Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 10.

L'amendement n° 26 rectifié, présenté par MM. Mézard, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :

Après l'article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l'article 60–1 et au quatrième alinéa de l'article 60–2 du code de procédure pénale, le montant : « 3 750 euros » est remplacé par les mots : « 75 000 euros et, en cas de récidive, de cinq ans d'emprisonnement et de 100 000 euros d'amende ».

La parole est à Mme Françoise Laborde.

Mme Françoise Laborde. L’article 60–1 du code de procédure pénale prévoit que le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire peut, par tout moyen, requérir de toute personne susceptible de détenir des documents intéressant l’enquête de lui remettre ces documents.

Or, le fait de s’abstenir de répondre dans les meilleurs délais à cette réquisition est aujourd’hui puni d’une amende de 3 750 euros, ce qui apparaît peu dissuasif. Par comparaison, l’article 6 de la loi de 2004 réprime d’un an d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende le fait, pour un prestataire de services, de ne pas avoir conservé les données d’identification ou de ne pas déférer à la demande d’une autorité judiciaire d’obtenir communication de ces éléments.

Cet amendement reprend une recommandation du rapport de M. Marc Robert sur la cybercriminalité, qui préconise de renforcer la répression de ce type d’actes qui entravent l’enquête pénale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Richard, rapporteur. L’avis est défavorable, car – mon corapporteur est souvent très vigilant et très convaincant sur ce sujet – il faut maintenir la cohérence de l’échelle des peines. Dans le cas présent, qui vise la non-observation d’une obligation de procédure, porter le montant des amendes à 75 000 euros et à 100 000 euros est disproportionné. Pour être récemment tombé sur cet obstacle en rapportant un texte, je rappelle que le Conseil constitutionnel veille à ce que l’on ne fasse pas « grimper » – si j’ose m’exprimer ainsi – les niveaux d’amende de façon disproportionnée par rapport à l’échelle des peines quand il ne s’agit pas de délits financiers. Aussi, je suggère à mes collègues de ne pas insister dans ce domaine.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 26 rectifié.

(L'amendement n’est pas adopté.)

Articles additionnels après l'article 10
Dossier législatif : projet de loi renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme
Article 11 bis

Article 11

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 230-1 est ainsi modifié :

aa) (nouveau) À la première phrase du premier alinéa, après les mots : « ou de les comprendre, », sont insérées les mots : « ou que ces données sont protégées par un mécanisme d’authentification, » ;

a) Aux premier et dernier alinéas, après les mots : « d’instruction », sont insérés les mots : « , l’officier de police judiciaire, sur autorisation du procureur de la République ou du juge d’instruction, » ;

a bis) (nouveau) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « la version en clair de ces informations » sont remplacés par les mots : « l’accès à ces informations, leur version en clair » ;

b) À la première phrase du deuxième alinéa, après le mot : « République », sont insérés les mots : « , de l’officier de police judiciaire » ;

c) À la seconde phrase du deuxième alinéa, après le mot : « prévu », est insérée la référence : « au deuxième alinéa de l’article 60 et », et les mots : « au premier alinéa de » sont remplacés par le mot : « à » ;

2° L’article 230–2 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, après le mot : « instruction », sont insérés les mots : « , l’officier de police judiciaire, sur autorisation du procureur de la République ou du juge d’instruction, » ;

b) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « au service national de police judiciaire chargé de la lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information » sont remplacés par les mots : « à un organisme technique soumis au secret de la défense nationale, et désigné par décret » ;

c) À la dernière phrase du premier alinéa, les mots : « l’autorité judiciaire requérante » sont remplacés par les mots : « le procureur de la République, la juridiction d’instruction, l’officier de police judiciaire sur autorisation du procureur de la République ou du juge d’instruction, ou la juridiction de jugement saisie de l’affaire ou ayant requis l’organisme technique » ;

d) La première phrase du second alinéa est supprimée ;

bis (nouveau) L’article 230–3 est ainsi modifié :

a) la première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée :

« Dès l’achèvement des opérations ou dès qu’il apparaît que ces opérations sont techniquement impossibles ou à l’expiration du délai prescrit ou à la réception de l’ordre d’interruption émanant du procureur de la République, de la juridiction d’instruction, de l’officier de police judiciaire, sur autorisation du procureur de la République ou du juge d’instruction ou de la juridiction de jugement saisie de l’affaire, les résultats obtenus et les pièces reçues sont retournés par le responsable de l’organisme technique à l’auteur de la réquisition. » ;

b) Le deuxième alinéa est supprimé ;

3° À l’article 230-4, le mot : « judiciaires » est supprimé. – (Adopté.)

Article 11
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Article 12

Article 11 bis

Au premier alinéa de l’article 323-3 du code pénal, la première occurrence du mot : « ou » est remplacée par les mots : « d’extraire, de détenir, de reproduire, de transmettre, ». – (Adopté.)

Article 11 bis
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Article 12 bis (nouveau)

Article 12

I. – Après l’article 323-4 du code pénal, il est inséré un article 323-4-1 ainsi rédigé :

« Art. 323-4-1. – Lorsque les infractions prévues aux articles 323-1 à 323-3-1 ont été commises en bande organisée et à l’encontre d’un système de traitement automatisé de données à caractère personnel mis en œuvre par l’État, la peine est portée à dix ans d’emprisonnement et à 150 000 € d’amende. »

I bis (nouveau). – À la première phrase du deuxième alinéa de l’article 704 du code de procédure pénale, la référence : « 323–4 » est remplacée par la référence : « 323–4–1 ».

II. – (Supprimé)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 12.

(L'article 12 est adopté.)

Article 12
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Article 13

Article 12 bis (nouveau)

Le titre XXIV du livre IV du code de procédure pénale est ainsi rétabli :

« Titre XXIV

« De la procédure applicable aux atteintes aux systèmes de traitement automatisé de données

« Art. 706–72. – Les articles 706–80 à 706–87–1, 706–95 à 706–103 et 706–105 sont applicables à l’enquête, à la poursuite, à l’instruction et au jugement des délits prévus à l’article 323–4–1 du code pénal. 

« Les articles mentionnés à l’alinéa précédent sont également applicables à l’enquête, à la poursuite, à l’instruction et au jugement du blanchiment des mêmes délits ainsi qu’à l’association de malfaiteurs lorsqu’elle a pour objet la préparation de l’un desdits délits. » – (Adopté.)

Article 12 bis (nouveau)
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Article 13 bis (nouveau)

Article 13

Après la section 2 du chapitre II du titre XXV du livre IV du code de procédure pénale, est insérée une section 2 bis ainsi rédigée :

« Section 2 bis

« De l’enquête sous pseudonyme

« Art. 706-87-1. – Dans le but de constater les infractions mentionnées aux articles 706–72 et 706–73 et, lorsque celles-ci sont commises par un moyen de communication électronique, d’en rassembler les preuves et d’en rechercher les auteurs, les officiers ou agents de police judiciaire agissant au cours de l’enquête ou sur commission rogatoire peuvent, s’ils sont affectés dans un service spécialisé désigné par arrêté du ministre de l’intérieur et spécialement habilités à cette fin, procéder aux actes suivants sans en être pénalement responsables :

« 1° Participer sous un pseudonyme aux échanges électroniques ;

« 2° Être en contact par le moyen mentionné au 1° avec les personnes susceptibles d’être les auteurs de ces infractions ;

« 3° Extraire, acquérir ou conserver par ce moyen les éléments de preuve et les données sur les personnes susceptibles d’être les auteurs de ces infractions ;

« 4° Extraire, transmettre en réponse à une demande expresse, acquérir ou conserver des contenus illicites dans des conditions fixées par décret.

« À peine de nullité, ces actes ne peuvent constituer une incitation à commettre ces infractions. » – (Adopté.)

Article 13
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Article 14

Article 13 bis (nouveau)

I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 706–25–2 est abrogé ;

2° L’article 706–35–1 est ainsi modifié :

a) A la première phrase du premier alinéa, les références : « 225–4–1 à 225–4–9, 225–5 à 225–15 » sont remplacées par les références : « 225–4–1 et 225–4–8 à 225–4–9, 225–5 à 225–6 » ;

b) Le quatrième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« 3° Extraire, acquérir ou conserver par ce moyen les éléments de preuve et les données sur les personnes susceptibles d'être les auteurs de ces infractions ; 

« 4° Extraire, transmettre en réponse à une demande expresse, acquérir ou conserver des contenus illicites dans des conditions fixées par décret ; »

3° Le quatrième alinéa de l’article 706–47–3 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« 3° Extraire, acquérir ou conserver par ce moyen les éléments de preuve et les données sur les personnes susceptibles d'être les auteurs de ces infractions ; 

« 4° Extraire, transmettre en réponse à une demande expresse, acquérir ou conserver des contenus illicites dans des conditions fixées par décret ; »

II. – Le troisième alinéa de l’article 59 de la loi n° 2010–476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« 2° Extraire, acquérir ou conserver par ce moyen les éléments de preuve et les données sur les personnes susceptibles d'être les auteurs de ces infractions ainsi que sur les comptes bancaires utilisés ; »

« 3° Extraire, transmettre en réponse à une demande expresse, acquérir ou conserver des contenus illicites dans des conditions fixées par décret ; ».

Mme la présidente. L'amendement n° 87, présenté par MM. Hyest et Richard, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L'article 706–35–1 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les références : « 225–4–1 à 225–4–9, 225–5 à 225–12 » sont remplacées par les références : « 225–4–1 et 225–4–8 à 225–4–9, 225–5 à 225–6 » ;

b) Après le 2°, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :

« 2° bis Extraire, acquérir ou conserver par ce moyen les éléments de preuve et les données sur les personnes susceptibles d'être les auteurs de ces infractions ; ».

2° Après le 2° de l'article 706–47–3, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :

« 2° bis Extraire, acquérir ou conserver par ce moyen les éléments de preuve et les données sur les personnes susceptibles d'être les auteurs de ces infractions ; »

II. – L'article 59 de la loi n° 2010– 476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne est ainsi modifié :

1° Au 2°, les mots : « des données » sont remplacés par les mots : « les éléments de preuve et les données » ;

2° Après le même 2°, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° Extraire, transmettre en réponse à une demande expresse, acquérir ou conserver des contenus illicites dans des conditions fixées par décret. »

La parole est à M. Alain Richard, rapporteur.

M. Alain Richard, rapporteur. Il s’agit d’une modification rédactionnelle.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 87.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 13 bis est ainsi rédigé.

Article 13 bis (nouveau)
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Article 15

Article 14

I. – À la fin de la première phrase de l’article 706-102-1 du code de procédure pénale, les mots : « ou telles qu’il les y introduit par saisie de caractères » sont remplacés par les mots : « , telles qu’il les y introduit par saisie de caractères ou telles qu’elles sont reçues et émises par des périphériques audiovisuels ».

II (nouveau). – L’article 226–3 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le régime d’autorisation prévu au 1° ne s’applique pas aux prestataires ou experts requis ou missionnés spécialement par un magistrat instructeur aux fins de développer ou mettre en œuvre un dispositif technique ayant pour objet la captation de données informatiques prévue par l’article 706–102–1 du code de procédure pénale. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 78, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 3

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le ministre.

M. Bernard Cazeneuve, ministre. La possibilité pour le juge d’instruction d’autoriser des officiers de police judiciaire à mettre en place des dispositifs de captation des données, dits « chevaux de Troie informatiques », a été prévue par l’article 36 de la loi du 14 mars 2011. Ce même article, en réponse aux inquiétudes de la CNIL, avait prévu que ces dispositifs seraient soumis à une autorisation administrative afin de contrôler les matériels et logiciels qui, par nature, portent atteinte à la vie privée.

Votre commission des lois a supprimé cette autorisation administrative. Il en résulte que les magistrats et officiers de police judiciaire pourront recourir à des logiciels qui n’auront pas été expertisés par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, l’ANSSI, et il sera ainsi techniquement possible, pour un vendeur négligeant ou malveillant, de concevoir un dispositif qui puisse prendre le contrôle des systèmes d’information des officiers de police judiciaire qui l’utiliseront.

Le logiciel pourrait aussi être configuré pour diffuser les données captées à d’autres personnes que celles qui sont autorisées à en connaître. Cela pourrait déboucher sur une compromission des systèmes d’information de la police judiciaire et sur une atteinte grave à la vie privée des personnes mises en cause.

De telles incertitudes techniques font également courir un risque sérieux aux procédures engagées.

C’est la raison pour laquelle cet amendement rétablit l’autorisation administrative des matériels et logiciels permettant la captation des données informatiques.

Mme la présidente. L'amendement n° 89, présenté par MM. Hyest et Richard, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

experts

insérer les mots :

figurant sur une liste fixée par décret

La parole est à M. Alain Richard, rapporteur.

M. Alain Richard, rapporteur. Ces deux amendements sont un peu en concurrence. En effet, l’objection, le risque technique, et, à vrai dire, éthique, invoqué par le ministre existe. Nous pensions pouvoir y parer avec une formule d’agrément par décret. Cette préoccupation est née du constat, qui nous a été réitéré par de nombreux partenaires judiciaires, de la lenteur excessive par laquelle se faisaient les agréments par l’ANSSI.

Donc, la commission retirerait aisément son amendement si vous pouviez, monsieur le ministre, nous donner des assurances sur une plus grande diligence de l’ANSSI pour se prononcer sur les demandes d’agrément.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 89 ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je comprends parfaitement la préoccupation du rapporteur. Je veux donc lui donner les assurances qu’il réclame légitimement et qui sont la condition de la bonne application de ces mesures.

M. Alain Richard, rapporteur. Dans ces conditions, je retire l’amendement n° 89, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 89 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 78.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 14, modifié.

(L'article 14 est adopté.)

Article 14
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Article 15 ter

Article 15

I. – Le second alinéa de l’article L. 242-5 du code de la sécurité intérieure est complété par les mots : « et la commission mentionnée à l’article L. 243-1 en est destinataire ».

II. – Après la première phrase de l’article L. 242–6 du code de la sécurité intérieure, il est inséré une phrase ainsi rédigée : « À titre exceptionnel, ce délai peut être porté à trente jours par la commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, si la transcription de l’enregistrement présente une difficulté avérée. »

Mme la présidente. L'amendement n° 71, présenté par Mme Aïchi et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Leila Aïchi.

Mme Leila Aïchi. L’article 15 dispose que le délai de conservation de données personnelles numériques dans le cadre d’une procédure judiciaire dans la lutte contre le terrorisme soit porté de dix à trente jours. L’examen en commission des lois a amené à restreindre cette mesure « à titre exceptionnel ». En dépit de cette avancée, un tel délai entraîne un risque non négligeable de déperdition, voire de divulgation du renseignement. En outre, cet allongement risque de remettre en cause le contrôle opéré par la commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, d’autant que cette extension s’appliquera à toutes les interceptions de sécurité de droit commun, alors que celles qui sont liées au terrorisme ne concernent qu’un nombre encore limité d’interceptions.

Par voie de conséquence, les nouvelles dispositions pourraient porter une atteinte disproportionnée au droit à la vie privée garanti à l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Cet amendement vise donc à revenir sur l’esprit général de plusieurs dispositions du texte tendant à appliquer au droit commun des mesures d’exception censées faciliter le travail d’enquête pour la sécurité nationale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Alain Richard, rapporteur. La commission a son propre texte, qui a infléchi assez fortement la mesure du Gouvernement que Mme Aïchi redoute. Elle préfère logiquement son propre texte à celui qui est proposé par Mme Aïchi. Notre formule consiste à maintenir à dix jours le délai de conservation des écoutes non transcrites. Il peut être porté à trente jours sur accord de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, la CNCIS, lorsque le service compétent motive cette demande par des difficultés particulières de traduction ou de décryptage.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 71.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 79, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

II. - Au premier alinéa de l’article L. 242–6 du même code, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « trente ».

La parole est à M. le ministre.

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Le présent amendement rétablit la durée de conservation des interceptions de sécurité à trente jours, compte tenu des difficultés liées, d’une part, à la possibilité de transcrire ces interceptions de sécurité dans le délai de dix jours, notamment pour les langues dans lesquelles les interprètes sont peu nombreux, et, d’autre part, à l’éclairage nouveau que ces interceptions peuvent connaître à la lumière de faits inconnus dans le délai de dix jours.

Le contrôle de la CNCIS est effectif puisque celle-ci est rendue destinataire des transcriptions. Toutefois, ajouter à cette transmission une procédure d’autorisation formelle rendrait ce dispositif extraordinairement complexe et finalement peu opérant, pour un pouvoir de contrôle similaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Nous avions déjà eu cette discussion lors de la loi de 1991. À l’époque, le Gouvernement avait proposé une durée de conservation des interceptions de sécurité de trente jours. Le Parlement, quant à lui, avait considéré que dix jours suffisaient.

C’est vrai que la transcription de ces interceptions peut poser problème dans quelques affaires. Je rappelle cependant qu’il existe six motifs justifiant une demande d’interception de sécurité, parmi lesquels la criminalité organisée et la sécurité nationale. Le terrorisme ne représente que 17 % des interceptions contrôlées, même si ce pourcentage augmente.

C’est la transcription qui permet de valider le motif de l’interception. Si l’absence de transcription durait un temps indéfini, il serait possible de procéder à des interceptions sans qu’il y ait de contrôle. Notre système est donc assez remarquable – dans d’autres pays, c’est beaucoup moins bien organisé –, car il concilie à la fois l’efficacité et un véritable contrôle des interceptions.

Nous avons bien compris qu’un problème pouvait se poser dans certaines affaires liées au terrorisme. Nous avons donc proposé que le délai puisse être prolongé lorsque la situation le justifie. Cependant, généraliser les trente jours aboutirait à déséquilibrer complètement le dispositif mis en œuvre par la loi de 1991 et qui fonctionne depuis lors, à la satisfaction générale, sans qu’il y ait jamais eu aucun incident. Les Premiers ministres ont toujours suivi les avis de la CNCIS, à une exception près.

Voilà pourquoi la commission est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Nous pourrions encore continuer ce débat, mais il a déjà eu lieu pendant de longues heures et à de multiples occasions, notamment au sein de la commission des lois du Sénat, que je remercie encore une fois, ainsi que ses rapporteurs, pour l’excellence du travail qui a été effectué.

Vous avez fait référence, monsieur le rapporteur, à la loi de 1991. Or, vous le savez très bien, ce texte s’inscrivait dans un contexte très différent. Nous devons aujourd’hui faire face à un phénomène qui n’était pas celui auquel nous étions confrontés dans les années quatre-vingt-dix, même en matière de terrorisme. En outre, la société numérique, avec les techniques de communication multiples qui s’y attachent, n’avait pas la même ampleur que celle qui prévaut aujourd’hui.

Nous sommes confrontés à un problème opérationnel concret : un certain nombre d’interceptions nécessitent un délai supplémentaire pour être exploitées dans des conditions satisfaisantes, tant dans l’intérêt du respect des procédures que pour la neutralisation des terroristes. Cette demande n’est donc pas faite pour une raison de confort, pour échapper au contrôle de la CNCIS. Mon cabinet ou moi-même avons d’ailleurs, à plusieurs reprises, demandé au président de la CNCIS quelle était son appréciation sur ces sujets.

Je suis, comme vous, viscéralement attaché à l’équilibre du dispositif. Je ne souhaite pas que le règlement de ce problème concret se fasse au détriment des prérogatives de contrôle de la CNCIS, auxquelles je tiens autant qu’à l’efficacité opérationnelle des services.

Je veux que le Sénat sache que la discussion que nous avons eue a été de qualité et qu’elle nous a permis d’aller au fond des choses. Elle ne nous aura cependant pas permis, pour l’heure en tout cas, de dégager un accord. J’en prends acte.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 79.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 15.

(L'article 15 est adopté.)

Article 15
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Articles additionnels après l'article 15 ter

Article 15 ter

L’article 706-161 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les dépenses de l’agence peuvent également comprendre des contributions versées à l’État destinées au financement de la lutte contre la délinquance et la criminalité. »

2° Au début du quatrième alinéa, le mot : « Elle » est remplacé par les mots : « L’agence ». – (Adopté.)

Article 15 ter
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Article 15 quater

Articles additionnels après l'article 15 ter

Mme la présidente. L’amendement n° 15 rectifié, présenté par MM. Courtois, Frassa et Gournac, est ainsi libellé :

Après l'article 15 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l’article 726-1 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans l’hypothèse où la personne détenue a été condamnée pour des actes de terrorisme définis aux articles 421-1 à 421-6 du code pénal, la personne est placée dans une cellule dédiée, isolée des autres détenus, lors de son entrée en prison. »

La parole est à M. Christophe-André Frassa.

M. Christophe-André Frassa. La prison reste l’un des principaux lieux de radicalisation. Ainsi, certains détenus non radicalisés à leur entrée en prison le deviennent au contact d’autres détenus. Afin d’éviter le prosélytisme et toute forme d’endoctrinement islamiste, il conviendrait de repenser l’organisation des prisons et d’écarter systématiquement tout individu condamné pour des actes de terrorisme.

Certains, lors de notre débat en commission, ont pu se méprendre sur l’intention des auteurs de cet amendement, pensant qu’il y aurait de leur part une volonté d’instaurer une double peine dans la mesure où le placement à l’isolement existe déjà. Tel n’est pas du tout l’objet de l’amendement. Ce que nous souhaitons, c’est la mise à l’écart des terroristes pour éviter que ceux-ci endoctrinent d’autres détenus.

Lors de votre audition, monsieur le ministre, nous avions débattu de la radicalisation à l’intérieur des prisons, dont nous sommes tous conscients et contre laquelle nous voulons tous lutter. Vous aviez alors mis l’accent sur la formation des imams et des personnels religieux qui sont en contact avec les détenus. Si nous mettons à l’écart les détenus liés à des groupes terroristes, les imams pourront faire un travail plus sérieux auprès des autres détenus et leur délivrer un message normal, celui des religions monothéistes que nous connaissons, comme l’islam.