Mme Christiane Demontès. La fonction publique n’intéresse pas l’UMP !

Mme Josiane Mathon-Poinat. C’est un déni total de nos débats !

La mesure prévue est injuste ; c’est d’abord et avant tout, une mesure d’économie.

Les fonctionnaires seront financièrement contraints de participer à une solidarité qui exclut toujours bien évidemment les plus riches. Pourtant, ce ne sont pas eux qui grèvent les comptes publics ; c’est plutôt vous, monsieur le secrétaire d'État, qui réduisez les ressources.

Pour preuve, les rémunérations, pensions comprises de tous les fonctionnaires, qu’ils soient d’État, territoriaux ou hospitaliers, représentaient, en 2000, 13,3 % du PIB (Brouhaha sur les travées du groupe socialiste.)

Monsieur le président, je ne puis poursuivre dans un tel brouhaha !

Mme Bariza Khiari. Nous sommes troublés par le départ de nos collègues !

Mme Josiane Mathon-Poinat. Certes, je comprends bien, mes chers collègues, mais soit vous m’écoutez, soit nous discutons de ce qui vient de se passer.

Mme Annie David. On pourrait suspendre la séance !

M. le président. Veuillez poursuivre, ma chère collègue ! Le président vous écoute !

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Et le ministre aussi !

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Ainsi que la commission !

Mme Josiane Mathon-Poinat. Je disais donc que les rémunérations, pensions comprises de tous les fonctionnaires, représentaient, en 2000, 13,3 % du PIB, alors qu’elles ne représentaient plus que 12,7 % du PIB en 2008. La proportion des dépenses de rémunération est en diminution par rapport à la richesse produite.

Dans ces dépenses, la part des retraites civiles et militaires pour l’État est passée de 2 % du PIB en 1999 à 2,1 % en 2008. On est très loin de la situation décrite comme catastrophique de par le « poids » des dépenses produites par les fonctionnaires dans le total des dépenses publiques.

Monsieur le secrétaire d'État, il faut peut-être cesser d’opposer les Français entre eux et de recourir à la caricature en disant que les fonctionnaires sont des privilégiés, des nantis.

Au contraire, vous devriez dire que les fonctionnaires sont non pas un fardeau pour l’État, mais la particularité d’un système qui est envié dans le monde entier, à savoir le service public : ils accomplissent des missions utiles à notre société en garantissant à nos citoyens un traitement égal sur tout le territoire national.

Vous devriez également dire, monsieur le secrétaire d'État, que, en matière de retraite, ils participent plus que d’autres à l’équilibre du système. Si l’État employeur a versé, au titre de ses personnels civils, 1,5 milliard d’euros en 2008 au titre de la compensation, les fonctionnaires, eux, ont contribué, dans le même temps, aux retraites des exploitants et salariés agricoles, des petits patrons de l’artisanat et du commerce, à hauteur de 2,5 milliards d’euros, et à hauteur de 1,5 milliard d’euros aux retraites des régimes spéciaux, tels que les mines, les marins-pêcheurs, au titre de la « surcompensation ». C’est bien une catégorie qu’il faut plutôt défendre.

M. le président. L'amendement n° 339 rectifié, présenté par MM. Collin et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

cinquante-deux

par les mots :

cinquante et un

Cet amendement n'est pas soutenu.

Article 8
Dossier législatif : projet de loi portant réforme des retraites
Article 8 (début)

M. Claude Domeizel. Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour un rappel au règlement.

M. Claude Domeizel. Je me pose une question, monsieur le président : pouvons-nous continuer de siéger, alors que les travées de la majorité sont totalement vides ?

M. Yves Pozzo di Borgo. Non ! Moi, je suis là !

M. Claude Domeizel. Les travées du groupe de l’UMP sont totalement vides !

M. Yves Pozzo di Borgo. Je suis là !

M. Claude Domeizel. Mais vous n’appartenez pas à l’UMP, mon cher collègue !

Monsieur le président, pouvons-nous continuer de siéger dans ces conditions ?

(M. Gérard Longuet regagne son banc.)

M. le président. Vous avez la réponse à votre question, mon cher collègue !

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Et la qualité, à défaut de la quantité !

Rappel au règlement
Dossier législatif : projet de loi portant réforme des retraites
Article 8 (interruption de la discussion)

M. le président. L'amendement n° 779, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Cet amendement constitue l’un des amendements portant sur la modification des règles propres aux catégories actives quant à l’exercice de leur droit à pension.

Le nombre des agents concernés par ces dispositions est, faut-il le rappeler, relativement réduit, mais toutes les mesures d’âge prévues par l’article 8 visent notamment à faire une économie budgétaire de l’ordre de 70 millions d’euros au bénéfice du compte spécial des pensions et au détriment, si l’on peut dire, des pensionnés.

Voici ce que nous dit, par exemple, le projet annuel de performance du compte spécial des pensions pour 2011.

De façon globale, sur l’ensemble du programme, l’impact des mesures liées à la loi portant réforme des retraites en discussion au Parlement pourrait être une réduction des dépenses de l’ordre de 32 millions d’euros en 2011, avec une réduction de 70 millions d’euros au titre des mesures d’âge et de 10 millions d’euros au titre de l’évolution du dispositif du minimum garanti et une augmentation de 48 millions d’euros au titre de la mise en extinction progressive du dispositif de départ anticipé pour les parents de trois enfants.

Dans ce dernier cas, le maintien provisoire des règles actuelles de liquidation pour les agents qui auront déposé leur dossier avant le 1er janvier 2011, pour une radiation des cadres au plus tard le 1er juillet 2011, pourrait se traduire par un supplément de dépenses provisoires pour les pensions, un impact que viendra cependant lisser le maintien des conditions actuelles de départ aux agents à moins de cinq ans de leur retraite. C’est le dispositif tel qu’imaginé par le Gouvernement.

D'une part, l'opération sur les pensions vise, par les mesures d'âge, à conduire à une moindre budgétisation du compte spécial de pensions. C’est celui-ci qu’il faut faire décroître. La mise en cause des cessations anticipées d'activité pour l’éducation de trois enfants est en effet un dispositif en extinction, qui finira par accroître la part captée par le budget général aux dépens des retraités.

D’autre part, l'objectif fixé par le Gouvernement est de pousser certains agents du secteur public à prolonger leur carrière, et cela touche effectivement les fonctionnaires classés en service actif.

Le Gouvernement espère manifestement de la réforme qu'elle conduise à un accroissement de la durée de cotisation et à un recul conséquent de l'âge de départ. Il s’agit d’ailleurs d’un mécanisme déjà à l’œuvre : l’âge moyen de liquidation de la retraite s’élève aujourd’hui 61,5 ans !

M. le président. L'amendement n° 340 rectifié, présenté par MM. Collin et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

cinquante-cinq

par les mots :

cinquante-trois

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 780, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Bernard Vera, pour présenter l'amendement n° 780.

M. Bernard Vera. Il y a dans la démarche du Gouvernement une logique qui est de faire peser une sorte de pression sur les fonctionnaires.

Nous sommes confrontés à une série d’alinéas qui tendent à remettre en question la situation des agents du secteur public ayant effectué des services actifs et tirant parti, de fait, d'une prise en compte différenciée de leur situation au regard du droit à pension.

Ce quatrième alinéa de l'article 8 prévoit expressément que les agents ne devront désormais plus avoir atteint l’âge de 54 ans mais celui de 56 ans pour faire valoir leur droit à pension.

Il est évident que la mesure s'inscrit dans une logique globale d'allongement des carrières, dont la seule raison d'être est de permettre à l'État de consacrer des sommes de moins en moins élevées au financement du compte spécial de pensions.

Le schéma est assez clairement établi : en remettant en question les situations découlant de sujétions particulières et qui se traduisaient dans le déroulement de carrière, il s'agit de compenser autant que faire se peut le mouvement naturel du compte spécial.

En théorie, la hausse des prix et l'allongement potentiel de la vie devraient entraîner une augmentation des dépenses du compte spécial de pensions. Cela revient à dire que la réforme des retraites consiste pour les fonctionnaires à leur faire payer, au-delà du gel de leur rémunération pour deux ou trois ans, les effets de la hausse des prix et de l'allongement de la vie !

On pourrait aussi dire que l'État spécule sur la mortalité de ses agents, puisque la conséquence quasi-mécanique de l’allongement de la carrière sera la réduction de la période de perception de la pension.

Enfin, notons que cette démarche va de pair avec une absence totale, pour les fonctionnaires, de bénéfice relatif à la prolongation de carrière. Même si les conditions de calcul de leurs droits à pension sont différentes de celles du secteur privé, les retraités de la fonction publique ne pourront pas espérer de la réforme la moindre valorisation de leur pension. Ainsi, ils travailleront plus longtemps et paieront des cotisations supplémentaires sans percevoir aucun avantage nouveau, puisque le Gouvernement vise également à réduire la part de ses agents bénéficiant d'une surcote.

Chers collègues, c'est en raison des observations qui précèdent que nous vous invitons à adopter cet amendement de suppression de l’alinéa 4.

M. le président. L'amendement n° 341 rectifié, présenté par MM. Collin et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

cinquante-six

par les mots :

cinquante-cinq

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 781, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 781.

Mme Marie-France Beaufils. Cet amendement découle de notre opposition de principe à l'allongement de la carrière des agents du secteur public qui, soumis à des sujétions spécifiques, disposent aujourd'hui de modalités propres de leur départ à la retraite.

Toujours plein d'imagination, le projet de loi prévoit de porter à 57 ans l'âge à partir duquel certains agents, nés après le 1er janvier 1961, pourraient faire valoir leurs droits à pension.

Par construction, le dispositif mis en place est évidemment appelé à s’amplifier année après année. Il s'agit en fait d'un dispositif inflationniste, au sens où le nombre d’agents touchés par son application augmentera de manière régulière jusqu'au 1er janvier 2018, qui sera la première date concernant pleinement les agents intéressés.

Notons toutefois qu’certains fonctionnaires pourraient être contraints à faire valoir leurs droits à pension avant cette date, quitte à supporter évidemment le poids éventuel d'une décote plus ou moins importante.

On rappellera tout de même que les professions visées ici présentent des caractéristiques de pénibilité avérées, puisqu’il s’agit des sapeurs-pompiers professionnels, des agents de salubrité des collectivités territoriales, ou encore des ouvriers professionnels et des aides soignantes de nos hôpitaux.

Ces personnels connaissent de manière générale des conditions de travail très spécifiques et contraignantes. Ainsi, nombre d’entre eux sont soumis à des contraintes de nuit ou des astreintes de sécurité. De fait, ces contraintes spécifiques participent d’une pénibilité qu’il convient de reconnaître.

On peut d'ailleurs s'étonner que le Gouvernement, qui se vante de faire entrer par la grande porte la prise en compte de la pénibilité dans le calcul de la retraite, commence par imposer à ses propres agents – et aux fonctionnaires des deux autres fonctions publiques – deux ans de services supplémentaires.

Nous sommes évidemment opposés à une telle approche qui néglige, entre autres choses, le fait que travailler dans un milieu insalubre ou dans l'obscurité – je pense par exemple aux égoutiers – est un facteur avéré de réduction de l'espérance de vie.

Ainsi, une étude du comité d'hygiène et de sécurité de la Régie autonome des transports parisiens avait montré que ses personnels employés à l'entretien des installations souterraines du métro – par exemple ceux affectés aux réseaux électriques ou au renouvellement de l’air – avaient une espérance de vie inférieure de cinq ans à la moyenne.

Nous constatons qu’aucune partie du rapport ne fait appel à la moindre statistique pour justifier de la mesure prise en direction des fonctionnaires en service actif. Faut-il croire que ces derniers sont tous en bonne santé ? Il y a dans cet hémicycle un certain nombre d’élus qui connaissent bien les métiers dont il s’agit, et ils savent que la réponse à cette question est malheureusement négative. Ils peuvent témoigner des nombreuses demandes de reclassement professionnel faites, avant leur départ à la retraite, par ces agents de la fonction publique.

Nous ne pouvons évidemment pas accepter une telle orientation du projet de loi et invitons le Sénat à voter notre amendement.

M. le président. L'amendement n° 342 rectifié, présenté par MM. Collin et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Remplacer les mots :

cinquante-sept

par les mots :

cinquante-six

Cet amendement n'est pas soutenu.

Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 136 est présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, M. Bel, Mmes Alquier et Campion, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot, Kerdraon et S. Larcher, Mmes Le Texier, Printz, San Vicente-Baudrin et Schillinger, MM. Teulade, Domeizel et Assouline, Mme M. André, M. Bérit-Débat, Mme Blondin, MM. Botrel et Bourquin, Mme Bourzai, MM. Courteau, Daunis, Guérini, Guillaume et Haut, Mmes Khiari et Lepage, MM. Mirassou, Mahéas, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.

L'amendement n° 392 rectifié est présenté par M. Milhau, Mme Laborde, M. Collin, Mme Escoffier et MM. Mézard et Plancade.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

, excepté pour les sapeurs pompiers dont la dangerosité du métier et des missions exercés est reconnue à l'article 67 de la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile

La parole est à Mme Gisèle Printz, pour défendre l’amendement n° 136.

Mme Gisèle Printz. L'alinéa 5 de l’article 8 cible les fonctionnaires de la catégorie active ayant accompli quinze ans de service et pouvant liquider leur pension dès l'âge de 55 ans.

Le classement en catégorie active ne concerne qu'un nombre d'emplois limité, soumis à un risque particulier ou à des fatigues exceptionnelles, comme les militaires, les policiers et les infirmiers. Il s’agit là de professions exposées, comme le sont également les sapeurs-pompiers professionnels, dont le travail est particulièrement difficile en cette période de grande détresse sociale.

Leur action ne se limite pas aux feux. Ils sont sollicités pour toutes sortes d'urgences. Il est important que le Gouvernement marque sa volonté de rester au plus près de nos compatriotes en prenant en compte la pénibilité du travail de ceux qui aident directement nos concitoyens dans les moments les plus difficiles.

Sans jusqu’ici recevoir de réponse, les sapeurs-pompiers professionnels ont sollicité le Gouvernement plusieurs fois au sujet de la prise en compte de la pénibilité et de la dangerosité de leur métier dans ce projet de loi. La précipitation avec laquelle ce dernier a été mis en place explique sans doute ce silence.

Cet amendement prévoit de maintenir le régime actuel et le droit au départ à la retraite à l'âge de 55 ans. L'exercice du métier de sapeur-pompier au-delà de cet âge posera inévitablement un problème de sécurité pour les intervenants eux-mêmes comme pour les usagers du service public qui les sollicitent.

Les possibilités d'emplois non opérationnels au sein des services départementaux d’incendie et de secours ne permettront pas de couvrir l'ensemble des besoins de la profession, compte tenu notamment du vieillissement lié à la pyramide des âges. Le reclassement dans une autre filière de la fonction publique territoriale ne peut s'envisager comme une alternative satisfaisante pour au moins deux raisons.

La première réside dans l’esprit de corps qui régit la profession des sapeurs-pompiers, et qui induit l’attachement particulier de ceux-ci à leur filière.

La deuxième est que la perte du statut de sapeur-pompier professionnel entraîne aujourd'hui de facto la perte des avantages acquis grâce à une sur-cotisation supportée par l'agent tout au long de sa carrière.

L'amendement n° 136 prévoit donc de maintenir le régime actuel avec, pour tous les sapeurs-pompiers professionnels, un droit au départ à la retraite dès l'âge de 55 ans. Celui-ci témoigne de la reconnaissance de la nation vis-à-vis d'une profession sans cesse plébiscitée par nos concitoyens.

M. le président. L'amendement n° 392 rectifié n'est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur les amendements nos 898, 778, 779, 780 et 781. Tous visent en effet à supprimer certains alinéas de l’article 8 et donc à le dénaturer.

Or cet article sur le relèvement de l’âge d’ouverture des droits à la retraite des catégories actives de la fonction publique ne fait que respecter l’esprit du projet de loi, dont l’équilibre repose sur un effort de toute la collectivité, tout en respectant la spécificité de certains métiers.

L’amendement n° 136 vise pour sa part à exclure les sapeurs-pompiers de la mesure du relèvement d’âge. Nous n’y sommes pas favorables car, comme les autres catégories actives, les sapeurs-pompiers conserveront leurs spécificités, à savoir un âge de départ moins élevé.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Sur chacun des amendements proposés, le Gouvernement émet le même avis que celui de la commission.

Dans mes propos liminaires, j’ai déjà eu l’occasion de répondre à plusieurs points à nouveau évoqués dans la défense de ces amendements. Je voudrais donc, maintenant, me limiter à quelques informations complémentaires.

Mme Beaufils vient d’affirmer que le taux de cotisation des agents de la fonction publique est inférieur à celui des salariés du privé. Je placerai ma réponse sous le contrôle du président Guy Fischer, qui avait tenu des propos similaires il y a quelques jours, et auquel j’avais apporté les éléments d’information suivants.

Dans la fonction publique, le taux de cotisation est un taux « intégré » qui résulte de l’addition au taux de base d’un taux complémentaire ; il s’élève aujourd’hui à 7,85 %. Dans le secteur privé, le taux de base est de l’ordre de 6,5 %, auquel il convient d’ajouter le taux de cotisation complémentaire, qui s’élève à environ 4 %.

Ainsi, si l’on compare les taux de cotisation globaux, on constate une différence de l’ordre de 2,7 % au détriment du secteur privé.

Mme Annie David. Mais pour quel niveau de pension ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Pour le même ! Je vous remercie de poser des questions comme celle-ci car elles nous permettent au moins de nous accorder sur des éléments factuels.

Le niveau des pensions est sensiblement équivalent. Il est légèrement supérieur dans le secteur public mais l’écart ne justifie pas de revenir sur la règle consistant à retenir comme salaire de référence celui des six derniers mois pour les fonctionnaires, et celui des 25 meilleures années pour les salariés du secteur privé.

À la question de Mme David, j’apporte donc la réponse suivante : oui, les niveaux de pensions sont grosso modo identiques.

En revanche, à la question : « les taux d’acquisition des droits à pension sont-ils les mêmes ? », ma réponse est négative. Pour Mme Beaufils, qui affirme que le taux est de 6,55 % dans le secteur privé et de 7,85 % dans le secteur public, je souhaite redire que le taux retenu pour les fonctionnaires est « intégré »: Il est par construction l’addition d’un taux de base et d’un taux complémentaire.

Par conséquent, le taux de 7,85 % est un taux d’acquisition final dans le secteur public, tandis que celui de 6,55 % n’est qu’un taux de base pour les salariés du privé ! Si on lui ajoute le taux complémentaire, on parvient à un taux de cotisation final de 10,55 % !

J’aimerais insister sur cet aspect. Le Gouvernement n’a pas à se reprocher de comparer des choses comparables ! Il n’y a pas lieu de polémiquer sur des éléments simplement factuels.

S’agissant des amendements qui ont été évoqués au sujet de l’équité des mesures d’âge, je ne répéterai pas les arguments de M. Dominique Leclerc, dont je partage l’avis.

J’aimerais cependant préciser un point quant à la part relative des retraites dans le produit intérieur brut de notre pays.

Vous avez raison de le souligner, ce rapport a effectivement légèrement diminué lorsque le produit intérieur brut a beaucoup augmenté. Mais ce dernier ayant à son tour diminué, la part allouée aux dépenses de retraites publiques, de même que la part allouée aux rémunérations, puisque vous évoquiez les deux, rapportée à l’ensemble du PIB sera vraisemblablement en augmentation à la fin de l’année prochaine. Ce n’est pas le numérateur qui a bougé, c’est plutôt le dénominateur.

Évidemment, avec la crise, la croissance étant négative, la part des pensions a augmenté. Madame le sénateur, permettez-moi de vous le rappeler, entre 1,5 milliard d’euros et 2 milliards d’euros de dépenses supplémentaires sont, chaque année, liés aux pensions de la fonction publique, augmentation d’ailleurs constante depuis dix ans. Dominique Strauss-Kahn l’avait relevé dans le rapport de 1999.

En dernier lieu, je vous ferai remarquer que, si le montant global que l’État consacre au compte d’affectation spéciale Pensions, donc les retraites de l’État, s’élève, comme je viens de vous le dire, à environ 2 milliards d’euros, 800 millions d’euros supplémentaires ont été versés en termes de rémunération, y compris pour cette année, pour un nombre d’agents légèrement inférieur. On peut tout naturellement en déduire que la rémunération a plutôt augmenté. Mais nous reviendrons sur ce débat lors de l’examen d’autres articles.

M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l'amendement n° 898.

Mme Marie-France Beaufils. Nous voterons en faveur de la suppression de toute la première partie de cet article, qui organise le relèvement du nombre d’annuités nécessaires aux fonctionnaires appartenant aux catégories actives de la fonction publique pour partir en retraite.

À sa lecture, la situation paraît simple et mécanique : selon vous, le principe de ce projet de loi étant de retarder le départ à la retraite à soixante-deux ans, il serait logique d’augmenter de la même manière l’âge de départ à la retraite des personnels en service actif.

Je note que vous profitez de cette automaticité pour mettre en cause la légitimité de l’intervention des syndicats et des partenaires sociaux. La retraite est extrêmement liée au travail. Il n’est pas question pour nous d’accepter que des dispositions aussi structurantes que celles qui sont contenues dans l’article 8 puissent perdurer et se durcir le cas échéant au fil des années, par la loi, hors de toute négociation avec les partenaires sociaux.

Une autre raison pour nous de rejeter cet article est, bien sûr, le fait que vous visez des fonctionnaires qui effectuent un travail difficile dont la pénibilité était reconnue de fait.

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Exactement !

Mme Marie-France Beaufils. Vous aggravez leur situation, alors que, d’un point de vue général, on le sait, on demande toujours plus d’efforts aux 30-50 ans, qui sont la grande majorité des travailleurs, au point qu’ils arrivent usés à l’âge de la retraite. Pour mesurer cette difficulté qui n’est pas prise en compte dans les propositions que vous avancez, il suffit de regarder, dans nos collectivités territoriales, le nombre de reclassements sollicités pour raison de santé par les éboueurs-ripeurs, les égoutiers, les infirmières, les sapeurs-pompiers...

Mais, bien évidemment, c’est plus globalement que nous rejetons l’accroissement du nombre d’annuités nécessaires pour prétendre à la retraite.

Votre logique n’est pas la nôtre. Ce n’est pas aux salariés, qu’ils soient fonctionnaires ou du privé, de payer toujours plus quand les plus riches savent s’exonérer, avec votre aide, de la solidarité nationale.

L’allongement de l’espérance de vie n’est pas un problème ; elle est une chance, mais une chance qui n’est pas la même pour tout le monde. Elle a tendance à s’accroître pour les catégories qui bénéficient déjà d’une espérance de vie élevée. La possibilité de partir en retraite avant soixante ans pour certains corps de métier de la fonction publique tient compte de cette situation ; vous la remettez en cause.

Vous nous opposez régulièrement la situation des régimes de retraite dans les autres pays européens, mais vous omettez de dire que votre réforme est la plus dure ! En effet, elle augmente à la fois les limites d’âge et la durée de cotisation. Celle-ci sera bientôt la plus longue d’Europe : quarante et un ans et demi, alors qu’elle est de trente ans au Royaume-Uni, de trente-cinq ans en Allemagne et en Espagne, de quarante ans en Suède et de trente-sept ans en Autriche.

La question réelle est ailleurs. Elle consiste à trouver, là où elles se trouvent, les ressources nécessaires pour faire face à des problèmes de financement : dans les profits financiers, les exonérations de cotisations patronales, le relèvement de ces cotisations patronales à hauteur de celles des salariés, cela avec une politique de croissance et non de régression sociale !

Si le nombre d’actifs, et donc de cotisants, est insuffisant, ce n’est évidemment pas parce que les taux d’activité au-delà de soixante ans nécessiteraient d’être augmentés. C’est en raison du nombre élevé de chômeurs qui est en augmentation constante. C’est en raison des taux d’activité relativement faibles entre cinquante ans et soixante ans, ce qui invalide vos prétextes pour allonger la durée des cotisations. Nous savons que le plein-emploi réduirait de moitié le besoin de financement des caisses de retraite.

Concernant précisément les fonctionnaires, on assiste aujourd’hui à un départ massif à la retraite de générations nombreuses de fonctionnaires embauchés dans les années soixante-dix. Mais votre obstination à considérer la dépense publique comme un coût et donc à la réduire, ce qu’illustre la révision générale des politiques publiques, fait que vous ne remplacez qu’une partie d’entre eux.

Pour toutes ces raisons, nous vous proposons de voter notre amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)