M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Un très bon travail en effet !

Mme Raymonde Le Texier. … et qui aurait pu être fécond, si ce gouvernement méprisait moins le rôle du Parlement.

Mme Annie David. C’est vrai !

Mme Raymonde Le Texier. En effet, si nous sommes loin de partager les mêmes idées, il n’en reste pas moins que, face à la dégradation continue des comptes de la sécurité sociale, le dialogue au sein de la commission, faisant suite aux rapports équilibrés rédigés par nos cinq collègues, a fait émerger des pistes de réformes structurelles intéressantes.

Premièrement, la question de l’efficacité des exonérations de cotisations et charges sociales et d’un usage plus ciblé de cet outil est une interrogation partagée par beaucoup d’entre nous.

Deuxièmement, la nécessité de porter les crédits destinés à la sécurité sociale au niveau des prévisions de dépenses des organismes telles qu’elles sont adoptées dans les lois de financement devrait recueillir un large assentiment. En effet, au regard de la reconstitution rapide des dettes de l’État à l’égard du régime général, constatée à peine quelques mois après l’opération d’extinction des 5,1 milliards d’euros de dettes antérieures, cette mesure s’impose.

Troisièmement, travailler sur la justice fiscale et taxer, dès le premier euro, les parachutes dorés, golden hello et autres rémunérations accessoires mobiliseraient sans doute au-delà des rangs de la gauche.

Quatrièmement, rechercher des sources de financement pérennes et continuer à travailler autour du forfait social susciteraient également nombre de propositions.

Le rapport de M. Leclerc relatif à l’assurance vieillesse vous alerte, mes chers collègues, sur la nécessité de passer d’une réforme paramétrique à une véritable réforme structurelle, en pointant deux phénomènes : la montée des inégalités entre les générations et la répartition inéquitable de l’effort contributif demandé aux différentes catégories d’assurés sociaux. C’est une réflexion qui nous semble pertinente et qu’il nous semble indispensable de mener sans attendre.

Voilà quelques exemples qui vous montrent que, en laissant aux commissions plus de temps pour travailler, les plans de financement que vous nous proposez année après année pourraient être autre chose que des architectures purement comptables, socialement inefficaces et déjà obsolètes avant même d’être votées !

Nous ne perdrions rien à procéder ainsi. De projets de loi de financement en projets de loi de financement, à force de déficits et d’accumulations de dettes, vous êtes en train d’étouffer le système. S’accorder une pause, et enfin travailler sur le fond, serait même salvateur. Mais vous préférez aller droit dans le mur en klaxonnant, pour que personne ne rate l’impact, plutôt que de prendre le temps de réfléchir aux besoins des Français et au sens de votre action.

Vous allez rejeter cette motion tendant au renvoi à la commission, alors que, cette année encore, votre approche purement comptable s’est révélée désastreuse. Mais ce n’est pas un hasard : avoir une vision uniquement comptable des enjeux conduit à ne se focaliser que sur le déficit et à préparer ainsi la fin du système.

Du fait de votre inaction et de l’alourdissement des charges liées aux intérêts de l’emprunt, les finances sociales se sont encore dégradées. Le découvert de l’ACCOSS a atteint 27,6 milliards d’euros à la fin de l’année 2008, tandis que la hausse des taux d’intérêt a provoqué une montée rapide des charges financières : 930 millions d’euros en 2008, contre 648 millions d’euros en 2007. Le coût des frais financiers est supérieur de 100 millions d’euros à ce que rapporteront les franchises médicales.

Face à cette situation, votre réponse est sidérante : planquer la poussière des découverts sous le tapis de la dette ! C’est ainsi que vous transférez à la CADES 27 milliards d’euros de dettes supplémentaires. Ce transfert de déficit, vous avez le toupet de l’appeler « assainissement des comptes » ! Bel assainissement qui consiste à laisser à nos enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants le soin de payer votre gabegie ! Et pour quel résultat ? Si au moins le refus de travailler sur les réformes structurelles et le gaspillage des fonds publics assurait à court terme l’opulence !

Il suffit de se pencher sur la situation de la branche maladie pour constater que les déficits ne sont pas liés à l’amélioration de la santé des Français. C’est même le contraire : aujourd’hui, notre système voit les inégalités se creuser entre les populations et entre les territoires. La différence d’espérance de vie entre les régions peut atteindre cinq ans, voire dix ans, si l’on compare les zones d’emploi. En moyenne, l’espérance de vie d’un ouvrier est inférieure de sept ans à celle d’un cadre, et l’écart tend même à s’accroître. Cela en dit long sur ce que devient avec vous le « meilleur système de santé du monde ».

Il est plus que temps de sortir de ce mensonge qui veut que la médecine soit libérale, alors qu’elle est largement socialisée. La collectivité consacre 160,7 milliards d’euros à la branche maladie, sans compter la part des mutuelles. Or, dans ce système, la solidarité repose quasi exclusivement sur les assurés et les malades. Ce sont eux qui, à coup de déremboursements, forfaits, franchises, ont supporté les efforts demandés à la branche. Cette année, faute de pouvoir encore alourdir les prélèvements par crainte d’irriter un peu plus nos concitoyens, vous ponctionnez un milliard d’euros sur le budget des assurances complémentaires.

Cette ponction ne sera pas exceptionnelle et aboutira forcément à la hausse des cotisations des ménages ou à l’augmentation du reste à charge. Dans les deux cas, c’est encore une fois l’assuré social qui servira de variable d’ajustement.

M. Guy Fischer. Voilà la vérité !

Mme Raymonde Le Texier. Cette ponction renforcera encore les inégalités : les primes d’adhésion aux mutuelles et aux complémentaires représentent 10 % du revenu des ménages les plus pauvres et moins de 3 % pour les plus aisés.

Les premiers, pour un taux d’effort trois fois plus élevé, bénéficient de contrats offrant des garanties inférieures à celles dont bénéficient les seconds. Tout cela, vous le savez parfaitement, mais c’est moins la réalité qui vous intéresse que la façon dont vous allez communiquer, et ce malgré les sévères mises en garde formulées, entre autres, par M. Jégou au nom de la commission des finances.

Aux autres acteurs de la santé, au monde médical, à l’industrie pharmaceutique, on impose peu de mécanismes contraignants et quasiment aucune sanction. Pourtant, l’augmentation des inégalités en matière de santé s’explique par l’apparition de déserts sanitaires, les dépassements non contrôlés des honoraires, l’absence de médecins en secteur 1 dans certaines zones géographiques et l’engorgement des hôpitaux.

Dans la mesure où la rémunération de ce secteur s’appuie sur la solidarité nationale, il est temps que la question de l’organisation des soins soit clairement posée. Constitutionnellement, il existe un droit à la santé. En revanche, la liberté d’installation dans un système socialisé n’a rien d’essentiel.

Il est temps également de remettre à plat la question de la rémunération des médecins, de travailler sur la notion de forfait, de penser à de nouveaux modes d’exercice.

L’an dernier, nous vous avions déjà interpellé sur l’absence de politique de prévention et de dépistage précoce, sur l’importance du rôle des médecins à l’école et au travail, sur l’encouragement au développement des maisons de santé. Toutes ces bonnes idées ne sont pas notre propriété et nous serions ravis que vous les mettiez en œuvre, car cela améliorerait grandement la situation des Français face à la maladie.

Enfin, nous proposons de modifier les critères d’appréciation du service médical rendu par les médicaments. Aujourd’hui, la moitié des médicaments est comparée uniquement à des placebos. On devrait prévoir une deuxième étape subordonnée à des essais cliniques entre produits comparables, s’ils existent, afin d’éviter que de simples copies à peine différentes de spécialités existantes ne soient considérées comme innovantes, échappant ainsi à la concurrence des génériques. Voilà encore une piste d’action concrète.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cela existe déjà !

Mme Raymonde Le Texier. Sur tous ces aspects, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale ne dit rien. Or, en identifiant ces problèmes, on peut dégager des axes de travail et des pistes de solution. Depuis des années, nous vous indiquons des pistes de réformes. Si vous choisissez de les ignorer, laissez donc les parlementaires travailler en commission sur ces questions dès cette année et, si le projet de loi de financement de la sécurité sociale que nous proposerons n’est pas parfait, du moins ne sera-t-il pas indigent !

Se pose aussi la question de la qualité de notre travail. En effet, un certain nombre de dispositions portent sur l’hôpital. Or, le projet de loi « Hôpital, patients, santé et territoires » doit être discuté en janvier prochain. L’intérêt de se positionner sur ces questions au moment de l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, alors que des changements importants seront discutés prochainement, est très relatif. Vous vous êtes exprimée sur ce point hier, madame la ministre, en regrettant ce problème de calendrier.

Eu égard à l’importance des sommes en jeu, au renforcement des besoins de solidarité liés à la crise, il est plus que jamais nécessaire de rompre avec les demi-mesures et le conservatisme.

C’est ainsi que, si la création d’une contribution de 2 % sur l’intéressement et la participation est une démarche intéressante, sa portée devient ridicule quand elle ne porte ni sur les stock-options ni sur les parachutes dorés. Alors que les plus modestes subissent la crise de plein fouet, les plus riches échappent, une fois de plus, au devoir de solidarité.

Affronter la crise suppose de dégager des moyens nouveaux et de porter haut l’impératif de solidarité. Si vous n’y arrivez pas, laissez agir notre commission. Même si nous n’arrivons pas à nous entendre sur tout, nous serons plus créatifs et plus audacieux que vous ne l’avez jamais été.

Chers collègues de la majorité, je vous invite vivement à nous suivre en adoptant cette motion tendant au renvoi à la commission. À défaut de pouvoir faire entendre nos propres propositions, nous pourrions rechercher les moyens de faire entendre celles de nos cinq rapporteurs, incontestablement plus lucides que le Gouvernement, même si leur surmoi reprend le dessus au moment du vote. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, rapporteur.

M. Alain Vasselle, rapporteur. Madame Le Texier, je serai bref pour répondre aux arguments que vous venez de développer en faveur de cette motion tendant au renvoi à la commission.

Pour commencer, je soulignerai les compliments que vous avez adressés au président et à tous les membres de la commission des affaires sociales. Vous avez considéré qu’elle effectuait un excellent travail, grâce à une participation dynamique de ses membres qui leur permet de se mettre d’accord, assez régulièrement, sur certaines propositions à caractère très technique et de dégager un consensus sur certains sujets.

Il est vrai que, lorsque nous abordons des sujets à caractère plus polémique ou politique ayant trait à la stratégie de réforme, nos points de vue divergent, ce qui paraît naturel à partir du moment où l’on distingue un groupe d’opposition et un groupe de la majorité. Sinon, nous pourrions ne constituer qu’un seul groupe !

Je vous rappelle, mes chers collègues, que la commission travaille beaucoup, et ce depuis plusieurs semaines. Nous avons auditionné pas moins de cinq ministres, M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes, ainsi que des présidents et directeurs de caisses nationales, notamment de la CNAM, de la CNAV et de l’ACOSS. Nous avons examiné le rapport de la Cour des comptes ; la commission s’est réunie durant trois heures et demie. On ne peut donc pas dire que son travail ait été bâclé ou négligé.

Dans ces conditions, est-il pertinent de renvoyer le texte à la commission pour y passer de nouveau autant de temps et en arriver à des conclusions qui risquent d’être identiques ?

Je puis comprendre, madame Le Texier, que vous remettiez en cause, sur la base de votre analyse et de vos objectifs, l’ensemble de la stratégie qui sous-tend le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Vous avez fait référence à l’insincérité de l’ensemble du projet de loi, qui s’appuie sur des données macroéconomiques ne tenant pas compte de la réalité de la situation. Sur ce point, Mme la ministre a rappelé tout à l’heure à Mme David les correctifs qui ont été apportés et qui tiennent compte des observations formulées par le Fonds monétaire international, que vous avez d’ailleurs cité. (Mme Annie David proteste.)

On ne peut donc pas dire que le Gouvernement ait fait preuve d’insincérité et d’absence de transparence, au contraire ! Que vous vous interrogiez sur le caractère volontariste des propositions, c’est sans doute légitime de votre part. Vous devez cependant reconnaître que le Gouvernement et la commission ont pris en considération la modification de ces éléments macroéconomiques, ce qui nous permet de tendre vers une plus grande sincérité.

En ce qui concerne la stratégie de la réforme, elle a été annoncée dès 2004, au moment de sa mise en place. Que les résultats ne soient pas à la hauteur des espérances, chacun peut en convenir ! En tant que rapporteur, je rappelle au Gouvernement la nécessité d’aller plus loin encore dans les réformes structurelles pour atteindre le plus rapidement possible l’équilibre.

Vous reprochez un effet d’annonce, le Gouvernement ayant prévu le retour à l’équilibre en 2012. Tenant compte de la crise financière, le Gouvernement a fait lui-même son mea culpa et annoncé que le déficit serait sans doute un peu plus important que prévu à la fin de l’année 2009 et que l’équilibre ne serait peut-être pas atteint en 2012. Il s’agit donc non pas d’un effet d’annonce, mais du réalisme.

Madame Le Texier, vous avez également fait référence aux risques qu’une telle situation pouvait engendrer pour les plus fragiles de nos concitoyens. Or notre système de protection sociale est tout de même considéré comme l’un des meilleurs au monde.

Mme Christiane Demontès. Il se dégrade !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Certes, on peut considérer qu’il est encore insuffisant, mais c’est celui qui reçoit de l’État le concours financier le plus important, si on fait la comparaison avec d’autres pays.

Enfin, faites preuve de pudeur, madame Le Texier, en ce qui concerne l’insincérité des chiffres du déficit et de l’ONDAM ! Souvenez-vous des ONDAM présentés par Mmes Aubry et Guigou ! Ils étaient multipliés par deux à la fin des exercices en question ! Vous pouvez aussi faire votre mea culpa d’avoir soutenu ces gouvernements.

Mme Christiane Demontès. La sécurité sociale était alors en équilibre !

M. François Autain. Il n’y avait pas de déficit à cette époque ! Aujourd’hui, il est de 120 milliards d’euros !

M. Alain Vasselle, rapporteur. Vous pouvez en donner acte à ce Gouvernement : l’ONDAM 2008 aura été respecté et l’ONDAM 2009 devrait l’être ! Je vous rappelle également que le premier ONDAM respecté fut celui de 1997.

Telles sont les raisons pour lesquelles le renvoi à la commission n’est pas justifié et nous vous invitons à rejeter cette motion. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je voudrais tout d’abord dire à Mme David que je tiens à sa disposition le rapport sur les franchises médicales transmis au Sénat voilà plusieurs semaines.

Mme Annie David. Nous ne l’avons pas eu !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J’en suis désolé, mais ce travail n’incombe pas au Gouvernement. (Mme la ministre fait remettre le rapport à Mme Annie David) Je vais également remettre aux huissiers une quarantaine d’exemplaires, à charge pour eux de vous les distribuer.

M. Guy Fischer. Et le rapport sur la convergence ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le rapport sur la convergence est sorti il y a plus d’un mois. Il a, depuis, fait l’objet d’un large débat à l’Assemblée nationale. Si vous ne l’avez pas eu, je n’y suis pour rien.

M. Guy Fischer. Où est-il ? Perdu à la commission ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Venons-en maintenant, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, à la motion de renvoi à la commission déposée par Mme Le Texier et le groupe socialiste.

M. le rapporteur a très bien répondu sur les hypothèses de prévision. Nous avons révisé les chiffres sans pour autant nous livrer à des manipulations comptables. Je me suis déjà longuement expliqué sur les points de désaccord que nous avons avec la Cour des comptes ; je n’y reviendrai donc pas.

Nous nous situons dans le cadre d’une maîtrise médicalisée des dépenses avec un objectif national des dépenses d’assurance maladie en hausse de 3,3 %. Nous réalisons des transferts entre la branche vieillesse et la branche famille ainsi qu’entre l’UNEDIC et la branche vieillesse, comme cela avait été annoncé en 2003. Nous n’augmentons pas les prélèvements obligatoires. Enfin, nous traçons un certain nombre de pistes de réformes structurelles ; d’autres seront également évoquées tout à l’heure.

La réforme des allégements généraux de cotisations sociales - ou « exonérations Fillon » - constitue un vœu pieux : ce n’est vraiment pas le moment de pénaliser l’emploi ! Quant à la budgétisation des crédits de l’État destinés à compenser les exonérations pour 2009, ce sont bien les prévisions de dépenses des régimes qui ont été prises en compte.

En ce qui concerne les stock-options, le Parlement a déjà adopté, l’an dernier, une contribution spécifique patronale. Elles sont donc désormais taxées à hauteur de 14,6 % du côté des salariés et de 10 % du côté des employeurs, ce qui constitue une augmentation significative.

Enfin, s’agissant de ce que l’on appelle les parachutes dorés, l'Assemblée nationale a adopté un amendement qui assujettit, dès le premier euro, les indemnités de rupture supérieures à un million d’euros aux cotisations sociales. M. le rapporteur propose de renforcer encore cette mesure en assujettissant, dès le premier euro, ces parachutes dorés à la CSG et à la CRDS. C’est, me semble-t-il, une bonne proposition.

M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Absolument !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Grâce à la reprise des 27 milliards d’euros par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, le régime général économisera 1,1 milliard d’euros.

La ponction d’un milliard d’euros sur les organismes complémentaires constitue un reversement parfaitement justifié. J’ai expliqué longuement, hier, en séance, les variations du taux de couverture entre les cotisations perçues et les prestations offertes par les organismes complémentaires. J’ai évoqué aussi les réserves que ces organismes s’étaient constituées. Ce reversement correspond finalement à la prise en charge supplémentaire des affections de longue durée, les ALD, par l’assurance maladie. Les mutuelles ayant eu moins de dépenses à supporter, ce reversement est une question de justice et, comme il s’agit d’un transfert pérenne, nous avons décidé d’augmenter la taxe sur les organismes complémentaires. Nous en rediscuterons évidemment l’an prochain, ainsi que nous le faisons chaque année. Je m’abstiendrai toutefois de prendre des engagements pour les années à venir ; tout dépendra de la situation économique.

Pour toutes ces raisons, madame Le Texier, le Gouvernement ne saurait approuver cette motion de renvoi à la commission. J’ai le sentiment que nous avons discuté au fond de toutes ces questions. Nous continuerons d’ailleurs de le faire, notamment lors du débat sur l’hôpital public. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

M. le président. Je mets aux voix la motion n° 458, tendant au renvoi à la commission.

(La motion n'est pas adoptée.)

Demande de renvoi à la commission
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2009
Article 1er

M. le président. En conséquence, nous passons à la discussion des articles.

Nous allons tout d’abord examiner la première partie du projet de loi concernant les dispositions relatives à l’exercice 2007.

PREMIÈRE PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L'EXERCICE 2007

Première partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2009
Article 2 et annexe A (début)

Article 1er

Au titre de l'exercice 2007, sont approuvés :

1° Le tableau d'équilibre, par branche, de l'ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(En milliards d'euros)

 

 

Recettes

Dépenses

Solde

 

Maladie

167,6

172,7

-5,0

 

Vieillesse

169,0

172,9

-3,9

 

Famille

55,1

54,9

0,2

 

Accidents du travail et maladies professionnelles

11,7

12,0

-0,4

 

Toutes branches (hors transferts entre branches)

398,3

407,4

-9,1

 ;

2° Le tableau d'équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :

(En milliards d'euros)

 

 

Recettes

Dépenses

Solde

 

Maladie

144,4

149,0

-4,6

 

Vieillesse

85,7

90,3

-4,6

 

Famille

54,6

54,5

0,2

 

Accidents du travail et maladies professionnelles

10,2

10,6

-0,5

 

Toutes branches (hors transferts entre branches)

290,0

299,5

-9,5

;

3° Le tableau d'équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(En milliards d'euros)

 

 

Recettes

Dépenses

Solde

 

Fonds de solidarité vieillesse

14,5

14,4

0,2

 

Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles

14,3

16,5

-2,2

 ;

4° Les dépenses constatées relevant du champ de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, s'élevant à 147,8 milliards d'euros ;

5° Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, s'élevant à 1,8 milliard d'euros ;

6° Le montant de la dette amortie par la Caisse d'amortissement de la dette sociale, s'élevant à 2,6 milliards d'euros.

M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.

Mme Annie David. Avant d’intervenir sur l’article 1er, je voudrais vous remercier, madame la ministre, des précisions que vous avez données sur les deux rapports. L’an dernier, vous aviez toutefois déclaré que vous nous les présenteriez. Peut-être vous avais-je mal compris mais, dans mon esprit, présenter un rapport, ce n’est pas simplement puiser dans une base de données des informations qui sont, par définition, à la disposition de tous.

L’article 1er de ce projet de loi, tout comme l’article 2 d’ailleurs, est d’une très grande importance, car il s’agit d’approuver les tableaux d’équilibre par branche et les dépenses constatées lors de l’exercice clos, ainsi que les montants des recettes affectées aux organismes chargés de la mise en réserve de certaines recettes au profit des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, ainsi que ceux qui correspondent à l’amortissement de leur dette.

Ainsi, notre vote contre cet article ne vous surprendra pas : il témoigne de notre profond regret de constater l’entêtement du Gouvernement à reproduire sans cesse les mêmes erreurs.

Nous nous souvenons tous, mes chers collègues, des promesses du plan Douste-Blazy et nous nous rendons bien compte, aujourd’hui, à quel point il a été inopérant.

Il en est de même du projet de loi de M. Fillon sur les retraites, qui n’a pas permis, loin s’en faut, de réduire le déficit de la branche vieillesse. Et cela n’est pas à mettre sur le seul compte de la démographie. La réponse efficace ne passe pas, contrairement à ce que vous prétendez, par l’allongement de la durée de cotisation, ni par le pillage des quelques excédents des ASSEDIC, qui sont très utiles au vu de la crise qui touche notre pays.

Il y a eu pourtant une époque, pas si lointaine, où les comptes sociaux avaient atteint l’équilibre. Ils étaient même excédentaires ! C’était de 1998 à 2001, une période durant laquelle la gauche était aux responsabilités.

M. Paul Blanc. C’était la croissance !

Mme Annie David. Depuis, la majorité présidentielle n’a eu de cesse de multiplier les mauvais coups en direction de notre protection sociale. Les multiples cadeaux que votre majorité a distribués aux plus riches ont eu pour conséquence de tarir les ressources de la sécurité sociale. Depuis 2007, les exonérations de cotisations sociales se sont multipliées, sans être compensées. De nombreux économistes, qui ne sont pas tous de gauche, se sont d’ailleurs émus de cette situation et, depuis trois ans, les magistrats de la Cour des comptes ne cessent de la dénoncer.

Finalement, ce sont nos concitoyennes et nos concitoyens, toujours eux, qui ne cessent de payer de leur poche les milliards d’euros que vous accordez sans contrepartie aux entreprises ou aux foyers les plus riches.

En 2008, vous êtes même allée jusqu’à imposer aux malades des franchises médicales, n’hésitant pas à comparer l’assurance maladie à une assurance commerciale. C’est dire la conception qui est la vôtre de l’accès aux soins, et le sort que vous entendez lui réserver à l’avenir. Je vous renvoie par exemple aux déclarations du Président de la République sur la prise en charge de la dépendance ! Ces franchises, véritables impôts sur la maladie, sont intolérables, notamment au regard des milliards d’euros que le Gouvernement a été capable de dégager pour les marchés de la finance et de la spéculation.

Il est décidément grand temps d’entreprendre une réforme ambitieuse du financement de la protection sociale dans notre pays, en faisant en sorte que l’ensemble des revenus du travail, même indirects, soient mis à contribution. II est inacceptable que les ressources issues de la spéculation et de l’oisiveté boursière soient moins taxées que les salaires des travailleurs. Il faut revoir l’assiette des cotisations sociales, comme l’avait promis un certain Jacques Chirac, alors Président de la République, qui redécouvrait la crise sociale !

En 2007, vous nous proposiez d’adopter des tableaux d’équilibre, que nous dénoncions déjà, parce qu’ils reposaient sur des estimations très optimistes qui les rendaient insincères.

Comme vous le savez, madame la ministre, cette question de la sincérité se situera au cœur de nos débats. Récemment, la Cour des comptes a refusé de certifier le bilan de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, et n’a pas hésité à contester les chiffres mêmes du Gouvernement en des termes très sévères, constatant « des irrégularités dans la comptabilisation de certaines opérations dont elle a demandé la correction sans obtenir satisfaction ». Ainsi, selon les magistrats de la rue Cambon, le déficit pour l’exercice 2007 ne serait pas de 9,5 milliards d’euros, mais de 10,5 milliards d’euros ! Un milliard d’euros en plus, excusez du peu !

Voter en faveur de cet article reviendrait pour notre groupe à accepter votre politique et les conséquences néfastes que celle-ci a, et ne manquera pas d’avoir, pour les plus faibles de nos concitoyens. C’est pourquoi nous voterons contre cet article. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote sur l'article.

M. Bernard Cazeau. L’année 2007 s’est soldée, une fois de plus, par un dérapage des comptes, le déficit général s’établissant, comme l’a rappelé Mme David, à 10,5 milliards d’euros – si l’on tient compte des problèmes soulevés par la Cour des comptes - et celui des fonds concourant au financement des régimes de base à 2,2 milliards d’euros.

Avec 4,6 milliards d’euros de déficit, l’assurance maladie continue de déraper. Le déficit de la CNAM a certes été réduit de 7,5 milliards d’euros en trois ans, passant de 12,2 milliards en 2004 à 4,6 milliards en 2007. Il diminuerait encore d’environ 600 millions en 2008, pour être ramené à 4 milliards d’euros. En juillet 2004, on nous avait pourtant promis un excédent pour cette année. On en est loin !

Le déficit de la branche vieillesse s’élève à 4,6 milliards d’euros pour 2007, contre 1,9 milliard en 2006. Les prestations augmentent de 6,1 % par rapport à 2006, ce qui était prévisible en raison des effets démographiques. Mais, loin de les juguler, les conséquences de la réforme Fillon constituent aujourd’hui l’un des obstacles majeurs qui empêchent le régime général de renouer avec son équilibre.

Quant à la branche famille, elle est excédentaire pour la première fois depuis 2003. Toutefois, comme pour l’exercice 2006, la Cour des comptes s’est déclarée en juin dernier dans l’impossibilité d’exprimer une opinion sur les comptes de la branche famille, en raison des subterfuges comptables que vous avez utilisés pour obtenir ce chiffre positif !

Enfin, la branche accidents du travail voit son déficit augmenter de 0,4 milliard d’euros par rapport à 2006, pour atteindre 0,5 milliard en 2007.

Il faut ajouter à cela le dépassement de l’ONDAM d’environ 3 milliards d’euros, essentiellement dû aux soins de ville. D’ailleurs, pour la première fois, la procédure d’alerte instaurée par la loi Douste-Blazy du 13 août 2004 a été mise en œuvre en 2007. Toutefois, compte tenu de la date tardive de son déclenchement, elle n’a eu que peu d’incidences sur la rectification des comptes, comme l’a souligné le comité d’alerte le 30 mai 2008.

Je terminerai mon intervention en faisant référence aux propos tenus en 2004 par M. Xavier Bertrand, qui, en tant que secrétaire d’État à l’assurance maladie, avait alors suivi ce texte de très près. Il déclarait alors : « Notre plan est justement crédible car, pour la première fois, il s’attaque aux problèmes structurels de notre système de soins, en créant les conditions d’un véritable changement des comportements. » On a vu ce qu’il en était, notamment pour les soins de ville ! C’est pourquoi nous voterons contre cette première partie.