M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je fais confiance au Gouvernement, surtout sur un tel sujet et compte tenu du travail qui a été effectué en amont avec les services de Bercy. Les quelques rectifications que vise à apporter le sous-amendement n° I-455 sont utiles et tiennent compte de la concertation à laquelle il semble avoir été procédé avec certaines organisations d’entreprise.

Quant aux sous-amendements nos I-447 et I-463, ils sont analogues à celui du Gouvernement. Je pense que leurs auteurs pourront se rallier à ce dernier texte, sur lequel – à titre personnel, puisque la commission ne s’est pas formellement prononcée, et sous votre contrôle, monsieur le président de la commission – je crois pouvoir émettre un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les sous-amendements nos I-447 et I-463 ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Comme l’ont très justement souligné MM. Jean-Jacques Jégou et Philippe Dominati, ces sous-amendements ont à peu près le même objet.

Si les auteurs de ces propositions ne trouvent pas infamant de se rallier au sous-amendement du Gouvernement, je les invite à le faire.

Mme la présidente. Monsieur Jégou, le sous-amendement n° I-447 est-il maintenu ?

M. Jean-Jacques Jégou. Non, je le retire, madame la présidente.

Monsieur Dominati, qu’en est-il du sous-amendement n° I-463 ?

M. Philippe Dominati. Je le retire également, madame la présidente.

Mme la présidente. Les sous-amendements nos I-447 et I-463 sont retirés.

Je mets aux voix le sous-amendement n° I-455.

(Le sous-amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-6, modifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l’article 6.

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° I-145, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :

Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Le deuxième alinéa du I de l'article 219 du code général des impôts est ainsi rédigé :

« Le taux normal de l'impôt est fixé à 33,1/3 %, dans la limite d'un plancher égal à 22 % minimum de l'assiette nette d'impôt sur les sociétés majorée des dépenses fiscales visées dans l'annexe Voies et moyens du projet de loi de finances. »

II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° I-372 rectifié, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa du I. de l’article 219 du code général des impôts est complété par les mots : « dans la limite d’un plancher égal à 15 % minimum de l’assiette nette d’impôt sur les sociétés majorée des dépenses fiscales visées dans l’annexe Voies et Moyens annexée à la loi n° …du … de finances pour 2011. »

Cet amendement n'est pas non plus soutenu.

L'amendement n° I-230, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après le deuxième alinéa du I de l'article 219 du code général des impôts, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le taux de l'impôt est fixé à 34,1/3 % pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 15 000 000 €. »

II. - Les dispositions du présent article s'appliquent au 1er janvier 2011.

La parole est à M. Bernard Angels.

M. Bernard Angels. Cet amendement vise à compenser, via une légère augmentation de l’impôt sur les sociétés, la suppression progressive, prévue sur trois ans, de l'imposition forfaitaire annuelle due par les entreprises passibles de l'impôt sur les sociétés.

Les premières entreprises bénéficiaires de cette suppression – à partir du 1er janvier 2009 – ont été celles dont le chiffre d’affaires était inférieur à 1,5 million d'euros.

Puis, à compter du 1er janvier 2010, cette mesure a concerné les entreprises dont le chiffre d’affaires était inférieur à 15 millions d’euros. Enfin, à partir du 1er janvier 2011, l’imposition forfaitaire annuelle devra être supprimée pour l’ensemble des entreprises.

Or, dans le contexte de forts déficits que nous connaissons, ces dispositions en faveur des entreprises creusent un peu plus la dette, alors que les mesures de relance les plus efficaces sont celles qui favorisent la consommation des ménages.

Il est donc logique de reporter le coût d’une telle réforme sur l’ensemble des entreprises qui font des bénéfices.

Monsieur le rapporteur général, cet amendement tend à récupérer en un an le coût de la suppression de l’impôt forfaitaire annuel pour 2010 et 2011, soit au total 1,3 milliard d'euros de recettes fiscales supplémentaires pour l’État. Comme je sais que vous êtes très attaché au rétablissement de nos finances publiques, je pense que vous émettrez un avis favorable sur mon amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Je crains de décevoir notre excellent collègue Bernard Angels ! En effet, comme il le sait d'ailleurs, l’angle d’attaque de la commission c’est « assiette large, taux faibles » plutôt que « assiette mitée, taux élevés ».

Or augmenter le taux de l’impôt sur les sociétés est une solution de facilité. Ce qu’il faudrait faire, c’est réduire les niches – une politique que nous n’avons pas réellement engagée en matière d’impôt sur les sociétés.

Mme Marie-France Beaufils. C’est le moins que l’on puisse dire !

Mme Nicole Bricq. Ce que vous ne faites pas !

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mais ce qu’il conviendrait de faire ! J’ai le souvenir – ce n’est pas très vieux, cela date de quelques années – d’avoir entamé une réflexion sur le sujet et d’avoir rencontré les principales organisations patronales à cette fin. Ces dernières m’ont toutes dit : « Passez, il n’y a absolument rien à voir ». J’ai donc pensé que d’autres sujets étaient peut-être plus immédiatement mobilisateurs. Il n’en reste pas moins qu’il faudra y revenir un jour.

Je conclurai en rappelant l’existence d’un exercice sur le plan européen, que vous connaissez bien : ACCIS, l’assiette commune consolidée pour l’impôt des sociétés, qui vise à homogénéiser l’assiette des impôts sur les sociétés des États membres de l’Union européenne. (Mme Nicole Bricq s’exclame.)

Malheureusement, comme tout ce qui est d’ordre fiscal dans l’Union, cette initiative est complètement encalminée. Il s’agit pourtant simplement de se doter d’un même outil d’analyse des résultats des entreprises, mais quand bien même un tel exercice ne préjuge de rien, d’aucune décision ni d’aucun taux, il fait vraiment très peur et il est très vraisemblable que plusieurs États membres de l’Union européenne suivent précisément ce qui se passe afin de bloquer toute avancée significative dans ce domaine.

Pour revenir à votre amendement, monsieur Angels, nous ne pensons pas qu’il aille dans le bon sens. Des progrès sont nécessaires en matière d’impôt sur les sociétés mais pas selon la logique que vous proposez.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement n’est pas favorable à cette proposition, et ce pour des motifs simples et logiques.

Quel est en réalité notre objectif, monsieur le sénateur ? C’est de mener une politique qui vise à renforcer la trésorerie et à soutenir la compétitivité des entreprises pour favoriser la reprise économique, tout simplement. En d’autres termes, il s’agit d’éviter d’augmenter la pression fiscale.

C’est pour cette raison que nous avons proposé la suppression de l’imposition forfaitaire annuelle, l’IFA, tout d’abord en faveur des PME et, à l’horizon 2011, en faveur de l’ensemble des entreprises. En effet, ce dispositif grevait la rentabilité des entreprises, en particulier celle des entreprises qui étaient déjà déficitaires.

Tout naturellement, dans la mesure où nous avons supprimé une taxe ou, en tout cas, une disposition qui nous semblait aller dans le sens inverse des objectifs que je viens de décrire, nous avons estimé qu’il n’était pas nécessaire de la remplacer par autre chose. De fait, je le répète, nous considérons qu’une telle mesure aurait un impact négatif sur l’attractivité du territoire.

Enfin, je tiens à préciser que l’Assemblée nationale a adopté le report de la suppression définitive de l’IFA en 2014, ce qui est de nature à vous rassurer s’agissant de la préoccupation budgétaire que vous avez exprimée en défendant votre amendement.

Je vous propose donc de retirer votre amendement, monsieur le sénateur. À défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-230.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° I-227, présenté par M. Rebsamen, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après le troisième alinéa de l'article 219 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

«...° Le taux fixé au présent article est fixé à 31 % pour la fraction du bénéfice imposable mise en réserve ou incorporée au capital au sens de l'article 109, à l'exclusion des sommes visées au 6° de l'article 112. Il est fixé à 49 % pour la fraction du bénéfice imposable distribuée. »

II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq. Cet amendement est proposé par notre collègue François Rebsamen, qui y est très attaché et qui a convaincu les autres membres du groupe socialiste, notamment ceux qui sont également membres de la commission des finances, de le suivre dans cette voie.

Notre collègue propose de moduler le taux de l’impôt sur les sociétés en fonction de l’affectation du bénéfice réalisé.

Nous avions déjà déposé un amendement analogue. On nous avait alors soutenu qu’une telle disposition était techniquement difficile à mettre en œuvre. Ce n’est pas tout à fait vrai, car la distinction entre bénéfices réinvestis et bénéfices distribués est pratiquée par certains de nos voisins européens.

L’intérêt de ce dispositif est de répondre à un problème tout à fait récurrent dans notre économie, à savoir le manque de capital des PME. Une incitation fiscale au réinvestissement des bénéfices serait peut-être un bon moyen, pas forcément très spectaculaire, mais en tout cas régulier, pour remédier à ce mal français.

En effet, l’État est intervenu pour renforcer les capitaux propres des PME, soit directement, soit par l’intermédiaire de fonds d’investissement ou de banques publiques ; OSEO est par exemple considéré comme l’organisme le plus à même de renforcer les fonds propres des PME non cotées.

Par ailleurs, des dispositifs fiscaux ont été mis en place pour inciter les particuliers à investir dans les fonds propres des petites entreprises. Nous serons amenés à aborder de nouveau ce sujet lundi prochain, à propos de l’investissement « ISF-PME ».

Certes, cette stratégie, utilisée depuis plusieurs années, a permis de faire de la France le quatrième marché mondial pour les capitaux investis et les fonds empruntés et le deuxième marché européen des LBO en termes de volume, mais force est de constater qu’elle n’a pas été suffisante pour entraîner une augmentation des fonds propres des sociétés nouvelles, en croissance, comme on dit.

Un tel afflux de capital investissement a bien plus profité aux cessions et aux successions qu’à la création et au développement des entreprises. C’est pourquoi le dispositif actuel de l’impôt sur les sociétés encourage finalement les entreprises à la sous-capitalisation, les entrepreneurs ayant intérêt à ne pas réinvestir les bénéfices et à s’endetter afin de réduire l’assiette de leur impôt sur les sociétés. Ce système fiscal les pousse à choisir l’endettement !

La redéfinition de l’impôt sur les sociétés devrait être le moyen de répondre au manque de fonds propres. C’est pourquoi nous proposons une piste de réforme, laquelle devrait être au moins expertisée par le Gouvernement.

Une telle disposition réduirait le coût de constitution des fonds propres et permettrait d’éviter les effets pervers induits par l’ouverture d’un guichet de distribution de capital.

Il est également souhaitable que le renforcement des fonds propres soit endogène, car ce sont les chefs d’entreprise qui sont les plus à même de choisir le moment opportun et le montant à affecter pour la consolidation de leur entreprise.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nicole Bricq ne m’en voudra pas de rappeler notre opposition de fond sur ce sujet, qui revient dans chaque discussion budgétaire.

Au demeurant, avant 2002, le gouvernement de l’époque avait suscité un débat sur ce thème et nous avions observé que cette idée apparemment séduisante – le secrétaire d’État Georges Tron s’en souvient, puisqu’il était alors à la commission des finances de l’Assemblée nationale – soulevait des impossibilités.

Concernant tout d’abord les sociétés cotées, il est tout à fait clair qu’un tel dispositif, qui influe sur les distributions de dividendes, ne pourrait pas être pratiqué par de grandes sociétés internationales régies par le droit français et cotées à Paris sans que ces dernières se déconsidèrent par rapport à leurs analystes et à l’environnement financier international.

Au surplus, sans doute vaut-il mieux faire confiance aux organes sociaux pour définir la juste part à mettre en réserve et celle qu’il convient de distribuer aux actionnaires, dont la confiance est nécessaire.

Permettez-moi d’évoquer brièvement une petite histoire. Il y avait autrefois, dans le domaine de la sidérurgie, une très belle entreprise d’origine française qui, par des fusions successives, est devenue Arcelor. Cette entreprise a été sur le plan technique un succès total dont nous pouvions nous enorgueillir. Toutefois, on pouvait émettre une toute petite réserve à son égard : les dirigeants, dont les qualités étaient très grandes et qui, en général, étaient issus d’un très grand corps de l’État, ne portaient peut-être pas toute l’attention qu’il fallait à leurs actionnaires. Ce qui devait se produire se produisit : aujourd'hui, on ne parle plus d’Arcelor mais d’ArcelorMittal.

La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° I-227.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet le même avis que celui qui vient d’être exprimé très clairement par le rapporteur général.

Je ferai deux observations, non pas complémentaires mais sans doute redondantes, afin d’éclairer l’avis du Gouvernement.

Tout d’abord, l’objectif qui est le nôtre, celui qui concerne la baisse de la pression fiscale sur les entreprises pour libérer l’investissement, sans entrer dans des situations d’une complexité excessive, s’est traduit par des crédits d’impôts qui sont destinés à encourager les entreprises à réaliser certaines dépenses ou certains investissements.

Prenons l’exemple d’une entreprise qui réalise des dépenses de recherche. Celle-ci peut bénéficier d’un crédit d’impôt égal à 30 % de ses dépenses ; la corrélation avec le sujet que vous évoquez dans votre amendement paraît claire, madame la sénatrice. De même, un crédit d’impôt peut être accordé sous certaines conditions à raison des primes d’intéressement qui sont versées aux salariés.

Comme vous le voyez bien, des parallélismes de forme existent.

Je reprendrai les propos du rapporteur général en les reformulant, mais cela revient strictement au même : le dispositif de modulation que vous proposez – d’ailleurs, il est, me semble-t-il, développé dans le cadre du récent projet de la formation politique à laquelle vous appartenez – et qui prévoit une taxation au taux réduit de 19 % des bénéfices sous condition d’intégration au capital a été supprimé en 2000 en raison du faible intérêt qu’il suscitait auprès des entreprises du fait de sa complexité. Un tel dispositif suppose en effet un suivi sur plusieurs années de la part de l’entreprise et s’accompagne de lourdes tâches de gestion.

Le Gouvernement préfère donc proposer des mesures qui incitent les entreprises à investir plutôt que de pénaliser celles qui, du fait de leurs performances, distribuent des dividendes. Une telle mesure se situerait à l’opposé de l’esprit et de la lettre de la politique que nous menons et que nous souhaitons poursuivre.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. M. le rapporteur général a raison sur un point : ce n’est pas la première fois que nous revenons sur ce sujet. Une proposition de loi du groupe socialiste déposée par notre collègue François Rebsamen a même été débattue dans le cadre d’une journée mensuelle réservée aux groupes politiques d’opposition et minoritaires.

Peut-être faut-il à un moment donné clore le débat s’il n’y a aucune réceptivité ni de la part du rapporteur général ni de la part du Gouvernement et de ses services.

Je voudrais néanmoins revenir sur l’échange qui a eu lieu lors de la discussion de la deuxième loi de finances rectificative pour 2009. Le ministre du budget, à l’époque M. Éric Woerth, nous avait dit que ce débat méritait d’être approfondi. Il s’était engagé à interroger le Trésor, plus précisément la Direction de la législation fiscale, afin qu’une expertise soit menée sur le sujet et nous avait fixé rendez-vous au projet de loi de finances pour 2010.

Or nous examinons actuellement le projet de loi de finances pour 2011 et nous n’avons pas de retour sur un sujet qui, je le pense, mériterait au moins une expertise. La porte est fermée, peut-être un jour s’ouvrira-t-elle. Pour l’heure, concernant cette proposition, nous nous y tenons.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-227.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° I-321 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le a du I de l'article 219 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, le taux : « 19 % » est remplacé par le taux : « 25 % » ;

2° Les deuxième et avant-dernier alinéas sont supprimés.

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Avec cet amendement, il s’agit de modifier de manière non négligeable la fiscalité des entreprises en mettant en place un taux unique d’imposition des plus-values de cession d’actifs, qu’il s’agisse de biens, de matériels, de brevets, d’éléments immatériels du patrimoine de l’entreprise ou d’actifs financiers purs.

Une telle mesure permettrait de promouvoir l’équité entre les entreprises, puisqu’elle améliore singulièrement la lisibilité d’un dispositif qui, au fil du temps, s’est profondément technicisé, au point que l’on peut dire, sans trop se tromper, qu’il existe aujourd’hui une lecture possible de la législation relative à l’impôt sur les sociétés pour chaque entreprise, car il est possible de jouer sur les principes et dérogations de l’article 219 du code général des impôts ou sur les autres dispositions correctrices de l’impôt.

Par ailleurs, il s’agirait également d’une mesure de rendement puisque les plus-values perçues par les entreprises se chiffrent à plusieurs dizaines de milliards d’euros et qu’une progression du moindre point de l’imposition est donc génératrice de plusieurs centaines de millions d’euros de recettes nouvelles.

Notons enfin que la mesure que nous préconisons est en cohérence avec celle que nous avons proposée précédemment sur la fiscalité des plus-values des particuliers. Il n’est en effet pas justifié que seuls les particuliers soient mis à contribution pour rétablir l’équilibre des comptes publics. Il nous semble logique qu’un effort particulier soit demandé aux entreprises.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Ce taux d’imposition comporte deux niveaux.

Cela vient d’être rappelé, les taux réduits s’appliquent en particulier à des éléments d’actifs immatériels, à des inventions brevetables, au produit net de concession des brevets, à certains procédés de fabrication industrielle par exemple. Sont soumis au taux de droit commun, qui est plus élevé, les titres de société à prépondérance immobilière non cotée, les titres de placement de façon générale, les titres de sociétés établies dans des États et territoires non coopératifs : tous ces éléments sont exclus du régime des plus-values à long terme.

Monsieur Vera, suivre vos préconisations serait une bien mauvaise idée : cela constituerait un élément négatif pour la propriété industrielle française et inciterait moins à la cession de brevets. En d’autres termes, cela irait à l’encontre de la politique conduite en ce domaine.

C’est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle demanderait son rejet.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Georges Tron, secrétaire d'État. Le Gouvernement ne peut accepter cet amendement, pour deux raisons.

D’une part, je rappelle, à la suite du rapporteur général, que le taux de taxation des plus-values portant sur ces titres a déjà été relevé en 2009, passant de 16,5 % à 19 %. Nous partageons la même logique que vous, monsieur le sénateur, mais le Gouvernement considère que le pas a été fait de manière suffisante jusqu’à présent.

D’autre part, relever le taux d’imposition des plus-values applicables aux cessions de brevet et aux redevances de concessions de brevet réduira l’attractivité de la France sur le plan de la recherche. Or c’est exactement l’inverse de ce que nous souhaitons tous, vous comme nous.

Par conséquent, il serait préférable de retirer cet amendement ; si tel n’était pas le cas, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-321 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° I-320 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le a quinquies du I de l'article 219 du code général des impôts est abrogé.

La parole est à Mme Marie-France Beaufils.

Mme Marie-France Beaufils. Si l’on en croit le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires sur les niches fiscales et sociales, une grande partie du déficit public et des déficits de la sécurité sociale provient de l’accumulation des baisses d’impôt, parfois même de leur suppression – la taxe professionnelle, par exemple –, des dépenses fiscales et des régimes dérogatoires concernant l’ensemble des activités économiques.

En 2010, selon ce rapport, plus de 170 milliards d’euros auront été consacrés, dans notre fiscalité et notre système de prélèvements, à alléger les obligations fiscales et sociales des entreprises.

La justification de telles mesures, qui se sont empilées au fil du temps, visant parfois les mêmes objectifs et la même « matière fiscale », est connue de tous.

Quand il s’est agi de réduire l’impôt sur les sociétés, il fallait encourager l’emploi et l’investissement.

Quand il s’est agi de réduire puis de supprimer la taxe professionnelle, il fallait encourager l’emploi et l’investissement.

La chute du nombre des emplois salariés dans notre pays, le démantèlement d’une grande partie de l’emploi industriel – aujourd’hui, ce secteur recourt si massivement à l’emploi précaire et à l’emploi intérimaire que c’est la qualité de l’emploi en général et la conception même du travail qui sont en péril – semblent des éléments suffisamment évidents pour démontrer que les intentions affichées dans le passé, à l’appui de telle ou telle mesure, ne se sont qu’assez peu traduites dans les faits.

La dépense fiscale consacrée à l’impôt sur les sociétés dite « niche Copé » est relativement importante, de l’ordre de 35 milliards d’euros, soit, pratiquement, la dépense budgétaire du ministère de l’éducation. Mais les régimes particuliers d’imposition se révèlent encore plus coûteux, avec un total estimé à 71,5 milliards d’euros par le Conseil des prélèvements obligatoires.

En d’autres termes, la niche Copé qui vise à exonérer les plus-values de cession de titres de participation de nos grandes entreprises à vocation transnationale représente un coût de 6 milliards d'euros ! Une telle dépense permet à quelques-unes de nos plus grandes entreprises de vendre à qui elles souhaitent et comme elles l’entendent telle ou telle filiale membre de leur groupe sans avoir à rendre le moindre compte à la collectivité.

En outre, le régime dérogatoire intervient même si la cession de participation se traduit in fine par un plan social de liquidation d’emplois ou d’activité mis en œuvre par le nouveau groupe « propriétaire », aussi rapidement qu’il a acquitté le prix de cession.

Autrement dit, l’opération peut non seulement faire perdre quelques recettes fiscales à l’État – « quelques » n’est-il pas de trop ? – mais également se traduire – c’est d’ailleurs souvent le cas – par un coût social complémentaire supporté par la société dans son ensemble.

Devons-nous continuer à financer, sur les deniers publics, des opérations de restructuration industrielle qui peuvent se révéler mortifères pour l’emploi et l’activité dans notre pays ? Nous ne le pensons pas. D’où notre amendement.