compte rendu intégral

Présidence de M. Gérard Larcher

Secrétaires :

M. Jean Desessard,

M. Jean-Pierre Leleux,

Mme Catherine Tasca.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Communication relative à un groupe politique

M. le président. Par courrier en date de ce jour, M. Bruno Retailleau m’a informé du changement de dénomination du groupe qu’il préside, qui s’appelle désormais : « Les Républicains ».

Acte est donné de cette communication. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du RDSE.)

M. Roger Karoutchi. Très bien !

Mme Jacqueline Gourault. Quelle surprise ! (Sourires.)

3

Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

M. le président. Mes chers collègues, j’ai le plaisir de saluer, dans les tribunes du Sénat, une délégation de quatre parlementaires et de deux fonctionnaires du Conseil d’État du Sultanat d’Oman, soit la chambre haute du Parlement omanais. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique et M. le secrétaire d'État chargé de la réforme territoriale, se lèvent.)

La délégation est conduite par Son Excellence M. Abdallah Al Dhahab. Elle est accompagnée par les membres du groupe d’amitié France-Pays du Golfe, présidé par notre collègue Nathalie Goulet.

La délégation est en France jusqu’au 4 juin prochain, pour une visite d’étude consacrée au renforcement des liens entre cette assemblée et le Sénat français, d’une part, et aux grands enjeux de la protection de l’environnement, d’autre part, un sujet majeur en cette année de la Conférence Paris Climat 2015, la fameuse Conférence des Parties ou Cop 21.

Après une première réunion avec nos collègues du groupe d’amitié, la délégation mènera cet après-midi des entretiens avec des représentants du ministère des affaires étrangères, notamment dans la perspective de cette conférence sur le climat qui se tiendra à Paris à la fin de l’année.

Demain, elle se rendra à l’IFREMER, l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer. Puis, elle échangera avec nos collègues de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

Cette visite marque donc une étape forte dans la construction du lien entre les assemblées de nos deux pays.

Au nom du Sénat de la République française, je souhaite à nos homologues du Conseil d’État omanais une cordiale bienvenue, ainsi qu’un fructueux et excellent séjour. (Applaudissements.)

4

Articles additionnels après l’article 17 septdecies (précédemment réservés) (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Explications de vote sur l'ensemble

Nouvelle organisation territoriale de la République

Suite de la discussion en deuxième lecture et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. L’ordre du jour appelle les explications de vote des groupes et le vote par scrutin public sur le projet de loi, modifié par l’Assemblée nationale, portant nouvelle organisation territoriale de la République (projet n° 336, texte de la commission n° 451, rapport n° 450, avis n° 438).

Avant de passer au vote, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui ont été inscrits pour expliquer leur vote.

Je vous inviterai ensuite, mes chers collègues, à vous rendre en salle des conférences pour voter et suspendrai la séance pendant la durée du scrutin, prévue pour une demi-heure.

Je proclamerai enfin le résultat à l’issue du dépouillement, aux alentours de quinze heures quarante-cinq, puis je donnerai la parole au Gouvernement.

Explications de vote sur l'ensemble

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République
Proclamation du résultat du scrutin public (début)

M. le président. J’indique au Sénat que la conférence des présidents a fixé, à raison d’un orateur par groupe, à sept minutes le temps attribué à chaque groupe politique, les sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes.

La parole est à Mme Jacqueline Gourault, pour le groupe UDI-UC. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)

Mme Jacqueline Gourault. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, au terme de la deuxième lecture de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou NOTRe, il nous paraît important de dégager les grandes lignes du texte initial, ainsi que celles des travaux du Sénat, qui amèneront la très grande majorité des membres du groupe UDI-UC, au nom duquel je m’exprime, à voter ce texte.

Je tiens à souligner ici le travail remarquable effectué par les deux corapporteurs de ce texte, René Vandierendonck et Jean-Jacques Hyest, qui ont su, lors de cette deuxième lecture, maintenir une parfaite cohérence avec la vision de la première lecture. (M. Bruno Sido applaudit.)

Je n’oublie pas, bien entendu, la commission des lois, son président et ses commissaires.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Merci !

Mme Jacqueline Gourault. Tout d’abord, je rappellerai que la région a vu ses missions stratégiques renforcées, avec le transfert de la compétence économique, de l’aménagement du territoire et de celle de l’emploi. Le Sénat a, en effet, réintroduit l’ambition décentralisatrice de première lecture en attribuant à la région la responsabilité de coordonner les acteurs du service public de l’emploi à l’échelle régionale, sans remise en cause de la structure de Pôle emploi.

Ensuite, grâce au Sénat, le département, dont la vocation demeure la solidarité, que ce soit en matière sociale ou territoriale, a également les compétences de voirie, de gestion des collèges et du transport scolaire.

Dans un souci de clarification des compétences, les sénateurs ont gardé le cap de l’exercice de la politique économique à la région malgré la volonté des départements de conserver cette compétence et en confortant les intercommunalités comme acteurs de la mise en œuvre du développement économique des territoires.

Cette simplification permettra de répondre aux attentes de nos concitoyens, en rendant le « qui fait quoi » plus lisible, tout en associant les intercommunalités et les départements à l’élaboration des grands schémas.

En effet, le Sénat a réintroduit la procédure de co-élaboration du schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation, le SRDEII, supprimée par l’Assemblée nationale.

De plus, il a renforcé la procédure de co-élaboration du schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire, le SRADDET, et modifié le mécanisme de deuxième délibération, en prévoyant qu’il pouvait être mis en œuvre par la moitié des EPCI à fiscalité propre ou par la moitié des départements et des collectivités territoriales à statut particulier.

J’en viens maintenant au volet intercommunal, avec l’affirmation d’une intégration communautaire adaptée aux spécificités des territoires.

Le Sénat a confirmé son vote précédent en décalant d’un an le calendrier de révision des schémas départementaux de la coopération intercommunale, le SDCI, et en décalant d’autant, en conséquence, le calendrier de mise en œuvre des cartes révisées des EPCI à fiscalité propre et des syndicats. Il en est de même pour le calendrier d’élaboration et de mise en œuvre du schéma régional de la coopération intercommunale d’Île-de-France.

Il a maintenu la nécessité de l’accord d’un tiers au moins des communes membres de chaque EPCI appelé à fusionner au sein de la majorité requise pour valider le projet, afin de favoriser un fonctionnement harmonieux de la nouvelle intercommunalité.

Il a reporté d’un an, au 1er janvier 2017 – je le dis notamment à l’intention de M. Karoutchi –, la création de la métropole du Grand Paris. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Roger Karoutchi. Je n’en voulais pas !

M. Hubert Falco. C’est la gloire, mon cher collègue ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Jacqueline Gourault. Il a aligné sur le droit commun la désignation des représentants des communes au conseil de la métropole et aux conseils de territoire.

Les sénateurs ont également supprimé l’élargissement des compétences obligatoires des communautés de communes et d’agglomération au tourisme, à l’eau et à l’assainissement – compétences transférées au sein des compétences optionnelles.

M. Bruno Sido. Très bien !

Mme Jacqueline Gourault. En revanche, le Sénat a maintenu les déchets ménagers au sein des compétences obligatoires. De plus, il a maintenu l’intérêt communautaire comme principe fondateur du transfert des compétences obligatoires des communautés de communes et la majorité qualifiée en vigueur pour décider de l’intérêt communautaire.

M. Alain Joyandet. Cela, c’est très bien !

Mme Jacqueline Gourault. Enfin, concernant le volet de l’intercommunalité, le Sénat a supprimé l’article 22 octies prévoyant la fixation par la loi, avant le 1er janvier 2017, des modalités particulières pour l’élection des conseillers communautaires.

En clair, les auteurs de cet amendement, adopté à l’Assemblée nationale, voulaient une élection sur le périmètre de l’intercommunalité des conseillers communautaires déliée de l’élection municipale. Après que je l’ai interrogé à ce sujet, M. le secrétaire d'État me l’a d’ailleurs personnellement confirmé en séance vendredi dernier : « Quant au Gouvernement, il a, pour l’heure, décidé de s’en tenir au système actuel. » (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Hubert Falco. Voilà un homme pragmatique, qui connaît les territoires !

Mme Jacqueline Gourault. J’espère, madame la ministre, que vous êtes à la même heure que M. Vallini ! (Sourires.)

Mme Isabelle Debré. Ce n’est pas gagné !

Mme Jacqueline Gourault. Par ailleurs, sur des dispositions plus diverses, le Sénat a supprimé le Haut Conseil des territoires, parce qu’il ne voyait pas l’utilité de cette structure…

Mme Jacqueline Gourault. … et parce que cette instance relève du domaine réglementaire.

Mme Jacqueline Gourault. Ensuite, il a supprimé le dispositif d’action récursoire de l’État à l’encontre des collectivités territoriales en cas de condamnation pour manquement par la Cour de justice de l’Union européenne dans le cadre d’une compétence décentralisée, tout en saluant les efforts du Gouvernement pour prendre en compte les objections du Sénat formulées en première lecture.

Enfin, le Sénat a voté la création, au 1er janvier 2018, de la collectivité unique de Corse, en lieu et place de la collectivité territoriale de Corse et des départements de Corse-du-Sud et de Haute-Corse, dans une rédaction légèrement modifiée par rapport au texte adopté par l’Assemblée nationale.

Pour terminer mes propos, je reviens sur le maintien du seuil de l’intercommunalité à 5 000 habitants. Nous savons que ce seuil doit évoluer, mais nous insistons, au groupe UDI-UC, sur le fait que cela doit se faire dans des conditions adaptées à la diversité des territoires et en associant les élus locaux dans le cadre de la CDCI, la commission départementale de la coopération intercommunale, qui doit, avec le préfet, avoir un vrai rôle. (Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

Les élus locaux souhaitent des orientations stables et une visibilité dans le cadre de leur mandature.

C’est pourquoi fixer un objectif haut, qui paraît inatteignable pour de nombreuses communes aujourd’hui, doit avant tout être un aiguillon pour motiver les élus à travailler ensemble, sur des échelles de fonctionnement réalistes. La rationalisation de la carte intercommunale sert, à mon sens, à l’amélioration des services à la population, qui est le cœur de l’action des communes. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du RDSE.)

M. David Assouline. La captation de ce nom est un scandale !

M. Dominique de Legge. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, au terme de cette deuxième lecture, deux constats s’imposent.

Le premier est que, à l’évidence, le Gouvernement a une vision à géométrie variable et très fluctuante des territoires. La promesse faite en 2012 de supprimer le conseiller territorial ne pouvait constituer en soi ni une fin ni un projet. Exit donc le conseiller territorial, qui avait pourtant le grand mérite de permettre des évolutions fondées sur la diversité des territoires et le choix des élus ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Charles Revet. Tout à fait !

M. David Assouline. On l’a déjà entendu !

M. Dominique de Legge. Peinant alors à trouver un fil directeur, vous avez multiplié hésitations et contradictions, sans qu’on sache aujourd’hui où vous voulez vraiment en venir.

Ainsi, à peine la clause de compétence générale rétablie en janvier 2014 à la faveur de la loi de modernisation de l’action territoriale et d’affirmation des territoires, dite « loi MAPAM », voici qu’elle est supprimée !

À peine la réforme du scrutin départemental votée, voici que l’on nous annonce la suppression des départements dont le Président de la République affirmait encore en janvier 2014 l’importance !

M. Didier Guillaume. C’est le même discours qu’il y a un an !

M. Dominique de Legge. Toutefois, en divisant par deux le nombre de régions, vous ne vous rendiez pas compte que cette décision posait de nouveau la question de l’existence même des départements.

C’est dans ce contexte que vous nous proposez la loi NOTRe, que vous avez écrite dans une logique de suppression des départements, sans tirer les conséquences de votre réforme pour les régions. Et dans tout cela, pas un mot n’est dit des dotations dont le candidat Hollande promettait le maintien à leur niveau de 2012. On sait ce qu’il en est advenu !

Mme Sylvie Goy-Chavent. Bonne remarque !

M. Dominique de Legge. Au total, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, malgré tant d’heures de débats, vous n’avez pas réussi à nous dire clairement quelle était votre vision des territoires et de leur organisation. Vous avez réussi, en revanche, à jeter le désarroi chez les élus, qui ne croient plus en la parole de l’État.

M. Dominique de Legge. Mes chers collègues, le second constat qui s’impose, c’est que le Sénat a pleinement joué son rôle, en première et en deuxième lecture.

Je veux rendre ici un hommage appuyé à nos deux rapporteurs, Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck. Ils ont porté la voix des territoires et montré que, lorsque le Sénat légifère au cœur de sa mission, il sait rassembler et trouver les voies de passage, en s’accordant sur l’essentiel. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Ainsi, nous avons supprimé l’élection des conseillers communautaires au suffrage universel direct, considérant que c’était la mort programmée des communes.

Nous avons refusé de substituer à un jacobinisme national un jacobinisme régional, via des schémas prescripteurs élaborés sans concertation.

M. Jean-Claude Carle. Très bien !

M. Dominique de Legge. N’est-ce pas vous, monsieur le secrétaire d’État, qui déclariez il y a peu devant le 56e congrès des maires de l’Isère : « L’État de droit ne doit pas devenir l’État d’entrave et, à l’heure où l’argent public est de plus en plus rare, la France a besoin d’optimiser ses dépenses publiques et de redonner de nouvelles marges de manœuvre à nos territoires, afin qu’ils agissent » ?

M. Bruno Sido. C’était en Isère !

M. Dominique de Legge. Quel dommage que vous n’ayez pas été entendu... par vous-même ! (M. le secrétaire d'État sourit.)

Nous avons voulu clarifier la répartition des compétences entre départements et régions, en assurant la viabilité des départements et une véritable cohérence territoriale, notamment dans la gestion des transports scolaires, des ports et du tourisme. Parce que nous voulions que ce texte ne soit pas simplement une loi d’organisation, mais également une loi de décentralisation susceptible d’apporter une approche nouvelle sur les préoccupations majeures des Français, nous avons renforcé les prérogatives des régions dans le domaine de l’emploi et du développement économique.

Nous avons réaffirmé haut et fort notre attachement à la commune, cellule de base de notre démocratie locale, au sein d’intercommunalités à la taille des bassins de vie, évitant des regroupements à marche forcée ou subis.

M. Hubert Falco. Très bien !

M. Dominique de Legge. Nous avons rétabli le seuil de 5 000 habitants pour l’intercommunalité.

L’Assemblée nationale a fait elle-même la démonstration que le seuil de 20 000 habitants n’avait aucun sens, en prévoyant que les territoires ayant une densité de population comprise entre 51,3 et 102,6 habitants au kilomètre carré – chacun appréciera ces chiffres ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.) – pourront déroger au seuil de 20 000 habitants, et ce en appliquant la formule arithmétique suivante : 20 000 divisés par la densité nationale et multipliés par la densité départementale. Voilà une belle simplification administrative ! Il fallait y penser...

Quelle monstruosité que de décider du vivre ensemble par l’application d’une formule arithmétique ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Alain Bertrand. Il ne s'agit que de moyennes !

M. Dominique de Legge. Il était tout aussi fondamental, selon nous, de réintroduire la notion d’intérêt communautaire dans le transfert de compétences communales aux établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, pour permettre d’adapter l’action communautaire aux spécificités locales. Nous avons également souhaité prolonger le calendrier de révision des schémas intercommunaux.

Nous ne pouvions pas davantage accepter le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux intercommunalités.

Enfin nous avons supprimé le Haut Conseil des territoires, dont la création à l’Assemblée nationale tourne à l’obsession, comme si l’article 24 de la Constitution ne conférait pas au Sénat la représentation des collectivités territoriales ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. René-Paul Savary. Très bien !

M. Dominique de Legge. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, la balle est maintenant dans votre camp !

Les choses sont relativement simples : vous pouvez choisir le consensus construit au Sénat et très largement partagé par les territoires et leurs élus, ou bien laisser la majorité de l’Assemblée nationale poursuivre ses chimères d’un « meilleur des mondes territorial », dans lequel le schéma l’emporte sur l’action, la structure sur les hommes, le nombre sur le territoire.

M. Dominique de Legge. Je ne veux pas croire que tout ce scénario ait d’autre but que de réguler la baisse des dotations que vous avez programmée. En conditionnant leur octroi à la mise en œuvre d’une organisation territoriale improbable, vous misez sur l’échec de votre propre texte pour mieux justifier, ensuite, votre désengagement et vos renoncements. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

C’est parce que nous refusons ce scénario du pire que nous avons porté, à nouveau, la voix des territoires et voté ce texte amendé. Notre groupe, Les Républicains, forme le vœu…

M. Alain Bertrand. Et que dit l’UMP ?

M. Dominique de Legge. … que le bon sens l’emportera enfin sur toute autre considération. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Kaltenbach, pour le groupe socialiste.

M. Philippe Kaltenbach. Le groupe socialiste et républicain, bien sûr ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nos travaux en seconde lecture s’achèvent. Comme en première lecture, nos débats auront été constructifs. Le Sénat, en tant que représentant des collectivités territoriales, a, encore une fois, pleinement rempli son rôle, et nous avons eu, toutes et tous, à cœur de faire avancer ce projet de loi.

Le groupe socialiste veut remercier le Gouvernement, représenté ici par Mme Lebranchu et par M. Vallini, de sa vigilance et son écoute. Il veut aussi saluer le travail, ô combien remarquable, des deux corapporteurs du texte, Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck, que nous remercions également. (Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

Nous avons travaillé collectivement, dans un état d’esprit constructif. Je n’ai aucun doute sur la poursuite de cette volonté d’aboutir à une réelle coproduction législative.

Nous avons toutes et tous conscience que nos territoires veulent de la stabilité. Nous avons conscience, aussi, que la réforme que nous sommes en train d’élaborer a vocation à s’inscrire dans la durée.

Les élus locaux et, au-delà, nos concitoyens ne veulent plus de changements incessants. Je rappelle, à cet égard, qu’il s’est écoulé vingt ans entre les actes I et II de la décentralisation, et qu’un peu plus de dix ans ont passé depuis les réformes portées par notre éminent collègue Jean-Pierre Raffarin.

L’organisation de la République décentralisée n’est pas un mécano que l’on monte et démonte au gré des majorités.

M. François Grosdidier. C’est pourtant ce que vous avez fait ! Il fallait garder le conseiller territorial !

M. Philippe Kaltenbach. M. le président Gérard Larcher, en fin connaisseur des territoires, le sait d’ailleurs parfaitement : à juste raison, il a appelé à stabiliser le fonctionnement de nos institutions locales. Nous savons que cette stabilité passe, notamment, par un consensus législatif et un accord entre les deux chambres du Parlement. C’est ce à quoi travaille le groupe socialiste. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Nous constatons, à ce stade du débat, qu’il y a de réels points de convergence entre l’Assemblée nationale et le Sénat : sur la suppression de la clause de compétence générale des régions et des départements, sur le renforcement des compétences stratégiques des régions en matière de développement économique et d’aménagement du territoire, sur la reconnaissance de compétences recentrées dans le domaine des solidarités sociales et territoriales pour les départements ;

Du reste, ces départements sont non plus voués à une mort annoncée, mais confortés dans leur rôle essentiel pour la République.

M. François Grosdidier. C’est vous qui vouliez les tuer !

M. Philippe Kaltenbach. Nous savons également, désormais, que le maintien des routes et des collèges dans le giron des départements est acquis.

M. Bruno Sido. Et les transports ?

M. Philippe Kaltenbach. Un autre point de convergence est la création d’une collectivité unique en Corse. La liste est encore longue, mais je m’en tiendrai là.

Sur d’autres sujets, nous devons encore surmonter nos divergences. Nous sommes convaincus que cela sera possible dans la suite de la navette parlementaire et en commission mixte paritaire.

Je pense, notamment, à la compétence relative aux transports scolaires, sur laquelle nous devrions trouver un accord, et aux ports maritimes et intérieurs, dont le Sénat a voulu qu’ils restent de la compétence des départements. Je pense aussi au tourisme et à l’éventuel chef de filat confié à la région, ainsi qu’à l’accroissement des compétences des intercommunalités.

M. Jean-François Husson. Vous n’étiez pas nombreux pour voter ces dispositions !

M. Philippe Kaltenbach. Sur tous ces points, un travail important a déjà été réalisé. Nous allons continuer à œuvrer pour parvenir à un compromis.

Sur deux points en particulier, le groupe socialiste regrette l’attitude de la majorité sénatoriale, et plus particulièrement des membres du groupe « LR ». (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Retailleau. Non, du groupe « Les Républicains » !

M. Philippe Kaltenbach. Il s’agit, tout d’abord, du relèvement du seuil de création des intercommunalités. (Brouhaha.)

Je le dis clairement, si nous ne sommes pas favorables à un seuil à 20 000 habitants, que nous estimons trop élevé, nous ne sommes pas davantage partisans du statu quo à 5 000 habitants. Nos territoires ont besoin d’évoluer. La meilleure manière de préserver les petites communes est bien de favoriser des regroupements à une échelle qui leur permette d’améliorer les services à la population.

Dans le souci de trouver un compromis, nous avons proposé par voie d’amendement d’imposer un seuil minimum de 15 000 habitants, avec les dérogations votées par l’Assemblée nationale.

J’ai bien noté que nos collègues du groupe UDI-UC avaient, eux aussi, fait des propositions allant dans le même sens. Hélas, les sénateurs « LR » ont jusqu’à présent refusé cette main tendue. (Nouvelles protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Retailleau. Les Républicains !

M. Hubert Falco. Il faut vous y habituer !

M. Philippe Kaltenbach. Nos collègues centristes le savent bien, il nous faudra tenter de parvenir à un compromis lors de la navette et de la commission mixte paritaire. À défaut, l’Assemblée nationale aura le dernier mot, lequel sera le seuil à 20 000 habitants.

M. Éric Doligé. C’est du marchandage !

M. Jean-François Husson. Respectez la liberté des communes !

M. Philippe Kaltenbach. Il me semble, pour ma part, qu’un seuil de 15 000 habitants serait plus raisonnable. La balle, chers collègues du groupe « LR », est dans votre camp !

M. Alain Bertrand. « LR » de rien... (Sourires.)

M. Philippe Kaltenbach. Le second point sur lequel le groupe socialiste ne saurait transiger concerne la remise en cause, intervenue ici en deuxième lecture, de l’application de la loi SRU.

Une nouvelle fois, la droite s’est employée à détricoter ce dispositif mis en place par la gauche et qui a fait ses preuves.

L’article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « loi SRU », qui impose un seuil de 20 % de logements sociaux – 25 % dans les zones tendues – n’est pas utile, mes chers collègues, il est indispensable ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Il est indispensable pour celles et ceux qui ne parviennent pas à se loger, indispensable pour la mixité, la cohésion et la paix sociale. Sur ce point, toute modification est inacceptable.

M. Hubert Falco. Et comment financer ces logements ?

M. Philippe Kaltenbach. Comme nous regrettons de n’avoir pu aboutir sur le seuil intercommunal à 15 000 habitants et refusons catégoriquement cette nouvelle tentative de déshabillage de la loi SRU,…