieur contenait, en effet, il faut bien l'avouer, une dévalorisation de fait de la médecine générale. Il entretenait un amalgame, dans l'esprit de l'opinion publique, entre compétence, voire qualité professionnelle, et exercice spécialisé.

Cette situation pernicieuse induisait une sorte de discrimination néfaste au sein du corps médical, qui, hélas ! perdure de nos jours. Ainsi, les actes techniques, voire les machines, sont-ils mieux rémunérés que la réflexion et l'examen clinique !

Enfin, il convenait de rendre à la médecine générale toute son attractivité dans un contexte de démographie médicale préoccupant, notamment chez les omnipraticiens, dont la population pourrait décliner de 13 % à 15 % dans les prochaines années.

Désormais, tous les étudiants souhaitant effectuer un troisième cycle d'études médicales doivent, sans exception, se présenter à l'internat, devenu un examen national classant, dont il y aurait beaucoup à dire...

Les premières épreuves d'internat organisées selon les nouvelles modalités ont eu lieu en 2004. La médecine générale est dorénavant soumise au même régime que les autres spécialités et la durée de la formation a été portée de deux ans et demi à trois ans.

L'enjeu de cette réforme est d'importance, tant il est vrai que la médecine générale est la discipline qui accueille le plus grand nombre d'étudiants : pour la seule année 2007, ce sont 2 600 d'entre eux qui ont été diplômés au terme d'une formation de trois ans.

Ces milliers d'étudiants, donc de futurs médecins, il convient de les former, de leur offrir le meilleur encadrement possible, avec des cours théoriques, des enseignements dirigés et des stages en médecine ambulatoire.

Aussi la reconnaissance de la médecine générale au rang de spécialité n'est-elle qu'une première étape dans la perspective de la création d'une véritable filière de formation universitaire.

Se fondant sur les dispositions de la loi de modernisation sociale, le Gouvernement a décidé, en 2004, d'organiser une formation spécifique d'interne en médecine générale au sein des universités. Cette formation est sanctionnée par un diplôme d'études spécialisées, délivré au nom de l'État.

Toutefois, qui dit formation, dit formateurs. Or les dispositions législatives et réglementaires, telles qu'elles existent aujourd'hui, ne permettent pas aux universités de recruter des enseignants titulaires pour assurer ces missions. En effet, les enseignants de médecine générale ne relèvent pas du statut des personnels enseignants et hospitaliers des centres hospitaliers et universitaires, ou CHU, définis par le décret du 24 février 1984, dans la mesure où ils n'exercent pas et n'ont pas vocation à exercer leur activité de soins à l'hôpital.

Cette situation pose deux problèmes. D'une part, elle ne garantit pas un recrutement de qualité, nécessaire à l'encadrement de nos futurs spécialistes en médecine générale. D'autre part, elle risque de compromettre la validité des diplômes délivrés, puisque, pour être valablement attribués, ils doivent être avalisés par des enseignants titulaires.

Dans ces circonstances, il convenait d'agir.

Madame la ministre, dès votre prise de fonctions, vous vous êtes efforcée d'apporter des réponses dans les meilleurs délais.

La création de vingt emplois de chef de clinique et de huit emplois de maître de conférences associés supplémentaires, ce qui porte à quarante-huit le nombre des nouveaux postes nécessaires, démontre tout l'intérêt que vous portez à la constitution d'une véritable filière universitaire de médecine générale.

Il n'en demeure pas moins que la création de ces postes, très attendue par toute la communauté médicale, est désormais subordonnée à la création d'un nouveau corps de personnels universitaires : les personnels enseignants de médecine générale.

Tel est précisément l'objet de la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui. Son économie est simple. Je la présenterai très brièvement.

Comme les personnels enseignants et hospitaliers, les personnels enseignants de médecine générale exerceront une activité d'enseignement et de recherche au sein de l'université. En revanche, ils pratiqueront leur activité de soins hors de l'hôpital, au sein de cabinets médicaux.

Le dispositif se borne à fixer le principe et renvoie à un décret en Conseil d'État, dont la rédaction est presque achevée, le soin de fixer les statuts ainsi que les conditions de recrutement et d'exercice des fonctions des personnels.

De plus, afin de permettre aux enseignants de médecine générale actuellement recrutés en tant qu'enseignants associés d'intégrer le nouveau statut qui sera mis en place, la proposition de loi prévoit également que le décret fixera les conditions dans lesquelles ces enseignants pourront être recrutés ou demander à être intégrés dans les nouveaux corps.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je conclurai en réaffirmant une dernière fois toute l'importance de ce texte dont l'adoption est très attendue par la communauté médicale. Cette proposition de loi est plus qu'une simple disposition technique, elle répond à un enjeu majeur. L'adopter, c'est permettre une meilleure harmonisation des études médicales, c'est mettre un terme à la suprématie trop souvent accordée à la technique sur l'aspect clinique, c'est encourager la recherche médicale et, ce faisant, c'est améliorer les soins.

La médecine générale est le pivot de notre système de santé. Elle est centrée sur le malade avant de l'être sur une affection ou sur un organe. Elle est fondée sur des relations personnelles durables entre le patient et le médecin. Le professionnel qui la pratique est un spécialiste de premier recours, qui coordonne avec les autres professionnels de santé les soins donnés au patient dont il assure le suivi. Il participe ainsi grandement à une démarche de santé publique.

Madame la ministre, monsieur le rapporteur, grâce à vous, la loi relative aux libertés et responsabilités des universités a fait que les unités de formation et de recherche de santé concourent davantage aux orientations stratégiques universitaires.

M. Alain Vasselle. C'est vrai !

M. Francis Giraud. Avec cette proposition de loi, la médecine générale trouvera toute la place qu'elle mérite au sein de l'université.

M. Alain Vasselle. Très bien !

M. Francis Giraud. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi, après quarante ans de vie professionnelle dans les hôpitaux et à l'université, d'exprimer ma joie et ma fierté d'avoir participé à ce processus, sûrement bénéfique pour notre pays. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Mme la ministre applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, tout d'abord, je me réjouis que la commission des affaires culturelles, en charge de l'enseignement, ait été saisie de ce texte, qui constitue un nouvel étage, essentiel, de la réforme des études en médecine générale, non achevée à ce jour.

M. Alain Vasselle. La commission des affaires sociales est frustrée ! (Sourires.)

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. L'article 60 de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, devenu l'article L. 632-2 du code de l'éducation, a réformé le troisième cycle des études médicales. La commission des affaires culturelles s'était d'ailleurs saisie pour avis de ce texte, et avait désigné notre collègue Jacques Legendre en tant que rapporteur.

Depuis cette réforme, ainsi que vient de le rappeler Francis Giraud, la médecine générale est soumise au même régime que les autres spécialités d'internat. Elle est ainsi érigée au rang de discipline universitaire, sanctionnée par un diplôme d'études spécialisées, le DES, de médecine générale.

Cette reconnaissance universitaire rendait nécessaire l'institution d'une filière universitaire complète, spécifique à cette spécialité.

Par ailleurs, la création, par l'arrêté du 25 octobre 2006, d'une option de médecine générale, au sein de la sous-section de médecine interne du conseil national des universités, constitue une étape supplémentaire vers la création d'une telle filière. Mais comme celle-ci n'existe toujours pas aujourd'hui, aucun généraliste enseignant n'a pu être titularisé.

Le fait que la médecine générale, considérée comme peu attractive, soit souvent choisie par défaut par les étudiants constitue une autre préoccupation majeure. En effet, l'analyse des résultats aux épreuves de classement national de 2006 montre la désaffection des étudiants pour cette discipline. Celle-ci est, avec la médecine du travail, choisie en dernier rang par les étudiants !

Cela pose un problème crucial pour notre système de santé, comme l'a d'ailleurs souligné M. Pierre-Jean Lancry, directeur de la santé à la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, dans son rapport remis au mois de février dernier et intitulé Les Conséquences de la réforme de janvier 2004 sur la médecine générale. En effet, de nombreux postes de médecine générale ne sont pas pourvus. Ainsi, en 2006, seuls 1 637 postes sur les 2 353 postes proposés l'ont été. Cela signifie que plus de 30 % des postes ouverts en médecine générale n'ont pas trouvé de candidats intéressés.

Je précise que la moitié des étudiants environ s'oriente néanmoins vers la médecine générale, mais, le plus souvent, après avoir échoué et n'avoir pu accéder à une spécialité ; environ 2 600 étudiants ont été dans cette situation en 2007.

Étant donné que cette formation dure trois ans, ce sont près de 8 000 étudiants qu'il faudra former dans les années à venir. Vous savez, en effet, qu'après avoir verrouillé pendant de nombreuses années le numerus clausus, pensant qu'en réduisant l'offre de soins nous diminuerions la demande, nous devons aujourd'hui former dans l'urgence de jeunes médecins généralistes pour remplacer ceux du baby-boom, qui prendront prochainement leur retraite, mais aussi pour tenir compte tant de l'évolution culturelle des nouvelles générations vis-à-vis du temps qu'elles sont prêtes à consacrer à leur travail que, bien entendu, de l'exigence de soins de la population.

M. Alain Vasselle. Très bien !

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. Cette proposition de loi arrive donc à point nommé. C'est pourquoi je tiens à saluer l'initiative de notre collègue Francis Giraud...

M. Alain Vasselle. Excellent collègue ! (Sourires.)

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. ...et à l'en remercier.

En effet, dans un contexte de sous-effectif des enseignants universitaires dans ce domaine, mais d'un nombre croissant d'étudiants à former, ce texte prévoit de créer un nouveau corps de personnels enseignants en médecine générale.

Suivant les recommandations d'un récent rapport de l'Inspection générale de l'enseignement supérieur et de la recherche et de l'Inspection générale des affaires sociales, leur statut présenterait les caractéristiques suivantes.

En premier lieu, il s'appuierait, comme pour les autres spécialités médicales, sur le triptyque enseignement-recherche-soins. Il s'agit ainsi de garantir le continuum qui existe entre ces trois activités.

En second lieu, ce statut tiendrait compte des spécificités de la médecine générale, en imposant que l'activité de soins soit réalisée non pas au sein des centres hospitaliers universitaires, mais en médecine ambulatoire.

Je me permets d'insister sur ce point très important. En effet, le statut des personnels universitaires-praticiens hospitaliers, que l'on appelle les « PU-PH », leur impose d'exercer leur activité de soins dans le cadre hospitalier, le plus souvent au sein des CHU. Or ce cadre n'apparaît pas adapté à l'enseignement de la médecine générale, dans la mesure où l'exercice de cette dernière ne se situe pas dans les hôpitaux, dont ce n'est pas la mission.

M. Alain Vasselle. C'est exact !

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. Par essence et par définition, la médecine générale est à l'opposé de l'hospitalisation. Elle implique le caractère continu de la prise en charge du patient, dans son cadre de vie familial, social et culturel ordinaire. Le généraliste soigne tous les types de patients et se préoccupe surtout des stades précoces de la maladie. Son rôle en matière de prévention est également essentiel.

À l'inverse, l'hospitalisation concerne la phase aigüe de l'infection et entraîne une prise en charge extérieure au cadre de vie normal du malade.

C'est pour tenir compte des spécificités de l'exercice de la médecine générale que la proposition de loi indique que l'activité de soins est exercée en médecine ambulatoire. Je précise que celle-ci pourra, bien entendu, s'effectuer en mode libéral ou sous un autre statut, par exemple celui de salarié.

La commission des affaires culturelles a estimé que ce texte était tout à fait adapté aux besoins spécifiques de la formation en médecine générale. Elle l'a donc adopté, en y apportant seulement quelques précisions rédactionnelles.

Ainsi a-t-elle fait référence au personnel enseignant « non titulaire », plutôt que « temporaire », cette terminologie étant en adéquation avec celle du statut de la fonction publique. De même a-t-elle préféré la notion de soins « en médecine générale » à celle de soins « primaires ».

En outre, la commission a adopté une disposition de coordination à l'article L. 952-3 du code de l'éducation relatif aux fonctions des enseignants-chercheurs. Elle l'a complété afin de viser, désormais, les nouveaux corps d'enseignants de médecine générale créés par le texte.

Comme vous le constatez, mes chers collègues, cette proposition de loi s'en tient aux grands principes d'organisation de cette filière et renvoie à un décret en Conseil d'État le soin de fixer leurs modalités d'application.

L'un des points délicats sera de préciser l'encadrement quantitatif de l'activité de soins. Parmi les personnes que j'ai auditionnées ou consultées, les propositions allaient d'un jour par semaine jusqu'à la moitié de la semaine ! La solution retenue, quelle qu'elle soit, devra garantir que cet exercice est à la fois suffisant et effectif.

Les modalités de rémunération de cette activité de soins ambulatoires devront être définies de façon à compenser la réduction d'activité professionnelle qu'entraînera, pour les intéressés, l'exercice de leurs fonctions d'enseignement et de recherche. D'après les informations qui m'ont été données, la solution la plus simple et équitable pourrait - je dis bien « pourrait » ! - passer par une convention avec l'Union régionale des caisses d'assurance maladie, afin que les médecins concernés perçoivent la rémunération afférente sous forme de traitements. Il s'agirait, dans un premier temps, d'expérimenter ainsi de nouveaux modes de rémunération.

Par ailleurs, madame la ministre, j'attire votre attention sur la nécessité de ne pas imposer aux futurs enseignants-chercheurs en médecine générale des conditions plus strictes d'accès au nouveau statut que celles qui sont demandées pour les autres spécialités.

M. Alain Vasselle. Très bien !

M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur. Enfin, je souhaite que, en coordination avec la ministre de la santé, vous puissiez rassurer les médecins concernés sur les modalités de leur éventuelle intégration dans les corps d'enseignants ainsi créés. À cet égard, nous souhaitons que le décret prévoie une période transitoire suffisamment longue - probablement d'au moins quatre ans - pour permettre, le cas échéant, cette intégration et assurer la montée en charge du dispositif, en tenant également compte de la pyramide des âges des enseignants concernés.

En définitive, je forme le voeu que ces dispositions permettent d'améliorer l'enseignement et qu'elles impulsent un nouveau souffle à la recherche clinique en médecine ambulatoire. À cet égard, les nouveaux moyens mis en oeuvre avec le pacte et la loi de programme pour la recherche de 2006 doivent la concerner pleinement.

Je souhaite également que cette réforme contribue à revaloriser et à renforcer l'attractivité d'un mode d'exercice de la médecine aussi essentiel dans notre dispositif de soins.

La formation devrait figurer parmi les sujets qui seront évoqués à l'occasion des états généraux de la santé, au mois de janvier prochain. S'agissant de celle des futurs médecins généralistes, nous aimerions que soient prises en compte les autres recommandations des inspections générales. Je pense, notamment, à la nécessaire amélioration de la situation des maîtres de stage.

Tels sont, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les commentaires dont je souhaitais assortir ma présentation du texte voté la semaine dernière par la commission des affaires culturelles et que nous vous proposons d'adopter aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)

Mme Valérie Pécresse, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, c'est avec un grand plaisir que je reviens au Sénat, moins d'une semaine après avoir présenté dans cet hémicycle le budget du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Ce plaisir est d'autant plus grand que, une fois n'est pas coutume, je viens défendre, non pas un projet de loi, mais une initiative du Sénat, que votre assemblée a décidé d'inscrire à son ordre du jour.

M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Très bien !

Mme Valérie Pécresse, ministre. D'emblée, je souhaite remercier M. Francis Giraud et ses collègues d'avoir déposé cette proposition de loi relative aux personnels enseignants de médecine générale. Elle vient, à point nommé, consacrer la reconnaissance des études de médecine générale, auxquelles, vous le savez, je suis très attachée.

Comme M. Francis Giraud et M. le rapporteur l'ont très justement rappelé, cette initiative va parachever un cycle de réformes entamé voilà longtemps déjà. Je crois qu'il n'est pas inutile que j'en rappelle à mon tour la chronologie, tant elle montre bien l'enjeu que représente le texte qui vous est soumis aujourd'hui.

En 1958, la France, sur l'initiative du professeur Robert Debré, a créé les centres hospitaliers universitaires, les CHU, et un corps de personnels qui leur était attaché, les personnels enseignants et hospitaliers.

En associant enseignement, recherche et soins, universités et hôpitaux, cette réforme a permis à notre pays de former des praticiens de grande qualité et de faire progresser, dans le même temps, la recherche médicale.

Toutefois, la médecine générale est restée à l'écart de cette organisation. Pendant de très nombreuses années, les futurs médecins généralistes ont eu un accès limité à la recherche, n'effectuant que des stages de courte durée dans des services souvent peu formateurs.

Une première réforme est intervenue en 1982, avec la loi relative aux études médicales et pharmaceutiques. Destinée à améliorer la formation des médecins généralistes, elle a mis en place une formation pratique hospitalière, une formation théorique de troisième cycle et une spécialisation en médecine générale avec le résidanat.

En dépit de ces aménagements, et comme le rappelle fort justement le rapport de la commission des affaires culturelles, « les insuffisances de notre système de formations médicales devenaient de plus en plus criantes : sélection par l'échec à l'entrée des études, enseignement inadapté, non prise en compte des technologies nouvelles, dévalorisation de la médecine générale, incompatibilité avec les normes européennes... »

C'est ainsi qu'est apparue la nécessité de créer une véritable filière de médecine générale au concours d'internat, disposant d'une formation spécifique et de qualité.

La première étape de cette prise de conscience est intervenue en 1996, avec le rapport des professeurs et députés Jean-François Mattei et Jean-Claude Étienne ; ce dernier a désormais rejoint votre assemblée, mesdames, messieurs les sénateurs.

Leurs recommandations, notamment en faveur de la création d'une filière « médecine générale » au concours d'internat, sont, au terme d'un long processus, à l'origine du texte qui nous rassemble aujourd'hui.

Elles ont tout d'abord donné lieu, en 2000, à un arrêté réorganisant le deuxième cycle des études médicales, puis, en 2002, à l'adoption, dans la loi de modernisation sociale, d'une disposition réformant le troisième cycle des études médicales.

Désormais, tous les étudiants souhaitant poursuivre un troisième cycle d'études médicales sont tenus de se présenter aux épreuves de l'internat et de choisir une discipline en fonction de leur rang de classement. La médecine générale est ainsi devenue une discipline universitaire sanctionnée, au même titre que les autres spécialités de l'internat, par un diplôme d'études spécialisées, un DES.

On pouvait croire que la réforme était achevée. En réalité, elle était au milieu du gué. Il restait encore à donner corps à des dispositions très largement restées à l'état de coquille vide, faute d'avoir été accompagnées des moyens nécessaires pour produire leurs effets.

Les participants à plusieurs colloques et à l'élaboration de différents rapports, issus d'horizons très divers allant de la conférence des présidents d'université aux inspections en passant par des experts, se sont ainsi accordés sur la nécessité de renforcer la filière de médecine générale pour encourager les vocations, pour dynamiser la recherche scientifique et le transfert de ses résultats, en résumé, pour faire du troisième cycle des études de médecine générale une véritable formation « à » et « par » la recherche, à l'instar de tous les troisièmes cycles universitaires.

L'enjeu, vous le savez, est de taille. Face à une demande de soins croissante, dont nous ne pouvons que nous réjouir tant elle traduit un allongement de l'espérance de vie et le progrès des thérapies, il devient nécessaire et urgent de renforcer l'attractivité des formations de médecine générale.

La filière attire la moitié des étudiants en médecine, soit plus de 2 000 étudiants chaque année. Pour toute cette jeunesse, animée par une vocation sincère, ce choix doit être vécu non comme un choix par défaut - comme cela a trop longtemps été le cas -, mais comme un choix voulu, conscient, assumé, fondé sur les compétences et les goûts de chacun.

Pour ce faire, un préalable est indispensable : les étudiants qui ont choisi de s'engager dans l'étude de la médecine générale doivent y trouver une formation de même qualité que celle qui est dispensée à leurs camarades qui suivent d'autres voies.

C'est pourquoi, dès mon arrivée au ministère, j'ai soutenu la création de 20 emplois destinés au recrutement de chefs de clinique de médecine générale. J'ai décidé également d'augmenter les effectifs prévus de 8 emplois de maîtres de conférences associés supplémentaires. À ces postes s'ajoutent 20 autres emplois de médecine générale. Nous aboutissons ainsi à 48 nouveaux postes - chiffre conforme aux voeux de la communauté médicale -, ce qui était une nécessité pour assurer la qualité de la formation de nos futurs médecins.

Toutefois, la création de ces postes est désormais subordonnée à celle de nouveaux corps de personnels enseignants en médecine générale, car leurs futurs titulaires effectuent leur activité de soins non pas à l'hôpital, mais en ville, dans leur cabinet. Les médecins généralistes ne peuvent, en effet, relever du statut des personnels enseignants et hospitaliers.

Tel est précisément l'objet de la proposition de loi qui vous est fort heureusement soumise aujourd'hui, mesdames, messieurs les sénateurs. Elle tire les conséquences de la création d'une filière de médecine générale et répond à une nécessité et à une urgence, à savoir offrir aux 6 000 étudiants qui, à l'heure où je vous parle, suivent une formation de médecine générale, un encadrement de qualité, conforme aux ambitions qui sont les miennes, qui sont les nôtres, pour la médecine française.

Le statut que propose M. Francis Giraud prend exemple sur celui des personnels enseignants et hospitaliers. Il en reprend ce qui, selon la formule du rapporteur Jean-Léonce Dupont, en fait la force, à savoir une triple mission d'enseignement, de recherche et de soins, chaque tâche venant enrichir l'autre, et lui apporte les adaptations nécessaires, liées à un exercice des activités de soins hors de l'hôpital.

En résumé, il s'agit tout simplement, mesdames, messieurs les sénateurs, de faire profiter la médecine générale d'une organisation qui a fait ses preuves et de permettre aux étudiants d'enrichir leur formation des dernières avancées de la recherche, elles-mêmes nourries du contact quotidien des malades.

Nos concitoyens seront ainsi en mesure de bénéficier au plus vite des derniers progrès de la connaissance et des innovations thérapeutiques qui en résultent. La mise en place de ce continuum enseignement-recherche-valorisation de cette dernière s'inscrit pleinement dans le cadre des réformes initiées par le pacte pour la recherche, avec, notamment, la mise en place des centres thématiques de recherche et de soins, les CTRS, et poursuivies par la loi relative aux libertés et responsabilités des universités.

L'intégration renforcée des formations médicales au sein de l'université, votée cet été, doit en effet permettre aux UFR de médecine de se fondre pleinement dans la stratégie globale de l'établissement - M. le rapporteur l'a fort bien rappelé - et, ce faisant, de mieux tirer profit des dernières avancées scientifiques qui ont été réalisées dans d'autres disciplines.

Décloisonner les savoirs pour enrichir la connaissance : la proposition de loi du sénateur Francis Giraud apporte une pierre à cet édifice qui nous rassemble tous.

Pour l'essentiel, le texte qui vous est soumis pose des principes et renvoie à un décret en Conseil d'État le soin d'en fixer les modalités d'application.

Je souhaite à cet instant, mesdames, messieurs les sénateurs, porter à votre connaissance quelques éléments d'information supplémentaires, afin que votre vote puisse être éclairé par l'ensemble des tenants et des aboutissants de cette réforme.

Sur ce point, je tiens à préciser que, dès que la proposition de loi a été inscrite à l'ordre du jour de votre assemblée, j'ai demandé à mes services de travailler à la rédaction d'un avant-projet de décret, qui a été porté à la connaissance de votre rapporteur. Je pense, en effet, que cette méthode, qui ne préjuge en rien le vote du Parlement, est de nature à améliorer le travail législatif en permettant à la représentation nationale de se prononcer en toute connaissance de cause et à la loi, une fois adoptée, de s'appliquer dans les meilleurs délais.

J'ajoute que cette méthode sera de nouveau utilisée pour le projet de loi relatif aux opérations spatiales, qui sera très prochainement soumis à l'examen de votre assemblée, sur lequel je travaille avec le président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, M. Henri Revol.