Sommaire

Présidence de M. Claude Bérit-Débat

Secrétaires :

M. François Fortassin, Mme Colette Mélot.

1. Procès-verbal

2. Organisme extraparlementaire

3. Convention internationale. – Adoption en procédure accélérée et en procédure d’examen simplifié d’un projet de loi dans le texte de la commission

Convention n° 29 de l'Organisation internationale du travail sur le travail forcé, 1930. – Adoption, de l’article unique du projet de loi dans le texte de la commission.

4. Rappel au règlement

Mme Éliane Assassi ; M. le président.

5. Sécurité publique dans les transports collectifs de voyageurs. – Discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission

Discussion générale :

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

M. François Bonhomme, rapporteur de la commission des lois

M. Alain Fouché, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire

6. Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire norvégienne

7. Sécurité publique dans les transports collectifs de voyageurs. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission

M. Jean-Claude Requier

M. Jean-François Longeot

Mme Éliane Assassi

M. Jean-Claude Leroy

Mme Esther Benbassa

M. Roger Karoutchi

M. Jacques Bigot

M. Jean-Jacques Filleul

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Clôture de la discussion générale.

Article 1er

Amendement n° 17 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 19 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 42 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 36 du Gouvernement. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Article additionnel après l'article 1er

Amendement n° 20 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Article 1er ter (nouveau)

Amendement n° 26 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 1 rectifié bis de M. Louis Nègre. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 2

Amendement n° 18 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendement n° 2 rectifié bis de M. Louis Nègre. – Retrait.

Amendement n° 21 de Mme Éliane Assassi. – Retrait.

Amendement n° 37 du Gouvernement. – Adoption.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

8. Questions d'actualité au Gouvernement

crise de la filière avicole

M. Pierre Médevielle ; M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement.

chômage

M. Jean-François Husson ; Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ; M. Jean-François Husson.

nouvelles cartes d’intercommunalité et conséquences en termes de découpage

Mme Françoise Laborde ; Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique.

renault : tests de pollution

Mme Aline Archimbaud ; M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement.

situation de jacqueline sauvage

Mme Laurence Cohen ; M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement ; Mme Laurence Cohen.

rapport badinter sur le droit du travail

Mme Nicole Bricq ; Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

encadrement des essais cliniques

M. Olivier Cigolotti ; Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie.

situation financière des départements

M. Benoît Huré ; Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique.

action de la france au niveau européen : lutte contre le terrorisme

M. Alain Richard ; M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur.

crise agricole

Mme Corinne Imbert ; M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement ; Mme Corinne Imbert.

protocole relatif à la protection de l'enfance

Mme Michelle Meunier ; Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie.

nouvelle-calédonie

M. Pierre Frogier ; Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Isabelle Debré

9. Candidature à une délégation sénatoriale

10. Sécurité publique dans les transports collectifs de voyageurs. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Article 2 (suite)

Amendement n° 31 rectifié de M. Jacques Bigot. – Adoption.

Amendement n° 43 de la commission. – Retrait.

Adoption de l’article modifié.

Article additionnel après l’article 2

Amendement n° 27 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Article 3 – Adoption.

Article 3 bis

Amendement n° 3 rectifié de M. Louis Nègre. – Non soutenu.

Amendement n° 41 du Gouvernement. – Rejet.

Amendement n° 33 rectifié de M. Jacques Bigot. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article additionnel après l'article 3 bis

Amendement n° 13 rectifié de M. Roger Karoutchi

Suspension et reprise de la séance

Amendement n° 13 rectifié de M. Roger Karoutchi (suite). – Rejet.

Article 4

Amendement n° 4 rectifié bis de M. Louis Nègre. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 4 bis

Amendements identiques nos 5 rectifié bis de M. Louis Nègre et 16 rectifié de M. Jacques Mézard. – Adoption des deux amendements.

Adoption de l’article modifié.

Article additionnel après l’article 4 bis

Amendement n° 29 rectifié de M. Charles Revet. – Non soutenu.

Article 4 ter (supprimé)

Article 5

Amendement n° 6 rectifié bis de M. Louis Nègre. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Article 6

Amendement n° 23 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 6 bis AA (nouveau)

Amendement n° 44 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article.

Article 6 bis A (supprimé)

Article 6 bis (supprimé)

Amendement n° 7 rectifié quater de M. Louis Nègre. – Adoption de l'amendement rétablissant l'article.

Article 6 ter (supprimé)

Article 6 quinquies (supprimé)

Article 7

Amendement n° 8 rectifié de M. Louis Nègre. – Non soutenu.

Adoption de l’article.

Article 8

Amendement n° 14 rectifié de M. Roger Karoutchi. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 8 bis

Amendement n° 38 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° 24 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Article 8 ter – Adoption.

Article 9

Amendement n° 25 de Mme Éliane Assassi. – Rejet.

Amendements identiques nos 9 rectifié de M. Louis Nègre et 30 rectifié de M. Charles Revet. – Non soutenus.

Amendement n° 10 rectifié bis de M. Louis Nègre. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Articles additionnels après l'article 9

Amendement n° 11 rectifié bis de M. Louis Nègre. – Retrait.

Amendement n° 15 rectifié de M. Roger Karoutchi. – Retrait.

Article 9 bis (supprimé)

Article 10 – Adoption.

Article 11 (supprimé)

Article 12

Amendement n° 39 du Gouvernement. – Adoption de l'amendement rédigeant l'article.

Article 13 – Adoption.

Article additionnel après l'article 13

Amendement n° 12 rectifié bis de M. Louis Nègre. – Rejet.

Article 14 (supprimé)

Article 15 (nouveau) – Adoption.

Vote sur l'ensemble

M. Jacques Bigot

Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification

11. Chambres de commerce et d'industrie et chambres de métiers et de l'artisanat. – Adoption en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Discussion générale :

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire

M. Michel Houel, rapporteur de la commission des affaires économiques

M. Alain Bertrand

Mme Anne-Catherine Loisier

M. Jean-Pierre Bosino

M. Yannick Vaugrenard

M. Joël Labbé

M. Philippe Adnot

Mme Sophie Primas

Mme Delphine Bataille

Clôture de la discussion générale.

Article 1er

M. Jean-Pierre Bosino

Amendement n° 10 rectifié de M. Vincent Delahaye. – Adoption.

Amendement n° 11 rectifié de M. Vincent Delahaye. – Adoption.

Amendements identiques nos 4 rectifié de M. Olivier Cigolotti, 8 rectifié octies de M. Louis Nègre, 14 de M. Yannick Vaugrenard et 16 du Gouvernement. – Rejet, par scrutin public, des quatre amendements.

Amendement n° 9 rectifié de M. Michel Canevet. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Articles additionnels après l'article 1er

Amendement n° 5 rectifié bis de M. Alain Bertrand. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 6 rectifié bis de M. Alain Bertrand. – Devenu sans objet.

Amendements identiques nos 7 rectifié de M. Philippe Leroy, 12 rectifié de M. Philippe Adnot, 13 de M. Jean-Jacques Lasserre et 15 rectifié de Mme Hermeline Malherbe. – Adoption de l'amendement n° 12 rectifié insérant un article additionnel, les amendements nos 7 rectifié, 13 et 15 rectifié n'étant pas soutenus.

Article 2

Amendement n° 3 rectifié bis de M. André Reichardt. – Retrait.

Adoption de l’article.

Articles additionnels après l'article 2

Amendement n° 1 rectifié bis de M. André Reichardt. – Rejet.

Amendement n° 2 rectifié bis de M. André Reichardt. – Rejet.

Article 3 – Adoption.

Adoption, par scrutin public, du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.

12. Réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées. – Adoption en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Discussion générale :

Mme Martine Pinville, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire

M. André Reichardt, rapporteur de la commission des lois

Mme Éliane Assassi

M. Alain Bertrand

M. Thani Mohamed Soilihi

M. Christophe-André Frassa

Clôture de la discussion générale.

Article 1er – Adoption.

Article 2 (nouveau)

Amendement n° 1 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 3 (nouveau)

Amendement n° 3 rectifié du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article additionnel après l'article 3

Amendement n° 2 de la commission. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Adoption du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.

13. Commission mixte paritaire

14. Nomination d’un membre d’une délégation sénatoriale

15. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Claude Bérit-Débat

vice-président

Secrétaires :

M. François Fortassin,

Mme Colette Mélot.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Organisme extraparlementaire

M. le président. M. le Premier ministre a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître le nom de quatre sénateurs – deux titulaires et deux suppléants – pour siéger au Conseil national de la mer et des littoraux.

Conformément à l’article 9 du règlement du Sénat, la commission des lois et la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ont été saisies.

Les nominations au sein de cet organisme extraparlementaire auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.

3

Convention internationale

Adoption en procédure accélérée et en procédure d’examen simplifié d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen du projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, autorisant la ratification du protocole relatif à la convention n° 29 de l’Organisation internationale du travail sur le travail forcé, 1930 (projet n° 630 [2014-2015], texte de la commission n° 318, rapport n° 317).

Pour ce projet de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.

Je vais donc le mettre aux voix.

projet de loi autorisant la ratification du protocole relatif à la convention n° 29 de l'organisation internationale du travail sur le travail forcé, 1930

 
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification du protocole relatif à la convention n° 29 de l'Organisation internationale du travail sur le travail forcé, 1930
Article unique (fin)

Article unique

Est autorisée la ratification du protocole relatif à la convention n° 29 de l'Organisation internationale du travail sur le travail forcé, 1930, adopté à Genève le 11 juin 2014, et dont le texte est annexé à la présente loi.

M. le président. Je mets aux voix l’article unique constituant l’ensemble du projet de loi autorisant la ratification du protocole relatif à la convention n° 29 de l’Organisation internationale du travail sur le travail forcé, 1930.

(Le projet de loi est adopté.)

Article unique (début)
Dossier législatif : projet de loi autorisant la ratification du protocole relatif à la convention n° 29 de l'Organisation internationale du travail sur le travail forcé, 1930
 

4

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour un rappel au règlement.

Mme Éliane Assassi. Ce rappel au règlement a trait à l’organisation de nos travaux.

Hier soir, nous avons appris que la discussion du projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat était reportée à cet après-midi, après les questions d’actualité au Gouvernement. Plus tard, alors qu’il était évident depuis un moment que la proposition de loi que nous allons examiner dans quelques instants ne pourrait être débattue dans la soirée, nous avons également appris que son examen n’aurait lieu que ce matin.

Ce n’est pas cela qui m’inquiète. C’est que, sauf à le bâcler, nous n’aurons pas terminé l’examen de cette proposition de loi à treize heures, voire à treize heures trente. C’est pourquoi, monsieur le président, je souhaite connaître le déroulement de nos travaux d’aujourd’hui.

L’on ne peut pas, je crois, reprocher à mon groupe des absences, que ce soit en séance publique ou en commission.

M. François Bonhomme. Non, c’est sûr !

Mme Éliane Assassi. Au nom de tous les membres du groupe CRC, je proteste contre cet embrouillamini, bien évidemment dû à l’inflation législative, et je demande au Gouvernement d’être un peu plus attentif au contenu des textes. En effet, certains d’entre eux méritent un temps de discussion plus important que celui qui est décidé au moment de l’élaboration de l’ordre du jour de nos travaux.

Ce n’est pas dans mes habitudes, mais je le dis haut et fort aujourd'hui : cette façon de traiter le Parlement me met vraiment en colère !

M. Roger Karoutchi. Très bien ! Je suis d’accord.

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.

L’examen de la proposition de loi se poursuivra vraisemblablement cet après-midi après les questions d’actualité au Gouvernement. Nous entamerons ensuite la discussion du projet de loi sur les chambres de commerce et d’industrie.

M. Jean-Claude Requier. Il y a un autre texte après ?

M. Roger Karoutchi. Oui, il y en a un troisième !

M. le président. Pour avoir présidé nos débats hier après-midi, j’ai pu constater qu’ils avaient été assez longs, tout comme certaines interventions, même si c’est parfois inévitable… Quoi qu'il en soit, je transmettrai votre rappel au règlement au président du Sénat.

Mme Éliane Assassi. Au Gouvernement surtout !

M. le président. Par ailleurs, je pense que le M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche, ici présent, a entendu votre intervention.

5

 
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
Discussion générale (suite)

Sécurité publique dans les transports collectifs de voyageurs

Discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs (proposition n° 281, texte de la commission n° 316, rapport n° 315, avis n° 314).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'État.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
Discussion générale (interruption de la discussion)

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous voici réunis pour examiner ensemble la proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs. Présentée par le député Gilles Savary, elle a été, comme vous le savez, adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale, le 17 décembre dernier.

Comme vous le savez aussi, le Gouvernement soutient pleinement l’adoption de ce texte. L’une des priorités de l’action que nous conduisons en matière d’ordre public consiste en effet à garantir partout en France le droit fondamental à la sécurité dont chaque Français doit pouvoir jouir lors de ses déplacements.

Chaque jour, sur l’ensemble du territoire national, des millions de Français et de visiteurs étrangers empruntent les transports publics. Ces derniers constituent donc un élément central dans la vie quotidienne de la plupart de nos concitoyens. Je pense notamment aux 8,3 millions de Franciliens qui utilisent quotidiennement les transports en commun pour se rendre sur leur lieu de travail le matin, puis pour rentrer chez eux le soir. À cet égard, je constate que le nombre de ces trajets a augmenté de 20 % en dix ans, tandis que, dans le même temps, celui des déplacements automobiles stagnait.

Qu’il s’agisse du bus, du métro, du tramway ou encore du train, les transports publics constituent donc à la fois une condition de notre liberté de circulation, un facteur de développement économique et un atout pour notre industrie touristique. Il est donc de notre responsabilité de faire en sorte que nos concitoyens qui les utilisent puissent le faire en toute tranquillité, sans craindre d’être victimes de la délinquance, a fortiori d’une entreprise terroriste.

Sur ce dernier point, le niveau de la menace à laquelle nous sommes aujourd’hui confrontés étant particulièrement élevé, la sagesse nous commande de faire preuve de la plus grande prudence et de prendre en amont toutes les dispositions qui s’imposent pour sécuriser au mieux les transports publics. Comme vous le savez, ces derniers peuvent constituer une cible pour les terroristes : en raison de leur caractère confiné et du grand nombre de passagers qui les empruntent, ils représentent en effet des espaces propices à la commission d’attentats de masse.

Le 21 août dernier, un carnage a ainsi pu être évité de justesse dans le train Thalys reliant Amsterdam à Paris, grâce à l’héroïsme dont ont fait preuve plusieurs passagers et membres du personnel. Cependant, par le passé, d’autres attentats, visant des cibles similaires et n’ayant pu être déjoués, se sont révélés particulièrement meurtriers : à Paris, la station Saint-Michel du RER B au mois de juillet 1995 ; à Madrid, à la gare d’Atocha au mois de mars 2004 ; à Londres, dans le métro et dans un bus au mois de juillet 2005 ; à Moscou, aux stations de métro Loubianka et Park Koultoury au mois de mars 2010.

L’expérience nous enseigne donc que les transports constituent des points de vulnérabilité qu’il nous faut tenter de protéger de la façon la plus efficace possible. Par ailleurs, si la prévention des attaques terroristes représente pour nous une priorité, nous devons continuer à mener une lutte inflexible contre les agressions et les violences plus quotidiennes.

En effet, le nombre d’agressions commises aussi bien contre les voyageurs que contre les personnels a nettement augmenté. Des décisions s’imposent pour inverser cette tendance en luttant sans relâche contre toutes les formes de délinquance susceptibles d’empoisonner la vie des Français qui utilisent les transports en commun. Je pense aux vols et aux agressions de toutes sortes, notamment aux rackets intolérables auxquels se livrent des bandes de jeunes délinquants sur certaines rames du RER.

C’est aussi sans relâche que nous devons lutter contre les violences sexistes dont bien des femmes sont victimes dans les transports en commun. À cet égard, une récente étude réalisée par le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes a montré que la totalité des femmes interrogées avait déjà été harcelée au moins une fois sur les lignes du réseau francilien.

C’est sans relâche, enfin, qu’il nous faut lutter contre la fraude et poursuivre les fraudeurs de toutes sortes, qui pénalisent gravement les transporteurs et contribuent à nourrir le sentiment d’insécurité et d’injustice parmi les usagers des transports en commun.

Ce phénomène de fraude dite « d’habitude » ou « de comportement », qui relève d’un choix délibéré et pleinement assumé par le fraudeur, est en effet lui aussi en forte augmentation depuis quelques années, alors que jusqu’à présent notre droit manquait d’outils pour l’entraver.

Son coût annuel est pourtant évalué par la Cour des comptes à plus de 500 millions d’euros pour les transporteurs. Rien que pour la SNCF, le manque à gagner est de 300 millions d’euros par an, alors que celle-ci ne recouvre qu’un très faible pourcentage des amendes infligées aux resquilleurs : 9 % seulement en 2013. Enfin, pour la RATP comme pour les entreprises de transport public de province, la fraude représente environ 100 millions d’euros.

Avant d’en venir au contenu de la proposition de loi, je rappelle que ce texte est d’abord le résultat de nombreux échanges particulièrement riches et fructueux conduits durant plusieurs mois entre l’État, les opérateurs de transports et les parlementaires.

Je tiens tout particulièrement à saluer le travail remarquable qu’ont réalisé les sénateurs François Bonhomme et Alain Fouché, respectivement rapporteur de la commission des lois et rapporteur pour avis de la commission du développement durable, afin d’améliorer le texte et de consolider les solutions juridiques susceptibles de nous aider à lutter plus efficacement contre les phénomènes criminels et délinquants, quels qu’ils soient, dans les transports en commun.

Je veux également rappeler que ce texte concrétise une ambition forte portée depuis longtemps par le Gouvernement.

En effet, dès le 16 décembre 2014, le Comité national de la sécurité dans les transports en commun, le CNSTC, après un long travail réalisé en amont, a proposé un premier train de mesures contre la fraude, repris dans la proposition de loi. Celle-ci a donc largement bénéficié du dialogue que le Gouvernement a su renouer avec l’ensemble des transporteurs. En effet, dès le mois de juin 2014, Bernard Cazeneuve avait souhaité réactiver ce Conseil, qui, après sa création en 2008, ne s’était réuni qu’une seule fois, en décembre 2011. Il n’avait depuis lors jamais plus été sollicité.

En lien avec les opérateurs de transports, nous avons ainsi pu évaluer avec précision les besoins en matière de sécurité, avant d’identifier les évolutions juridiques qui apparaissaient nécessaires pour que l’action des forces de l’ordre et celle des services de sécurité internes, soit la SUGE, ou sûreté générale, la sûreté SNCF, et le Groupe de protection et de sécurisation des réseaux de la RATP, le GPSR, puissent gagner en efficacité.

Le texte tient également compte des évolutions de la situation sécuritaire globale de notre pays. L’attentat évité dans le Thalys nous a rappelé les enjeux fondamentaux de sûreté propres aux transports collectifs, plus particulièrement aux transports ferroviaires, en mettant en évidence des modes opératoires terroristes inédits sur notre sol. Certes, cet événement nous a contraints à différer quelque peu l’examen au Parlement de la proposition de loi, afin d’y intégrer des mesures supplémentaires adaptées à la menace terroriste, mais je pense que personne, dans le contexte actuel, ne s’en étonnera. Il était nécessaire, chacun en conviendra, de prendre le temps de réfléchir et d’élaborer les mesures idoines.

Malgré ce petit délai, le Comité national de la sécurité dans les transports en commun a néanmoins pu présenter, dès le 19 octobre dernier, les principales mesures contenues dans la proposition de loi qui est aujourd’hui soumise à votre examen.

Ce texte s’articule autour de deux axes majeurs : d’une part, la lutte contre la fraude, et, d’autre part, le renforcement de la lutte que nous menons contre le risque terroriste et les atteintes graves à la sécurité publique dans les transports. Je veux à présent les évoquer plus en détail.

Trois mesures principales sont prévues en matière de lutte contre la fraude.

Le texte prévoit tout d’abord, pour caractériser le délit de « fraude d’habitude », d’abaisser de dix à cinq le nombre nécessaire de contraventions reçues en cas de défaut de présentation d’un titre de transport valable. Il faudra désormais avoir commis seulement cinq infractions en moins d’un an pour que le délit soit constitué.

Il prévoit ensuite de donner la possibilité aux personnels des transporteurs de constater eux-mêmes les ventes à la sauvette dans les gares. Les agents de contrôle et de sécurité ferroviaire pourront donc constater un tel délit par procès-verbal.

Le texte prévoit également de reconnaître un droit de communication entre les transporteurs et les administrations publiques, afin de faciliter la recherche et la vérification des états civils et des adresses communiqués par les fraudeurs, et, par là même, d’améliorer le recouvrement des amendes.

Nous avons bien sûr veillé à ce que cette mesure soit préalablement soumise à l’avis du Conseil d’État. J’ajoute que le texte d’application sera, lui, soumis à l’avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL. Comme vous pouvez le constater, nous entendons nous conformer au droit de la façon la plus stricte et la plus précautionneuse possible, afin que cette mesure nécessaire ne puisse souffrir aucune contestation.

Enfin, le texte prévoit la création d’un nouveau délit pour lutter contre les « mutuelles de fraudeurs », dont les incitations se multiplient sur internet. Je rappelle que l’objectif de ces organisations est d’imposer la gratuité des transports pour les usagers, lesquels doivent dès lors s’acquitter d’une cotisation mensuelle auprès d’une « mutuelle » qui prend en charge le paiement des amendes dressées en cas d’infraction. Désormais, une amende sanctionnera lourdement ces pratiques particulièrement pernicieuses et contraires au civisme le plus élémentaire.

L’ensemble de ces mesures vise donc à changer l’état d’esprit des voyageurs qui pratiquent la fraude dans les transports en commun, qu’ils s’y adonnent de façon régulière ou bien épisodique.

J’en viens maintenant aux mesures de sûreté prises pour lutter contre le risque terroriste et contre les atteintes les plus graves à la sécurité publique dans les transports. En la matière, nous renforçons considérablement nos dispositifs de lutte et de vigilance.

En premier lieu, les agents de sécurité internes de la SNCF et de la RATP seront autorisés, au même titre que les agents de sécurité privés, à procéder à l’inspection visuelle et à la fouille des bagages, ainsi que, en cas de circonstances graves constatées par le préfet, à des palpations de sécurité. Bien évidemment, toute inspection de bagage, comme toute palpation de sécurité, ne pourra être réalisée qu’avec le consentement des intéressés, qui pourront les refuser, mais ne pourront alors accéder à la gare ou à la rame.

Le dispositif prévu sera donc le même que celui qui existe dans les grands magasins et que personne ne songerait à contester. Nos concitoyens ont pleinement compris sa nécessité. Je suis convaincu qu’il en ira de même dans les transports collectifs.

En contrepartie de cette extension de leurs prérogatives, nous renforçons de façon significative les procédures de contrôle auxquelles sont soumis les agents de la SUGE et du GPSR. Le texte prévoit que le contenu de leur formation sera désormais fixé conjointement par le ministère de l’intérieur et le ministère des transports.

À cet égard, je sais que nous avons un point de divergence sur les modalités du contrôle de cette formation.

Vous souhaitez en effet, mesdames, messieurs les sénateurs, que la tâche en soit confiée au Conseil national des activités privées de sécurité, le CNAPS, tandis que le Gouvernement estime, quant à lui, comme les deux grands opérateurs d’ailleurs, que ce sont les services du ministère de l’intérieur qui doivent s’en charger directement. Il nous apparaît en effet que ces derniers sont les mieux placés pour réaliser les contrôles nécessaires et prescrire les exigences attendues en termes de formation, dans la mesure où ils sont déjà familiarisés avec les modalités d’intervention des agents de la SUGE et du GPSR, ainsi qu’avec les prérogatives qui leur incombent. Aucune raison particulière ne nous semble donc justifier qu’une telle mission de contrôle revienne au CNAPS.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement a déposé un amendement visant à rétablir le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale. J’espère que, au terme de nos propres échanges sur ce sujet, nous parviendrons à une position efficace et par là même satisfaisante.

En second lieu, le texte prévoit d’élargir les possibilités, pour les agents de la SUGE et du GPSR, d’exercer leurs missions en tenue civile et, dans certaines conditions, en étant armés, afin de renforcer l’efficacité des opérations de constatation d’infractions.

Comme c’est le cas aujourd’hui, c’est aux préfets, dans leurs territoires respectifs, qu’il reviendra d’habiliter les agents autorisés à exercer en tenue civile et de déterminer la durée et les lieux où ces derniers pourront intervenir en ayant recours à cette option. Des instructions strictes seront donc délivrées pour encadrer l’application de cette mesure, car notre volonté n’est certainement pas de la généraliser. Le décret du 7 septembre 2007 prévoyant la mise en œuvre de la dispense d’uniforme pour les agents des services de sécurité internes sera complété, afin que le travail en civil soit strictement encadré et que son contrôle par les préfets soit pleinement effectif.

Enfin, la proposition de loi prévoit que les officiers de police judiciaire et les agents de police judiciaire, ainsi que certaines catégories d’agents de police judiciaire adjoints, soient désormais autorisés à procéder à l’inspection visuelle et à la fouille des bagages, afin de prévenir toute atteinte grave à la sécurité des personnes ou des biens, notamment les actes terroristes, y compris sans l’accord des passagers concernés.

Pour finir, je tiens à dire quelques mots sur une mesure présentant un caractère de sensibilité particulier. Je veux parler du « criblage » des personnels des exploitants de transports publics de personnes, autrement dit le fait que leur recrutement ou leur affectation puisse être précédé d’enquêtes administratives destinées à vérifier que leur comportement n’est pas incompatible avec l’accomplissement de leur mission, en ce qu’il pourrait constituer une menace grave pour l’ordre ou la sécurité publics.

Il s’agit d’un sujet auquel le Gouvernement, comme vous le savez, est sensible depuis longtemps, puisque nous avions envisagé, voici plusieurs mois, l’introduction d’une mesure équivalente dans le projet de loi relatif au renseignement, lequel prévoyait initialement que, à l’occasion de grands événements, les personnels ayant accès à des lieux dits « sensibles » fussent « criblés ».

C’est donc un enjeu qui dépasse de loin les seuls opérateurs de transports publics. Il doit être traité avec rigueur et responsabilité. De même, une telle mesure de « criblage » ne saurait exonérer les entreprises concernées de leur devoir de vigilance lors du recrutement de leurs personnels et de bonne gestion de leurs ressources humaines.

Je sais que la commission a privilégié la conservation de l’équilibre du texte issu des travaux de l’Assemblée nationale, en confiant au Conseil d’État le soin de fixer la liste des fonctions concernées et de déterminer les modalités d’application de la mesure de « criblage » à un décret en Conseil d’État.

Pour sa part, le Gouvernement a décidé de déposer un amendement que nous examinerons ensemble, afin que nous puissions améliorer encore le dispositif proposé. Nous pensons en effet que, en raison du degré élevé de la menace terroriste qui pèse sur notre pays, il serait utile de préciser son contenu dès maintenant.

J’ajoute que cet amendement se fonde sur les conclusions du rapport demandé par le ministre de l’intérieur et la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie après le drame survenu en juin dernier à Saint-Quentin-Fallavier. À mes yeux, c’est là une garantie à la fois d’efficacité opérationnelle et de protection des libertés individuelles.

Le Gouvernement soutient donc pleinement l’adoption de la proposition de loi qui est aujourd’hui soumise à votre examen, dans la mesure où elle nous permettra de renforcer la sécurité des usagers des transports publics sur l’ensemble du territoire national, dans un contexte de menace terroriste particulièrement élevée. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. François Bonhomme, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs a pour principal objet de lutter contre la fraude dans les transports terrestres, mais elle comporte également plusieurs dispositions permettant d’y renforcer la sécurité.

La sécurité dans les transports a été le sujet d’une mission d’information commune à la commission des lois et à la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, dont les conclusions vous ont été présentées le 13 janvier dernier.

Le texte qui nous est aujourd'hui soumis intègre plusieurs recommandations de cette mission.

Avant de présenter un bilan rapide de la fraude dans les transports en commun et les moyens pour y faire face, j’évoquerai le cadre juridique contraignant des contrôles et des vérifications d’identité. Enfin, je vous présenterai les axes de travail retenus par la commission.

Le transport terrestre, en particulier le transport ferroviaire, se caractérise évidemment par une vulnérabilité et par des flux très importants de voyageurs. Or le cadre juridique des contrôles et des vérifications d’identité est très contraignant. Les dispositions des articles 78-1 et suivants du code de procédure pénale sont également très compliquées, car elles résultent de réformes successives, qui se sont superposées au fil du temps et sont finalement peu mises en œuvre.

La fraude dans les transports collectifs de voyageurs représente assurément une perte de recettes considérable pour les exploitants de transports. Dans son rapport annuel de février 2015, la Cour des comptes évalue à 500 millions d’euros annuels le coût de la fraude dans l’ensemble des transports publics de voyageurs.

J’ajoute que ce montant est en fait très minoré, puisque c’est un taux de fraude mesuré, qui ne prend pas en compte le cas des fraudeurs n’ayant pas fait l’objet d’un contrôle. De ce fait, le taux de fraude réel peut être évalué en multipliant d’un facteur d’au moins quatre ou cinq le taux de fraude mesuré. Pour la seule SNCF, la fraude apparente représente 340 millions d’euros par an. Pour vous donner un ordre de grandeur, ce montant est à rapprocher du budget que la SNCF consacre chaque année à la sécurité, qui est de l’ordre de 400 millions d’euros…

Les moyens pour lutter contre la fraude ont donc fait la preuve de leur inefficacité. Ainsi, la création d’une transaction permettant à l’opérateur de décider d’une amende en échange de la contravention est en réalité peu efficace, en raison de la facilité qu’il y a à fournir de fausses adresses ou de faux noms.

De fait, les délits existants, créés pour lutter contre la fraude, ont peu de portée. Ainsi, le délit de fourniture d’une fausse adresse ou d’un faux nom à un agent assermenté n’a fait l’objet que de dix condamnations en 2014 ; son effet est donc nul. Le délit de fraude d’habitude dans les transports en commun n’est pas plus sanctionné, seules 710 condamnations ayant été prononcées à ce titre pour l’année 2014.

Au total, au regard d’un phénomène de fraude très coûteux pour les opérateurs de transport public, les réponses apparaissent relativement limitées.

Sur ce point, en matière de sécurité, mais aussi de lutte contre la fraude, le texte prévoit plusieurs améliorations.

Lors de l’examen en commission, le texte a fait l’objet de nombreuses modifications. Celles-ci s’articulent autour de quatre directions : premièrement, un travail de simplification du texte ; deuxièmement, des mesures d’encadrement supplémentaires de certains dispositifs ; troisièmement, un rapprochement – et non un alignement, monsieur le ministre – des contrôles exercés sur les services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP avec ceux qui sont applicables aux sociétés de sécurité privée – il est ainsi proposé de donner au Conseil national des activités privées de sécurité, le CNAPS, une mission de contrôle assoupli des services internes de la SNCF et de la RATP ; quatrièmement, enfin, l’intégration de nouvelles dispositions pour renforcer la sécurité dans les transports.

Premier point, la commission a simplifié les dispositions proposées en supprimant les dispositions réglementaires ou sans caractère normatif. Deuxième point, elle a encadré les dispositifs proposés. Ainsi, le mécanisme d’enquête administrative préventive a été complété, afin de traiter le cas de personnes qui posent un problème de sécurité après leur recrutement ou leur affectation. Par ailleurs, le régime de fouille des bagages a été aligné sur celui des véhicules. Enfin, le délai pendant lequel un contrevenant peut être maintenu à disposition d’un agent de la sécurité en attendant la décision de l’OPJ a été limité à trente minutes.

Par ailleurs, l’article 12, qui donne la possibilité aux polices municipales de relever les infractions à la police des transports publics en général, apparaît contradictoire avec le principe selon lequel les missions de police judiciaire doivent être placées sous le contrôle de l’autorité judiciaire.

Troisième point, la commission, au regard de l’extension des prérogatives des agents de sécurité internes de la SNCF et de la RATP, a renforcé les contrôles externes de ces derniers. Ce renforcement relatif du contrôle doit être analysé, me semble-t-il, comme le juste contrepoids de l’extension de ces prérogatives. Cela a été relevé par Alain Fouché et moi-même dans notre rapport d’information. Je précise que le Défenseur des droits a également souligné cet impératif.

En effet, le code de la sécurité intérieure autorise les entreprises qui le souhaitent à se doter d’un service interne de sécurité propre. Ces services sont alors soumis au contrôle du CNAPS. Les établissements publics industriels et commerciaux sont soumis à ce régime. Or la SNCF et la RATP sont des EPIC.

Je voudrais relever ici que la surveillance générale, la SUGE, et le Groupe de protection et de sécurisation des réseaux, le GPSR, présentent évidemment des spécificités ; nul n’en doute. Pour autant, il me semble que celles-ci ne doivent pas être surestimées.

En effet, si le secteur ferroviaire a ses propres caractéristiques, il existe d’autres activités de sécurité privée, comme la protection des navires, qui présente également des particularités fortes, notamment le fait que les activités soient exercées sur des bâtiments en mer très éloignés de la métropole. Elles sont cependant soumises aujourd’hui au contrôle du CNAPS.

Dès lors, il y aurait assurément une certaine logique propre à soumettre les services internes de sécurité privée de la SNCF et de la RATP au contrôle du CNAPS. Ce serait sans doute la solution la plus pertinente, comme la commission l’avait décidé pour les activités de protection des navires en son temps, sur l’initiative de notre collègue M. Alain Richard.

Toutefois, ce n’est pas la proposition qui vous est faite aujourd’hui, ne serait-ce que pour des raisons pratiques. En effet, au regard du surcroît de travail que cela représenterait pour le CNAPS, la commission a retenu une solution médiane, par un contrôle moins contraignant.

Ce contrôle, limité, prendrait la forme de trois dispositions de portée mesurée : tout d’abord, un contrôle par le CNAPS au regard du référentiel des formations des agents des services internes ; ensuite, l’application du code de déontologie édicté par le CNAPS, qui est placé, je le rappelle, sous la tutelle du ministère de l’intérieur, aux agents de sécurité interne ; enfin, le bilan annuel des contrôles serait transmis pour information à la fois au Défenseur des droits et au CNAPS.

Quatrième point, les dispositions nouvelles issues du rapport d’information. En lien avec les recommandations du rapport, une disposition prévoit d’organiser la transmission en temps réel des images de vidéoprotection opérées au sein des véhicules et des emprises immobilières de transport de voyageurs vers les forces de l’ordre. Cette transmission se ferait sur le modèle de ce qui existe dans le code de la construction et de l’habitation pour les images prises dans les halls d’immeuble.

Enfin, il est prévu de renforcer le rôle des polices municipales. Ainsi, en application des recommandations de la mission d’information de nos collègues François Pillet et René Vandierendonck, il est proposé de prévoir la possibilité pour les communes de transférer les pouvoirs de réglementation de l’activité de transports urbains.

Je précise que cette possibilité est prévue pour le seul cas où l’intercommunalité est compétente en matière de transport, selon la logique qui prévaut en matière d’aménagement des aires d’accueil des gens du voyage ou encore en matière de voirie, d’assainissement ou de déchets.

Une disposition nouvelle a en outre été insérée, à l’initiative de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, sur proposition de son rapporteur pour avis, M. Alain Fouché, visant à mener une expérimentation de « caméras-piéton » au bénéfice des agents des services internes de sécurité.

En conclusion, mes chers collègues, je vous propose d’adopter la présente proposition de loi. Les avancées significatives qu’elle comporte tendent toutes vers l’objectif de lutte contre la fraude et de sécurité fixé par le texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Alain Fouché, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la tentative d’attentat qui s’est produite dans le Thalys le 21 août 2015 a démontré, s’il le fallait, la fragilité structurelle des infrastructures de transport terrestre face à la menace terroriste. Lieux ouverts et facilement accessibles, les trains, les gares et les stations de métro concentrent des flux importants d’usagers, qui constituent une cible privilégiée pour les terroristes, tout comme ils rendent plus complexe la protection des espaces.

Dès le mois de septembre dernier, j’ai souhaité que le Sénat s’empare de cette question, en proposant une commission d’enquête. Nous avons finalement choisi l’option, plus rapide, d’une mission d’information conjointe à la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable et à la commission des lois, dont j’ai eu l’honneur d’être nommé rapporteur, avec François Bonhomme.

Je voudrais revenir quelques instants, monsieur le secrétaire d'État, sur les conclusions de ce travail mené au cours des trois derniers mois, car il permet d’éclairer le travail législatif sur la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui.

Première observation : l’économie actuelle des transports terrestres, qui repose, je l’ai dit, sur une grande accessibilité et des flux importants d’usagers, nous a semblé devoir être préservée. Cela conduit à affirmer l’impasse d’une transposition à l’identique du modèle de sécurité aéroportuaire aux transports terrestres.

En effet, l’espace contraint des gares et des stations de métro et les flux de passagers qu’elles drainent rendent l’installation de portiques sur l’ensemble des quais physiquement impossible. Je rappelle que la station Châtelet est traversée quotidiennement par 1,5 million de personnes… Outre que cette mesure allongerait de façon considérable le temps de trajet des usagers et les détournerait de ces modes de transport, elle pourrait déplacer le risque terroriste sur les files d’attente créées par ces nouveaux contrôles. En Russie, en 2013, une femme kamikaze s’était fait exploser dans la file d’attente de portiques de sécurité situés dans une gare, provoquant la mort de dix-sept personnes.

Dans ce contexte, l’installation de portiques pour sécuriser les trains Thalys, demandée par la ministre de l’écologie, Mme Ségolène Royal, ne nous paraît pas satisfaisante.

Tout d’abord, elle ne sert à rien si nos voisins belges et allemands ne font pas de même. Je rappelle que l’auteur de l’attaque du Thalys était monté à Bruxelles. Or les représentants des ambassades que nous avons rencontrés nous ont dit que ces pays n’étaient pas prêts à installer des portiques.

Ensuite, cette mesure laisse entière la question de la protection des autres services ferroviaires, en particulier les trains de banlieue. Il s’agit donc, finalement, d’une mesure très coûteuse - 7,5 millions d’euros par an pour la location des matériels et la rémunération des personnels, mes chers collègues ! –, pour une efficacité limitée.

Aussi, avec François Bonhomme, j’ai préconisé de remplacer ce dispositif par la réalisation de contrôles aléatoires au moyen de portiques déplaçables, plus légers, qui seraient déployés sur l’ensemble du réseau, sans que les usagers en soient préalablement informés. Cette mesure aurait l’avantage de contribuer à la sécurisation de l’ensemble des réseaux, y compris les trains de banlieue et les métros, à un coût raisonnable, en créant un climat d’incertitude pour les personnes souhaitant commettre des actes terroristes.

Nous en avons aussi appelé à une unification de la coordination des services étatiques chargés de la sécurité dans les transports, pour en améliorer l’efficacité. Trop de structures sont impliquées ; il est urgent d’améliorer cet aspect du dispositif.

Beaucoup des autres propositions que nous avons formulées sont d’ordre législatif. Je me félicite que nous ayons pu les intégrer dans le texte de la commission, pour celles qui n’y figuraient pas déjà.

Il en est ainsi des dispositions prévoyant un contrôle adapté du Conseil national des activités privées de sécurité, le CNAPS, sur les agents des services internes de sécurité de la SNCF, la sûreté générale ou SUGE, et de la RATP, le GPSR, ou de l’autorisation de transmettre en temps réel aux forces de l’ordre des images filmées par les opérateurs dans les gares et dans les matériels roulants.

Dans la gare du Nord, par exemple, des opérateurs placés derrière les caméras voient tout ce qui se passe. En revanche, nul ne voit ce qui se passe dans les trains de banlieue et dans les voitures du métro. Nous savons bien qu’il ne pourra pas se trouver des agents derrière toutes les caméras. Nous proposons donc qu’un système permette de contrôler, d’une façon variable, les différents trains qui circulent.

Il en est ainsi également de la clause de transfert de la compétence de police des transports, entendue comme le pouvoir de réglementer cette activité, au président de l’intercommunalité lorsque celle-ci est compétente en matière de transports. La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a souhaité préciser que ce transfert n’était pas automatique, pour ne pas déposséder les maires qui y seraient opposés de leurs prérogatives dans ce domaine.

Nous avons aussi souhaité sécuriser ou améliorer plusieurs mesures qui avaient déjà été introduites par les députés : l’extension des possibilités de travail en civil pour les agents de la SUGE et du GPSR, à l’article 3 ; le dispositif d’enquêtes administratives préalables au recrutement ou à l’affectation de certains personnels, à l’article 3 bis, que nous avons étendu à l’ensemble des opérateurs de transport, et pas seulement à la SNCF et à la RATP. Nous y avons également prévu le cas d’un changement de comportement de la part d’une personne déjà affectée ou recrutée.

Toujours dans le volet « sécurité » de ce texte, monsieur le secrétaire d’État, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a adopté, sur mon initiative, deux amendements qui ne s’inscrivent pas directement dans le cadre du rapport d’information.

En premier lieu, il nous a semblé utile d’autoriser, à titre expérimental, les agents de la SUGE et du GPSR à utiliser des caméras-piéton lorsqu’ils interviennent. Ces caméras, accrochées à la boutonnière des agents, leur permettront d’enregistrer des éléments de preuve en cas de comportements violents de la part des personnes contrôlées, ce qui dissuadera de tels comportements. Il s’agit là d’une mesure importante pour ces agents, malheureusement confrontés à une violence croissante.

Nous avons aussi proposé la suppression de l’article 6 quinquies, soit un rapport du Gouvernement au Parlement sur la création d’une redevance de sûreté. Nous sommes opposés à la création d’une nouvelle taxe – la SNCF n’est pas toujours très bien gérée, monsieur le secrétaire d’État ; de nombreux terrains délaissés n’ont pas été vendus, contrairement à ce qui était prévu dans la loi Duflot, des gares sont laissées à l’abandon… –, qui pourrait écarter un certain nombre d’usagers des transports en commun, mais nous avons montré, François Bonhomme et moi-même, que des mesures concrètes, à un coût maîtrisé, étaient possibles pour améliorer la sûreté.

Je me réjouis que la commission des lois ait adopté l’ensemble de ces amendements, qui tendent utilement à compléter le volet consacré à la sécurité de cette proposition de loi, sur lequel notre commission a émis un avis favorable.

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a aussi émis un avis favorable sur le deuxième volet de la proposition de loi, consacré à la lutte contre la fraude dans les transports.

Si cet enjeu, qui est sans lien avec le premier, peut sembler relatif au regard de l’importance de la lutte contre le terrorisme, il n’en reste pas moins important pour les opérateurs et les autorités organisatrices de transport, puisqu’il se chiffre en effet à 500 millions d’euros en termes de manque à gagner.

Une augmentation des contrôles peut répondre en partie à ce phénomène, mais elle n’est pas suffisante tant que l’efficacité de ces contrôles n’est pas renforcée. En effet, les contrôleurs sont aujourd’hui désarmés lorsque les contrevenants donnent une fausse identité ou une fausse adresse, ce qui explique le très faible taux de recouvrement des amendes, de l’ordre de 10 %.

La proposition de loi comporte des avancées importantes dans ce domaine. L’article 9 prévoit par exemple la communication aux exploitants des services de transport des données relatives aux contrevenants par les administrations publiques et les organismes de sécurité sociale, ce qui leur permettra de vérifier l’adresse des contrevenants. Notre commission a adopté trois amendements visant à améliorer le dispositif prévu à cet article, repris par la commission des lois.

Au total, je me félicite de la qualité du travail mené par nos deux commissions sur cette proposition de loi et de notre étroite collaboration, qui a permis d’y intégrer plusieurs des mesures que nous avions préconisées dans notre rapport d’information.

Qu’il s’agisse de la sécurité face à la menace terroriste ou de la lutte contre la fraude, ce texte comporte des avancées importantes, que la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable soutient pleinement.

Chacun sait que nous faisons le maximum pour éviter des actes terroristes, mais le risque zéro n’existe pas. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
Discussion générale (suite)

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Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire norvégienne

M. le président. Mes chers collègues, je suis heureux de saluer en votre nom la présence dans notre tribune d’honneur d’une délégation de la commission des affaires sociales et du travail du parlement du Royaume de Norvège, conduite par son président, M. Arve Kambe. (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent.)

La délégation est accompagnée par notre collègue Mme Élisabeth Doineau, présidente déléguée pour la Norvège du groupe d’amitié France-Europe du Nord.

Nous sommes particulièrement heureux de recevoir nos collègues norvégiens.

Ils seront reçus aujourd’hui par la commission des affaires sociales, afin d’échanger sur les politiques à conduire en matière de lutte contre le chômage et la pauvreté, puis par le groupe d’amitié France-Europe du Nord, dont une délégation doit se rendre à Oslo en avril prochain.

Nous formons le vœu que cette visite conforte les relations entre nos deux pays et permette d’accroître la coopération entre nos deux assemblées.

Nous souhaitons à nos collègues norvégiens de fructueux travaux et la plus cordiale bienvenue au Sénat français ! (Mmes et MM. les sénateurs applaudissent longuement.)

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Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
Discussion générale (suite)

Sécurité publique dans les transports collectifs de voyageurs

Suite de la discussion en procédure accélérée d’une proposition de loi dans le texte de la commission

M. le président. Nous reprenons la discussion de la proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean-Claude Requier.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
Article 1er

M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, est-il utile de rappeler combien les gares, les métros, les trains et les bus constituent des espaces sensibles en termes de sécurité ?

Depuis les attentats à la bombe en 1995 et 1996 dans le RER parisien jusqu’à la récente tentative d’attaque dans le Thalys, sous oublier les attentats de Madrid, Londres et Moscou, au cours des années deux mille, on ne peut que constater cette dure réalité de la vulnérabilité des transports collectifs face au terrorisme.

L’insécurité dans les transports terrestres, c’est aussi un quotidien fait d’incivilités, de fraudes et d’agressions physiques qui peuvent nuire à la quiétude des usagers, lesquels sont par ailleurs parfois malmenés par des cadences éreintantes. Certaines gares, comme celle de Paris-Nord, première gare européenne, voit transiter en une journée environ 700 000 passagers, offrant ainsi un terrain propice aux actes de malveillance et à la fraude.

Bien sûr, il existe une organisation de sécurité, à plusieurs niveaux, pour répondre aux enjeux suscités par ces déplacements massifs, ainsi qu’à la concentration de population dans les gares.

Chacun d’entre nous connaît ici le rôle du service national de la police ferroviaire, ainsi que celui de la gendarmerie nationale, dont quelque 90 % du réseau ferré français entrent dans la zone d’intervention. Il y a aussi des renforts ponctuels bienvenus, dont les effectifs militaires que nous voyons patrouiller dans les gares, de plus en plus nombreux depuis les attentats de 2015 à Paris.

En région parisienne, la sûreté générale, la SUGE, pour la SNCF, et le groupe de protection et de sécurisation des réseaux, le GPSR, pour la RATP, sont des services internes qui assurent une mission de sécurité. Leur centre opérationnel, aidé par un vaste réseau de caméras de vidéosurveillance, permet des interventions rapides et efficaces, mais qui ne peuvent garantir une totale protection.

Mes chers collègues si nous sommes bien conscients que le risque zéro n’existe pas, comme l’a dit M. le rapporteur pour avis tout à l’heure, on peut toutefois améliorer la sûreté dans les transports collectifs par des actions de prévention, notamment en matière de fouilles et de contrôles d’identité. Tel est l’objet de la proposition de loi, qui, si elle n’entend pas tout résoudre, cherche en effet à améliorer le cadre juridique existant, pour mieux prévenir les infractions ou toutes sortes de délits.

La plupart des mesures vont dans le bon sens. Ainsi, le RDSE approuve en particulier la rédaction issue des travaux des commissions des lois et du développement durable, qui ont expurgé du texte initial les mesures de nature réglementaire ou celles qui sont déjà satisfaites par la législation actuelle.

Dans mon groupe, vous le savez, mes chers collègues, nous sommes attachés aux libertés individuelles et, à ce titre, nous sommes toujours vigilants quant à la frontière entre le respect de ces libertés et les impératifs de la sécurité.

À cet égard, l’article 1er, qui étend aux agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP la possibilité de procéder à des inspections visuelles, des fouilles de bagages et des palpations de sécurité, aurait pu soulever une difficulté. Toutefois, la contrepartie à cette extension de compétences prévue à l’article 2, qui consiste à augmenter les contrôles externes sur ces agents, permet d’instaurer un équilibre satisfaisant.

Nous approuvons aussi plusieurs autres dispositions, qui visent à améliorer la sécurité sans pour autant gêner les missions régaliennes de l’État.

Je pense notamment à celles sur le constat des infractions à la police des transports, sur les contrôles préventifs d’identité ou encore sur la communication des informations relatives aux permis de conduire. Sur ce dernier point, nous vous proposerons un amendement visant à permettre le contrôle des permis des transporteurs privés de voyageurs, et donc pas seulement de ceux des transporteurs publics, afin d’intégrer les autocars de tourisme.

M. Antoine Lefèvre. Très bien !

M. Jean-Claude Requier. En effet, si le texte intéresse en particulier l’agglomération parisienne à travers les dispositions touchant directement les polices ferroviaires et de la RATP, je me réjouis que la province ne soit pas oubliée par le biais de l’article 12.

M. Antoine Lefèvre. Il ne faut pas oublier la province !

M. Jean-Claude Requier. En effet, cet article vise à encourager le rôle des polices municipales pour assurer la sécurité dans les transports. C’est une bonne chose, car, si Paris concentre les attaques terroristes, la capitale n’est plus la seule cible. Nous avons eu, hélas, à le déplorer dans ma région, à Montauban et à Toulouse. Par conséquent, c’est sur tout le territoire que les transports doivent faire l’objet d’une vigilance renforcée.

S’agissant de la fraude, le rapporteur de la proposition de loi l’a souligné, c’est un manque à gagner de près de 500 millions d’euros pour l’ensemble des transports publics de voyageurs, un coût qui repose in fine sur les voyageurs réguliers et les contribuables. L’amélioration des moyens juridiques sur ce point est notable, bien qu’il me semble que cela ne suffira peut-être pas à déjouer la malhonnêteté sans borne des fraudeurs, comme en témoignent les « mutuelles de fraudeurs ».

Mes chers collègues, plus de 10 millions de nos concitoyens empruntent chaque jour les transports terrestres publics, ce qui impose de conserver la fluidité de la circulation des usagers. C’est toute la difficulté : comment contrôler sans entraver ? Parce que le texte conserve à ce stade cet équilibre, le RDSE l’approuvera. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du RDSE. – M. Jean-François Longeot applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur de la commission des lois, monsieur le rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, mes chers collègues, cette proposition de loi, attendue par les professionnels du secteur des transports depuis longtemps, a, il faut l’admettre, changé de nature depuis sa première mouture.

Initialement, il s’agissait principalement de concrétiser plusieurs mesures de lutte contre la fraude, proposées notamment par le Comité national de la sécurité dans les transports en commun. Aujourd’hui, outre ces mesures importantes de lutte contre la fraude, le texte qui nous est présenté s’est largement étoffé. Cela transparaît d’ailleurs dans son intitulé, qui vise « la prévention et la lutte contre les atteintes graves à la sécurité publique, contre le terrorisme et contre la fraude dans les transports publics de voyageurs ».

Ce texte part d’un constat unanimement partagé : le manque criant de sécurité dans nos transports publics. Cette proposition de loi, portée à l’Assemblée nationale par notre collègue Gilles Savary, dont nous tenons à saluer le travail rigoureux, ne prétend pas régler la question, mais elle apporte un certain nombre d’outils juridiques qui nous paraissent nécessaires.

Nécessaires, car nous devons désormais tenir un discours ferme et mettre en place des actions concrètes pour lutter contre les nombreux dangers qui menacent la tranquillité des voyageurs. Nous devons également tout mettre en œuvre pour lutter contre les incivilités, le harcèlement, les agressions, mais aussi la fraude, qui rythment le quotidien des passagers et du personnel, de plus en plus désemparé.

Il est de notre responsabilité de faire en sorte que nos concitoyens qui utilisent les transports en commun, souvent quotidiennement, puissent le faire en toute tranquillité, sans craindre d’être victimes de la délinquance ou, a fortiori, d’une entreprise terroriste.

Le 21 août dernier, un carnage a ainsi pu être évité de justesse dans le train Thalys reliant Amsterdam à Paris, grâce à l’héroïsme de plusieurs passagers. Malheureusement, par le passé, d’autres attentats visant des transports publics se sont révélés particulièrement meurtriers : à la station Saint-Michel du RER B en juillet 1995, à Madrid en mars 2004, dans le métro et dans un bus à Londres en juillet 2005, enfin dans le métro de Moscou en mars 2010.

Ces précédents dramatiques nous enseignent que les transports sont vulnérables et que nous devons tenter de les protéger de la façon la plus efficace. Voilà pourquoi nous soutenons le texte qui nous est aujourd’hui proposé.

Il ne faut pas oublier que nos 14 000 trains quotidiens, dont plus de 5 000 dans la seule Île-de-France, transportent annuellement quelque 2,5 milliards de voyageurs individuels, contre 140 millions pour l’ensemble de nos aéroports.

Pour faire face à ce défi sécuritaire, nous ne partons pas de rien : le service national de la police des transports compte 2 000 agents, déployés dans tout le pays. La surveillance générale de la SNCF dispose de 2 800 agents, et le groupe de protection et de sécurisation des réseaux de la RATP en déploie 1 250 dans le métro et le réseau des bus et des tramways.

Ce texte traite aussi de la problématique de la fraude. Je vais rappeler certains chiffres : la Cour des comptes a évalué à 500 millions d’euros annuels le coût de la fraude dans l’ensemble des transports publics de voyageurs, en observant toutefois que ce montant est très minoré, puisqu’il correspond en réalité à la somme des amendes établies et qu’il ne comprend donc pas le cas des fraudeurs n’ayant pas fait l’objet d’un contrôle. Le manque à gagner lié à la fraude est estimé, pour la seule SNCF, à environ 340 millions d’euros par an.

Cette proposition de loi est destinée à enrayer ce phénomène. Parmi les mesures proposées, les agents des services internes de sécurité pourront constater le délit de vente à la sauvette. Le texte crée également un délit de fraude d’habitude dans les transports en commun, qui serait constitué sur la base de cinq contraventions sur douze mois, et non dix dans le droit en vigueur.

Après le travail réalisé par nos collègues députés, l’examen du texte en commission des lois a permis des évolutions intéressantes. L’excellent travail réalisé par le rapporteur a notamment permis d’améliorer le contrôle des agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP. En effet, le texte que nous examinons accroît sensiblement leurs missions et leurs prérogatives. Actuellement – cela a été rappelé –, leur contrôle s’effectue principalement selon des procédures internes à l’entreprise.

Dans la mesure où nous allons autoriser, avec cette proposition de loi, les agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP à procéder à des inspections visuelles et à des fouilles de bagages, ainsi qu’à des palpations de sécurité, ces évolutions sont indispensables.

Autre évolution intéressante, la commission a introduit l’expérimentation d’un dispositif de caméra-piéton, au bénéfice des agents des services de sécurité de la SNCF et de la RATP.

Comme cela a été rappelé par plusieurs collègues en commission, ces dispositifs présentent un double intérêt. Ils permettront de constituer des éléments objectifs de preuve en cas de contestation des conditions dans lesquelles s’est déroulée l’intervention. Surtout, ces dispositifs auront pour effet d’atténuer les tensions en cas de contrôle.

Quelques mots sur les dispositions de l’article 12, qui concerne la participation des polices municipales à la police des transports publics. La commission a intégré au texte une disposition, proche de celle qui avait été adoptée en 2014 par le Sénat dans le cadre de la proposition de loi relative aux polices territoriales, consistant à permettre, de manière facultative, le transfert au président de l’intercommunalité des attributions lui permettant de réglementer l’activité de transports urbains, quand l’intercommunalité est compétente en matière de transports. Cette innovation, là encore, va dans le bon sens.

Je tiens à saluer, encore une fois, l’ensemble du travail réalisé sur ce texte par nos deux rapporteurs, François Bonhomme et Alain Fouché. En plus de leurs rapports législatifs, ils ont récemment éclairé le Sénat par le biais de leur rapport d’information intitulé « Renforcer la sécurité des transports terrestres face à la menace terroriste ».

Ils nous présentent aujourd’hui un texte qui nous semble équilibré. Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe de l’UDI-UC est favorable à l’adoption de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens dans un premier temps à remercier notre rapporteur, qui a su éviter toute surenchère sur ce texte et qui a aussi proposé la suppression de cavaliers législatifs – je pense en particulier à l’article 11 de la proposition de loi initiale –, ainsi que de mesures qui sont en contradiction avec notre tradition, comme le port obligatoire d’une pièce d’identité.

Cela dit, cette proposition de loi nous inquiète. En effet, comment accepter que, dans un même texte, puissent être abordées la lutte contre le terrorisme et celle contre la fraude ? Comment accepter l’utilisation d’une émotion et d’une inquiétude légitimes pour privatiser les pouvoirs régaliens de l’État ? Car c’est bien de cela qu’il s’agit : un transfert des missions de maintien de l’ordre public de la police et de la gendarmerie nationale vers les personnels de sécurité de la SNCF et de la RATP.

Certes, ces personnels de sécurité disposent, à l’heure actuelle, d’une délégation des missions de sécurité, en vertu des dispositions de la loi relative à la sécurité intérieure. Cette exception leur a été accordée en raison de la qualité d’entreprises publiques, investies de missions de service public et dont le personnel relève d’un statut particulier.

Or, nous assistons depuis quelques années à une banalisation des transferts de compétences et à un glissement progressif vers un régime de prestation marchande des services de sécurité. Pour notre part, nous refusons d’élargir encore ce transfert de compétences. Les agents des entreprises de transport ne sont pas des policiers !

Cette proposition de loi oublie la spécificité de la mission de sûreté, qui est confiée aux personnels des entreprises que je viens de citer, à savoir la sécurité des infrastructures et la nécessité d’assurer la fluidité et la continuité de la circulation. Sur ce point, la proposition de loi est muette. Rien n’est dit sur la nécessité de renforcer les investissements, par exemple dans le matériel roulant ou la rénovation des infrastructures.

Ainsi, dans son premier volet, la proposition de loi continue à dessaisir l’État d’une parcelle de souveraineté dans le domaine de la sûreté et de la sécurité. Après avoir fortement incité les entreprises à se protéger par elles-mêmes contre des risques et menaces de toute nature, elle prolonge, au-delà d’un contexte particulier, l’idée de la contribution de la sécurité à but lucratif à la sécurité générale ; elle consacre donc un glissement vers une privatisation.

L’État ne se donne plus les moyens d’entretenir une force publique répondant à la demande des citoyens. Face à ce mouvement, comment pouvons-nous continuer à affirmer que l’État a le monopole de la contrainte légitime ? Ce principe constitue pourtant le fondement de l’État de droit. Et le contrôle a posteriori des actions des personnels des entreprises de transport n’est pas suffisant.

Sur le second volet relatif à la lutte contre la fraude et les incivilités, nous sommes plus que dubitatifs… Les moyens coercitifs sont renforcés, les sanctions sont multipliées, mais rien n’est fait pour un renforcement de la présence humaine dans les gares et points d’accueil ou sur les quais.

Nous le savons tous, pour peu que nous les prenions au quotidien, ce qui est mon cas, dans les transports collectifs, les sentiments sont exacerbés. Le sentiment d’insécurité, l’impatience et l’énervement augmentent au rythme des dysfonctionnements, malheureusement très nombreux du fait d’un manque d’investissements sur les réseaux. Je prends tous les matins la ligne B du RER et je peux vous dire que c’est parfois très difficile.

M. Alain Gournac. Moi aussi, je prends le RER B !

Mme Éliane Assassi. Pour lutter contre la fraude, c’est avant tout de personnel que nous avons besoin. D’un personnel identifié et présent.

Or, tant à la RATP, même s’il y a eu cent embauches supplémentaires d’agents dédiés à la sécurité, qu’à la SNCF, le constat est le même : il y a une tendance globale à la baisse des effectifs de contrôleurs, d’agents de vente ou d’accueil ou encore d’agents de la sûreté ferroviaire en ce qui concerne la SNCF.

Rien ne semble fait aujourd’hui pour inverser la tendance, alors que tout le monde reconnait la nécessité d’une présence préventive et dissuasive pour lutter contre le sentiment d’insécurité, mais aussi contre le sentiment d’impunité.

Quant à la proposition d’étendre les dérogations à l’obligation du port de la tenue, elle nous semble contreproductive, alors même que celle-ci revêt un aspect dissuasif certain sur les incivilités.

Pour lutter contre la fraude, il faut aussi une politique tarifaire ambitieuse. À cet égard, je vous renvoie à nos propositions de TVA réduite dans les transports et d’extension du versement transport, qui permettrait de financer non seulement la sécurité, mais aussi la régénération et le développement des réseaux.

Ainsi, nous pensons que cette proposition de loi, loin d’être inspirée par la lutte contre le terrorisme, ne vise, sous couvert de sécurité, qu’à assurer la rentabilité des compagnies de transports, ce qui, en soi, n’est pas problématique,…

M. Charles Revet. Heureusement !

Mme Éliane Assassi. … sauf lorsqu’elles utilisent une politique antifraude agressive, attentatoire aux libertés, qui augmentera les tensions et le climat anxiogène d’insécurité générale dans lequel notre pays est plongé.

C’est pourquoi nous avons déposé des amendements supprimant l’extension du transfert des compétences traditionnellement dévolues à la police nationale.

Afin que la procédure des fouilles ne soit pas détournée de son objectif premier, nous proposons que soit systématiquement remis un récépissé justifiant la fouille.

Pour rappeler que le transport collectif est une mission de service public et que les agents en charge de la sûreté des voyageurs remplissent une mission de service public, nous ne pensons pas souhaitable de les soumettre au CNAPS, le Conseil national des activités privées de sécurité. Cela constituerait une banalisation inacceptable de leurs missions, sans compter le coût que cela pourrait entraîner pour la SNCF et la RATP. Par ailleurs, nous souhaitons renforcer le contrôle démocratique du CNAPS, en intégrant les parlementaires dans le collège chargé de l’administrer.

Cette liste n’est pas exhaustive : elle souligne notre intérêt pour le texte dont nous débattons et le fait que nous puissions être une force de propositions, mais elle met aussi en avant notre vigilance et nos réserves face à un texte qui marchandise la sécurité, crée des clivages et une suspicion généralisée au sein des personnels et soulève de sérieuses interrogations sur la garantie des libertés publiques et la responsabilité de l’État dans l’exercice de ses pouvoirs régaliens. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Leroy.

M. Jean-Claude Leroy. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les différents événements survenus au cours de ces derniers mois, notamment l’attentat évité du 21 août 2015 dans le Thalys, ont fait évoluer le texte qui était alors en cours de préparation. Ils ont replacé les problématiques de sécurité dans les transports collectifs, notamment les transports ferroviaires, au cœur des préoccupations des transporteurs et des pouvoirs publics.

La proposition de loi prend ainsi en compte les évolutions des questions de société, ce qui était nécessaire dans le contexte actuel. Selon nous, elle répond de façon appropriée aux différents problèmes soulevés et qui sont d’ailleurs étroitement liés. La lutte contre les incivilités fait partie de la lutte contre l’insécurité vécue ou ressentie quotidiennement par les voyageurs. Et le fait, par exemple, que la moitié des agressions dont sont victimes les contrôleurs soient le fait de fraudeurs montre bien le lien qui existe entre sécurité et fraude.

M. Jean-Claude Leroy. Traiter de ces différents problèmes dans un même texte est donc parfaitement cohérent.

M. Charles Revet. Très bien !

M. Jean-Claude Leroy. Nous remarquons également que la proposition de loi issue de l’Assemblée nationale ne se limitait pas à l’Île-de-France, puisqu’elle introduisait une obligation, pour tous les opérateurs de transports urbains, d’assurer la sûreté de leur réseau, où qu’il se trouve sur le territoire, et donnait la possibilité à tous les réseaux de transports en commun de se doter de services de sécurité internes en fonction de leurs spécificités locales.

Elle assurait, en outre, l’effectivité de ces mesures, en prévoyant la conclusion d’un contrat d’objectif de sûreté associant toutes les autorités organisatrices de transport pour déterminer des objectifs et veiller à ce que les mesures soient appliquées sur chaque territoire.

Nous ne pouvons donc que regretter la suppression de cet article lors de l’examen en commission des lois au Sénat : il est nécessaire que l’ensemble des usagers des transports, et pas seulement les Franciliens, bénéficient des mêmes garanties.

Dans le même temps, nous avons aussi entendu les autorités organisatrices de transport de petite taille poser la question des moyens. C’est pourquoi nous avions souhaité que soit inscrite une faculté, plutôt qu’une obligation, de créer des services propres de sécurité.

Nous déplorons aussi la suppression de l’article 14, au sein du titre III, qui était consacré à la prévention des harcèlements et des violences à caractère sexiste dont sont victimes les femmes dans les transports publics. Traiter de cette question dans un texte relatif à la lutte contre les incivilités et aux atteintes à la sécurité est tout à fait logique. Il ne semble pas raisonnable de repousser le traitement de ce problème, que l’on ne peut ignorer indéfiniment.

En ce qui concerne le renforcement des moyens de contrôle, il faut souligner qu’un dispositif important, destiné à assurer la sécurité des voyageurs, existe déjà.

Il est constitué, en termes de moyens humains, des gendarmes et policiers spécialisés de la police ferroviaire nationale, des agents de la préfecture de police de Paris, des agents de la surveillance générale de la SNCF, la SUGE, et du groupe de protection et de sécurisation des réseaux de la RATP, le GPSR. À cela s’ajoutent les moyens matériels, comme les caméras installées dans pratiquement l’ensemble des gares : la gare du Nord en compte 510 à elle seule.

Les mesures qui nous sont proposées pour compléter ce dispositif et renforcer la protection des usagers nous semblent pertinentes et de nature à répondre aux besoins.

L’extension des compétences des agents internes de sécurité de la SNCF et de la RATP, qui seront désormais autorisés à inspecter et à fouiller les bagages et, dans certaines conditions, à procéder à des palpations de sécurité, nous semble opportune, de même que la faculté donnée à ces agents d’exercer leur mission en tenue civile.

Étendre aux officiers et agents de police judiciaire la possibilité d’inspecter et fouiller les bagages et leur permettre de participer à la police des transports nous paraît également opportun.

Nous constatons, par ailleurs, que ces dispositions sont tout à fait mesurées, puisque l’accroissement des prérogatives des agents s’accompagne d’un encadrement resserré : les agents de la SUGE et du GPSR sont placés sous le contrôle des préfets et, en pratique, de la police, de la gendarmerie nationale et du parquet. Il est également prévu de vérifier la compatibilité entre leur comportement et l’exercice de leurs missions. En outre, le texte maintient parfaitement la distinction entre forces de l’ordre et forces de sûreté.

Nous sommes, en revanche, très réservés – pour ne pas dire que nous y sommes opposés ! – sur les dispositions de l’article 2, qui visent à soumettre les formations des agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP au contrôle du CNAPS.

Les activités de ces agents ne peuvent être assimilées à celles des personnels des sociétés privées de gardiennage. La SNCF et la RATP disposent, de plus, de leur propre système de formation, dont la qualité est reconnue, et le contrôle du CNAPS aurait un coût estimé à un million d’euros pour chacune des deux sociétés.

Certains pourront penser que ces mesures demeurent insuffisantes, mais il faut bien être conscient que nous sommes, ici, confrontés à la question de la mise en œuvre des différents dispositifs. Et dans ce domaine, les transports ferroviaires ne peuvent pas être comparés aux transports aériens, notamment en raison du flux de voyageurs.

Les trains sont utilisés quotidiennement par de nombreuses personnes et certaines en empruntent même plusieurs pour se rendre au travail. Il n’est donc pas possible de mettre en place des systèmes de contrôle qui seraient trop chronophages pour les voyageurs et qui entraveraient la rapidité et la fluidité du trafic. La question de l’installation de portiques de sécurité par exemple, au-delà du coût financier, doit être abordée au regard de l’ensemble de ces données.

Alors que les pouvoirs publics encouragent l’utilisation des transports collectifs, notamment ferroviaires, il est important que ceux-ci puissent rester des transports de masse. Mettre en place des procédures intenses de contrôle serait alors non seulement irréaliste, mais aussi contreproductif.

Les mesures destinées à lutter contre la fraude qui sont présentées dans le titre II de la proposition de loi nous semblent également pertinentes.

La fraude constitue un réel problème pour les sociétés de transports – les chiffres ont été rappelés. Réduire la facture annuelle de la fraude pour les sociétés de transports est d’autant plus nécessaire qu’elles devront faire face à des investissements importants pour financer les dispositifs de sécurité qui seront mis en œuvre.

En conclusion, nous devons aujourd’hui répondre rapidement, en matière de transports ferroviaires, à des questions importantes en termes de prévention des actes terroristes et des incivilités ou de lutte contre la fraude. Selon nous, la présente proposition de loi est cohérente et répond de manière proportionnée à ces différentes problématiques.

Même si le risque zéro n’existe pas, cette proposition de loi est destinée à mieux protéger nos concitoyens et les agents qui ont en charge cette protection, dans un cadre législatif et réglementaire garant du respect des libertés publiques. C’est pourquoi le groupe socialiste et républicain votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, monsieur le rapporteur pour avis, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui la proposition de loi socialiste relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs, adoptée le 17 décembre 2015 par l’Assemblée nationale.

Cette proposition de loi, conçue au début de 2015, avait initialement pour objectif la répression des incivilités et des violences dans les transports, ainsi que la lutte contre la fraude, phénomène qui prive la SNCF et la RATP de ressources estimées à près d’un demi-milliard d’euros chaque année. Cependant, la tentative d’attentat du 21 août dernier dans le Thalys est venue rappeler que les transports collectifs sont aussi une cible des terroristes. Si nous avons, ce jour-là, échappé au pire grâce au courage de quelques-uns, les attentats de Londres et de Madrid nous sont revenus en mémoire, et les objectifs de la présente proposition de loi ont été transformés.

En outre, son examen par l’Assemblée nationale est intervenu à peine un mois après les sanglants attentats du 13 novembre, dans un contexte où il était peut-être plus que jamais difficile de raison garder. J’ai malheureusement eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises dans cet hémicycle, je suis profondément convaincue que l’on ne peut légiférer de manière satisfaisante si l’on est guidé par la peur et l’émotion.

La peur est légitime, elle nous a tous saisis le 13 novembre dernier, mais elle ne peut être notre moteur. La lutte contre le terrorisme doit être menée sans relâche et nos concitoyens doivent pouvoir aller au travail et voyager dans le climat le plus serein possible, mais, encore une fois, nos principes démocratiques et notre liberté sont les remparts les plus efficaces contre la terreur.

Si nous gardons cela en mémoire, le texte de la proposition de loi, tel qu’il était issu des travaux de l’Assemblée nationale, posait de nombreux problèmes. Comme l’a fait remarquer le Défenseur des droits : « La confusion des objectifs ne rend pas toujours aisée l’appréciation de la portée des dispositions contenues dans le texte du point de vue de leur proportionnalité ».

De surcroît, le groupe écologiste considère que, si des prérogatives coercitives qui relèvent de missions de sécurité publique doivent être confiées à des agents privés de sécurité, elles doivent être strictement encadrées, afin de garantir au maximum les libertés individuelles.

M. Alain Gournac. Très bien !

Mme Esther Benbassa. Je veux alors saluer ici les travaux de notre rapporteur, M. Bonhomme, et du rapporteur pour avis, M. Fouché, qui ont largement amélioré le texte.

M. Charles Revet. Tout à fait !

Mme Esther Benbassa. Ainsi, notre commission des lois a maintenu le principe d’un agrément et d’une habilitation spéciale des agents privés pour pouvoir procéder à des palpations de sécurité. Elle a également rétabli le principe d’une autorisation préalable du procureur de la République pour permettre aux forces de l’ordre de fouiller les bagages d’une personne le refusant. Autre avancée notable, elle a supprimé des dispositions visant à pénaliser, entre autres, le fait de signaler la présence de contrôleurs ou d’agents de sécurité ou la non-présentation d’un document d’identité par les fraudeurs.

M. Alain Gournac. Très bien !

Mme Esther Benbassa. Malgré ces améliorations, la question demeure : ces dispositions sont-elles à même de renforcer réellement la sécurité dans les transports ? Ne sont-elles pas, au contraire, une source d’exacerbation des tensions déjà très prégnantes dans les transports ?

La réponse ne me paraît pas évidente, mes chers collègues. Certaines dispositions semblent faire peser une menace relativement lourde sur nos libertés individuelles, d’autres sont probablement de nature à rendre les transports plus sûrs pour tous et à lutter contre la fraude.

M. Charles Revet. C’est l’objectif !

Mme Esther Benbassa. Finalement, c’est bien la confusion des objectifs de cette proposition de loi, soulignée par le Défenseur des droits, qui nous pose problème aujourd’hui.

Nous n’aurions pas pu soutenir le texte issu de l’Assemblée ; celui qui a été élaboré par la commission des lois est plus acceptable, mais certaines questions restent en suspens et de nombreux amendements ont été déposés, certains étant pour le moins problématiques. Le vote final du groupe écologiste sera donc déterminé par l’issue des débats, débats que j’espère constructifs. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs – dont je salue l’excellent travail –, mes chers collègues, cette proposition de loi déposée par notre collègue député Gilles Savary, dont l’objet est en fait très proche de la proposition de loi déposée par Valérie Pécresse sur la sécurisation des transports, présente un double aspect.

Effectivement, ajouter, dans un texte qui vise à lutter contre la fraude et les incivilités, des dispositions destinées à prévenir les actes de terrorisme est source de confusion et de complications. Peut-être eût-il mieux valu présenter deux textes. Quoi qu’il en soit, urgence faisant nécessité, il faut nous en accommoder !

M. Alain Fouché, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. C’est comme ça !

M. Roger Karoutchi. Je considère que cette proposition de loi Savary, corrigée en bien par notre commission des lois, va dans le bon sens.

Évidemment, nous retrouvons le débat éternel entre la préservation des libertés et la sécurité. Toutefois, pour moi, qui n’ai pas le permis de conduire…

M. Roger Karoutchi. … et qui emprunte régulièrement – ce matin encore – les transports en commun de l’Île-de-France,…

M. Alain Gournac. C’est aussi mon cas !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Vous avez du mérite !

M. Roger Karoutchi. … dont je ne qualifierai pas l’état, imaginer qu’il puisse y avoir un débat entre la liberté et la sécurité relève de la plaisanterie à l’égard des usagers ! Essayez de voir si vous vous sentez en sécurité dans des transports de masse aussi vétustes !

Je suis d’ailleurs en plein accord avec le groupe communiste sur un point : depuis des années, dans le cadre du Syndicat des transports d’Île-de-France, le STIF, je dénonce le fait que la RATP comme la SNCF réduisent leur personnel. En effet, si un élément concourait à la sécurité des usagers, au moins du point de vue psychologique, c’était bien la présence humaine dans les gares et les stations.

M. Roger Karoutchi. L’absence totale de personnel qui s’est installée progressivement et que j’ai condamnée depuis une dizaine d’années au STIF est une aberration ! On prétend gagner de l’argent, sans pour autant réaliser les investissements nécessaires dans cette région, qui les aurait bien mérités et qui doit se contenter, outre d’un personnel réduit, d’un matériel vétuste.

M. Jacques Chiron. Il n’y a pas que l’Île-de-France en France !

M. Roger Karoutchi. Je ne doute pas que les problèmes de sécurité dans les transports soient également nombreux dans votre région, cher collègue, mais l’Île-de-France, à elle seule, représente 65 % des usagers des transports publics. Et permettez-moi de vous dire que, si un attentat se produit, il y a plus de chance qu’il ait lieu dans le métro à Paris que dans des transports ailleurs en France – je dis cela, je ne dis rien, mais soyons réalistes !

Ce texte n’avance pas assez à mon sens – j’ai d’ailleurs déposé quelques amendements –, mais il est vrai que, sur les 500 millions d’euros au total que coûte la fraude – chiffre avancé par la Cour des comptes –, l’Île-de-France représente 400 millions d’euros. Cette somme correspond à la moitié de ce que le STIF peut consacrer aux investissements dans l’ensemble de la région, soit 800 millions d’euros à 900 millions d’euros.

Tolérer un tel niveau de fraude est aberrant, parce qu’il réduit considérablement les possibilités de moderniser le réseau. Par exemple, j’étais favorable au passe Navigo à tarif unique, et je le reste, mais je reconnais que l’argent manquait pour le financer. Sans la fraude, il serait financé ! Un certain nombre de mesures doivent donc être prises.

Aujourd’hui, sur l’ensemble du territoire, le contrôleur qui veut constater l’identité de fraudeurs doit les retenir en attendant l’arrivée des policiers ; il ne peut rien faire d’autre. Certains estiment qu’il faudrait qu’ils obtiennent au moins une autorisation du procureur de la République pour pouvoir contrôler les identités, mais permettez-moi de leur rappeler les principes de réalité et d’effectivité !

Si vous dites que, au nom de la liberté, il faut attendre la décision d’un procureur pour contrôler un fraudeur, si vous dites que, pour contrôler des bagages, il faut attendre une décision du parquet ou l’arrivée des forces de police, cela signifie clairement que, dans la réalité, les contrôles ne seront pas effectués. Vu la faiblesse du personnel de la RATP et de la SNCF, il n’y aura pas de contrôles ! Si l'on oppose trop d'obstacles à l’effectivité des contrôles, ils ne se feront pas.

M. Jacques Chiron. Tout à fait !

M. Roger Karoutchi. Autant dire que nous ne votons rien et que nous laissons les usagers se débrouiller et espérer plus de sécurité tous seuls ! Il faut bien, à un moment, que les personnels de la RATP et de la SNCF – la Surveillance générale ou SUGE – aient les capacités et la compétence pour agir, sinon rien ne sert à rien.

Effectivement, je ne suis pas convaincu que l’on puisse s’amuser à installer des portiques à l’entrée du métro ou du RER. Il n’y aura pas non plus de portiques à l’entrée de la majeure partie des gares, même si j’ai cru comprendre que ce serait fait pour certaines destinations internationales.

La vérité est simple : il faut plus de personnel, un personnel habilité à effectuer des contrôles, et il faut que les contrôles d’identité puissent se faire. Si vous nous dites que, pour la fraude comme pour le terrorisme, on ne peut pas contrôler les identités, autant dire qu’on ne fait rien ! S’il n’y a ni portiques, ni contrôle des bagages, ni contrôles des identités, expliquez-moi ce que l’on fait ? Rien, et tant pis pour les usagers qui auraient des problèmes ! Cela n’a pas de sens et je pense, par exemple, qu’il faut élargir les cas de dispense du port de la tenue professionnelle, afin d’accroître l’efficacité des agents sur le terrain.

En ce qui concerne le recrutement et l’affectation de personnel au sein des entreprises de transports collectifs, nous avons ouvert aux employeurs la possibilité d’effectuer des enquêtes administratives.

Enfin, la commission a ramené de dix à cinq le nombre de contraventions requises sur une période de douze mois pour entraîner la constitution du délit d’habitude. Je voterai naturellement cette disposition, même si j’ai déposé un amendement pour abaisser ce nombre de cinq à trois – je ne suis pas sûr que vous le repreniez, mes chers collègues, mais quitte à être un peu sévères, soyons-le !

En effet, si quelqu’un fait l’objet de trois contraventions dans l’année, on peut penser qu’il fraude assez régulièrement, compte tenu du faible nombre de contrôleurs présents dans les trains – pardonnez-moi de le répéter. Je pense donc que, sans commettre une atteinte aux libertés, nous pouvons considérer que trois contraventions dans une année suffisent à caractériser un délit d’habitude.

Toutes ces mesures répondent à une demande très forte de nos concitoyens.

Lutter contre la fraude est certes un impératif économique, nécessaire pour l’investissement, mais c’est aussi le moyen de rassurer les usagers, qui savent bien que les incivilités consistant à ne pas payer, quand eux-mêmes paient, conduisent à une augmentation des tarifs et à une baisse des investissements.

Néanmoins, lutter contre la fraude est aussi un impératif démocratique, une attitude de justice, qui doit nous guider. Beaucoup sont revenus sur l’attentat déjoué dans le Thalys le 21 août 2015, qui a malheureusement démontré la nécessité d’adopter des mesures. Mes chers collègues, nous le savons, aucune mesure, quelle qu’elle soit, ne peut garantir la sécurité absolue.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Bien sûr !

M. Alain Fouché, rapporteur pour avis. On l’a dit !

M. Roger Karoutchi. Quelles que soient les mesures que vous prendrez, monsieur le secrétaire d’État, il peut y avoir un attentat, mais il importe de montrer que vous agissez. La loi doit permettre à l’exécutif, à la RATP et à la SNCF de rassurer les usagers en prenant un certain nombre de mesures de sécurisation.

En France, quelque 10 millions de personnes, dont 7 millions en Île-de-France, utilisent tous les jours les transports en commun. Dire à ces usagers qu’on envisage leur sécurité à l’aune de leur liberté, ce qui signifie qu’on réduit les contrôles de bagages et d’identité, peut être compris dans une période faste, où tout le monde se sent en sécurité.

En revanche, dans la France d’aujourd’hui, menacée comme elle l’est, avec l’état d’urgence, qui est justifié par des menaces perpétuelles sur notre pays, tenir ce discours aux usagers des trains, du métro ou du RER, qui sont déjà dans des espaces anxiogènes, car très fermés, revient à leur dire que, au nom de la liberté, on ne peut pas assurer leur sécurité. Cela n’est pas acceptable !

Mme Éliane Assassi. Il faudrait peut-être aussi plus de trains, de métro et de RER !

M. Roger Karoutchi. À l’évidence, il faut trouver un équilibre et ne pas en faire trop, mais, sincèrement, la sécurité de 10 millions d’usagers des transports au quotidien mérite quand même, monsieur le secrétaire d’État, que nous soutenions ce texte. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, à l’Assemblée nationale, ce texte a été suivi au fond par la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, tandis que, au Sénat, il est venu devant la commission des lois, la Haute Assemblée ayant considéré qu’il fallait s’assurer, comme certains l’ont dit, que les équilibres de l’État de droit étaient respectés dans ce texte.

Pour autant, mes chers collègues, l’État de droit ne signifie en rien qu’il faille porter atteinte à la sécurité des personnes.

M. Charles Revet. Au contraire !

M. Jacques Bigot. Alors que l’usage des transports publics a considérablement évolué, en raison d’abord de la plus grande mobilité des gens, mais également des convictions que les gouvernements successifs ont su faire partager sur la nécessité de développer les transports publics. N’oublions pas, et je le dis notamment à mes collègues écologistes, que la COP21 nous y incite encore.

M. Charles Revet. Il y a encore du chemin à faire !

M. Jacques Bigot. Il faut encourager les gens à prendre les transports publics ! Pour ce faire, nous devons trouver des moyens pour les financer et améliorer leur qualité, dans laquelle j’inclus la sécurité.

M. Jacques Bigot. Le travail n’est pas terminé, et cette proposition de loi ne réglera pas tout.

S’agissant des aspects financiers, une solution fort simple, mes chers collègues, qui a d’ailleurs eu cours dans d’autres pays, sous d’autres régimes, consiste à rendre les transports publics complètement gratuits.

Mme Éliane Assassi. Bonne idée !

M. Jacques Bigot. Dans ce cas, il n’y a pas de fraude, puisque tout le monde peut utiliser les transports sans que cela ne coûte rien, mais cette solution suppose que l’impôt les finance en totalité. Or nous savons que les transports publics sont déjà plus largement financés par les fonds publics que par les usagers.

Mme Éliane Assassi. Plus que par les entreprises également !

M. Jacques Bigot. Pour autant, l’usager qui paie ne peut pas supporter que d’autres ne paient pas.

M. Jacques Chiron. Tout à fait !

M. Jacques Bigot. La question de la lutte contre la fraude reste donc économiquement nécessaire.

M. Jacques Bigot. Même si on n’en souffre pas individuellement, il s’agit de la première incivilité dans les transports.

Le second sujet, c’est la sécurité dans le « vivre ensemble ». Certes, on peut déplorer la disparition progressive de personnels dans l’organisation des transports.

M. Roger Karoutchi. Oui, c’est trop !

M. Jacques Bigot. Cela étant, même si l’on peut écouter avec nostalgie la chanson, doit-on regretter Le Poinçonneur des Lilas ? (Sourires.) Je ne le crois pas.

M. Roger Karoutchi. Il n'y a plus personne derrière les guichets !

M. Jacques Bigot. Cependant, il faut tout de même remettre du personnel dans les transports et exalter la citoyenneté, car, dans le Thalys, c’est l'esprit citoyen de certains qui a permis d’éviter le pire. Il est important de s’en souvenir.

Nous devons également donner aux personnels la capacité d’agir et de ne pas avoir peur d’agir. Tel est le sens de ce texte équilibré, dont nous allons discuter. À l’issue de nos débats, j’espère que nous arriverons à rassurer ceux qui ont quelques réserves en ce début de discussion générale.

Mes chers collègues, nous ne pouvions pas envisager qu’un texte sur la sécurité dans les transports n’aborde pas la question du terrorisme, qui est actuellement au cœur du débat public.

Nous n’avons pas travaillé dans l’émotion. Il s’agit simplement de renforcer les moyens de nos agents de sécurité, tout en assurant le contrôle juridique de ce qu’ils peuvent faire. À ce sujet, il convient de rappeler une règle fondamentale, qui concerne les fouilles notamment : les personnes peuvent refuser, même si elles doivent en supporter les conséquences. Si je refuse actuellement d’ouvrir mon sac à l’entrée d’un bâtiment public, je suis refoulé.

C’est une façon d’organiser le contrôle tout en respectant l’État de droit et la liberté des personnes,…

M. François Bonhomme, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Exactement !

M. Jacques Bigot. … ma liberté étant d’ouvrir ou non mon sac pour montrer ce qu’il y a à l’intérieur si je veux bénéficier du transport.

À mon sens, il faut faire très attention à ne pas donner le sentiment à certains que, par ce texte, nous portons atteinte aux libertés. La sécurité est la première des garanties de liberté d’aller et venir, y compris dans les transports publics, y compris dans les transports de masse, y compris dans les transports organisés dans nos grandes agglomérations, où ces questions se posent aussi, peut-être pas avec la même acuité.

Je suis de Strasbourg, une ville qui peut être aussi visée par le terrorisme, notamment au travers des transports, qui sont des lieux de regroupement de masse.

M. Jacques Bigot. Mes chers collègues, abordons ce texte avec confiance et détermination, car la commission des lois a su trouver un équilibre.

Certes, monsieur le secrétaire d’État, nous aurons encore des débats sur tel ou tel sujet. Par exemple, je peux comprendre que la SNCF et la RATP doutent de l’utilité de payer un million d’euros pour être sous le contrôle de la CNAPS. Pour ma part, autant je pense que nous devons pouvoir faire confiance à ces entreprises de transport, autant je ne suis pas sûr qu’il en aille de même avec d’autres autres autorités.

Voilà, mes chers collègues, dans quel esprit je souhaite que nous abordions ce débat. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Roger Karoutchi applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Filleul.

M. Jean-Jacques Filleul. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui a été élaborée ces derniers mois pour répondre aux difficultés rencontrées au quotidien non seulement par les contrôleurs et les agents de sûreté de la SNCF et de la RATP, mais aussi par les autres personnels et les usagers.

Je salue le travail de notre collègue Gilles Savary, à l’Assemblée nationale, ainsi que celui de nos rapporteurs, Alain Fouché et François Bonhomme. Le travail initial de Gilles Savary présentait des solutions à la lutte contre la fraude dans les transports en commun. Le texte a ensuite été élargi aux questions de sécurité et de prévention du terrorisme.

Nous savons tous ici combien le risque terroriste est important dans les transports. Ceux-ci regroupent beaucoup de monde, tant sur les quais des gares que dans les trains et les avions. Les attentats récents ou anciens nous ont profondément marqués et nous savons l’opinion publique fortement sensibilisée à ces risques.

Notre société se doit de réagir. Aussi, la proposition de loi impose à tous les opérateurs de transport d’assurer la sécurité de leur réseau en renforçant les moyens légaux à la disposition des agents de sûreté des autorités organisatrices et des exploitants et en déployant des moyens humains et matériels sur le terrain.

Le titre Ier répond aux nécessités et aux attentes en donnant de nouvelles prérogatives aux agents de sûreté de la SUGE et du GPSR. Il donne également la faculté à tous les agents de police judiciaire, gendarmes, policiers et douaniers, de participer à la police des transports en cas de nécessité et en tout lieu du territoire national.

Je précise que je ne suis pas favorable à un contrôle du CNAPS sur les personnels de la SUGE et du GPSR. Je rejoins ainsi ceux qui, avant moi, se sont exprimés sur ce point.

Le titre II étend les prérogatives de la police des transports, notamment dans la lutte contre la fraude. Par parenthèse, nous connaissons le lien qu’il y a entre la fraude et le terrorisme.

La fraude à la SNCF et à la RATP représente un manque à gagner évalué à 500 millions d’euros par an, qu’il convient de comparer aux 500 millions d’euros dépensés chaque année pour financer les tarifs sociaux et les gratuités de service public, ciblés sur une grande diversité de publics fragiles. La sûreté exigeant des dépenses et des investissements nouveaux, il serait donc particulièrement injuste qu’elle protège tout le monde, mais qu’elle ne soit financée que par ceux qui consentent à payer le prix des transports.

Quatre grandes dispositions visent à améliorer le recouvrement des amendes d’infraction.

Je veux revenir sur le délit de fraude, ramené par le texte de dix à cinq occurrences annuelles. J’avoue être partisan d’une plus grande rigueur. On peut se tromper une ou deux fois, mais se tromper trois fois au même endroit, dans les mêmes circonstances, me paraît de nature à être sanctionné.

Par ailleurs, je ne suis pas favorable au transfert de plein droit de la compétence de police des transports au président de l’intercommunalité lorsque celle-ci est compétente en matière d’organisation des transports. Les autorités organisatrices variant selon la taille de la communauté, un transfert facultatif me semble préférable.

Enfin, le titre III traitait de la lutte contre le harcèlement sexiste dans les transports collectifs. Il a été supprimé en commission des lois au Sénat. Le groupe socialiste a tenté de le réintroduire par amendement, mais ce dernier a été retoqué au titre de l’article 41. C’est dommage, car nous ne pouvons pas occulter, même si, j’en conviens, cela relevait du domaine réglementaire, ces situations malheureusement trop nombreuses, qui affectent les femmes quotidiennement et participent au climat d’insécurité.

Voilà en quelques minutes les éléments que je souhaitais évoquer. L’ambition de ce texte, que j’approuve, est de conduire à une prise de conscience de l’Union européenne et de la communauté internationale en faveur de la définition d’un cadre législatif international et d’un plan d’action ambitieux en matière de politique de sûreté et de prévention des actes de terrorisme dans les transports terrestres. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Jean-Claude Requier applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Je ne répondrai pas en particulier à chaque intervenant, mais je souhaite souligner la qualité du débat, qui fait écho à la celle des travaux en commission. Les problématiques essentielles ont été naturellement au cœur de toutes les interventions. Je tiens également à apporter quelques précisions.

S’agissant des mesures mises en place dans les gares, il n’y a pas lieu d’opposer le choix des portiques et celui des contrôles aléatoires. Ce n’est pas l’un ou l’autre, mais l’un et l’autre, puisqu’ils répondent à des objectifs assez différents.

J’avais moi-même proposé des contrôles aléatoires, à la suite de la réunion de l’ensemble des ministres de l’intérieur et des transports européens que Bernard Cazeneuve avait organisée après l’attentat d’août 2015. La question des portiques pour accéder aux Thalys et aux trains internationaux pose des problèmes d’une autre nature, essentiellement parce que les modes d’organisation sont différents selon les pays.

Ainsi, en Allemagne, pays qui se montre aujourd'hui réticent sur le sujet, il n’y a pas de quai dédié au Thalys, de sorte que l’entrée en gare de ce train peut être suivie de celle d’un TER ou de n’importe quel autre train. Cela rend évidemment la solution du problème beaucoup plus complexe. Néanmoins, la réflexion avance. Les Belges sont plutôt d’accord avec nous. Le débat se poursuit avec les autres pays, mais il ne faut pas opposer les deux initiatives.

Interrogé sur les terrains de la SNCF qui ne seraient pas cédés en application de la loi dite « Duflot », je saisis l’occasion pour vous indiquer que l’un des plus gros dossiers en cours de discussion sur la métropole de Lille a abouti à une signature au début de la semaine. Un terrain de treize hectares situé en zone urbaine a été cédé par la SNCF à la métropole pour faire de l’habitat, à caractère essentiellement social. Le contrat prévoit une clause qui revient à faire participer a posteriori la SNCF aux résultats obtenus sur le plan immobilier. Cela me paraît une bonne mesure. J’ai d’ailleurs moi-même beaucoup insisté pour qu’elle se concrétise.

Nombre d’entre vous sont naturellement revenus sur le débat qui est au cœur de ce texte, à savoir la difficulté de concilier la sécurité et le respect des libertés publiques. Qu’il me soit simplement permis de rappeler que nous écrivons le droit. Les dispositions proposées par votre commission et par le Gouvernement s’inscrivent précisément dans le respect du principe qui a été rappelé.

Oui, la meilleure des réponses que nous avons à faire au terrorisme, c’est exciper de nos principes démocratiques. Et c’est ce que nous faisons ! Personne ici ne soutient des mesures liberticides. Comment peut-on s’appuyer sur ce raisonnement pour s’opposer au texte en discussion ? Les uns et les autres, nous sommes sur la même position.

Certains amendements ont été écartés parce qu’ils tendent à franchir la ligne jaune, mais tel n’est pas le cas du texte de la commission. Ce qui me paraît faire la force de la démarche que nous suivons aujourd'hui, c’est d’avoir réussi à concilier deux sujets – la lutte contre la fraude et le renforcement de la sécurité – qui, le Gouvernement en est évidemment conscient, n’étaient pas forcément aisés à traiter simultanément. La nécessité a fait loi et nous avons décidé de les distinguer dans le texte. Ils auraient pu faire l’objet d’un examen séparé : cette objection, il va de soi que nous l’acceptons.

Je suis tout de même quelque peu frappé du raisonnement, que vous nous avez proposé, madame Assassi, au sujet des incivilités. Le taux de la TVA a varié au fil du temps. Qu’il soit haut ou bas, cela n’a malheureusement eu aucune conséquence sur les incivilités ! Que les trains soient neufs ou vieux, cela ne change rien non plus. Il faut chercher la réponse ailleurs.

Puisque vous faites partie des défenseurs du service public, comme nous tous ici, la question que vous devez prendre à bras-le-corps porte sur une exigence qui est au cœur du service public. Au-delà de son appartenance à l’État ou à l’entreprise publique, le service public appartient en effet à l’ensemble des citoyens. Cela implique naturellement l’exercice de droits et de responsabilités, et le sujet de l’incivilité pose, au fond, la question du vivre ensemble et du message que l’on doit porter sur ce sujet, avec les responsabilités qu’il sous-tend.

Tous les usagers qui paient leurs tickets et aimeraient être mieux protégés font le constat, tout de même terrible, que la fraude s’élève à 400 millions d'euros dans la seule région parisienne. Face à cette situation inadmissible, ils interpellent les politiques pour leur demander ce qu’ils font. J’ai entendu votre réponse, madame Assassi ; nous ne la partageons pas. La question dépasse largement l’état du matériel ou du réseau, elle relève de la responsabilité citoyenne. Et pour le pouvoir exécutif au nom duquel je m’exprime, il n’est pas interdit, dans un État de droit, de parler de répression et de dissuasion.

Mme Éliane Assassi. Nous ne sommes vraiment pas d’accord !

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. C’est même la règle pour que les obligations et l’exercice des libertés soient garantis, y compris contre ceux qui empêchent les autres d’exercer leur responsabilité ou leur liberté.

Je crois qu’il faut vraiment refuser d’entrer dans le débat sur le corpus juridique que nous ne respecterions pas. Non, nous ne prenons pas de mesures d’exception ! Nous répondons, avec la force de la loi et du droit, à deux situations, certes assez différentes, mais qui, aujourd'hui, imposent des réponses, et des réponses fortes.

Nous verrons ensuite, au fil de la discussion des amendements, les quelques différences qui subsistent entre la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale et celle de la commission. En cet instant, je veux souligner la force de l’engagement – quasi majoritaire, me semble-t-il, ce matin – de l’ensemble des groupes sur ces objectifs qui sont aujourd'hui une exigence et qui répondent, dans tous les cas, à une attente forte de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs

TITRE Ier

DISPOSITIONS RELATIVES À LA PRÉVENTION ET À LA LUTTE CONTRE LES ATTEINTES GRAVES À LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET LE TERRORISME DANS LES TRANSPORTS PUBLICS DE VOYAGEURS

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
Article additionnel après l'article 1er

Article 1er

I. – Le code des transports est ainsi modifié :

1° Le chapitre Ier du titre V du livre II de la deuxième partie du code des transports est complété par un article L. 2251-9 ainsi rédigé :

« Art. L. 2251-9. – L’article L. 613-2 du code de la sécurité intérieure est applicable aux agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la Régie autonome des transports parisiens.

« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. » ;

2° À la troisième phrase du troisième alinéa de l’article L. 5332-6 et à la deuxième phrase du second alinéa du II de l’article L. 6342-4, les mots : « à main » sont supprimés.

II. – Le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° A Au dernier alinéa des articles L. 511-1 et L. 531-1, au premier alinéa de l’article L. 613-2 et au second alinéa de l’article L. 613-3, les mots : « à main » sont supprimés ;

1° (Supprimé)

2° (Supprimé)

III. – (Supprimé)

M. le président. L'amendement n° 17, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. J’aurai peut-être l’occasion de revenir sur les propos de M. le secrétaire d'État lors de mon explication de vote sur l’ensemble de la proposition de loi, mais, pour l’heure, je vais défendre l’amendement n° 17.

Comme je l’ai mentionné dans mon intervention lors de la discussion générale, nous pensons que cette proposition de loi, sous couvert de lutte contre le terrorisme, a pour objectif principal la privatisation des missions de maintien de l’ordre public.

Notre conviction est confortée, monsieur le secrétaire d'État, au vu de la volonté du Gouvernement de revenir à l’écriture initiale de la proposition de loi, faisant fi des analyses pertinentes du rapporteur de la commission des lois, qui soulignait que, au regard du caractère sensible des palpations de sécurité, il convient de maintenir une habilitation et un agrément supplémentaire plutôt qu’une simple justification d’aptitude professionnelle, aptitude professionnelle qui sera délivrée par des compagnies commerciales, il faut tout de même le souligner, en lieu et place de l’intervention de l’État, ce qui, pour les membres de notre groupe, est une grave dérive !

De plus, nous ne pensons pas que le renforcement des compétences des agents de sécurité de la RATP et de la SNCF puisse pallier le manque d’effectifs de la police nationale.

Comme le souligne le rapport du comité de suivi et d’évaluation de la politique de prévention et de sécurité dans les transports, ainsi que l’étude sur la sécurisation des transports publics franciliens de l'Institut d'aménagement et d'urbanisme de la région Île-de-France, l’IAU, c’est la question de la présence humaine qui est au cœur des problématiques de sécurité.

Constamment, tout au long des travaux, cette question a été reconnue comme le facteur premier de la prévention : celle des agents en charge de la sécurité, mais plus largement, celle des agents commerciaux dans les gares qui, par leur présence – lorsqu’elle est proactive – concourent aussi à la tranquillité et au sentiment de sécurité.

Or les objectifs de productivité, imposés tant à la RATP qu’à la SNCF, mais aussi à l’ensemble des autorités organisatrices de transports, ou AOT, reposent souvent sur la réduction des dépenses salariales, cela en totale contradiction avec les mesures proposées par l’ensemble du texte dont nous débattons, en particulier par l’article 1er.

Loin de lutter efficacement contre le terrorisme, ce texte risque, au contraire, de mettre en grande difficulté les agents de la SNCF et de la RATP. Nous pensons qu’il y a une faute majeure à déléguer la responsabilité de la sécurité publique dans les transports à des entreprises, fussent-elles publiques. Cela doit rester le rôle régalien de l’État au travers des forces de l’ordre. Tel est le sens de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. La commission est défavorable à cet amendement qui vise à supprimer l’article 1er, lequel prévoit, je le rappelle, l’alignement des prérogatives des agents de sécurité de la SNCF et de la RATP sur celles des agents privés, en leur permettant de procéder, avec leur consentement, à la fouille des bagages, à leur inspection visuelle et à la palpation de sécurité.

Je rappelle à l’adresse de Mme Assassi que, à l’occasion de la préparation de notre rapport d’information, nous avons consulté les syndicats de la RATP et de la SNCF, qui étaient favorables à l’extinction de ces prérogatives.

Mme Éliane Assassi. Nous les avons rencontrés nous aussi !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Je voudrais rappeler que nous avons été confrontés à une situation assez singulière et qui n’a jamais suscité de protestations. Aujourd'hui, quand vous arrivez à l’entrée d’un grand magasin, des agents privés en charge de la sécurité vous demandent d’ouvrir votre sac. Vous pouvez refuser de l’ouvrir, mais dans ce cas l’entrée du magasin vous est interdite. Cette situation est couverte par une disposition législative.

Or il faut savoir que c’est l’une des mesures essentielles contenues dans cet article. Tout le monde pouvait agir de la sorte, sauf les agents de la Sûreté générale, ou SUGE, qui sont, de surcroît – je veux le rappeler –, des agents publics. Et je confirme que les organisations syndicales elles-mêmes – sauf à penser qu’elles tiennent des discours variables ! – sont d’accord avec cette proposition. Il fallait donc au moins leur donner ce moyen.

Madame Assassi, je suis attentivement toutes les démonstrations. Sachez-le, si j’avais la certitude que l’augmentation des salaires des agents fait baisser la délinquance, je vous promets que ce serait fait immédiatement !

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Malheureusement, ce n’est pas aussi simple que cela, et nous sommes face à une situation qui exige de mettre en place des moyens nouveaux. Nous avons répondu à une situation législative anormale, que tout le monde a découverte.

Le Gouvernement ne peut donc qu’être défavorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 19, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 4

Insérer dix alinéas ainsi rédigés :

« Les fouilles réalisées en application du présent article donnent lieu, à peine de nullité, à l'établissement d'un procès-verbal ou d’un récépissé.

« Il mentionne :

« - l’identité de la personne contrôlée ;

« - les motifs du contrôle ;

« - le jour, le lieu, et l’heure de la fouille ;

« - le matricule de l’agent ayant procédé à la fouille ;

« - l’aboutissement de cette fouille ;

« - les observations éventuelles de la personne ayant fait l’objet de la fouille ;

« - la pratique éventuelle d’une palpation et sa justification ;

« - la mention des recours possibles devant l’inspection générale des services, l’inspection générale de la police nationale, le défenseur des droits ou les tribunaux. » ;

La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Dans son avis sur la présente proposition de loi, le Défenseur des droits a alerté les parlementaires que nous sommes sur la nécessité d’encadrer l’extension des pouvoirs des agents de la RATP et de la SNCF, afin d’éviter les abus, toujours possibles.

En effet, il souligne qu’en attribuant des « missions de sécurité publique à des agents de sécurité privés qui ne disposent pas de l’arsenal juridique garantissant l’exercice de la “force légitime” propre aux forces de l’ordre », ce dispositif est, selon lui, potentiellement explosif. Il en va ainsi, par exemple, « des palpations de sécurité ou encore de l’inspection visuelle et de la fouille des bagages ».

Il propose ainsi, a minima, la mise en place d’un dispositif de traçabilité, qui permettrait au passager d’avoir des explications sur les motifs du contrôle ou de la fouille. Cela permettrait de prévenir les risques de protestations, de réactions, de troubles éventuels et d’atteintes à la sécurité que pourrait causer un contrôle vécu comme inique.

Lors de nos auditions, les agents de sécurité de la SNCF et de la RATP nous ont affirmé que le risque de fouilles ciblées de certaines personnes ne présentant pas forcément une menace pour l’ordre public – on peut penser, par exemple, aux nombreux sans-abris qui trouvent un refuge dans le métro parisien ou à des interventions au faciès – ne pouvait malheureusement pas être exclu. C’est pourquoi l’idée d’un récépissé systématique en cas de fouilles leur semblait un moyen de les protéger tout en protégeant aussi les usagers contre les abus.

En effet, nous devons garder à l’esprit l’arrêt du 24 juin 2015 par lequel la cour d’appel de Paris a condamné l’État pour faute lourde du fait de contrôles d’identité discriminatoires et de l’absence d’obligation de traçabilité. Cette interprétation pourrait, dans le futur, être étendue aux fouilles et palpations opérées par les agents de sécurité dans les transports.

Dès lors, il nous semble important de mettre en place cet outil de traçabilité, afin d’éviter la multiplication de situations qui pourraient être jugées comme condamnables.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir la remise d’un récépissé à peine de nullité du procès-verbal.

Les obligations qu’entraînerait cette proposition seraient très lourdes, inapplicables de ce fait, en tout cas inadaptées aux règles de sécurité en vigueur dans le secteur ferroviaire. Elles risquent d’affaiblir l’efficacité du service public.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Le débat sur cette question est légitime, et le Gouvernement souhaite donner une réponse très précise.

Évidemment, lorsqu’il s’agit de faire une palpation ou une fouille, il faut donner des garanties, notamment pour éviter d’éventuels détournements. Les palpations, comme les fouilles, ne peuvent être faites qu’avec le consentement de la personne. Le texte n’autorise pas la palpation d’autorité.

Faut-il un récépissé ? Le débat me renvoie à une idée à laquelle j’avais adhéré, jusqu’au moment où elle s’est révélée fausse. Je veux parler de l’affaire du CV anonyme pour les personnes qui cherchaient à se faire recruter. L’idée était la même : on disait qu’il valait mieux, pour éviter des discriminations dans le recrutement, que le CV soit anonyme. J’ai soutenu cette proposition pendant longtemps. Puis, il est apparu que c’était, en réalité, une fausse solution. Intellectuellement, elle était bonne, mais, dans la pratique, les choses empiraient. Les promoteurs de cette affaire eux-mêmes ont fini par y renoncer.

Quel serait le résultat de cette démarche ? Pour notre part, nous souhaitons l’efficacité. Les fouilles et palpations constituent des mesures de filtrage sur des lieux fréquentés non par des personnes ciblées, mais par un flux d’usagers. De ce point de vue, la méthode elle-même me paraît apporter toutes les garanties.

Il faut ensuite déterminer si la remise d’un récépissé est nécessaire. C’est une question d’efficacité.

M. Alain Fouché, rapporteur pour avis. C’est compliqué !

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Si, chaque fois qu’un tel contrôle est effectué au sein d’un flux de passagers, il fallait délivrer un récépissé, vous n’ignorez pas, mesdames, messieurs les sénateurs, ce qui se passerait : plus aucun contrôle ne serait réalisé ou, du moins, leur nombre serait probablement largement divisé.

Mme Éliane Assassi. Quand ces agents infligent une amende, un récépissé est donné ! Il faudrait vous faire prendre le RER pendant une semaine !

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Le débat sur cette question est légitime. Il faudra être attentif à la mise en œuvre de cette mesure. Cela dit, l’adoption de cet amendement ferait courir le risque d’une efficacité diminuée des dispositifs de sécurité, à l’opposé des objectifs de cette proposition de loi. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable à son sujet.

M. Charles Revet. Bien sûr ! C’est normal !

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Je comprends l’objectif des signataires de cet amendement. Néanmoins, comme le rappelait M. le secrétaire d’État à l’instant, le vrai problème est la regrettable réduction de la présence humaine effectuée tant par la RATP que par la SNCF. Cela a une conséquence : au vu de l’état actuel du personnel de sécurité de ces entreprises, et quand bien même on augmenterait quelque peu les effectifs de la police régionale des transports ou de la SUGE, il est impossible d’exiger la remise d’un tel récépissé. L’agent qui aurait cette obligation, conscient qu’il lui faudrait un quart d’heure pour remplir le formulaire, rechignerait à effectuer plus de trois contrôles par jour, et ce si tout va bien !

Dès lors, le choix est clair : soit on embauche une armada d’agents – la RATP comme la SNCF vous répondront qu’elles n’en ont pas les moyens –, soit on fait en sorte que les agents en charge de ces contrôles les accomplissent avec respect pour les passagers, mais aussi avec efficacité.

En toute sincérité, je préférerais que l’on se préoccupe de la qualité du recrutement de ces agents et de leur formation plutôt que d’apporter tant de nouvelles contraintes qu’au final nul contrôle ne pourra se faire.

Mme Éliane Assassi. Alors l’article 1er n’est pas nécessaire !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 19.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 42, présenté par M. Bonhomme, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer les mots :

et à la deuxième phrase du second alinéa du II de l’article L. 6342-4

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Bonhomme, rapporteur. L’Assemblée nationale, dans sa précipitation, si j’ose dire, avait supprimé la notion de bagage à main, considérant qu’elle était superflue. Or il s’avère nécessaire de la rétablir, dans la mesure où cette distinction est opérationnelle dans le transport aérien, où le bagage à main se distingue bien du bagage en soute. Elle conserve donc toute sa pertinence ; ne pas la rétablir mettrait en grande difficulté les opérateurs de transport aérien.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 42.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 36, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 8 et 9

Rétablir ces alinéas dans la rédaction suivante :

1° À la première phrase du second alinéa de l’article L. 613-2, les mots : « spécialement habilitées à cet effet et agréées par le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, par le préfet de police » sont remplacés par les mots : « justifiant d’une aptitude professionnelle » ;

2° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 613-3, la première occurrence des mots : « agréées par la commission régionale d’agrément et de contrôle » est remplacée par les mots : « justifiant d’une aptitude professionnelle ».

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Cet amendement vise à modifier la rédaction de l’article 1er, qui permet aux agents de sécurité de la SNCF et de la RATP d’effectuer l’inspection visuelle et la fouille des bagages, ainsi que des palpations de sécurité, afin de filtrer l’accès aux gares et aux trains. Il tend à rétablir dans le texte une mesure de simplification administrative, introduite par l’Assemblée nationale, qui mettait fin à une redondance en supprimant l’agrément spécifique requis des agents privés de sécurité pour qu’ils soient habilités à réaliser les palpations.

J’attire votre attention sur le fait que ces prérogatives sont déjà ouvertes, depuis la loi du 15 novembre 2001, aux agents privés de sécurité placés sous le contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité, ou CNAPS. En effet, le CNAPS vérifie la moralité et l’aptitude professionnelle de ces agents dans le cadre de la délivrance d’une carte professionnelle. Je tiens à préciser que plusieurs garanties entourent l’exercice de ces opérations d’inspection-filtrage : la fouille des bagages comme les palpations ne peuvent être effectuées qu’avec le consentement de la personne. À défaut de consentement, l’accès aux lieux est refusé.

Par ailleurs, les palpations de sécurité, qui sont des mesures intrusives, ne pourront intervenir que dans certains cas bien précis. Elles sont déjà encadrées par le code de la sécurité intérieure : seul le préfet peut les autoriser, par arrêté, en cas de circonstances particulières liées à l’existence de menaces graves pour la sécurité publique. Cet arrêté fixe la durée et détermine les lieux ou catégories de lieux dans lesquels elle peut être effectuée ; il est communiqué au procureur de la République. Je précise également que la palpation de sécurité doit être faite par une personne de même sexe que la personne qui en fait l’objet.

Pour les agents de la SNCF et de la RATP, le contrôle de la moralité et la vérification de l’aptitude sont réalisés dans les conditions prévues par le titre V du livre II de la deuxième partie du code des transports. Dans la rédaction actuelle, issue des travaux de la commission, figure donc un doublon qui nous paraît inutile et auquel le Gouvernement souhaite remédier par le présent amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. La commission émet un avis défavorable. La commission a considéré qu’il fallait maintenir le principe de l’habilitation pour effectuer les seules palpations, pour la raison évidente que la palpation a un caractère beaucoup plus intrusif que d’autres actions des agents de sécurité. De ce fait, nous considérons insuffisante la seule justification de l’aptitude professionnelle au travers du CNAPS.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 36.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
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Article 1er ter (nouveau)

Article additionnel après l'article 1er

M. le président. L’amendement n° 20, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le troisième alinéa de l’article L. 2251-1 du code des transports, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’activité des services internes de sécurité de la SNCF et de la Régie autonome des transports parisiens ne peut être filialisée ni confiée à des prestataires privés de sécurité. »

La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’amendement que nous vous proposons vise à assurer que les services de sécurité internes aux transports publics SNCF et RATP demeurent exercés par ces entreprises publiques et ne fassent pas l’objet d’un recours à la filialisation.

En premier lieu, nous considérons que la sécurisation des réseaux de transports relève du service public. C’est une mission très particulière que mènent à bien les agents du GPSR et de la SUGE en raison, notamment, de la particularité des lieux et des emprises concernées.

Ces agents, assermentés par le tribunal de grande instance et agréés par le préfet et le procureur de la République, peuvent exercer des pouvoirs de police judiciaire strictement encadrés.

L’exception qui a été accordée à la SNCF et à la RATP pour l’exercice de ces missions régaliennes depuis la loi sur la sécurité intérieure de 2003 tient pour une large part à leur qualité d’entreprises publiques qui sont investies de missions de service public et dont le personnel relève d’un statut particulier présentant des garanties comparables au statut des fonctionnaires.

La sécurité des infrastructures et la prise en compte des dangers inhérents au milieu ferroviaire, que cela concerne le train – voies, caténaires –, ou le métro – lieu confiné, risques électriques sur les voies –, requièrent une connaissance accrue du contexte et une formation spécifique. C’est pourquoi ces missions ne peuvent être menées par des agences de sécurité privée.

En effet, la seule justification au recours à ces agences résiderait dans une question de coût. Or ce coût, en définitive, se répercutera nécessairement sur la formation des agents, mais aussi sur la qualité de la prestation.

Dans ces circonstances, il paraît nécessaire de préciser que les services internes de la SNCF et de la RATP ne sauraient faire l’objet d’une filialisation et que leur activité ne saurait être confiée à des agents privés de sécurité. Il s’agit, en d’autres termes, de barrer la voie à la privatisation éventuelle de ces missions de sécurité publique.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Défavorable. Cet amendement tend à instaurer une interdiction générale de filialiser ou de confier à des opérateurs de sécurité privés l’activité des services internes de sécurité. La SUGE et le GPSR ont une activité spécifique reconnue dans le code de sécurité intérieure et le code des transports. Toutefois, ne serait-ce que pour permettre aux agents de la SNCF et de la RATP de se concentrer sur les missions les plus compliquées, il nous paraît justifié d’avoir recours à des agents de sécurité privée pour effectuer, par exemple, le gardiennage des emprises immobilières de la SNCF, comme les dépôts ou les gares.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 20.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 1er
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Article 2 (début)

Article 1er ter (nouveau)

I. – Après l’article L. 2251-4 du code des transports, il est inséré un article L. 2251-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 2251-4-1. – À compter du 1er janvier 2017 et pour une durée de trois ans, les agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la Régie autonome des transports parisiens peuvent procéder à l’enregistrement audiovisuel des interventions qu’ils réalisent dans l’exercice de leurs missions, au moyen de caméras individuelles.

« Cet enregistrement est réalisé dans les conditions prévues au titre V du livre II du code de la sécurité intérieure, sous réserve des dispositions du présent article.

« L’enregistrement, limité à la durée de l’intervention, ne peut être effectué en continu. Il fait l’objet d’une signalisation permettant d’informer les personnes filmées de son activation.

« Il ne peut avoir lieu hors des emprises immobilières nécessaires à l’exploitation des services de transport ou des véhicules de transport public de personnes qui y sont affectés.

« Les données enregistrées ne sont pas accessibles aux agents qui les enregistrent. »

II. – L’expérimentation fait l’objet d’un bilan de sa mise en œuvre dans les deux ans suivant son entrée en vigueur, afin d’évaluer l’opportunité du maintien de cette mesure.

M. le président. L’amendement n° 26, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Notre amendement vise à supprimer l’article 1er ter, qui autorise une expérimentation de la captation, par une caméra portée par l’agent des services internes de sécurité, des interventions réalisées par celui-ci.

En effet, nous nous interrogeons sur la pertinence de cette expérimentation alors même que nous ne bénéficions pas encore des retours d’expérience de son utilisation par les forces de police nationale.

Nous considérons que la transparence peut être intéressante et que cette mesure est susceptible d’y participer. Néanmoins, il convient d’avoir une vue plus précise de ses effets avant d’envisager de l’élargir à l’ensemble des services de sécurité.

En effet, une expérimentation doit précisément rester relativement restreinte pour qu’on puisse tirer tous les bénéfices des résultats qu’elle peut engendrer. Cette expérimentation, qui concerne déjà des forces de police situées dans des zones de sécurité prioritaires, ou ZSP, a notamment permis de constater des limites liées au stockage des images, à l’accès aux données et, plus généralement, aux conditions d’utilisation des caméras. Sur cette question précise, le fait que la décision d’enregistrer reste à la discrétion totale du policier ou, en l’occurrence dans ce texte, de l’agent de sécurité porteur de la caméra, montre les limites de ce dispositif dans la lutte contre les contrôles abusifs.

De notre point de vue, ces limites actuelles – conditions d’utilisation de la caméra, détention des images, utilisation des données de personnes ne l’ayant pas sollicité, etc. – prouvent que nous devons réfléchir à l’opportunité d’étendre cette utilisation avant d’avoir sécurisé plus sûrement son usage.

De plus, aucune information sur le coût d’une telle utilisation de ces caméras n’est avancée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Défavorable. Cet amendement a pour objet de supprimer l’article 1er ter, qui prévoit une expérimentation des caméras-piétons. Or ce dispositif vise aussi bien à protéger les agents qu’à constituer des éléments objectifs de preuve en cas de litige ; il participe de ce fait à la protection des citoyens et du service public. J’ajouterai que l’expérimentation de ce dispositif par les agents de police nationale en ZSP est en cours depuis 2013.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. C’est un débat utile et nécessaire. Deux difficultés se posent. Tout d’abord, la commission inscrit sa réflexion sur les caméras-piétons dans le cadre plus général de la vidéoprotection. Cela, à mon sens, représente une erreur. Les normes existantes relatives à la vidéoprotection sont destinées à contrôler des systèmes statiques. Le Gouvernement souhaite pour les caméras-piétons qu’un cadre législatif différent soit adopté à l’issue de l’expérimentation en cours, dont les résultats sont d’ailleurs très positifs et encourageants pour la gendarmerie comme pour la police.

M. Alain Fouché, rapporteur pour avis. On nous l’a dit, oui !

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Nous entendons inscrire dans la réforme à venir sur la sécurité des dispositifs législatifs plus convaincants, qui tirent les enseignements de cette démarche. De fait, nous sommes favorables au système des caméras-piétons ; pour autant, l’approche adoptée par la commission, consistant à intégrer ce dispositif au cadre juridique de la vidéoprotection, n’est pas juste sur le plan théorique. Un texte viendra qui nous permettra, sinon de statuer définitivement sur ce point, du moins d’avancer au vu des résultats de l’expérience en cours.

Dès lors, quoique je ne partage pas la motivation des membres du groupe CRC, je partage leur réticence à inscrire ces dispositions dans la présente proposition de loi.

Mme Éliane Assassi. On reverra cela plus tard !

M. Alain Fouché, rapporteur pour avis. L’efficacité est la même !

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 26.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 1 rectifié bis, présenté par MM. Nègre, Karoutchi, Revet et Charon, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le mot :

parisiens

insérer les mots :

ainsi que les agents mentionnés au 4° du I de l’article L. 2241-1 du présent code

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Nous entendons, au travers de cet amendement, étendre le champ de l’expérimentation prévue à l’article 1er ter. Cet article autorise l’expérimentation de l’usage par les agents de la SUGE et du GPSR d’un dispositif vidéoporté pour les contrôles qu’ils effectuent. Or la plupart des contrôles dans le train, le métro ou le RER sont réalisés par du personnel de contrôle et non par du personnel de sécurité.

Par conséquent, dans la mesure où l’essentiel des contrôles est réalisé par ces agents, pourquoi exclure ceux-ci de l’expérimentation ? Pourquoi ne pas laisser à la SNCF et à la RATP la capacité de décider que leurs contrôleurs disposeront aussi de moyens vidéoportés, de manière que les contrôles effectués soient incontestables ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Avis favorable.

Cette extension aux agents contrôleurs nous paraît tout à fait bienvenue et s’inscrit dans la même logique d’expérimentation.

M. Charles Revet. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Je ne reviendrai pas sur l’argumentation que j’ai développée sur l’amendement précédent – le débat pourrait être le même.

Il n’est pas si évident de donner à des contrôleurs des moyens dont disposent des services chargés de la sécurité. Cela pose même beaucoup de problèmes (M. Roger Karoutchi est dubitatif.), car les fonctions ne sont pas les mêmes. Si l’on veut se doter de règles claires en la matière, il faudra, à un moment, fixer la frontière.

Au reste, ces questions sont tangentes des questions de libertés publiques. (M. Roger Karoutchi est de nouveau dubitatif.) Le juge constitutionnel tiendra donc forcément compte du principe de proportionnalité, que chacun connaît bien ici.

On comprend bien que, sur ces questions de sécurité, un engagement qu’exprimerait aujourd'hui le législateur à l’unanimité, même si nous ne sommes pas d’accord sur le texte qui lui servira de base, pourra être convaincant.

Il me semble que l’extension de l’expérimentation aux contrôleurs sera beaucoup plus difficile. En tout cas, le Gouvernement ne partage pas l’avis que l’on pourrait élargir ainsi le champ de l’expérimentation.

Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Alain Fouché, rapporteur pour avis. Je veux simplement confirmer ce que vient de dire M. le rapporteur.

Il s’agit d’un bon amendement.

Comme en témoignent un certain nombre d’expériences en cours, les caméras-piétons fonctionnent bien : elles apportent plus de sécurité, plus de confiance et peuvent inquiéter un certain nombre d’individus potentiellement dangereux.

Je considère donc qu’il n'est pas nécessaire d’attendre pour en confier à des agents contrôleurs : ce serait encore plus sécurisant pour le public !

M. Charles Revet. Tout à fait !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

Mme Éliane Assassi. Heureusement que nous sommes là pour soutenir le Gouvernement… (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 1er ter, modifié.

(L'article 1er ter est adopté.)

Article 1er ter (nouveau)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
Article 2 (interruption de la discussion)

Article 2

I. – Le chapitre Ier du titre V du livre II de la deuxième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° (nouveau) Après le deuxième alinéa de l’article L. 2251-1, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Outre la formation initiale dont ils bénéficient, les agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la Régie autonome des transports parisiens reçoivent une formation continue dispensée en cours de carrière et adaptée aux besoins des services, en vue de maintenir ou de parfaire leur qualification professionnelle, leur connaissance des règles déontologiques et leur adaptation aux fonctions qu’ils sont conduits à exercer.

« Ces formations sont soumises au titre II bis du livre VI du code de la sécurité intérieure. » ;

2° Au début de l’article L. 2251-5, sont ajoutées les références : « Le 1° et le 2° de l’article L. 617-13, » ;

3° Il est ajouté un article L. 2251-6 ainsi rédigé :

« Art. L. 2251-6. – Sans préjudice des dispositions prévues au code de procédure pénale pour le contrôle des personnes habilitées à constater les infractions à la loi pénale, les commissaires de police, les officiers de police et les officiers et sous-officiers de la gendarmerie nationale des services désignés par arrêté du ministre de l’intérieur assurent, pour le compte du représentant de l’État dans le département ou, à Paris, du préfet de police, le contrôle des agents des services internes de sécurité mentionnés à l’article L. 2251-1 du présent code.

« Ils peuvent recueillir, sur convocation ou sur place, les renseignements et justifications nécessaires relatifs à l’activité opérationnelle de ces services.

« Ils transmettent à l’exploitant toute information établissant qu’un agent d’un service interne de sécurité mentionné à l’article L. 2251-1 se trouve dans l’un des cas décrits aux trois premiers alinéas de l’article L. 2251-2.

« Un bilan national annuel des actions entreprises dans le cadre du présent article est publié et notifié au Défenseur des droits ainsi qu’au Conseil national des activités privées de sécurité défini au titre III du livre VI du code de la sécurité intérieure. »

II. – Le chapitre II du même titre V est ainsi modifié :

1° Le I de l’article L. 2252-1 du code des transports est supprimé ;

2° Il est ajouté un article L. 2252-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 2252-2.  Est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende le fait pour tout agent d’un service de sécurité mentionné à l’article L. 2251-1 de faire obstacle à l’accomplissement des contrôles exercés dans les conditions prévues à l’article L. 2251-6. »

III. – (nouveau) Le 2° de l’article L. 632-1 du code de la sécurité intérieure est complété par les mots : « ainsi qu’aux services internes de sécurité de la SNCF et de la Régie autonome des transports parisiens dont les modalités d’organisation sont définies par le chapitre Ier du titre V du livre II de la deuxième partie du code des transports. »

M. le président. L'amendement n° 18, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Évelyne Didier.

Mme Évelyne Didier. Il s'agit d’un amendement de cohérence.

L’article 2 accompagne l’extension des compétences des services de sécurité de la SNCF et de la RATP et, en contrepartie, les soumet à une forme de tutelle, certes limitée, du CNAPS.

Il nous est expliqué que cette mesure est un garde-fou, la tutelle du CNAPS étant plus efficace que le contrôle exercé par le ministère de l’intérieur. Sauf que l’on entrevoit, au bout de ce processus, la privatisation de la sécurité dans les transports collectifs ainsi qu’une externalisation de la formation des agents…

Aujourd’hui, les effectifs de la branche de la sécurité privée ne cessent d’évoluer, avec plus de 90 % d’augmentation en dix ans, selon le Centre d’études et de recherches sur les qualifications. Ils représentent 37 % de l’ensemble des effectifs consacrés à la sécurité des biens et des personnes, contre 21 % il y a seulement vingt ans.

Dans ce secteur, les employeurs font tout ce qu’ils veulent : travail illégal, précarité de l’emploi, salaires insuffisants, conditions de travail souvent déplorables… tout cela sous le contrôle du CNAPS.

Il faut garder à l’esprit qu’un agent de sécurité privée coûte cinq fois moins cher qu’un policier ou un gendarme et trois fois moins cher que les agents de la SUGE et de la RATP. Évidemment, avec des salaires inférieurs, ils ne peuvent pas être bien encadrés.

Vous conviendrez, mes chers collègues, que les enjeux de sécurité sont trop importants pour être ainsi délégués.

À cet égard, les personnels d’Air France sont nombreux aujourd’hui à remettre en cause la privatisation de la sûreté aéroportuaire, qui fait peser des risques majeurs dans les aéroports. Ils ont demandé à l’État d’en assurer à nouveau la gestion.

En effet, la sécurité et la sûreté ne peuvent être low cost ! De nombreux syndicats signalent les failles de cette organisation, notamment le turn over et la précarité, avec plus de 30 % d’intérimaires, qui sont incompatibles avec l’efficacité de la sûreté aéroportuaire.

Contrairement à la règle en vigueur dans de nombreux pays, ce sont les transporteurs aériens, et non la puissance publique qui financent les missions de sécurité et de sûreté.

Nous ne souhaitons pas que ce modèle soit étendu aux transports collectifs. Tel est le sens de notre amendement.

Mme Éliane Assassi. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Contrairement à ce que Mme Didier vient de déclarer, le CNAPS, qui a été créé par la LOPPSI 2 – loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure –, a été un facteur important de moralisation et de contrôle sur les agents de sécurité privée.

Cet amendement a pour objet de supprimer l’article 2, alors que, dans sa rédaction modifiée par notre commission, celui-ci permettra justement d’accentuer les contrôles opérés sur les agents de sécurité interne de la SNCF et de la RATP.

Par conséquent, l’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. René Vandierendonck, pour explication de vote.

M. René Vandierendonck. Nous avons réalisé une étude portant sur l’ensemble des communes dotées d’une police municipale.

Nous avons systématiquement examiné les modes de gestion de leurs transports en commun et nous avons constaté, madame Didier, que des villes de votre couleur politique – comme d’autres, d'ailleurs – ont massivement choisi des modes de gestion en délégation de service public,…

Mme Évelyne Didier. Personne n’est parfait ! (Sourires.)

M. René Vandierendonck. … confiant donc à des agents contractuels les missions de sécurité dont nous débattons.

Vous avez raison sur un point : plus la délégation de service public fait l’objet d’un contrôle public, plus on s’entoure de garanties.

Monsieur le secrétaire d'État, permettez-moi ensuite de rappeler que l’on envoie aussi des policiers municipaux dans les gares ou les stations de métro et que certains y laissent leur vie en dépit des progrès sensibles que l’action conduite par le ministre de l’intérieur ces derniers mois a permis d’enregistrer – vous me pardonnerez peut-être cette considération en apprenant que nous avons, dans cet hémicycle, défendu le service public et ses agents jusqu’à une heure et demie du matin !

Veuillez donc considérer mon intervention comme une simple bande-annonce du débat que nous aurons tout à l'heure sur la possibilité, pour la police municipale, d’intervenir sur le domaine public et, le cas échéant, sur les conditions des interventions.

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Nous examinerons, dans un instant, un amendement que j’ai déposé afin de réécrire l’article 2.

En fait, celui-ci vise à obtenir une réponse à la question suivante : pourquoi vouloir soumettre la SUGE, notamment, au contrôle du CNAPS ? En fonction des explications qui me seront apportées, je pourrais éventuellement le retirer…

Franchement, je ne comprends pas pourquoi l’on veut faire passer la SUGE ou les services de la RATP sous le contrôle du CNAPS.

Si, en 2011, la SUGE et les services de la RATP ont été exclus de son périmètre de contrôle, ce n’est pas sans raison ! On a simplement considéré qu’il ne s’agissait pas des mêmes activités. La SNCF organise une formation – excellente d'ailleurs ! – pour les agents de la SUGE. De même, la RATP forme son personnel de sécurité. Pourquoi veut-on mettre par terre ce qui fonctionne aujourd'hui ? S’il est vrai que les effectifs de la SNCF et de la RATP peuvent être insuffisants, il ne faudrait pas substituer, au débat sur la qualité de la formation, un débat sur les chiffres.

Sincèrement, je préfère le maintien du système actuel, avec, de fait, un droit de contrôle du ministère de l’intérieur sur la SUGE comme sur le personnel de sécurité de la RATP, notamment en matière de formation, à un transfert de cette compétence au profit du CNAPS. Je ne vois pas franchement ce qu’on y gagnerait sur le plan de la sécurisation des transports publics ! Au reste, je ne suis pas certain que le CNAPS demande à exercer un tel contrôle.

Nous sommes tous d’accord pour dire qu’il faut plus de sécurité dans les transports publics. Dès lors, pourquoi vouloir réformer deux systèmes qui fonctionnent bien, même s’ils sont insuffisants ? Je ne comprends pas.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 18.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 2 rectifié bis, présenté par MM. Nègre, Karoutchi, Revet et Charon, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le chapitre Ier du titre V du livre II de la deuxième partie du code des transports est complété par trois articles L. 2251-6 à L. 2251-8 ainsi rédigés :

« Art. L. 2251-6. – Sans préjudice des dispositions prévues au code de procédure pénale pour le contrôle des personnes habilitées à constater les infractions à la loi pénale, les commissaires de police, les officiers de police et les officiers et sous-officiers de la gendarmerie nationale des services désignés par arrêté du ministre de l'intérieur assurent, pour le compte du représentant de l'État dans le département ou, à Paris, du préfet de police, le contrôle des agents des services internes de sécurité mentionnés à l'article L. 2251-1 du présent code.

« Ils peuvent recueillir, sur convocation ou sur place, les renseignements et justifications nécessaires relatifs à l'activité opérationnelle de ces services.

« Ils transmettent à l'exploitant toute information établissant qu'un agent d'un service interne de sécurité mentionné à l'article L. 2251-1 du présent code se trouve dans l'un des cas décrits aux trois premiers alinéas de l'article L. 2251-2 dudit code.

« Un bilan national annuel des actions entreprises dans le cadre du présent article est publié et notifié au Défenseur des droits.

« Art. L. 2251-7  Un code de déontologie des agents des services internes de sécurité de la Société nationale des chemins de fer français et de la Régie autonome des transports parisiens est établi par décret en Conseil d'État.

« Art. L. 2251-8  Outre la formation initiale dont ils bénéficient, les agents des services internes de sécurité de la Société nationale des chemins de fer français et de la Régie autonome des transports parisiens reçoivent une formation continue dispensée en cours de carrière et adaptée aux besoins des services, en vue de maintenir ou de parfaire leur qualification professionnelle, leur connaissance des règles déontologiques et leur adaptation aux fonctions qu'ils sont conduits à exercer.

« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article. »

II. – Le chapitre II du même titre V est complété par un article L. 2252-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 2252-  Est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende le fait pour tout agent d'un service de sécurité mentionné à l'article L. 2251-1 de faire obstacle à l'accomplissement des contrôles exercés dans les conditions prévues à l'article L. 2251-6. »

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Cet amendement – j’ai finalement décidé de le maintenir – est, de fait, défendu.

Monsieur le rapporteur, pouvez-vous m’expliquer ce que la RATP et la SNCF gagneraient à passer sous le contrôle du CNAPS, en termes de sécurité au quotidien comme de formation ?

Si vous me répondez que les contrôles effectués par le ministère de l’intérieur sur la formation ont été sans intérêt, voire nuls, j’en prendrai acte, mais je ne vois vraiment pas pourquoi vous voulez changer un système qui fonctionne.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. J’ai bien écouté les arguments de notre collègue Roger Karoutchi.

Son amendement a pour objet de rétablir la rédaction initiale de l’article 2, qui prévoyait un code de déontologie propre à la SNCF, établi par décret en Conseil d’État.

Je précise que nous ne souhaitons pas voir s’appliquer un contrôle total des agents de la SUGE et de la RATP. En revanche, la nécessité d’un référent sur les formations nous paraît évidente.

Le CNAPS ne sort pas de nulle part ! Il a été créé par la LOPPSI 2 et est placé sous la tutelle du ministère de l’intérieur – que l’on retrouve donc, d’un côté comme de l’autre. Depuis sa création, cet organisme a développé des compétences spécifiques. Je rappelle, en outre, qu’il est majoritairement composé de représentants de l’État. Chargé d’une mission de police administrative ainsi que de missions disciplinaires et d’assistance, le CNAPS a fait ses preuves ! J’ajoute que son code de déontologie, qui figure dans le code de sécurité intérieure, s’est également montré tout à fait opérant.

Pour ce qui concerne la philosophie globale de la rédaction que nous proposons, puisque l’on donne de nouvelles prérogatives aux agents de la SUGE et de la RATP, il est naturel que l’on assortisse ces compétences de moyens de contrôle adéquats, du même régime…

M. François Bonhomme, rapporteur. … et donc du CNAPS. Cela paraît évident.

Je veux éviter une erreur de lecture qu’ont commise plusieurs orateurs lors de la discussion générale.

Il n’est pas question d’exercer le même type de contrôle sur les agents de la SUGE et du GPSR, auxquels ce texte prévoit de confier de nouvelles prérogatives, que sur les agents de sécurité privée aujourd'hui soumis au CNAPS. Il s'agit simplement d’ajouter quelques éléments assouplis de contrôle, ce qui nous paraît une mesure intermédiaire médiane, de bon aloi et mesurée.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Ce débat n’est pas nouveau et l’ensemble des arguments sont connus – tous n’ont d'ailleurs pas été exprimés.

Comme M. Karoutchi l’a rappelé, une décision a été prise en 2011. Je n’ai rien entendu qui démontrerait que cette décision a été défaillante…

M. Roger Karoutchi. Effectivement !

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. … ou qu’elle poserait des difficultés.

Au demeurant, cette décision avait été prise, notamment à la demande des opérateurs, en raison de l’existence d’approches différentes et d’intérêts complexes, en particulier sur le plan financier. Il faut le dire !

Le Gouvernement considère donc aujourd'hui qu’il n'y a aucune raison de remettre en cause le travail qui a été réalisé par les opérateurs, par le ministère de l’intérieur et la puissance publique…

M. Roger Karoutchi. Très bien !

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. … et qu’il faut en rester à la situation actuelle.

On connaît cette offensive, c’est un débat récurrent. Beaucoup de textes sont examinés dans lesquels cet amendement visant à soumettre la SUGE et le GPSR au CNAPS revient, même si la question n’est pas posée. Cela fait au moins quatre ou cinq fois que je le vois, sur des textes divers. Comme je ne crois pas beaucoup à la génération spontanée (Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste et républicain.), je me dis que des forces poussent en ce sens…

M. Roger Karoutchi. Ou il y a un loup !

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. … et qui existaient déjà en 2011.

Très honnêtement, la sagesse aujourd’hui consiste à ne pas accepter ce mouvement ;…

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. … la situation actuelle est satisfaisante.

En revanche, d’un point de vue rédactionnel, monsieur Karoutchi, nos deux amendements, votre amendement n° 2 rectifié bis et notre amendement n° 37, vont dans le même sens. Je ne vais pas entrer dans les détails, mais le Gouvernement préfère sa rédaction. Je vous demande donc si vous envisageriez de retirer votre amendement au profit de l’amendement du Gouvernement.

Ils ont exactement le même objectif et le même dispositif, mais le nôtre est plus sécurisé du point de vue juridique ; en particulier, il prévoit explicitement les compétences du préfet de police de Paris en ce qui concerne les mesures administratives relatives aux agents. J’y insiste, la sécurisation juridique y est plus forte, mais l’objectif est exactement le même.

Ainsi, le Gouvernement ne souhaite pas soutenir les initiatives de la commission de rattacher la SUGE et le GPSR au CNAPS…

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. … mais je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement au profit de l’amendement n° 37, qui pourra être considéré comme défendu.

M. le président. Monsieur Karoutchi, l’amendement n° 2 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Roger Karoutchi. Je maintiens ce que j’ai dit tout à l’heure : quand quelque chose fonctionne, il ne faut pas l’entraver, surtout en ce moment. Je n’ai donc pas d’état d’âme et cela ne me pose pas de problème politique : je vais retirer mon amendement, je voterai celui du Gouvernement et j’invite nos collègues à le faire.

Je suis désolé pour la commission, mais, quelle que soit ma considération pour le CNAPS, la situation entre 2011 et 2015 n’a pas changé à un point tel que la SUGE et le GPSR doivent changer de tutelle ou de contrôle.

M. Roger Karoutchi. Je veux en rester à la situation actuelle.

Mme Évelyne Didier. Très bien !

M. Roger Karoutchi. Je retire donc mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 2 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 21, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéa 10

Supprimer les mots :

ainsi qu’au Conseil national des activités privées de sécurité défini au titre III du livre VI du code de la sécurité intérieure

III. – Alinéa 15

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Évelyne Didier.

Mme Évelyne Didier. Comme cela vient d’être dit, la SUGE, créée il y a plus d’un siècle, et le GPSR ne peuvent être assimilés à des services de gardiennage. En particulier, le service interne de sécurité de la SNCF est composé d’agents SNCF, qui ont le statut de cheminots et qui reçoivent une formation spécifique.

Cette formation particulière est d’autant plus importante que, pour leurs missions, les agents assermentés par le tribunal de grande instance dressent des procès-verbaux à la police des transports, mettent en place des procédures de relevé d’identité – qui ne sauraient être confondues avec les procédures prévues en matière de contrôle ou de vérification d’identité relevant de la compétence des autorités régaliennes – et prononcent des injonctions de sortir des trains et des emprises.

Dès lors, nous ne pensons pas que le contrôle du CNAPS sur les activités des agents de sécurité de la SNCF et de la RATP soit de nature à renforcer les contrôles aujourd’hui exercés par d’autres autorités ni à en améliorer les qualités professionnelles.

Enfin, comme le soulignent tant la SNCF que la RATP, le rattachement au CNAPS aurait des conséquences financières importantes pour elles. En effet, dans l’hypothèse d’un tel rattachement, ces deux entreprises devraient verser près de 1 million d’euros pour financer le CNAPS, ce qui ne manquerait pas de dégrader durablement les moyens affectés à la sûreté.

La course à la rentabilité inhérente au secteur marchand et les impératifs de sécurité ne sont pas compatibles. Cela est de bon sens eu égard à la situation financière actuelle de la SNCF et de la RATP.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Il y a un malentendu initial persistant : le CNAPS est un établissement public administratif, je le rappelle, placé sous l’autorité du ministère de l’intérieur. Parler de privatisation me paraît donc hors sujet.

L’argument suprême de la « course à la rentabilité » parfois soulevé relève aussi du malentendu : ma chère collègue, les activités de la SUGE, pour la SNCF, et du GPSR, pour la RATP, qui seraient soumises au contrôle du CNAPS ne sont pas assujetties à cette taxe. Cela est prévu explicitement par le code de la sécurité intérieure. Arrêtons donc d’évoquer cet argument…

Mme Évelyne Didier. Je n’ai pas parlé de ça !

M. François Bonhomme, rapporteur. Je l’ai entendu ici et là !

… du coût de 1 million d’euros ; il est incorrect.

Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas la question ! Répondez sur le fond !

M. François Bonhomme, rapporteur. Les activités de la SUGE et du GPSR sont explicitement exclues de cette taxe.

L’avis est donc défavorable.

Mme Évelyne Didier. Mais en quoi le CNAPS apportera-t-il quelque chose ? On ne se comprend vraiment pas !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d’État. Je ne vais pas reprendre l’argumentation, mais je dois demander au groupe CRC ce que j’ai déjà demandé à M. Karoutchi, c’est-à-dire de bien vouloir retirer l’amendement n° 21 au profit de l’amendement n° 37 du Gouvernement.

M. le président. Madame Didier, l’amendement n° 21 est-il maintenu ?

Mme Évelyne Didier. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 21 est retiré.

L’amendement n° 37, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

1° Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Le contenu de ces formations est conforme à un cahier des charges fixé par arrêté conjoint du ministre de l’intérieur et du ministre chargé des transports. » ;

2° Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

3° Alinéa 7

Supprimer les mots :

ou, à Paris, du préfet de police

4° Alinéa 10

Supprimer les mots :

ainsi qu’au Conseil national des activités privées de sécurité défini au titre III du livre VI du code de la sécurité intérieure

5° Après l’alinéa 10

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 2251-… – Un code de déontologie des agents des services internes de sécurité de la Société nationale des chemins de fer et de la Régie autonome des transports parisiens est établi par décret en Conseil d’État.

« Art. L. 2251-… – Les compétences dévolues par le présent chapitre au représentant de l’État dans le département sont exercées, dans les départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, ainsi que dans les transports en commun de voyageurs par voie ferrée de la région d’Île-de-France, par le préfet de police et, dans le département des Bouches-du-Rhône, par le préfet de police des Bouches-du-Rhône. »

6° Alinéa 15

Supprimer cet alinéa.

Cet amendement a déjà été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 37.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

Article 2 (début)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
Discussion générale

8

Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement

Mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je rappelle que la séance est retransmise en direct sur France 3, Public Sénat et sur le site internet du Sénat.

Je me fais le porte-parole du Bureau pour appeler chacun, dans des échanges qui doivent être directs et sincères, à conserver l’une des valeurs essentielles du Sénat : le respect des uns pour les autres. (Applaudissements.)

crise de la filière avicole

M. le président. La parole est à M. Pierre Médevielle, pour le groupe UDI-UC.

M. Pierre Médevielle. Monsieur le secrétaire d’État, l’annonce le 24 novembre dernier de la découverte d’un cas d’influenza aviaire en Dordogne a déclenché un véritable cataclysme dans le grand Sud-Ouest. La détection de nouveaux cas, suivie d’abattages massifs, et la mise en place de périmètres de sécurité ont plongé les acteurs de cette filière dans le plus profond désarroi.

Le plan d’éradication national du virus que vous avez proposé en concertation avec les services vétérinaires, seule piste crédible dans l’immédiat, se traduira par un vide sanitaire total de nos élevages. Cela ne va pas sans poser plusieurs problèmes majeurs.

Premièrement, nos aviculteurs seront soumis à de nouvelles normes et mesures de biosécurité qui vont entraîner un alourdissement des charges et des investissements importants.

Deuxièmement, les éleveurs devront faire face non à une simple diminution de leurs revenus, mais à une suppression brutale de ceux-ci.

Troisièmement, cette filière aviaire et palmipède gras qui permettait encore l’installation de jeunes éleveurs est un véritable emblème national et l’un des fleurons du made in France, quoi qu’en pense Miss Pamela Anderson : 74 % du foie gras consommé dans le monde est produit en France. Sachons préserver cet élément de notre patrimoine gastronomique.

Monsieur le secrétaire d’État, je vous poserai deux questions.

J’ai pris note de vos annonces de mardi. Nous n’avons bien sûr pas le droit de laisser tomber l’aviculture française qui sera en cessation d’activité dès que les derniers animaux auront été abattus début avril.

Donc, dans un premier temps, et dans l’urgence, comptez-vous privilégier les aides directes aux investissements, et selon quel calendrier ?

Soyons réalistes, l’éradication totale de l’influenza aviaire relève pour moi de la communication. Ce virus, de par sa capacité à muter, me paraît beaucoup plus résistant que notre filière.

Par conséquent, si le vide sanitaire ne se révélait pas suffisant, comptez-vous, dans un second temps, engager un suivi sur le moyen et le long terme afin de sauver et de pérenniser l’élevage avicole et la production de palmipèdes gras ? (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur certaines travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Stéphane Le Foll : il ne peut participer à cette séance de questions d’actualité, car il discute aujourd’hui avec son homologue iranien de contrats touchant l’agriculture. (Mouvements et exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Je tiens au préalable à réaffirmer le plan sanitaire décidé par le Gouvernement. Cette politique du vide sanitaire est la bonne, car elle est innovante et courageuse. Elle est nécessaire, car c’est la garantie de l’avenir de cette filière.

Toutefois, le Gouvernement a pleinement conscience du lourd impact économique que cette décision entraînera sur tous les opérateurs de la filière, aussi bien en amont qu’en aval.

C’est pourquoi le ministre de l’agriculture a, comme vous le savez, rencontré mardi matin les professionnels, pour leur expliquer la mise en œuvre de ce plan d’action, qui doit être efficace d’un point de vue sanitaire et doit limiter au maximum les conséquences économiques.

Un arrêté sanitaire sera finalisé à la fin de la semaine prochaine sur ces bases, prenant en compte tous les types d’élevages concernés dans la zone.

Le plan d’assainissement consiste à arrêter l’introduction des canetons tout en continuant jusqu’à leur terme les productions engagées aujourd’hui, soit un vide sanitaire pendant quatre semaines avec une reprise de la production au mois de mai, après désinfection et assainissement de la zone.

L’État sera aussi là pour soutenir les opérateurs de la filière sur le plan économique : 130 millions d’euros seront destinés à compenser les pertes de revenus des éleveurs et des accouveurs.

En outre, pour sauvegarder l’emploi dans les territoires, des dispositifs d’activité partielle et d’aide à la formation professionnelle seront activés. D’autres indemnisations seront disponibles pour les entreprises d’abattage, de transformation, de transport d’aliments, sous forme de baisses de charges fiscales et sociales. Par ailleurs, les accords commerciaux pourront, en raison de cette situation particulière, être remis en cause si nécessaire.

M. le président. Il faut conclure, monsieur le secrétaire d’État !

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Enfin, 220 millions d’euros sur cinq ans seront affectés au soutien de l’investissement.

Telles sont les propositions très concrètes et extrêmement fortes de M. le ministre de l’agriculture. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.)

chômage

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour le groupe Les Républicains. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-François Husson. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

Madame la ministre, les chiffres du chômage, tombés hier, sont cruels pour le Gouvernement et confirment l’inexorable montée du chômage : 700 000 chômeurs de plus depuis le début du quinquennat ; quel triste bilan !

Avec cette hausse, la France, dont aucune des régions n’est épargnée, est parmi les plus mauvais élèves de la zone euro. Pourtant, nous sommes dans une conjoncture économique favorable avec des taux d’intérêt bas, un pétrole bon marché et une inflation quasi nulle !

Un sénateur du groupe Les Républicains. Très bien !

M. Jean-François Husson. Outre-mer incluse, 5,75 millions de personnes pointent à Pôle emploi, dont 2,5 millions depuis plus d’un an.

Ces chiffres doivent nous révolter, car ils nourrissent la désespérance, terreau du vote extrémiste ! Derrière ces chiffres, il y a des femmes et des hommes, de tous âges et de toutes conditions, qui sont atteints dans leur dignité et vivent mal cette situation.

De la boîte à outils imaginée en septembre 2012 au énième plan présenté en janvier par le Président de la République, en passant par la fameuse promesse d’inverser la courbe du chômage à la fin de l’année 2013,…

M. Charles Revet. On en est loin !

M. Jean-François Husson. … le constat d’échec est accablant. Il traduit vos mauvais choix, économiques et politiques, pour combattre ce fléau et créer de l’emploi.

Madame la ministre, ma question sera simple : quand allez-vous non plus traiter seulement les conséquences du chômage, mais vous attaquer enfin à ses causes profondes, et comment le ferez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur le sénateur, vous l’avez dit, le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A a augmenté de 15 800 en décembre 2015. Ce chiffre, nous ne pouvons malheureusement pas le nier. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Dallier. Encore heureux !

Mme Myriam El Khomri, ministre. Il me semble essentiel de rappeler ici – cela nous permet en effet d’établir le bilan sur l’année 2015 – que ce chiffre est aussi la conséquence des circonstances exceptionnelles des mois de novembre et décembre derniers,…

Mme Myriam El Khomri, ministre. … lesquelles ont pesé sur les embauches, avec une baisse de 2,2 % des offres d’embauche. C’est une réalité ! Il me semble important que nous nous mettions d’accord entre nous sur une chose : le contexte de l’année 2015 a été différent de celui des années précédentes. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Notre pays a créé plus d’emplois qu’il n’en a détruits. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Sido. Près de 500 chômeurs de plus chaque jour !

Mme Myriam El Khomri, ministre. Certes, 46 000 créations nettes d’emploi, ce n’est pas suffisant par rapport à notre croissance démographique. Mais prenez l’exemple de l’Allemagne, avec 700 000 départs à la retraite et un peu plus de 400 000 entrées sur le marché du travail. En France, nous enregistrons 700 000 départs à la retraite et de 800 000 à 850 000 entrées sur le marché du travail.

Un autre enseignement de l’année 2015 tient à la baisse du chômage des jeunes, qui diminue pour la première fois depuis 2010 de près de 4 % (Marques de satisfaction sur les travées du groupe socialiste et républicain.) : ce signe encourageant montre que notre mobilisation doit continuer.

Ce contexte difficile pour les personnes connaissant cette désespérance – vous l’avez souligné à juste titre – justifie pleinement le plan de mobilisation pour l’emploi que le Président de la République a présenté la semaine dernière (Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.),…

M. Alain Gournac. Il n’est pas bon !

Mme Myriam El Khomri, ministre. … et ce pour deux raisons : il s’agit, d’une part, de soutenir la création d’emplois – en une semaine, 7 000 employeurs ont demandé l’aide en faveur des très petites entreprises et des petites et moyennes entreprises – et, d’autre part, d’accélérer la formation des demandeurs d’emploi les plus éloignés du travail pour répondre à cette question des métiers non pourvus. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour la réplique.

M. Jean-François Husson. Madame la ministre, ne répondez pas aux questions que je n’ai pas posées ! (Rires sur les travées du groupe Les Républicains.) En revanche, pour répondre aux causes du chômage, faites confiance aux entreprises, celles que M. le Premier ministre a déclaré aimer, et faites-le en mettant en œuvre leurs propositions pour engager la France sur une nouvelle dynamique de l’emploi.

Je ne me résous pas à ce que la « génération Hollande » soit la « génération chômage ». (M. Claude Bérit-Débat s’exclame.)

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Jean-François Husson. Désormais, il faut agir pour l’emploi et en faire une grande cause nationale d’utilité publique. Il faut le faire pour la France ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

nouvelles cartes d’intercommunalité et conséquences en termes de découpage

M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour le groupe du RDSE.

Mme Françoise Laborde. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.

À l’occasion des dernières élections municipales, les électeurs ont désigné eux-mêmes, et pour la première fois, les représentants de leurs communes au sein des conseils communautaires. Certaines intercommunalités, composées en partie de communes rurales, ont sollicité la possibilité de constituer leurs assemblées sur un système de représentativité « dérogatoire », qui permet aux communes les plus petites d’avoir au moins deux délégués au conseil communautaire. Ces délégués élus au suffrage universel direct ont donc débuté leur mandat au sein des différentes communautés de communes qui maillent notre pays.

Or, dans le même temps, l’application de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe », fixe au 31 mars 2016 la publication des nouveaux schémas de coopération intercommunale par les préfets, lesquels procèdent actuellement à la mise en œuvre des fusions et autres modifications de périmètre des EPCI.

Si la fusion des compétences trouve une issue administrative favorable dans l’organisation des nouvelles grandes intercommunalités, il n’en va pas de même pour le système de représentativité des plus petites communes, qui passent de deux à un délégué seulement.

En plus de la question de la représentation des communes rurales au sein des intercommunalités, se pose également, et très clairement, celle de l’interruption soudaine du mandat de nombreux délégués communautaires, élus en 2014 et théoriquement jusqu’en 2020.

En effet, madame la ministre, vous ne pouvez ignorer que, moins de deux ans après les élections, des élus du suffrage universel se verront retirer leur mandat au sein des conseils communautaires le 31 décembre 2016, à minuit. Cette situation inédite suscite des interrogations.

Autant il est possible d’allonger la durée d’un mandat, autant le raccourcir dans de telles conditions pose problème.

Madame la ministre, les préfets ont proposé des schémas sans notifier à chacun des conseillers municipaux les conséquences de ces nouveaux schémas sur la composition des futurs conseils communautaires au 1er janvier 2017.

M. Henri de Raincourt. C’est vrai !

Mme Françoise Laborde. Ma question est donc simple et appelle une réponse simple : oui ou non, madame la ministre, allez-vous donner des instructions précises aux préfets pour qu’ils informent les élus et les collectivités concernés des conséquences découlant de leurs projets de schémas ? (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Madame la sénatrice, vous soulevez une question qui se pose non seulement pour la révision des périmètres des intercommunalités, mais aussi en ce moment même dans un certain nombre de cas en France. Ici, un maire a démissionné et doit être réélu – c’est le cas d’une communauté d’agglomération que je connais bien. Là, une commune nouvelle vient de naître et s’oppose tout d’un coup à l’accord local sur le nombre de représentants.

Il aurait presque fallu prendre langue avec Alain Richard, lequel a essayé, avec plusieurs de ses collègues, après une question prioritaire de constitutionnalité ayant conduit à la décision du Conseil constitutionnel Commune de Salbris, de trouver une solution pour que cette décision permette quand même la conclusion d’accords locaux, en particulier pour la représentation des plus petites communes.

Avant même la réforme des EPCI, des vice-présidents d’intercommunalité ou même des conseillers communautaires ne pourront plus exercer leur mandat : ce sera du fait non pas de la loi NOTRe, mais bien de cette décision du Conseil constitutionnel.

Dans certains cas, des accords locaux ont permis d’aboutir à des arrangements, qui sont toutefois d’une autre nature.

Au cours d’un débat qui, s’il ne portait pas sur cette question, n’en était pas moins très intéressant, on m’a demandé si le Gouvernement pouvait proposer un nouveau type de représentation en dehors du véhicule législatif dont Alain Richard a eu l’initiative. Je le rappelle, il n’est en aucun cas possible de contourner une décision du Conseil constitutionnel.

Telle est la situation face à laquelle nous nous trouvons. Les préfets ont, comme les autres acteurs concernés, lu l’instruction dont il s’agit. Ce document a été diffusé le plus vite possible après le 7 août 2015. Il porte non seulement sur les périmètres des EPCI et sur les missions des communes, mais aussi sur les contours des communes nouvelles, qui créent beaucoup plus de surprises encore.

M. Alain Fouché. Faute de concertation !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. En l’espèce, nous sommes confrontés à une question de nature constitutionnelle. J’espère que les accords locaux permettront de résoudre un maximum de problèmes, mais, quoi qu’il en soit, la Constitution s’impose à tous. À mon niveau, j’en suis moi aussi la garante ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.)

renault : tests de pollution

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour le groupe écologiste.

Mme Aline Archimbaud. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, et porte sur les tests d’émission de polluants automobiles.

Depuis juin 2012, l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, a classé les particules fixes et l’oxyde d’azote, ou NOx, dans la catégorie des cancérogènes certains. On connaît le chiffre de 40 000 morts prématurées liées, chaque année en France, à la pollution de l’air, auxquelles il faut ajouter les innombrables maladies respiratoires et cardiovasculaires.

Après la publication, au début de ce mois, des premiers résultats de la commission technique indépendante mise en place par Mme la ministre de l’écologie, le Gouvernement a tenu à nous rassurer, en nous certifiant que le constructeur Renault n’avait pas fraudé. Nous en prenons acte. Cela étant, sur les vingt-deux premiers véhicules français et européens examinés, la même commission a constaté des dépassements très élevés des normes d’émission – ces seuils seraient franchis au moins trois à cinq fois –, lorsque les véhicules sont utilisés en conditions de circulation réelles.

Faut-il rappeler cette évidence ? Les consommateurs achètent une voiture pour rouler normalement. Or les tests ne sont pas effectués dans des conditions normales : absence de vent, vitesse très basse, pas de changement de température ou de relief, ces critères ne correspondent en rien à l’utilisation réelle des automobiles. Divers constructeurs jouent donc avec la réglementation pour faire homologuer des véhicules qui, en fait, sont bien plus polluants qu’annoncé. Ce n’est pas de la fraude : à ce jour, ces pratiques sont en effet parfaitement légales. Elles n’en sont pas moins totalement inacceptables.

Nous sommes convaincus de la nécessité de consolider notre industrie automobile. Néanmoins, si cette dernière veut être attractive, elle ne peut pas jouer avec la santé et la confiance des populations.

Par ailleurs, des doutes existent quant à l’indépendance des organismes officiels d’homologation, qui, même s’ils ne reçoivent pas de subventions directes des constructeurs, assurent pour leur compte de très nombreuses prestations.

Je poserai donc, à ce sujet, deux questions au Gouvernement.

Premièrement, pour ce qui concerne les tests en conditions réelles de circulation, le Parlement européen doit se prononcer prochainement sur la possibilité d’autoriser des marges de dépassement des normes de pollution qui seraient considérables – jusqu’à 110 %. La France s’oppose-t-elle à ces autorisations ?

Deuxièmement, dans le but d’accroître l’indépendance des tests d’homologation, la Commission européenne a annoncé hier son souhait de réaliser elle-même des relevés sur des véhicules déjà en circulation. Elle pourrait ainsi vérifier si ces derniers sont conformes à leur première certification et, le cas échéant, prononcer des sanctions. La France compte-t-elle soutenir cette proposition au sein de l’Union européenne ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice, avant tout, permettez-moi d’excuser Ségolène Royal (Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.),…

M. Bruno Sido. Elle ne vient jamais aux questions au Gouvernement, elle nous snobe !

M. Jean-Pierre Raffarin. Mes chers collègues, cessez d’attaquer Ségolène ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. … qui est aujourd’hui au grand forum des investisseurs de l’économie bas carbone, mis en place lors de la COP 21.

Comme vous l’avez souligné, et comme elle s’y était engagée, Mme la ministre de l’écologie a mis en place une commission technique indépendante chargée d’évaluer les émissions polluantes.

L’organisme désigné par le ministère a bien opéré ces tests, et vous en connaissez déjà un certain nombre de résultats.

Tout d’abord, le protocole de test a conduit à s’interroger sur d’éventuelles fraudes à l’homologation. Il a, hélas ! confirmé l’existence de programmes trompant le cycle réglementaire d’homologation sur deux véhicules Volkswagen testés, sans pour autant établir l’existence de tels logiciels sur les autres véhicules examinés, produits par d’autres marques.

Ensuite, pour ce qui concerne les émissions de polluants, il est exact que les contrôles exercés ont mis à jour des émissions supérieures aux niveaux précédemment attestés.

Ces travaux d’expertise vont se poursuivre dans d’autres pays d’Europe, et la France – je tiens à vous le confirmer – soutient cette démarche de transparence au service du consommateur. Ces tests permettront, en effet, d’éclairer les décideurs européens.

Vous le savez, la France a obtenu l’inscription dans la réglementation d’une clause de revoyure des coefficients, pour renforcer nos ambitions dans un avenir proche. À cet égard, l’objectif, c’est l’entrée en vigueur de ces nouvelles normes dès 2017.

À l’échelle tant nationale qu’européenne, le Gouvernement est donc tout à fait actif pour que la transparence et la qualité des normes soient véritablement respectées ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.)

situation de jacqueline sauvage

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour le groupe CRC.

Mme Laurence Cohen. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement, et porte sur la situation de Jacqueline Sauvage, qui a tué son mari après avoir été victime, avec ses quatre enfants, durant quarante-sept ans, des violences d’un homme les frappant et les violant régulièrement.

La condamnation de cette femme à dix ans de prison, malgré le calvaire enduré par elle-même, ses trois filles et son fils, qui s’est suicidé, ne peut qu’interpeller.

Bien sûr, je n’entends nullement commenter une décision de justice.

M. Alain Fouché. C’est pourtant ce que vous faites !

Mme Laurence Cohen. Cette décision est le résultat d’une application stricto sensu de l’article 122-5 du code pénal, relatif à la légitime défense. Mais elle traduit surtout la non-prise en compte par l’ensemble de la société du fléau que représentent les violences faites aux femmes.

M. Alain Fouché. Et les hommes battus ?

M. Bruno Sido. Eh oui, qu’en est-il des hommes ?

Mme Laurence Cohen. Faut-il rappeler ici que, en 2014, 134 femmes sont décédées sous les coups de leur conjoint dans notre pays ? Faut-il rappeler que les victimes de violences sont en général dans un tel état de sidération que seulement 10 % d’entre elles environ portent plainte ?

Après la décision de justice, confirmée en cour d’appel, dont elle a fait l’objet, Jacqueline Sauvage n’a plus qu’un seul recours : obtenir la grâce présidentielle. À cette fin, des féministes ont lancé une pétition. Cette dernière circule actuellement et je l’ai signée moi-même, comme des milliers de femmes et d’hommes de toutes sensibilités politiques. Je n’en suis que plus étonnée du brouhaha dans lequel je suis contrainte de m’exprimer… Cette pétition devrait totaliser 500 000 soutiens d’ici à la fin de février prochain.

Monsieur le secrétaire d’État, le contexte dans lequel Jacqueline Sauvage a commis cet acte doit être pris en compte. Je sais que François Hollande est sensible à ce motif, et qu’il recevra demain les enfants et les avocats de Jacqueline Sauvage. J’ose y voir un signe positif. Votre réponse sera sans doute de nature à nous éclairer.

Au-delà de cette grâce présidentielle très attendue, pouvez-vous nous indiquer quels moyens financiers et humains le Gouvernement entend mobiliser afin de mieux lutter contre les violences faites aux femmes ? (Applaudissements.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice, les applaudissements qu’a suscités votre intervention en témoignent, nous sommes aujourd’hui très nombreux à éprouver de l’émotion…

M. Bruno Sido. C’est vrai.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. … face au cas de Jacqueline Sauvage et, bien au-delà, face au grave problème de société qu’il illustre.

Cette mobilisation est forte et nous l’entendons.

Vous l’avez vous-même précisé, vous n’attendez pas du Gouvernement qu’il commente une décision de justice. Bien entendu, je ne peux pas davantage m’avancer quant à l’accueil d’une demande en grâce destinée à obtenir une annulation ou une réduction de peine. Une telle décision est du ressort total et exclusif du chef de l’État.

Je vous le confirme, les représentants du comité de soutien à Jacqueline Sauvage seront, ainsi que des membres de sa famille, reçus demain par le Président de la République.

Au-delà de cette situation et de cette émotion, que nous entendons, vous m’interrogez avec raison quant à la mobilisation du Gouvernement contre les violences faites aux femmes. (M. Alain Gournac s’exclame.)

Mesdames, messieurs les sénateurs, Pascale Boistard est particulièrement impliquée dans ce combat, et elle le livre avec force. Le Président de la République a fait de ce sujet une priorité de son action et de l’action gouvernementale. (M. Alain Gournac s’exclame à nouveau.) Il a renforcé la lutte contre le viol, crime que l’on déplore encore beaucoup trop fréquemment.

Dans cette lutte contre le harcèlement sexiste et les violences sexuelles, le Gouvernement, je le sais, peut compter sur le soutien de nombre d’entre vous. Il peut également compter sur le concours des collectivités territoriales, des associations et de nombreuses entreprises.

En effet, au-delà de l’action, parfaitement légitime, que déploie l’État, une mobilisation de la société tout entière est nécessaire. Il s’agit de mettre véritablement en mouvement des droits que les intéressés ne font malheureusement pas toujours valoir.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le secrétaire d’État.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Il convient d’agir avec détermination contre ces discriminations et ces violences.

Madame Cohen, à cet égard, votre question permet de rappeler une nouvelle fois l’existence du problème et d’amplifier, sur ce front, la mobilisation de chacun ! (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Annie David et M. Dominique Watrin applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour la réplique.

Mme Laurence Cohen. Monsieur le secrétaire d’État, vous l’avez dit avec raison, ce phénomène nous interroge individuellement, et il interroge collectivement notre société.

Dans ce cas précis, des dysfonctionnements sont à déplorer : malgré divers signalements, malgré plusieurs passages aux urgences, Mme Sauvage n’a pas pu échapper aux mains de son bourreau.

Bien entendu, pour garantir l’exercice de la loi, des moyens humains et financiers sont nécessaires. À ce propos, j’attire votre attention sur le rapport que la délégation sénatoriale aux droits des femmes publiera le 11 février prochain, préconisant notamment des moyens financiers et humains pour assurer une formation de tous les acteurs – magistrats, policiers, personnels de santé – et des observatoires contre les violences aux niveaux départemental et régional.

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Laurence Cohen. Les violences faites aux femmes sont un fléau que la société doit affronter pour pouvoir s’en libérer.

M. Alain Gournac. Très bien !

Mme Laurence Cohen. Chacune et chacun d’entre nous, à commencer bien entendu par les membres du Gouvernement, doit prendre ses responsabilités ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du groupe Les Républicains.)

rapport badinter sur le droit du travail

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour le groupe socialiste et républicain.

Mme Nicole Bricq. Ma question s'adresse à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Madame la ministre, depuis votre prise de fonctions en septembre dernier, vous avez beaucoup travaillé, vous avez consulté et vous avez agi. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Vous avez agi avec pour objectif de présenter lors du conseil des ministres du 1er mars prochain votre projet de loi relatif au droit du travail, qui est très attendu.

Vous avez agi, notamment, en lançant la consultation publique relative au compte personnel d’activité, dont il convient à présent de définir le contour et le périmètre. Bien sûr, plus ce périmètre sera ambitieux, plus cet outil garantira l’émancipation individuelle. Dès lors, nos concitoyens pourront définir eux-mêmes leur trajectoire professionnelle.

J’ai assisté au lancement du compte personnel d’activité, que vous avez confié à France Stratégie. En cette circonstance, j’ai pu observer beaucoup d’enthousiasme, notamment de la part de jeunes gens qui, après avoir subi des ruptures dans leur activité professionnelle, disaient tout le bien qu’ils pensaient d’un tel outil.

En outre, M. le Premier ministre et vous-même avez reçu lundi dernier le rapport du comité Badinter, synthétisant les principes essentiels et fondamentaux de notre droit du travail. C’est sur cette base que vous allez écrire votre projet de loi.

Ce texte traitera du temps de travail, sujet qui a déjà fait couler beaucoup d’encre et beaucoup de paroles.

Un sénateur du groupe Les Républicains. Et votre question ?

Mme Nicole Bricq. De plus, il y sera question de la liberté laissée aux entreprises pour conclure des accords bons pour l’emploi, l’activité et l’innovation, qu’elle soit sociale ou technologique.

Dès lors, madame la ministre, ma question est très simple. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées de l’UDI-UC.)

M. Philippe Dallier. « Qu’allez-vous en faire ? » (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Nicole Bricq. Dites-nous comment vous allez tirer le meilleur parti de tout ce travail dont vous disposez ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. –Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées de l’UDI-UC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Madame la sénatrice, vous l’avez dit, Robert Badinter et ses collègues chargés de cette mission nous ont remis lundi dernier leur rapport contenant soixante et un principes.

Dans notre société, il est important de réaffirmer les principes qui constituent le socle du droit des travailleurs. Il s’agit d’une sorte de déclaration des droits des travailleurs. C’est important, parce que nous affirmons ainsi ce à quoi il n’est pas possible de déroger.

La loi relative à l’avenir du travail, que je prépare et qui sera présentée en conseil des ministres le 9 mars prochain, répond à l’enjeu de mieux prendre en compte les mutations du travail. Le compte personnel d’activité en fait partie. Il s’agit d’un véritable progrès social.

Aujourd’hui, on n’entre plus dans une entreprise à dix-huit ans pour en sortir à soixante ans (M. Michel Bouvard s’exclame.), en ayant connu un seul et même employeur. Nos parcours professionnels sont faits de nombreux employeurs, ils sont nourris par notre capacité à passer d’un statut à un autre, à exercer parfois plusieurs activités.

Il me semble essentiel, afin de mieux sécuriser ces parcours professionnels, que la rupture ne soit pas un échec, mais une occasion de rebondir. Il faut pour cela conférer aux individus les moyens de rebondir, c’est-à-dire des conseils en évolution professionnelle, et leur permettre d’utiliser à cette fin leur compte personnel de formation. C’est cela, réécrire notre modèle social.

Il s’agit d’un enjeu majeur. Je vous invite toutes et tous à participer à ce débat public, qui se poursuivra jusqu’au 20 mars prochain.

Le second point concerne l’adaptation de notre droit du travail. À partir de ce socle de principes, auxquels des dispositions législatives devront donner chair, il importe de définir la place à ménager à la négociation collective.

Il s’agit véritablement de permettre des adaptations au plus près des territoires, en développant les accords d’entreprise, mais aussi en repositionnant les accords de branche, qui sont essentiels afin d’éviter la concurrence déloyale.

Pour tout cela, il faudra redynamiser le dialogue social…

M. le président. Il va falloir conclure !

Mme Myriam El Khomri, ministre. … en donnant plus de force à ceux qui sont chargés de le mener, c’est-à-dire aux organisations syndicales. Il s’agit non pas de les contourner, mais d’essayer de créer cet espace de respiration. Tel est l’objectif de mon projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

encadrement des essais cliniques

M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, pour le groupe UDI-UC.

M. Olivier Cigolotti. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la santé.

Le 15 janvier dernier, nous apprenions l’hospitalisation de patients au CHU de Rennes à la suite d’un essai clinique. Deux jours plus tard, l’un des volontaires hospitalisés décédait. Quatre autres présentent encore des risques de conserver des séquelles neurologiques irréversibles.

En France, les essais cliniques ont la réputation d’être parfaitement encadrés, mais cette affaire comporte de nombreuses zones d’ombre.

Les experts s’interrogent en particulier sur le protocole du laboratoire pharmaceutique qui a été opéré par le centre d’essais thérapeutiques et validé par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM. Ce protocole semble en effet comporter certaines anomalies et à ce jour l’ANSM se refuse à le rendre public.

De nombreuses questions restent sans réponse, notamment concernant la taille importante de l’échantillon de volontaires ainsi que sa composition.

Le test réalisé en amont n’ayant pas été publié, les experts se demandent si le laboratoire n’a pas tenté de gagner du temps pour passer directement à l’étape suivante.

Les délais de sécurité n’ont pas été respectés dès le premier palier. Les volontaires étaient en effet traités par intervalles de vingt-quatre heures, un délai jugé très court.

Pourquoi un tel empressement ? Était-ce par souci d’économie ? En effet, superposer plusieurs schémas d’administration d’une molécule peut permettre d’économiser jusqu’à un an d’expérimentation ! Cette pratique semble malheureusement se développer, au détriment de la sécurité des volontaires.

Un porte-parole du centre d’essais cliniques déclarait : « On ne rémunère pas un risque, mais une contrainte. » Madame la ministre, tout essai clinique comporte des risques. Les minimiser constitue une faute grave !

Aussi, madame la ministre, comptez-vous proposer une évolution des standards en vigueur pour les essais cliniques de médicaments, afin d’éviter de tels drames et de permettre de mieux informer les volontaires des risques encourus ? (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et sur certaines travées du groupe Les Républicains. – M. Alain Bertrand applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l’enfance, des personnes âgées et de l’autonomie. Monsieur le sénateur, je vous prie d’abord d’excuser l’absence de Marisol Touraine (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.),…

Mme Nicole Bricq. Elle était là hier !

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. … qui, avec le Président de la République, reçoit le Président iranien. (M. Alain Fouché s’exclame.)

M. Bruno Sido. Tout va très bien, madame la marquise !

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. Le sujet que nous évoquons est sérieux et grave !

Un accident grave est survenu à Rennes, il y a deux semaines, dans le cadre d’un essai clinique de phase 1 sur une nouvelle molécule.

Six personnes ont été admises au CHU de Rennes. L’une d’entre elles est décédée. L’état des cinq autres volontaires s’est, quant à lui, amélioré : ils ont tous pu quitter le CHU et sont désormais rentrés chez eux ou sont suivis par des hôpitaux locaux de proximité.

Dès qu’elle a eu connaissance de cet accident, Marisol Touraine s’est rendue sur place pour rencontrer les victimes et leur famille afin de leur témoigner du soutien total des pouvoirs publics face à cette situation dramatique (M. Alain Gournac s’exclame.) et de s’assurer de leur prise en charge sanitaire et sociale.

Elle a immédiatement annoncé le lancement de deux enquêtes sur le site du laboratoire, indépendamment des procédures judiciaires engagées par le parquet de Rennes et le pôle de santé publique du parquet de Paris.

M. Alain Gournac. Une commission !

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d’État. L’Agence nationale de sécurité du médicament a immédiatement lancé une procédure d’inspection technique sur le site, visant notamment à vérifier le respect des procédures réglementaires et des bonnes pratiques cliniques.

Elle a, de surcroît, saisi l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, d’une mission d’inspection. Comme prévu, une note d’étape de l’IGAS lui sera remise au début de la semaine prochaine.

Enfin, la ministre a demandé que soient identifiés et contactés sans délai tous les volontaires ayant été exposés à ce produit dans le cadre de cet essai. Un numéro de téléphone dédié a été mis en place à cette fin.

Les examens se poursuivent, mais, à ce stade, les anomalies cliniques et radiologiques présentes chez les patients hospitalisés n’ont pas été retrouvées.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, face à cette situation d’une exceptionnelle gravité, nous avons pris les mesures nécessaires pour garantir la sécurité et le suivi des volontaires exposés et, surtout, pour comprendre ce qui a pu conduire à cette situation dramatique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

situation financière des départements

M. le président. La parole est à M. Benoît Huré, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Benoît Huré. Ma question s’adressait à M. le Premier ministre.

Je souhaite évoquer la situation financière et budgétaire très difficile des départements et ainsi, finalement, la question même de leur survie.

En plus de la baisse des dotations, l’État rembourse de moins en moins aux départements les allocations de solidarité que ceux-ci versent à nos concitoyens pour le compte de la nation. Les chiffres explosent, parallèlement à la montée du besoin de solidarité. Ainsi, 7,2 milliards sont dus aux départements au titre de l’année 2014 et 8,1 milliards d’euros en 2015.

Pour ne citer que les seules dépenses relatives au RSA, celles-ci ont augmenté depuis trois ans de 9,1 % en moyenne, de 20 % dans certains départements en difficulté, et même de 25,5 % dans le département des Ardennes, que je connais bien.

L’équilibre budgétaire de 2016 est tout simplement impossible : dix départements en 2015 se sont trouvés dans une impasse budgétaire, trente autres s’y trouveront en 2016 et tous les autres tomberont en 2017 et en 2018.

Aujourd’hui, les départements attendent du Gouvernement des actes forts, à la hauteur du péril grave qui les menace.

Si le gouffre financier qui est en train d’engloutir les conseils départementaux et leurs politiques de proximité n’est pas comblé dès cette année, l’ensemble des missions de solidarité territoriale, mais aussi des engagements contractuels avec l’État, seront impossibles à tenir.

Tout cela se produirait, madame la ministre, au pire moment de l’histoire de notre nation, et je n’ose imaginer les réactions que nos concitoyens exprimeraient dans la rue et lors de prochaines élections. (M. David Rachline sourit.)

L’Assemblée des départements de France, pluraliste et unanime, vous a fait des propositions raisonnables et responsables. Quand M. le Premier ministre y répondra-t-il, ou fera-t-il de nouvelles propositions ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC. – M. Jean-Claude Luche applaudit également.)

Mme Sophie Primas. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.

Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Monsieur le sénateur, je vous remercie de cette question comme de votre engagement dans le groupe de travail que le Premier ministre a tenu à mettre en place et qui doit toujours rendre ses conclusions à la fin du mois de mars.

La question qui nous est posée concerne les allocations individuelles de solidarité, les AIS. Vous-même, comme d’autres, avez tenu à proposer de travailler sur l’ensemble des allocations individuelles de solidarité, et pas seulement sur le RSA. En effet, dans certains départements, le RSA augmente gravement, c’est le cas du vôtre, mais dans d’autres, la démographie est telle que c’est l’APA, l’allocation personnalisée d’autonomie, qui, parfois, grève lourdement les finances.

Nous devons être attentifs à tous ces sujets dans ce groupe de travail, auquel nous sommes quelques-uns à participer, bien évidemment sous les ordres du Premier ministre.

Christophe Sirugue est chargé également d’une mission sur l’ensemble des minima sociaux, parce qu’il faut bien, à un moment donné, et en particulier en période de crise budgétaire suite à une crise économique que chacun connaît, poser toutes les questions de façon claire et transparente.

Entre-temps, nous avons signé un pacte de confiance dès juillet 2013 avec l’ADF – Assemblée des départements de France –, il faut le reconnaître, qui a permis, au moins, de verser 1,6 milliard d’euros par an aux départements. Nous avons ainsi pu aider ceux qui se trouvaient en grande difficulté.

La question posée, qui me semble intéresser tous les sénateurs et toutes les sénatrices, et, au-delà, tous nos concitoyens, est la suivante : qui finance la solidarité ?

M. Philippe Dallier. C’est une vraie question !

Mme Marylise Lebranchu, ministre. Sur quelle assiette fiscale ? S’agit-il de solidarité départementale, régionale ou nationale ? Vous avez fait des propositions : nous conclurons ensemble à la fin du mois de mars ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Benoît Huré. Je demande la parole pour la réplique.

M. le président. Monsieur Huré, je ne peux vous la donner, car vous avez épuisé tout le temps dont vous disposiez.

action de la france au niveau européen : lutte contre le terrorisme

M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Alain Richard. Monsieur le ministre de l’intérieur, notre nation reste sous la menace intense de nouvelles agressions terroristes et nous savons que cette menace a des ramifications internationales profondes. Vous nous en parlez, de façon très ouverte, lors des réunions du comité de suivi de l’état d’urgence et je crois que tous nos collègues des différents groupes reconnaissent votre volonté de partager complètement l’information.

Vous avez participé à un nouveau Conseil Justice et affaires intérieures, et nous attendons des expressions de solidarité et d’efficacité collective de tous nos partenaires européens sur trois sujets : la fourniture d’informations fiables et en temps réel pour les fichiers de sécurité que nous partageons et qui constituent l’outil de base de la lutte antiterroriste ; une lutte organisée contre les trafics de documents d’identité falsifiés, très répandus, semble-t-il, à partir de la Syrie ; enfin, un renforcement de l’efficacité du contrôle aux frontières extérieures de l’Union, tout particulièrement bien sûr nos partenaires grecs, la géographie de la Grèce, avec ses multiples îles face à la Turquie, constituant un défi particulier.

Monsieur le ministre, il serait judicieux que vous nous indiquiez les avancées que vous avez pu obtenir lors de cette rencontre.

J’ajoute que l’Union européenne est un projet politique dans lequel se sont engagées toutes les familles démocratiques de nos pays, dont l’acquis primordial réside dans la constitution d’un espace commun de démocratie et d’échanges humains.

Nous devons donc nous garder d’en faire un maillon faible de la sécurité de nos concitoyens. Ce défi me semble essentiel pour nos démocraties et devrait, selon moi, faire l’objet de discussions au cours du prochain Conseil européen rassemblant nos leaders. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, les trois questions que vous m’avez posées sont celles que nous avons souhaité mettre à l’agenda du Conseil Justice et affaires intérieures. Avant cette réunion, j’avais adressé une lettre au commissaire Timmermans, de manière à lui indiquer nos priorités.

Le premier sujet concerne le contrôle aux frontières extérieures de l’Union européenne. Il n’existe aucune possibilité de sauver Schengen sans un renforcement de ce contrôle. C’est ce qui a été obtenu de la Commission le 15 décembre dernier, lorsqu’elle a décidé d’engager la réforme du code frontières Schengen en en modifiant l’article 7–2, qui permet des contrôles systématiques et coordonnés aux frontières extérieures.

Ensuite, si nous voulons atteindre cet objectif, il faut renforcer Frontex. Deux cent cinquante millions d’euros de budget constituent une première étape ; les gardes-côtes, les gardes-frontières dont nous avons décidé de la mobilisation. La France contribue fortement à Frontex, puisque nous fournissons des gardes-frontières, et des collaborateurs au bureau de l’EASO, l’European Asylum Support Office.

Concernant le deuxième sujet, les fichiers, un contrôle aux frontières sans possibilité d’interroger le système d’information Schengen, le SIS, n’a aucune utilité. Cette démarche doit donc être systématique.

Toutefois, cela est inutile si tous les pays de l’Union européenne n’alimentent pas cette base. Des pays disposant d’informations sur le caractère terroriste de l’activité de certains individus signalent ceux-ci comme délinquants et non comme terroristes, obérant ainsi complètement l’efficacité de notre action en matière de lutte antiterroriste.

M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Enfin, il est nécessaire que les fichiers soient connectés entre eux – en particulier le SIS avec les grands fichiers criminels – et que l’on puisse utiliser Eurodac à des fins sécuritaires.

Concernant le troisième sujet, la lutte contre les faux documents, Daech en a récupéré beaucoup et dispose d’une usine qui produit de tels documents. J’ai proposé de mettre en place une task force composée de nos meilleurs spécialistes de police pour identifier ces documents au moment du franchissement des frontières extérieures.

Je me trouvais hier au conseil des ministres allemand, à Berlin,…

M. le président. Il va falloir conclure !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. … où, avec mon collègue Thomas de Maizière qui a repris ces propositions, j’ai proposé cela. Nous allons faire de ces propositions des propositions franco-allemandes, afin que le Conseil Justice et affaires intérieures du 25 février prochain, qui sera décisif, reprenne cet agenda et définisse un strict calendrier d’application. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – MM. Alain Bertrand, Jean-Claude Luche et Yves Pozzo di Borgo applaudissent également.)

crise agricole

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Corinne Imbert. Ma question s'adressait à M. le ministre de l’agriculture.

Monsieur le secrétaire d’État, la France agricole a mal.

La détresse des agriculteurs est infinie. Leur colère est légitime. Chaque jour des exploitations ferment. Tous les deux jours, un agriculteur se suicide.

Depuis plusieurs mois, les filières du lait et de l’élevage traversent une crise particulièrement grave, récemment accentuée par la grippe aviaire dans le Sud-Ouest.

Le ministre de l’agriculture avait annoncé l’été dernier un plan de soutien à l’agriculture. Cependant, aujourd’hui, rien n’est réglé. Soit, 700 millions d’euros ont été débloqués, mais c’est un pansement sur une jambe de bois !

Quelle est la vision du Gouvernement pour l’agriculture française ? Quel est son cap ?

Que 15 000 dossiers sont éligibles au fonds d’allégement des charges, est-ce la source d’une quelconque fierté ? Accepteriez-vous de travailler et de vendre à perte, monsieur le secrétaire d’État ?

Toute la filière d’élevage française est menacée alors qu’elle est déterminée à réussir. Prenez vos responsabilités !

La majorité sénatoriale a pris les siennes en adoptant une proposition de loi courageuse qui a malheureusement été rejetée hier par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale. (Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.) C’est une marque de mépris à l’égard des agriculteurs. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Élisabeth Doineau ainsi que MM. Jean-François Longeot et Jean-Claude Luche applaudissent également.)

Ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement… Les agriculteurs ont droit à un ministre à plein temps !

Prenez vos bottes, allez dans les fermes, sortez de Paris, sillonnez la France ! À laisser l’agriculture en jachère, vous récoltez la colère. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

La France agricole est debout, mais elle est à bout. Je n’ai qu’une question : qu’attendez-vous pour agir enfin efficacement en adoptant des mesures structurelles, et non plus conjoncturelles ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Jean-Claude Luche et Jean-François Longeot applaudissent également.)

M. Jeanny Lorgeoux. C’est de la démagogie !

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice, faisons attention, face à une situation aussi grave, à poser sereinement les diagnostics et à faire des propositions. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – MM. Alain Bertrand et Joël Labbé applaudissent également.)

La crise agricole, vous le savez, n’est pas seulement française. Elle est au moins européenne et vraisemblablement mondiale.

Le Gouvernement a réagi de façon à la fois conjoncturelle et structurelle, vous le savez, depuis l’été dernier. J’en veux pour preuve que 15 000 dossiers sont d’ores et déjà effectivement payés, mais notre action ne s’arrête pas là.

De nouvelles propositions de simplification de normes seront présentées avant la fin du mois de février, normes dont je ne crois pas que ce soit forcément ce gouvernement qui les ait accumulées en quelques années (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) : vous avez contribué à nombre d’entre elles, chers amis de l’opposition d’aujourd'hui et de la majorité d’hier… (Mme Sophie Primas s’exclame.)

Stéphane Le Foll rencontrera le commissaire européen sur la question de l’étiquetage et sur des mesures de gestion de marché puisque, vous le savez, c’est sa responsabilité.

Par ailleurs, le Gouvernement appelle solennellement les entreprises de la transformation et de la distribution à un esprit de solidarité, car voilà les mesures structurelles qui sont nécessaires : chacun doit prendre ses responsabilités (Mme Michelle Meunier et M. Alain Bertrand applaudissent.) et, de ce point de vue, les choses bougent. Cinq groupements de producteurs porcins bretons viennent de créer un outil commercial commun. Un grand distributeur, une laiterie et une organisation de producteurs de lait du Centre viennent de signer un contrat tripartite. Des producteurs de porcs ont signé un contrat avec un grand transformateur.

Dans d’autres pays européens, des fonds privés d’aide aux éleveurs, alimentés par une contribution volontaire des distributeurs, ont été mis en place, avec l’accord des autorités de la concurrence. Le Gouvernement invite donc les enseignes de la distribution à s’engager dans cette démarche en concertation avec la profession agricole.

J’ajouterai que si l’ensemble de la représentation nationale participait à ce mouvement plutôt que de se leurrer en faisant de fausses critiques et de mauvaises propositions (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.), nous serions beaucoup plus forts…

M. le président. Il vous faut conclure, monsieur le secrétaire d'État.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. … pour affronter une crise stratégique. Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs,…

M. le président. Concluez !

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. … l’élevage français a de l’avenir à condition que l’on se mobilise ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour la réplique.

Mme Corinne Imbert. Monsieur le secrétaire d’État, la représentation nationale a contribué à faire des propositions de fond, notamment au travers de la proposition de loi…

Mme Corinne Imbert. … que la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale a détricotée hier.

Le vrai courage serait de garantir une compétitivité favorisant des prix rémunérateurs. Le vrai courage serait de défendre la préférence européenne et d’encourager les circuits courts. Le vrai courage serait de soutenir l’investissement pour les agriculteurs.

M. Didier Guillaume. Avec quels financements ?

Mme Corinne Imbert. Alors, agissez ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

protocole relatif à la protection de l'enfance

M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour le groupe socialiste et républicain – pour deux minutes, règle, je le rappelle, qui s’applique à tous.

Mme Michelle Meunier. Madame la secrétaire d'État chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie, l’application par la France de la convention internationale des droits de l’enfant a été examinée les 13 et 14 janvier dernier à l’Organisation des Nations unies. Cette audition intervient vingt-cinq ans après la ratification par la France de cette convention en novembre 1989.

Force est de constater que l’engagement de la France en matière de reconnaissance des droits des enfants est longtemps resté plus symbolique que concret. Cet engagement a en effet souvent eu du mal à se traduire dans la vie quotidienne des enfants et de leurs familles.

Le comité des droits de l’enfant de l’ONU avait d’ailleurs pointé plusieurs dysfonctionnements graves et formulé un certain nombre de critiques lors de la précédente audition de la France en 2009, notamment sur la situation des enfants touchés par la pauvreté, en particulier ceux qui sont issus de l’immigration ou victimes de discriminations particulières, sur les difficultés de scolarisation des enfants handicapés ou encore sur les problèmes de santé mentale et de toxicomanie des adolescents.

Il fallait donc agir pour rectifier le tir et améliorer les conditions de vie de ces enfants. Il fallait que la France prenne ses responsabilités et gagne en exemplarité.

Depuis 2012, au travers de la lutte contre la pauvreté, par la refondation de l’école ou encore par la création de solutions d’accueil des jeunes enfants, le Gouvernement agit. Faire de l’enfance une priorité, madame la secrétaire d'État, c’est aussi le sens de votre « feuille de route 2015–2017 » en matière de protection de l’enfance en danger.

Bien sûr, il reste de grands chantiers devant nous et des insatisfactions demeurent alors que près d’un enfant sur cinq vit sous le seuil de pauvreté ou que le nombre de mineurs isolés étrangers ne cesse de progresser en France, situation à laquelle les départements ne peuvent plus faire face seuls.

Madame la secrétaire d'État, le comité publiera ses observations et recommandations dans quelques jours, mais peut-être pouvez-vous d’ores et déjà nous dire quelles sont les pistes d'actions que le Gouvernement compte mener à bien pour garantir sur notre territoire les droits des enfants, de tous les enfants. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mmes Éliane Assassi et Élisabeth Doineau ainsi que M. Joël Labbé applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie.

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie. Madame la sénatrice, en effet, la France a été auditionnée voilà deux semaines par le comité des droits de l’enfant de l’ONU pour examiner la conformité de nos politiques publiques aux engagements que nous avons pris en application de la convention internationale des droits de l’enfant.

C’est un exercice récurrent. Le précédent rapport avait eu lieu en 2009 et avait conduit à ce que nous nous fassions assez sérieusement tancer par l’ONU, probablement en partie pour des raisons de forme et pour la désinvolture qu’avait manifestée la France à l’époque à l’égard de cet exercice,…

M. Marc Daunis. À l’époque…

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. … mais aussi pour un certain nombre de nos politiques.

Il y a deux semaines, je me suis attachée à montrer au comité des droits de l’enfant que, sur les points qui avaient donné lieu à des remarques, nous avions progressé, notamment sur la mise en œuvre d’une politique globale en faveur de l’enfance et d’une stratégie interministérielle conduite par le ministère des affaires sociales, et plus particulièrement par mon secrétariat d'État. L’introduction de l’enfance dans l’intitulé de celui-ci en témoigne.

Nous avons également progressé en matière de lutte contre la pauvreté par la mise en place d’une politique familiale plus juste et plus redistributive en faveur des familles les plus en difficulté.

J’ai aussi fait valoir la priorité que nous donnons en France à l’école, en citant en particulier la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, la réforme des rythmes scolaires, plus adaptés aux rythmes de l’enfant, la création de postes dans l’éducation et en faveur de la scolarisation des enfants handicapés.

Enfin, la réforme de la protection de l’enfance, dont, avec notre ancienne collègue Huguette Dini, vous avez pris l’initiative, correspond aussi à ce besoin d’un meilleur pilotage et d’une plus grande attention à l’enfant et à sa parole.

Le comité des droits de l’enfant a fait remarquer qu’il était très exigeant à l’égard de la France en raison à la fois de notre place dans l’histoire des droits de l’homme…

M. le président. Il faut conclure !

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. … et de notre place économique, mais il s’interroge aussi sur les réticences psychologiques, symboliques qui sont encore à l’œuvre en France en matière de droits de l’enfant. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)

nouvelle-calédonie

M. le président. La parole est à M. Pierre Frogier, pour le groupe Les Républicains.

M. Pierre Frogier. Ma question, à laquelle j’associe mon collègue Hilarion Vendegou, s’adresse à Mme la ministre des outre-mer.

Madame la ministre, les conditions dans lesquelles les militaires de la gendarmerie exercent leurs responsabilités et leurs missions en Nouvelle-Calédonie m’amènent à m’adresser à vous.

Après une année 2015 marquée par une augmentation des faits de violence à l’égard des forces de l’ordre, dont plusieurs par armes à feu sur les forces de gendarmerie, la situation s’est de nouveau dégradée la semaine dernière, à la suite de l’arrestation des auteurs d’un crime crapuleux commis voilà moins d’un mois dans le village de Thio, ce village resté dans nos mémoires pour avoir été pris en otage alors que débutait la période dite des événements, voilà trente ans. La famille de la victime de ce crime avait déjà été meurtrie alors… Les criminels seront jugés !

Je veux profiter de la parole qui m’est donnée pour exprimer ici, devant la représentation nationale, notre empathie à l’égard des militaires blessés et saluer le professionnalisme et le sang-froid des forces de l’ordre.

Je fais cependant deux constats : les auteurs des agressions – souvent des mineurs ou de jeunes majeurs – contre ces dernières restent pour la plupart impunis ; les zones dans lesquelles les agressions se multiplient sont connues depuis longtemps.

Dans moins d’une semaine se réunira à Paris, sous l’autorité du Premier ministre, le comité des signataires de l’accord de Nouméa. Je ne doute pas, madame la ministre, de l’attachement du gouvernement auquel vous appartenez au processus engagé en 1988 et visant à bâtir entre toutes les communautés de Nouvelle-Calédonie une communauté de destin. Mais ce processus reste fragile et peut être mis en péril par un niveau de violence rarement atteint.

M. Marc Daunis. La question !

M. Pierre Frogier. À deux ans d’échéances majeures pour son avenir, la population de Nouvelle-Calédonie a droit à la sécurité, comme tous nos concitoyens partout ailleurs sur le territoire de la République. Elle a particulièrement besoin de sérénité pour aborder dans la paix et la confiance réciproques les débats qui s’annoncent.

M. Marc Daunis. La question !

M. Daniel Raoul. C’est incroyable !

M. Yves Daudigny. Il y a des chronomètres de gauche et des chronomètres de droite !

M. Pierre Frogier. Ma question est simple : avez-vous conscience de la fragilité du processus né de l’accord de Nouméa ? Si oui, ne serait-il pas utile d’installer auprès du haut-commissaire un dispositif spécifique dédié à la sécurité publique afin d’assainir ces zones de non-droit connues de tous ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Vincent Capo-Canellas et Jean-Marie Bockel applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.

Mme George Pau-Langevin, ministre des outre-mer. Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser le Premier ministre, qui ne pouvait être présent cet après-midi, mais nous avons préparé avec lui, en coordination, évidemment, avec le ministre de l’intérieur, les éléments de réponse à votre question.

Vous avez raison de dire que ce qui s’est passé le 30 décembre est grave : nous suivons avec préoccupation les incidents qui se sont produits en Nouvelle-Calédonie et qui nous rappellent un passé douloureux.

Nous saluons l’action des forces de l’ordre, et notamment des gendarmes, et nous rendons hommage à leur engagement et à leur sang-froid. Je peux vous assurer qu’ils sont pleinement mobilisés en Nouvelle-Calédonie pour faire face à la situation.

Les moyens mis en œuvre sont importants. Il y a en permanence, vous le savez, quatre escadrons de gendarmes mobiles ; 468 gendarmes sont affectés en Nouvelle-Calédonie, plus des policiers.

Mais il est vrai aussi, comme vous le soulignez, que la sécurité est l’affaire de tous. Il nous faut donc bâtir avec les élus locaux des actions sur le terrain qui permettent la prévention, notamment en direction de ces jeunes mineurs trop souvent à la dérive qui font partie de ceux qui posent problème. Nous avons été saisis de projets, par exemple par le maire de Mont-Dore, où j’ai eu l’occasion de me rendre.

Vous parlez d’un dispositif spécifique à mettre en œuvre aux côtés du haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie. Il faudra que nous puissions examiner cette proposition.

Nous sommes toutes et tous dans cet hémicycle très conscients de la fragilité de la situation en Nouvelle-Calédonie, situation que nous suivons, je l’ai dit, avec beaucoup d’attention et de détermination. C'est la raison pour laquelle la réunion du comité des signataires de l’accord de Nouméa la semaine prochaine est très importante. Nous comptons sur les participants pour bâtir ce destin commun pour la Calédonie qui est tellement important. Nous comptons sur vous, mesdames, messieurs les sénateurs, et nous espérons qu’avec votre aide nous parviendrons à avancer dans le bon sens. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Mes chers collègues, je vous rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu mardi prochain 2 février, de seize heures quarante-cinq à dix-sept heures trente, et seront retransmises sur Public Sénat et le site internet du Sénat.

Avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux quelques instants ; nous les reprendrons à seize heures quinze.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de Mme Isabelle Debré.)

PRÉSIDENCE DE Mme Isabelle Debré

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

9

Candidature à une délégation sénatoriale

Mme la présidente. J’informe le Sénat que le groupe Les Républicains a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu’il propose pour siéger à la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes en remplacement de M. Alain Houpert, démissionnaire.

Cette candidature a été affichée et la nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.

10

Article 2 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
Article 2

Sécurité publique dans les transports collectifs de voyageurs

Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Mme la présidente. Nous reprenons la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs.

Dans la suite de la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen des amendements déposés à l’article 2.

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
Article additionnel après l’article 2

Article 2 (suite)

Mme la présidente. L'amendement n° 31 rectifié, présenté par MM. Bigot, J.C. Leroy, Filleul et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

« Sans préjudice des compétences des inspecteurs et contrôleurs du travail, ils peuvent demander la communication du registre unique du personnel prévu aux articles L. 1221-13 et L. 1221-15 du code du travail et de tous autres registres, livres et documents mentionnés aux articles L. 3171-3, L. 8113-4 et L. 8113-5 du même code ainsi que recueillir, sur convocation ou sur place, les renseignements et justifications nécessaires.

« En présence de l'occupant des lieux ou de son représentant, ils peuvent, entre huit heures et vingt heures, accéder aux locaux dans lesquels est habituellement exercée l’activité des agents des services internes de sécurité visés au premier alinéa ; ils peuvent également y accéder à tout moment lorsque l'exercice de cette activité est en cours. Ils ne peuvent accéder à ceux de ces locaux qui servent de domicile.

« Un compte rendu de visite est établi, dont copie est remise immédiatement au responsable de l'entreprise et adressé aux autorités mentionnées au premier alinéa.

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Je ne suis pas sûr que cet amendement puisse encore s’intégrer dans le texte, l’adoption de l’amendement n° 37 présenté par le Gouvernement ayant modifié la rédaction de l’article 2.

Je vais néanmoins le soutenir, parce qu’il s’agit d’une proposition de modification de l’alinéa 8 – ce qui, à mon sens, devrait pouvoir être possible – qui, si mes souvenirs sont exacts, a reçu un avis favorable de la commission.

L’article 2 de la proposition de loi instaure un encadrement spécifique relatif au contrôle administratif des activités opérationnelles des services de sécurité de la SNCF et de la RATP.

Le présent amendement tend à aligner le régime de contrôle des agents de sécurité des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP sur qui est celui mis en place à l’article L. 611-2 du code de la sécurité intérieure pour le contrôle des activités de surveillance et de gardiennage. Il vise notamment à étendre la possibilité de communiquer les registres uniques du personnel aux inspecteurs et contrôleurs du travail, ainsi que le recours à des mesures particulières de perquisition applicables aux agents des services de sécurité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Cet amendement tend à renforcer le dispositif adopté par la commission en détaillant le contrôle qui peut être effectué par les agents des forces de l’ordre dans le cadre des missions de contrôle des agents de services internes. La commission émet donc un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification. Vous proposez d’ajouter des dispositions supplémentaires relatives au contrôle administratif des agents du Groupe de protection et de sécurisation des réseaux, le GPSR.

Ces dispositions ne nous semblent pas adaptées au contrôle opérationnel des agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP. En effet, l’article que vous proposez de transposer a été conçu pour s’appliquer au secteur de la sécurité privée, dont certaines entreprises ont pu adopter des pratiques peu respectueuses du code du travail.

Il en va différemment à la SNCF et à la RATP. Il ne nous paraît donc pas nécessaire que les agents de la Surveillance générale, la SUGE, et du GPSR soient soumis à des règles de droit du travail différentes de celles qui sont applicables aux autres agents de la SNCF et de la RATP.

Le Gouvernement a en outre proposé un amendement visant à réécrire l’article 2 de la proposition de loi. Dans ce cadre, le contrôle opérationnel mené par les forces de l’ordre sera davantage axé sur les prérogatives particulières des agents de la SUGE et du GPSR.

Pour ces raisons, je sollicite le retrait de cet amendement.

Mme la présidente. Monsieur Bigot, l'amendement n° 31 rectifié est-il maintenu ?

M. Jacques Bigot. Je le maintiens, madame la présidente, car je pense qu’il peut toujours s’articuler à l’article 2 malgré les modifications qui sont intervenues.

Il me semble logique que les agents de la SNCF et de la RATP, bien qu’ils aient un statut différent de celui des salariés des entreprises privées, soient soumis à ce contrôle, qu’il soit possible de vérifier certains documents et de procéder à des visites domiciliaires. Il s’agirait d’une protection supplémentaire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 31 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 43, présenté par M. Bonhomme, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 10

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° Le même chapitre est complété par un article L. 2251-… ainsi rédigé :

« Art. L. 2251-… – Les compétences dévolues au représentant de l’État dans le département par le présent chapitre sont exercées dans les départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, ainsi que dans les transports en commun de voyageurs par voie ferrée de la région d'Île-de-France, par le préfet de police et dans le département des Bouches-du-Rhône par le préfet de police des Bouches-du-Rhône. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Bonhomme, rapporteur. Cet amendement est devenu sans objet à la suite de l’adoption de l’amendement n° 37 du Gouvernement. Aussi, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 43 est retiré.

Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2
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Article 3

Article additionnel après l’article 2

Mme la présidente. L'amendement n° 27, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l'article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le quatrième alinéa de l’article L. 632-2 du code de la sécurité intérieure, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 4° De six parlementaires. »

La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.

M. Jean-Pierre Bosino. La volonté d’extension des compétences du Conseil national des activités privées de sécurité, le CNAPS, ne peut se faire sans un renforcement du contrôle démocratique.

Au vu de l’actualité, malheureusement, nous pensons qu’il est important d’assurer la présence de parlementaires au sein du CNAPS. En effet, l’éthique est aujourd’hui plus que jamais une exigence qui émane avant tout d’une demande citoyenne d’exemplarité ou d’honorabilité. Cela est d’autant plus important que le marché de la sécurité privée est en pleine expansion, son chiffre d’affaires global s’élevant à près de 5 milliards d’euros.

Ce marché compte près de trois mille entreprises, mais parmi celles-ci seulement trente, soit 1 %, emploient plus de 500 salariés et réalisent 55 % du chiffre d’affaires global de la profession. En outre, les marchés publics représentent plus de 25 % du chiffre d’affaires global de la branche et la sous-traitance y est malheureusement une pratique trop courante.

Pour toutes ces raisons, il nous semble pertinent que la représentation nationale puisse siéger au sein du CNAPS.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Le fait d’introduire la présence de parlementaires dans ce type d’organismes nous paraît contraire à l’objectif visé.

Les parlementaires disposent en effet d’un pouvoir de contrôle, qu’ils l’exercent dans le cadre d’une commission d’enquête ou dans le cadre du simple droit d’interpellation. Systématiser ce genre de situation reviendrait à congestionner et à dénaturer le travail parlementaire.

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 27.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l’article 2
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
Article 3 bis

Article 3

L’article L. 2251-3 du code des transports est ainsi rédigé :

« Art. L. 2251-3. – La tenue et la carte professionnelle dont les agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la Régie autonome des transports parisiens sont obligatoirement porteurs dans l’exercice de leurs fonctions ne doivent entraîner aucune confusion avec celles des agents des services publics, notamment des services de police.

« Ces agents peuvent être dispensés du port de la tenue dans l’exercice de leurs fonctions.

« En cas d’intervention, ces agents sont porteurs, de façon visible, de l’un des moyens matériels d’identification dont ils sont dotés, qui ne doivent entraîner aucune confusion avec les moyens utilisés par les agents des services publics.

« Les conditions d’application du présent article sont fixées par voie réglementaire. » – (Adopté.)

Article 3
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Article additionnel après l'article 3 bis

Article 3 bis

Le chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code de la sécurité intérieure est complété par un article L. 114-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 114-2.  Les décisions de recrutement et d’affectation concernant les emplois relevant du domaine du transport collectif de personnes peuvent être précédées d’enquêtes administratives destinées à vérifier que le comportement des personnes intéressées n’est pas incompatible avec l’exercice des fonctions ou des missions envisagées. L’autorité administrative compétente informe l’employeur du résultat de l’enquête.

« Si le comportement des personnes intéressées est devenu incompatible avec l’exercice des missions pour lesquelles elles ont été recrutées ou affectées, une enquête administrative peut être menée à la demande de l’employeur. L’autorité administrative avise sans délai l’employeur du résultat de l’enquête.

« Un décret en Conseil d’État fixe la liste des fonctions concernées et détermine les modalités d’application du présent article. »

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 3 rectifié, présenté par MM. Nègre, Revet et Charon, n’est pas soutenu.

L'amendement n° 41, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le chapitre premier du titre III du livre VI de la première partie du code des transports est complété par un article L. 1631-… ainsi rédigé :

« Art. L. 1631-… – Le recrutement, l’affectation ou le maintien d’une personne, au sein d’une entreprise de transport public de personnes, ou d’une entreprise de transport de marchandises dangereuses soumise à l’obligation d’adopter un plan de sûreté, sur une fonction en lien direct avec la sécurité d’un grand nombre de personnes, peut être soumis à l’avis de l’autorité administrative.

« Cet avis indique si le comportement de cette personne donne des raisons sérieuses de penser qu’elle est susceptible, à l’occasion de ses fonctions, de commettre un acte portant gravement atteinte à la sécurité ou à l’ordre publics.

« Il est rendu à la suite d’une enquête administrative qui peut donner lieu à la consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire et de traitements automatisés de données à caractère personnel relevant de l’article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, à l’exception des fichiers d’identification.

« La personne concernée est informée qu’elle est susceptible de faire l’objet de l’enquête administrative mentionnée au deuxième alinéa du présent article.

« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. Il établit notamment la liste des fonctions pour lesquelles la procédure mentionnée au premier alinéa peut être mise en œuvre, ainsi que la liste des traitements automatisés de données pouvant faire l’objet d’une consultation dans ce cadre. »

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Les exploitations de transports collectifs sont de plus en plus souvent confrontées à des phénomènes de radicalisation et se trouvent démunies pour répondre à ce type de risque. Des mesures de criblage existent déjà, mais elles ne concernent que les agents des services de sécurité de la SNCF et de la RATP.

La loi prévoit en effet que les agents de la SUGE et les agents du GPSR font l’objet d’une enquête administrative destinée à vérifier que leur comportement n’est pas incompatible avec l’accomplissement de leur mission. L’article L. 2251-2 du code des transports impose un contrôle de moralité.

Cependant, le sujet dépasse largement le cadre des services internes de sécurité et des opérateurs historiques que sont la SNCF et la RATP. Cette faculté de recourir à des mesures de criblage doit être élargie, nous semble-t-il, non seulement à certaines fonctions sensibles, mais aussi à tous les opérateurs de transport, ainsi qu’au transport de certaines marchandises dangereuses.

Le présent amendement vise donc à réécrire l’article 3 bis sur les enquêtes administratives pouvant être réalisées sur certaines personnes appelées à exercer, dans les entreprises de transport public et de personnes, des fonctions en lien direct avec la sécurité d’un grand nombre de personnes.

Il vise également à clarifier les conditions dans lesquelles l’avis de l’autorité administrative peut être sollicité : en amont du recrutement d’une personne, mais aussi à l’occasion d’une nouvelle affectation ou en cours d’exercice des fonctions de celle-ci. L’autorité administrative pourra donc être sollicitée à ces trois occasions.

Le présent amendement tend par ailleurs à étendre le dispositif aux entreprises de transport de marchandises dangereuses soumises à l’obligation d’adopter un plan de sûreté.

Enfin, il tend à préciser les objectifs de la procédure d’avis : l’avis de l’autorité administrative permet de vérifier que l’agent n’est pas susceptible de commettre, dans l’exercice de ses fonctions, un acte portant gravement atteinte à la sécurité publique, à l’ordre public ou à la sécurité des personnes. Nous proposons donc d’élargir l’objectif de cet avis.

Le décret d’application de cet article sera soumis à l’avis préalable de la CNIL, dès lors qu’est en cause la consultation de fichiers intéressant la sécurité publique ou la sûreté de l’État mentionnés à l’article 26 de la loi de 1978.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. La commission n’a pas pu se prononcer sur cet amendement.

Néanmoins, à titre personnel, j’y suis défavorable dans la mesure où il tend à réécrire quelque chose qui existe déjà.

De plus, la partie concernant l’information de la personne qui est susceptible de faire l’objet de l’enquête administrative mentionnée au deuxième alinéa me paraît dans sa rédaction imprécise et source de confusion, voire contre-productive par rapport à l’objectif affiché.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 41.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 33 rectifié, présenté par MM. Bigot, J.C. Leroy, Filleul et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La personne concernée est informée de l’enquête administrative dont elle fait l’objet.

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Il paraît conforme aux règles d’un État de droit qu’une personne visée par une enquête administrative en soit informée. Il n’y a pas de raison qu’elle ne le soit pas.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Favorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. J’aimerais avoir une précision. La commission pourrait-elle justifier son avis défavorable sur cet amendement ?

Pour ma part, je rejoins l’argumentaire défendu par notre collègue Jacques Bigot : il me paraît évident d’informer – ni plus ni moins – la personne visée par une enquête administrative. L’avis défavorable de la commission me laisse, je l’avoue, très perplexe.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. François Bonhomme, rapporteur. Cet amendement prévoit que la personne faisant l’objet d’une enquête administrative est informée de la situation, sur le modèle de ce qui existe pour l’enquête réalisée pour accéder aux points d’importance vitaux de l’entreprise, par exemple.

Néanmoins, il nous paraît contre-productif de prévenir cette personne qu’elle fait l’objet d’une telle enquête, alors même que les conclusions ne sont pas encore connues. En tout état de cause, si l’enquête conclut à un déplacement ou à un licenciement de la personne, celle-ci en sera nécessairement informée.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 33 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3 bis.

(L'article 3 bis est adopté.)

Article 3 bis
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Article 4 (Texte non modifié par la commission)

Article additionnel après l'article 3 bis

Mme la présidente. L'amendement n° 13 rectifié, présenté par MM. Karoutchi et Houel, Mme Mélot, MM. Cornu et Vaspart, Mme Cayeux, MM. Laufoaulu, Doligé, Leleux, Chaize, Cambon, D. Laurent, Lefèvre et Mayet, Mme Primas, MM. Mouiller, Milon et Houpert, Mme Deroche, MM. B. Fournier et Joyandet et Mmes Lopez et Gruny, est ainsi libellé :

Après l'article 3 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le titre VI du livre II du code de la sécurité intérieure est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :

« Chapitre IV

« Partage d’informations en matière de sécurité intérieure

« Art. L. 264. – Le représentant de l’État dans le département, sur la base des informations transmises par les services de police ou de gendarmerie, transmet aux employeurs publics ainsi qu’aux employeurs de secteurs dits sensibles dont la liste est définie par décret en Conseil d’État la liste de ceux de leurs salariés qui font l’objet d’un signalement “fiche S”. »

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. On le répète depuis ce matin, les transports publics sont, par définition, anxiogènes dans la mesure où ils sont une cible potentielle et facile du terrorisme, qu’il s’agisse du métro, des RER ou des trains. Des attentats dans les transports ont malheureusement eu lieu ailleurs, et notre pays en a également connu dans le passé. C’est donc là un vrai sujet.

Les directions de la SNCF et de la RATP le reconnaissent, elles ne savent pas, ces informations ne leur étant pas communiquées, qui, parmi leurs personnels, notamment de conduite, fait l’objet d’une fiche dite « S » ou « S+ » – il paraît que ces fiches existent maintenant –, qui concerne les personnes susceptibles d’avoir un comportement particulièrement dangereux. Excusez-moi de vous le dire : je ne suis pas sûr que cela contribue à rassurer l’usager !

Dans la mesure où nos services sont au courant des activités non pas de l’ensemble des fichés S, mais des plus dangereux d’entre eux, ne serait-il pas normal d’en informer – elles décideront ensuite de la suite à donner – les entreprises de transport qui emploient certains d’entre eux sans le savoir, dans la mesure où ces derniers peuvent évidemment représenter un véritable danger ?

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Bien que je comprenne les motivations qui le sous-tendent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui prévoit la possibilité pour le préfet de transmettre aux employeurs publics et aux entreprises privées de secteurs sensibles les informations relatives au fichage de leurs employés. D’ailleurs, un amendement identique a été repoussé par la commission.

En effet, cette obligation aurait des effets, semble-t-il, très négatifs sur le fonctionnement du renseignement en France, avec la divulgation des informations contenues dans les fiches S.

Tout l’intérêt de ces fiches réside justement, par nature, allais-je dire, dans le fait que les personnes qui en font l’objet ne le savent pas. L’adoption de cet amendement aurait des effets contraires à ceux qui sont recherchés et risquerait d’affaiblir durablement le renseignement en France.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis de la commission, sur la base de la même argumentation.

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, je suis admiratif ! Enfin, quasi admiratif !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Merci !

Mme Esther Benbassa. Cela ne se voit pas !…

M. Roger Karoutchi. Alors, il vaut mieux ne rien savoir ? Il est préférable de laisser les services de renseignement agir comme ils le font actuellement ? Mais que dira-t-on si jamais un attentat est commis ? Qu’on ne savait pas ? Mais, mes chers collègues, figurez-vous que la SNCF et la RATP s’empresseront de dire qu’elles n’étaient pas informées !

Nos services de renseignement ne devraient surtout pas diffuser quoi que ce soit ? Mais si l’entreprise ne sait pas qu’elle emploie une personne particulièrement dangereuse, susceptible de commettre un attentat, ne serait-ce que potentiellement, que se passera-t-il en cas de problème ? Que direz-vous alors aux usagers ? Que vous avez agi ainsi pour protéger la qualité des services de renseignement ? Sincèrement, dans quel monde vivons-nous ?

Je respecte la liberté de chacun, mais si c’est de cette façon que vous faites la guerre au terrorisme, excusez-moi de vous le dire, il s’agit franchement d’une guerre en dentelle !

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, j’ai du mal à comprendre le cheminement de votre raisonnement.

M. Roger Karoutchi. C’est dommage !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Je vous ai écouté avec attention, et j’essaie de comprendre la cohérence qui est la vôtre d’un article à l’autre, d’un amendement à l’autre. Moi, j’essaie d’être cohérente.

Voilà quelques minutes, je vous ai proposé à l’article 3 bis un amendement concernant ce que nous appelons « le criblage ».

M. Roger Karoutchi. Je n’ai pas voté contre !

Mme Catherine Procaccia. Non, il n’a pas voté contre !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Cela veut dire que vous avez compris le fond de cet amendement et que vous êtes d’accord avec celui-ci.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Mais peu importe, car, comme vous l’avez constaté vous-même, cet amendement a été repoussé par la Haute Assemblée ! Moi je ne détaille pas les positions de chacun.

Toujours est-il que je vous ai présenté précédemment, au nom du Gouvernement, en essayant d’être pédagogique et précise, un amendement visant à élargir considérablement le processus, afin de bien prendre en compte tous les risques qui peuvent apparaître lors du recrutement, dans l’exercice des fonctions courantes, c'est-à-dire à tout moment – on peut difficilement faire plus large ! –…

M. Roger Karoutchi. Eh oui ! Et je n’ai pas voté contre, je le répète !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. … et lors des mutations.

Avec cet amendement, nous avions veillé à couvrir le champ le plus large pour répondre, monsieur le sénateur,…

M. Roger Karoutchi. C’est pour cette raison que je n’ai pas voté contre !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. … comme il le fallait, à la nécessité de faire preuve de la plus grande vigilance, une vigilance constante, sans relâchement aucun, pour atteindre l’objectif que nous partageons avec vous.

L’amendement que vous proposez prévoit la transmission des fiches S, qui constituent des signalements. Or, comme l’a relevé à juste titre M. le rapporteur, ces fiches doivent rester confidentielles (M. Roger Karoutchi rit) et ne doivent pas être diffusées.

M. Roger Karoutchi. Les personnes fichées peuvent donc conduire des trains, des métros et des RER !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. On fournit à l’employeur la liste des personnes faisant l’objet d’un signalement, mais une personne privée n’a pas à connaître les éléments de fond dont disposent les services de renseignement.

Je persiste à penser que, s’il avait été adopté,…

M. Roger Karoutchi. Mais il ne l’a pas été !

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. … l’amendement du Gouvernement vous aurait donné toute satisfaction, monsieur le sénateur, et je m’en serais réjouie avec vous.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.

Mme Sophie Primas. Si on lit bien l’amendement n° 13 rectifié, présenté par M. Karoutchi, le représentant de l’État transmet aux employeurs publics la liste de ceux de leurs salariés qui font l’objet d’un signalement « fiche S », et non pas le contenu de la fiche.

M. Roger Karoutchi. Absolument !

Mme Sophie Primas. Ce n’est pas tout à fait la même chose, c’est déjà un criblage. Il s’agit d’alerter l’employeur pour éviter que celui-ci ne nomme cette personne à un poste sensible.

Peut-être auriez-vous préféré, madame la secrétaire d’État, que l’amendement du Gouvernement soit adopté, ce que je comprends, mais, pour ma part, je voterai l’amendement de M. Karoutchi.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Vous faites comme vous voulez !

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Je rejoins les propos de ma collègue Sophie Primas. On parle là d’entreprises qui comptent non pas cinquante personnes, mais des milliers. Comme vient de le souligner ma collègue, cet amendement vise à transmettre la liste des salariés fichés.

Vous parlez de renseignement, madame la secrétaire d’État. Mais l’entreprise doit pouvoir signaler indirectement aux services de renseignement que le comportement de ladite personne ne pose absolument aucun problème. Les usagers des transports en commun que nous sommes seraient ainsi sécurisés.

Entendre que des entreprises telles que la SNCF, Air France ou encore Aéroports de Paris, par exemple, ne savent pas qu’elles comptent peut-être parmi leurs personnels, depuis quinze ou vingt ans, une personne susceptible de « basculer » n’est pas de nature à nous rassurer. D’ailleurs, cela ne nous rassure pas non plus quant au rôle de l’État.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. François Bonhomme, rapporteur. J’ai bien entendu tous les arguments qui ont été développés. Notre collègue Roger Karoutchi est le porte-parole du sens commun.

Néanmoins, j’estime que les services de renseignement doivent conserver des prérogatives qui leur sont propres. D’ailleurs, les arguments avancés sont tout à fait réversibles dans la mesure où une divulgation systématique de l’information pourrait entraîner des dommages, qui ne seraient pas forcément réparables.

Par ailleurs, cela constituerait un précédent fâcheux : une divulgation systématique de la fiche S pourrait être difficile à gérer dans d’autres cas.

M. Roger Karoutchi. Il ne s’agit pas de divulguer la fiche !

M. François Bonhomme, rapporteur. De fait, les prérogatives des services de renseignement doivent demeurer en l’état.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Bosino, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Bosino. J’entends l’argumentation développée par M. Karoutchi. En tant qu’utilisateur des transports en commun, je peux comprendre l’inquiétude qu’il a exprimée. Mais il y a une difficulté, et les propos du rapporteur ne m’ont pas convaincu.

Certes, la divulgation du secret peut poser problème, mais là n’est pas l’essentiel.

M. Jean-Pierre Bosino. Que fait l’entreprise publique dès lors qu’elle est informée que l’un de ses salariés fait l’objet d’une fiche S ?

M. Roger Karoutchi. Elle le transfère dans les services administratifs !

M. Jean-Pierre Bosino. Que signifie cette fiche ? À partir de quels éléments considère-t-on qu’un individu est susceptible de commettre un attentat ? L’entreprise engage-t-elle une procédure disciplinaire en cas de suspicion pour s’en séparer ?

M. Jean-Pierre Bosino. Que fait-on de ce salarié ?

M. Roger Karoutchi. On le transfère d’un poste de conduite à un poste administratif ! C’est plus sûr quand même !

M. Jean-Pierre Bosino. Certes, mais il faut des éléments concrets. En tout état de cause, il s’agit quand même d’une procédure disciplinaire.

M. Jean-Pierre Bosino. Le transfert d’un salarié sur un autre poste nécessite des éléments concrets, avec une procédure contradictoire pour le salarié. Voilà ce qui me pose problème dans cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. On l’oublie, la fiche S doit rester secrète.

M. Roger Karoutchi. Personne ne veut la divulguer !

M. Jacques Bigot. Son contenu n’est pas connu, y compris dans cet hémicycle. Cette fiche peut effectivement faire naître des inquiétudes plus ou moins fortes sur une telle ou telle personne.

Lors de l’embauche d’une personne, l’enquête administrative qui sera diligentée – la personne n’en sera même pas informée dans la mesure où notre amendement a été repoussé – permettra à l’autorité administrative de donner des renseignements qui seront utiles à l’employeur.

Mais si la personne est déjà en poste, sur quels éléments l’employeur devra-t-il se fonder pour régler le problème qui se posera en termes de droit du travail ? La simple communication d’une fiche S ou même d’éléments y figurant ne sera pas suffisante.

Le vrai sujet est le suivant. Lorsque le représentant de l’État estimera qu’il doit prendre des mesures au vu des renseignements figurant dans la fiche S, et qui sont confidentiels, quels éléments d’information pourra-t-il porter à la connaissance du procureur de la République pour obtenir, le cas échéant, des précisions ?

M. Roger Karoutchi. C’est autre chose !

M. Jacques Bigot. L’adoption de cet amendement ne permettra pas de de résoudre cette difficulté extrêmement complexe.

Par ailleurs, si l’on devait légalement obliger le représentant de l’État à communiquer des renseignements sur des personnes fichées S, on peut être sûr que les services de renseignement auraient des fiches S 1 ou S+, qui, elles, ne seraient pas visées par ce texte.

M. Roger Karoutchi. Peut-être !

M. Jacques Bigot. On crée des problèmes qui, en fait, ne peuvent pas être résolus comme cela.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.

M. Alain Houpert. Si je suis, comme nous tous, résolument tourné vers l’avenir, je voudrais vous faire ressouvenir du temps jadis, lorsque, pour entrer dans l’administration, il fallait être irréprochable : ne pas être réformé du service militaire, ne pas être objecteur de conscience, ne pas avoir de casier judiciaire. J’appuie vigoureusement la proposition de M. Karoutchi, parce que les personnes qui n’ont rien à se reprocher n’auront pas de problème !

Les entreprises de transport public présentent une importance particulière, car c’est l’intégrité des personnes transportées qui est en jeu. Mes chers collègues, la sécurité de ces personnes n’a pas de prix !

Qu’attendent de nous les Français ? Que nous nous occupions de leur sécurité. Cessons donc d’être naïfs ! Les commissions du type de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, c’est très bien, mais il ne s’agit plus aujourd’hui de mettre en place des systèmes d’alerte, d’installer des disjoncteurs. Nous ne sommes pas en état de guerre, mais nous sommes visés par des actes de guerre. Or, dans les entreprises de transport public, en particulier à Paris, il y a des gens qui sont un peu dangereux, tout spécialement dans les aéroports.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Que M. Karoutchi soulève un véritable problème, tout le monde en est convenu ; mais je fais partie de celles et ceux qui pensent que ce problème ne pourra pas être réglé par un amendement.

En effet, en l’état actuel du droit, peuvent être fichées toutes « les personnes faisant l’objet de recherches pour prévenir des menaces graves pour la sécurité publique ou la sûreté de l’État, dès lors que des informations ou des indices réels ont été recueillis à leur égard ». Par exemple, un hooligan, un manifestant altermondialiste ou un opposant actif à la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes peut faire l’objet d’une telle fiche !

M. François Bonhomme, rapporteur. Ou un opposant au mariage pour tous !

M. Roger Karoutchi. Vous savez très bien, madame Cohen, que nous ne parlons pas de ces personnes-là !

Mme Laurence Cohen. Convenez que ce cadre est tout de même un peu flou !

Par ailleurs, si la fiche S est communiquée à l’employeur, elle cessera d’être secrète. Et l’employeur, que pourra-t-il en faire ?

M. Roger Karoutchi. Nous ne proposons pas que les fiches soient communiquées à l’employeur !

Mme Sophie Primas. En effet !

Mme Laurence Cohen. Monsieur Karoutchi, votre amendement tend bien à permettre la transmission d’une telle fiche à un employeur. On ne peut pas garantir ce qui se passerait ensuite, alors que, en effet, la fiche S peut viser une personne susceptible de commettre des actes terroristes.

Enfin, si le secret entourant cette fiche est levé, il faut que la personne visée en soit informée. Or c’est une idée que nous avons repoussée il y a peu de temps !

En définitive, je considère que cet amendement ne convient pas à la gravité du problème soulevé. Loin de le résoudre, son adoption risquerait d’entraîner des difficultés supplémentaires, en particulier sur le plan du droit du travail.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Je voterai cet amendement, car nous ne pouvons pas, quelques semaines après avoir adopté la loi relative au renseignement, considérer qu’il ne doit plus rien se passer. Après avoir estimé qu’il était nécessaire de renforcer nos capacités de connaissance des risques, nous ne pouvons pas rester les bras croisés, sans quoi la loi que nous avons votée aura été un coup pour rien !

Par ailleurs, en adoptant cet amendement, nous ferions entrer la proposition de M. Karoutchi dans le champ de la commission mixte paritaire,…

M. Alain Fouché, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Oui !

M. Daniel Gremillet. … ce qui permettrait qu’une vraie discussion de fond s’instaure au sein de cette instance.

Je constate que nous n’avons pas abordé une dimension importante du problème : la responsabilité de l’employeur. Or s’il est bon que celui-ci soit informé, il ne faudrait pas que la charge de la responsabilité retombe sur lui !

Mes chers collègues, je le répète : il est très important d’aller au-delà des dispositions que nous avons votées il y a quelque temps en matière de renseignement.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Il me semble que, en réalité, nous sommes tous d’accord sur l’objectif à atteindre. Seulement, nous commettons une erreur si nous pensons que distribuer des fiches S aux employeurs est le seul moyen d’y parvenir ! À la vérité, je crois même que cette erreur risque d’aggraver l’insécurité dans les transports publics.

M. Roger Karoutchi. Cela commence à bien faire ! Nous n’avons jamais demandé la transmission des fiches !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Pourtant, mon cher collègue, vous proposez que « le représentant de l’État dans le département, sur la base des informations transmises par les services de police ou de gendarmerie, » transmette « aux employeurs publics ainsi qu’aux employeurs de secteurs dits sensibles dont la liste est définie par décret en Conseil d’État la liste de ceux de leurs salariés qui font l’objet d’un signalement ″fiche S″ ».

M. Roger Karoutchi. Et voilà : la liste !

Mme Sophie Primas. La liste !

Mme Catherine Procaccia. Il ne s’agit pas de la fiche elle-même !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. En d’autres termes, vous proposez que tous les employeurs des secteurs concernés aient connaissance de la liste de leurs salariés faisant l’objet d’une fiche S.

Toutes les personnes visées par une telle fiche sont-elles des terroristes en puissance ? Non. Les personnes fichées font l’objet d’une surveillance, et le degré de préoccupation qui s’attache à chacune d’elles est variable. Telle est la signification exacte de la fiche S.

Mes chers collègues, il y a deux partis possibles pour résoudre le problème qui nous occupe : faire confiance à la police ou à l’entreprise de transport. Au demeurant, les deux doivent coopérer étroitement pour que l’action menée soit efficace.

Si nous décidons de faire confiance à la police, celle-ci, ayant appris qu’une personne signalée par une fiche S est en cours de recrutement par la RATP ou la SNCF, préviendra l’entreprise si la personne est dangereuse.

M. Jacques Chiron. Très bien !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. En d’autres termes, la police avertira l’entreprise que la personne sur le point d’être recrutée fait l’objet d’une fiche S et que des éléments permettent de penser qu’elle est en cours de radicalisation. (M. Jacques Bigot et Mme Esther Benbassa opinent.) Dès lors, et dès lors seulement, l’employeur pourra, selon le cas, ne pas recruter la personne ou la licencier. Il n’agira pas à l’aveugle, sur le seul fondement de l’existence d’une fiche S : il prendra sa décision après avoir été averti par la police.

M. Jacques Chiron. Tout à fait ! Et cela se passe déjà !

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. J’ai longuement reçu la présidente de la RATP. Que m’a-t-elle demandé ? D’être informée ! Or le meilleur moyen d’assurer cette information me semble être de compter sur la police, qui avertira l’entreprise de ne pas maintenir dans son poste ou de ne pas recruter un individu potentiellement dangereux. (Marques d’acquiescement sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)

La fiche S lancée à la cantonade ne servirait à rien pour l’employeur ! En effet, elle n’indique pas un degré de dangerosité et, à elle seule, ne permet pas de déterminer la bonne décision à prendre vis-à-vis d’une personne susceptible d’être recrutée ou déjà en fonction. La seule existence d’une fiche S est une information qu’il est impossible à un employeur d’interpréter : elle ne signifie pas qu’une personne est dangereuse, mais simplement que celle-ci est surveillée.

Aussi bien, l’adoption de l’amendement n° 13 rectifié serait au mieux inutile, au pire contre-productive du point de vue de la sécurité. Car le bon système, je le répète, consiste pour la police, qui surveille les personnes faisant l’objet d’une fiche S, à informer leur employeur. Voilà ce qu’attend la présidente de la RATP, qui reconnaît ne pas avoir les moyens d’apprécier par elle-même si une personne est dangereuse ou non. Une personne surveillée n’est pas nécessairement à la veille de passer à l’acte ! (Marques d’acquiescement sur les mêmes travées.)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Si nous voulons être efficaces, nous devons organiser l’information entre la police et l’entreprise de telle sorte que, à tout moment, cette dernière puisse prendre, fort banalement, en application des règles du droit du travail ou de la fonction publique, des sanctions allant jusqu’au licenciement ou à la rupture du lien statutaire à l’égard d’un individu qui, parce qu’il est dangereux, ne peut plus accomplir sa tâche.

Mes chers collègues, nous recherchons tous l’efficacité. Je vous assure que la transmission à l’employeur de la liste de ses personnels faisant l’objet d’une fiche S n’est pas en soi un système efficace ; elle peut éventuellement s’ajouter à un système efficace, mais elle n’est pas source d’une meilleure efficacité ! (Mmes Laurence Cohen et Esther Benbassa applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Chiron, pour explication de vote.

M. Jacques Chiron. En tant qu’ancien président d’une société de transport en commun, je tiens à préciser que, chaque fois qu’un contrôleur est en passe d’être recruté, l’employeur demande à la police si la personne pressentie peut effectivement l’être. Cette procédure de contrôle a d’ores et déjà cours dans toutes les grandes entreprises de transports en commun. Or ce que l’on fait pour les contrôleurs, on peut le faire aussi pour d’autres catégories d’agents. M. le président de la commission des lois a donc raison !

M. Roger Karoutchi. Madame la présidente, je demande une suspension de séance de cinq minutes ! (Exclamations sur diverses travées.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux pendant cinq minutes.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Je mets aux voix l'amendement n° 13 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 3 bis
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
Article 4 bis (Texte non modifié par la commission)

Article 4

(Non modifié)

L’article L. 2241-1 du code des transports est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « officiers », sont insérés les mots : « et les agents » ;

b) (Supprimé)

2° Le 1° du II est abrogé.

Mme la présidente. L'amendement n° 4 rectifié bis, présenté par MM. Nègre, Karoutchi, Revet et Charon, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Rétablir le b dans la rédaction suivante :

b) Après le 4°, il est inséré un 4° bis ainsi rédigé :

«  bis Les agents assermentés missionnés de l’exploitant du service de transport ; »

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Je retire mon amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 4 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Article 4 (Texte non modifié par la commission)
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Article additionnel après l’article 4 bis

Article 4 bis

(Non modifié)

Le code de la route est ainsi modifié :

1° À l’article L. 225-4, le mot : « directement » est supprimé ;

2° L’article L. 225-5 est ainsi modifié :

a) À la fin du premier alinéa, les mots : « sur leur demande » sont supprimés ;

b) Il est ajouté un 11° ainsi rédigé :

« 11° Aux entreprises exerçant une activité de transport public routier de voyageurs ou de marchandises, pour les personnes qu’elles emploient comme conducteur de véhicule à moteur. » ;

3° À la fin du premier alinéa des articles L. 330-2 et L. 330-3 et au premier alinéa de l’article L. 330-4, les mots : « sur leur demande » sont supprimés.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 5 rectifié bis est présenté par MM. Nègre, Karoutchi, Revet et Charon.

L'amendement n° 16 rectifié est présenté par M. Mézard et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 6

Supprimer le mot :

public

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour présenter l’amendement n° 5 rectifié bis.

M. Roger Karoutchi. On conçoit sans peine que l’ensemble des transporteurs routiers privés notamment de voyageurs devraient également pouvoir obtenir des informations sur la validité du permis de conduire de leurs chauffeurs.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l'amendement n° 16 rectifié.

M. Jean-Claude Requier. Cet amendement vise à étendre le contrôle de la validité des permis aux conducteurs travaillant pour des transporteurs routiers privés.

À cet égard, mes chers collègues, je vous informe que le transport de tourisme par autocar a représenté 226 millions de kilomètres parcourus en 2014. Ces chiffres ne sont pourtant pas si significatifs que cela : ils ont été établis avant le vote de la loi Macron, grâce à laquelle le secteur devrait encore se développer !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. La possibilité offerte à tous les transporteurs d’avoir accès au fichier du permis de conduire nous paraît tout à fait bienvenue. La commission émet donc un avis favorable sur ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Nous n’interprétons pas le terme « transports » dans l’expression « transports publics » de la même façon que vous.

Pour nous, les autocars de tourisme auxquels vous faites référence entrent dans la catégorie des transports publics de la même façon que les transports privés de marchandises.

Cette subtile question de terminologie conduit le Gouvernement à émettre un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 5 rectifié bis et 16 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4 bis, modifié.

(L'article 4 bis est adopté.)

Article 4 bis (Texte non modifié par la commission)
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Article 4 ter

Article additionnel après l’article 4 bis

Mme la présidente. L'amendement n° 29 rectifié, présenté par M. Revet, Mme Lamure, M. D. Laurent, Mme Hummel et M. Mayet, n'est pas soutenu.

Article additionnel après l’article 4 bis
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Article 5

Article 4 ter

(Supprimé)

Article 4 ter
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Article 6

Article 5

I. – Le chapitre III du titre II du livre Ier du code de procédure pénale est complété par un article 78-7 ainsi rédigé :

« Art. 78-7. – Sans préjudice des prérogatives des procureurs territorialement compétents, le procureur de la République du lieu où se situe la gare de départ d’un véhicule de transport ferroviaire de voyageurs peut, en vue des contrôles et des vérifications mis en œuvre dans ce véhicule sur son trajet, prendre les réquisitions et les instructions prévues au sixième alinéa de l’article 78-2 et à l’article 78-2-2.

« Lorsque la gare de départ se situe hors du territoire national, sans préjudice des prérogatives des procureurs territorialement compétents, les réquisitions et les instructions mentionnées au premier alinéa du présent article peuvent être prises par le procureur de la République du lieu où se situe la gare d’arrivée.

« Les procureurs des lieux où le train marque un arrêt en sont informés. »

II (Non modifié). – Le dernier alinéa de l’article 18 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Lorsque les réquisitions prises par le procureur de la République en application de l’article 78-7 le prévoient expressément, ces officiers ou agents de police judiciaire sont compétents pour les mettre en œuvre sur l’ensemble du trajet d’un véhicule de transport ferroviaire de voyageurs. »

Mme la présidente. L'amendement n° 6 rectifié bis, présenté par MM. Nègre, Karoutchi, Revet et Charon, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 4

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque les gares de départ et d’arrivée se situent hors du territoire national, sans préjudice des prérogatives des procureurs territorialement compétents, les réquisitions et instructions mentionnées au premier alinéa du présent article peuvent être prises par le procureur de la République du lieu du premier arrêt du train en France. Les procureurs des autres lieux où le train marque un arrêt en sont informés. »

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. L’article 5, dans sa rédaction actuelle, ne nous semble pas traiter le cas des gares de départ et d’arrivée se situant hors du territoire national.

Cet amendement assez formel vise simplement à préciser que, dans ce type de situation, c’est le procureur de la République du lieu où se situe le premier arrêt du train en France qui est compétent.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Les auteurs de l’amendement prévoient le cas où un train partirait d’une gare étrangère et arriverait dans une gare étrangère.

Nous soutenons cet amendement avec enthousiasme et émettons un avis favorable !

M. Roger Karoutchi. N’exagérons rien, n’en faites pas trop, monsieur le rapporteur ! (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Sans être enthousiaste, le Gouvernement sera tout de même favorable à l’amendement ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 6 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 5, modifié.

(L'article 5 est adopté.)

Article 5
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Article 6 bis AA (nouveau)

Article 6

Le titre II du livre Ier du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 78-2-2 est ainsi rédigé :

« Art. 78-2-2. – I. – Sur réquisitions écrites du procureur de la République aux fins de recherche et de poursuite des actes de terrorisme visés par les articles 421-1 à 421-6 du code pénal, des infractions en matière de prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs visées aux 1° et 2° du I de l’article L. 1333-9, à l’article L. 1333-11, au II des articles L. 1333-13-3 et L. 1333-13-4 et aux articles L. 1333-13-5, L. 2339-14, L. 2339-15, L. 2341-1, L. 2341-2, L. 2341-4, L. 2342-59 et L. 2342-60 du code de la défense, des infractions en matière d’armes et d’explosifs visées par les articles L. 2339-8 et L. 2353-4 du code de la défense et L. 317-8 du code de la sécurité intérieure, des infractions de vol visées par les articles 311-3 à 311-11 du code pénal, des infractions de recel visées par les articles 321-1 et 321-2 du même code ou des faits de trafic de stupéfiants visés par les articles 222-34 à 222-38 dudit code, les officiers de police judiciaire, assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire et des agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l’article 21 peuvent, dans les lieux et pour la période de temps que ce magistrat détermine et qui ne peut excéder vingt-quatre heures, renouvelables sur décision expresse et motivée selon la même procédure, procéder non seulement aux contrôles d’identité prévus au sixième alinéa de l’article 78-2, mais aussi à :

« 1° La visite des véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public ;

« 2° L’inspection visuelle des bagages ou leur fouille, dans les véhicules et emprises immobilières des transports publics de voyageurs.

« II. – Pour l’application des dispositions du 1° du I, les véhicules en circulation ne peuvent être immobilisés que le temps strictement nécessaire au déroulement de la visite qui doit avoir lieu en présence du conducteur. Lorsqu’elle porte sur un véhicule à l’arrêt ou en stationnement, la visite se déroule en présence du conducteur ou du propriétaire du véhicule ou, à défaut, d’une personne requise à cet effet par l’officier ou l’agent de police judiciaire et qui ne relève pas de son autorité administrative. La présence d’une personne extérieure n’est toutefois pas requise si la visite comporte des risques graves pour la sécurité des personnes et des biens.

« En cas de découverte d’une infraction ou si le conducteur ou le propriétaire du véhicule le demande ainsi que dans le cas où la visite se déroule en leur absence, il est établi un procès-verbal mentionnant le lieu et les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. Un exemplaire en est remis à l’intéressé et un autre est transmis sans délai au procureur de la République.

« Toutefois, la visite des véhicules spécialement aménagés à usage d’habitation et effectivement utilisés comme résidence ne peut être faite que conformément aux dispositions relatives aux perquisitions et visites domiciliaires.

« III. – Pour l’application du 2° du I, les propriétaires des bagages ne peuvent être retenus que le temps strictement nécessaire au déroulement de l’inspection visuelle ou de la fouille des bagages, qui doit avoir lieu en présence du propriétaire.

« En cas de découverte d’une infraction ou si le propriétaire du bagage le demande, il est établi un procès-verbal mentionnant le lieu et les dates et heures du début et de la fin de ces opérations. Un exemplaire en est remis à l’intéressé et un autre est transmis sans délai au procureur de la République.

« IV. – Le fait que ces opérations révèlent des infractions autres que celles visées dans les réquisitions du procureur de la République ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes. » ;

2° Le deuxième alinéa de l’article 78-2-3 est ainsi rédigé :

« Le II de l’article 78-2-2 est applicable au présent article. » ;

3° L’article 78-2-4 est ainsi rédigé :

« Art. 78-2-4. – I. – Pour prévenir une atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens, les officiers de police judiciaire et, sur l’ordre et sous la responsabilité de ceux-ci, les agents de police judiciaire et les agents de police judiciaire adjoints mentionnés aux 1°, 1° bis et 1° ter de l’article 21 peuvent procéder non seulement aux contrôles d’identité prévus au septième alinéa de l’article 78-2, mais aussi, avec l’accord du conducteur ou du propriétaire du bagage ou, à défaut, sur instructions du procureur de la République communiquées par tous moyens, à :

« 1° La visite des véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public ;

« 2° L’inspection visuelle des bagages ou leur fouille, dans les véhicules et emprises immobilières des transports publics de voyageurs.

« II. – Pour l’application du 1° du I du présent article, le II de l’article 78-2-2 est applicable.

« Dans l’attente des instructions du procureur de la République, le véhicule peut être immobilisé pour une durée qui ne peut excéder trente minutes.

« III. – Pour l’application du 2° du I du présent article, le III de l’article 78-2-2 est applicable.

« Dans l’attente des instructions du procureur de la République, le propriétaire du bagage peut être retenu pour une durée qui ne peut excéder trente minutes. »

Mme la présidente. L'amendement n° 23, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 7, première phrase

Supprimer les mots :

En cas de découverte d’une infraction ou si le conducteur ou le propriétaire du véhicule le demande ainsi que dans le cas où la visite se déroule en leur absence,

II. – Alinéa 10, première phrase

Supprimer les mots :

En cas de découverte d’une infraction ou si le propriétaire du bagage le demande,

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. L’amendement vise à rendre la délivrance d’un procès-verbal systématique lors de la fouille de véhicules qui se situent aux abords des emprises immobilières d’entreprises de transport de voyageurs. Il s’agit donc en quelque sorte d’un amendement de précision.

Dans l’état actuel du texte, on ne prévoit la délivrance d’un procès-verbal que dans le cas où une infraction est relevée ou si le conducteur concerné en fait la demande. Or le fait qu’un individu détienne un droit, mais soit obligé de demander à l’exercer pour en bénéficier, ne nous semble pas pertinent.

En effet, dans bien des cas, le conducteur n’aura pas connaissance d’une telle possibilité. De plus, il ne faut pas se leurrer, mes chers collègues : dans ce type de situations, on observe une véritable asymétrie dans le rapport de force. Dans les faits, l’absence d’infraction n’entraînera sans doute pas la remise d’un procès-verbal.

Pourtant, la délivrance automatique de ces procès-verbaux est bénéfique à plusieurs égards.

Tout d’abord, la délivrance systématique de procès-verbaux permettrait de juger plus efficacement de la pertinence, du nombre et de la fréquence des fouilles.

Ce faisant elle facilite le travail des officiers de police judiciaire, les OPJ, et des agents de police judiciaire, les APJ, puisqu’elle leur permettra en définitive de mieux cibler les potentielles infractions à l’aune de l’expérience acquise et notifiée dans des procès-verbaux accessibles.

Ensuite, une telle disposition permettrait aux conducteurs dont le véhicule est fouillé de connaître à la fois les raisons de la fouille et d’en obtenir une trace écrite, en vue de réduire les abus dont ils pourraient faire l’objet.

Enfin, la mesure détaille les conditions des interventions : elle est donc de nature à sécuriser celles-ci et à apaiser les tensions que pourraient causer les fouilles.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Madame Cohen, l'amendement n° 23 est-il maintenu ?

Mme Laurence Cohen. Oui, je le maintiens, madame la présidente, dans la mesure notamment où aucune explication ne nous a été donnée.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 23.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 6.

(L'article 6 est adopté.)

Article 6
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Article 6 bis A

Article 6 bis AA (nouveau)

La section 1 du chapitre II du titre III du livre VI de la première partie du code des transports est complétée par un article L. 1632-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1632-2-1. – La transmission aux forces de l’ordre des images réalisées en vue de la protection des véhicules et emprises immobilières des transports publics de voyageurs lors de circonstances faisant redouter la commission imminente d’une atteinte grave aux biens ou aux personnes est autorisée sur décision conjointe de l’autorité organisatrice de transport et de l’exploitant de service de transport. Les images susceptibles d’être transmises ne doivent concerner ni l’entrée des habitations privées, ni la voie publique.

« Cette transmission s’effectue en temps réel et est strictement limitée au temps nécessaire à l’intervention des services de la police ou de la gendarmerie nationales ou, le cas échéant, des agents de la police municipale.

« Une convention préalablement conclue entre l’autorité organisatrice de transport et l’exploitant de service de transport concernés et le représentant de l’État dans le département précise les conditions et modalités de ce transfert. Cette convention prévoit l’information par affichage sur place de l’existence du système de prise d’images et de la possibilité de leur transmission aux forces de l’ordre.

« Lorsque la convention a pour objet de permettre la transmission des images aux services de police municipale, elle est en outre signée par le maire.

« Cette convention est transmise à la commission départementale de vidéoprotection mentionnée à l’article 10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité qui apprécie la pertinence des garanties prévues et en demande, le cas échéant, le renforcement au représentant de l’État dans le département.

« Ne sont pas soumis au présent article les systèmes utilisés dans des traitements automatisés ou contenus dans des fichiers structurés selon des critères permettant d’identifier, directement ou indirectement, des personnes physiques, qui sont soumis à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. »

Mme la présidente. L'amendement n° 44, présenté par M. Bonhomme, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Remplacer la référence :

10 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d’orientation et de programmation relative à la sécurité

par la référence :

L. 251-4 du code de la sécurité intérieure

II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

« Les compétences dévolues au représentant de l’État dans le département par le présent article sont exercées dans les départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, ainsi que dans les transports en commun de voyageurs par voie ferrée de la région d'Île-de-France, par le préfet de police et dans le département des Bouches-du-Rhône par le préfet de police des Bouches-du-Rhône. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Bonhomme, rapporteur. L’amendement tend à apporter une précision formelle au texte en actualisant la référence faite à la loi du 21 janvier 1995.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 44.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 6 bis AA, modifié.

(L'article 6 bis AA est adopté.)

Article 6 bis AA (nouveau)
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Article 6 bis (supprimé)

Article 6 bis A

(Supprimé)

Article 6 bis A
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Article 6 ter

Article 6 bis

(Supprimé)

Mme la présidente. L'amendement n° 7 rectifié quater, présenté par MM. Nègre, Karoutchi, Revet et Charon, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code des transports est ainsi modifié :

1° Le chapitre Ier du titre IV du livre II de la deuxième partie est complété par des articles L. 2241-10 et L. 2241-11 ainsi rédigés :

« Art. L. 2241-10. – Les passagers des transports routiers, ferroviaires ou guidés doivent être en mesure de justifier de leur identité lorsqu’ils ne disposent pas d’un titre de transport valable à bord des véhicules de transport ou dans les zones dont l’accès est réservé aux personnes munies d’un titre de transport, ou lorsqu’ils ne régularisent pas immédiatement leur situation. Ils doivent, pour cela, être porteurs d’un document attestant de cette identité ; la liste des documents valables est établie par arrêté conjoint du ministre de l’intérieur et du ministre chargé des transports.

« Le présent article n’est pas applicable aux mineurs accompagnés par une personne de plus de dix-huit ans qui en a la charge ou la surveillance.

« Art. L. 2241-11. – Les entreprises de transports routiers, ferroviaires ou guidés peuvent subordonner le voyage de leurs passagers à la détention d’un titre de transport nominatif. Dans ce cadre, le passager est tenu, lorsque l’entreprise de transport le lui demande, de présenter un document attestant son identité afin que soit vérifiée la concordance entre celle-ci et l’identité mentionnée sur son titre de transport. » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 2241-6, après le mot : « tarifaires », sont insérés les mots : « , aux dispositions de l’article L. 2241-10 » ;

3° À l’article L. 3114-1, après la référence : « L. 2241-5, », est insérée la référence : « et l’article L. 2241-10 ».

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Il s’agit d’un amendement essentiel. Je suis certain que l’on me soutiendra sur le sujet, même si je ne suis plus sûr de rien lorsque je regarde le banc des commissions. (Sourires.)

Dans sa rédaction initiale, notre amendement avait pour objet de permettre aux entreprises de transport comme la RATP ou la SNCF de contrôler l’identité des voyageurs sans titre de transport valable – j’insiste bien sur ce point.

À l’origine, nous avions également prévu d’instaurer une amende pour les voyageurs qui ne disposent pas de titre de transport valable après un contrôle d’identité. Or on nous a expliqué qu’introduire une telle mesure dans la loi serait compliqué, car une telle disposition relève du domaine réglementaire. Nous avons donc rectifié l’amendement et retiré toute mention à une amende.

Le problème reste entier. Il fut un temps – révolu – où les entreprises de transport pouvaient émettre des billets nominatifs et pouvaient éventuellement demander aux voyageurs leur identité au moment de leur délivrance. Ce n’est plus possible aujourd’hui : les billets ne sont plus nominatifs et les identités ne peuvent plus être contrôlées.

Nous souhaiterions que les entreprises de transport puissent désormais contrôler les voyageurs et disposer de leur identité lorsqu’ils n’ont pas de titre de transport valable. À défaut d’une telle mesure, on se retrouve avec près de 500 millions d’euros d’amendes non payées ! Aujourd’hui, on ne parvient à recouvrer que 10 % du produit attendu des amendes.

M. Bruno Sido. Eh oui !

M. Roger Karoutchi. Quand on ne peut pas contrôler l’identité des voyageurs sans billet, ceux-ci peuvent avancer n’importe quel nom ou n’importe quelle adresse. Notre amendement a donc pour objet d’empêcher les fraudeurs contrôlés de présenter une fausse identité à l’avenir.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 7 rectifié quater.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 6 bis est rétabli dans cette rédaction.

Article 6 bis (supprimé)
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Article 6 quinquies

Article 6 ter

(Supprimé)

Article 6 ter
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Article 7

Article 6 quinquies

(Supprimé)

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES À LA POLICE DU TRANSPORT PUBLIC DE VOYAGEURS

Article 6 quinquies
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Article 8

Article 7

L’article L. 2241-5 du code des transports est ainsi rédigé :

« Art. L. 2241-5. – Les agents mentionnés au I de l’article L. 2241-1 peuvent constater par procès-verbal le délit prévu à l’article 446-1 du code pénal lorsqu’il est commis dans les véhicules et emprises immobilières des transports publics de voyageurs.

« Les agents mentionnés à l’alinéa précédent peuvent appréhender, en vue de leur confiscation par le tribunal, les marchandises de toute nature offertes, mises en vente ou exposées en vue de la vente dans les véhicules et emprises immobilières des transports publics de voyageurs sans l’autorisation administrative nécessaire. Ils peuvent également saisir dans les mêmes conditions les étals supportant ces marchandises.

« Les marchandises saisies sont détruites lorsqu’il s’agit de denrées impropres à la consommation. Elles sont remises à des organisations caritatives ou humanitaires d’intérêt général lorsqu’il s’agit de denrées périssables.

« Il est rendu compte à l’officier de police judiciaire compétent de la saisie des marchandises et de leur destruction ou de leur remise aux organisations mentionnées au troisième alinéa. »

Mme la présidente. L'amendement n° 8 rectifié, présenté par MM. Nègre, Revet et Charon, n’est pas soutenu.

Je mets aux voix l'article 7.

(L'article 7 est adopté.)

Article 7
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Article 8 bis

Article 8

L’article L. 2242-6 du code des transports est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « une voiture » sont remplacés par les mots : « tout moyen de transport public de personnes payant » ;

2° Le second alinéa est ainsi modifié :

a) Le mot : « dix » est remplacé par le mot : « cinq » ;

b) (Supprimé)

Mme la présidente. L'amendement n° 14 rectifié, présenté par MM. Karoutchi et Houel, Mme Mélot, MM. Cornu et Vaspart, Mme Cayeux, MM. Laufoaulu, Doligé, Leleux, Chaize, Cambon, D. Laurent, G. Bailly et Mayet, Mmes Procaccia et Primas, MM. Mouiller et Milon, Mme Deromedi, M. Houpert, Mme Deroche, MM. B. Fournier, Legendre et Joyandet et Mme Gruny, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer le mot :

cinq

par le mot :

trois

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. J’ai déjà brièvement exposé l’objet de cet amendement lors de mon intervention en discussion générale ce matin.

Aujourd’hui, la loi qualifie de « délit d’habitude » le fait pour une même personne d’être contrôlé à dix reprises sans titre de transport valable. Le texte, dans sa version actuelle, prévoit d’abaisser le seuil qui détermine cette qualification de dix à cinq infractions.

Cependant, comme l’ont dit nos collègues du groupe CRC ce matin, le nombre de contrôleurs a tellement été réduit dans les faits que vous avez assez peu de chances d’être contrôlé lorsque vous empruntez le métro, le RER ou circulez dans un train ! En vérité, lorsqu’un voyageur est contrôlé trois fois sans billet valable au cours de la même année, on peut raisonnablement estimer que cela aurait pu lui arriver à dix, vingt ou trente reprises, compte tenu du rythme des contrôles et de la capacité actuelle des entreprises à les exercer.

Si l’on veut réellement mettre un terme à ces pratiques consistant à voyager de manière répétée sans titre valable, il faut établir un seuil de trois contraventions pour qualifier le délit d’habitude.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement, dans la mesure où il nous paraît disproportionné…

M. François Bonhomme, rapporteur. … d’abaisser davantage le seuil permettant de caractériser le délit d’habitude.

En effet, le texte a déjà réduit ce seuil de dix à cinq contraventions. D’ores et déjà, il devrait être plus facile de sanctionner les fraudeurs d’habitude.

Il serait malvenu d’aller trop vite et trop loin, alors même que nous n’avons pas encore évalué les bénéfices que l’on peut attendre du dispositif figurant dans le texte.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Comme M. le rapporteur, je voudrais insister sur le fait que le texte abaisse déjà le seuil du délit d’habitude de dix à cinq infractions et qu’il nous paraît difficile d’aller plus loin.

J’invoquerai également un argument de constitutionnalité qui repose sur le principe de proportionnalité.

En guise de référence, concernant un autre domaine, on peut citer l’arrêt du 28 janvier 2014 de la Cour de cassation, dans lequel elle a considéré que l’habitude n’était pas caractérisée à l’encontre d’une personne ayant recelé à trois reprises des objets.

Il nous paraît donc plus sage de conserver la rédaction actuelle du texte. Comme M. le rapporteur l’a indiqué, passer de dix contraventions à cinq, puis à trois, ce serait aller trop vite, trop loin !

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.

Mme Sophie Primas. Un seuil de trois contraventions est peut-être bas pour la majorité du territoire. Dans les trains de grande ligne, par exemple, les contrôles sont fréquents, voire systématiques. Mais Roger Karoutchi, me semble-t-il, fait ici référence à la situation de la région d’Île-de-France, où la fraude dans les transports est massive, avec des contrôles très peu fréquents. Pour cette région, au moins, la jauge de trois contraventions doit être conservée.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.

Mme Catherine Procaccia. Une fois de plus, je m’exprime en tant que francilienne. Ma position rejoint celle de ma collègue Sophie Primas et je serais même tentée, monsieur le rapporteur, de vous inviter à prendre, de temps en temps, les transports en commun en région parisienne. Vous verrez combien de fois vous vous faites contrôler !

Je peux vous citer – il en existe un certain nombre en banlieue, notamment dans mon département du Val-de-Marne – des lignes de bus dans lesquelles personne ne valide un ticket ou un pass Navigo, hormis quelques-uns dont je fais partie, sans que le moindre contrôle soit effectué.

Même sans aller jusque dans le Val-de-Marne, je prends souvent les bus 84 et 89, qui passent devant le Sénat : en trois ans, alors même que j’emprunte ces lignes deux fois par jour, je n’ai jamais été contrôlée une seule fois !

M. Alain Fouché, rapporteur pour avis. Je l’ai été cinq fois !

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.

M. Bruno Sido. M. Karoutchi l’a fort bien dit, et j’appuie ses propos : une personne contrôlée une fois sans titre de transport l’aurait été dix, vingt, trente fois – probablement plus – à d’autres moments. Ne serait-ce que deux fois, l’on peut parler de récidive. Or la récidive donne toujours lieu à une peine plus grave. À tout le moins, il convient donc de s’en tenir à trois fois. Sans cela, ce n’est plus la peine de mettre les billets en vente !

Pour toutes ces raisons, je voterai l’amendement n° 14 rectifié.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Je peux comprendre qu’un organisateur de transport soit sensible à l’idée d’instaurer un seuil de trois, voire deux contraventions. Mais il est un point qu’on a tendance à oublier : la plupart du temps – et c’est un des principaux problèmes rencontrés –, l’usager qui se fait contrôler sans ticket de transport transige avec le transporteur et le paie immédiatement. De ce fait, il ne s’agit pas stricto sensu d’une amende et le contrôle n’entrera pas dans le calcul du seuil.

Une faible fréquence des contrôles et l’existence de cette solution transactionnelle, qui n’est pas prise en compte et ne le sera pas aux termes de cette proposition de loi, incitent de plus en plus les usagers à faire leurs calculs. Mieux vaut payer plus les rares fois où ils se font contrôler ; cela leur coûtera toujours moins cher que de payer régulièrement !

M. Bruno Sido. Très bien !

M. Jacques Bigot. En fait, le seuil de cinq contraventions pourrait tout à fait donner des résultats. Mais, j’interpelle le Gouvernement sur le fait que cela supposerait de réfléchir à la question de cette transaction entre, par exemple, la SNCF ou la RATP et l’usager.

Faire en sorte que la contravention pour transport irrégulier soit accompagnée du forfait et que ce forfait soit payé dans le transport permettrait de régler le problème. Dès lors, effectivement, le seuil de cinq contraventions conviendrait parfaitement.

En résumé, je comprends et partage les difficultés du transporteur. Toutefois, sous l’angle strictement pénal, la position de la commission, lorsqu’elle estime que porter le seuil à cinq contraventions représente déjà un gros effort, me semble parfaitement justifiée. En revanche, il faut trouver une solution pour que la transaction ne soit pas systématique.

Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.

Mme Colette Mélot. En tant que francilienne, je souhaite insister sur la situation que connaît notre région. Deux fois par semaine, je prends le train à Melun pour me rendre à Paris. Voilà des mois que je n’ai pas vu de contrôleurs ! Lorsque, dans le courant de l’année, il est arrivé que des contrôleurs investissent une rame, j’ai pu constater qu’un très grand nombre de personnes voyageaient sans titre de transport et, bien sûr, sans pièce d’identité.

Cette situation est vraiment patente en Île-de-France. C’est pourquoi l’amendement n° 14 rectifié m’apparaît tout à fait pertinent.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Notre débat illustre bien le fait que cette proposition de loi mélange tout. Il est question de lutter tout à la fois contre les incivilités, les atteintes à la sécurité publique et les actes de terrorisme. On met sur un pied d’égalité des actes n’ayant aucun rapport les uns avec les autres !

À cet instant, nous discutons des transports, notamment en Île-de-France. Élue, moi aussi, dans la région, précisément dans le département du Val-de-Marne, je ne considère pas la fraude comme le principal problème s’agissant des transports en Île-de-France. Aujourd'hui, mes chers collègues, le problème numéro un, c’est la vétusté de ces transports et la succession incessante des problèmes techniques.

M. Roger Karoutchi. Je suis d’accord !

Mme Laurence Cohen. On nous transporte comme si nous étions des bestiaux et cela, pardonnez-moi, n’est pas sans faire monter le ras-le-bol.

Bien sûr, cette situation ne justifie rien. Mais comme l’a prouvé la discussion de ce matin, il faudrait pouvoir augmenter les moyens humains à la RATP et à la SNCF.

M. Jean-Pierre Bosino. Ils ont été réduits !

Mme Laurence Cohen. Certains de nos collègues observent qu’ils ne voient pas de contrôleurs… Mais nous nous sommes battus, notamment au niveau du Syndicat des transports d’Île-de-France, le STIF, pour qu’une présence humaine soit garantie dans les transports publics.

C’est de ce manque de moyens qu’on pâtit ! Se rassurer en se faisant encore plus sécuritaires que les plus sécuritaires ne réglera aucun problème, et l’on passera à côté de ce que vit la population.

M. Roger Karoutchi. Si les fraudeurs étaient moins nombreux, on pourrait investir…

M. Alain Bertrand. Excusons donc les fraudeurs !

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Houel, pour explication de vote.

M. Michel Houel. Permettez-moi, mes chers collègues, de vous raconter une anecdote. Alors que je me trouve dans les transports en commun, un contrôle survient. Les contrôleurs passent de personne en personne – bien sûr, j’ai un titre de transport en ma possession. Ils se tournent alors vers deux jeunes gens dans la force de l’âge.

« Titres de transport ?

– Nous n’en avons pas.

– Pouvez-vous payer immédiatement ?

– Nous n’avons pas d’argent.

– Avez-vous une carte d’identité ?

– Non, nous n’en avons pas. »

Au moment où les contrôleurs demandent leur nom et leur adresse aux intéressés – il faut bien remplir le formulaire –, je me retrouve avec un Michel Houel, demeurant à Crécy-la-Chapelle ! Et ils sont repartis comme cela !

Dès lors, un processus s’engage et je plains ceux à qui cela arrive s’ils n’ont pas les moyens d’arrêter la machine, car, là, il s’agit d’une usurpation d’identité.

De toute façon, de tels contrevenants ne seront jamais punis. Les contrôles dans nos trains de banlieue sont effectués par des groupes qui comptent jusqu’à quatre agents, et ces agents ne sont pas faits pour la bagarre. Reste donc la loi du plus fort !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.

M. Alain Fouché, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. J’entends mes collègues débattre du nombre exact de contrôles… Mais les Parisiens ne sont pas les seuls à prendre le métro ; en province aussi, nous circulons toute l’année en métro et subissons des contrôles.

Il y en a également dans le métro parisien, station Châtelet ou ailleurs. Dernièrement, n’ayant pas ma carte d’abonnement (M. le rapporteur pour avis brandit son pass Navigo), je me suis fait prêter un ticket : c’était un ticket pour enfant ! Au contrôleur, j’ai bien expliqué que j’avais une carte d’abonnement, mais, comme je ne pouvais pas le prouver, j’ai dû payer 36 euros.

Donc des contrôles sont bien effectués…

Mme Colette Mélot. Ils sont très rares !

M. Alain Fouché, rapporteur pour avis. … dans les trains de grande ligne, mais aussi dans les trains de banlieue et dans le métro.

Permettez-moi, mes chers collègues, d’ajouter un point qui n’a rien à voir avec tout cela. J’ai oublié, ce matin, d’excuser le président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, M. Hervé Maurey. Du fait d’une réunion importante dans sa région, celui-ci ne pouvait être aujourd'hui parmi nous.

Mme la présidente. Nous en prenons acte.

Je mets aux voix l'amendement n° 14 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 8, modifié.

(L'article 8 est adopté.)

Article 8
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Article 8 ter

Article 8 bis

Le troisième alinéa de l’article L. 2241-2 du code des transports est complété par les mots et une phrase ainsi rédigée : « , pour une durée n’excédant pas trente minutes. La violation de cette obligation est punie de deux mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende. »

Mme la présidente. L'amendement n° 38, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer les mots :

les mots et

et les mots :

, pour une durée n’excédant pas trente minutes.

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Cet amendement tend à supprimer la durée de trente minutes pendant laquelle une personne ayant commis une fraude et refusant de décliner son identité aux agents contrôleurs assermentés peut être retenue.

La fixation d’une durée maximale de trente minutes pendant laquelle la retenue est possible est de nature à rendre la mesure peu opérationnelle.

La retenue doit être possible pendant le temps nécessaire à la prise de contact avec l’officier de police judiciaire.

La Cour de cassation a d’ailleurs admis, dans son arrêt du 1er octobre 1979, que la rétention doit être limitée au temps strictement nécessaire à la remise du délinquant entre les mains de l’officier de police judiciaire, lequel doit être avisé dans les meilleurs délais.

L’exemple d’un vol à l’étalage commis à quatorze heures quarante-cinq alors que le chef de service n’avait alerté la gendarmerie qu’à quinze heures cinquante permet d’illustrer l’équilibre à préserver, la Cour ayant considéré que ce délai, employé à procéder aux constatations et à recueillir les explications des intéressés, n’était nullement excessif.

Il n’en demeure pas moins que la rétention d’une personne ayant commis une fraude et refusant de décliner son identité pendant un temps trop long ne peut être admis. La Cour de cassation a notamment considéré, en 1988, qu’il était illégal d’avoir laissé s’écouler sept heures entre l’interpellation d’un vol à l’étalage et l’avis à la gendarmerie.

Pour ces raisons, le Gouvernement propose de s’en tenir à la rédaction actuelle de l’article du code des transports concerné : la durée est celle du temps nécessaire à l’information et à la décision de l’officier de police judiciaire.

Cette rédaction convient parfaitement et évite de tomber dans un excès ou dans un autre.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Il est défavorable. La proposition de loi comprend déjà une avancée significative dans la mesure où l’agent assermenté pour procéder à des vérifications d’identité ne pouvait pas, par le passé, retenir la personne. Il s’agit simplement, ici, de fixer une durée maximale pour cette rétention, permettant à l’agent, en cas de refus de vérification d’identité, de demander l’intervention d’un officier de police judiciaire. C’est bien ce laps de temps qui, de notre point de vue, doit être limité. Si tel n’était pas le cas, comme l’a indiqué Mme la secrétaire d’État, nous nous verrions sans doute contraints par le droit.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Je me suis efforcée d’être précise, mais peut-être n’ai-je pas été claire…

En l’état actuel du droit, la possibilité pour le contrôleur de retenir une personne ayant fraudé et refusant de décliner son identité pendant le temps nécessaire aux vérifications qui s’imposent existe déjà dans la loi, sans aucune limitation de durée. Or vous en introduisez une.

De fait, dans un certain nombre de cas, les vérifications ne demanderont que cinq minutes et la durée de trente minutes sera excessive. En revanche, ces vérifications peuvent prendre quarante-cinq minutes ou une heure.

Dans l’arrêt rendu par la Cour de cassation en 1979, que j’ai cité à l’instant, le voleur a été retenu pendant une heure et cinq minutes et la Cour a estimé que le délai employé à procéder aux constatations et à recueillir des explications n’était nullement excessif.

Donc, en fixant une durée maximale de trente minutes, vous adoptez une position qui, de fait, ne permet plus à la loi de s’appliquer dans sa forme actuelle. Or le dispositif aujourd'hui en vigueur permet de répondre à toutes les situations, qu’il faille cinq minutes ou une heure et quart pour prévenir la police judiciaire.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Je comprends parfaitement la position du rapporteur, qui tient à proposer une limitation dans le temps. Reste que les situations ne sont pas partout identiques et que le temps nécessaire pour alerter un OPJ et obtenir une intervention peut être extrêmement variable selon les territoires. Qui plus est, en adoptant la rédaction de la commission, on risque l’effet inverse : le fraudeur pourrait être retenu trente minutes, alors que ce n’est pas forcément nécessaire.

Je sais bien que telle n’est pas l’intention de la commission. Je pense néanmoins que la rédaction du Gouvernement est meilleure de ce point de vue, même si cela suppose un contrôle a posteriori plutôt qu’a priori.

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Je vais finir par avoir des problèmes avec la commission ! (Sourires.) Pour ma part, je suis tout à fait favorable à l’amendement du Gouvernement et, pour tout dire, je ne comprends même pas pourquoi la commission s’y oppose !

Si un problème sérieux survient entre les contrôleurs et celui qui n’a ni titre de transport ni papiers d’identité, il faut avoir le temps d’appeler l’OPJ. Si le texte ne prévoit que trente minutes, au bout de trente minutes, quoi qu’il advienne, le type pourra se barrer et l’affaire sera close ! Si l’OPJ ne se trouve pas à proximité immédiate, cela ne marche pas et ce n’est même pas la peine de faire des contrôles. Autant dire aux contrôleurs de rester chez eux !

En quoi le fait de prévoir que, à partir d’un moment où un agent de la SNCF ou de la RATP appelle un OPJ, il faut laisser à celui-ci le temps nécessaire pour se rendre sur place et constater est-il gênant et attentatoire aux droits et à la liberté des gens ? Ou alors on ne peut plus rien faire et il vaut mieux tout fermer !

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. François Bonhomme, rapporteur. Je tiens à rassurer notre collègue : ces trente minutes correspondent au temps nécessaire pour appeler l’OPJ ; une fois que celui-ci a donné son accord pour retenir le fraudeur, le temps n’est pas limité. Cela n’a donc pas la même portée.

M. Roger Karoutchi. Il faut le temps de le joindre !

Mme Catherine Procaccia. S’il est en opération, il ne va pas répondre tout de suite !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 38.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 24, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Remplacer les mots :

de deux mois d'emprisonnement et de 7 500 € d’amende

par les mots :

d'une amende de 3 750 €

La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.

M. Jean-Pierre Bosino. Cet amendement vise à proportionner la sanction du délit de fuite en cas de contrôle. En effet, si nous concevons que la lutte contre la fraude doit s’accompagner de sanctions dissuasives, il nous paraît inopportun de rendre aussi fortement punissable la fuite à un contrôle.

Risquer de la prison ferme en sus d’une amende de 7 500 euros pour un délit de fuite nous semble véritablement excessif. Combattre la fraude ne peut passer par la répression à outrance. Nous avons là, typiquement, une disposition dont on peut comprendre le but, mais dont l’efficacité est quasi nulle.

On ne peut concevoir que, par exemple, une personne pressée, mais qui aurait oublié ses papiers ou autre et qui, par accès de colère, tenterait de prendre la fuite dans l’attente de la réponse de l’OPJ compétent puisse se trouver condamnée à de la prison ferme pour un problème de titres de transport !

En adoptant cet article dans sa rédaction actuelle, on transforme une obligation en délit en l’assortissant d’une sanction très lourde. De notre point de vue, encore une fois, cette disposition méconnaît le principe de la proportionnalité de la peine.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Contrairement à ce qui vient d’être indiqué, ne pas se maintenir à la disposition d’un agent assermenté est un comportement plus grave que la simple fraude et justifie donc une répression accrue.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement. La suppression de la peine d’emprisonnement viderait de son sens l’article 8 bis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 24.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 8 bis, modifié.

(L'article 8 bis est adopté.)

Article 8 bis
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Article 9

Article 8 ter

À l’article 40 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, après le mot : « correctionnelle, », sont insérés les mots : « ainsi qu’une transaction prévue à l’article 529-3 du code de procédure pénale ». – (Adopté.)

Article 8 ter
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Articles additionnels après l'article 9

Article 9

I. – Après l’article L. 2241-2 du code des transports, il est inséré un article L. 2241-2-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 2241-2-1. – Pour fiabiliser les données relatives à l’identité et à l’adresse du contrevenant recueillies lors de la constatation des contraventions mentionnées à l’article 529-3 du code de procédure pénale, les agents de l’exploitant du service de transport chargés du recouvrement des sommes dues au titre de la transaction mentionnée à l’article 529-4 du même code peuvent obtenir communication auprès des administrations publiques et des organismes de sécurité sociale, sans que le secret professionnel puisse leur être opposé, des renseignements, strictement limités aux nom, prénoms, date et lieu de naissance des contrevenants, ainsi qu’à l’adresse de leur domicile.

« Les renseignements transmis ne peuvent être utilisés que dans le cadre de la procédure transactionnelle prévue au même article 529-4, en vue d’inviter le contrevenant à s’acquitter du versement des sommes dues au titre de la transaction dans le délai imparti. Ils ne peuvent être communiqués à des tiers, hormis à l’autorité judiciaire, qui est informée des cas d’usurpation d’identité détectés à l’occasion de ces échanges d’information.

« Les demandes des exploitants et les renseignements communiqués en réponse sont transmis par l’intermédiaire d’une personne morale unique, commune aux exploitants. Les agents de cette personne morale unique susceptibles d’avoir accès à ces renseignements, dont le nombre maximal est fixé par arrêté conjoint du ministre de l’intérieur et des ministres chargés des finances et des transports, sont spécialement désignés et habilités à cet effet par l’exploitant. Ils sont tenus au secret professionnel.

« Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. »

II. – Le chapitre III du titre II de la première partie du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :

1° Le VII de la section II est complété par un 10° ainsi rédigé :

« 10° : Exploitants de transports publics ferroviaires, guidés ou routiers

« Art. L. 166 F. – L’obligation du secret professionnel ne fait pas obstacle à ce que l’administration fiscale transmette à la personne morale mentionnée au troisième alinéa de l’article L. 2241-2-1 du code des transports les renseignements, relatifs aux nom, prénoms, date et lieu de naissance ainsi qu’à l’adresse du domicile des auteurs des contraventions mentionnées à l’article 529-3 du code de procédure pénale, utiles à la réalisation de la transaction prévue à l’article 529-4 du même code.

« Le secret professionnel ne fait pas obstacle à ce que cette personne morale transmette aux agents de l’exploitant du service de transport chargés du recouvrement des sommes dues au titre de la transaction mentionnée à l’article 529-4 du code de procédure pénale les informations nécessaires à l’exercice de cette mission. » ;

2° Au second alinéa de l’article L. 113, la référence : « et L. 166 D » est remplacée par les références : « , L. 166 D et L. 166 F ».

III. – (Supprimé)

Mme la présidente. L'amendement n° 25, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. Les dispositions de cette proposition de loi en matière de lutte contre la fraude nous semblent suffisantes. C’est pourquoi nous proposons la suppression de cet article, qui porte une atteinte grave à la vie privée et au respect du secret professionnel. En effet, il est prévu, dans le seul but de recouvrer des amendes, de lever purement et simplement et sans intervention judiciaire préalable le secret professionnel opposé par certains organismes et de créer un nouveau fichier, et ce alors même que le recouvrement serait assuré par des organismes purement commerciaux.

Sous couvert de faciliter les demandes des usagers et d’améliorer la lutte contre la fraude, cette proposition de loi instaure un principe général d’échanges d’informations qui nous inquiète. Les perspectives de croisement et d’interconnexion de fichiers, dans le climat ambiant de lutte contre le terrorisme et contre la fraude, de détection des comportements suspects, de recours croissant au fichage social et policier des citoyens ne sont pas acceptables.

Nous le répétons, la lutte contre la fraude ne pourra passer que par un renforcement des effectifs des agents RATP et SNCF ainsi que de la présence de la police des transports.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement qui vise à supprimer l’article 9 au motif que celui-ci porterait atteinte à la vie privée.

Or cet article est nécessaire pour améliorer l’efficacité de la lutte contre la fraude. Par ailleurs, il est entouré de garanties qui nous semblent importantes. Les informations concernées se limitent aux nom, prénom, date de naissance et adresse. Une personne morale, qui sera un établissement public administratif, assurera l’intermédiaire entre les agents chargés du recouvrement et les administrations publiques. Enfin, le décret d’application sera pris après avis de la CNIL, à la suite de l’amendement qui a été adopté la semaine dernière en commission.

Ce dispositif nous paraît donc tout à fait proportionné.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 25.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 9 rectifié est présenté par MM. Nègre et Charon.

L'amendement n° 30 rectifié est présenté par M. Revet, Mme Lamure, M. D. Laurent, Mme Hummel et M. Mayet.

Ces deux amendements ne sont pas soutenus.

L'amendement n° 10 rectifié bis, présenté par MM. Nègre, Karoutchi, Revet et Charon, est ainsi libellé :

Alinéa 4, deuxième phrase

Remplacer les mots :

l’exploitant

par les mots :

la personne morale

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. C’est très formel. Le texte prévoit que c’est auprès de « l’exploitant » que l’on peut avoir accès aux renseignements pour connaître les personnes habilitées. Or l’exploitant, cela ne veut pas dire grand-chose ! Plusieurs exploitants différents seront amenés à interroger la personne morale unique.

C’est la raison pour laquelle nous proposons de remplacer l’exploitant par la personne morale, laquelle est en réalité celle qui exerce l’ensemble de la tutelle. C’est plus explicite et plus conforme à la réalité.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement et je remercie M. Karoutchi de sa vigilance : cette rédaction est bienvenue.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 10 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 9, modifié.

(L'article 9 est adopté.)

Article 9
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Article 9 bis

Articles additionnels après l'article 9

Mme la présidente. L'amendement n° 11 rectifié bis, présenté par MM. Nègre, Karoutchi, Revet et Charon, est ainsi libellé :

Après l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa du 2 du I de l’article 529-4 et à la première phrase du premier alinéa et au second alinéa de l’article 529-5 du code de procédure pénale, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « quatre ».

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Il fut un temps pas si ancien – jusqu’à la loi du 5 janvier 1993 ayant modifié le dispositif – où les opérateurs de transport public disposaient de quatre mois pour recouvrer les amendes. Ce délai a été abaissé à deux mois ; peut-être à l’époque constatait-on moins de fraudes ou était-ce moins difficile…

Aujourd’hui, alors que seulement 10 % des amendes sont recouvrées, que l’on peut désormais saisir un médiateur, ce qui, par définition, rallonge d’autant les délais, que l’on peut engager des recours, un délai de quatre mois pour récupérer le produit des contraventions dressées dans les transports publics me semble plus raisonnable. Cela ne change rien au dispositif, cela rallonge seulement le délai de récupération.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Cet amendement vise à allonger de deux mois à quatre mois le délai à partir duquel l’amende du transporteur devient une amende forfaitaire majorée et est de ce fait recouvrée par le trésor public.

Un article de la proposition de loi issu des travaux de l'Assemblée nationale faisait passer ce délai de deux mois à trois mois. Il a été supprimé par la commission, pour laquelle un allongement des délais de paiement est un signal tout à fait contradictoire avec l’objectif de lutte contre la fraude. Celui-ci nécessite en effet des délais courts et une procédure rapide.

Au demeurant, un allongement des délais fragilise la procédure. En outre, le trésor public dispose de moyens juridiques très efficaces – saisie sur salaire ou sur les comptes – pour recouvrer l’amende forfaitaire majorée, plus performants que les services de recouvrement des transporteurs.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Même avis.

M. Roger Karoutchi. Je le retire ! Pour une fois, je veux bien être d’accord avec la commission ! (Sourires.)

Mme la présidente. L'amendement n° 11 rectifié bis est retiré.

L'amendement n° 15 rectifié, présenté par MM. Karoutchi et Houel, Mme Mélot, MM. Cornu et Vaspart, Mme Cayeux, MM. Laufoaulu, Doligé, Leleux, Chaize, Cambon, D. Laurent, G. Bailly, Lefèvre et Mayet, Mmes Procaccia et Primas, MM. Mouiller et Milon, Mme Deromedi, M. Houpert, Mme Deroche, MM. B. Fournier, Legendre et Joyandet et Mme Gruny, est ainsi libellé :

Après l'article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre II du titre IV du livre II de la deuxième partie du code des transports est complété par un article L. 2242-… ainsi rédigé :

« Art. L. 2242- – Est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende, le fait d’inciter à la fraude dans les transports par la création d’un collectif solidaire de fraudeurs. »

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. C’est un amendement d’appel. Je suis d’accord avec le groupe CRC : la proportionnalité doit rester de mise et je reconnais bien volontiers que la peine envisagée dans cet amendement est trop sévère. On a un peu chargé la barque… (Sourires.)

M. Roger Karoutchi. Avant de retirer cet amendement, je tiens à signaler au Gouvernement que l’on voit fleurir sur l’internet, grâce à des réseaux sociaux en tout genre, des collectifs organisant le non-paiement des titres de transport et la fraude dans les transports publics. Cela peut paraître assez surprenant, mais c’est ainsi. C’est devenu une espèce non pas de jeu, mais d’aventure des temps modernes : « Rejoignez-nous pour voir comment on peut frauder les transports publics : SNCF, RATP… »

Lisez, c’est tout à fait sympathique. En général, il est question de trains pourris, de RER encombrés. Sur le fond, ces individus n’ont pas tort. Je suis bien d’accord avec ma collègue du groupe CRC, les transports en commun en Île-de-France sont dans un état lamentable ! Peut-on pour autant accepter l’organisation et la structuration de collectifs appelant à la fraude ?

M. Roger Karoutchi. Bien sûr que non !

Cet amendement vise donc à créer un délit de collectif engageant à la fraude, mais la sanction prévue est trop lourde. C’est ainsi…

Madame la secrétaire d’État, je ne vous demande pas de sous-amender cet amendement en acceptant le délit de collectif à la fraude et en prévoyant une sanction moindre. S’il en était ainsi, une fois de plus, je voterais pour le Gouvernement, ce qui en dit long sur mes capacités à appartenir à un gouvernement futur… (Sourires.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Défavorable.

M. François Bonhomme, rapporteur. M. Karoutchi a reconnu lui-même que la sanction prévue pour le délit de fraude et d’incitation à la fraude dans les transports en commun était disproportionnée. Cinq ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende, c’est ce qui prévaut pour une agression sexuelle !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable. En effet, l’article 8 ter de ce texte, qui complète l’article 40 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de presse, a déjà pour objet de créer un nouveau délit de presse consistant à ouvrir ou à annoncer publiquement une souscription pour financer une transaction avec un opérateur de transport et sanctionne par conséquent la pratique communément appelée « mutuelle de fraudeurs ».

Par conséquent, monsieur le sénateur, je pense que cette disposition est de nature à vous satisfaire.

M. Roger Karoutchi. Je retire cet amendement !

Mme la présidente. L'amendement n° 15 rectifié est retiré.

Articles additionnels après l'article 9
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Article 10

Article 9 bis

(Supprimé)

Article 9 bis
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Article 11

Article 10

(Non modifié)

À la fin du dernier alinéa du II de l’article 529-4 du code de procédure pénale, les mots : « l’indemnité forfaitaire » sont remplacés par les mots : « l’ensemble des sommes dues au titre de la transaction ». – (Adopté.)

Article 10
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Article 12

Article 11

(Supprimé)

Article 11
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Article 13

Article 12

Le A du I de l’article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Sans préjudice de l’article L. 2512-14, lorsqu’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est compétent en matière de transports urbains, les maires des communes membres peuvent transférer au président de cet établissement les attributions lui permettant de réglementer cette activité. »

Mme la présidente. L'amendement n° 39, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Le I de l’article L. 2241-1 du code des transports est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les agents de police municipale. »

II. – Le titre Ier du livre V du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° L’article L. 511-1 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Affectés par le maire à des missions de maintien du bon ordre au sein des transports publics de voyageurs, les agents de police municipale peuvent constater par procès-verbaux les infractions mentionnées à l’article L. 2241-1 du code des transports sur le territoire de la commune ou des communes formant un ensemble d’un seul tenant dans les conditions définies à l’article L. 512-1-1, sans pouvoir excéder le ressort du tribunal auprès duquel ils ont prêté serment.

« À cette fin, les communes contiguës desservies par un ou plusieurs réseaux de transports publics peuvent conclure entre elles une convention locale de sûreté des transports collectifs afin de permettre à leurs polices municipales d’exercer indistinctement leurs compétences sur les parties de réseaux qui les traversent. Cette convention est conclue sous l’autorité du représentant de l’État dans le département dans le respect des conventions de coordination des interventions de la police municipale et des forces de sécurité de l’État prévues par la section 2 du chapitre II du présent titre et dans le respect du contrat d’objectif départemental de sûreté dans les transports collectifs. » ;

2° La section 1 du chapitre II est complétée par un article L. 512-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 512-1-1. – Pour l’exercice des missions mentionnées à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 511-1, les communes formant un ensemble d’un seul tenant peuvent autoriser un ou plusieurs agents de police municipale à intervenir sur le territoire de chacune d’entre elles, dans les conditions prévues par la convention prévue au dernier alinéa du même article.

« Pendant l’exercice de leurs fonctions sur le territoire d’une commune, ces agents sont placés sous l’autorité du maire de cette commune.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Cet amendement a pour objet de remplacer l’actuel dispositif prévu par l’article 12 afin d’offrir, notamment en province, davantage de sécurité dans les transports collectifs de personnes.

L’article 12 tel qu’il est actuellement rédigé prévoit que lorsqu’un EPCI à fiscalité propre est compétent en matière de transport, les maires peuvent transférer à son président le pouvoir de police relatif à la réglementation des transports. Or il n’existe en droit aucun pouvoir de police spécial relatif à la réglementation des transports.

Le maintien de l’ordre public dans les transports relève du pouvoir de police générale du maire, défini à l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales.

Les arrêtés de police que le maire peut prendre au titre du bon ordre au sein des transports publics de voyageurs relèvent de la police générale dont le maire est le seul titulaire et qui ne saurait être transférée au président de l’EPCI.

En conséquence, le présent amendement tend à revenir à la logique de la version initiale de l’article 12 et à développer les capacités d’intervention des polices municipales pour assurer le bon ordre dans les transports publics de voyageurs dans les communes formant un ensemble d’un seul tenant.

Il vise à ouvrir la possibilité pour les polices municipales de constater, par procès-verbal, les infractions prévues par le code des transports, ainsi que les contraventions prévues par les règlements relatifs à la police ou à la sûreté du transport et à la sécurité de l’exploitation des systèmes de transport ferroviaire ou guidé.

L’amendement vise également à rendre possible l’intervention des policiers municipaux sur le territoire d’une autre commune de l’agglomération dans le but d’assurer la sûreté complète du réseau de transport collectif. À cette fin, il tend à prévoir que des agents de police municipale peuvent être mis en commun à l’échelle d’un groupe de communes.

Ce dispositif est efficace et respectueux des pouvoirs des différents acteurs en présence. Les agents sont systématiquement placés sous l’autorité du maire de la commune sur le territoire de laquelle ils interviennent. Il permet de donner les moyens d’assurer la sécurité des transports sur l’ensemble du territoire à l’échelle communale et intercommunale, tout en respectant les équilibres locaux.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Cet amendement a pour objet de rétablir l’article 12 dans sa rédaction initiale. Il est, nous semble-t-il, contraire à la position de la commission. Celle-ci a en effet considéré que donner aux policiers municipaux la compétence de constater des infractions en matière de police des transports pose des difficultés d’ordre constitutionnel. Je rappelle que le Conseil constitutionnel a imposé que les missions de police judiciaire soient effectuées sous le contrôle de l’autorité judiciaire. Or les policiers municipaux sont placés sous l’autorité du maire.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Je vais une fois de plus soutenir le Gouvernement. À cet égard, je prie M. le rapporteur, pour qui j’ai la plus grande estime, de bien vouloir m’en excuser, mais je dois lui dire que je ne comprends pas la position de la commission.

Alors que tout va à vau-l’eau, que l’état d’urgence a été instauré, qu’il faut accroître la sécurité, on refuse de permettre aux polices municipales de contribuer à cette sécurité, arguant que ce n’est pas son domaine.

Cela ne me paraît pas scandaleux que les polices municipales – on n’en trouve pas partout – puissent intervenir à la demande de l’autorité de transport dans certaines grandes villes dont les gares et les systèmes de transport sont parfois très compliqués à gérer. Sinon ce n’est pas la peine d’instaurer l’état d’urgence ni de lutter contre quoi que ce soit. Autant dire qu’on ne peut rien faire !

Pour ma part, je voterai l’amendement du Gouvernement. Il ne faut pas opposer droit et sécurité. Il faut les deux.

Je ne vois pas en quoi l’action de la police municipale serait absolument insupportable dans les zones de transport. L’intervention de la police municipale, non pas dans une gare parisienne, car il n’y a pas de police municipale à Paris, ce que je regrette infiniment, mais dans la gare Saint-Charles à Marseille par exemple ne me mettrait pas dans un état second.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Je suis en désaccord avec vos arguments, monsieur le rapporteur. Contrairement à ce que vous dites, il n’y a pas de problème de nature constitutionnelle. Il est déjà possible aujourd'hui de donner aux polices municipales des compétences limitées en matière de constatation d’infractions, s’agissant notamment des infractions routières. La loi le prévoit. C’est pour cette raison que nous proposons d’étendre cette possibilité aux infractions prévues par le code des transports.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Je vous sais gré, monsieur le rapporteur, de veiller à ce qu’on ne continue pas de transférer aux polices municipales, et donc aux communes, des charges que la police nationale exerce de moins en moins. Le risque de l’article 12 est en effet qu’il conduise à une plus grande sollicitation des collectivités locales à travers leur police municipale.

Cela étant dit, les polices municipales pouvant d’ores et déjà constater des infractions, notamment les infractions au code de la route, autant qu’elles puissent intervenir aussi dans les transports.

En revanche, madame la secrétaire d’État, le problème de l’exercice des compétences de police municipale au sein d’intercommunalités ayant la compétence transport, alors que ces polices sont placées sous l’autorité du maire, n’est pas réglé. Ce sujet a déjà été abordé dans notre hémicycle et a fait l’objet d’un rapport et d’une proposition de loi de nos collègues François Pillet et René Vandierendonck. Le Gouvernement doit travailler sur cette question afin qu’une solution soit trouvée. Il faut parvenir à mutualiser les polices municipales, tout en les maintenant sous l’autorité du maire, afin qu’elles puissent agir.

Votre amendement, madame la secrétaire d’État, fait déjà un effort dans ce sens, mais le problème demeure.

De même, la question des moyens des collectivités locales pour financer leurs polices municipales reste posée.

Monsieur le rapporteur, même si je comprends votre avis défavorable, je voterai l’amendement du Gouvernement, compte tenu de ce qu’est la réalité sur le terrain, en accord avec notre collègue Roger Karoutchi.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 39.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 12 est ainsi rédigé.

Article 12
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Article additionnel après l'article 13

Article 13

Le titre IV du livre II de la deuxième partie du code des transports est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa de l’article L. 2241-1-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans l’exercice de leurs missions de recherche de la fraude prévues par le code des douanes, les agents des douanes accèdent librement aux trains en circulation sur le territoire français. » ;

2° L’article L. 2241-6 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi modifié :

 après la première occurrence du mot : « public », sont insérés les mots : « , ainsi que toute personne qui refuse de se soumettre à l’inspection visuelle ou à la fouille de ses bagages ou aux palpations de sécurité » ;

 les mots : « enjoindre par les agents mentionnés au I de l’article L. 2241-1 » sont remplacés par les mots : « interdire par les agents mentionnés au I de l’article L. 2241-1 l’accès au véhicule de transport, même munie d’un titre de transport valide. Le cas échéant, elle peut se voir enjoindre par ces mêmes agents » ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « contraindre l’intéressé à descendre du véhicule » sont remplacés par les mots : « interdire à l’intéressé l’accès du véhicule ou le contraindre à en descendre » ;

3° À l’article L. 2242-5, après les mots : « puni de », sont insérés les mots : « deux mois d’emprisonnement et de » ;

4° (Supprimé)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 13.

(L'article 13 est adopté.)

Article 13
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Article 14

Article additionnel après l'article 13

Mme la présidente. L'amendement n° 12 rectifié bis, présenté par MM. Nègre, Karoutchi, Revet et Charon, est ainsi libellé :

Après l'article 13

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre II du titre IV du livre II de la deuxième partie du code des transports est complété par un article L. 2242-… ainsi rédigé :

« Art. L. 2242-… – Est puni de deux mois d’emprisonnement et de 3 750 € d’amende le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support :

« 1° Tout message incitant, notamment par la mutualisation du paiement d’éventuelles sommes sanctionnant une infraction, à ne pas respecter les dispositions du présent titre ou celles des règlements relatifs à la police ou à la sûreté du transport et à la sécurité de l’exploitation des systèmes de transport routiers, ferroviaires ou guidés ;

« 2° Tout message de nature à déceler la présence de contrôleurs ou d’agents de sécurité employés ou missionnés par un exploitant de transports routiers, ferroviaires ou guidés.

« Lorsque les agissements prévus au présent article sont commis par voie de presse écrite ou audiovisuelle ou au moyen d'un support de communication au public en ligne, les dispositions particulières des lois régissant ces matières sont applicables pour déterminer les personnes responsables. »

La parole est à M. Roger Karoutchi.

M. Roger Karoutchi. Cet amendement vise à lutter contre les systèmes permettant de mutualiser le paiement des amendes, d’inciter à la fraude ou d’indiquer où se trouvent les contrôleurs dans les transports publics.

Non seulement cette mutualisation est délictuelle, mais ces collectifs mettent en plus en danger la sécurité des contrôleurs. Indiquer exactement où se trouvent ces derniers et à quelle heure, c’est les désigner éventuellement à la vindicte.

Ces pratiques constituent un délit que je suggère de punir de deux mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende, ce qui est beaucoup moins sévère que ce que j’ai proposé tout à l’heure.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François Bonhomme, rapporteur. Défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Sagesse.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.

Mme Sophie Primas. Tous les amendements visant à éviter les fraudes que nous avons examinés montrent qu’il manque un système de vérification des titres de transport avant l’entrée dans le moyen de transport. Si nous en avions un, un grand nombre des amendements que nous avons examinés ne seraient plus justifiés. Nous devrions peut-être y réfléchir.

Certes, un tel système existe dans le métro, mais il n’empêche pas totalement la fraude. Ce serait cependant une bonne idée d’y réfléchir pour les trains de banlieue.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Titre III

DISPOSITIONS RELATIVES À LA LUTTE CONTRE LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES DANS LES TRANSPORTS

(Division et intitulé supprimés)

Article additionnel après l'article 13
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Article 15 (nouveau)

Article 14

(Supprimé)

Titre IV

DISPOSITIONS RELATIVES À L’OUTRE-MER

(Division et intitulé nouveaux)

Article 14
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 15 (nouveau)

I. – Le 2° du I de l’article 1er et les articles 3 bis, 6 et 8 ter sont applicables dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.

II. – Le 1° A du II de l’article 1er, en ce qu’il modifie l’article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure, est applicable en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.

III. – L’article 12 est applicable en Polynésie française.

IV. – Le titre IV du livre VI du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Après le 11° des articles L. 645-1 et L. 647-1, il est inséré un 11° bis ainsi rédigé :

« 11° bis Au 2° de l’article L. 632-1, après les mots : « activités mentionnées aux titres Ier et II », la fin de l’alinéa est supprimée ; »

2° Après le 12° de l’article L. 646-1, il est inséré un 12° bis ainsi rédigé :

« 12° bis Au 2° de l’article L. 632-1, après les mots : « activités mentionnées aux titres Ier et II », la fin de l’alinéa est supprimée ; ». (Adopté.)

Vote sur l'ensemble

Article 15 (nouveau)
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, dans le texte de la commission, modifié, je donne la parole à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous tenons à vous faire part de notre satisfaction d’avoir pu travailler sur cette proposition de loi de manière équilibrée, en cherchant à la fois à respecter notre État de droit, ce qui n’est pas simple, et à lutter contre trois phénomènes : le terrorisme, qui n’était initialement pas traité dans le texte ; la fraude, sur laquelle nous avons beaucoup échangé – peut-être s’agit-il d’un exercice très français, les fraudeurs se disant : « Après tout, si ça fonctionne, pourquoi pas ? » – ; enfin, la sécurité dans les transports de masse.

Nous sommes parvenus, je pense, à un texte d’équilibre, ce qui nous permettra de le voter.

Nous devons cependant être conscients de la modestie de notre travail et ne pas oublier le rapport de nos citoyens à la fraude. Les opérateurs de transport, notamment, devraient donc également effectuer un travail de sensibilisation et d’explication, en s’appuyant sur les dispositifs nouveaux dont ils vont désormais disposer.

La sécurité dans les transports repose également sur le sens civique de nos concitoyens : les gens doivent se soumettre au contrôle volontairement, mais ils doivent aussi être attentifs à ce qui se passe, comme cela a été le cas dans le Thalys.

De ce point de vue, je regrette que nous n’ayons pas pu débattre du dernier titre de la proposition de loi, notamment de l’article 14, M. le président de la commission ayant considéré qu’il n’était pas recevable au motif qu’il relevait du domaine réglementaire. Toutefois, nous savons bien que le harcèlement dont sont victimes les femmes dans les transports est souvent lié à l’indifférence des gens qui voyagent à leurs côtés. Pour lutter contre indifférence, nous devons communiquer davantage. Le vivre-ensemble, c’est aussi la citoyenneté. (M. Jean-Jacques Filleul, Mme Esther Benbassa et Mme Sophie Primas applaudissent.)

En tout cas, je suis fier que nous puissions ensemble voter ce texte.

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l'ensemble de la proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs.

(La proposition de loi est adoptée.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous remercier du travail que vous avez effectué sur ce texte et de la qualité de nos débats. Nous avons eu des échanges intéressants, utiles, qui, je l’espère, nous permettront de progresser par la suite.

À l’article 3 bis, je pense avoir compris quelles difficultés vous pose la proposition du Gouvernement concernant le criblage. J’espère que nous pourrons continuer de travailler ensemble et trouver une réponse à ces difficultés, qui soulèvent des questions de fond, lors de la réunion de la commission mixte paritaire. Je retiens l’intervention du président de la commission des lois et celle de M. Karoutchi. Il est très important que l’on parvienne à régler ces difficultés concrètes, opérationnelles, et qui se posent dans les termes que j’ai développés devant vous. (Applaudissements.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs
 

11

 
Dossier législatif : projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d'industrie et des chambres de métiers et de l'artisanat
Discussion générale (suite)

Chambres de commerce et d'industrie et chambres de métiers et de l'artisanat

Adoption en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif aux réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat (projet n° 252, texte de la commission n° 311, rapport n° 310).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d’État.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d'industrie et des chambres de métiers et de l'artisanat
Article 1er

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, l’État est engagé aux côtés des élus consulaires dans une réforme d’envergure, une réforme qui vise à moderniser les réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat au service de notre tissu économique local.

Comme tous les opérateurs de l’État, les réseaux consulaires doivent faire face à deux enjeux majeurs : participer à l’effort de maîtrise des dépenses publiques et s’organiser en adéquation avec la nouvelle carte régionale.

C’est une réforme indispensable ; elle demande de faire preuve de courage, mais elle permettra, à terme, d’offrir des services modernisés à nos entreprises. En effet, ces enjeux budgétaires et structurels représentent aussi une opportunité pour les réseaux consulaires. C’est l’opportunité de mener à leur terme les mouvements de mutualisation engagés depuis 2010. C’est l’opportunité de mieux articuler leurs actions avec les services de l’État et les régions. C’est surtout l’opportunité d’apporter aux entreprises un accompagnement plus lisible et encore plus efficace.

S’ils démontrent leur capacité à se moderniser, les réseaux consulaires sortiront renforcés de cette réforme. Notre objectif est donc d’aider les élus à saisir cette opportunité au plus vite. C’est tout le sens du projet de loi qui a été adopté par l’Assemblée nationale en décembre et sur lequel je souhaite revenir aujourd’hui.

Le Gouvernement veut permettre aux réseaux de disposer d’un cadre clair pour mener les changements nécessaires, et cela, avant les élections consulaires prévues pour la fin de l’année 2016. Nous espérons aller d’autant plus vite que les dispositifs dont nous allons parler aujourd’hui étaient déjà intégrés dans la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques et avaient été adoptés par le Parlement. Il y a eu une censure du Conseil constitutionnel sur un motif de procédure, et nous avons donc réengagé un travail législatif intense pour soumettre à la représentation nationale un nouveau texte aussi vite que possible. Je tiens à souligner par ailleurs que c’est un texte attendu par les élus consulaires, qui souhaitent, eux aussi, engager rapidement cette réforme.

Concernant les chambres de commerce et d’industrie, le projet de loi poursuit trois objectifs principaux : mutualiser, rationaliser et améliorer la représentativité au sein des chambres. Pour atteindre ces objectifs, nous introduisons notamment deux schémas régionaux.

Le premier sera un schéma directeur à caractère opposable, qui déterminera la carte consulaire de chaque circonscription régionale. Il sera adopté après concertation dans chaque CCI de région et permettra d’atteindre l’objectif de réduction du nombre d’établissements publics, tout en maintenant les missions de proximité.

Le deuxième schéma portera sur la description des missions des CCI de région. Il permettra de préciser les fonctions qui leur reviennent spécifiquement et donc de renforcer les mutualisations engagées en 2010.

Je tiens à souligner que le choix des schémas comme outils de la réforme n’est pas anodin. Nous voulons respecter l’autonomie des réseaux et permettre une réforme qui soit le fruit d’une véritable concertation au plus près des territoires. C’est toute la philosophie de ces deux schémas. Grâce à eux, les réseaux de CCI de région définiront eux-mêmes leur organisation et la répartition de leurs missions. C’était une demande de leur part, exprimée notamment en février 2015 par une délibération de l’assemblée générale des CCI, qui a obtenu 76 % de votes positifs.

En parallèle de ces deux schémas régionaux, le projet de loi vise à améliorer la représentativité de chaque CCI territoriale au sein de leur CCI de région. Nous proposons, en effet, de mieux répartir le nombre d’élus régionaux en proportion du poids économique de chaque échelon infrarégional. Cette disposition participe aussi à l’effort de modernisation du réseau des CCI.

S’agissant des chambres de métiers et de l’artisanat, le projet de loi prévoit de modifier le code de l’artisanat pour permettre aux chambres départementales de se regrouper en chambre de métiers et de l’artisanat de niveau interdépartemental, ou CMAI. À terme, le réseau des CMA se structurera progressivement autour de deux modèles cohérents : d’un côté, les chambres régionales de métiers et de l’artisanat, les CRMA, qui disposeront de chambres de métiers et de l’artisanat départementales et de chambres de métiers et de l’artisanat interdépartementales ; de l’autre, les chambres de métiers et de l’artisanat de région, qui se composeront de délégations départementales.

Telles sont donc l’essentiel des dispositions prévues par le projet de loi.

Ce texte fixe un cadre clair et introduit de nouveaux outils de rationalisation efficaces. Il respecte par ailleurs l’autonomie des réseaux consulaires dans la définition de leur stratégie de réorganisation, pour une mise en œuvre de la réforme qui se fasse au plus près des problématiques de chaque territoire.

Pour finir, je précise que le projet de loi a été précédé par une ordonnance, prise en application de la loi NOTRe, qui contient les mesures les plus urgentes pour permettre aux réseaux consulaires de s’adapter à la nouvelle carte régionale. Cette ordonnance permet donc aux chambres de commerce et d’industrie de région, les CCIR, et aux chambres de commerce et d’industrie territoriales, les CCIT, qui le souhaitent de fusionner dès le 1er janvier 2016, sans attendre les élections consulaires prévues pour la fin de l’année.

Concernant les CMA, l’ordonnance permet aux élus consulaires de décider avant le 31 janvier 2016 de la forme juridique qu’ils souhaitent adopter pour leurs nouvelles chambres régionales. À ce jour, les CMA en Normandie et dans le Nord-Pas-de-Calais-Picardie se sont engagées vers des fusions. Pour les autres CMA, l’absence de décision explicite entraîne la formation de chambres régionales de métiers et de l’artisanat.

Pour les CCI également, le mouvement est bien engagé, voire accompli dans un certain nombre de régions. En Normandie, les deux CCI de région ont fusionné, et le paysage des CCIT comprises au sein de cette région est en train de se réorganiser. On peut également citer en exemple la mise en place de la CCIT de Lyon Métropole, effective depuis le 1er janvier dernier.

D’autres projets sont en cours à un niveau interdépartemental. Je pense à la fusion de la CCIT « littoral normand-picard » et de la CCIT « côte d’Opale », à celle des CCIT de Mayenne et de la Sarthe et à la fusion de trois CCIT en Alsace, déjà votées par les chambres concernées.

Si nous voulons que ce mouvement de réorganisation continue à ce rythme, il est bien entendu de notre responsabilité collective de ne pas produire, à l’occasion notamment du débat parlementaire, un cadre trop rigide, susceptible de réduire l’adhésion des chambres à la réforme.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous l’aurez compris, ce projet de loi est un texte attendu par les réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat. Les débats au sein de l’Assemblée nationale ont révélé la possibilité de réunir un consensus autour de cette réforme qu’il nous semble crucial de préserver.

Les réseaux consulaires, essentiels pour la vitalité de nos territoires, sont prêts à se moderniser, mais ils ont besoin pour cela des outils adéquats. Je vous appelle donc à les doter de ces outils au plus vite pour permettre l’indispensable modernisation de nos réseaux consulaires, au service d’une action économique sur les territoires cohérente et efficace.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Houel, rapporteur de la commission des affaires économiques. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes saisis, en première lecture, du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif aux réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat.

Depuis près de dix ans, des efforts considérables ont été fournis par ces deux réseaux pour se réorganiser.

Historiquement, les chambres de commerce et d’industrie ont toujours eu un ancrage territorial et une influence variables, liés aux caractéristiques du bassin économique dans lequel elles évoluent et, bien évidemment, à la qualité de leurs ressortissants. Toutefois, la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux services a donné l’élan et les moyens nécessaires à la structuration des CCI autour de l’échelon régional, conduisant ainsi à une régionalisation « à la carte », pour mieux épouser les particularismes locaux.

De création plus récente, les chambres de métiers et de l’artisanat ont historiquement été organisées autour de l’échelon départemental, mais la loi du 23 juillet 2010 a également entendu faire de l’échelon régional le niveau structurant du réseau en autorisant trois modes de regroupement au niveau régional, assurant une intégration plus ou moins poussée en fonction des besoins exprimés par les membres du réseau.

Le mouvement de rationalisation ainsi engagé reste cependant inabouti, car il se heurte parfois à une volonté d’autonomie encore très marquée des chambres infrarégionales. Or la poursuite de la rationalisation des réseaux est rendue d’autant plus nécessaire du fait de l’érosion des ressources publiques octroyées aux chambres consulaires. Au total, s’agissant des chambres de commerce, la baisse des recettes issues de la taxe pour frais de chambres a été de l’ordre de 35 % entre 2012 et 2016. Pour les chambres de métiers, le montant du plafond de la taxe pour frais de chambres a baissé de 12,5 % entre 2013 et 2016. Ce à quoi l’on assiste aujourd'hui doit, bien sûr, faire prendre conscience aux deux chambres de la difficulté de rester en l’état.

En outre, la nouvelle carte des régions implique une réorganisation des réseaux, car, dans les nouvelles régions instituées le 1er janvier 2016, le principe d’une structuration au niveau régional a pour conséquence de rendre inévitables des fusions entre certaines chambres de niveau régional ou, à tout le moins, la transformation de leur périmètre d’action.

Afin d’approfondir cette démarche de rationalisation, le Gouvernement a déposé, au cours de l’examen du projet de loi Macron, des amendements tendant à insérer plusieurs articles additionnels relatifs à la gouvernance des réseaux consulaires, qui ont été adoptés sans opposition par les deux chambres du Parlement. Dans sa décision du 5 août 2015, le Conseil constitutionnel a cependant estimé que ces dispositions avaient été adoptées selon une procédure contraire à la Constitution. La loi a donc été promulguée sans ces articles.

Voilà pourquoi le Parlement est de nouveau saisi de dispositifs semblables à ceux que nous avons examinés il y a déjà plus de six mois. Cette reprise n’est toutefois que partielle : les dispositions les plus urgentes ont fait l’objet d’une ordonnance, prise le 26 novembre dernier, sur le fondement d’une habilitation figurant dans la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « loi NOTRe ». Les dispositions du présent projet de loi, qui n’ont guère été modifiées sur le fond par l’Assemblée nationale, apportent donc des correctifs ponctuels à la gouvernance des CCI et des CMA.

Pour les chambres de commerce, les plus notables consistent en un renforcement des prérogatives des chambres de région, en particulier en donnant aux schémas directeurs un caractère prescriptif et en créant des nouveaux schémas d’organisation des missions, opposables aux chambres territoriales ou départementales rattachées.

Pour les chambres de métiers, il faut évoquer la possibilité, désormais offerte, d’instituer des chambres interdépartementales et de renforcer l’intégration au niveau régional avec la suppression des chambres de métiers de région dites « partielles ».

Enfin, introduit par l’Assemblée nationale, l’article 3 du projet de loi procède à la ratification sans modification de l’ordonnance du 26 novembre 2015.

Le présent projet de loi s’inscrit dans une démarche de renforcement de l’échelon régional, rendu d’autant plus nécessaire compte tenu du nouveau poids des régions dans notre organisation territoriale. Il apporte donc des outils ponctuels nécessaires à la poursuite de la démarche de rationalisation en cours. On peut en partager l’objectif, mais il faut souligner que les effets immédiats de l’approfondissement de cette réorganisation, alliée à la réduction des ressources des réseaux, se traduiront d’abord par des réductions importantes des personnels des chambres – celles-ci pourront toutefois réembaucher ces personnes en priorité une fois leur réorganisation effectuée. Mais si, à l’avenir, cette rationalisation permet effectivement un meilleur accompagnement des entreprises et, ce faisant, un développement de l’emploi marchand, elle mérite sans doute d’être soutenue.

En outre, d’une ambition très mesurée, ce texte n’épuise pas toutes les problématiques que peut soulever l’organisation consulaire actuelle. Pourtant, il doit pouvoir être adopté rapidement : les réseaux attendent ces mesures depuis plus de six mois déjà, par le seul fait d’une regrettable erreur de procédure parlementaire commise par le Gouvernement. Toutes les personnes auditionnées ont ainsi insisté sur la nécessité d’une adoption rapide de ce texte afin que la campagne pour les élections consulaires, qui auront lieu au début du dernier trimestre de 2016, puisse s’ouvrir dans un environnement juridique stabilisé. Votre commission est donc favorable à son adoption.

J’ajoute que nous avons également auditionné des représentants des chambres d’agriculture, qui se trouveront peut-être confrontées, tôt ou tard, à des problèmes financiers. Nos interlocuteurs ont été très attentifs, et je pense qu’ils pourront faire œuvre commune sur certains points.

Cette démarche de rationalisation des réseaux et de renforcement des prérogatives de l’échelon régional n’est acceptable que si, dans le même temps, elle ne fait pas disparaître leurs implantations de « proximité » – nous sommes très attachés à cette proximité, tout comme les habitants des territoires ruraux, à qui l’on a déjà retiré beaucoup de choses. Certes, l’esprit de la réforme de 2010 était d’inciter les chambres à se regrouper, en adoptant les stratégies territoriales que, compte tenu des caractéristiques des bassins économiques concernés, les élus consulaires considéraient comme les plus pertinentes, mais le droit positif, modifié par le projet de loi, offre une large palette de solutions juridiques envisageables pour que le lien avec les territoires soit maintenu.

Pour autant, soucieuse de garantir un maillage territorial suffisant des réseaux consulaires, seul à même de garantir le maintien d’une offre de service de proximité indispensable à un bon accompagnement des entreprises sur le terrain, votre commission des affaires économiques a imposé la présence minimale d’une entité du réseau des chambres de commerce – délégation de la chambre régionale ou chambre territoriale, selon le cas – dans chaque département.

Mme la présidente. Il faut conclure, monsieur le rapporteur.

M. Michel Houel, rapporteur. Les réseaux ne doivent pas se regarder comme des concurrents, ce qui est parfois le cas, malheureusement – nous le regrettons très vivement –, mais comme des partenaires à même de développer des coopérations profitables à tous.

Néanmoins, ces mesures appellent moins de nouveaux dispositifs juridiques qu’une volonté, sur le terrain, de mettre en place des solutions adaptées lorsque le service aux entreprises, qu’elles soient commerciales, artisanales ou agricoles, peut s’en trouver amélioré.

La commission des affaires économiques vous invite donc, mes chers collègues, à adopter ce projet de loi ainsi modifié.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Bertrand.

M. Alain Bertrand. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi reprend des dispositions de la loi Macron censurées par le Conseil constitutionnel et s’inscrit dans la continuité de la réforme du 23 juillet 2010, qui a permis d’entamer un mouvement de rationalisation et une régionalisation plus importante des CCI au moyen du regroupement de chambres.

Si ces regroupements sont souhaitables, supprimer la limitation du nombre de sièges d’une chambre territoriale au sein de sa chambre régionale de rattachement en tenant compte du seul critère du poids économique ne me semble pas être une chose juste. Si le texte reste en l’état, dans la grande région Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, les chambres territoriales de l’Ariège ou de la Lozère n’auront aucun pouvoir ; il suffira aux chambres puissantes, celles de l’Hérault ou de la Haute-Garonne par exemple, que nous apprécions beaucoup par ailleurs, de s’accorder pour décider de tout. Cela n’est ni bon ni juste ! Il faut que chaque chambre territoriale soit assurée d’être représentée au sein de sa chambre régionale, mais surtout garantir un équilibre entre les petites chambres et les puissantes.

La loi de finances pour 2016 a institué un fonds de péréquation versé et fléché par CCI France aux chambres régionales. Lorsque j’avais relayé, en 2014, la demande de création de ce fonds de péréquation, c’était dans l’idée que les chambres puissantes soutiennent les plus petites, celles situées dans les territoires ruraux et hyper-ruraux. Le but était de leur permettre de continuer à assurer leurs missions et, ainsi, garantir le maillage territorial sur l’ensemble du sol national. Cela découle d’un principe qui m’est cher, énoncé dans mon rapport sur l’hyper-ruralité : « pas de sous-citoyen, pas de sous-territoire ! »

Or ce fonds de péréquation s’élève à 20 millions d’euros pour 2016, dont 2 millions d’euros pour CCI France et 18 millions d’euros destinés à soutenir les chambres portant des projets d’investissement ou étant en difficultés financières, quelle que soit leur taille ou leur localisation ! Rien n’indique donc que ce fonds bénéficiera aux chambres qui en ont le plus besoin, c’est-à-dire aux plus faibles, celles qui sont situées en zone rurale et hyper-rurale. Une répartition proportionnelle à leur taille économique permettrait à la grande CCI de Paris de percevoir 4,3 millions d’euros sur les 18 millions d’euros du fonds. Ce serait le contraire du but recherché !

Je sais que, récemment, Mme Pinville et M. Macron ont adressé un courrier au président de CCI France pour lui préciser qu’une partie « substantielle » de ces 18 millions d’euros devait aller vers les CCI situées en zone de revitalisation rurale. Je crois qu’il est important de définir à quel montant correspond cette « partie substantielle ».

M. Alain Bertrand. Pour ma part, je milite pour que cela soit la moitié de ce fonds.

Si rien n’est fait, comment peut-on espérer que nos territoires les moins densément peuplés puissent concourir au développement économique alors qu’on les prive de moyens ? À titre d’exemple, l’an passé, la CCI de Lozère a conclu son exercice budgétaire avec un déficit de 260 000 euros, non pas à cause d’une mauvaise gestion – elle a réalisé de nombreuses économies, vendu une partie de ses biens, mutualisé l’intégralité de ses fonctions support ! –, mais parce qu’elle supporte des charges très lourdes, notamment la gestion de l’aérodrome de Mende, qui est indispensable à l’économie du département, mais aussi à la sécurité des personnes et à l’égalité des territoires. Je rappelle que, aujourd’hui, alors que les zones hyper-rurales constituent près de 26 % du territoire national, elles ne perçoivent que 4,87 % des ressources totales des CCI.

L’hyper-ruralité a des droits, elle aussi, et l’État a besoin de ces chambres territoriales. En effet, plus on est rural, plus on doit accompagner les mesures gouvernementales. En Lozère, c’est essentiellement la CCI qui a accompagné, à la demande du préfet, la mise en place du CICE.

Pour le reste, ce texte est bon, mais il devra s’appliquer rapidement. Pour autant, si aucune garantie n’était apportée, je choisirais de ne pas encore pénaliser la ruralité et l’hyper-ruralité. Il faut maintenir une offre de proximité et un maillage local. C’est un impératif au regard du principe d’égalité républicaine, lui-même sous-tendu par le principe d’équité, qui s’impose à tout le monde, que l’on soit de gauche ou de droite. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier.

Mme Anne-Catherine Loisier. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, pour une approche plus concrète des dispositions contenues dans le projet de loi que nous examinons, permettez-moi de citer quelques extraits de schémas préétablis de CCI : « réaffirmer la primauté opérationnelle de l’échelon territorial », « reconnaître à chaque échelon des missions spécifiques », « favoriser la mise en place de CCI et de CMA régionales représentatives s’appuyant sur des réseaux de CCIT ou de CMAI »…

À partir de ces exemples, on mesure la volonté des acteurs économiques consulaires de valoriser les échelons de proximité pertinents à même de développer des initiatives territoriales. Ils s’articulent autour de chambres territoriales dotées de personnalité juridique et financière, d’une réelle capacité d’initiative et de structures régionales assurant des fonctions support d’une stratégie collectivement élaborée.

Ce cadre législatif, à partir duquel les organismes consulaires ont déjà commencé à travailler, s’exerce donc en toute collégialité. Je rappelle, mes chers collègues, que nous avons défini et voté ces principes à l’unanimité, voilà quelques mois, lors de l’examen du projet de loi Macron. Ils ont fait consensus au Sénat et à l’Assemblée nationale, nos collègues députés ayant largement retenu et voté nos aménagements.

Nous réexaminons aujourd’hui ces dispositions, parce que le Conseil constitutionnel les a censurées, au motif qu’elles constituaient des cavaliers législatifs. Toutefois, depuis notre vote, la position de certains de nos collègues a évolué, une évolution motivée, semble-t-il, par l’observation de pratiques régionales qui pourraient menacer la présence et la capacité d’agir de chambres locales. Ils l’ont manifesté par des amendements limitant la portée des schémas organisationnels tels qu’ils sont prévus dans ce projet de loi.

En tant qu’élue rurale, je suis attachée comme eux à une présence consulaire de proximité, mais celle-ci sera d’autant plus dynamique et efficace qu’elle s’inscrira dans une stratégie régionale partagée et consolidée. Car l’objectif est bien d’organiser demain, sur nos territoires, des CCI et des CMA fortes, capables non seulement de porter des initiatives et des services de proximité, mais aussi d’accompagner les entrepreneurs !

Au-delà de la genèse du texte et de son approche collégiale – deux arguments qui plaident en faveur de son adoption conforme –, il faut également rappeler que cette réforme est attendue par le réseau des chambres consulaires. Nous qui réclamons quotidiennement dans cette assemblée des décisions politiques en lien avec les territoires et les acteurs locaux, nous ne pouvons ignorer le vote de l’assemblée générale de CCI France en février 2015, qui a plébiscité ce texte à hauteur de 76 %. La méthode de travail utilisée par le Gouvernement, qui a associé le réseau des CCI et des CMA à l’écriture du projet de loi, y est certainement pour beaucoup et confère à ce texte une légitimité indéniable.

Les acteurs consulaires comptent donc sur nous et sur une adoption rapide du texte pour passer à l’action sans perdre de temps et adapter le réseau aux évolutions, notamment à la réforme territoriale. Ainsi, les nouveaux schémas directeurs des CCI et des CMA devront être votés dès février. Ensuite, et avant le 31 mars, seront déterminées les règles électorales et la composition des collèges électoraux pour des élections qui devraient se tenir à l’automne. Alors seulement, les réseaux des CCI et des CMA seront en ordre de marche pour développer leurs actions, tout en faisant face aux réalités budgétaires drastiques qu’ils connaissent. Vous le savez, les CCI et les CMA ont été confrontées à des réductions budgétaires considérables : les recettes ont baissé de 35 % pour les CCI entre 2012 et 2016 !

Cette réorganisation s’impose donc pour mettre en cohérence les chambres de commerce et d’industrie territoriales et les bassins économiques et pour gagner en efficacité au bénéfice des entreprises et des entrepreneurs.

Le texte accorde aux réseaux des CCI et des CMA la liberté de développer leur propre schéma organisationnel stratégique. Ils pourront ainsi se structurer en fonction des réalités diverses, des projets et des besoins qui sont propres à leur territoire.

À l’heure de la simplification administrative, à l’heure des plans d’urgence pour l’emploi et de la lutte prioritaire contre le chômage, faisons confiance aux acteurs économiques de terrain pour optimiser les atouts de nos territoires, identifier les sujets porteurs et soutenir les initiatives qu’ils connaissent bien ! Quel signal donnerions-nous aux chefs d’entreprise de notre pays si nous ne leur faisions pas confiance pour s’organiser au mieux de l’intérêt économique collectif ? Sur quels fondements saurions-nous mieux qu’eux comment doit s’organiser le maillage consulaire de nos territoires ?

Choisissons donc de faire confiance aux forces vives, aux hommes et aux femmes qui s’impliquent quotidiennement dans les CCI et dans les CMA ! Avec de nombreux collègues du groupe UDI-UC, nous voterons, en conséquence, les amendements de suppression des alinéas 6 à 8 de l’article 1er pour rétablir la version qui est attendue par les chambres consulaires.

Nous soutiendrons les acteurs économiques des chambres de commerce et d’industrie et de celles de métiers et de l’artisanat, qui, comme nous le faisons actuellement dans nos collectivités, souhaitent adapter leurs structures aux réalités nouvelles. (MM. Joël Labbé et Yannick Vaugrenard applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.

M. Jean-Pierre Bosino. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi dont nous débattons aujourd’hui est une étape de plus vers la mise en cause de notre réseau consulaire, initiée il y a déjà plusieurs années. Ainsi, depuis près de dix ans, ce réseau est attaqué par les gouvernements successifs et le projet de loi qui nous est soumis s’inscrit dans la continuité de la réforme de 2010, en reprenant certaines des dispositions censurées par le Conseil constitutionnel.

Pourtant, les promoteurs des réformes successives nous rappellent l’importance des missions fondamentales menées par les CCI auprès des entreprises et des territoires, en termes de formation, d’accompagnement ou encore de gestion d’infrastructures. Même si tous reconnaissent la difficulté des efforts qui leur sont ainsi demandés, cela n’a pourtant pas empêché l’organisation de l’asphyxie progressive du réseau. Comme le souligne le rapporteur lui-même, il y a une érosion des ressources des CCI et des CMA. Ainsi, la baisse des recettes issues de la taxe pour frais de chambres a été de l’ordre de 35 % entre 2012 et 2016.

Toujours selon le rapport de la commission, cette réduction du financement public du réseau des CCI a déjà conduit les chambres à abandonner, au 1er septembre 2015, 349 millions d’euros d’investissements et à mettre en place de véritables plans de suppressions d’emplois concernant 1 750 salariés sous statut. Malheureusement, d’autres départs devront être envisagés ! Il en est de même pour les CMA, dont la taxe pour frais de chambres a baissé de 12,5 % entre 2013 et 2016.

Le plus surprenant, c’est que tout le monde est conscient que les effets immédiats de cette réorganisation, alliée à la réduction des ressources des réseaux, se traduiront par d’autres réductions importantes du nombre des personnes travaillant dans les chambres. Car, in fine, ce qui importe depuis plus de dix ans, c’est d’organiser une diminution des ressources fiscales, qui devrait se traduire par une baisse de la fiscalité des entreprises au détriment de l’emploi et du maillage territorial.

De plus, cette réforme est porteuse d’une centralisation administrative régionale supplémentaire, qui oublie les spécificités de terrain ainsi que les atouts territoriaux à valoriser. En effet, l’objet du présent texte est, d’une part, de favoriser la réduction du nombre d’établissements des deux réseaux – CCI et CMA –, au risque d’entraîner la dégradation du service de proximité nécessaire au soutien des entreprises, et, d’autre part, d’accélérer leur mise en conformité territoriale avec les nouvelles régions, mises en place en application de la loi NOTRe.

En ce qui concerne les CCI, le texte rend opposables les schémas directeurs élaborés par les chambres de région, crée un nouveau schéma régional d’organisation des missions, également opposable, et étend les possibilités de fusion entre les CCI départementales. Il prévoit également une nouvelle représentation des territoires au sein des chambres, en mettant fin à la règle selon laquelle aucune chambre territoriale, locale ou départementale ne peut disposer de plus de 40 % des sièges d’une chambre de région et en modifiant le plafond de sièges des chambres territoriales et des chambres de région, en les portant respectivement de soixante à cent et de cent à cent vingt.

Pour les CMA, le projet de loi autorise la création de chambres interdépartementales, résultant de la fusion de chambres départementales, et précise les modalités de regroupement des chambres de niveau infrarégional en chambres de région. Ces mesures doivent permettre, selon leurs promoteurs, d’améliorer l’intégration régionale du réseau.

Comme une forme d’obsession, l’échelon départemental est ainsi systématiquement dépecé de son organisation administrative et institutionnelle, au fil des différents projets de loi. Nous le contestons ! D’une part, dépouiller le département de sa réalité administrative entraîne de fait la suppression d’un espace de démocratie. D’autre part, nous estimons qu’il est utile de garantir, au niveau départemental, un fort pouvoir d’initiative des CCI, au plus près des besoins, mais également des réalités. À cet égard, les amendements adoptés en commission prévoyant de garantir, par la loi, la présence d’au moins une CCI territoriale dans chaque département ou, le cas échéant, d’une délégation de la CCI de région par département sont les bienvenus. Mais cela reste évidemment très insuffisant.

À l’image des politiques libérales, vous cherchez, une nouvelle fois, à faire des économies au détriment du service public et de l’aménagement des territoires, en privant d’assise territoriale forte les chambres de commerce et d’industrie et les chambres de métiers et de l’artisanat. De manière connexe, cela permettra une nouvelle fois d’abaisser les charges des entreprises. C’est donc, selon vos critères, une excellente réforme que vous nous proposez d’adopter ! Nous allons évidemment porter une voix différente…

Déjà, en 2010, les parlementaires du groupe CRC s’étaient opposés à l’application brutale de la RGPP – certains l’appelaient « révision générale des politiques publiques », mais il s’agissait plutôt de la « réduction générale des politiques publiques »… Je note que ce qui a suivi n’est pas mieux ! Nous nous étions également opposés à la régionalisation forcée pour permettre une réduction du coût de l’ensemble du réseau.

Vous l’aurez compris, nous voterons contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Vaugrenard.

M. Yannick Vaugrenard. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le texte que nous examinons aujourd’hui met en place une réforme essentielle pour l’avenir de nos chambres de commerce et d’industrie et nos chambres de métiers et de l’artisanat.

Dans un premier temps, le projet de loi vise à ratifier une ordonnance prise par le Gouvernement qui permet à ces réseaux de chambres de s’adapter à la réforme territoriale promulguée en août dernier. Depuis le 1er janvier, il est en effet proposé aux chambres de commerce et d’industrie de région qui le souhaitent ainsi qu’aux chambres de commerce et d’industrie territoriales qui leur sont rattachées de fusionner pour mettre en conformité leur organisation avec celle des nouvelles régions, et cela sans attendre les élections des membres des chambres de commerce et d’industrie qui sont prévues à la fin de l’année 2016.

Pour les chambres de métiers et de l’artisanat, l’objectif est de disposer d’une seule chambre de niveau régional, comme interlocuteur unique du conseil régional, dans les sept nouvelles régions fusionnées. Le choix de la forme juridique de la nouvelle chambre de niveau régional doit être décidé, au plus tard le 31 janvier, par les élus qui seront également renouvelés à la fin de cette année. Cette échéance laisse aux établissements du réseau des CMA un délai raisonnable pour opérer cette modification, étant précisé que le périmètre actuel des chambres de niveau régional est maintenu jusqu’au 31 mars 2016. Pour les régions qui conservent leurs limites territoriales antérieures, il est prévu la création d’une chambre de métiers et de l’artisanat uniquement composée de sections, dépourvues de la personnalité juridique.

En poursuivant trois objectifs, le projet de loi est également porteur d’une réforme d’ampleur pour nos chambres de commerce et d’industrie.

Premier objectif : renforcer le mouvement de rationalisation et de mutualisation des fonctions support au niveau régional, tel qu’il est mis en œuvre depuis 2010, en instituant un schéma régional d’organisation des missions dans chaque chambre de commerce et d’industrie de région.

Deuxième objectif : rationaliser le réseau, en conférant aux schémas directeurs un caractère opposable, ce qui permettra, après concertation, d’atteindre l’objectif de réduction du nombre d’établissements publics, tout en maintenant les missions de proximité.

Enfin, troisième objectif : améliorer la représentativité de chaque CCI territoriale, locale ou départementale en proportion de son poids économique.

En ce qui concerne les CMA, le projet de loi modifie le code de l’artisanat, en ouvrant aux chambres départementales la possibilité de se regrouper en chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale, tout en conservant des délégations départementales si elles le souhaitent.

J’aimerais maintenant revenir rapidement sur les raisons pour lesquelles nous nous retrouvons à examiner, une nouvelle fois, cette réforme.

La loi NOTRe ayant modifié notre organisation territoriale et la contrainte budgétaire devant être supportée par tous, la nécessité de la réforme consulaire avait déjà été anticipée par le Gouvernement. La loi Macron, que nous avons adoptée, mes chers collègues, contenait ces dispositions de manière précise, mais elles ont été censurées par le Conseil constitutionnel, uniquement pour un motif de procédure. Le texte que nous examinons aujourd’hui reprend donc ces dispositions, sur lesquelles nous étions d’accord.

M. Yannick Vaugrenard. Au vu des débats qui ont eu lieu lors de la réunion de la commission des affaires économiques la semaine dernière, j’aimerais vous rappeler quelques éléments qui me paraissent particulièrement importants.

La bonne organisation des prochaines élections consulaires, qui auront lieu à la fin de cette année, dépend de l’adoption de ces mesures le plus tôt possible, puisque les nouveaux schémas directeurs des CCI doivent être votés en février pour respecter la date du 31 mars 2016 en ce qui concerne la fixation des règles de l’élection et la composition des collèges électoraux. De plus, de nombreux projets de réorganisation des CCI en région sont suspendus à l’adoption définitive de ces mesures, que ce soit les schémas directeurs prescriptifs, les schémas d’organisation régionale prescriptifs ou encore l’adaptation du nombre de sièges dans les CCI territoriales et les CCI de région.

Je tiens par ailleurs à vous signaler que, grâce à l’ordonnance du Gouvernement, le premier projet de rapprochement interrégional a pu voir le jour. Une seule CCI de région et cinq CCI territoriales, au lieu de douze précédemment, ont ainsi été instaurées en Normandie. Cette nouvelle organisation est entrée en vigueur le 1er janvier 2016. La réforme a donc bien été prise en compte par les CCI, avec des entités départementales.

Enfin, et c’est pour moi un point essentiel, le projet de loi est voulu, souhaité, demandé par le réseau des CCI, selon les orientations qui ont été votées à une forte majorité – 76 % ! – en février 2015, lors de l’assemblée générale de CCI France. Ce texte a d’ailleurs été rédigé avec le réseau des CCI. Il donne les outils indispensables à la bonne mise en œuvre de la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires. En outre, il est conforme aux recommandations du rapport de nos collègues Jean-Claude Lenoir et Claude Bérit-Débat de juillet 2014, que nous avions soutenu.

Mes chers collègues, il s’agit de mettre en place, pour l’avenir, une organisation efficiente et efficace des réseaux dans les régions qui permettrait de satisfaire l’exigence de maîtrise des dépenses publiques, tout en offrant des services de proximité aux entreprises et aux personnes. Les CCI de région décideront de la manière dont cela pourra s’organiser.

L’adoption de ce texte dans une version conforme à celle de l’Assemblée nationale – point particulièrement important – ne nuirait en aucun cas à l’exercice du débat parlementaire, puisque nos débats ont déjà eu lieu. Cela me paraîtrait même essentiel, afin de faire entrer le réseau des CCI et des CMA dans le temps présent et de leur permettre de continuer leurs missions au plus près des acteurs locaux. Je vous invite donc à voter ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé.

M. Joël Labbé. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur l’historique de ce projet de loi, qui a été rappelé par mes collègues. Nous avons affaire à un texte plutôt technique qui vient poursuivre l’œuvre de rationalisation de l’organisation des chambres consulaires, entamée il y a maintenant plus de dix ans.

Cette régionalisation de l’organisation va dans le sens des textes de décentralisation, même s’il faut veiller à ne pas supprimer l’ancrage territorial de proximité. La création des grandes régions vient encore accélérer ce phénomène. En ce sens, je suis toujours particulièrement sensible aux arguments de notre collègue Alain Bertrand, ardent défenseur de nos territoires ruraux, qui restent incontestablement une précieuse richesse, non seulement d’un point de vue patrimonial, mais aussi parce qu’ils sont porteurs d’avenir pour une économie qui devra, à terme, devenir résiliente.

Dans le Morbihan, les chambres sont surtout remontées contre les prélèvements sur réserve dont elles ont fait l’objet ces dernières années et qui leur ont semblé plutôt injustes. Elles ont dû annuler un certain nombre de projets économiques sur leur territoire, tels que des pépinières d’entreprises. Pour la chambre de commerce et d’industrie du Morbihan, il s’agit tout de même de 6 millions d’euros qui, au lieu d’être réinjectés dans l’économie locale, sont venus éponger – mais si peu ! – le déficit de l’État. Une meilleure concertation en amont aurait permis d’éviter le sentiment d’un arbitraire de l’État.

Je voudrais souligner le rôle clé des CCI et des CMA dans l’appui qu’elles fournissent aux entreprises de nos territoires, aussi bien dans la coordination du développement local que dans leur représentation au sein des instances nationales et internationales, trop souvent dominées par les grosses entreprises, multinationales notamment. Dans le Morbihan, la chambre de métiers et de l’artisanat regroupe 4 200 entreprises, soit 27 500 salariés.

Je me suis intéressé plus particulièrement à l’apprentissage, qui permet d’obtenir tous les niveaux de diplômes, du CAP jusqu’au bac+5, grâce à des formations qualifiantes, responsabilisantes et diplômantes. Il permet une meilleure intégration sur le marché du travail des jeunes et associe les entreprises aux contenus des formations délivrées.

Mme Sophie Primas. Très bien !

M. Joël Labbé. Ces formations permettent de redonner une image valorisante auprès des jeunes de nombreux métiers manuels, par exemple les métiers de bouche. Notre institution peut s’enorgueillir d’accueillir les lauréats du concours des meilleurs apprentis de France : c’est toujours un moment fort pour nous, lorsque nous accueillons ces jeunes pour les honorer.

Je me réjouis également que le Président de la République ait fait de l’apprentissage une priorité pour l’année 2016.

Mme Sophie Primas. Il était temps !

M. Joël Labbé. Cependant, lorsque l’on définit des politiques prioritaires, il convient de s’assurer des moyens de financement de ces politiques.

Là encore, dans le Morbihan, les plafonnements et prélèvements des dernières années sur le budget de la chambre de métiers ont rendu la situation assez complexe. Cette chambre gère un CFA qui accueille 1 500 apprentis chaque année. La gestion d’un tel établissement nécessite des investissements mobiliers et immobiliers importants que le conseil départemental ne prend que partiellement en charge. À titre d’exemple, la chambre de métiers a investi, entre 2012 et 2016, près de 9,2 millions d’euros dans la rénovation de son CFA, dont 2,6 millions d’euros en autofinancement. D’où la nécessité de conserver des réserves, même optimisées…

Par ailleurs, le financement des CFA passe aussi par la taxe d’apprentissage. Celle-ci représente près de 20 % du budget de la chambre de métiers et de l’artisanat. Il convient donc de veiller à ce que la taxe d’apprentissage soit réellement fléchée vers l’apprentissage.

À compter du 1er janvier 2016, un nouvel organisme collecteur interconsulaire régional recouvrera la taxe d’apprentissage pour le compte des chambres d’agriculture, des chambres de métiers et des chambres de commerce et d’industrie. Si sa création n’a pas présenté de difficultés majeures, il conviendra de rester particulièrement vigilant quant à la répartition des fonds libres, la loi ne prévoyant pas, au niveau national, de critères d’affectation objectifs et réalistes, comme le nombre d’apprentis formés par chacun des réseaux consulaires.

Les chambres de métiers ont besoin de ressources pérennes pour préparer l’avenir, former des jeunes, accompagner et soutenir les entreprises. Depuis 2013, le plafonnement de leurs ressources, toujours un peu plus à la baisse chaque année, fragilise les trésoreries des établissements, malgré les efforts de rationalisation et d’efficience de fonctionnement conduits depuis longtemps. En effet, les chambres de métiers et de l’artisanat de Bretagne se sont déjà engagées dans des démarches collectives d’optimisation de leurs moyens, car elles souhaitent conserver les capacités nécessaires au maintien de la proximité, de la qualité et de l’efficience des services offerts aux entreprises artisanales.

Enfin, je voudrais évoquer la question des moyens humains de l’apprentissage. Si deux tiers des enseignants-formateurs des CFA sont titulaires de leur poste dans le Morbihan, un tiers de ces enseignants restent en CDD sous convention financière avec les régions et, pour la plupart, ne travaillent pas à temps plein : ils oscillent entre mi-temps et temps partiel à 80 %, en fonction des demandes. Il conviendrait donc de trouver des solutions pour remédier à cette situation qui ne peut être acceptable.

Ce texte va dans le sens de la régionalisation et de la mutualisation. Il convient cependant de veiller au maintien de l’ancrage territorial. En fonction de l’évolution des débats, nous pourrions être favorables à son adoption. (Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier la commission d’avoir soutenu l’amendement que j’ai déposé. Je voudrais vous dire, en quelques mots, pourquoi cet amendement me paraît important.

Vous savez que cette réforme a été engagée pour préfigurer la suppression des départements. C’est ainsi que nous avons assisté à la mise en place de chambres régionales de commerce qui ont privé les chambres départementales de leurs ressources. Nous voyons d’ores et déjà la traduction concrète de cette volonté délibérée.

Dans mon département, la chambre de commerce joue un rôle essentiel : c’est elle qui est chargée du développement économique du département, car celui-ci n’a pas créé d’agence. La chambre de commerce a ainsi créé l’école supérieure de commerce. Aujourd’hui, elle ne peut plus la financer, parce que les recettes remontent à la chambre régionale. Si nous voulons conserver des instruments permettant une action de proximité dans les départements qui n’accueillent pas un chef-lieu, il est essentiel d’être attentif à créer les conditions qui permettent à ces instruments d’exister.

La volonté du Gouvernement et des grandes chambres régionales de commerce est de faire en sorte que ne subsistent plus qu’une chambre régionale au chef-lieu de la grande région et les anciennes chambres régionales, toutes les autres chambres étant supprimées. Cette démarche est contraire à l’efficacité économique, puisque nous aurons ainsi un niveau de plus. Nous acceptons, quant à nous, qu’une chambre régionale soit créée dans la grande région et que les chambres départementales continuent de travailler auprès du terrain, afin que les entreprises et le commerce trouvent des interlocuteurs de proximité, gages d’efficacité administrative et économique.

C’est la raison pour laquelle j’ai déposé un amendement afin que, dans chaque département, une chambre de commerce puisse continuer à exister. Je dispose déjà d’exemples de départements qui risquent de ne plus avoir de chambre consulaire, parce que le pouvoir de décision va être concentré dans les anciennes capitales régionales, à l’encontre des intérêts du territoire et de la proximité. Une telle évolution me paraît assez grave. C’est pourquoi j’espère que vous pourrez soutenir mon amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas.

Mme Sophie Primas. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, j’interviens ce soir au nom de notre collègue Élisabeth Lamure, présidente de la délégation aux entreprises.

Le texte qui nous est soumis aujourd’hui reprend les dispositions adoptées par le Parlement, dans le cadre de l’examen du projet de loi dit « Macron », et censurées par le Conseil constitutionnel, qui y a vu des cavaliers législatifs. Le Gouvernement soumet donc de nouveau ces mesures au Parlement.

Dans son article 1er, relatif aux chambres de commerce, le texte rend opposable les schémas directeurs élaborés par les chambres de région. Il crée un nouveau schéma régional d’organisation de missions, également opposable, et il étend les possibilités de fusion entre les CCI départementales.

Dans son article 2, relatif aux chambres de métiers et de l’artisanat, il autorise la fusion de chambres départementales et précise les modalités de regroupement des chambres de niveau infrarégional en chambres de région.

Enfin, dans son article 3, le texte ratifie une ordonnance prise en application de la loi NOTRe. Pour les CCI, cette ordonnance prévoit les modalités de fusion des CCIR pour mettre ce réseau en conformité avec la nouvelle carte des régions, sans attendre les élections consulaires prévues à la fin de 2016. Pour les chambres de métiers, elle adapte leur réseau à la nouvelle carte territoriale, le choix de la forme juridique de la nouvelle chambre de niveau régional devant être arrêté avant le 31 janvier 2016.

L’objectif global de ce texte est donc d’adapter les deux réseaux consulaires à la nouvelle carte des régions, entrée en vigueur depuis le début de cette année, et de renforcer le mouvement de régionalisation de ces réseaux, entamé avec la loi du 23 juillet 2010. Comme le soulignait le rapport de nos collègues Jean-Claude Lenoir et Claude Bérit-Débat, la loi de 2010 a enclenché un mouvement de « régionalisation à la carte ». Il s’agit aujourd’hui de faire un pas supplémentaire et de passer de la régionalisation à la « rationalisation » du réseau.

À ce stade, je veux saluer l’action des réseaux consulaires : chambres de commerce et d’industrie, chambres de métiers et de l’artisanat, sans oublier les chambres d’agriculture, que M. le rapporteur a d’ailleurs auditionnées pour établir son rapport. Ces trois réseaux forment un maillage territorial dense et jouent un rôle important dans l’accompagnement des entreprises, la formation et l’apprentissage.

En ce qui concerne l’apprentissage, en particulier, ces réseaux consulaires sont, à l’évidence, très performants, malgré une conjoncture peu favorable depuis le début de ce quinquennat – il faut le dire ! Les choix opérés en début de mandat par le Gouvernement ont en effet provoqué une baisse significative du nombre d’apprentis, de 8 % en 2013 et de 3,2 % en 2014. Parallèlement, le taux de chômage des jeunes n’a cessé d’augmenter, et le nombre d’emplois non pourvus s’élève toujours à plus de 300 000. Cette situation est ubuesque ! C’est la raison pour laquelle la délégation aux entreprises présentera très prochainement une proposition de loi portant sur ce sujet, à l’élaboration de laquelle le réseau consulaire sera naturellement associé.

Quoi qu’il en soit, nous devons veiller à ce que les réseaux consulaires, en tant qu’acteurs importants de la formation professionnelle et de l’apprentissage, puissent poursuivre leur mission dans de bonnes conditions.

Il s’agit de trouver un juste équilibre entre une dispersion des chambres consulaires, qui peut rendre leurs actions parfois illisibles, et une organisation qui soit suffisamment proche des acteurs de terrain – je pense notamment au milieu rural. En effet, depuis quelques décennies, le processus de « métropolisation » a vu les grandes villes se tourner vers des activités à fort potentiel de valeur ajoutée, comme la conception, la recherche, la gestion, la finance, le commerce interentreprises, tant et si bien que les grandes métropoles concentrent désormais les meilleurs PIB de notre pays, avec un tiers du PIB français pour la seule région parisienne, par exemple.

Cette concentration, si elle permet de tirer l’économie de la France vers le haut, est parfois intervenue au détriment des territoires éloignés des grandes métropoles, des territoires ruraux, qui se sentent aujourd’hui délaissés, avec une activité économique qui peut être à la peine et des Français qui tendent à se paupériser. Le réseau consulaire, dans sa réorganisation, doit ainsi particulièrement veiller à sa proximité avec les entreprises de ces territoires, des TPE, PME ou ETI, qui y maintiennent une activité et des emplois.

À cet égard, les choix de réorganisation basés uniquement sur des chiffres bruts et décontextualisés ne sont pas les bons : en imposant un seuil de 10 000 ressortissants pour le maintien d’une CCI, le Gouvernement a commis la même erreur que pour la taille des EPCI dans la loi NOTRe, c’est-à-dire qu’il n’a pas tenu compte des situations locales, où, d’ailleurs, les petites CCI n’ont pas de technostructure coûteuse, mais où elles ont, en revanche, de vraies valeurs de proximité. C’est pourquoi je défendrai le texte de la commission, qui prévoit le principe d’une CCI par département ou, éventuellement, d’une CCI interdépartementale, au cas où quelques réseaux départementaux le souhaiteraient. À défaut d’être examiné ce soir, ce point devra probablement être abordé en CMP. Le bon dosage entre régionalisation, rationalisation et proximité nous semble essentiel.

Les chambres consulaires doivent rester des interlocuteurs attentifs ayant les moyens financiers et territoriaux d’accompagner au plus près les entreprises et le commerce. Notons qu’au lieu d’être soutenues dans leurs missions, les CCI ont vu leurs moyens drastiquement réduits ces dernières années, avec près de 400 millions d’euros en moins en raison du plafonnement des taxes affectées, combiné au prélèvement sur leurs fonds de roulement.

Voilà quelques mois, en déplacement avec la délégation aux entreprises, nous avons été accueillis par un président de CCI par ces mots : « Bienvenue dans une chambre de commerce et d’industrie qui va mourir ! » Vous le voyez, la situation de certaines chambres est désormais très fragile. Ainsi, vous vous souvenez que nous avons été contraints de créer un fonds de péréquation entre les CCI, doté de 18 millions d’euros, qui a notamment pour objectif de venir en aide aux CCI les plus en difficulté financièrement.

Pour conclure, je voudrais insister sur ce qui doit être notre objectif commun, à savoir le développement de l’activité économique, car c’est bien sûr de là que viendra la création d’emplois durables. À cet effet, écoutons ce que les chefs d’entreprise, que nous les rencontrons régulièrement avec la délégation aux entreprises, nous disent. Le constat est le même partout sur le territoire : ils demandent moins de contraintes réglementaires étouffant leur activité, moins d’impôts et de charges finançant les dépenses publiques et un système de formation davantage en adéquation avec les besoins réels du marché. Sur tous ces points, je le répète, l’action et le soutien des réseaux consulaires sont absolument cruciaux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Alain Bertrand applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Delphine Bataille.

Mme Delphine Bataille. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les chambres consulaires, partenaires essentiels de la concertation entre la sphère économique et les pouvoirs publics, jouent un rôle stratégique dans chacun de nos territoires pour l’accompagnement des petites et moyennes entreprises et assurent une part importante de la formation. Ce texte, qui s’inscrit dans le prolongement des dernières évolutions des réseaux consulaires, consacre leur rôle central pour notre économie.

Le projet de loi apporte des précisions à la loi de 2010, qui avait réorganisé ces réseaux autour de l’échelon régional, et permet les mutations nécessaires à la nouvelle organisation territoriale, caractérisée notamment par une nouvelle délimitation des régions. Avec ses compétences économiques renforcées par la loi NOTRe, la région constitue, pour les réseaux consulaires, non seulement le principal partenaire financier direct, mais aussi l’échelon le plus pertinent de la coopération.

La loi de 2010 n’a pas mis fin à la coûteuse dispersion des structures consulaires, car elle a autorisé une régionalisation à la carte. De cette dispersion des réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat résulte une mauvaise articulation entre leur action et les politiques économiques menées par les collectivités régionales.

Très peu de CCI ou de CMA ont fait le choix opéré par le Nord-Pas-de-Calais, qui avait entrepris dès 2006, comme Mme la secrétaire d’État l’a rappelé, une démarche de regroupement des chambres en fonction des flux économiques et non des bassins de vie. Ainsi, la CCI de région Nord-de-France avait fusionné avec les autres chambres de sa circonscription dans un même établissement public et avait signé avec la région Nord-Pas-de-Calais une délégation de service public pour l’action à l’international, qui, nous l’espérons, sera pérennisée. Cette régionalisation a également permis de favoriser la contractualisation entre la CRMA et la région portant sur un programme de développement de l’artisanat, qui se poursuivra jusqu’en 2020.

Toutefois, il faut noter que, pour la région Nord-Pas-de-Calais, les regroupements ont entraîné la suppression de 130 postes. Il nous faudra donc être extrêmement vigilants sur l’impact social et être attentifs au devenir des agents de ces chambres consulaires, qui ont acquis des connaissances essentielles des territoires et de leurs entreprises.

Ce projet de loi, par la rationalisation des réseaux et le renforcement de l’échelon régional qu’il annonce, est d’abord gage d’efficacité et d’une meilleure lisibilité. Il facilitera ainsi la coopération avec les collectivités. De même, la mutualisation des fonctions administratives doit favoriser la réalisation d’économies et, in fine, améliorer les services rendus aux commerçants et artisans. Ces mesures, voulues par une grande majorité de chambres, permettront des fusions et des rationalisations, qui ne remettront pas en cause les services publics de proximité.

Si certaines de ces dispositions avaient fait l’unanimité lors de leur adoption dans le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, elles avaient été déclarées inconstitutionnelles pour des raisons de forme.

Les professionnels, qui ont besoin aujourd’hui de ce texte pour poursuivre leur rationalisation et réaliser des économies d’échelle, ont accueilli d’autant plus favorablement le projet de loi que le schéma proposé respecte la liberté de choix de gouvernance régionale. Ils espèrent que le texte pourra être voté rapidement, car les futures élections consulaires prévues en novembre 2016 supposent une fixation des règles au plus tard au printemps prochain. C’est pourquoi nous avons déposé un amendement, comme le Gouvernement et d’autres collègues, visant à revenir sur la disposition adoptée par la commission privant les chambres consulaires de la souplesse qu’elles souhaitent conserver dans leurs possibilités d’organisation. Nous invitons donc le Sénat à voter ces amendements et ce projet de loi très attendu. (Applaudissements sur quelques travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat

Titre Ier

CHAMBRES DE COMMERCE ET D’INDUSTRIE

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d'industrie et des chambres de métiers et de l'artisanat
Articles additionnels après l'article 1er

Article 1er

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° L’avant-dernier alinéa de l’article L. 711-1 est ainsi rédigé :

« À l’initiative de la chambre de commerce et d’industrie de région ou à leur propre initiative, des chambres de commerce et d’industrie territoriales peuvent être réunies en une seule chambre territoriale dans le cadre des schémas directeurs mentionnés au 2° de l’article L. 711-8. Elles disparaissent au sein de la nouvelle chambre territoriale ou peuvent devenir des délégations de la chambre territoriale nouvellement formée et ne disposent plus dans ce cas du statut d’établissement public. » ;

2° L’article L. 711-1-1 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, le mot : « Les » est remplacé par les mots : « À l’initiative de la chambre de commerce et d’industrie de région ou à leur propre initiative, des » ;

b) Il est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« En cas de fusion de l’ensemble des chambres de commerce et d’industrie territoriales d’une région en une chambre de commerce et d’industrie de région, il y a au moins une délégation de la chambre régionale nouvellement formée dans chaque département. Ces délégations ne sont pas dotées de la personnalité morale.

« En l’absence de fusion mentionnée à l’alinéa précédent, il y a au moins une chambre de commerce et d’industrie territoriale dans chaque département. »

3° L’article L. 711-8 est ainsi modifié :

a) Le 1° est ainsi rédigé :

« 1° Élaborent et votent, à la majorité des deux tiers des membres présents ou représentés, la stratégie régionale et le schéma régional d’organisation des missions opposable aux chambres de commerce et d’industrie de leur circonscription ainsi que, chaque année, à la majorité des membres présents ou représentés, le budget nécessaire à la mise en œuvre de cette stratégie et de ce schéma ; »

b) Au 2°, après le mot : « directeur », il est inséré le mot : « opposable » et, après la première occurrence du mot : « territoriales », il est inséré le mot : « , locales » ;

c) Au 4°, après le mot : « sectoriels », sont insérés les mots : « et avec le schéma régional mentionné au 1° » ;

d) Le 6° est ainsi rédigé :

« 6° Assurent, au bénéfice des chambres de commerce et d’industrie territoriales qui leur sont rattachées, des fonctions d’appui et de soutien ainsi que toute autre mission pouvant faire l’objet d’une mutualisation et figurant dans le schéma régional d’organisation des missions, dans des conditions et des domaines précisés par décret en Conseil d’État ; »

4° À la fin du dernier alinéa du I de l’article L. 711-10, les mots : « une partie des fonctions de soutien mentionnées au 6° de l’article L. 711-8 » sont remplacés par les mots : « tout ou partie des fonctions mentionnées au 6° de l’article L. 711-8, à l’exception de la gestion des agents de droit public sous statut » ;

5° À la seconde phrase de l’article L. 711-13, les mots : « et vice-présidents » sont supprimés ;

6° L’article L. 711-22 est ainsi modifié :

a) Au début, sont ajoutés les mots : « À l’initiative de la chambre de commerce et d’industrie de région ou à sa propre initiative, » ;

b) Les mots : « à sa demande et en conformité avec le » sont remplacés par les mots : « dans le cadre du » ;

7° L’article L. 712-4 est abrogé ;

8° L’article L. 713-12 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du II, le mot : « soixante » est remplacé par le mot : « cent » ;

b) Le second alinéa du même II est supprimé ;

c) Au premier alinéa du III, le mot : « cent » est remplacé par les mots : « cent vingt » ;

d) Les trois premières phrases du second alinéa du même III sont remplacées par deux phrases ainsi rédigées :

« Chaque chambre de commerce et d’industrie territoriale, locale ou départementale d’Île-de-France est représentée au sein de la chambre de commerce et d’industrie de région à laquelle elle est rattachée à due proportion de son poids économique. Lorsque le nombre de chambres de commerce et d’industrie territoriales, locales ou départementales d’Île-de-France rattachées à une même chambre de commerce et d’industrie de région est égal à deux, il peut être dérogé à cette règle dans des conditions fixées par décret. » ;

9° Au 4° de l’article L. 920-1, les mots : « les articles L. 712-2, L. 712-4 ainsi que » sont remplacés par la référence : « l’article L. 712-2, ».

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Bosino, sur l'article.

M. Jean-Pierre Bosino. Je ne souhaite pas allonger le débat, mais, même si un certain nombre de choses ont déjà été dites dans la discussion générale, l’article 1er, qui a pour objet de rationaliser le réseau des CCI, mérite qu’on en dise quelques mots.

Rationalisation, modernisation, simplification, mutualisation… Derrière ces mots, qui ne cessent d’être employés, se cache une autre réalité : toujours moins de proximité et toujours plus d’austérité ! Nous considérons qu’il est dangereux de poursuivre dans cette voie.

Cette recentralisation régionale ignore complètement les territoires et leurs spécificités. En commission, deux amendements identiques ont cependant été adoptés afin de maintenir la présence d’une CCI dans chaque département. Il s’agit d’une bonne mesure, mais elle ne règle pas tout. Régionaliser les CCI permettra certainement de réaliser quelques économies, mais, dans le même temps, remettra en cause tout un pan de l’aménagement du territoire.

Dépouiller les départements de leurs acteurs économiques pour renforcer l’échelon régional est, de notre point de vue, une erreur, compte tenu de l’étendue des nouvelles régions. Par exemple, ma région, Nord-Pas-de-Calais-Picardie, en plus d’être vaste – le bassin creillois est à 200 kilomètres de Lille ! –, est très diverse : grands ports internationaux, terres agricoles, zones désindustrialisées, pôles urbains…

Nous le savons, la proximité est un gage d’efficacité et, à ce titre, elle ne doit pas être bradée. Les CCI sont des relais sur les territoires et portent un effort particulier en faveur du développement économique, qui ne pourra pas être aussi pertinent si elles sont éloignées des lieux d’activité.

Pour notre part, nous n’acceptons pas d’organiser la casse de ce service public pour répondre à la demande d’économies budgétaires.

Mme la présidente. Je suis saisi de deux amendements, présentés par MM. Delahaye et Dassault.

L'amendement n° 10 rectifié est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Après le mot :

région

insérer les mots :

autre que la région Île-de-France

L'amendement n° 11 rectifié est ainsi libellé :

Alinéa 5

Après le mot :

région

insérer les mots :

autre que la région Île-de-France

La parole est à M. Serge Dassault, pour présenter ces deux amendements.

M. Serge Dassault. Je défends ces amendements à la demande de notre collègue Vincent Delahaye.

En l’état actuel, le projet de loi aura de graves répercussions pour les CCI de l’Essonne et de la Seine-et-Marne : elles seront amenées à disparaître. Or pourquoi changer ce qui marche ? Ce texte revient en effet sur des dispositions dérogatoires adoptées en 2010, que j’avais moi-même défendues dans cet hémicycle devant Hervé Novelli, alors secrétaire d’État au commerce. Celui-ci avait accepté de conserver deux chambres de commerce et d’industrie autonomes, à la grande satisfaction de tous leurs adhérents.

Rien ne justifie aujourd’hui de remettre en cause le statut d’établissement public de ces deux CCI. Leur force réside dans leur capacité à rendre des services qui répondent aux attentes de toutes les entreprises de leur territoire. Leur statut actuel est un gage de proximité, de qualité et d’efficacité. Il leur offre la possibilité de proposer des accompagnements et des conseils, en cohérence avec les besoins du tissu économique et social.

Revenir sur cette exception francilienne reconnue en 2010 aura des conséquences néfastes pour l’Essonne et la Seine-et-Marne, ainsi que pour le service de leurs adhérents : l’assemblée générale ne sera plus une instance décisionnelle au plan local, l’action territoriale sera limitée et nécessitera de s’en remettre à un arbitrage régional – or les intérêts de la petite et de la grande couronne divergent – ; il sera également impossible de contractualiser localement et librement avec des partenaires ou encore de percevoir directement des ressources propres provenant de subventions ou de la vente de prestations.

Mes chers collègues, depuis de nombreuses années, l’Essonne est un exemple de collaboration entre l’ensemble des acteurs économiques locaux, qui travaillent en bonne intelligence dans l’intérêt des entreprises du département. Il est primordial de conserver le statut actuel de sa CCI. Nous ne pouvons pas accepter un retour en arrière, qui reviendrait à supprimer la liberté totale de développement économique, à nuire à son efficacité et, finalement, à entraîner une réduction globale de l’activité.

Le MEDEF, avec son président Christian Thérond, et la CGPME, avec son président Olivier Boudon, sont également opposés à ce projet de réorganisation, de même que Philippe Lavialle, président de la CCI de l’Essonne, qui fait un travail remarquable.

Je vous demande donc, mes chers collègues, de soutenir avec moi ces amendements, pour le développement économique de l’Essonne et de la Seine-et-Marne. S’ils sont adoptés, ils permettront aux CCI de conserver leur personnalité juridique et une liberté d’action indispensable pour continuer à offrir aux entreprises de l’Essonne et de la Seine-et-Marne des services spécifiques adaptés à leurs besoins.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Houel, rapporteur. Il s’agit d’amendements très particuliers pour moi, puisqu’ils me rappellent que nous avons lutté avec succès, à une certaine époque, madame Bricq, pour défendre les intérêts des Seine-et-Marnais.

M. Michel Houel, rapporteur. Raison de plus pour ne pas changer d’avis maintenant… (Sourires.)

Le texte du projet de loi recèle une certaine ambiguïté sur la question de savoir si une évolution du statut des chambres territoriales de Seine-et-Marne et de l’Essonne peut être imposée à celles-ci contre leur gré. Les auteurs de ces amendements entendent la lever totalement en garantissant l’autonomie de ces deux chambres au regard d’une évolution institutionnelle future, ce qui conforterait la volonté du législateur de 2005 d’assurer un traitement particulier en Île-de-France, dérogatoire à celui qui s’applique au reste des CCI. L’avis est donc favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Je tiens à vous rassurer, monsieur Dassault : la spécificité francilienne est déjà inscrite dans le code de commerce. Le projet de loi n’a pas pour objet de revenir sur cette disposition. Les CCI de l’Essonne et de la Seine-et-Marne conserveront donc leur statut d’établissement public.

Vos amendements étant satisfaits, je vous invite à les retirer.

Mme la présidente. Monsieur Dassault, les amendements nos 10 rectifié et 11 rectifié sont-ils maintenus ?

M. Serge Dassault. Il n’est pas question de les retirer ! Ces CCI marchent bien, elles font bien leur travail de développement économique dans les deux départements de l’Essonne et de la Seine-et-Marne. Pourquoi voulez-vous mettre fin à ce système ? Pour empêcher le développement économique ? C’est complètement idiot !

Il faut que ces deux CCI continuent à travailler comme elles le font depuis 2010, comme l’avait accepté Hervé Novelli. Je ne vois pas pourquoi on changerait quelque chose qui marche !

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. Il est vrai qu’avec nos collègues de la Seine-et-Marne et de l’Essonne, notamment avec Claire-Lise Campion, sénatrice de l’Essonne, nous avions bataillé pour garder la spécificité de nos chambres de commerce et d’industrie. La singularité de l’Île-de-France, c’est que le regroupement des CCI avait déjà eu lieu. Ainsi, la CCI de Paris, qui est très puissante, on le sait, avait été rejointe par celles des Yvelines, du Val-d’Oise et des Hauts-de-Seine, qui est très importante. Restaient donc en grande couronne la Seine-et-Marne et l’Essonne.

Monsieur Dassault, vous avez raison, il ne faut pas tuer ce qui marche. Ce qu’il faut, c’est garder ce que nous avions obtenu dans le code de commerce. J’ai d’ailleurs sous les yeux le troisième alinéa de l’article L. 711-11 du code de commerce : « Toutefois, par dérogation aux dispositions prévues au deuxième alinéa, les chambres de commerce et d’industrie de la Seine-et-Marne et de l’Essonne peuvent décider de conserver le statut juridique d’établissement public dans des conditions définies par décret. ». C’était ce qui était en question quand nous avons bataillé, et nous avons eu gain de cause.

Mme la secrétaire d'État vient de nous dire que le projet de loi ne change rien au code de commerce. Or j’ai la même volonté que vous, mon cher collègue : garder cet outil performant et utile. En effet, ces deux départements sont à la fois urbains – pour le mien, toute la frange ouest est très urbaine –, périurbains et ruraux. Il faut d’autant plus garder cette entité juridique que la remontée du financement aux chambres régionales était déjà actée dans la loi qui avait été présentée par l’ancienne majorité. Je vous rappelle que cela n’avait pas été facile, le gouvernement de l’époque – nous étions dans l’opposition – avait dû s’y reprendre à trois fois pour faire passer son texte !

Comme Mme la secrétaire d'État vous a clairement dit que le projet de loi ne changeait rien à ce que nous avions voté, il me semble que vous pourriez retirer votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Michel Houel, rapporteur. C’est vrai que Mme la secrétaire d'État a été parfaitement claire. Néanmoins, élu de la ruralité – Mme Bricq vient de le dire, la Seine-et-Marne comporte une partie rurale –, je préfère m’en remettre à l’adage « un tiens vaut mieux que deux tu l’auras ». C’est pourquoi je voterai malgré tout ces amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 10 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 11 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.

L'amendement n° 4 rectifié est présenté par M. Cigolotti, Mme Loisier, MM. Roche, Longeot, Luche, Kern, L. Hervé, Bockel, Bonnecarrère, Détraigne et Gabouty, Mme Jouanno et M. Marseille.

L'amendement n° 8 rectifié octies est présenté par MM. Nègre, Husson, Danesi et Buffet, Mmes Keller et Canayer et M. Kennel.

L'amendement n° 14 est présenté par MM. Vaugrenard et Guillaume, Mme Bataille, MM. M. Bourquin, Cabanel et Courteau, Mme Espagnac, MM. Daunis et Duran, Mme Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Montaugé, Rome, Marie et les membres du groupe socialiste et républicain.

L'amendement n° 16 est présenté par le Gouvernement.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 6 à 8

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié.

Mme Anne-Catherine Loisier. Cet amendement vise à rétablir le texte de l’article 1er dans la version adoptée par l’Assemblée nationale pour quatre raisons, qui ont d'ailleurs déjà été évoquées.

Premièrement, le texte initial traduit la volonté d’une très grande majorité des acteurs des réseaux consulaires de nos territoires. Les élus des CCI veulent en effet privilégier un cadre organisationnel souple qui leur permet de s’adapter aux enjeux de chaque territoire. Or les amendements adoptés en commission fixent un cadre organisationnel rigide avec, au minimum, une CCIT par département.

Deuxièmement, se pose la question de savoir sur quoi doit porter notre priorité. Faut-il privilégier les enjeux économiques, les intérêts des entreprises et la stratégie des entrepreneurs ou devons-nous privilégier une carte administrative ?

Troisièmement, le texte de la commission conduirait à annuler un certain nombre de projets de regroupements de CCI en Normandie, en Nord-Pas-de-Calais-Picardie, en Alsace-Champagne-Ardennes-Lorraine, en Languedoc-Roussillon et en Rhône-Alpes. Or ne vaut-il pas mieux fusionner des assemblées d’élus pour privilégier le maintien de véritables services de proximité aux entreprises sur le territoire ?

Enfin, dernier argument, il y va de la bonne organisation des élections consulaires, qui sont prévues à l’automne prochain.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Husson, pour présenter l'amendement n° 8 rectifié octies.

M. Jean-François Husson. Représentant un territoire également concerné par cette question, je me permets de rappeler l’incongruité d’une réforme qui a fait grossir d’un coup de ciseaux les régions.

La région Alsace-Champagne-Ardennes-Lorraine regroupe désormais trois anciennes régions. Pour autant, les chambres de commerce et d’industrie ne sont pas restées les deux pieds dans le même sabot – s’agissant de la Lorraine, vous saisissez l’allusion… (Sourires.)

Ce qui est intéressant, c’est de voir la démarche, qui, à défaut d’être parfaitement unanime, est aujourd'hui fortement majoritaire : elle consiste à construire le travail des chambres en réseau avec un cadre organisationnel souple. Ce qu’il faut aujourd'hui favoriser, c’est la souplesse, la fluidité et la bonne répartition !

Pour le reste, l’essentiel ayant été dit – et bien dit ! –, je n’insisterai pas. Je tenais simplement à défendre moi aussi ces amendements, portés par un certain nombre de mes collègues, y compris de notre nouvelle région.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour présenter l'amendement n° 14.

M. Yannick Vaugrenard. Au départ, l’objectif était de parvenir à un vote conforme. Après le vote curieux qui a précédé, après la position curieusement différente du rapporteur par rapport à celle qu’avait adoptée la commission, je comprends que, derrière tout cela, il y a des aspects qui n’ont rien à voir avec la logique et le rationnel…

Le projet de loi et l’ordonnance qu’il est proposé de ratifier vont tout à fait dans le sens des conclusions du rapport de Claude Bérit-Débat et de Jean-Claude Lenoir relatif au bilan d’application de la réforme de 2010 des chambres de commerce et d’industrie Nos collègues proposaient en effet que la mise en œuvre et la portée de la stratégie régionale du réseau des chambres de commerce et d’industrie soient précisées pour permettre aux CCI de réaliser des économies. Ils proposaient également de renforcer les compétences des chambres de commerce et d’industrie de région.

Nous partageons totalement cette analyse. C'est la raison pour laquelle nous regrettons que la commission ait adopté deux amendements identiques visant à ce que, lorsque toutes les chambres de commerce et d’industrie territoriales d’une même région ont fusionné, il y ait au moins une délégation par département. Dans les autres cas, il y aurait au moins une CCIT par département.

Or l’objectif de la réforme proposée, c’est bien de permettre que la présence et le ressort territorial des chambres de commerce et d’industrie, ainsi que l’organisation qui en découlera, relèvent du choix de gouvernance des chambres et des élus en fonction des besoins des territoires et des entreprises. Ces choix, qui sont exprimés par délibération des chambres, sont inscrits dans les schémas directeurs régionaux.

Voilà pourquoi nous présentons un amendement permettant de revenir au dispositif qui a été adopté par l’Assemblée nationale à l’unanimité, moins le vote du groupe communiste, et à la quasi-unanimité – moins le vote du même groupe – au Sénat lors de l’examen de la loi Macron. Je n’arrive pas à comprendre ces différences de vote et d’appréciation six mois après…

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État, pour présenter l’amendement n° 16.

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Ces quatre amendements identiques répondent à l’attente des chambres de commerce et d’industrie, qui souhaitent pouvoir disposer de réelles marges de manœuvre pour mener leur réorganisation au bénéfice des entreprises. Leur adoption est d’autant plus nécessaire que des fusions sont déjà en cours en Alsace, en Mayenne, dans la Sarthe, le Nord-Pas-de-Calais-Picardie. D’autres sont accomplies, c’est le cas en Normandie et en Rhône-Alpes, notamment sur l’initiative des chambres de commerce et d’industrie. Il est de notre responsabilité de ne pas contrecarrer cette dynamique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Houel, rapporteur. Ces quatre amendements identiques visent à revenir sur un dispositif adopté par la commission, qui prévoit expressément le maintien dans chaque département d’une chambre territoriale ou, le cas échéant, d’une délégation de la chambre régionale. Ils sont donc contraires à la position de la commission, laquelle a estimé nécessaire d’assurer une présence dans chaque département. Par conséquent, l’avis est défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.

Mme Sophie Primas. Notre collègue Vaugrenard se demandait ce qu’il s’était passé depuis que nous avions tous voté ces dispositions dans la loi Macron. La réponse, ce sont les élections régionales de décembre. Les territoires ruraux nous ont envoyé un signal fort ! C’est un message qui soulignait leur désertification, la paupérisation de la population et le départ des services publics. Or les chambres de commerce et d’industrie font partie des services qui permettent de soutenir le commerce local dans les départements.

Je le répète, c’est ce message qui a fait fondamentalement évoluer notre position. Le prendre en compte ici, au Sénat, qui représente les collectivités territoriales, telle est la volonté qui a prévalu à l’adoption de ces amendements en commission des affaires économiques.

Je suis pour la liberté d’organisation. Je fais confiance aux chambres de commerce et d’industrie pour s’organiser, mais il n’empêche que le risque de voir les grosses chambres de commerce peser plus lourd que les petites chambres de commerce implantées dans de petits départements existe. Les territoires très ruraux ne seront-ils pas les oubliés de l’aménagement du territoire ?

Mme la présidente. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

M. André Reichardt. Je voudrais soutenir ces quatre amendements pour la multitude de raisons déjà indiquées tout à l’heure.

Moi aussi, je m’étonne que le Sénat puisse changer d’avis et revenir sur un vote quasi unanime émis il y a très peu de temps. J’aimerais donc me faire le chantre de la souplesse et de l’adaptabilité.

Nous faisons, Mme Primas et moi, le même constat, mais nous ne parvenons pas à la même conclusion. Je pense qu’il ne faut pas être bridé par un réseau préétabli. Tout est possible si on le souhaite. On le sait, il est difficile d’opérer une réforme, mais c’est précisément parce que c’est difficile qu’il faut essayer de le faire.

En ma qualité de sénateur alsacien, je veux saluer les efforts déjà réalisés dans ma région. En effet, alors que trois chambres territoriales que je connais bien se disaient voilà peu de temps encore « un certain nombre de vérités » – pour employer un euphémisme –, elles ont réussi, grâce à la volonté de certains, à oublier leurs diversités. Vous savez que le Bas-Rhin, ce n’est pas tout à fait le Haut-Rhin… Je voudrais rendre hommage à leur action et témoigner de ce qu’elle est duplicable ailleurs, si tant est qu’on le souhaite.

En conclusion, permettez-moi de me répéter : faisons confiance aux gens et donnons-leur un motif de travailler ensemble !

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Adnot, pour explication de vote.

M. Philippe Adnot. La position de la commission, que je soutiens, n’interdit pas les rapprochements comme ceux qui viennent de s’effectuer en Alsace. Simplement, il faut partir de la base : si un département veut conserver sa chambre de commerce et d’industrie, il doit pouvoir le faire.

M. Philippe Adnot. Si ces quatre amendements identiques étaient adoptés, la décision dépendrait de la volonté des puissants : si ces derniers s’allient pour refuser, un petit département n’aura plus la possibilité de garder sa chambre consulaire.

Nous, nous partons du principe que les décisions doivent d’abord être prises dans les départements. Pour autant, nous ne nous opposons en rien aux fusions des chambres consulaires.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour explication de vote.

M. Yannick Vaugrenard. Nous avons tous entendu le résultat des élections régionales, mais il faudrait que nous l’interprétions tous de la même manière. Quand il y a vingt millions d’abstentionnistes à une élection, que l’extrême droite avoisine parfois les 25 % ou 30 %,…

Mme Sophie Primas. Et même plus !

M. Yannick Vaugrenard. … cela doit interpeller tous ceux qui défendent la démocratie et la République.

Certains sujets devraient réunir une large majorité, même si elle est à géométrie variable. Or il se trouve justement que 76 % des élus territoriaux des chambres de commerce et d’industrie soutiennent les orientations du projet de loi. Ce n’est tout de même pas rien, monsieur Adnot ! Ce texte a même été coécrit par les représentants consulaires et ceux du Gouvernement.

Nombre de nos concitoyens, qu’ils appartiennent à des organisations professionnelles ou à des organisations de salariés, souhaitent qu’on leur fasse confiance, même si eux n’ont plus confiance dans le monde politique. Dès lors, l’initiative prise ici, en particulier par les membres du groupe Les Républicains, me semble aller droit à l’encontre du message envoyé par les élections régionales. Chacun prendra ses responsabilités, certes, mais le dispositif adopté par la commission retarde d’autant les décisions prises par un certain nombre de réseaux consulaires de se regrouper afin d’être plus efficaces. Or c’est bien l’efficacité économique qui doit nous guider !

Cette initiative s’oppose à une forme de participation à la fois réaliste et ambitieuse des professionnels. Or ce qui existe aujourd’hui pour ces derniers pourra demain s’appliquer à un autre domaine : au monde salarié, par exemple. Voilà pourquoi je peine à comprendre cette position, nouvelle, qui ne saurait selon moi répondre à l’objectivité nécessaire en la matière. Par ailleurs, je ne puis comprendre le vote de certains de nos collègues sur les deux premiers amendements en discussion, qui sont en contradiction avec la position adoptée par la commission à une très large majorité.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Ces amendements ne sont en aucun cas une remise en cause des CCI départementales.

Les fusions – M. Reichardt a évoqué celle réalisée en Alsace, alors même que les discussions n’avaient pas toujours été faciles – ou les réorganisations qui sont en cours de négociation ne se font pas au détriment des chambres départementales. Les nombreux présidents de CCI départementales ou régionales que j’ai rencontrés me le disent : chacun trouve sa place. Il faut donc avancer dans le respect de chacun.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.

Mme Nicole Bricq. J’ai l’impression de revivre les débats de la loi MAPTAM ou de la loi NOTRe. Ces débats n’avaient pas été faciles au Sénat, parce qu’il avait fallu à chaque étape justifier du fait que la région était l’échelon le plus pertinent pour assurer le développement économique de nos territoires.

Je ne comprends pas que nous ayons encore ce débat. Nous étions pourtant d’accord lors de la loi Macron et en commission. En vous entendant contester l’échelon régional, j’ai l’impression de revenir en arrière.

Tout à l’heure, sur les amendements présentés par M. Dassault, vous avez fait un vote partisan, alors que ce n’est pas le sujet. Il s’agit de trouver, dans le respect de chacun, la meilleure organisation des chambres départementales et régionales pour leur permettre d’accomplir au mieux leur travail auprès des entreprises et des territoires en termes d’accompagnement et de formation.

Maintenant que l’adoption conforme est derrière nous, il nous reste à espérer que la commission mixte paritaire aboutira. Nous avons bien réussi à nous mettre d’accord sur la loi NOTRe, alors que c’était quand même un autre morceau… Le succès a même été au rendez-vous sur un sujet de société : nous avons adopté hier soir les conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative à la fin de vie. Si chacun y met du sien, nous devrions tout de même y parvenir sur ce texte !

Je vous rappelle, mes chers collègues de la majorité sénatoriale, que, en 2010, alors que vous apparteniez aussi à la majorité nationale, vous avez voté des deux mains la régionalisation. Cela n’avait pas empêché le maintien d’un certain nombre de spécificités.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Bertrand, pour explication de vote.

M. Alain Bertrand. Certains se demandent pourquoi nous avons des doutes.

Si les élections régionales ont vu la montée du vote extrême dans les zones rurales, c’est parce que les petits territoires, les ruralités, qui font partie à part entière de la République, se sentent abandonnés. Certes, le Gouvernement a pris tout un tas de mesures en faveur de la ruralité : l’augmentation de la DETR, les maisons de santé, les maisons de service public, etc. Pourtant, le signal ne passe pas.

Alors, pourquoi certains comprendraient que c’est un bon texte, qui mutualise, qui rationalise, alors que d’autres auraient des doutes ? Je vais vous expliquer, mon cher collègue Vaugrenard.

Comme l’a dit Jean-Pierre Bosino, c’est histoire qui continue : on entasse tout dans les grandes agglomérations. Laissez-moi vous raconter l’histoire en Lozère.

La mutualité sociale agricole, tout d’abord : on a commencé par en transférer certains services dans le Gard ; au bout du compte, elle y est partie complètement. On nous avait promis à l’origine le maintien des emplois ; or il n’en reste que la moitié, voire le tiers ou le quart : bientôt, il n’y en aura plus un seul. Le Crédit agricole : la caisse devait rester en Lozère, mais a finalement été rattachée à l’Hérault. À force d’être ainsi dépouillés, à force de constater que la décentralisation a abouti à tout recentraliser dans les grandes métropoles, à force de ressentir un certain abandon, nous sommes amenés à avoir peur de certaines mesures.

Malgré sa volonté de réorganisation, je ne donne pas cher de la peau de notre réseau consulaire dans dix ans dans les dix plus petits départements. On peut déjà voir ce qui va se passer…

Dès lors, alors même que je soutiens ce gouvernement, je pense lui rendre service en lui conseillant de faire le choix de l’aménagement du territoire, de la ruralité et même de l’hyper-ruralité. On voit bien, en effet, ce qui se passe lors des élections : on connaît bien déjà le problème des grandes villes – les banlieues –, mais il faut maintenant apprendre à connaître le problème des territoires : la ruralité. Il faut aussi apprendre à y répondre. Et si certains s’en étonnent, ils n’ont pas dû bien connaître la vie du pays durant les vingt dernières années !

Mme la présidente. La parole est à Mme Delphine Bataille, pour explication de vote.

Mme Delphine Bataille. Je souhaite répondre aux inquiétudes qui ont été exprimées par certains de nos collègues, en particulier par Mme Primas, quant au devenir de la ruralité.

J’ai évoqué au cours de la discussion générale l’expérience menée en Nord-Pas-de-Calais : la CCI de région Nord-de-France a fusionné avec les autres chambres consulaires de sa circonscription au sein d’un même établissement public. Ainsi, la CRMA et la région ont pu signer ensemble un programme de développement de l’artisanat pour les années 2014 à 2020.

Étant originaire de cette région, plus particulièrement d’un territoire rural où je vis depuis plus de quarante ans, je crois modestement savoir ce qui s’y passe. Or l’expérience menée dans cette région est bonne, alors même que la population, qui était alors de plus de quatre millions d’habitants, dépasse désormais les six millions à la suite de la fusion avec la Picardie. Cela fait de nous l’une des régions avec le plus grand nombre de « ruraux », si vous me passez l’expression.

Ces programmes, qui avaient été concertés avec les acteurs économiques et découlaient de leur volonté, sont aujourd’hui une grande réussite ; du moins, personne ne s’en plaint. Pourtant, à l’époque, beaucoup d’élus avaient manifesté leur inquiétude : pour tout vous dire, j’en étais. La réussite finale de l’expérience saura peut-être vous rassurer. Voilà en tout cas pourquoi nous demandons aujourd’hui un petit peu plus de souplesse.

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour explication de vote.

Mme Anne-Catherine Loisier. Je ne voudrais pas laisser perdurer l’idée selon laquelle les dispositions contenues dans nos amendements ne recueillent pas l’assentiment des territoires ruraux. Comme chacun y va de son expérience, je vais vous faire part de la mienne.

Je suis élue du Morvan, dont la densité de population ne dépasse pas les douze habitants au kilomètre carré. J’y ai consulté l’ensemble des élus consulaires : ils sont tous partants pour le regroupement. En effet, ils ont confiance en eux, en leur capacité à travailler avec leurs collègues issus des métropoles régionales et à les convaincre et, plus largement, en l’avenir ! Selon eux, le bon chemin est celui du travail en concertation, qui permet un réel maillage du territoire : il importe de ne pas donner le sentiment qu’on isole les ruraux par rapport aux urbains.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 4 rectifié, 8 rectifié octies, 14 et 16.

J'ai été saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe socialiste et républicain et, l'autre, de la commission.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 136 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 340
Pour l’adoption 165
Contre 175

Le Sénat n'a pas adopté.

Mes chers collègues, il est dix-neuf heures cinquante. Je vous propose de prolonger la séance pour terminer l’examen des textes inscrits à notre ordre du jour. (Assentiment.)

Je vous rappelle, comme le dirait notre président bien-aimé, que la concision n’empêche pas la précision. (Sourires.)

L'amendement n° 9 rectifié, présenté par M. Canevet et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 20

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

… Après le troisième alinéa de l'article L. 712-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de vacance de la présidence de la chambre de commerce et d'industrie de région, au cours de l’année qui précède le renouvellement de ses membres élus, un président de chambre de commerce et d'industrie territoriale rattachée à cette chambre de région peut assurer, jusqu'au renouvellement des membres et simultanément à son mandat de président de la chambre territoriale, un mandat de président de la chambre de région. » ;

La parole est à M. Michel Canevet.

M. Michel Canevet. Cet amendement assez formel vise à résoudre le cas où un président de chambre de commerce et d’industrie de région démissionne l’année précédant les élections. Dans cette hypothèse, un président de chambre de commerce et d’industrie territoriale rattachée à cette chambre de région pourrait assurer temporairement la présidence.

Nous savons que ces deux mandats ne peuvent se cumuler. Néanmoins, chaque président de chambre de commerce et d’industrie territoriale est vice-président de la chambre de commerce et d’industrie régionale. Lorsque le président de la chambre régionale démissionne, le président d’une chambre territoriale peut devenir président par intérim, le temps qu’une autre personne soit élue.

Je n’imagine pas que, quelque mois avant le renouvellement des membres élus d’une chambre régionale, il soit nécessaire de chambouler toute l’organisation en raison d’une démission. En Bretagne, nous connaissons la situation. Le président de la chambre régionale ayant démissionné, le président de la chambre territoriale de Quimper a été élu hier président de la chambre régionale. La chambre territoriale de Quimper étant appelée à disparaître à la fin de l’année, je n’imagine pas que le président sortant puisse être remplacé par un président intérimaire, d’autant qu’il va falloir mener à bien la fusion à venir de trois chambres territoriales.

Pour éviter de nous retrouver confrontés à une énorme pagaille, nous proposons de limiter ce dispositif dans le temps, jusqu’au renouvellement des élus consulaires.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Houel, rapporteur. Même de nature transitoire, une exception au principe de non-cumul de la présidence de deux établissements publics du réseau des CCI ne semble pas souhaitable. Au surplus, la vacance d’une présidence de CCI, si elle est de nature à rendre plus complexe, dans un temps limité, la gouvernance d’une CCI, ne l’empêche pas pour autant de fonctionner.

En application des dispositions réglementaires du code de commerce et des règlements intérieurs de chaque CCI, les vice-présidents ont vocation à assurer l’intérim en cas de vacance du président, dans l’attente d’une nouvelle assemblée générale qui procédera à l’élection d’un nouveau président.

Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. En cas de vacance de la présidence, l’assemblée générale a toute latitude pour élire un nouveau président à titre transitoire parmi les membres de la CCI. En outre, il est difficile de modifier les règles du jeu une année d’élection.

Par conséquent, je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Canevet, l'amendement n° 9 rectifié est-il maintenu ?

M. Michel Canevet. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 9 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
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Article 2 (Texte non modifié par la commission)

Articles additionnels après l'article 1er

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L'amendement n° 5 rectifié bis, présenté par MM. Bertrand, Amiel, Barbier, Collin et Fortassin, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier, Chasseing, Gorce, Lozach, Nougein et Delcros, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le b du III de l'article 1600 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :

« La moitié au moins de ce montant est destinée à être allouée par les chambres de commerce et d’industrie de région aux chambres de commerce et d’industrie territoriales de leur circonscription dont le périmètre comprend une proportion substantielle de communes ou de groupements de communes classés en zone de revitalisation rurale au titre du II de l’article 1465 A du présent code. »

La parole est à M. Alain Bertrand.

M. Alain Bertrand. Cela fait un an que le fonds de péréquation a été créé. Or sa mise en œuvre n’est toujours pas effective.

J’ai en main une lettre de M. Macron, ministre de l’économie, et de Mme Pinville, ici présente, adressée à André Marcon lui rappelant que les parlementaires se montrent particulièrement attentifs à ce qu’une partie substantielle dudit fonds soit orientée vers les chambres sur les territoires desquelles se trouvent des communes ou des groupements de communes classés en zone de revitalisation rurale. En effet, il faut le dire, rien n’a pas été prévu pour affecter ce fonds de péréquation conformément à son objet, qui est d’aider les plus faibles et ceux qui en ont le plus besoin.

Voilà pourquoi je propose, au travers de cet amendement, que la moitié au moins des 18 millions d’euros soit allouée par les chambres de commerce et d’industrie de région aux chambres de commerce et d’industrie territoriales de leur circonscription dont le périmètre s’étend en zone de revitalisation rurale. Nous aurons ainsi la garantie que ce montant sera bien versé aux petits départements, à ceux qui en ont le plus besoin.

Je suis d’accord pour que le dispositif soit mis en œuvre rapidement, mais à condition de ne pas brader la ruralité. Je rappelle que le budget des chambres de commerce et d’industrie s’élève à 3,3 milliards d’euros. Le fonds de péréquation, c’est 20 millions d’euros ! Et il faudrait encore que la solidarité ne joue pas en faveur des petits territoires ?

Je vous demande, mes chers collègues, de voter cet amendement de bon sens, qui plaide pour l’équité territoriale et sur lequel la commission a émis un avis favorable.

Mme la présidente. L'amendement n° 6 rectifié bis, présenté par MM. Bertrand, Amiel, Barbier, Collin et Fortassin, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier, Chasseing, Gorce, Lozach, Nougein et Delcros, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le b du III de l'article 1600 du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Un tiers au moins de ce montant est destiné à être alloué par les chambres de commerce et d’industrie de région aux chambres de commerce et d’industrie territoriales de leur circonscription dont le périmètre comprend une proportion substantielle de communes ou de groupements de communes classés en zone de revitalisation rurale au titre du II de l’article 1465 A du présent code. »

La parole est à M. Alain Bertrand.

M. Alain Bertrand. Il s’agit d’un amendement de repli.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Houel, rapporteur. Ces amendements traitent d’une question nouvelle, non abordée par le projet de loi : le financement des CCI, en particulier dans le cadre du fonds de péréquation de 18 millions d’euros mis en place en loi de finances.

Malgré tout, une solidarité envers les territoires hyper-ruraux est indispensable. Si une certaine liberté d’action doit être laissée dans le cadre de la gestion de ce fonds, il faut néanmoins s’assurer d’un fléchage vers ces territoires. C’est pourquoi la commission a émis un avis favorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Comme vous, monsieur le sénateur, j’accorde une attention toute particulière aux chambres de commerce et d’industrie des zones rurales et très rurales. Vous l’avez dit, Emmanuel Macron et moi-même avons adressé un courrier à M. Marcon, président de CCI France, en ce sens.

Je ne peux pas prendre aujourd’hui un engagement sur un montant, puisque, vous le savez, nous sommes en train de préparer le décret d’application. Néanmoins, Emmanuel Macron et moi-même tenons vraiment à ce que chacun soit respecté au sein de ces territoires.

En revanche, je peux m’engager devant vous à être extrêmement vigilante sur la manière dont sera réparti ce fonds. Pour bien connaître les territoires ruraux, je sais que notre tissu économique n’est pas seulement urbain, il est également rural, et nous devons y attacher une importance toute particulière. Je vous le dis solennellement, je veillerai à ce que les CCI rurales soient respectées.

Pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour explication de vote.

M. Yannick Vaugrenard. Mes chers collègues, qu’il n’y ait aucune ambiguïté quant aux positions des uns et des autres.

Je comprends tout à fait le souci exprimé par M. Bertrand : aujourd’hui, le secteur rural est trop souvent en déperdition, notamment faute de services publics, sur le plan économique, en matière de diversification des activités ou d’aménagement du territoire. J’ai eu, moi aussi, l’occasion d’observer ces problèmes sur le terrain. Ce message doit être relayé.

Grâce aux interventions et à la vigilance de M. Bertrand, il me semble que tel est le cas. Quant à la proposition que Mme la secrétaire d’État vient de formuler, elle va précisément dans ce sens.

Au reste, le Gouvernement ne peut faire que ce qui est juridiquement possible ! Dès lors qu’il s’engage à exercer une forte vigilance sur les réalisations des chambres de commerce et d’industrie, pour l’ensemble du territoire, il faut entendre sa proposition.

Je vois mal comment le Gouvernement pourrait assurer une gestion en lieu et place des chambres de commerce et d’industrie. En revanche, le ministère peut bien exercer une pression, en vérifiant la manière dont sont distribués les fonds concrètement, tout en tenant compte des demandes impérieuses et essentielles émanant du monde rural. Il faut donc faire confiance à Mme la secrétaire d’État, et je suggère aux auteurs du présent amendement de le retirer.

Mme la présidente. Monsieur Bertrand, l’amendement n° 5 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Alain Bertrand. J’ai bien entendu les propos de Mme la secrétaire d’État, et je l’en remercie. Néanmoins, je n’ai aucune assurance quant au montant, quant au fléchage de 50 % de ces crédits. Aussi, je ne peux que maintenir mon amendement !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 5 rectifié bis.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er, et l’amendement n° 6 rectifié bis n’a plus d’objet.

Je suis saisie de quatre amendements identiques.

L'amendement n° 7 rectifié est présenté par MM. P. Leroy, César et Pierre, Mme Lamure et MM. G. Bailly, Sido, Gremillet, Luche, Buffet et Savary.

L'amendement n° 12 rectifié est présenté par MM. Adnot et Huré.

L'amendement n° 13 est présenté par M. Lasserre.

L'amendement n° 15 rectifié est présenté par Mme Malherbe, MM. Amiel, Collin et Fortassin, Mmes Jouve et Laborde et M. Requier.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 1er ne s’applique pas aux schémas directeurs mentionnés au 2° de l’article L. 711-8 du code de commerce votés avant l’entrée en vigueur de la présente loi.

L’amendement n° 7 rectifié n’est pas soutenu.

La parole est à M. Philippe Adnot, pour présenter l’amendement n° 12 rectifié.

M. Philippe Adnot. Madame la présidente, me conformant à votre demande, je serai bref : à travers cet amendement, nous affirmons une bonne fois pour toutes que nous sommes en désaccord avec la rétroactivité !

Mme la présidente. Monsieur Adnot, je salue votre sens de la concision et de la précision ! (Sourires.)

Les amendements nos 13 et 15 rectifié ne sont pas soutenus.

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 12 rectifié ?

M. Michel Houel, rapporteur. Favorable !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. André Reichardt, pour explication de vote.

M. André Reichardt. Je ne tiens surtout pas à ralentir nos débats. Toutefois, n’étant pas membre de la commission des affaires économiques, j’ai un peu de mal à comprendre ce dont il retourne.

Les schémas adoptés avant l’entrée en vigueur du présent texte auront-ils ou non force obligatoire ? Il me semble qu’ils ont été élaborés à titre indicatif et non prescriptif. Aussi, je peine à mesurer l’utilité de cette précision.

M. Jean-Pierre Bosino. Qui peut le plus peut le moins !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.

TITRE II

CHAMBRES DE MÉTIERS ET DE L’ARTISANAT

Articles additionnels après l'article 1er
Dossier législatif : projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d'industrie et des chambres de métiers et de l'artisanat
Articles additionnels après l'article 2

Article 2

(Non modifié)

Le code de l’artisanat est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article 5-1, après le mot : « départementales », sont insérés les mots : « et interdépartementales » ;

2° L’article 5-2 est ainsi modifié :

a) Le I est ainsi rédigé :

« I. – Dans chaque région, il existe une chambre de métiers et de l’artisanat de région ou une chambre régionale de métiers et de l’artisanat. En Corse, la circonscription de l’entité de niveau régional est celle de la collectivité territoriale de Corse. Le siège de la chambre de métiers et de l’artisanat de région ou de la chambre régionale de métiers et de l’artisanat est fixé par décision de l’autorité administrative compétente. » ;

b) Au II, le mot : « devient » est remplacé par les mots : « est une » et, à la fin, les mots : « et exerce ses fonctions à une date fixée par décret » sont supprimés ;

c) Le III est ainsi rédigé :

« III. – Dans chaque région où existe une chambre régionale de métiers et de l’artisanat, la majorité des chambres de métiers et de l’artisanat qui lui sont rattachées, représentant la majorité des ressortissants cotisants ou exonérés de la taxe prévue à l’article 1601 du code général des impôts, peut décider de prendre la forme d’une chambre de métiers et de l’artisanat de région.

« Pour l’expression de ce choix, il est procédé au vote à bulletin secret des élus au sein de chaque chambre de métiers et de l’artisanat départementale et de chaque chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale. Chaque chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale dispose d’autant de voix que de délégations départementales qui la composent.

« La chambre de métiers et de l’artisanat de région se substitue à la chambre régionale de métiers et de l’artisanat et à l’ensemble des chambres de métiers et de l’artisanat départementales et interdépartementales qui y étaient rattachées. Elle est constituée d’autant de délégations départementales que de départements dans la région.

« Le nouvel établissement devient l’employeur des personnels employés par les anciens établissements de la circonscription régionale.

« Il ne peut être institué une chambre régionale de métiers et de l’artisanat en lieu et place d’une chambre de métiers et de l’artisanat de région. Ces chambres sont exclusivement composées de délégations départementales.

« Les chambres de métiers et de l’artisanat de région sont instituées par décret.

« Pour l’application du présent III à la région Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine, le choix exprimé par les chambres de métiers régies par les articles 103 et suivants du code professionnel local du 26 juillet 1900 pour l’Alsace et la Moselle, maintenu en vigueur par la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, est pondéré du nombre de départements et des ressortissants cotisants ou exonérés de la taxe prévue par la loi n° 48-977 du 16 juin 1948 relative à la taxe pour frais de chambre de métiers applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Le regroupement choisi est opéré sous réserve des dispositions régissant les chambres de métiers des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. » ;

d) Après le III, il est inséré un III bis ainsi rédigé :

« III bis. – Si des chambres de métiers et de l’artisanat départementales d’une même région le décident, elles se regroupent en une chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale. Pour l’expression de ce choix, il est procédé au vote, à bulletin secret, des élus au sein de chaque chambre de métiers et de l’artisanat départementale. Cette chambre se substitue aux chambres de métiers et de l’artisanat départementales qu’elle regroupe et est constituée d’autant de délégations départementales que de départements regroupés.

« Le regroupement entre chambres de métiers et de l’artisanat interdépartementales ou entre chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale et chambres de métiers et de l’artisanat départementales d’une même région intervient sur décision prise à la majorité des élus des établissements concernés. Pour l’expression de ce choix, la chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale dispose d’autant de voix que de délégations départementales qui la composent.

« Le nouvel établissement devient l’employeur des personnels des chambres de métiers et de l’artisanat départementales regroupées, à l’exclusion des personnels qui occupent les fonctions exercées au niveau régional en application du IV du présent article et qui relèvent de la chambre régionale de métiers et de l’artisanat.

« Les chambres de métiers et de l’artisanat interdépartementales sont instituées par décret. » ;

e) Au IV, le mot : « administratives » est supprimé ;

3° À l’article 5-4, après le mot : « départementales », sont insérés les mots : « et interdépartementales » et les mots : « à la chambre de métiers et de l’artisanat de région ou » sont supprimés ;

4° L’article 5-5 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « chambre de métiers et de l’artisanat de région ou la » sont supprimés ;

b) Au 2°, après le mot : « Répartit », sont insérés les mots : « , en fonction notamment des projets de budget départementaux et interdépartementaux, » et, après le mot : « départementales », sont insérés les mots : « et interdépartementales » ;

5° Au second alinéa de l’article 5-7, le mot : « sections » est remplacé par les mots : « délégations départementales » et la référence : « du III » est remplacée par les références : « des III et III bis » ;

6° À l’article 7, après le mot : « départementales », sont insérés les mots : « et interdépartementales » et les mots : « aux chambres de métiers et de l’artisanat de région ou » sont supprimés ;

7° Au premier alinéa de l’article 8, le mot : « sections » est remplacé par les mots : « délégations départementales » et, après le mot : « départementales », sont insérés les mots : « et interdépartementales ».

Mme la présidente. L'amendement n° 3 rectifié bis, présenté par MM. Reichardt, Bonnecarrère, César, Bockel, Charon, Chasseing, G. Bailly, Chaize et Danesi, Mmes Deromedi, Di Folco, Férat, Gruny et Keller, MM. Kennel, Kern et Laménie, Mme Lamure, MM. Lefèvre, Laufoaulu et Masclet, Mme Morhet-Richaud, MM. Rapin, Revet, Vasselle, Longeot, Lemoyne et Mayet, Mme Mélot et M. Pellevat, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Après le mot :

interdépartementaux,

insérer les mots :

qui lui sont soumis,

La parole est à M. André Reichardt.

M. André Reichardt. Nous proposons que les chambres de métiers et de l’artisanat départementales ou interdépartementales fournissent aux chambres régionales leurs projets de budget, ce qu’elles ne font pas toujours spontanément pour l’heure, invoquant leur autonomie. Cette précision nous semble tout à fait utile.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Houel, rapporteur. En vertu de la disposition qui nous est soumise, les chambres régionales acquerraient une forme de tutelle sur l’élaboration des projets de budget des chambres qui leur sont rattachées. Elles pourraient ainsi remettre en cause l’autonomie budgétaire que doivent pouvoir conserver les chambres infrarégionales. Aussi, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Monsieur Reichardt, il est bien nécessaire que les projets de budget locaux soient transmis aux chambres régionales, préalablement à la répartition des ressources par celles-ci. Je suis donc particulièrement favorable à une clarification sur ce point.

Toutefois, une telle précision est d’ordre non pas législatif, mais réglementaire. À cet égard, je m’engage à introduire par voie de règlement dans le code de l’artisanat la phrase suivante : « Les chambres de métiers et de l’artisanat départementales et interdépartementales transmettent leurs budgets à la chambre régionale de métiers et de l’artisanat, en vue de leur prise en compte dans l’élaboration du budget régional, voté avant le 1er décembre de chaque année. »

En conséquence, je vous invite à retirer votre amendement.

Mme la présidente. Monsieur Reichardt, l’amendement n° 3 rectifié bis est-il maintenu ?

M. André Reichardt. L’engagement de Mme la secrétaire d’État répond tout à fait à notre attente. Aussi, je retire volontiers cet amendement, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 3 rectifié bis est retiré.

Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2 (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d'industrie et des chambres de métiers et de l'artisanat
Article 3 (début)

Articles additionnels après l'article 2

Mme la présidente. L'amendement n° 1 rectifié bis, présenté par MM. Reichardt, Bonnecarrère et Bockel, Mme Cayeux, MM. G. Bailly, César, Chaize, Charon, Chasseing et Danesi, Mmes Di Folco, Deromedi, Férat et Gruny, MM. Kennel et Laménie, Mmes Lamure et Keller, MM. Lefèvre, Laufoaulu, Masclet, Longeot, Rapin et Vasselle, Mme Lopez, MM. Revet et Lemoyne, Mme Mélot et MM. Mayet et Pellevat, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Pendant la période allant au plus tard du 31 mars 2016 à la date du renouvellement électoral des chambres de métiers et de l’artisanat :

1° Le nombre d’élus régionaux par département des chambres de métiers et de l’artisanat de région ou des chambres régionales de métiers et de l’artisanat de Bretagne, Centre-Val de Loire, Corse, Île-de-France, Pays de la Loire et Provence-Alpes-Côte d’Azur reste inchangé ;

2° Dans les régions suivantes, la délégation régionale par département est constituée du président et d’élus de la chambre de métiers et de l’artisanat départementale dans les proportions suivantes :

a) Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine : 9 ;

b) Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes : 7 ;

c) Bourgogne et Franche-Comté : 11 ;

d) Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées : 7 ;

e) Basse-Normandie et Haute-Normandie : 18 ;

f) Nord-Pas-de-Calais et Picardie : 18 ;

g) Auvergne et Rhône-Alpes : 7 ;

3° Le nombre d’élus régionaux par département des chambres de métiers et de l’artisanat interdépartementales est fixé sur ces mêmes bases ;

4° Les délégations mentionnées aux 2° et 3° sont composées dans les proportions résultant de l’application des dispositions électorales en vigueur lors du dernier renouvellement général.

La parole est à M. André Reichardt.

M. André Reichardt. Le présent amendement tend à réintroduire dans la législation le dispositif adopté dans le cadre de la loi Macron du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, avant d’être censuré par le Conseil constitutionnel, dans des conditions évoquées à plusieurs reprises au cours de la discussion générale.

À cet égard, les dispositions que je vous soumets comprennent deux volets.

Premièrement, la réduction du nombre de mandats dans les régions qui fusionnent me semble nécessaire, ce pour deux raisons au moins.

D’une part, les décisions votées par les nouvelles assemblées générales risquent d’être remises en cause, étant donné le déséquilibre souvent flagrant du nombre de représentants départementaux des anciennes régions. Ainsi, la région Rhône-Alpes compterait onze représentants, tandis que l’Auvergne, qui n’a ni la même vitalité économique ni la même aire géographique, en dénombrerait vingt-deux. Rappelons que les nouvelles assemblées générales devront désigner les bureaux des nouveaux établissements et voter le nouveau budget régional : il s’agit là de décisions importantes, dont l’annulation éventuelle serait, cela va sans dire, préjudiciable, surtout au cours de cette année d’organisation des élections.

D’autre part, les difficultés matérielles d’organisation des assemblées générales ne sont pas négligeables, notamment au titre des quorums.

Deuxièmement, le présent amendement vise à respecter, dans la nouvelle répartition opérée, les résultats obtenus par les diverses listes au cours des dernières élections, les élus étant désignés en vertu des modalités électorales en vigueur lors du scrutin.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Houel, rapporteur. Le dispositif dont il s’agit assure, à titre transitoire, une réduction du nombre des membres des chambres régionales des nouvelles grandes régions. Certes, il a été voté par le Parlement au mois de juillet 2015, mais le Gouvernement n’a pas jugé bon de le reprendre dans le présent projet de loi, et pour cause : entre-temps, la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou loi NOTRe, a prévu le maintien de l’ensemble des mandats en cours.

Ce qui pouvait être envisagé en juillet 2015 ne peut donc sans doute plus l’être aujourd’hui. Au reste, à supposer que le présent texte puisse être adopté rapidement, cette composition transitoire ne pourrait être assurée que plusieurs semaines après sa promulgation.

À l’heure actuelle, est-il encore pertinent de mettre en œuvre cette nouvelle composition, qui implique des démarches complexes et ne s’appliquerait que pour une, voire deux réunions ? Il semble plus raisonnable de conserver en l’état la composition actuelle de ces instances.

Voilà pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Monsieur Reichardt, l’ordonnance du 26 novembre 2015 précise que, jusqu’au renouvellement général des élus des chambres de métiers et de l’artisanat, soit au plus tard en octobre 2016, « les membres des chambres de métiers et de l’artisanat de niveau régional sont les élus des chambres regroupées au sein de la région. »

Le maintien de l’ensemble des élus régionaux en 2016 préserve une égalité de traitement, alors que ces représentants vont bientôt entrer en campagne. Il prévient, de ce fait, de potentielles protestations.

De surcroît, cette solution est transitoire et reste limitée par l’obligation de réunir une assemblée générale dans les sept régions résultant d’une fusion de précédents ensembles régionaux.

Pour ces raisons, le Gouvernement vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Reichardt, l’amendement n° 1 rectifié bis est-il maintenu ?

M. André Reichardt. Oui, madame la présidente, pour les raisons que j’ai précédemment exposées.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 2 rectifié bis, présenté par MM. Reichardt, Bonnecarrère, Bockel, G. Bailly, César, Chaize, Charon, Chasseing et Danesi, Mmes Deromedi, Di Folco, Férat et Gruny, MM. B. Fournier et Kennel, Mme Keller, M. Laufoaulu, Mmes Lamure et Lopez, MM. Masclet, Lefèvre, Longeot, Kern et Laménie, Mme Morhet-Richaud, MM. Vasselle, Rapin, Revet, Lemoyne et Mayet, Mme Mélot et M. Pellevat, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les personnels employés par les chambres de métiers et de l'artisanat qui occupent les fonctions exercées au niveau régional en application du IV de l'article 5-2 du code de l’artisanat sont transférés à la chambre de métiers et de l'artisanat de région ou à la chambre régionale de métiers et de l'artisanat, qui en devient l'employeur.

En cas de regroupement d’établissements, les personnels, employés par les chambres de métiers et de l'artisanat regroupées, sont transférés au nouvel établissement, qui en devient l’employeur.

Les modalités de ces transferts font l'objet d'une décision de la chambre de métiers et de l'artisanat de région ou de la chambre régionale de métiers et de l'artisanat, prise après l'avis de la commission paritaire locale compétente.

Ces agents sont mis à la disposition, le cas échéant, de la chambre départementale qui les employait à la date d'effet du transfert. Les modalités de cette mise à disposition font l'objet d'une décision de la chambre de métiers et de l'artisanat de région ou de la chambre régionale de métiers et de l'artisanat, prise après l'avis de la commission paritaire locale compétente.

Les dépenses de rémunération des agents ainsi mis à disposition constituent des dépenses obligatoires des chambres de métiers et de l'artisanat départementales et sont des recettes des chambres de métiers et de l'artisanat de région ou des chambres régionales de métiers et de l'artisanat concernées.

La parole est à M. André Reichardt.

M. André Reichardt. Le présent amendement tend à rétablir un dispositif supprimé par l’article 308 de la loi Macron.

Ce dispositif a été abandonné pour des raisons de procédure, ce qui est regrettable, car il relève du bon sens : il favorise les transferts de personnels des chambres de métiers et de l’artisanat occupant des fonctions mutualisées, non seulement à l’échelle régionale, mais aussi en cas de regroupement entre diverses chambres de cette nature.

Pourquoi ne pas ajouter une telle précision au sein du présent texte, via un article additionnel ? Ces dispositions relèveraient-elles, elles aussi, du domaine réglementaire ?

Les questions dont il s’agit se poseront nécessairement. Nous souhaitons les anticiper, notamment en précisant que les chambres de niveau régional peuvent mettre leurs agents à disposition des chambres départementales qui les employaient avant la date d’effet du transfert.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Michel Houel, rapporteur. Cet amendement tend à rétablir l’article 45 de la loi du 23 juillet 2010, seule disposition que le Conseil constitutionnel n’a pas considérée comme un cavalier dans le cadre de la loi sur la croissance, l’activité et l’égalité des chances.

Ces dispositions semblent inutiles, dans la mesure où, d’une part, l’article 2 du projet de loi prévoit déjà un principe de transfert d’employeur ; d’autre part, les conditions de mise à disposition ou de transfert d’agents des chambres de métiers sont d’ores et déjà régies par la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952, qui prévoit, en la matière, la compétence exclusive de la commission paritaire nationale pour définir les modalités de transfert des agents du réseau.

Sauf à modifier cette dernière loi, qui concerne les trois réseaux consulaires, il convient de ne pas déséquilibrer l’édifice juridique actuel.

Dans ces conditions, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d’État. Je partage l’avis du rapporteur et je me range à ses explications.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 2 rectifié bis.

(L’amendement n’est pas adopté.)

TITRE III

DISPOSITIONS DIVERSES

Articles additionnels après l'article 2
Dossier législatif : projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d'industrie et des chambres de métiers et de l'artisanat
Article 3 (fin)

Article 3

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2015-1540 du 26 novembre 2015 relative aux réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat est ratifiée. – (Adopté.)

Mme la présidente. Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 137 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 221
Pour l’adoption 202
Contre 19

Le Sénat a adopté.

Article 3 (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif aux réseaux des chambres de commerce et d'industrie et des chambres de métiers et de l'artisanat
 

12

 
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d'actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées
Discussion générale (suite)

Réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées

Adoption en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, après engagement de la procédure accélérée, ratifiant l’ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées (projet n° 222, texte de la commission n° 296, rapport n° 295).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d’État.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d'actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées
Article 1er

Mme Martine Pinville, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire. Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai le plaisir de vous présenter le projet de loi de ratification de l’ordonnance relative à la réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées.

Cette ordonnance a été prise en application de l’article 23 de la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises. Cette mesure est issue des travaux du Conseil de la simplification pour les entreprises. Elle a pour objet de diminuer le nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées pour le faire passer de sept à deux, et ainsi d’aligner ce régime sur la règle de droit commun prévue à l’article 1832 du code civil.

En effet, jusqu’à présent, les sociétés anonymes devaient, en application de l’article L. 225-1 du code de commerce, réunir au minimum sept actionnaires. Historiquement, cette exigence a été introduite en droit français par la loi du 23 mai 1863, sous l’influence du droit britannique.

Toujours est-il que cette exigence est depuis longtemps contestée, le chiffre de sept ne reposant sur aucune justification économique ou juridique. En outre, elle est en décalage avec la pratique des sociétés familiales et des petites et moyennes entreprises, dans lesquelles les parts sont souvent réunies entre les mêmes mains. Elle n’est pas davantage adaptée à la pratique des groupes de sociétés au sein desquels les filiales sont parfois détenues à 100 % par la société mère.

Ainsi, cette obligation, qui ne trouve aucune justification ni juridique ni économique, conduit de nombreuses sociétés à avoir recours à des actionnaires de complaisance et réduit l’intérêt de cette forme sociale, par ailleurs jugée trop lourde.

La présente ordonnance a pour finalité de renforcer l’attractivité de la société anonyme, laquelle, en raison de la stabilité et de la prévisibilité de ses règles de fonctionnement, assure une meilleure protection des associés, plus particulièrement des associés minoritaires, que sa rivale, la société par actions simplifiée.

Elle a également pour objectif de renforcer la compétitivité de la France à l’échelle européenne, dans la mesure où notre pays est le seul en Europe à avoir établi et maintenu cette règle des sept actionnaires. Au Royaume-Uni, en Belgique et en Italie, il suffit de deux actionnaires pour créer une société anonyme, au Luxembourg et en Allemagne, un seul suffit, tandis que, en Espagne, aucun seuil minimal n’est imposé.

Le Gouvernement a prévu de fixer le nombre minimal d’actionnaires au plus bas, à deux, suivant en cela les recommandations des praticiens et des théoriciens du droit.

Si certains des praticiens consultés militaient pour la création d’une société anonyme unipersonnelle, cette option, qui impliquait une modification des compétences, des règles de composition, d’organisation et de fonctionnement des organes de direction, n’entrait pas dans le champ de l’habilitation.

Ainsi, il est apparu que la réduction à deux du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes, en ce qu’elle aligne le régime de ces sociétés sur le droit commun, organisé par l’article 1832 du code civil, constituait une simplification attendue.

La commission sénatoriale a complété utilement les dispositions contenues dans l’ordonnance du 10 septembre 2015 en étendant cette diminution du nombre d’actionnaires à deux aux sociétés d’exercice libéral à forme anonyme, extension que le texte de l’habilitation ne permettait pas.

Elle a également procédé à la rectification d’une erreur de coordination à l’article 32 de l’ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, ainsi qu’à une coordination avec une disposition issue de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

Elle a enfin, pour une meilleure clarté du droit, précisé le périmètre des sociétés cotées qui étaient exclues du dispositif.

Je tiens naturellement à remercier le rapporteur, André Reichardt, de la qualité de son rapport et de ses propositions désormais inscrites dans le texte.

Enfin, je connais l’attachement du Sénat aux exigences de simplification et de modernisation du droit des sociétés qui dépasse la seule question du nombre d’actionnaires. La commission des lois a d’ailleurs engagé un travail législatif plus approfondi et minutieux, sous la direction de Thani Mohamed Soilihi, qui a élaboré une proposition de loi de simplification, de clarification et d’actualisation du code de commerce portant principalement sur le droit des sociétés. Le travail de fond de votre assemblée se poursuivra donc.

Cela dit, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous invite à voter cette mesure de simplification et de bon sens.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. André Reichardt, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il est rare que le Gouvernement invite le Parlement à examiner le projet de loi de ratification d’une ordonnance dont le dépôt est pourtant une obligation formelle exigée par l’article 38 de la Constitution pour éviter la caducité de l’ordonnance.

C’est encore plus rare lorsque le projet de loi de ratification ne prévoit aucune modification, c’est-à-dire lorsqu’il s’agit d’une ratification dite « sèche ».

En effet, les ratifications sont souvent faites dans d’autres projets de loi et, trop souvent, par amendement gouvernemental tardif, ce qui ne permet pas toujours d’apprécier le contenu et la portée des ordonnances concernées.

Le texte qui nous réunit aujourd’hui traduit donc une démarche tout à fait vertueuse du Gouvernement qu’il faut saluer : le Parlement doit effectivement pouvoir approuver en connaissance de cause l’usage fait par le Gouvernement de la délégation de pouvoir législatif qui lui a été consentie, et, le cas échéant, y apporter des corrections.

Comme nous avons été saisis de ce texte de ratification, nous l’avons évidemment examiné sérieusement et, bien entendu, nous avons trouvé matière à amender !

Je rappelle que la rédaction de l’habilitation a été arrêtée, par compromis entre les deux assemblées, lors de la réunion de la commission mixte paritaire sur la loi relative à la simplification de la vie des entreprises du 20 décembre 2014, dont j’étais déjà rapporteur pour le Sénat.

L’accord a consisté à accepter une réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées, sans pour autant remettre en cause l’architecture générale de ces sociétés, c’est-à-dire les compétences et les règles de composition, d’organisation et de fonctionnement de leurs organes, autant d’éléments constitutifs de la société anonyme qui assurent sa reconnaissance et sa crédibilité. En d’autres termes, la société anonyme à actionnaire unique ne nous paraissait pas souhaitable, pour ne pas dénaturer le régime de ce type de société.

Conformément à l’intention du législateur lorsqu’il a adopté cette habilitation, l’ordonnance a donc réduit à deux le nombre minimal d’actionnaires pour les sociétés non cotées, vous l’avez dit madame la secrétaire d’État, ce qui correspondait d’ailleurs à la situation de la plupart des formes dérogatoires de société anonyme. Le nombre minimal de sept a été maintenu pour les sociétés cotées.

Sur ma proposition, lors de l’élaboration de son texte le 13 janvier, la commission a adopté deux amendements, qui seront, si le Sénat en est d’accord, complétés par les deux amendements que je présenterai tout à l’heure au moment de la discussion des articles.

Entre-temps, le Gouvernement nous a transmis un troisième amendement. Je m’empresse de dire que, bien que la commission n’ait pas eu le temps de l’examiner, à titre personnel, j’y serai favorable.

Les modifications proposées sont pour l’essentiel techniques, de coordination ou de correction. Elles concernent, par exemple, le nombre minimal des associés d’une société d’exercice libéral, ou bien la situation des sociétés dont l’État est le seul actionnaire. Quant à l’amendement qui nous a été transmis récemment et que j’ai examiné rapidement, il s’agit simplement, avec la rétroactivité, de permettre à l’État, lorsqu’il est actionnaire unique, de le rester.

Une modification bien plus importante a néanmoins été introduite. Je souhaite donc la signaler : alors que l’ordonnance prévoyait que le minimum de sept actionnaires devait s’appliquer à toutes les sociétés dont les titres sont cotés, la commission a réduit ce périmètre aux seules sociétés dont les actions sont cotées, mais pas les autres titres.

Un amendement que nous examinerons tout à l’heure tend à préciser encore ce périmètre. Cela signifie que les quelques dizaines de sociétés dont les actions ne sont pas cotées, mais qui réalisent des émissions obligataires, pourront aussi bénéficier de la réduction à deux du nombre minimal d’actionnaires. Puisqu’il s’agit d’une règle de composition de l’actionnariat, il est logique que le critère discriminant soit la cotation des actions.

Assorti des deux amendements complémentaires que j’ai évoqués, ce texte peut donc être approuvé sans difficulté par la Haute Assemblée.

Pour autant, je considère que la question de la simplification et de l’adaptation de notre droit des sociétés, en particulier pour ce qui concerne les sociétés non cotées, est loin d’être épuisée par cette ordonnance sur le nombre minimal d’actionnaires des sociétés non cotées, ni d’ailleurs par les quelques autres dispositions ponctuelles de droit des sociétés de la loi relative à la simplification de la vie des entreprises du 20 décembre 2014, ou par l’ordonnance du 31 juillet 2014 relative au droit des sociétés, prise elle-même sur le fondement de la loi du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises.

C’est un travail permanent que nous devons accomplir, même s’il ressemble parfois davantage à un catalogue de mesures qu’à une démarche d’ensemble…

Pour prolonger le travail accompli à l’occasion de l’élaboration de ces textes récents, la commission des lois m’a désigné, la semaine dernière, rapporteur de la proposition de loi de simplification, de clarification et d’actualisation du code de commerce déposée il y a un an et demi par Thani Mohamed Soilihi à la suite de ses travaux en qualité de rapporteur sur la loi du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises. Cette proposition de loi pourra ainsi être inscrite à l’ordre du jour du Sénat au printemps.

Pour conclure, j’indique que la commission des lois, depuis plusieurs mois, a souhaité conduire un travail approfondi sur d’importantes ordonnances prises ces derniers temps, pour pouvoir les ratifier de façon éclairée.

Sous la responsabilité de notre ancien collègue Jean-Jacques Hyest, désormais membre du prestigieux Conseil constitutionnel, relayé par Christophe-André Frassa, qui interviendra tout à l’heure, la commission a étudié les deux ordonnances de 2014 ayant réformé de façon importante le droit des entreprises en difficulté, sans en remettre en cause l’économie générale : les propositions de la commission ont été introduites dans le projet de loi pour la justice du XXIe siècle, relatif à l’action de groupe et à l’organisation judiciaire.

Pour ma part, je suis chargé du projet de loi ratifiant l’ordonnance du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, et, le moment venu, la commission souhaitera sans doute examiner l’ordonnance réformant le droit des obligations à laquelle le Sénat était très opposé, considérant qu’une telle matière ne devait pas échapper à l’examen parlementaire, compte tenu de son importance…

S’attacher à contrôler l’application des lois et le suivi des décrets d’application, c’est utile pour le législateur. Contrôler la façon dont le Gouvernement a utilisé la délégation de pouvoir législatif que le Parlement lui a accordée et, le cas échéant, y apporter des corrections, comme nous le faisons aujourd’hui, est tout aussi nécessaire : il y va de notre responsabilité de législateur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, mon groupe est, par principe, plutôt hostile au fait de légiférer par voie d’ordonnance conformément aux règles de l’article 38 de la Constitution, notamment parce que ce mode d’« élaboration » de la loi prive la représentation nationale d’un authentique débat sur le sujet placé au centre de la procédure d’habilitation.

Il aura tout de même fallu un délai supérieur à un an entre la promulgation de l’article d’habilitation et la discussion du texte de ratification que nous examinons ce jour – le dispositif qu’il comporte était préconisé par les milieux socioéconomiques, conformément à une ancienne aspiration –, ce qui montre les limites de l’article 38 susvisé dans son application…

Cela étant, c’est tout de même à une très sensible évolution que nous ouvrons la porte avec la discussion et la probable adoption de ce texte.

En France, l’esprit d’entreprise se traduit notamment par l’existence de 3,6 millions entreprises artisanales, commerciales, industrielles ou de services, dont environ la moitié relève encore aujourd’hui du statut d’entreprise individuelle.

Faciliter l’émergence d’une nouvelle catégorie de sociétés de capitaux, notamment par le développement des sociétés par actions simplifiées, forme qui sera probablement fort utilisée dès l’adoption du présent texte, c’est renforcer la sécurité des entrepreneurs, en favorisant la distinction des patrimoines en cas de malheur…

La grande affaire de ce projet de loi, c’est bien évidemment l’abandon de la référence à la règle des sept associés pour la constitution d’une entreprise sous forme de société de capitaux. Il est évident que cela va modifier, sur la durée, l’architecture de notre système productif en « sociétisant » nombre d’exploitations individuelles.

La mise en œuvre de la future loi devrait donc conduire à la transformation d’un certain nombre de formes sociales, notamment à la rationalisation du secteur des auto-entrepreneurs.

Mais les conséquences de ce texte sont également fiscales. Une chose en effet est de recouvrer l’impôt sur le revenu d’un travailleur dit indépendant, commerçant ou artisan, une autre est de percevoir l’impôt dû par une société, fût-elle créée par deux associés, puisque nous passons alors de l’application d’un barème à celle d’un taux. On peut par conséquent s’attendre, les années passant, à la réduction relative du produit de l’impôt sur le revenu et à la progression de l’impôt sur les sociétés.

La même remarque vaut également en matière sociale : la contribution sociale généralisée sera perçue non plus auprès d’« entrepreneurs », mais, éventuellement, de gérants salariés.

Quoi qu’il en soit, et c’est la présidente du groupe communiste, républicain et citoyen qui vous le dit, comme nous ne sommes pas hostiles, contrairement à ce que l’on peut entendre ici ou là, à la sécurisation des entrepreneurs prévue par ce texte, j’ai le plaisir d’annoncer que nous le voterons.

M. André Reichardt, rapporteur. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Bertrand.

M. Alain Bertrand. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis plusieurs années, la notion de simplification est omniprésente en droit des affaires, à travers de nombreuses lois et ordonnances, ainsi que de textes européens. Le dernier exemple en date est la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques dont le titre II comporte un chapitre IV intitulé Simplifier, qui comprend lui-même une section visant à « alléger les obligations des entreprises ».

Le projet de loi ratifiant l’ordonnance du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées s’inscrit dans ce mouvement général. Autorisée par la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises, cette ordonnance prévoit d’abaisser de sept à deux le nombre minimal d’actionnaires nécessaire pour constituer une société anonyme. Cette disposition ne concerne pas les sociétés cotées en bourse, où les petites entreprises sont d’ailleurs très rares, il est vrai.

En effet, l’abaissement de ce seuil correspond mieux à la réalité économique des entreprises en France, composées en grande majorité de petites, voire de très petites entreprises, d’origine familiale ou non.

Signe que le dispositif antérieur était en partie fictif, le recours à des actionnaires de complaisance ou inactifs était souvent utilisé pour atteindre sept actionnaires. De plus, le nombre sept était quelque peu arbitraire : l’article 1832 du code civil qui fonde le droit français des affaires dispose que deux associés suffisent pour constituer une société. L’ordonnance apporte donc une simplification limitée, mais réelle et très concrète.

La commission des lois a introduit quelques modifications techniques. Une simple question : ces modifications, si elles sont adoptées in fine, auront-elles un effet rétroactif ?

Protéger le régime juridique des sociétés anonymes, avec leurs organes spécifiques qui assurent le bon fonctionnement de la vie économique, défendre les petits entrepreneurs : telles sont nos priorités.

Pour ces différentes raisons, l’ensemble des membres du groupe du RDSE votera en faveur de la ratification.

Mme la présidente. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est présenté aujourd’hui vise à ratifier une ordonnance du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées, elle-même prise en application de l’article 23 de la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises.

L’exigence initiale de sept actionnaires a toujours été contestée. Elle n’était pas adaptée à la pratique des sociétés familiales et des petites et moyennes entreprises, dans lesquelles les parts sont souvent détenues entre les mêmes mains. Elle ne correspondait pas non plus à la pratique des groupes de sociétés, au sein desquels les filiales appartiennent parfois à 100 % à la société mère.

En France, pour contourner cette condition et ne pas avoir à ouvrir leur capital, de nombreuses sociétés avaient recours à ce que l’on appelle des « actionnaires de complaisance ». Ce montage rendait cette forme sociétale trop lourde et lui faisait perdre en intérêt.

Les statistiques démontrent que, en 2014, une centaine de sociétés anonymes avait été immatriculée, contre plus de neuf mille sociétés par actions simplifiées.

Désormais, grâce au concours du Gouvernement, le nombre minimal d’actionnaires est réduit de sept à deux pour les sociétés anonymes non cotées. Cette modification du régime des sociétés anonymes permettra d’aligner le nombre minimal d’actionnaires sur celui que prévoit le régime de droit commun du code civil, et d’harmoniser notre droit sur celui de nombreux pays européens ; je pense notamment au Royaume-Uni, à la Belgique, ou encore à l’Italie, la France étant jusqu’à présent le seul pays européen à conserver une règle aussi stricte.

Comme vous, madame la secrétaire d’État, je pense que cette mesure aura pour effet de renforcer l’attractivité des sociétés anonymes, et évitera aux petites et moyennes entreprises comme aux structures familiales de recourir à l’actionnariat de complaisance. Elle aura également pour conséquence d’accroître la compétitivité de la France en Europe.

Pour aller plus loin encore, mon groupe avait déposé deux amendements visant à reprendre des dispositions de la proposition de loi de simplification, de clarification et d’actualisation du code de commerce que j’avais déposée. Mais nous avons accepté de les retirer, la commission des lois devant examiner ce texte très prochainement. Je me permets néanmoins de vous les présenter brièvement, en espérant que, le moment venu, ils retiendront toute votre attention.

Le premier amendement tendait à permettre la dématérialisation des assemblées générales ordinaires des actionnaires dans les sociétés non cotées. S’il était adopté, ce dispositif constituerait une simplification très substantielle pour l’organisation de ces assemblées.

Les assemblées générales extraordinaires, compétentes notamment pour modifier les statuts, ne pourraient pas, quant à elles, délibérer de façon dématérialisée, à l’instar de toutes les assemblées générales des sociétés qui font appel public à l’épargne. Deux modalités seraient prévues : soit la délibération par visioconférence ou autre moyen de télécommunication, soit la délibération exclusive par correspondance.

Pour respecter la liberté contractuelle, les statuts des sociétés concernées pourraient toutefois écarter cette faculté de façon globale ou pour certaines décisions seulement de l’assemblée générale ordinaire. Un droit d’opposition pour des actionnaires représentant au moins 5 % du capital serait également ménagé.

Quant au second amendement, il visait à supprimer une obligation formelle inutile, consistant à présenter tous les trois ans à l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires une résolution tendant à réaliser une augmentation de capital réservée aux salariés, dans l’hypothèse où ceux-ci détiennent moins de 3 % du capital.

En pratique, cette disposition concerne essentiellement les sociétés non cotées et quelques petites sociétés cotées, pour lesquelles cette résolution formellement proposée est systématiquement rejetée. Un tel mécanisme n’incite en rien les sociétés qui ne le souhaitent pas à développer l’actionnariat salarié, de sorte qu’il est inutile. En revanche, ne serait pas remise en cause l’obligation de proposer une augmentation de capital réservée aux salariés à chaque fois qu’est présentée une augmentation de capital, un cas de figure qui concerne en pratique la plupart des sociétés cotées de façon fréquente.

En outre, cet amendement tendait à procéder à une clarification rédactionnelle, en précisant les cas d’exonération de cette seconde obligation.

En conclusion, le présent projet de loi va dans le sens de la simplification du droit des entreprises souhaitée par le Président de la République et mise en œuvre par le Gouvernement depuis 2012. C’est la raison pour laquelle le groupe socialiste le votera évidemment.

Mme la présidente. La parole est à M. Christophe-André Frassa.

M. Christophe-André Frassa. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous devons aujourd’hui apporter notre pierre à un édifice dont nous ne disposons pas encore des plans et dont l’architecte a été remercié plusieurs fois. Celui qui a finalement été choisi ne fait pas non plus – c’est un euphémisme ! – l’unanimité dans son propre camp.

En effet, lorsque l’on est chargé de répondre aux demandes de simplification et de modernisation du droit des sociétés, comment ne pas agacer en déclarant que « la vie d’un entrepreneur est souvent plus dure que celle d’un salarié » ?

J’en veux pour preuve les propos d’Alexis Corbière : « Ce qu’il fait comme ministre est plutôt au service du MEDEF, qui pour moi ne représente pas le patronat ». Ou encore, ceux d’un non moins charismatique postier de Neuilly : « Le ministre ne connaît ni la vie des uns ni la vie des autres » et est le symbole d’un gouvernement qui est « dans une bulle, coupé de la réalité et du ressenti de millions de personnes. »

Un argument repris par notre collègue Pierre Laurent, le député Christian Paul et tant d’autres…

Mme Éliane Assassi. Que faites-vous ?

M. Christophe-André Frassa. Je cite les grands classiques, chère collègue !

Mme Éliane Assassi. Ce sont des accusations sorties de leur contexte, monsieur Frassa !

M. Christophe-André Frassa. Et que dire de la venue de ce même ministre à Davos, annoncé et attendu comme une rock star, qui a présenté des propositions si libérales qu’il en aurait fait pâlir, pour un peu, les chantres du libéralisme réunis dans ces alpages enneigés.

Pour ma part, je ne suis pas vraiment opposé à cette vision, pas plus d’ailleurs qu’à d’autres propos tenus par un homme qui veut – pour combien de temps encore ? – donner un grand coup de pied dans une fourmilière qui a pris des dimensions gigantesques.

Mme Éliane Assassi. Tout le monde n’a pas la chance d’être sénateur de Monaco !

M. Christophe-André Frassa. Quand on parle de Monaco, on a tout dit ! Tout le monde ne peut pas être communiste !

Mme Éliane Assassi. Surtout pas vous ! Et cela nous rassure !

M. Christophe-André Frassa. Mais il y en a de moins en moins et, bientôt, on vous mettra dans une réserve ! (Mme Éliane Assassi proteste véhémentement.)

Le monde du travail a changé ; l’entreprenariat a changé ; la carrière professionnelle dans sa continuité a changé ; l’Uberisation, le crowdfunding – c’est de l’anglais, madame Assassi ! –,…

M. Alain Bertrand. Soyez courtois !

Mme Éliane Assassi. Vous êtes un grossier personnage, monsieur Frassa !

M. Christophe-André Frassa. … l’économie de partage, la consommation collaborative bousculent les codes. Mais je plaide surtout pour une révision profonde, une vraie simplification du droit des sociétés. Nous en débattons aujourd’hui, et le chemin sera long au regard de ce que je viens de souligner.

En effet, ce texte est la ratification stricte de l’ordonnance du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées – de sept à deux –, et, comme l’a excellemment rappelé le rapporteur, André Reichardt, « cette ordonnance est loin de répondre aux demandes de simplification et de modernisation du droit des sociétés. De telles demandes appellent légitimement un travail législatif plus approfondi et minutieux, que la simple réduction du nombre d’actionnaires ne fait qu’effleurer. »

Mais bon, s’il faut travailler sur ce texte, travaillons-y !

Les membres de la commission des lois ont suivi la proposition du rapporteur d’adopter le projet de loi de ratification de l’ordonnance susmentionnée, en y apportant des modifications techniques. Ces modifications, que le rapporteur aura l’occasion de présenter dans quelques instants, me semblent cohérentes et appropriées.

J’ajoute néanmoins que la simplification du droit, pour les sociétés anonymes, ne peut se limiter à la réduction du nombre minimal d’actionnaires pour les sociétés non cotées.

Une démarche plus ambitieuse et systématique de simplification du droit des sociétés par actions doit être menée pour améliorer la compétitivité du droit français des entreprises, ainsi que nous l’avons déjà évoqué l’année dernière dans le cadre d’une mission d’information parlementaire.

La commission des lois a d’ores et déjà envisagé ce chantier, notamment par le biais d’une proposition de loi de simplification, de clarification et d’actualisation du code de commerce élaborée dans la continuité des travaux législatifs portant sur la loi du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises.

Reconnaissant l’utilité de cette initiative, l’Association française des entreprises privées, l’AFEP, l’Association nationale des sociétés par actions, l’ANSA, et le MEDEF ont publié, au mois d’octobre 2015, un rapport sur la modernisation et la simplification du droit des sociétés. J’espère que cette proposition trouvera grâce à vos yeux, mes chers collègues.

Quoi qu’il en soit, et pour conclure sur une note positive, le groupe Les Républicains votera le texte qui nous est soumis.

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d'actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées
Article 2 (nouveau)

Article 1er

(Non modifié)

L’ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées est ratifiée.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 1er.

(L'article 1er est adopté.)

Article 1er
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d'actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées
Article 3 (nouveau)

Article 2 (nouveau)

Le code de commerce est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase du second alinéa de l’article L. 225-1, les mots : « titres sont admis » sont remplacés par les mots : « actions sont admises » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 225-247, les mots : « titres sont admis » sont remplacés par les mots : « actions sont admises ».

Mme la présidente. L'amendement n° 1, présenté par M. Reichardt, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 3

Compléter ces alinéas par les mots :

et, après le mot : « réglementé », sont insérés les mots : « ou sur un système multilatéral de négociation »

La parole est à M. le rapporteur.

M. André Reichardt, rapporteur. Le présent amendement vise à ajuster le périmètre des sociétés anonymes tenues d’avoir au moins sept actionnaires – nous sommes passés du terme « titres » à celui d’« actionnaires » –, en prenant en compte celles dont les actions sont cotées sur un système multilatéral de négociation et pas seulement sur un marché réglementé classique. Il s’agit là d’un amendement de précision.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à cet amendement : cette extension du périmètre ne pose pas de difficultés juridiques.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2, modifié.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2 (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d'actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées
Article additionnel après l'article 3 (début)

Article 3 (nouveau)

I. – La seconde phrase du II de l’article L. 521-18 du code de l’énergie est supprimée.

II. – L’article 4 de la loi 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à l’exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales est abrogé.

III. – L’article 32 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique est ainsi rétabli :

« Art. 32. – Le second alinéa de l’article L. 225-1 du code de commerce n’est pas applicable aux sociétés dont l’État détient la majorité ou la totalité du capital. »

Mme la présidente. L'amendement n° 3 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 3

Compléter cet alinéa par les mots :

, à compter du 11 septembre 2015

II. - Alinéa 4

Après le mot :

commerce

insérer les mots :

, dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées,

La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Il s’agit d’un amendement de précision technique visant à organiser les modalités d’entrée en vigueur d’une disposition introduite par la commission des lois.

En effet, celle-ci a adopté un amendement, sur votre proposition, monsieur le rapporteur, pour corriger une malfaçon de l’ordonnance du 10 septembre 2015, ainsi que vous l’avez évoqué dans votre intervention liminaire, concernant les sociétés publiques. Cet amendement tend donc à compléter la disposition introduite par la commission, en précisant que cette correction vaut à compter du 11 septembre 2015, afin d’éviter toute difficulté d’interprétation.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. André Reichardt, rapporteur. Comme je l’ai indiqué précédemment, la commission n’a pas pu examiner cet amendement, qui a été déposé aujourd'hui.

Mais, eu égard au contenu de ce dernier et à titre personnel, je ne puis qu’émettre un avis favorable, car il prévoit une application rétroactive pour éviter d’éventuels contentieux, même si je doute qu’il y en ait…

Quoi qu’il en soit, cet amendement est bienvenu.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3, modifié.

(L'article 3 est adopté.)

Article 3 (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d'actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées
Article additionnel après l'article 3 (fin)

Article additionnel après l'article 3

Mme la présidente. L'amendement n° 2, présenté par M. Reichardt, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 2 et le II de l’article 3 de la présente loi sont applicables dans les îles Wallis et Futuna.

La parole est à M. le rapporteur.

M. André Reichardt, rapporteur. Cet amendement vise à assurer l’application outre-mer des dispositions ajoutées par la commission au projet de loi de ratification. Sont concernées les îles Wallis et Futuna.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 2.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.

Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l'ensemble du projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d’actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées.

(Le projet de loi est adopté.)

Article additionnel après l'article 3 (début)
Dossier législatif : projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2015-1127 du 10 septembre 2015 portant réduction du nombre minimal d'actionnaires dans les sociétés anonymes non cotées
 

13

Commission mixte paritaire

Mme la présidente. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l’article 12 du règlement.

14

Nomination d’un membre d’une délégation sénatoriale

Mme la présidente. Je rappelle au Sénat que le groupe Les Républicains a présenté une candidature pour la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.

Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.

La présidence n’a reçu aucune opposition.

En conséquence, je déclare cette candidature ratifiée et je proclame M. Patrick Chaize, membre de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, en remplacement de M. Alain Houpert, démissionnaire.

15

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 2 février 2016 :

À quatorze heures trente :

Proposition de loi tendant à renforcer l’efficacité de la lutte antiterroriste (n° 280, 2015-2016) ;

Rapport de M. Michel Mercier, fait au nom de la commission des lois (n° 335, 2015-2016) ;

Texte de la commission des lois (n° 336, 2015-2016).

À seize heures quarante-cinq : questions d’actualité au Gouvernement.

À dix-sept heures quarante-cinq, le soir et, éventuellement, la nuit : suite de la proposition de loi tendant à renforcer l’efficacité de la lutte antiterroriste.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt et une heures.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART