M. Michel Bouvard. J’ai l’habitude ! (Sourires.)

Mme Françoise Férat, rapporteur. Si cet amendement a le mérite de considérer non pas la surface de terrain à aménager du lotissement, mais la surface de plancher pour fixer le seuil, je suis tout de même opposée à votre proposition. J’entends bien votre argument sur le coût, mais cela reviendrait à mettre en péril l’amélioration de la qualité des lotissements, que nous voulons justement mettre en avant.

Mon commentaire vaut également pour l’amendement n° 173 rectifié.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Audrey Azoulay, ministre. J’apporterai une précision et une réponse.

Tout d’abord, s’il y a effectivement un seuil dans l’amendement du Gouvernement, l’association de la compétence de l’architecte n’est en aucun cas un monopole. La rédaction évoque les compétences nécessaires, dont celles d’un architecte. Je me suis mal exprimée si j’ai pu laisser croire qu’il s’agissait d’un monopole. Voilà pour la précision.

Ensuite, vous m’interrogez sur le seuil. Ce point reste à déterminer. J’ai eu l’occasion de m’exprimer à l’Assemblée nationale pour dire qu’il fallait que ce seuil soit assez bas. Les enjeux structurants tenant à l’aménagement des lots commençant très tôt, il faut associer les architectes et les autres compétences assez vite.

Monsieur Bouvard, vous demandez que les assemblées parlementaires soient associées à la définition de ce seuil, qui sera faite par décret. Si vous adoptez l’amendement du Gouvernement et si cette disposition était in fine retenue pour ce texte de loi, je m’engage, bien entendu, à ce qu’il y ait une concertation, une bonne information des commissions concernées de l’Assemblée nationale et du Sénat.

Je demande le retrait des amendements nos 62 rectifié, 179 rectifié et 173 rectifié au profit de celui qu’a présenté Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à M. Georges Labazée, pour explication de vote.

M. Georges Labazée. Je suis très favorable aux amendements présentés respectivement par Mme Sylvie Robert et par M. Bouvard, ainsi qu’à celui du RDSE, même s’il y a quelques différences de rédaction.

Je suis prudent, car j’ai été échaudé par mon expérience à la suite du vote à l’unanimité, à l’Assemblée et au Sénat, après une CMP, de la loi sur la préparation de la société au vieillissement voilà quelques mois. Postérieurement, j’ai été désigné pour siéger dans un comité national chargé de suivre l’application du texte de loi et la préparation des décrets d’application.

Madame la ministre, j’ai été obligé, la semaine dernière, de faire remarquer à plusieurs reprises que la façon dont l’administration, que je respecte, rédige les décrets d’application, traduit en bon Français, comme l’on dit, la volonté du législateur, la met en musique, ne correspond pas toujours à l’esprit du texte voté par le Parlement.

Fort de cette expérience, je reste très prudent. Mieux vaut tenir que courir.

M. Georges Labazée. Je suis donc farouchement partisan de l’adoption des amendements nos 62 rectifié et 179 rectifié, et même de l’amendement n° 173 rectifié, s’il le faut.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.

Mme Sylvie Robert. Je voudrais interroger Mme la ministre sur la formulation précise de son amendement.

L’amendement que nous avions déposé renvoyait à un décret l’élaboration de la liste des professionnels de l’aménagement et du cadre de vie. Il est bien évident, dans notre esprit, que cette liste comprenait les architectes, en plus des autres professionnels. En outre, nous gardions les seuils. Il faut bien comprendre que ce n’est pas pareil de faire un lotissement en zone périurbaine ou en zone rurale, donc il faut pouvoir déterminer quels professionnels sont les plus à même d’intervenir en fonction des spécificités des territoires.

Madame la ministre, j’aimerais comprendre pourquoi vous faites explicitement référence à l’architecte dans votre amendement, alors même qu’il n’était pas exclu de notre rédaction, laquelle renvoyait à un décret censé le mentionner aux côtés des autres professionnels. Pourquoi, dans ce cas-là, ne pas mentionner un autre professionnel du cadre de vie en deçà d’un certain seuil ?

Je le répète, je voudrais savoir ce qui a motivé la mention explicite de l’architecte. Pour moi le risque est le suivant : si le seuil résultant des arbitrages interministériels est très bas, nous serons revenus finalement à la première version issue de l’Assemblée nationale, qui prévoyait le recours presque automatique à un architecte.

Aussi, mes chers collègues, je vous engage à bien mesurer les implications du texte que nous allons voter, notamment au regard des arbitrages qui seront rendus au moment de la préparation du décret.

MM. Georges Labazée et Jean-François Longeot. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.

M. Alain Vasselle. Je soutiendrai la série d’amendements qui viennent d’être présentés par nos collègues. Je ne sais pas s’il est plus approprié de suivre l’amendement du Gouvernement ou l’amendement que vient de présenter notre collègue du groupe socialiste. On peut effectivement s’interroger sur la pertinence de faire référence aux architectes, car il est possible de faire appel à d’autres professionnels pour réaliser un projet.

Cela étant, c’est la possibilité de fixer un seuil qui retient le plus mon attention, car c’est essentiel. Madame la ministre, vous avez annoncé une concertation avec les assemblées parlementaires à cet effet, ce qui est positif. Mais je voudrais profiter de cet amendement pour appeler votre attention sur la spécificité des bâtiments agricoles, notamment destinés à l’élevage, pour lesquels il me semble nécessaire de prévoir un seuil différent de celui qui sera proposé pour les particuliers.

Il est évident que le recours à un professionnel contribue à surenchérir le coût de la construction, or la conception d’un bâtiment d’élevage est relativement simple et ne nécessite pas de faire appel à des professionnels dans les mêmes conditions que pour d’autres types de constructions. Je tenais à appeler votre attention sur ce point, madame la ministre, afin que vous acceptiez de le prendre en considération le moment venu.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Kern, pour explication de vote.

M. Claude Kern. Je voudrais juste réparer un oubli. Dans mon intervention sur l’article, j’ai omis de préciser que le fait de citer spécifiquement l’architecte me gênait beaucoup. C’est pourquoi je préfère voter les amendements présentés par nos collègues, et je n’appelle pas à voter en faveur de l’amendement du Gouvernement.

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Allizard, pour explication de vote.

M. Pascal Allizard. Je voudrais attirer l’attention de notre assemblée et du Gouvernement sur un problème de cohérence. Voilà quelques instants, à l’occasion de l’examen d’un article précédent, nous expliquions que l’absence de réponse de l’administration valait refus. Je veux quand même rappeler qu’il y a quelques mois, dans un souci de simplification et de rapidité des réponses données aux pétitionnaires publics, nous avions décidé que l’absence de réponse dans les soixante jours valait accord.

MM. Michel Bouvard et Alain Vasselle. C’est la règle !

M. Pascal Allizard. Effectivement, c’est ce que nous avons décidé.

J’attire aussi votre attention sur le fait qu’une série de décisions publiques sur le point d’être prises vont restreindre l’application de cette règle, ce qui peut, à la rigueur, se concevoir sur un certain nombre de points. En tout état de cause, l’absence de réponse de l’administration vaudra désormais refus dans ces domaines. C’est tout le sujet qui nous occupe en ce moment, donc j’attire solennellement l’attention des uns et des autres sur la lisibilité, vis-à-vis de nos concitoyens et nos pétitionnaires, des décisions que nous allons prendre.

Ensuite, je suis gêné, comme d’autres collègues, de décerner un monopole à telle ou telle profession sur les décisions d’urbanisme. Il faut ne jamais avoir été en situation d’accorder un permis de lotir ou un permis de construire pour ignorer qu’il s’agit toujours de décisions individuelles.

C’est pourquoi je me rallie assez facilement aux amendements de nos collègues, car je suis d’avis de donner de la responsabilité aux élus locaux qui sont en charge des décisions d’urbanisme.

Voilà quelques mois, nous discutions dans cet hémicycle de la loi Macron, qui a été, certes, fortement amendée, mais ce texte avait pour objet de redonner de la liberté et de l’initiative. Il en allait de même dans la loi NOTRe, qui visait à redonner de la liberté aux élus locaux sur un certain nombre de sujets, notamment l’urbanisme. Aussi, je suis profondément choqué de constater que, sous la pression de certains lobbies professionnels, nous sommes en train de faire marche arrière. (M. Jackie Pierre applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Tout d’abord, l’intervention de M. Vasselle m’interpelle : depuis quand y a-t-il des bâtiments d’élevage dans des lotissements ? À moins qu’il ne s’agisse d’abriter des animaux aux longues oreilles en mettant des clapiers… (Sourires.)

Enfin, je ne comprends pas comment la chose est possible. Au moins, nous sommes sûrs qu’il ne s’agit pas d’élevage extensif… (Nouveaux sourires.)

Plus sérieusement, je suis très favorable aux amendements de nos collègues. Madame la ministre, je suis navré, mais je crois que c’est le bon sens et le vécu des élus locaux qui s’expriment à travers ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.

M. Jean-François Longeot. Je voterai contre l’amendement n° 216. L’intitulé du projet de loi que nous étudions commence par le mot liberté. En prévoyant que l’architecte devra participer, on ne laisse pas de liberté aux élus. Aussi, je préfère les amendements nos 62 rectifié et 179 rectifié, qui visent l’ensemble des professionnels compétents que sont les architectes, les géomètres, les urbanistes. Il faut que ce texte respecte les maires, qui doivent pouvoir choisir qui ils ont envie de retenir pour la création d’un lotissement.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Françoise Férat, rapporteur. À ce moment de la discussion, je suis sincèrement désolée…

Mme Françoise Férat, rapporteur. Eh oui, cela m’arrive souvent, monsieur Raoul, mais ce soir tout particulièrement. Ne m’en veuillez pas ! (Sourires.)

Je pensais que ce que nous avions intégré dans le texte de la commission sur ce sujet était de bon sens et de nature à éviter toutes ces « choses » – je n’ose pas employer d’autres mots – que nous voyons ici ou là fleurir dans certaines de nos communes.

Je le répète, parce que certains ont envie de valoriser le moindre mètre carré, ils font fi de la qualité de vie des habitants, c’est-à-dire oublient de planter ce qu’il faudrait et d’installer des maisons sur des parcelles dignes de ce nom.

Sincèrement, le seuil me dérange beaucoup. Cependant, j’ai parfaitement entendu les positions qui se sont exprimées dans l’hémicycle.

Madame la ministre, je ne viendrai pas vers votre amendement, car il tend à rétablir le monopole de l’architecte, ce qui me dérange beaucoup. Nous risquons de nous priver de ce qui a été le cœur de la réflexion, tant en commission qu’en séance, en première et en deuxième lecture, à savoir l’envie de disposer d’une équipe susceptible de mettre en scène une véritable qualité de vie.

J’ai lu attentivement les autres amendements, et il m’est difficile de choisir entre les amendements identiques nos 62 rectifié et 179 rectifié, d’un côté, et l’amendement n° 173 rectifié de l’autre.

M. Georges Labazée. On prend tout !

Mme Françoise Férat, rapporteur. Néanmoins, l’amendement n° 173 rectifié, présenté par Mme Jouve, me semble à cet égard plus intéressant, car il fait référence à la surface de terrain à aménager. À titre personnel, je vous encourage donc à le voter, mes chers collègues.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Audrey Azoulay, ministre. Je souhaite brièvement réagir aux arguments qui viennent d’être avancés.

Tout d’abord, je regrette que l’on oppose la liberté des élus, confrontés aux nécessités pratiques de la vie d’une commune, et le recours à l’architecte. Il me semble que cela revient à méconnaître ce que nous avons essayé de faire dans cette loi, à savoir intégrer les architectes dans l’ensemble de nos procédures qui concernent le cadre de vie en général. Malheureusement, ce besoin apparaît en creux devant le constat des dégâts trop souvent occasionnés par ce type de projet. C’est la raison pour laquelle il nous semble particulièrement important de les faire intervenir dans les procédures qui concernent les lotissements.

Cette semaine s’ouvre la Biennale internationale d’architecture de Venise. L’affiche de cette manifestation représente une femme sur un escabeau devant un grand espace vide, ce qui montre que l’architecte intervient dès que l’on imagine un espace de vie. C’est pourquoi nous le mentionnons dans divers articles de ce projet de loi et dans cet amendement, s’agissant des lotissements.

Je maintiens qu’il n’y a pas de monopole de l’architecte. Il s’agit d’une compétence parmi d’autres, mais cette compétence nous paraît nécessaire. Si nous ne le mentionnons pas à ce stade, alors que c’est une profession réglementée et que nous sommes dans le cadre d’un projet architectural, paysager, environnemental, je crains que nous ne puissions l’imposer au-delà d’un certain seuil uniquement par voie réglementaire parmi l’ensemble des compétences. Or il me semble qu’elle mérite de l’être.

J’ai bien entendu les arguments, je ne me fais pas d’illusions sur l’issue des débats, mais je tenais à préciser ma position.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 216.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 62 rectifié et 179 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l'amendement n° 173 rectifié n'a plus d'objet.

Je mets aux voix l'article 26 quater, modifié.

(L'article 26 quater est adopté.)

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Article 26 quater
Dossier législatif : projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine
Article 26 undecies

Article 26 sexies

Après l’article 5 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 précitée, il est inséré un article 5 bis ainsi rédigé :

« Art. 5 bis. – Les maîtres d’ouvrage publics et privés favorisent, pour la passation des marchés de maîtrise d’œuvre ayant pour objet la réalisation d’un ouvrage de bâtiment, l’organisation de concours d’architecture, procédure de mise en concurrence qui participe à la création, à la qualité et à l’innovation architecturales et à l’insertion harmonieuse des constructions dans leur milieu environnant.

« Après l’examen et le classement des projets par le jury, le concours d’architecture peut comporter une phase de dialogue entre le jury et les candidats permettant de vérifier l’adéquation des projets présentés aux besoins du maître d’ouvrage. » – (Adopté.)

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Article 26 sexies
Dossier législatif : projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine
Article 26 duodecies (supprimé)

Article 26 undecies

(Non modifié)

I. – À titre expérimental et pour une durée de sept ans à compter de la promulgation de la présente loi, l’État, les collectivités territoriales ainsi que leurs groupements et les organismes d’habitations à loyer modéré mentionnés à l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation peuvent, pour la réalisation d’équipements publics et de logements sociaux, déroger à certaines règles en vigueur en matière de construction dès lors que leur sont substitués des résultats à atteindre similaires aux objectifs sous-jacents auxdites règles. Un décret en Conseil d’État fixe les règles qui peuvent faire l’objet de cette expérimentation, notamment en ce qui concerne les matériaux et leur réemploi, ainsi que les résultats à atteindre qui s’y substituent. Il détermine également les conditions dans lesquelles l’atteinte de ces résultats est contrôlée tout au long de l’élaboration du projet de construction et de sa réalisation. Dans un délai de trois mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation comprenant des recommandations.

II. – Pour les projets soumis à permis de construire autres que ceux mentionnés au I du présent article, dans les limites des opérations d’intérêt national mentionnées à l’article L. 132-1 du code de l’urbanisme, à titre expérimental et pour une durée de sept ans à compter de la promulgation de la présente loi, l’État et les collectivités territoriales peuvent autoriser les maîtres d’ouvrage ou locateurs d’ouvrage à déroger aux règles applicables à leurs projets dès lors que leur sont substitués des résultats à atteindre similaires aux objectifs sous-jacents auxdites règles.

Le permis de construire prévu à l’article L. 421-1 du code de l’urbanisme emporte, dans ce cas, approbation de ces dérogations. À cette fin, la demande prévue à l’article L. 423-1 du même code comporte une étude de l’impact des dérogations proposées. Cette étude est préalablement visée par l’établissement public d’aménagement géographiquement compétent. Au terme de la période d’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport concernant la mise en œuvre de cette disposition. – (Adopté.)

Article 26 undecies
Dossier législatif : projet de loi relatif à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine
Article 26 terdecies (Texte non modifié par la commission)

Article 26 duodecies

(Supprimé)

Mme la présidente. L'amendement n° 63, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, MM. Guillaume, Montaugé, Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après le premier alinéa de l’article L. 423-1 du code de l’urbanisme, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’autorité compétente en matière de délivrance du permis de construire peut déroger à ces conditions et délais pour la présentation et l’instruction des demandes de permis de construire présentées par les personnes physiques et morales mentionnées au premier alinéa de l’article 4 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l’architecture, lorsque le projet architectural faisant l’objet de la demande de permis de construire a été établi par un architecte. »

La parole est à Mme Sylvie Robert.

Mme Sylvie Robert. Il s’agit encore d’un amendement déjà présenté en première lecture par notre groupe.

Nous proposons de modifier l’article L. 423–1 du code de l’urbanisme, qui, je le rappelle, précise que les conditions de présentation et d’instruction des permis de construire, d’aménager ou de démolir et des déclarations préalables sont renvoyées au pouvoir réglementaire.

Le dispositif que nous proposons impose au pouvoir réglementaire de prévoir des délais d’instruction inférieurs pour les permis de construire des particuliers qui auront eu recours à un architecte conformément au dispositif de l’article 26 quinquies, que nous avons approuvé ici, et qui rend ce recours obligatoire pour toute construction supérieure à 150 mètres carrés.

Nous souhaitons ainsi rétablir une disposition que l’Assemblée nationale a par deux fois adoptée. Comme en première lecture, je ne souhaite néanmoins pas fixer ce délai de façon rigide. Il me semble préférable que le pouvoir réglementaire puisse distinguer différents cas de figure pour fixer ces dérogations.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 240, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Amendement n° 63, alinéa 3

Remplacer le mot :

délais

par les mots :

réduire les délais

La parole est à Mme la ministre.

Mme Audrey Azoulay, ministre. Un avis favorable du Gouvernement sur ce dispositif est conditionné à l’adoption de ce sous-amendement.

Vous proposez de rétablir l’article qui dispose que les autorités compétentes en matière de délivrance des permis de construire peuvent prévoir des dérogations en matière d’instruction des demandes de permis en cas de recours à l’architecte en dessous du seuil de recours obligatoire pour un particulier.

J’avais eu l’occasion de dire que le Gouvernement souhaitait lancer des expérimentations sur le sujet, et nous venons d’ailleurs de publier un appel à manifestation d’intérêt pour les collectivités locales susceptibles d’être intéressées par cette procédure.

Nous ne sommes pas opposés à cette modification, sous réserve de l’adoption de ce sous-amendement, afin de prévoir que la dérogation ne puisse pas conduire à augmenter les délais d’instruction.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?

Mme Françoise Férat, rapporteur. Le présent amendement a pour objet de rétablir l’article 26 duodecies, que nous avons supprimé en commission. Il permettrait aux collectivités de déroger aux conditions et délais pour la présentation et l’instruction des demandes de permis de construire, lorsque celles-ci ont été réalisées par un architecte en deçà du seuil de recours obligatoire.

Selon moi, cette solution créerait beaucoup plus de problèmes qu’elle n’en résoudrait. En premier lieu, me semble-t-il, elle pose un problème juridique (M. Michel Bouvard opine.) en ce qui concerne le respect de la hiérarchie des normes.

M. Michel Bouvard. Très bien !

Mme Françoise Férat, rapporteur. Dans quelle mesure et pour quelles normes les collectivités pourraient-elles y déroger et jusqu’où les collectivités elles-mêmes pourraient-elles aller dans les dérogations ?

S’agissant des délais d’instruction, mes chers collègues, dois-je vous rappeler que nous sommes en ce moment en pleine fusion de nos intercommunalités, que nous avons à subir un désengagement des services de l’État en matière d’urbanisme et que nous avons à mettre en place des équipes pour compenser ce retrait ? Malgré toutes ces contraintes, nous réussissons à tenir des délais convenables pour l’octroi des permis de construire.

Sommes-nous sûrs, par ailleurs, que les architectes sont infaillibles et qu’ils ne commettent jamais d’erreurs ?

Les délais ne sont pas rallongés lorsqu’un permis de construire est déposé dans une commune, même une commune rurale comme la mienne. Pourtant, si vous êtes sur le territoire d’un parc naturel régional, ce dernier doit être interrogé en même temps, de même que l’architecte des Bâtiments de France, la communauté de communes pour l’assainissement, le SPANC, etc. Bref, nous ne perdons pas de temps. Dans une telle commune rurale, les délais ne dépassent pas deux mois au maximum.

Pourquoi devrions-nous entrer dans un système susceptible de provoquer du contentieux, les architectes pouvant aussi commettre des erreurs ?

Enfin, madame la ministre, je crois qu’une expérimentation est menée conjointement par l’État, l’ordre des architectes et les collectivités volontaires en vue de mettre en place un permis simplifié pour les demandes de cette nature. Ne pourrions-nous pas laisser l’expérimentation se dérouler jusqu’à son terme ?

En conséquence, madame Robert, je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable. Par ailleurs, à titre personnel, la commission n’ayant pas eu le temps de l’examiner, je demande également le retrait du sous-amendement présenté par le Gouvernement, faute de quoi j’y serai défavorable. En effet, ce sous-amendement n’a pas fait tomber les réserves que j’avais formulées en commission.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.

M. Michel Bouvard. Je ne doute pas qu’il y ait une bonne intention derrière cet amendement, avec un souci de simplification.

En revanche, il pose un vrai problème, parce qu’on ne peut pas créer deux types de délais, quels que soient le respect et l’attachement que nous inspire la créativité des architectes. Mme la rapporteur a raison de rappeler que tout permis de construire peut présenter des carences.

J’ajoute que, philosophiquement et au regard de l’histoire, je suis toujours très dérangé quand on veut accorder un avantage législatif à une corporation. La dernière fois qu’on a légiféré pour favoriser les corporations, c’était dans une période bien sombre de l’histoire de notre pays. Pour cette raison également, je ne peux accepter un tel amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Allizard, pour explication de vote.

M. Pascal Allizard. Madame la ministre, votre proposition me paraît extrêmement discriminante et tout à fait inégalitaire. Ainsi, les ménages ayant un gros budget pour construire s’offriront les services d’un architecte et bénéficieront d’un délai minoré pour obtenir leur permis de construire, tandis que les moins fortunés devront attendre plus longtemps leur autorisation. Je trouve cela choquant.

Par ailleurs, vous semblez complètement ignorer que, depuis la loi ALUR, que nous devons à la majorité à laquelle vous appartenez, un certain nombre de maires ruraux n’instruisent plus les permis de construire et les accordent au bout des soixante jours. Concrètement, la demande, avec un dossier parfaitement rempli, est mise dans un tiroir, elle n’est pas instruite, puis, absence de réponse valant accord, le permis de construire est délivré. Telle est aujourd’hui la réalité aujourd’hui en France.

Je voudrais vous signaler que j’ai attiré l’attention du ministre de l’agriculture sur ce sujet voilà plusieurs mois, à l’occasion d’un débat sur l’élargissement des critères de constructibilité, notamment sur les parcelles agricoles. J’attends toujours la réponse.

Vouloir discriminer sur les délais de délivrance des permis de construire me semble très choquant. Une telle proposition rejoint finalement celles que nous avons entendues en commission lors de la première lecture. Le lobby des architectes est même allé jusqu’à demander une signature de l’autorité communale uniquement pour la forme, puisqu’un permis de construire demandé par un architecte était automatiquement accordé.

Si nous laissions passer cette mesure – je rejoins les propos de mon collègue Michel Bouvard sur ce point –, ce serait une énorme faute. C’est juste pas possible !

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.

M. Alain Vasselle. Je fais miens les arguments des deux collègues qui m’ont précédé. Cette mesure présente un véritable caractère discriminatoire et engendrerait une situation d’iniquité entre celles ou ceux qui feraient appel à un architecte et les autres. En qualité de maire, je vivrais assez mal une situation de cette nature dans la petite commune rurale qui est la mienne.

M. Raoul s’est absenté, mais je voudrais profiter de cette prise de parole pour que figure au procès-verbal une précision sur l’argumentation que j’ai développée précédemment au sujet d’un autre amendement. J’ai défendu la construction des bâtiments agricoles non pas spécifiquement dans le cadre de la création de lotissements, mais de manière générale, pour que Mme la ministre, en sa qualité de membre de Gouvernement, puisse en tenir compte sur les autres articles du texte, notamment l’article L. 431–3 du code de l’urbanisme.

Je referme la parenthèse pour dire que je suivrai la position de la commission.