M. Roland Courteau. Très bien !

M. le président. La parole est à M. David Rachline.

M. David Rachline. Monsieur le président, madame le ministre, chers collègues, comme je l’ai déjà souligné à l’occasion de mon intervention dans le cadre de la précédente mission, j’ai du mal à comprendre pourquoi les missions « Politique des territoires » et « Égalité des territoires et logement » sont séparées.

Je débuterai la présente intervention en évoquant l’égalité des territoires.

La véritable question que pose cette mission est la suivante : comment maintenir l’unité du territoire français, tout en conservant les spécificités de nos provinces ? Le maillage territorial a fait la France, et la présence de représentants de l’État au plus près des populations est l’un des symboles de notre pays. Or, depuis des années, les gouvernements UMPS successifs ont abandonné de nombreux territoires. La disparition des bureaux de poste dans les villages en est l’un des symboles les plus marquants.

Ce renoncement de l’État stratège à organiser l’unité dans la diversité de nos territoires a conduit la population à se concentrer en région parisienne ou dans quelques grandes agglomérations et à déserter les campagnes. L’absence de toute volonté réelle de la puissance publique conduit à l’hypertrophie de l’agglomération parisienne et à la croissance de quelques villes. S’y ajoute une attirance pour les côtes maritimes, notamment pour les rivages méditerranéens, entraînant des catastrophes en termes d’urbanisme comme mon département en a encore fait les frais voilà quelques semaines.

Ces déséquilibres géographiques pèsent lourdement sur le marché immobilier, même locatif, et aggravent les difficultés rencontrées par les Français pour se loger. Des régions entières du territoire national sont ainsi laissées à l’abandon, avec un parc immobilier parfois important - comme dans le Nord-Pas-de-Calais ou en Lorraine -, qui ne demanderait qu’à être entretenu ou restauré au lieu de se dégrader.

Sur la question des logements sociaux, il est temps d’adapter la loi aux possibilités des communes. L’objectif est non pas de construire autant de logement social que possible, mais d’attribuer les logements existants de la manière la plus juste.

À coup de sanction financière, on oblige les villes, qui n’en ont d’ailleurs plus les moyens, contrairement à ce que le Gouvernement imagine peut-être, à construire des logements sociaux, trop souvent ghettoïsés ou attribués selon des procédés clientélistes. D’ailleurs, on ne compte plus les affaires judiciaires qui, dans ce domaine, touchent vos partis respectifs - affaire Gérard Dallongeville ou autres : la liste est longue ! Au lieu de cela, on pourrait imaginer d’autres types d’aides, responsabilisant mieux ceux qui en bénéficient.

L’absence de mixité sociale, issue d’un discours faussement égalitariste depuis des décennies, est aujourd’hui un fléau pour notre pays. La politique du logement pourrait être un moyen de s’attaquer à cette problématique.

L’idée d’un chèque logement, sur le modèle des tickets restaurant, financé à la fois par l’État et par les entreprises, pourrait être intéressante. Le dispositif permettrait à des personnes ayant de faibles revenus d’avoir accès au marché « traditionnel » du logement, voire de se loger au plus près de leur lieu de travail et dans des quartiers auxquels, malheureusement, elles ne peuvent plus aujourd’hui prétendre.

Il faut donc les responsabiliser, leur redonner de la fierté et peut-être un peu moins les assister.

Un des aspects de ce sujet concerne les personnes auxquelles on fournit des aides au logement. Votre budget, madame le ministre, souligne une nouvelle fois vos choix idéologiques. En augmentant de plus de 4 % l’enveloppe allouée au programme 177, « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables », tout le monde sachant bien que ce sont d'abord des ressortissants étrangers qui en bénéficieront (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.),…

M. Roland Courteau. Nous y voilà !

M. David Rachline. … vous soulignez une nouvelle fois le peu de considération que vous avez pour les plus pauvres de notre pays, que vous êtes pourtant, tous ici, chargés de défendre. Manifestement, nous n’avons pas les mêmes priorités, et je m’en honore !

Le rapporteur spécial souligne que « l’hébergement d’urgence doit faire face au nombre toujours plus important de demandeurs d’asile qui, soit ont été déboutés, soit ne disposent pas de places dans les structures qui leur sont en principe réservées et font donc appel aux dispositifs de droit commun ».

M. le président. Veuillez conclure.

M. David Rachline. Je conclus, monsieur le président.

Nous n’avons pas assez de logements pour nos compatriotes, mais vous préférez en faire des laissés-pour-compte et loger des personnes en situation irrégulière.

En matière d’aide au logement, quel que soit le type d’aide auquel on recourt, il convient enfin de mettre en place la priorité nationale. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. Il faut conclure, monsieur Rachline.

M. David Rachline. Cette solidarité nationale a d’abord pour but d’aider les Français en difficulté, et Dieu sait si nous savons qu’ils sont nombreux ! Cela reste l’argent des Français que vous utilisez. Eh non, bien que ce soit l’État qui paie, cela ne coûte pas rien ! Il faut donc la réserver en priorité à nos compatriotes.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la mission budgétaire « Égalité des territoires et logement » est décidément bien mouvante d’une année sur l’autre. Comme l’ont souligné les différents rapporteurs, son périmètre a largement évolué depuis l’année dernière. Entre le déplacement du programme « Politique de la ville » vers la mission « Politique des territoires » et la rebudgétisation du financement du Fonds national d’aide au logement, il est bien difficile de comparer le budget présenté pour 2015 avec celui de l’année dernière.

Notre rôle est certes de voter les crédits, mais aussi de contrôler leur évolution et leur utilisation. Je ne suis pas sûre qu’un tel mouvement soit de nature à simplifier notre mission de contrôle, ni même à rendre cohérente la politique publique du logement. La confiance dans ce domaine, moteur essentiel de ce secteur, tarde toujours à revenir.

Le constat est, aujourd’hui, malheureusement clair : on construit de moins en moins, et on n’a jamais construit aussi peu depuis fort longtemps dans notre pays.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Eh oui !

Mme Valérie Létard. Loin de l’objectif des 500 000 logements, on passera probablement en 2014, si l’on exclut le programme national de rénovation urbaine, le PNRU, en dessous de 300 000 logements. Or mon collègue Daniel Dubois le rappelait en commission des affaires économiques : 100 000 logements en moins par an, ce sont 180 000 emplois en moins ! En ce temps d’atonie de la croissance, c’est un manque terrible.

Face à cet effondrement de la construction, certaines mesures correctrices bienvenues ont été présentées, en particulier en matière de simplification. On en annonce d’autres ; il en faudra cependant beaucoup plus. De même, les incitations fiscales arrivent bien tard.

En premier lieu, j’aurais quelques questions générales à vous poser sur ce budget, madame la ministre.

Comment expliquer, face à des annonces néanmoins plutôt positives, que les crédits du programme « Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat » diminuent ? Où sont les priorités du Gouvernement ? Les messages envoyés nous paraissent bien contradictoires.

On se focalise en général sur la vacance de logements dans les grandes agglomérations, mais le problème du nombre de logements vacants dans le monde rural est également important. Madame la ministre, vous êtes en charge non seulement du logement, mais aussi de l’aménagement du territoire – on l’a vu dans la mission précédente. Dans le cadre des Assises des ruralités en cours, quelles mesures spécifiques au logement pourrez-vous proposer pour y remédier ?

Par ailleurs, je voudrais revenir sur l’article 52 rattaché à la mission qui réforme les APL accession, perçues par des ménages modestes. Vous prévoyez que ces aides seront désormais versées aux seuls ménages subissant une diminution de revenus de 30 %. Cette mesure va désolvabiliser les primo-accédants et risque de faire perdre encore 10 000 logements nouveaux, probablement de 15 000 à 20 000 dans l’ancien.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Eh oui !

Mme Valérie Létard. Cela est incompréhensible, et nous soutiendrons la suppression de cet article proposée par la commission des finances.

Concernant l’hébergement d’urgence, je rejoins Mme la rapporteur pour avis : si nous nous réjouissons de l’augmentation des crédits qui lui sont consacrés, nous nous inquiétons des inégalités qui se creusent entre les territoires. Nous nous inquiétons également des conséquences du report de l’hébergement d’urgence des demandeurs d’asile sur les centres d’hébergement et de réinsertion sociale, les CHRS, et l’hébergement de droit commun, alors que la mission budgétaire « Immigration, asile et intégration » devrait être abondée en priorité. Les crédits ouverts permettront-ils de couvrir cette prestation ? Je vous le rappelle, les structures d’hébergement d’urgence de droit commun sont déjà au bord de l’explosion. Ne mélangeons pas tout ! Les demandeurs d’asile ont besoin d’un accompagnement spécifique.

En deuxième lieu, je souhaiterais appeler votre attention sur la question des garanties communales et communautaires.

Le logement locatif a pu être produit ces dernières années grâce aux collectivités qui, palliant le désengagement de l’État, en ont garanti le financement. Or les collectivités, notamment les communautés urbaines et les communautés d’agglomération, sont aujourd’hui confrontées à une progression importante des garanties d’emprunt en faveur du logement social. Pour citer un exemple, l’agglomération que je préside garantit, au 30 novembre 2014, 235 millions d'euros d’emprunts, avec une progression constatée de 40 millions d'euros par an, soit à terme un stock évalué à 500 millions d'euros pour répondre aux objectifs de la rénovation urbaine et à ceux de la production de logements. Cette progression est d’autant moins contrôlée et régulée que les ratios prudentiels de la loi Galland, mis en place pour limiter le risque, ne prennent pas en compte le logement social.

Pourtant, les financeurs des collectivités, banques et investisseurs sur le marché obligataire, prennent, eux, de plus en plus en compte cette dette garantie lorsqu’ils étudient la situation financière des collectivités et leur solvabilité. La croissance importante des garanties d’emprunt commence donc à peser sur les conditions financières des prêts accordés aux collectivités. Il existe des cas très concrets sur mon territoire. Certaines communautés d’agglomération ou communautés urbaines sont déjà, aujourd’hui, confrontées à cette inquiétude de leurs financeurs, les amenant à chercher à maîtriser l’octroi des garanties au logement social.

Dans la période récente, des communes ont déjà connu une telle situation, mais elles ont pu se tourner vers leurs intercommunalités pour prendre le relais. Demain, avec les tensions financières que vont connaître les budgets locaux, certains territoires ne vont-ils pas se retrouver en panne de création de logements sociaux, faute pour les bailleurs de trouver des garants ?

M. François Calvet. C’est sûr !

M. Charles Revet. Absolument !

Mme Valérie Létard. Il paraît donc important de trouver un nouveau mécanisme de garantie des prêts au logement social qui ne soit pas un vecteur d’inégalités entre les territoires. Le développement de l’intervention de la Caisse de garantie du logement locatif social, la CGLLS, pourrait être une solution. À ce propos, on rappellera que la Cour des comptes avait souligné en 2013 que les fonds propres immobilisés au niveau de la CGLLS pouvaient gagner en efficacité. En 2011, près de 500 millions d'euros étaient immobilisés en fonds propres au niveau de la CGLLS alors que cet organisme n’avait été appelé en garantie que trois fois depuis 2002, pour un montant de 232 000 euros.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cette garantie est chère !

Mme Valérie Létard. Certes, depuis lors, le Gouvernement en a décidé autrement en centralisant la trésorerie de cet opérateur auprès du Trésor public afin de l’utiliser pour contribuer au désendettement de l’État.

D’autres pistes existent : pourquoi ne pas envisager que la garantie des emprunts soit répartie entre les différents niveaux de collectivités, régions et départements notamment, en fonction du périmètre d’intervention des bailleurs sociaux pour partager la charge avec les intercommunalités ? Quelles mesures envisagez-vous pour sécuriser ces collectivités ?

Enfin, j’aimerais revenir sur la question de l’Agence nationale de l’habitat et de son financement.

Je me félicite une nouvelle fois de l’adoption de l’amendement que j’avais déposé lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances visant à augmenter de 40 millions d’euros supplémentaires le produit de la taxe sur les logements vacants, garantissant ainsi à l’ANAH un revenu annuel de 91 millions d’euros. Près de 12 000 dossiers restent cependant en suspens dans le cadre du programme « Habiter mieux », qui seront reportés, nous le savons, sur l’année 2015. Autrement dit, malgré l’augmentation qui a été soutenue sur l’ensemble de nos travées, les crédits seront insuffisants.

Les crédits du Fonds d’aide à la rénovation thermique, ou FART, ainsi que ceux du Commissariat général à l’investissement, le CGI, accompagnent parallèlement le programme « Habiter mieux ». Là aussi, les baisses des taux d’intervention pour les ménages très modestes et modestes seront importantes. Comment conserverons-nous une dynamique en matière de rénovation thermique des logements si nous continuons dans cette direction ?

L’ANAH est un partenaire financier décisif pour nos politiques territoriales en matière de requalification et d’amélioration thermique du parc privé ancien. En sécurisant son financement, nous permettons la poursuite de ces politiques au profit des habitants très modestes. Nous serons donc particulièrement vigilants - je compte particulièrement sur les sénateurs présents en commission mixte paritaire – sur le maintien des 40 millions d'euros jusqu’au bout du processus parlementaire.

Enfin, un texte sur la transition énergétique devrait bientôt nous être transmis. Nous espérons qu’il sera l’occasion de faire en sorte que l’ANAH puisse continuer à fonctionner après 2015 au service de la transition énergétique et de la lutte contre la précarité énergétique. L’objectif ne doit pas être de produire du logement neuf en laissant de l’habitat ancien dégradé et vacant en milieu rural comme en milieu urbain. N’oublions pas l’essentiel, à savoir que les ménages les plus modestes occupent aujourd'hui de l’habitat ancien dégradé et sont en situation de précarité énergétique. Le principal problème en matière d’impayés concerne l’énergie plus que les loyers.

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité. Absolument !

Mme Valérie Létard. Ne nous trompons pas d’objectif. Nous devons disposer d’un fonds s'agissant de la transition énergétique, auquel le CGI pourrait participer dans le cadre de ses objectifs environnementaux de développement durable. Il faut en revenir aux fondamentaux, à savoir les ménages les plus modestes, réconcilier l’urbain et le rural. Ce sont des enjeux que nous partageons tous.

Voilà un objectif commun, voilà des pistes pour les budgets futurs ! Nous pourrions tous ensemble faire en sorte que le CGI soit non pas simplement dans une prospective à dix ans mais également un relais de croissance en soutenant le BTP et l’ensemble de notre territoire national.

Le groupe UDI-UC ne votera malheureusement pas les crédits de cette mission, car ils sont bien trop insuffisants par rapport à ces enjeux déterminants pour notre avenir. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, ainsi que sur plusieurs travées de l'UMP.)

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Bravo !

M. le président. La parole est à M. François Calvet.

M. François Calvet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais en préambule m’associer à l’hommage rendu à Jacques Barrot, ce grand humaniste qui m’avait accueilli, à l’Assemblée nationale, lors de mon premier mandat de député.

La promesse électorale du Président de la République d’accroître l’offre de logements accessibles au plus grand nombre sombre chaque trimestre un peu plus dans l’échec.

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Il faut inverser la tendance !

M. François Calvet. Les ventes de logements neufs ne cessent de chuter depuis huit trimestres consécutifs et moins de 300 000 logements neufs auront été mis en chantier en 2014, ce qui est le niveau le plus bas, au regard de la population française, depuis les années quarante.

Dans ce contexte, le Gouvernement maintient son objectif de production de 150 000 logements sociaux. On peut légitimement douter de la réalisation de cet objectif de production de logements, qui représenterait une augmentation de 15 % par rapport aux résultats obtenus en 2013. C’est un peu comme les objectifs de croissance, toujours optimistes dans l’annonce et sans cesse revus à la baisse. Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir légiféré.

La loi du 18 janvier 2013, qui prévoyait, d’une part, le relèvement du taux de production de logements sociaux prévu par la loi SRU et, d’autre part, la mise à disposition gratuite des terrains de l’État aux collectivités territoriales pour libérer du foncier, n’a eu aucun effet positif.

Après trois lois et 212 articles en deux ans sur le logement, après des centaines d’heures de débat parlementaire ponctuées de déclarations médiatiques fracassantes, le résultat est là : le secteur du logement est tétanisé et sinistré.

Entre l’avalanche de normes et de mesures coercitives,…

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ce sont vos normes !

M. François Calvet. … et malgré l’annonce du choc de simplification, l’instabilité fiscale sur le patrimoine immobilier incite tous les investisseurs avisés à attendre.

En deux ans et demi, vous avez réussi le tour de force de décourager les investisseurs, qui n’ont aucune visibilité, d’inquiéter les bailleurs en ne pensant qu’aux droits des locataires, d’insupporter un peu plus les propriétaires de résidences secondaires en annonçant une surtaxe de 20 % dont personne ne connaît les conditions d’application. Vous avez également réussi à décourager de très nombreux maires, que nous rencontrons, en rendant impossible l’application de la loi SRU, qui se traduit par un nouvel impôt et une dégradation des moyens d’investissements des communes.

Je voudrais, puisque nous sommes au Sénat, vous démontrer l’absurdité de cette loi, que nous avons dénoncée en vain dans cet hémicycle.

Alors que la loi ALUR instaure le principe du plan local d’urbanisme intercommunal afin de favoriser une gestion coconstruite de l’urbanisme entre les communes membres, la loi n’inscrit pas la problématique de production mutualisée de logements locatifs sociaux. L’article 55 de la loi SRU n’a pas évolué. Le concept de mutualisation des objectifs communaux sur la base du volontariat des communes n’est admis que dans le cadre d’un programme local de l’habitat.

Je voudrais souligner ici que les élus de la communauté d’agglomération Perpignan Méditerranée se sont engagés dans cette démarche puisque toutes les communes, même celles qui n’avaient aucune obligation au titre de la loi, ont produit du logement locatif social. Ainsi, à l’échelle du territoire communautaire, l’objectif SRU 2011-2013 de l’ensemble des quinze communes SRU de l’agglomération a été atteint à 130 %, et l’objectif spécifique 2013 à 111 %.

Force est de constater que, au final, cette démarche intercommunale réussie, basée sur le volontariat des maires, n’a aucun impact puisque les objectifs et les obligations restent du niveau communal et que les communes ne les ayant pas atteints vont être carencées. Je citerai, à titre d’exemple, le cas de deux communes, traversées par le fleuve Agly, qui n’ont quasiment aucune capacité d’urbanisation du fait d’un PPRI, un plan de prévention des risques d’inondation, très contraignant, sans doute à juste raison comme nous avons pu encore le constater ce week-end dans notre département des Pyrénées-Orientales.

Ces communes n’arriveront jamais à atteindre les objectifs réglementaires, même en développant une production volontaire dans le cadre du renouvellement urbain. De ce fait, sept communes vont faire l’objet d’un constat de carence et les pénalités majorées pourraient s’élever à près de 1 750 000 euros par an sans l’intervention de Mme la préfète. Par ailleurs, je me permets de vous rappeler que la majoration des pénalités vient alimenter un fonds national, dont le pourcentage de retour sur le territoire est très faible.

S’agissant des problèmes de production de logements HLM, je ne reviendrai pas sur ce qu’a excellemment dit Mme Létard des garanties d’emprunt octroyées par les collectivités dont le volume nous inquiète. Même si ces garanties ne sont pas prises en compte dans les « ratios Galand », il est urgent de revoir cette réglementation, qui risque de constituer – nous l’avons déjà dit – un frein à la production de logements sociaux.

En matière d’habitat privé, vous réaffirmez votre volonté de rénover 500 000 logements privés par an d’ici à 2017 afin de lutter contre la précarité énergétique. Permettez-moi de douter de la réalisation de cet objectif quand je vois les difficultés auxquelles nous sommes confrontés pour satisfaire toutes les demandes au titre du Fonds d’aide à la rénovation thermique. Si cette situation se confirme, ce sont nos petites entreprises du bâtiment et nos concitoyens qui en souffriront.

Il semblerait que le Gouvernement commence à se rendre compte des ravages provoqués par ces mauvais signaux et à faire marche arrière : l’encadrement des loyers, adopté par l’ensemble de la majorité dans la loi ALUR, est mort avant même d’être né ; le projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises, en cours de navette parlementaire, comporte déjà des mesures visant à assouplir la loi ALUR ; enfin, le 29 août dernier, le Premier ministre a annoncé un énième plan de relance de la construction et du logement dont ce budget est supposé être le support…

Il sera malheureusement très difficile de redonner confiance au secteur, de le redynamiser, au regard de ce qui a été détruit. Le nouveau dispositif fiscal en faveur de l’investissement locatif demeure incertain, et la possibilité de louer aux ascendants pourrait être abandonnée, ce qui ruinerait le seul aspect attractif de cette mesure.

De même, la réforme du dispositif APL accession réduit considérablement son intérêt puisqu’il bénéficiera uniquement aux ménages dont le montant total des ressources perçues est inférieur de plus de 30 % aux ressources évaluées à la date de signature du contrat de location-accession ou de leur prêt immobilier. Cette mesure, qui va désolvabiliser une grande partie des primo-accédants, risque de les faire renoncer à l’achat de très nombreux logements neufs ou anciens.

Fidèle à votre stratégie, vous préférez gérer la pénurie plutôt que de prendre des mesures pour accroître l’offre.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ça vous va bien !

M. François Calvet. Vous préférez la politique des rustines, en augmentant les dépenses sociales, à l’encouragement d’une véritable offre de logement pouvant bénéficier à toute la filière de la construction, laquelle lance aujourd’hui des appels au secours sans avoir le sentiment d’être entendue.

Pour ces raisons, qui ne permettent pas de voir la réalité des axes d’amélioration que nous souhaitons tous, le groupe UMP ne votera pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Oui, madame la ministre, il est difficile de débattre uniquement de cette ligne budgétaire et de ses programmes, car votre action s’inscrit dans un cadre beaucoup large : elle concerne d’autres chapitres du budget, notamment les aides fiscales, dont on a un peu trop usé à mon goût. Pour ma part, je suis plutôt favorable à d’autres types d’interventions, mais ces aides demeurent néanmoins l’un des éléments déterminants de la politique menée par le Gouvernement.

L’examen de votre budget intervient dans une période difficile. J’entends avec délectation mes collègues de l’UMP nous expliquer que l’origine de la crise est à trouver dans la loi ALUR… Oui, il y a une profonde crise du logement et de l’immobilier en France et dans presque toute l’Europe ! Nous sommes installés dans un cycle de crise et les politiques du logement sont longues à produire leurs effets. Mais il est faux de prétendre que les subventions, les aides fiscales permettraient d’agir immédiatement sur la construction, sur l’offre de logements. Ce cycle de chute de la production ne provient ni de la loi ALUR ni de l’arrivée de la gauche au pouvoir. Vous avez la mémoire courte, chers collègues de la majorité sénatoriale.

Vous avez cité Les Échos, mais, dès juillet 2011 ce quotidien titrait : « Le ralentissement des mises en chantier se confirme ». À la fin de 2011, ce journal titrait à nouveau : « La construction de logements neufs baissera en 2012 ». Je vous rappelle que, à cette époque, la gauche n’était pas encore au pouvoir et que la loi ALUR n’avait pas été votée.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Enfin, en mai 2012, quelque temps avant l’élection présidentielle, Les Échos titraient : « Logements neufs : la glissade du marché s’accélère sur fond de problème de financement »… Ce n’était toujours pas la gauche qui était au pouvoir !

M. Jacques Chiron. Absolument !

M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Mais aujourd’hui, elle y est…

M. Charles Revet. … et elle ne fait rien !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Une fois le cycle enclenché, il est difficile de l’inverser. Les gouvernements de gauche ont commencé à prendre des mesures pour tenter de le faire, mais cela s’avère d’autant plus difficile que la droite n’a pas mené de politique contracyclique au moment où les prix augmentaient : elle a préféré prendre des mesures fiscales sans plafonnement, ce qui a poussé à la spéculation. Le prix du logement, aujourd’hui trop cher dans notre pays, a décollé durant les dix ans où vous étiez au pouvoir.

M. Claude Raynal. Tout à fait !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il s’agit d’un handicap majeur pour le droit au logement, pour la compétitivité française. Vous auriez dû prendre des mesures contracycliques, vous avez fait l’inverse ! Vous avez alimenté la spéculation et produit du logement dont le prix est décalé par rapport au revenu des Français. Là est la raison de la crise !

M. Claude Raynal. Bonne analyse !

M. Jacques Mézard. Très bien !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. La gauche a pris des dispositions dont je ne vais pas reparler ici. Il faut maintenant – vous le savez, madame la ministre – que toute une série d’annonces se transforme vraiment en actes. Certaines ont commencé à prendre forme, vous vous y êtes attelée. Notre groupe va vous accompagner pour réussir ce passage à l’action. Or les services de Bercy ne vous rendent pas toujours service : ils passent leur temps à trouver des critères de « machin » pour brider les initiatives ; ce qui devait être simple, à l’instar des annonces du Président de la République et du Premier ministre, se transforme en usine à gaz que vous devez simplifier. Je veux souligner vos efforts en ce sens.

Quelles sont les réponses du Gouvernement à la question centrale de la production de logements ?

Premièrement, s’agissant du logement intermédiaire, une ordonnance et des dispositifs fiscaux ont été pris. Je souhaiterais, madame la ministre, que vous nous expliquiez concrètement comment va s’opérer le passage à l’action et quelles seront les répercussions sur les opérateurs.

Deuxièmement, M. Valls a fait des propositions sur la relance de l’accession à la propriété. Il me semble que les opérateurs se sont montrés plutôt satisfaits de ces annonces et souhaitent, comme moi, qu’elles se concrétisent dans les faits.