M. Adrien Gouteyron. … de manière très convenable, je dois le dire, exprimant néanmoins un très grand désarroi, voire de la détresse. C’est vraiment ce que j’ai pu ressentir en dialoguant avec eux.

Compte tenu du retournement des marchés, le prix du lait est une nouvelle fois orienté à la baisse, et la situation n’est plus tenable pour les producteurs, qui réclament un prix juste et équitable face à la grande distribution.

Vous avez récemment adressé un signal fort à la filière laitière, en confortant et en clarifiant la situation juridique du Centre national interprofessionnel de l’économie laitière. Cela permet de revenir à des principes de régulation positive que nous approuvons tous. Mon collègue Benoît Huré l’a fort bien expliqué tout à l'heure.

L’accord signé lundi dernier par les différents acteurs de l’interprofession, s’il exprime sans doute l’esprit de responsabilité des producteurs, est peut-être empreint d’une certaine désillusion. En effet, il prévoit une baisse progressive du prix du lait, d’abord de 2,5 centimes d’euro par litre, mais qui devrait atteindre 5,5 centimes d’euro par litre au mois de mars prochain. Cette perspective n’est, évidemment, guère réjouissante. La filière laitière mérite d’être soutenue, monsieur le ministre.

Par ailleurs, comment ne pas vous entretenir rapidement de l’installation des jeunes ? Vous avez obtenu, et c’est une grande chance pour un département comme le mien, la réévaluation du plafond communautaire pour les aides à l’installation. Nous en avions souvent parlé, et vous m’aviez fait part de votre volonté d’aboutir. Voilà un verrou qui a sauté !

M. Jean-Marc Pastor. À quel prix ?

M. Adrien Gouteyron. Ce plafond est passé de 55 000 euros à 70 000 euros. C’est un progrès considérable, mais, pour des régions comme la mienne, il serait souhaitable qu’il soit encore augmenté, même si je sais que c’est difficile. En tout état de cause, je tiens à saluer le résultat que vous avez obtenu avec, je n’en doute pas, beaucoup de difficultés.

Dans ce projet de budget, vous avez choisi de consolider la politique d’installation des jeunes par une hausse de 13,3 % des crédits, en vous engageant à poursuivre cet effort en 2010 et en 2011.

Monsieur le ministre, l’accord européen sur le bilan de santé de la PAC ouvre des perspectives nouvelles et fait naître un réel espoir. Je sais que vous saurez mobiliser les crédits nationaux qui permettront à notre agriculture de surmonter les difficultés actuelles.

Vous connaissez cette citation d’Alain : « Le pessimisme est d’humeur ; l’optimisme est de volonté. » Je suis frappé de la volonté de beaucoup d’agriculteurs et de responsables agricoles d’échapper à l’humeur et de s’engager avec beaucoup de lucidité et suffisamment d’optimisme dans la voie, enfin ouverte pour des régions de montagne comme la mienne, du développement, et donc de l’espoir. Monsieur le ministre, je tiens, à cette tribune, à vous remercier de votre action en faveur de notre agriculture. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. En préambule, monsieur le ministre, je voudrais souligner la dimension très positive de ce projet de budget et son orientation vers le futur, par le biais notamment des aides aux jeunes agriculteurs et de l’enveloppe des prêts bonifiés.

Je voudrais aussi saluer la profonde restructuration de l’administration centrale et déconcentrée du ministère et de ses opérateurs.

Je centrerai mon intervention sur le fait que le ministre de l’agriculture et de la pêche doit faire face aux conséquences des crises et aléas sanitaires, climatiques et économiques qui surviennent régulièrement dans le monde agricole.

Afin de les prévenir, il me paraît fondamental de prévoir des sommes budgétaires suffisantes dès le vote de la loi de finances, sans avoir besoin de recourir, comme ce fut le cas l’année précédente, à des décrets d’avances.

De plus, il me semble indispensable d’affecter par anticipation la réserve de précaution au financement des crises, cette réserve pouvant notamment être établie selon la moyenne des besoins des années précédentes.

S’agissant plus particulièrement de la situation de l’ostréiculture arcachonnaise, qui a connu, comme chaque année depuis 2005, des fermetures de marché, je voudrais mettre en lumière les difficultés de fonctionnement de ces entreprises ostréicoles, pour lesquelles la constitution d’un fonds de solidarité, d’un fonds de soutien, a été envisagée mais jamais concrétisée.

Outre les difficultés de fonctionnement récurrentes dues à des fermetures de marché pour le moins mal expliquées, les professionnels doivent faire face à une difficulté structurelle liée à la non-propriété de leurs principaux outils de production.

En effet, alors qu’en Charente-Maritime les claires sont installées sur le domaine privé, les cabanes ostréicoles du bassin d’Arcachon sont, comme les parcs, situées sur le domaine public maritime. Les autorisations d’occupation sont donc consenties par l’État ou par son concessionnaire à titre temporaire, le conseil général.

La difficulté principale que pose cette non-propriété tient au fait que les banques demandent des garanties suffisantes pour accorder des crédits. Les ostréiculteurs n’étant pas propriétaires de leur outil de production, les banques exigent fréquemment que leurs bateaux, mais aussi leurs biens personnels, notamment leur habitation, servent de cautionnements.

Les professionnels dénoncent depuis plusieurs années cette situation et soulignent que les bonifications de taux d’intérêt consenties par l’État lors des crises récentes ne sont que des effets d’annonce, car les banques, faute de garanties suffisantes, refusent bien souvent le prêt. Bien entendu, dans le contexte de crise financière actuel, l’offre de prêt est encore plus réduite.

La solution, monsieur le ministre, réside à mon sens dans la création d’un fonds de garantie qui permettrait de cautionner une part significative des prêts d’installation ou des prêts bonifiés accordés en cas de calamités agricoles pour la reconstitution des stocks de naissain.

La constitution de ce fonds de garantie ostréicole me paraîtrait même plus importante que celle du fonds de solidarité précité. Je vous remercie par avance, monsieur le ministre, de faire tout ce qui est en votre pouvoir pour aider à sa mise en œuvre. Nous avons apprécié votre visite sur le terrain au printemps, ainsi que la qualité de votre écoute, au mois de septembre dernier, lorsque vous nous avez laissé espérer la négociation d’un nouveau protocole pour le bassin d’Arcachon, qui est prêt à une expérimentation.

Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre. Nous connaissons votre esprit d’ouverture sur tous ces sujets, qu’il s’agisse de l’anticipation et de la gestion des crises, de la prise en compte des spécificités et de la mise en œuvre des adaptations nécessaires. Dans tous les cas, c’est du renforcement de la sécurité qu’il s’agit, ainsi que de la nécessité de disposer de nouveaux outils. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Blanc.

M. Jacques Blanc. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la qualité des travaux des rapporteurs et des commissions me permet de concentrer mon propos sur trois points.

Le premier concerne votre action européenne, monsieur le ministre.

Nous connaissons votre expérience et votre compétence à cet égard. Elles ont beaucoup contribué à ce que la présidence française de l’Union européenne aboutisse sur deux dossiers.

Ainsi, l’accord du 20 novembre dernier ouvre des perspectives jusqu’en 2013, avec notamment la mise en œuvre d’outils efficaces de gestion des marchés, la mise en place d’instruments de gestion des risques et des crises climatiques et sanitaires, la réorientation éventuelle de certaines aides ciblées vers des secteurs, des zones ou des productions fragiles, en application de l’article 68, ainsi que des mesures visant à accompagner la suppression progressive des quotas laitiers, sujet ô combien délicat !

En outre, cet accord prévoit un renforcement des dispositions en faveur du développement rural, avec le basculement de fonds du premier pilier de la politique agricole commune vers le deuxième – notre collègue Adrien Gouteyron a rappelé combien ce transfert était essentiel pour la production d’herbe –, s’accompagnant d’une prise en compte des défis posés par le changement climatique, la biodiversité, la gestion de l’eau, les bioénergies, l’innovation et l’adaptation du secteur laitier, une certaine progressivité des aides étant introduite.

Par ailleurs, vous avez organisé un conseil des ministres européens exceptionnel, afin de préparer l’après-2013 en engageant la réflexion sur des thèmes aussi essentiels que la disponibilité alimentaire, les équilibres alimentaires mondiaux, les équilibres territoriaux – je reviendrai sur cette question, car Dieu sait si elle est importante ! – et la durabilité de l’agriculture. À cette occasion, il est apparu qu’un grand nombre d’États membres de l’Union européenne étaient disposés à adopter vos vues.

Monsieur le ministre, vous-même et l’ensemble de vos collaborateurs devez être remerciés d’avoir obtenu ces acquis.

Vous avez également dû faire face à des situations difficiles, que j’évoquerai maintenant dans le deuxième point de mon intervention, portant sur l’analyse de votre action à l'échelle nationale.

Ainsi, vous avez lancé un plan d’urgence en faveur de la filière ovine, comportant notamment une somme de quelque 25 millions d'euros dégagée à partir des DPU dormants, à laquelle s’est ajoutée par la suite une aide supplémentaire d’un montant équivalent.

L’élevage ovin avait grand besoin d’un tel soutien, lui qui constitue, comme de nombreux intervenants l’ont souligné, un élément essentiel de la vie du monde rural, en même temps qu’un facteur de développement durable pour nos territoires.

Ensuite, vous avez pris une série de mesures destinées à alléger les charges financières ou sociales des éleveurs en difficulté et mis en place des comités départementaux.

Toutefois, monsieur le ministre, permettez-moi de vous dire que ces allégements ne suffiront pas.

Dans le département que j’ai l’honneur de représenter et qui est peut-être celui qui compte le plus de petites exploitations agricoles, quelque cinq cents éleveurs ovins, tous installés en zone de montagne, produisent environ 120 000 litres de lait chaque année.

Des allégements de charges d’un montant de 800 000 euros ont été décidés en leur faveur, or chacun de ces producteurs de lait acquitte annuellement 2 400 euros de charges en moyenne, soit un total de 1,2 million d'euros…

Aussi, monsieur le ministre, nous vous demanderons un effort supplémentaire en matière d’allégements de charges, faute de quoi les éleveurs ne pourront passer la crise et seront condamnés à la faillite.

M. Jean-Marc Pastor. Tout à fait !

M. Jacques Blanc. En ce qui concerne la fièvre catarrhale ovine, je tiens à vous féliciter, monsieur le ministre, pour votre réactivité. Cette épizootie a créé un véritable traumatisme, mais la prise en charge des vaccinations a été salutaire et vous nous avez permis de passer ce cap difficile. Soyez-en remercié.

Des difficultés sont également à surmonter dans le secteur laitier, pour lequel 2010 devrait être une année plus favorable.

Vous avez su permettre à l’interprofession de trouver un accord, qui a le mérite d’exister.

M. Paul Raoult. Il est bien fragile !

M. Jacques Blanc. Il est vrai qu’il toujours difficile, pour les producteurs, d’accepter des baisses de prix, mais c’est une attitude responsable. D'ailleurs, monsieur le ministre, vous avez laissé espérer de nouveaux DPU, et peut-être même une extension de la prime à l’herbe en 2010, qui devrait compenser une partie de la baisse du prix du lait.

Nous devons rester vigilants quant à ces perspectives de long terme, mais le plus urgent est de passer le cap de l’année 2009, grâce en particulier aux mesures que j’évoquais à l’instant.

Enfin – ce sera le troisième point de mon intervention, et le plus général –, je tiens à souligner, après nombre de nos collègues, qu’une véritable politique de la montagne est nécessaire.

Monsieur le ministre, vous connaissez parfaitement ce dossier, et vous avez eu le courage – je le dis publiquement – d’affirmer la nécessité de défendre l’élevage dans des zones difficiles telles que la montagne. Je sais que nous pouvons compter sur vous.

Lundi dernier, j’ai organisé à Aumont-Aubrac, en Lozère, un séminaire de la commission pour l’agriculture et le développement durable du Comité des régions de l’Union européenne. À l’issue de nos travaux, nous avons adopté une série de conclusions, que je vous ai d'ailleurs d'ores et déjà transmises.

Pour nous, le principe de cohésion territoriale qui figure dans le traité de Lisbonne, dont j’espère qu’il finira par être approuvé par tous les États membres, doit permettre de lancer une politique de la montagne encore plus active à l'échelle européenne.

Nous souhaitons que la Commission européenne rédige un Livre vert sur cette question, comme M. Barroso l’avait d'ailleurs promis au Comité des régions de l’Union européenne. La montagne ne doit pas seulement constituer le sujet d’un chapitre de ce document ; elle mérite d’être prise en compte dans une perspective nouvelle : c’est cela, le développement durable !

Votre grand mérite, monsieur le ministre, a été précisément de jouer le jeu du développement durable avec les agriculteurs. Ceux-ci ne doivent pas être montrés du doigt ! Au contraire, ils sont des acteurs indispensables de la préservation de la qualité de la vie et de l’environnement.

En ce qui concerne la PHAE et les ICHN, je vous remercie d’avoir ajouté 12 millions d'euros aux crédits prévus. Ainsi, les ICHN pourront être augmentées de 5 % pour les vingt-cinq premiers hectares. Par ailleurs, des efforts ont été consentis en faveur de l’installation des jeunes agriculteurs et de la mise aux normes des bâtiments d’élevage.

Pour conclure, nous devons montrer aux agriculteurs, quelles que soient leurs difficultés actuelles, voire leur détresse, qu’il y a des raisons d’espérer. En effet, l’agriculture est non pas un boulet que nous traînons, mais une chance pour notre pays ! Quand il était Président de la République, Valéry Giscard d’Estaing avait parlé de l’agriculture comme du « pétrole vert » de la France. Eh bien oui, elle est une chance pour le développement durable !

Ne laissons plus dire que la PAC coûte trop cher à l’Union européenne, alors qu’elle est, ou peu s’en faut, la seule véritable politique commune européenne ! Et elle est tournée non pas vers le passé, mais vers l’avenir, comme le montrent d'ailleurs vos efforts, monsieur le ministre, en faveur de la recherche agronomique et de l’enseignement supérieur agricole.

Nous soutenons votre action et nous voterons les crédits de cette mission. Mais surtout, offrons, ensemble, une espérance nouvelle à tous nos agriculteurs ! (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. Gérard César, rapporteur pour avis. Vive la France !

Mme la présidente. La parole est à M. Louis Pinton.

M. Louis Pinton. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon intervention portera, comme beaucoup d’autres, sur la fièvre catarrhale ovine, mais je présenterai cette dernière sous un aspect quelque peu différent, et moins optimiste.

La fièvre catarrhale ovine crée des désordres importants dans les élevages, mettant en péril, outre la santé des animaux, les équilibres budgétaires.

Aujourd'hui, la réponse apportée aux perturbations sanitaires et économiques dues à l’épizootie tient essentiellement dans la vaccination des cheptels.

Toutefois, cette solution trouve ses limites, qui sont liées tant à la complexité épidémiologique de la maladie qu’à la façon dont on pratique la vaccination. En effet, pour que celle-ci soit le plus efficace possible contre un sérotype donné, elle doit concerner tous les sujets sensibles sur l’ensemble du territoire où peut sévir l’agent pathogène, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

La vaccination répond assez bien à une logique d’élevage, mais pour qu’elle puisse empêcher la circulation du virus, elle doit être totale et porter sur tous les animaux. Or, aujourd'hui, on vaccine par anneaux concentriques autour des cas qui ont été repérés.

En outre, les ruminants sauvages, tels que les cerfs ou les chevreuils, ne sont pas vaccinés, alors qu’ils seraient sensibles à la maladie…

M. Paul Raoult. Abattons tous les sangliers !

M. Louis Pinton. … et constitueraient donc des réservoirs de virus.

Par ailleurs, la complexité épidémiologique ne permet pas aujourd’hui d’envisager la disparition de la maladie : vingt-quatre sérotypes du virus de la fièvre catarrhale ovine sont connus, et à chacun d’eux correspond un vaccin.

Aujourd’hui, en France, sont apparus les sérotypes 1 et 8. Il est raisonnable de penser que d’autres se manifesteront, comme c’est d'ailleurs le cas en ce moment du sérotype 6. Or dès qu’un sérotype nouveau apparaît, le vaccin qui lui correspond doit être fabriqué et administré aux sujets susceptibles d’être infectés.

Si l’on considère que, sur les vingt-quatre sérotypes, deux pourraient apparaître tous les ans, il nous faudra douze années pour faire disparaître définitivement la maladie, et c’est là l’une des grandes difficultés auxquelles nous sommes confrontés. La vaccination, en quelque sorte, court derrière les nouveaux sérotypes, lesquels ne manqueront pas de se manifester.

De surcroît, en ce qui concerne la dissémination de la maladie, on imaginait qu’il n’existait qu’un seul vecteur, un moucheron, le culicoïde. Désormais, on estime que de très nombreux insectes ou acariens seraient vecteurs de cette maladie, dont ils assurent la propagation.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, la vaccination pourrait montrer ses limites, même si je n’ignore pas que, pour le moment, nous ne disposons guère d’autres solutions.

Comme vous vous en doutez, mes chers collègues, il ne s’agit pas là de considérations personnelles : j’ai recueilli les avis d’éminents spécialistes. En particulier, le professeur François Schelcher, spécialiste de pathologie bovine à l’école vétérinaire de Toulouse, qui fut mon camarade d’études, a confirmé la justesse de mes observations. Il m’a cité l’exemple de l’Espagne, qui a tenté d’éradiquer la maladie par la vaccination et qui constate aujourd'hui les limites de cette politique.

D’autres logiques pourraient donc être suivies, surtout pour les élevages de bovins allaitants.

Tout d'abord, une autre logique médicale : en cas d’épidémie incontrôlable par la vaccination, il faut envisager la quarantaine.

Ensuite, une autre logique économique, complémentaire et conforme aux nécessités de la précédente : elle consiste à maintenir les animaux sur place.

Or, aujourd’hui, les éleveurs des zones défavorisées produisent des broutards maigres, qu’ils déplacent ensuite pour les faire engraisser hors des territoires où ils sont nés.

Cette pratique, outre qu’elle cantonne ces éleveurs dans un système de production d’une matière première – les broutards – qu’ils ne valorisent pas jusqu’au bout, favorise la circulation des bovins et certainement celle du virus, donc la propagation de celui-ci.

De plus, pour parer aux conséquences de cette circulation, particulièrement en cas de crise sanitaire, toute une réglementation et le contrôle qui en relève se mettent en place. La contrainte qui s’y attache nuit gravement à l’activité économique et à la rentabilité des élevages.

Cette circulation est-elle inévitable ? C’est certainement l’une des questions que l’on doit se poser.

Aussi, ne serait-il pas plus efficace, en complément de la vaccination, de favoriser une politique volontariste d’engraissement des animaux sur le lieu même de leur naissance, grâce à des aides ciblées et adaptées ?

Dans le même temps, cela supprimerait un facteur de propagation de toutes ces épidémies à répétition.

Médicalement, cette politique satisferait au principe de la quarantaine, qui, bien que très ancien, reste pertinent. Économiquement, elle permettrait aux éleveurs d’accomplir la totalité du cycle de production en « finissant » leurs animaux sur place. Elle stimulerait le développement de filières locales, abattoirs et entreprises de transformation.

Ne s’agirait-il pas d’une réponse médicale et économique plus appropriée ? Je vous pose la question, monsieur le ministre. Nous nous soucions tous de préparer l’avenir, cet avenir auquel je m’intéresse beaucoup, car c’est là que je compte passer les prochaines années ! (Sourires et applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Bailly.

M. Gérard Bailly. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, deux heures viennent de sonner : je vais donc écourter mon intervention, pour me concentrer sur quelques points. De toute façon, tout n’a-t-il pas déjà été dit ?

Monsieur le ministre, vous venez de vivre des semaines chargées avec la conférence nationale sur le revenu agricole et, surtout, le bilan de santé de la PAC.

Il est superflu de vous dire que votre plan d’urgence a été le bienvenu. Ces 250 millions d’euros en faveur des agriculteurs, dont 50 millions d’euros pour les éleveurs d’ovins, qui voient leurs revenus baisser depuis plusieurs années, avec même une chute de 15 % en 2008, représentent un effort indispensable.

En effet, la situation des éleveurs est particulièrement difficile : ils subissent de plein fouet l’augmentation du coût de l’énergie, des aliments, et même de la paille dans les zones de montagne ; en outre, ils souffrent de la valorisation insuffisante des productions, la fièvre catarrhale, souvent évoquée ce soir, venant fragiliser encore davantage bon nombre d’exploitations.

À ce propos, les vétérinaires de mon département aimeraient savoir si les vaccins seront bien disponibles dans les premières semaines de 2009. Les éleveurs se demandent qui devra les payer. Peut-être pourrez-vous nous éclairer sur ce point, monsieur le ministre ?

Les aides conjoncturelles que vous avez annoncées le 12 novembre sont donc essentielles et permettront aux exploitants, je l’espère, d’attendre la réorientation des aides de la PAC en faveur de l’élevage.

J’ai déjà eu l’occasion de vous dire à quel point j’approuve que vous entendiez favoriser les systèmes de production à l’herbe, la production laitière de montagne et l’élevage ovin. Ce sont là autant de priorités auxquelles je souscris.

Il a déjà été beaucoup question des éleveurs ovins ce soir. En ma qualité de président du groupe d’étude sur l’élevage, j’avais examiné leur situation avec M. François Fortassin. Elle est presque désespérée.

Le nombre de têtes de bétail ovin diminue très rapidement : de 13 millions en 1979, on est passé à 8 millions en 2007. C’est à se demander comment, dans quelques décennies, nos montagnes pourront encore être pâturées. La fièvre catarrhale est une source de soucis supplémentaires pour les éleveurs d’ovins.

En outre, le rôle des prédateurs ne peut être passé sous silence. J’évoque souvent ce sujet : vous savez, monsieur le ministre, la calamité qu’ils représentent pour les élevages, principalement ovins.

J’ai noté que des crédits sont affectés à des mesures de protection des troupeaux, les mesures d’indemnisation relevant des programmes du ministère chargé de l’écologie.

Lors de la prochaine campagne, il sera important de veiller à ce que les moyens mobilisés soient suffisants pour indemniser l’ensemble des éleveurs, eu égard à l’accroissement de la population des loups et à l’expansion de leur territoire.

Je l’ai déjà dit, les éleveurs apprécieraient qu’un effort soit fait pour maîtriser le nombre de prédateurs. À cet égard, je voudrais évoquer une anecdote, concernant le lynx.

Un jour, Le Progrès a fait ses gros titres sur la douzième attaque par un lynx d’un élevage de Mirebel, dans mon département du Jura. Quelque temps plus tard, on a appris qu’une association se consacrant aux animaux malades venait de soigner un petit lynx, pour un coût de plus de 1 500 euros, et que M. le préfet était allé – bien sûr clandestinement – relâcher l’animal dans la forêt… (Sourires sur les travées de lUMP.) Pour l’éleveur qui a subi douze attaques de lynx, cela est tout de même difficile à admettre ! Pour nous, élus, il est parfois malaisé de répondre aux questions que l’on nous pose sur de tels sujets.

J’en viens maintenant à la crise laitière, qui a déjà été beaucoup évoquée ce soir mais que, en tant que président du groupe d’étude sur l’élevage, je ne peux passer sous silence.

Les éleveurs laitiers, qui étaient au nombre de 130 000 en 1998, voilà dix ans à peine, ne sont plus aujourd’hui que 87 700. Même le nombre de vaches laitières a baissé, à hauteur de 12 %.

Les éleveurs laitiers ont subi, hormis en 2007, des baisses successives du prix du lait, et ce n’est pas l’accord conclu tout récemment qui va leur redonner le moral : une nouvelle baisse significative est prévue, qui atteindra 55 euros aux 1 000 litres au mois de mars prochain. Leurs inquiétudes sont donc compréhensibles.

Dans une situation si conflictuelle, l’amendement récemment adopté à l’Assemblée nationale, qui vise à autoriser les activités de l’organisation interprofessionnelle laitière relatives à l’information sur la tenue des marchés et la formation des prix de cession, est le bienvenu : il était impensable que les activités du Centre national interprofessionnel de l’économie laitière puissent être empêchées.

Il faut d’urgence privilégier une grande transparence sur les prix, afin de bien déterminer le profit de chaque acteur de la filière, jusqu’à la distribution. Vous avez annoncé récemment, monsieur le ministre, la prochaine mise en place d’un observatoire. Nous attendons beaucoup de cette mesure.

Comme cela a été dit déjà à cette tribune, l’année dernière, l’augmentation du prix du lait, et par suite des produits laitiers, avait provoqué un grand tapage médiatique. Le prix de la baguette de pain avait lui aussi augmenté. Aujourd’hui, le prix payé aux producteurs de blé est pratiquement revenu à son niveau d’il y a deux ans, celui du lait a également diminué, mais, pour autant, la distribution a-t-elle beaucoup baissé les prix pour les consommateurs ? En tout cas, les médias n’en parlent pas… Nous espérons que le nouvel observatoire fera la lumière sur cette situation.

Enfin, toujours en ma qualité de président du groupe d’étude sur l’élevage, je me dois d’évoquer une autre inquiétude des éleveurs : celle que suscite la réforme du service public de l’équarrissage.

Je sais que des discussions ont eu lieu avec la profession et ont débouché sur des accords. Le dispositif actuel arrivera à échéance au mois de juillet. J’aimerais donc que vous nous indiquiez, monsieur le ministre, ce qu’il adviendra ensuite. Personnellement, je ne souhaite en aucun cas que la moindre redevance soit demandée aux éleveurs lors de l’enlèvement des animaux.

Dans le contexte actuel, les éleveurs ne sauraient l’accepter. Cela pourrait susciter des manifestations, avec dépôt d’animaux morts devant les préfectures ou les permanences parlementaires ! Il est donc indispensable de trouver un système de collecte des animaux qui n’aggrave pas les charges des éleveurs, d’autant que le nombre d’animaux ramassés a beaucoup augmenté – à hauteur de 23 % pour les bovins et de 60 % pour les ovins –, à cause, notamment, de la fièvre catarrhale.

Par ailleurs, je déplore une baisse, de 13 millions d’euros à 11,5 millions d’euros, des crédits consacrés à la génétique animale.

S’agissant de la politique forestière, je me réjouis de la hausse des crédits destinés au plan de compétitivité des scieries et des aides accordées aux micro-entreprises pour la mécanisation de la récolte forestière. Je regrette, cependant, la diminution des crédits consacrés aux dessertes forestières. Un amendement a été déposé sur ce sujet.

Il est beaucoup question, à l’heure actuelle, du bois en tant que source d’énergie – cela concerne les résidus, car le bois d’œuvre doit continuer à être utilisé comme il l’est actuellement –, mais je remarque que le développement de cette filière se heurte au fait que, aujourd’hui, un tiers de nos forêts sont inaccessibles, à cause de la pente du terrain ou de l’absence de voirie forestière. Or il faut aller chercher la ressource assez loin dans les forêts, ce qui implique que de nouvelles routes forestières devront être tracées.

Je terminerai en évoquant un produit dont beaucoup d’orateurs ont parlé, particulièrement M. César, et qui nous réjouit tous : le vin !

Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre soutien à notre filière viticole, qui est en crise, dans certains secteurs plus particulièrement. Je vous félicite notamment d’avoir défendu les viticulteurs sur la question de la publicité sur internet. Cela était indispensable.

Vous avez travaillé avec eux au plan de modernisation de la viticulture. Continuez dans cette voie, monsieur le ministre, car la lutte contre l’alcoolisme peut se faire autrement que par le harcèlement de la filière !