avenir du site sevelnord

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, le groupe PSA a annoncé hier, à la suite d’un comité de groupe européen, un plan pour sa division automobile, avec à la clé la suppression de 6 800 emplois en 2012.

Cette annonce ne vient pas rassurer les salariés de la filière automobile, très présente dans le Nord, plus précisément dans le Hainaut, et ce malgré les investissements récents réalisés par le groupe PSA dans notre région, située au carrefour de l’Europe.

Monsieur le ministre de l’industrie, les annonces d’hier ne font au contraire qu’aggraver les inquiétudes des salariés de Sevelnord. Ce site était déjà menacé par l’extinction, prévue pour être définitive en 2017, du partenariat entre PSA et Fiat.

En juin dernier, ici même, on nous a expliqué : « L’État n’acceptera pas que, à peine sortis de la crise grâce à son aide, les constructeurs français annoncent la fermeture ou la délocalisation de l’un de leurs sites industriels. »

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous y avez cru ?

Mme Valérie Létard. Depuis septembre dernier, on sait que la pérennité de Sevelnord dépend aussi du choix par le groupe PSA du lieu de production de son futur véhicule utilitaire, entre la France et l’Espagne. Fermer Sevelnord à Hordain, c’est condamner 2 500 salariés, sans compter les sous-traitants, c’est fragiliser tout un bassin d’emploi attaché à son industrie.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous n’avez pas voulu du contrôle de l’argent public !

Mme Valérie Létard. Notre territoire a depuis longtemps compris combien il est important d’anticiper les difficultés pour mieux y faire face et trouver des solutions.

Mme Éliane Assassi. Ben voyons !

Mme Valérie Létard. Cette anticipation est, bien sûr, aussi du devoir du Gouvernement. C’est ce que nous avons réussi à faire ensemble, alors que l’on critique tant la mondialisation, avec le groupe Toyota, qui investit dans la production de la Yaris hybride et qui permettra de créer 800 emplois dans nos territoires dès janvier prochain.

Monsieur le ministre, ce qui se passe aujourd’hui suscite en réalité des interrogations sur la capacité des groupes français de taille internationale à mener de pair développement industriel et visibilité sociale. Comment entendez-vous travailler avec le groupe PSA pour que ce qui a été annoncé hier ne soit pas une catastrophe pour nos territoires industriels et pour leurs salariés ?

Concernant Sevelnord, pouvez-vous nous dire comment l’État compte s’engager dans un réel travail d’anticipation de l’après-2017 et nous assurer que l’avenir du site et de ses salariés sera bien une priorité pour le Gouvernement ? (Applaudissements sur les travées de lUCR et de lUMP. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie.

M. Éric Besson, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique. Monsieur le président, avec votre autorisation, je veux saluer les syndicalistes de la Fonderie du Poitou que j’aperçois dans la tribune du public puisque je les ai mentionnés tout à l'heure, en répondant à la première question.

Madame la sénatrice, vous avez raison : l’industrie automobile traverse actuellement des turbulences, que nous espérons temporaires, et le groupe PSA a effectivement annoncé hier un plan d’économies.

Il faut cependant, dans le diagnostic, raison garder : le groupe PSA produit et investit deux fois plus en France qu’il n’y vend de voitures. Le ratio demeure donc, pour ce qui concerne ce groupe, extrêmement favorable à l’industrie automobile française.

Le président Philippe Varin a confirmé qu’aucun plan de licenciements ou de départs volontaires n’était envisagé à ce jour. Nous lui avons demandé très clairement de ne pas fragiliser les sous-traitants français. Nous disposons pour cela du soutien du Fonds de modernisation des équipementiers automobiles, notamment, afin d’accompagner de façon approfondie l’ensemble des salariés concernés, puisque les mesures touchent, vous le savez, particulièrement les intérimaires.

Pour ce qui concerne la pérennité de Sevelnord, les décisions annoncées hier n’auront pas de conséquences directes : la fin, en 2017, du partenariat entre Fiat et PSA – c’est la prochaine échéance – ne concerne que l’un des cinq produits fabriqués sur le site, la Fiat Scudo, qui représente 20 % de l’activité.

Donc, si l’on sait en 2011 que 20 % de l’activité cessera en 2017, cela laisse largement le temps nécessaire pour étudier le problème et se retourner.

Toutefois, comme nous souhaitons anticiper les conséquences de cette décision et protéger au mieux les emplois des 2 800 salariés du site, nous avons demandé à PSA, qui l’a accepté, de participer à une cellule de suivi et d’anticipation industrielle qui réunit les syndicats, les élus et le groupe PSA, sous l’égide du préfet du Nord. Sa mission est très claire : examiner la façon dont les collectivités publiques, avec PSA, peuvent favoriser l’affectation de nouveaux modèles sur le site de Sevelnord.

Madame la sénatrice, vous savez qu’une telle mobilisation peut porter ses fruits puisque vous avez personnellement contribué à localiser à Valenciennes la production de la Toyota Yaris.

Cette cellule de suivi et d’anticipation que nous avons créée pour Sevelnord se réunira avant la fin du mois de novembre.

L’ensemble des moyens dont dispose l’État en termes de soutien à l’innovation, de primes à l’aménagement du territoire et d’aides à la réindustrialisation sont et seront mobilisés pour assurer l’avenir de Sevelnord. (Applaudissements sur les travées de lUMP, ainsi que sur quelques travées de lUCR.)

agriculture

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

M. Jean-Luc Fichet. Monsieur le Premier ministre, je souhaiterais obtenir des éclaircissements concernant ce qui a motivé le décret qui vient de modifier les règles d’épandage sur les terres agricoles.

Sous couvert de mise en conformité avec la législation européenne, vous modifiez la ligne fixée par l’ensemble des partenaires qui travaillent aujourd’hui à améliorer les pratiques agricoles en vue de les rendre plus respectueuses de l’environnement.

En augmentant la quantité d’azote susceptible d’être épandue à l’hectare cultivable, vous apportez une mauvaise réponse aux problèmes de la pollution de l’eau et des algues vertes.

Dans leur majorité, les agriculteurs et les éleveurs ont compris qu’ils ne pouvaient plus ignorer les enjeux écologiques. Ils sont animés par une volonté forte : restaurer, aux yeux de la population, l’image de l’agriculteur garant de notre alimentation, respectueux de la terre, de l’air et de l’eau.

La région Bretagne a voulu les accompagner en engageant un véritable dialogue avec tous les acteurs de la filière, lequel a débouché sur le programme de la nouvelle alliance agricole.

Et voilà que, au beau milieu de ces travaux, un décret vient permettre d’augmenter les quantités d’azote à l’hectare !

M. Jean-Luc Fichet. Quel mauvais génie a pu inspirer le Gouvernement pour prendre une telle mesure ? Pourquoi vouloir toujours enfermer les agriculteurs dans des pratiques intensives ?

Ce décret dégrade leur image aux yeux de l’opinion publique. De plus, il exaspère l’Europe, qui nous désigne déjà comme un mauvais élève.

D’ailleurs, même dans vos rangs, Mme Keller…

M. Roger Karoutchi. Qu’as-tu encore fait ? (Sourires sur les travées de lUMP.)

M. Jean-Luc Fichet. … souligne dans Le Monde d’hier combien nous sommes en retard sur des dossiers comme celui de la qualité de l’eau, pour n’en citer qu’un. Nous sommes à peu près certains, précise-t-elle, d’être condamnés par la Cour de justice de l’Union européenne.

Ce décret va à l’encontre de toutes les politiques de l’eau menées depuis des décennies et risque d’augmenter encore la facture d’eau des consommateurs.

Si je m’adresse à vous, monsieur le Premier ministre, c’est aussi parce que vous êtes allé sur place constater le véritable fléau que constituent les marées vertes.

M. Jean-Louis Carrère. C’est parce qu’il aime les sangliers ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste-EELV.)

M. Jean-Luc Fichet. Vous avez pris des engagements, et les efforts conjugués de tous commencent à payer : en 2011, on a compté 8 000 tonnes d’algues vertes en moins par rapport à 2010.

Face à ce constat, nous attendions de votre part des mesures de soutien aux collectivités locales qui paient cette pollution très cher. Personne ne comprend le sens de ce décret qui discrédite la France en même temps que le Gouvernement, et qui porte un coup terrible aux agriculteurs.

Monsieur le Premier ministre, expliquez-nous donc cette décision. Comment poursuivre notre action si votre main droite continue d’ignorer ce que votre main gauche fait de bien ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, nous sommes, autant que vous, déterminés à lutter contre la prolifération des algues vertes en Bretagne, en particulier dans un certain nombre de bassins versants.

Sous l’autorité du Premier ministre, avec Nathalie Kosciusko-Morizet, nous avons mis en œuvre en 2010 un plan d’action doté de 135 millions d’euros pour lutter contre ce phénomène, non seulement par le ramassage mais aussi par des actions de prévention.

Ce plan comporte des mesures très strictes à l’égard des agriculteurs qui, comme vous le soulignez à très juste titre, veulent lutter de la manière la plus résolue contre des pratiques intensives qui, désormais, n’ont plus lieu d’être. Les zones d’épandage sont limitées et les quantités d’azote rejetées par les différentes exploitations d’élevage sont strictement contrôlées.

Je souligne que les agriculteurs jouent parfaitement le jeu. D’ailleurs, si tel n’était pas le cas, nous n’aurions pas enregistré au cours de la dernière décennie une baisse des taux de nitrates, qui atteint par exemple 18 % dans la baie de Lannion.

Récemment encore, nous y avons ajouté de nouvelles mesures, notamment dans le cadre des chartes territoriales pour les baies de Saint-Brieuc et de Lannion, qui visent à développer une agriculture plus biologique, des élevages à l’herbe : autant de pratiques qui permettront de limiter les rejets d’azote.

Ainsi, vous le voyez, sur ce sujet, notre détermination est sans faille.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Après avoir poussé à l’agriculture intensive !

M. Bruno Le Maire, ministre. Nous gagnerons la bataille contre les algues vertes en Bretagne, et nous fonderons un nouveau modèle d’agriculture en Bretagne.

M. Bruno Le Maire, ministre. Monsieur le sénateur, pour ce qui concerne le décret auquel vous faites plus précisément référence, si vous le permettez, je reprendrai à l’encontre de votre analyse la critique que vous avez formulée : il ne faut pas en voir, en quelque sorte, la partie droite et en oublier la partie gauche.

Car ce décret fixe des obligations beaucoup plus strictes en matière de calcul des rejets d’azote par les élevages, obligations qui sont rigoureusement conformes aux normes européennes.

Pendant plusieurs années, la France a défendu une sorte d’« exception culturelle » qui n’était pas nécessairement très positive et qui revenait à considérer que, dans un bâtiment d’élevage, chaque vache rejetait 85 kilogrammes d’azote par an.

M. Jean-Louis Carrère. C’est du Chirac ! (Sourires sur de nombreuses travées.)

M. Bruno Le Maire, ministre. Cette règle avait sans doute des effets favorables à la France au regard de la politique agricole commune, mais elle était défavorable à l’environnement.

Nous avons accepté de réviser ce mode de calcul et de reconnaître que certaines vaches rejetaient jusqu’à 100, 110 ou 120 kilogrammes d’azote par an dans l’atmosphère. Cela implique évidemment des contrôles plus rigoureux et plus efficaces. Ce décret va donc également dans le sens de la protection de l’environnement en Bretagne ! (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUCR.)

M. Gérard Larcher. Très bien !

politique de l’emploi

M. le président. La parole est à Mme Chantal Jouanno.

Mme Chantal Jouanno. Ma question s’adresse à Xavier Bertrand, ministre du travail, de l’emploi et de la santé.

M. Jean-Louis Carrère. Cher compagnon…

Mme Chantal Jouanno. Monsieur le ministre, vous avez rendu publics, hier, les derniers chiffres du chômage : vous l’avez vous-même admis, ils sont mauvais.

M. Ronan Kerdraon. Et même très mauvais !

Mme Chantal Jouanno. Cependant, soyons honnêtes et reconnaissons que, dans le contexte d’incertitude de ces dernières semaines, il n’y avait là pas de quoi nous étonner…

Cela étant, le récent sommet européen nous offre quelques perspectives d’espoir. Il convient, du reste, de replacer ce débat dans le contexte européen. Il apparaît ainsi que la France a évité l’emballement du chômage depuis 2008. (Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)

M. Jean-Louis Carrère. À l’évidence, nous nous portons bien mieux que les autres !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Mettez des lunettes !

Mme Chantal Jouanno. Nous avons évité cet emballement…

M. Jean-Louis Carrère. Vous l’avez amplifié !

Mme Chantal Jouanno. Regardez les chiffres, chers collègues : en France, le chômage est légèrement inférieur à la moyenne européenne.

En effet, depuis deux ans, le chômage des jeunes tend à baisser, d’une manière certes légère, mais sensible. Je dis cela avec beaucoup de prudence, sachant bien que la crise que nous traversons n’est pas purement française. Regardez la violence avec laquelle certains pays européens ont été touchés. En Espagne, le nombre de demandeurs d’emplois a augmenté de plus de 100 %.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On trouve toujours pire !

Mme Chantal Jouanno. Dans toute l’Europe, les jeunes sont tous confrontés aux difficultés du chômage : en Europe, un jeune actif sur cinq est aujourd’hui sans emploi.

M. Jean-Louis Carrère. Regardez la France !

M. Ronan Kerdraon. Et que faites-vous ?

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Créez des emplois !

Mme Chantal Jouanno. Cette crise n’est donc pas nationale et conjoncturelle, elle est européenne et structurelle !

Monsieur le ministre, dans ce contexte, vous avez annoncé de nouvelles mesures et notamment de nouvelles directives concernant Pôle Emploi. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)

Chers collègues, il s’agit d’un sujet suffisamment grave,…

M. Didier Boulaud. Et vous ne vous en apercevez que maintenant ? Voilà dix ans que vous êtes au pouvoir !

Mme Chantal Jouanno. … certaines situations individuelles sont suffisamment douloureuses pour que vous écoutiez dans le calme.

Le chômage de longue durée constitue un phénomène de relégation sociale extrêmement préoccupant. Monsieur le ministre, face à ce drame, que comptez-vous faire concrètement ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées de lUMP, ainsi que sur plusieurs travées de lUCR.)

M. Jean-Louis Carrère. Voilà une question qui n’était pas du tout téléphonée… Quelle spontanéité !

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé. Madame le sénateur, je l’ai reconnu hier : ces chiffres ne sont pas bons. Et nous sommes tous conscients que, lorsque la croissance n’est pas au rendez-vous, la situation devient beaucoup plus difficile.

M. Jean-Louis Carrère. La faute à Baroin !

M. Xavier Bertrand, ministre. Chacun le sait sur différentes travées de cet hémicycle, et chacun tente d’agir au mieux dans son département. Personne n’a d’ailleurs de leçons à donner à qui que ce soit en matière d’emploi.

M. Jean-Louis Carrère. Surtout pas vous à nous !

M. Didier Boulaud. Quand nous étions au pouvoir vous ne vous en êtes pourtant pas privés ! Souvenez-vous en quand vous serez dans l’opposition !

M. Xavier Bertrand, ministre. Car l’emploi n’est pas un sujet franco-français.

En revanche, il y a une majorité qui a voté des moyens supplémentaires pour lutter contre le chômage. Un demi-milliard d’euros ont été débloqués pour permettre d’augmenter le nombre des contrats aidés et des entrées en formation. Les contrats aidés sont tout de même préférables au chômage ! À la fin du mois, mieux vaut recevoir une fiche de paye plutôt qu’un bulletin d’allocations !

Ainsi, nous faisons en sorte que, même si les chiffres du chômage ne sont pas bons en France, ils soient néanmoins meilleurs que ceux de bien des pays.

M. Jean-Louis Carrère. Cela nous rappelle Giscard ! « La progression diminue ! »

M. Xavier Bertrand, ministre. En outre, et suivant les souhaits de la majorité, Nadine Morano et moi-même avons mobilisé des moyens supplémentaires pour l’apprentissage. Aujourd’hui, la formation par alternance progresse. Nous savons que cette solution a fait ses preuves, notamment en Allemagne, où, dans une même tranche d’âge, deux jeunes sur trois trouvent un emploi grâce à l’apprentissage.

Vous me permettrez de considérer que l’avenir des jeunes ne réside pas dans des emplois publics payés avec de l’argent public que l’on n’a pas ! Il passe par l’entreprise et notamment par l’apprentissage. Voilà la réalité ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de lUMP. – M. Jean-Jacques Pignard applaudit également.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Qu’attendez-vous ?

Mme Annie David. Arrêtez de délocaliser !

M. Xavier Bertrand, ministre. Par ailleurs, nous nous attachons, nous, à mettre en face les offres d’emploi qui existent et les demandeurs d’emploi. Il faut savoir que, le mois dernier, le nombre d’offres d’emplois satisfaites a augmenté de 12 %.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous rencontrez tous dans vos permanences des chefs d’entreprise qui vous disent : « Je cherche à embaucher, mais je ne trouve personne ! ». Et vous rencontrez autant de chômeurs à la recherche d’un emploi !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les patrons n’ont qu’à embaucher des apprentis !

M. Xavier Bertrand, ministre. Eh bien, nous, face à cela, nous obtenons des résultats ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)

Enfin, il faut évoquer le rôle de Pôle Emploi.

M. Ronan Kerdraon. Oui, parlons-en !

M. Xavier Bertrand, ministre. Une nouvelle feuille de route va être adoptée. Certes, pour mener à bien la fusion entre l’ANPE et les ASSEDIC, il était sans doute nécessaire de centraliser les compétences. Mais aujourd’hui, il nous faut confier davantage de pouvoirs et de marges de manœuvre au niveau local, au plus près du terrain. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)

M. Jean-Louis Carrère. Il faut surtout revenir sur la réforme des collectivités !

M. Didier Boulaud. Deux pas en avant, trois pas en arrière !

M. Xavier Bertrand, ministre. Voilà pourquoi les conseillers de Pôle Emploi doivent non seulement obtenir une plus grande autonomie, mais aussi davantage de moyens pour répondre aux besoins des demandeurs d’emplois avec plus de réactivité.

M. Didier Boulaud. Le disque est rayé !

M. Xavier Bertrand, ministre. Cette feuille de route sera mise en œuvre plus tôt que prévu, dès la fin de l’année, dans un seul but : donner davantage de moyens aux acteurs locaux, pour ramener vers l’emploi ceux qui en sont éloignés.

Il y a ceux qui font de grands discours et qui parlent fort, et puis il y a ceux qui agissent juste. C’est ce que fait cette majorité ! (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUCR.)

M. Jean-Louis Carrère. Quelle caricature !

industrie

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.

M. Jean-Marc Todeschini. Alors que nous apprenons aujourd’hui même que les chiffres du chômage ont enregistré pour le seul mois de septembre une hausse historique de près de 1 %, les annonces de fermeture de sites industriels ou de diminution des effectifs se multiplient : fermeture programmée de plusieurs raffineries, telle celle de LyondellBasell à Berre-l’Étang, dans les Bouches-du-Rhône, ou la suppression prévue par le groupe PSA de 6 800 emplois en Europe, avec une réduction de 10 % de ses effectifs pour le seul territoire français. Chaque fois, ce sont des milliers d’emplois qui s’évanouissent purement et simplement et des régions entières qui se trouvent sacrifiées, sans que votre gouvernement réagisse !

Depuis 2005, la production industrielle s’est effondrée de plus de 7 % en France, alors que, dans le même temps, et malgré la crise, elle a progressé de plus de 11 % en Allemagne.

L’exemple le plus emblématique de vos échecs en matière industrielle aura été la fermeture de Gandrange. Au total, la Lorraine aura perdu 25 000 emplois industriels en cinq ans !

Aujourd’hui, c’est au tour du site sidérurgique de Florange de faire les frais de la stratégie financière et spéculative du groupe Arcelor-Mittal, avec la fermeture prétendument temporaire des deux derniers hauts-fourneaux de Lorraine. Près de 3 000 emplois sont directement menacés, 1 100 salariés étant déjà en situation de chômage partiel, sans parler des intérimaires et des sous-traitants.

Le sentiment d’inquiétude des salariés et des élus locaux est encore aggravé par la récente annonce de la fermeture du site sidérurgique belge de Liège.

Face au risque d’un nouveau Gandrange, il est vital de concrétiser le projet européen ULCOS – projet de captage et de stockage souterrain de CO2 – qui doit être développé à Florange. De fait, aujourd’hui plus que jamais ce programme apparaît comme le seul moyen de pérenniser la filière liquide lorraine.

La récente autorisation de recherche pour le stockage souterrain de CO2 accordée par le Gouvernement à Arcelor-Mittal pour le site de Florange n’est qu’une première étape. Le financement du projet ULCOS doit être arrêté de toute urgence par l’État français et la Commission européenne.

En outre, le groupe Arcelor-Mittal doit aussi investir 200 millions d’euros pour assurer la remise aux normes du site de Florange. Il s’y est engagé dès 2008, lors de la fermeture de Gandrange.

Ma question est donc la suivante : contraint par un calendrier particulièrement resserré et sachant que seul un partenariat politique fort peut placer Arcelor-Mittal face à ses responsabilités, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre afin que, à l’issue du processus communautaire NER 300, le projet ULCOS soit financièrement soutenu par l’Union européenne, aux côtés de l’État français et des collectivités locales ?

Pour ma part, j’ose espérer qu’il ne faudra pas attendre le résultat de l’élection présidentielle pour apprendre que vous abandonnez la filière sidérurgique en Lorraine. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de l’industrie.

M. Éric Besson, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique. Monsieur le sénateur, en matière industrielle nous avons des forces et des faiblesses, mais il faut éviter les caricatures. Oui, la France connaît des restructurations. Cependant, la vérité oblige aussi à dire que chaque jour de l’année écoulée a vu une usine s’y créer ou s’y agrandir.

Mme Annie David. Et combien d’emplois créés ?

M. Éric Besson, ministre. La vérité oblige également à dire que, pour la première fois depuis vingt-cinq ans, l’emploi industriel a cessé de se dégrader : nous l’avons stabilisé et même légèrement augmenté.

M. David Assouline. Parce que c’est grâce à vous !

M. Éric Besson, ministre. Vous pourriez donc nous épargner un certain nombre de caricatures.

En ce qui concerne le haut-fourneau de Florange, M. Mittal, le PDG du groupe Arcelor-Mittal, m’a confirmé que son arrêt était temporaire. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’esclaffe.)

Cela fait peut-être sourire à gauche, mais, de notre côté, nous nous attachons surtout à obtenir des engagements concrets.

Premièrement, le groupe va investir plusieurs dizaines de millions d’euros selon un programme précis et chiffré de maintenance. A priori, lorsqu’un groupe réalise de tels investissements, c’est qu’il n’a pas l’intention de fermer le site.

Deuxièmement, nous avons veillé, avec Xavier Bertrand, à ce qu’il n’y ait aucun licenciement n’intervienne et qu’Arcelor-Mittal prenne des engagements écrits en matière de maintien de l’emploi dans le cadre du dispositif de chômage partiel. Cet engagement a également été pris.

Troisièmement, nous ne vous avons pas attendus pour nous mobiliser ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.). Avec le projet ULCOS, que vous avez cité, Arcelor-Mittal a bien l’intention de faire de Florange l’un des sites les plus compétitifs en Europe.

M. Didier Boulaud. Le Président de la République devrait commencer sa campagne électorale à Florange : il rencontrerait un franc succès !

M. Éric Besson, ministre. Puis-je vous rappeler que les études relatives à ce projet, qui représentent un coût de près de 30 millions d’euros, ont été financées par l’État via le Fonds démonstrateur de recherche, dont 9 millions d’euros de participation au financement des seules études concernant le captage et le stockage ?

M. Didier Boulaud. Pour les études et les tableaux, vous êtes les champions !

M. Éric Besson, ministre. En ce qui concerne le développement du projet, une enveloppe de 150 millions d’euros a été réservée dans le cadre des investissements d’avenir.

Comme vous l’avez souligné, monsieur le sénateur, j’ai signé récemment l’arrêté octroyant à Arcelor-Mittal un permis exclusif de recherche.

Enfin, comme vous l’avez également fait remarquer, ce projet a besoin d’un financement européen. Les décisions de la Commission européenne sont attendues pour la mi-2012 et, le 8 novembre prochain, je me rendrai à Bruxelles où j’ai l’intention de défendre avec vigueur le projet auprès des trois commissaires respectivement en charge de l’industrie, de la concurrence et du climat.

Notre mobilisation est donc totale pour l’avenir du site et de ses emplois et j’ai compris, à travers votre question, monsieur le sénateur, que vous nous souteniez dans nos démarches. (Applaudissements sur les travées de lUMP. – Mme Muguette Dini applaudit également.)