M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Braye, rapporteur. L’amendement no 187, défendu par M. Danglot, vise à la suppression de l’article 7, qui porte création du PNRQAD. Cela me paraît tout à fait impossible à envisager ! Compte tenu du caractère totalement légitime et nécessaire des objectifs de cette politique, je ne comprends pas, mon cher collègue, que vous puissiez avancer une telle proposition. Si je peux comprendre que l’on ait des interrogations sur le financement du PNRQAD, je comprends moins votre opposition de principe sur ce point. À moins que vous ne connaissiez pas de quartier ancien dégradé : c’est la seule explication au fait que vous soyez contre leur réhabilitation. (Sourires.)

Quoi qu’il en soit, la commission a émis un avis défavorable.

L’amendement no 354 est identique au précédent, mais Mme Khiari l’a motivé par la faiblesse des moyens mis en œuvre. Dois-je comprendre, madame, que vous souhaitiez présenter un amendement qui permette de prélever 200 millions d’euros supplémentaires sur le 1 % logement ? Vous pouviez le faire et aider ainsi Mme le ministre à engager le chantier qu’elle désire lancer ! (Rires.)

Mme Dominique Voynet. Il faudrait surtout supprimer le bouclier fiscal !

M. Dominique Braye, rapporteur. Dans la mesure où vous vous contentez d’exprimer des regrets, je ne peux que donner, à regret, un avis défavorable. (Sourires.)

M. Daniel Raoul. Bien joué, monsieur le rapporteur ! Retour à la case zéro !

M. Dominique Braye, rapporteur. Avec son amendement no 263 rectifié, la commission des finances nous propose une formulation manifestement plus satisfaisante que celle qui figure dans le projet de loi. J’y suis donc favorable.

Monsieur Raoul, vous avez défendu le sous-amendement no 351 rectifié. Or il me semble que la procédure de sélection des quartiers éligibles au programme sera totalement ouverte puisqu’il appartiendra aux communes et aux EPCI qui pensent répondre aux critères fixés par la loi de se porter candidats. Une commission – qui, j’imagine, sera pluraliste, madame le ministre – devrait ensuite arrêter la liste définitive des quartiers retenus. C’est donc à ce stade qu’il conviendra de prendre l’attache des uns et des autres, et je ne suis pas sûr qu’il soit très opportun de mettre en exergue tel ou tel niveau de collectivités territoriales avant la publication du décret.

Mme Christine Boutin, ministre. C’est vrai !

M. Dominique Braye, rapporteur. J’espère, madame le ministre – mais je ne doute qu’il en sera bien ainsi –, que ce PNRQAD s’adressera, sur la base de critères totalement objectifs, indiscutables et vérifiables sur le terrain, aux quartiers qui en ont le plus besoin,…

Mme Christine Boutin, ministre. Absolument !

M. Dominique Braye, rapporteur. … et je regrette avec vous, et avec Mme Khiari, le fait que, compte tenu de l’ambition d’origine et des moyens, le nombre de quartiers concernés sera peut-être plus faible qu’il n’aurait été souhaitable.

Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur le sous-amendement no 351 rectifié.

Je suis naturellement en total désaccord avec l’objet de l’amendement no 353, qu’a défendu M. Courteau, car je ne vois pas ce qui justifierait le fait que les opérations de recyclage foncier ne puissent être réalisées qu’au bénéfice des bailleurs sociaux. Que se passerait-il dans une ville comme Trappes, où l’on compte déjà plus de 80 % de logements sociaux, si le maire était obligé d’en avoir encore davantage ? Vous savez bien, mes chers collègues, que tout est question d’équilibre !

Il ne faut donc surtout pas imposer de tels critères, car, dans certaines communes, cela aggraverait les déséquilibres, dans un sens comme dans l’autre. De plus, pour reprendre l’exemple de Trappes – que vous connaissez bien, puisque le maire, Guy Malandain, est l’un de vos amis –, cela empêcherait les programmes d’accession à la propriété et conduirait à un taux de 86 % de logements sociaux, alors qu’il est déjà de 82 %. Cela ne me semble pas de bonne gestion.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement : là aussi, je fais confiance aux élus.

L’amendement no 586, que nous a présenté Mme Voynet, apporte une précision qui ne me paraît pas dépourvue de bon sens dans la mesure où les actions menées au titre du PNRQAD dans les communes soumises à l’article 55 de la loi SRU doivent permettre à celles-ci de rattraper leur déficit. Je serais donc tenté de m’en remettre à la sagesse du Sénat. (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.)

L’amendement no 350 rectifié, qui est identique à l’amendement no 45 de la commission, met bien en évidence le fait que le PNRQAD a pour objet de développer l’offre locative sociale et les capacités d’hébergement et de réhabiliter le parc privé. J’y suis bien sûr favorable.

L’objet de l’amendement no 357 rectifié me paraît évidemment pertinent, bien que je me demande s’il n’est pas déjà pris en compte dans le texte du projet de loi : celui-ci indique en effet que le PNRQAD a pour objet la réhabilitation du parc privé existant. Je peux toutefois comprendre la motivation des auteurs, qui souhaitent mettre en avant un aspect ayant trait à l’amélioration de la performance énergétique.

La version rectifiée de l’amendement est en outre le résultat d’une modification conforme aux préconisations de la commission. Dans ces conditions, j’émets un avis favorable.

Le sous-amendement no 325 rectifié de la commission des affaires sociales apporte une précision manifestement très utile. La commission des affaires économiques a émis un avis favorable.

Madame Khiari, j’ai bien pris note de la modification de forme du sous-amendement no 585 rectifié. Malheureusement, l’avis de la commission reste inchangé. En effet, la décision de conventionner un logement privé appartient en définitive au propriétaire, et l’Agence nationale de l’habitat ne saurait lui imposer la forme de la convention. Le caractère plus ou moins social du logement privé conventionné conditionne ensuite le montant de l’aide fiscale qui est accordée au propriétaire, puisque, pour un logement à loyer « intermédiaire », la déduction forfaitaire est fixée à 30 % des revenus locatifs alors que, pour un logement à loyer social, elle peut être portée à 45 %. En un mot : plus le logement est à caractère social, plus la déduction potentielle est forte.

Dans ces conditions, il me paraît difficile de fixer dans la loi des proportions de logements conventionnés à loyer social, car, dépendant des circonstances locales et des décisions des propriétaires – éléments que nous ne maîtrisons pas –, elles pourraient s’avérer difficiles à respecter. La commission a donc émis un avis défavorable

M. Thierry Repentin. Le sous-amendement apporte pourtant un complément utile à l’amendement no 47 !

M. Dominique Braye, rapporteur. Un complément que vous estimez utile, mon cher collège, mais que nous apprécions différemment, comme le montrent les arguments que je viens de développer.

J’imagine, monsieur Danglot, que vous avez déposé l’amendement no 188 uniquement pour le plaisir de demander plus : plus de logements, plus de places d’hébergement, plus, plus, plus… D’ailleurs, je ne sais pas pourquoi vous vous en tenez à 50 000 ! Pourquoi pas 200 000 ? Je trouve le groupe CRC moins ambitieux qu’autrefois ; là aussi, je perds mes repères ! (Rires.)

Plus sérieusement, l’objectif de 30 000 logements sociaux a été défini sur la base d’une analyse précise effectuée dans le cadre d’un rapport commandé par la ministre à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine. Il correspond donc à un ciblage précis des quartiers qui pourraient être concernés par le programme et, surtout, à l’enveloppe financière qui sera attribuée au programme.

Dès lors, aucune raison ne justifie une augmentation, j’allais dire – vous savez que j’aime la mer ! – « au doigt mouillé » de cet objectif, à moins que vous ne me présentiez un rapport, concurrent de celui que j’évoquais, qui, établi par une instance dûment agréée et sérieuse, prouverait que cela peut être le contraire. Dans cette attente, j’émets bien sûr un avis défavorable.

J’ai même cru comprendre – mais peut-être va-t-on me contredire – que certains quartiers éligibles au PNRU pourraient être reclassés dans le PNRQAD, ce qui libérerait d’autant plus quelques moyens supplémentaires en faveur de la politique de rénovation urbaine. Mais peut-être était-ce avant la fin des négociations avec les partenaires sociaux…

Quoi qu’il en soit, je suis persuadé que Mme la ministre nous donnera tous les éclaircissements nécessaires et vous apportera un certain nombre d’assurances qui vous permettront peut-être de retirer votre amendement.

En ce qui concerne l’amendement n° 265, il y avait effectivement une ambiguïté dans le texte du projet de loi, qui mélangeait allègrement les objectifs du PNRQAD et ceux, plus vastes, qui étaient définis par le Premier ministre dans le cadre d’une circulaire tendant à lutter contre l’habitat indigne.

Dans ces conditions, la seconde phrase du dernier alinéa n’avait effectivement rien à faire dans le texte du projet de loi. La commission des affaires économiques vous en propose d’ailleurs la suppression dans son amendement n° 47.

Par conséquent, je vous demande de retirer votre amendement, mon cher collègue, puisqu’il est satisfait par celui de la commission.

Enfin, s’agissant de l’amendement n° 266, souhaitez-vous réellement inscrire dans la loi une telle obligation, à savoir le dépôt d’un rapport annuel sur l’état d’avancement et le bilan de la mise en œuvre du PNRQAD ? En effet, j’ai cru comprendre que la mode actuelle était plutôt en faveur de la suppression de ces rapports qui sont régulièrement demandés au Gouvernement par le Parlement.

Monsieur le rapporteur pour avis, la commission a émis un avis défavorable sur tous les amendements prévoyant la présentation d’un rapport. Le fait que vous ayez déposé cet amendement me pose un véritable problème, mais j’aurais tendance à émettre un avis défavorable s’agissant d’un rapport supplémentaire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Boutin, ministre. Avant de donner l’avis du Gouvernement je veux profiter de l’opportunité qui m’est offerte pour vous apporter des précisions sur ce nouveau programme national de rénovation des quartiers anciens dégradés qu’il est proposé d’instituer dans la loi.

Cinq ans après le lancement du programme national de rénovation urbaine et la création de l’ANRU, nous sommes en mesure de mieux cerner, à la lumière des retours d’expérience, le sens, l’utilité et les conditions de réussite de tels projets.

Je vous propose donc, par l’article 7, de donner une dimension nouvelle au renouvellement urbain au travers d’un programme national de requalification des quartiers anciens dégradés en vue de remédier aux difficultés des quartiers de certaines villes qui cumulent des situations de pauvreté, d’exclusion, de chômage, d’illettrisme et d’échec scolaire.

Ces quartiers, caractérisés par un habitat dégradé, sont dans les faits laissés en marge de la société, coupés du reste de la ville. Les moyens classiques s’avèrent insuffisants pour enrayer la spirale de l’exclusion et la disparition de la mixité sociale. Il s’agit donc d’apporter une réponse à la hauteur des difficultés en reconfigurant les lieux, en requalifiant l’habitat et en y restaurant la diversité. User de moyens d’exception pour remédier à des dysfonctionnements urbains et sociaux de la ville, lorsqu’ils tiennent les solutions classiques en échec, c’est cela le renouvellement urbain.

L’État souhaite offrir ainsi un moyen de levier en lançant ce nouveau programme, qui fonctionnera de manière différente et donc indépendante, monsieur le rapporteur pour avis, du programme national de rénovation urbaine, le PNRU, en particulier pour les financements. Les engagements du PNRU seront tenus, j’y insiste.

L’ANRU a traité quelques quartiers anciens dans le PNRU. Cette première expérience confirme toute la complexité de l’action face à une multitude de propriétaires difficiles à mobiliser et à une diversité de situations des différents immeubles. Cette expérience doit maintenant être approfondie dans un nouveau programme spécifique aux quartiers anciens dégradés. La réhabilitation de l’habitat privé, qui est au cœur du métier de l’ANAH, y jouera en particulier un rôle important. Cette deuxième agence d’État sera également fortement mobilisée. Encore plus qu’ailleurs, la détermination et la qualité de l’organisation locale seront donc les clés du succès.

Ainsi, le programme de rénovation des quartiers anciens dégradés sera fondé, à terme, sur une enveloppe de 2,5 milliards d’euros, qui générera des investissements de l’ordre de 9 milliards d’euros. Nous lancerons des actions de réhabilitation de l’habitat privé avec l’ANAH et les opérations d’aménagement, les actions foncières des collectivités et des bailleurs sociaux, les démolitions d’immeubles, ainsi que l’ingénierie de projets qui seront subventionnées par l’ANRU. L’enveloppe sera gérée par l’ANRU, qui sera chargée de la coordination du programme.

L’ANRU et l’ANAH lanceront donc, au début de l’année prochaine, un appel à candidature pour sélectionner les premiers quartiers en juin 2009, dans la limite d’une enveloppe de 330 millions d’euros, dont je peux vous donner le détail car je sais que vous l’attendez.

Cette enveloppe compte 50 millions d’euros, somme qui est inférieure à ce que je pouvais espérer, mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez bien. Des négociations ont toutefois eu lieu. J’ai indiqué que l’accord entre le 1 % logement et l’État était un accord gagnant-gagnant. Mais, pour ce faire, il faut que tout le monde fasse un pas. L’État a fait un pas, mais j’ai entendu que Mme Khiari était prête à m’aider. J’attends donc son amendement. (Sourires.)

À ces 50 millions d’euros sur trois ans, il convient d’ajouter les 60 millions d’euros de l’ANAH sur trois ans par fléchage de crédits, conformément à la priorité donnée par le conseil d’administration de l’ANAH à l’habitat indigne, car il y a là une spécificité que je tiens vraiment à développer en ce qui concerne cette agence.

Il faut bien sûr y ajouter les financements classiques de droit commun sur ces quartiers avec les PLUS et les PLAI.

Cet appel à candidature se fondera sur deux critères : d’une part, la situation du quartier qui prendra en compte sa proportion d’habitat indigne, la tension du marché local du logement et la pauvreté des habitants ; d’autre part, l’engagement global de la collectivité, qui devra montrer sa capacité d’organisation pour mettre en œuvre le projet avec succès.

Le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés permettra ainsi d’apporter une contribution à la résorption de l’habitat indigne et à l’accroissement de l’offre de logements. En transformant les logements sociaux de fait en vrais logements sociaux de droit, la mixité sociale sera garantie.

À cet égard, je tiens à vous dire très clairement que, dans cette volonté politique de rénovation des quartiers anciens dégradés, il ne s’agit bien sûr, en aucune façon, de transformer ces quartiers en quartiers « boboïsés », comme cela s’est fait parfois. Je veux, au contraire, que les personnes qui vivent actuellement dans ces quartiers puissent y rester, mais en ayant des conditions de vie et de logement qui soient dignes.

En outre, je tiens à souligner qu’il résulte d’une enquête de l’USH de juillet 2008 relative au relogement dans le cadre des opérations de rénovation urbaine que 80 % des ménages interrogés se sont dits satisfaits du déroulement de leur relogement, de leur suivi comme de leur nouveau logement. Ces résultats sont donc très encourageants et nous nous appuierons sur cette expérience dans la mise en œuvre du programme national de rénovation des quartiers anciens dégradés.

Je vous prie de m’excuser si j’ai été un peu longue sur cette déclaration liminaire, mais comme c’est la première fois que j’ai l’honneur de développer publiquement ma vision du problème et ma volonté politique de rénovation de ces quartiers dégradés, j’étais heureuse de pouvoir le faire devant la Haute Assemblée

En ce qui concerne les amendements identiques nos°187 et 354, le Gouvernement émet un avis défavorable, puisqu’ils visent à supprimer le dispositif qu’il souhaite mettre en place.

S’agissant des amendements nos 263 rectifié et 44, le Gouvernement émet un avis favorable.

Pour ce qui est du sous-amendement n° 351 rectifié, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Quant à l’amendement n° 353, monsieur Courteau, je comprends votre préoccupation, qui est également la mienne, mais la mesure proposée aurait un effet pervers, car il ne s’agit pas de construire uniquement du logement social. Si l’on veut la diversité, une vie de quartier, il faut des commerces, des constructions neuves, des activités, dans différents lieux. Telle est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable.

En ce qui concerne l’amendement n° 586, le Gouvernement émet un avis défavorable, comme l’a fait M. le rapporteur.

M. Dominique Braye, rapporteur. Non, c’était un avis de sagesse !

Mme Christine Boutin, ministre. Eh bien ! le Gouvernement est plus directif et il émet donc un avis défavorable.

Je comprends la préoccupation exprimée dans cet amendement, mais outre la production de logements locatifs sociaux, la requalification des îlots dégradés a également pour finalité de développer la production de logements à loyer maîtrisé ou libre en vue de favoriser la mixité sociale.

Le Gouvernement émet un avis favorable sur les amendements identiques nos 45 et 350 rectifié.

L’amendement n° 357 rectifié me paraît satisfait, monsieur Lagauche. Par conséquent, je vous demande de le retirer.

Le Gouvernement émet un avis favorable sur les amendements nos 46 et 47.

Le sous-amendement n° 325 rectifié est inapplicable, madame le rapporteur pour avis, car sa rédaction est trop large. En effet, il y a encore nombre d’endroits où il n’existe pas de convention. Je vous demande donc de le retirer.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur le sous-amendement n° 585 rectifié.

S’agissant de l’amendement n° 188, le Gouvernement émet également un avis défavorable. Je tiens cependant à vous signaler, monsieur Danglot, que le Gouvernement veillera à ce que l’offre soit équilibrée entre les deux types d’accueil auxquels vous faites référence.

En ce qui concerne l’amendement n° 264, le Gouvernement en demande le retrait, monsieur le rapporteur pour avis. À défaut, il émettra un avis défavorable. Je redis de façon très claire qu’il n’y aura pas de ponction sur les financements de l’ANRU pour financer la rénovation des quartiers anciens dégradés.

L’amendement n° 265 a le même objet que l’amendement n° 264. Le Gouvernement en demande donc également le retrait.

S’agissant de l’amendement n° 266, personnellement, je ne vois pas d’opposition à votre souhait de dépôt devant le Parlement d’un rapport annuel présentant l’état d’avancement du programme. Je m’en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 187 et 354.

Mme Bariza Khiari. Je souhaite répondre à M. le rapporteur, dont je ne méconnais pas l’expertise en la matière.

Monsieur le rapporteur, vous nous avez inspiré cet amendement de suppression, car vous êtes parfois source d’inspiration : « votre commission ne manque cependant pas de s'interroger sur de nombreux aspects de ce programme, en ce qui concerne tant sa mise en œuvre, sa gouvernance et son exécution que son financement, sur lequel le projet de loi n'apporte aucune précision. » – c’est vous-même qui le dites ! Donc, finalement, monsieur le rapporteur, nous n’avons fait que vous paraphraser.

Quant au financement, vous avez l’air de nous reprocher de ne pas faire de propositions. Si nous pouvions transformer le bouclier fiscal en bouclier social, avec une part substantielle pour le logement, nous le ferions.

M. Dominique Braye, rapporteur. Heureusement qu’on l’a fait, sinon ils n’auraient pas grand-chose à dire !

Mme Bariza Khiari. Cela explique notre vote en faveur de la suppression de l’article, monsieur le rapporteur.

M. le président. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.

M. Thierry Repentin. Mon explication de vote laissera peut-être à M. le rapporteur le temps de répondre à l’excellente interpellation de Mme Khiari s’agissant de l’interrogation de la commission des affaires économiques – que nous avons tous louée – concernant l’applicabilité de ce nouveau plan.

Madame la ministre, si nous souhaitons supprimer cet article 7, c’est parce que, lors de la mise en place du plan de cohésion sociale et du plan national de rénovation urbaine, nous avions longuement discuté à la fois sur les outils et les moyens mobilisables.

Avouez que nous n’avons pas eu le temps de discuter de ce point. Si nous avons refusé, ce matin, d’étendre les missions de l’ANAH aux centres d’hébergement d’urgence, comme nous l’avions fait hier pour l’ANRU par exemple, c’est parce que nous n’avons pas la certitude, à l’heure où nous parlons, que l’élargissement des missions de ces agences ne se fera pas au détriment des missions qu’elles assument aujourd'hui sur d’autres territoires urbains et ruraux et auxquelles nous tenons beaucoup.

Mme Christine Boutin, ministre. Moi aussi, j’y tiens beaucoup !

M. Thierry Repentin. Nous ne savons absolument rien des moyens qui seront alloués pour la mise en place de ce programme, à l’exception de ce que l’on appelle le hold-up ou la ponction d’une partie du 1 % logement.

Tout à l'heure, vous avez indiqué, madame la ministre, que vous aviez passé un accord « gagnant-gagnant » avec le 1 % logement, ramenant la ponction de 300 millions d’euros à 50 millions d’euros. Mais, souvenez-vous, à l’occasion de votre audition, voilà une dizaine de jours, devant la commission des affaires économiques, nous avions souligné le fait que vous n’aviez pas besoin de ponctionner le 1 % logement pour mettre en place le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés, car le temps de montage de ces opérations est tel que vous n’utiliserez pas cet argent.

M. Philippe Dallier, rapporteur pour avis. Justement ! Où est le problème ?

M. Thierry Repentin. Je ne veux donc pas que l’on dise aujourd'hui que l’on a fait un pas vers le 1 % logement.

C’est revenir sur notre argumentation que de dire que vous n’en avez pas besoin actuellement pour le plan national de requalification des quartiers anciens dégradés.

Mme Christine Boutin, ministre. Je ne vous comprends pas !

M. Thierry Repentin. Nous souhaitons donc l’abrogation de l’article 7, en vue de le réécrire ensemble sur des bases nouvelles. J’ai d’ailleurs le sentiment que, depuis une semaine, nous réécrivons ce projet de loi ligne par ligne, ce qui montre qu’il a été élaboré dans une certaine précipitation.

Mme Christine Boutin, ministre. Non !

M. Thierry Repentin. Madame la ministre, donnez-nous des assurances sur les moyens octroyés à l’ANRU et à l’ANAH, pour que cette nouvelle mission n’entre pas en concurrence avec les actions traditionnelles qu’elles mènent.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Dominique Braye, rapporteur. Je ne puis naturellement me dérober à l’interpellation de ma collègue Mme Khiari…

Je maintiens ce que j’ai dit. Je regrette, ma chère collègue, que vous n’ayez pas été attentive aux amendements que la commission a proposés. Nous avons voulu clarifier les missions dévolues à l’ANRU et à l’ANAH. Les choses ont été précisées : l’ANRU sera, si je puis dire, l’ensemblier, tandis que l’ANAH exercera ses compétences régaliennes dans l’habitat privé. Je croyais que vous l’aviez compris : nous ne sommes pas du genre à nous poser des questions sans tenter d’y apporter des réponses.

Compte tenu des problèmes qui se posent dans les quartiers anciens dégradés de très nombreuses villes, nous aurions aimé, il est vrai, disposer de moyens supplémentaires. Vous le comprenez bien, les moyens financiers diminuant, les critères de sélection seront sûrement plus stricts. Mais la commission a défendu un amendement prévoyant deux nouveaux critères, qui sont, à nos yeux, essentiels pour sélectionner ces quartiers.

Mme la ministre vous a expliqué tout à l'heure qu’elle espérait avoir plus de moyens. Pour ma part, je n’ai pas de réponse plus précise sur les moyens financiers. Mais il ne vous aura pas échappé que, entre le moment où nous avons discuté de cette question, il y a deux mois, et aujourd'hui, quelques petits événements se sont produits dans notre pays,…

Mme Odette Terrade. Vous croyez ?

M. Dominique Braye, rapporteur. … qui nous conduisent à nous adapter de jour en jour, voire d’heure en heure. Mme la ministre est d’ailleurs la première à regretter de ne pas disposer de tous les moyens financiers prévus initialement, qui étaient nécessaires pour régler les problèmes des quartiers anciens dégradés. Si elle en avait eu les moyens, je n’en doute pas, elle nous aurait proposé un vaste plan Marshall pour réhabiliter les quartiers anciens dégradés, mais c’est un autre problème !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur Repentin, je vous remercie de me poser toutes ces questions. Toutefois, dans leur globalité, je vous le dis sincèrement, la plupart de vos remarques sont incohérentes, voire contradictoires, même si certaines d’entre elles sont pertinentes.

Vous le savez parfaitement, je tiens à la réhabilitation des quartiers dégradés, qui est essentielle, je le crois vraiment, au lien social dans nos villes. (M. Thierry Repentin lève les bras au ciel.) Laissez-moi vous expliquer, monsieur le sénateur ! Ce programme est, à mes yeux, très important et j’avais réellement l’ambition de le mettre en place.

Lors de mon audition devant la commission des affaires économiques il y a une dizaine de jours, les négociations avec le 1 % logement n’étaient pas encore achevées. Vous me reprochez de ne pas vous avoir informés de leur issue, mais je ne pouvais pas vous en dire plus, ne sachant pas exactement quelles avancées les uns et les autres allaient consentir. Je joue donc totalement la transparence avec vous.

Effectivement, je vous le dis, c’est un accord « gagnant-gagnant » et je joue la vérité des prix. Au lieu de mettre en place un plan plus ambitieux, qui aurait été nécessaire, je le répète, pour la rénovation des quartiers anciens dégradés, avec 300 millions d’euros, l’État a fait un effort et a réduit ses prétentions quant à la participation du 1 % logement, en la ramenant à 50 millions d’euros. C’est vrai, je ne suis pas un ministre qui fait de l’esbroufe ; je dis simplement les choses telles qu’elles sont !

Par ailleurs, si je vous comprends bien, vous arguez du fait que le risque n’est pas grand à l’égard de l’ANRU, puisque les moyens mis à disposition sont faibles. Le risque est mineur, vous avez raison : l’enveloppe est tellement mince que cette nouvelle mission ne peut pas nuire à tous les autres projets importants de l’ANRU, auxquels je ne touche en aucune manière.

En revanche, supprimer ce programme de rénovation des quartiers anciens dégradés, qui doit nous permettre de porter un regard global sur la ville, reviendrait, je le pense sincèrement, à perdre une occasion de lancer des opérations. Comme vous l’avez dit fort justement, je vais naturellement être obligée de réduire la voilure. Je ne le conteste pas mais, en abrogeant l’article 7, on différerait de trois ans le démarrage des travaux.

Je crois profondément que ce programme est important en ce qu’il permet de réunir la ville au-delà de ce qui a été fait et de ce qui doit être encore fait. Je pense notamment aux transports qui relient les différents quartiers. J’aurais voulu donner une perspective plus grande, je vous le dis clairement, à ce programme. Mais si l’on supprimait cet article, on ne pourrait même pas lancer les quelques programmes qu’il me sera encore possible de lancer dans les années qui viennent. Je peux d’ailleurs d’ores et déjà vous dire que vous êtes très nombreux, quelle que soit votre appartenance politique, à vous porter candidat pour bénéficier des plans de rénovation des quartiers anciens dégradés, ce qui montre bien l’intérêt de ce concept.

Monsieur Repentin, laissez au moins l’opération se faire ! Certes, vous avez la liberté de ne pas me faire confiance, mais, je le répète, le risque financier est maintenant mineur.