M. Yves Daudigny. Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Vous engagez, madame la ministre, un plan d’investissement pour l’hôpital de 2 milliards d’euros sur cinq ans. Votre annonce s’inscrit dans le prolongement des multiples réformes accomplies sur tous les fronts de la santé depuis 2012, réformes qui ont marqué une véritable rupture politique. Il faut y revenir, car les Françaises et les Français doivent choisir quel système de santé les protégera ou, pour certains, ne les protégera plus à l’avenir.

J’en veux pour preuve la proposition de loi relative à l’avenir de notre système de santé élaborée par le groupe Les Républicains et débattue le 16 juin à l’Assemblée nationale. Elle mérite la plus large publicité. Pour la prévention ? Rien ! Pour coordonner les structures de prise en charge et les professionnels ? Rien ! Pour l’innovation ? Rien ! Pour les droits des patients ? Rien !

M. Didier Guillaume. Atelier mémoire !

M. Yves Daudigny. Mais pour défaire, supprimer, abroger, réduire, oui ! Ce texte reprend la quintessence des mesures appliquées durant la dernière décennie, avec les résultats que l’on a connus en 2012 : près de 30 milliards d’euros de déficit sociaux, couverture sociale réduite, hôpitaux grevés de dettes.

La rupture a été en effet profonde en 2012 entre ces mesures fondées sur « l’efficience et la mise en concurrence » et la politique menée depuis, fondée sur la solidarité et l’excellence. Chacun peut juger des résultats : comptes sociaux rétablis, reste à charge réduit, service public hospitalier rétabli et financement réformé, organisation repensée sur des bases de coopération au plus près des besoins, des spécificités et des fragilités de chaque territoire, excellence reconnue au niveau international.

M. Yves Daudigny. Merci donc, madame la ministre, de rappeler à la représentation nationale et à nos concitoyens les nouvelles mesures prises pour l’innovation et la santé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le sénateur Yves Daudigny, vous avez raison de rappeler quelques vérités que certains voudraient oublier. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.)

Il est pourtant difficile de ne pas les voir. Depuis quelques mois, nous voyons éclore des projets prétendument alternatifs qui nous font revivre un passé pas si lointain. On apprend ainsi que, pour certains, il faut, pour assurer l’avenir du système de santé, réduire d’au moins 3 % les remboursements de la sécurité sociale, faire revenir les franchises et les forfaits non remboursés.

Nous avons, rappelons-le, mis fin à cette fâcheuse pratique depuis 2012. Certains nous expliquent que l’avenir réside dans ce que l’on appelle pudiquement la « révision » de la carte hospitalière. Disons les choses plus clairement : il s’agit purement et simplement de supprimer les hôpitaux de proximité dans les territoires, ce à quoi nous nous refusons. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.)

Nous entendons aussi que, pour assurer l’avenir, il faudrait au moins 100 milliards d’euros d’économies et la suppression de centaines de milliers de postes de fonctionnaires. Mesdames, messieurs les sénateurs, cela ne se fera pas sans toucher drastiquement à l’hôpital public.

Contrairement à ce que j’entends parfois, je veux rappeler que nous consacrons à l’hôpital public des moyens supplémentaires, année après année. En 2016, 1,3 milliard d’euros de plus ont été alloués aux hôpitaux de France. Depuis 2012, ce sont 30 000 emplois supplémentaires qui ont été créés dans les hôpitaux publics de France.

Enfin, comme vous l’avez souligné, monsieur le sénateur, je viens d’annoncer un plan d’investissement de 2 milliards d’euros sur cinq ans pour soutenir l’innovation et l’investissement dans les systèmes d’information de nos hôpitaux. C’est de cette manière que nous répondrons aux besoins et aux attentes des Français. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

brexit

M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Pascale Gruny. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, les Britanniques se prononcent en ce moment même sur l’avenir européen de leur pays. La portée historique de ce référendum n’a échappé à personne. L’ampleur des conséquences économiques d’un Brexit est débattue. À n’en pas douter, elles seront négatives pour l’ensemble des Européens, mais c’est au niveau politique qu’une sortie du Royaume-Uni serait la plus grave.

Nous aurions tort de penser que les causes qui ont conduit à cette situation sont propres à nos amis britanniques ! Ne nous y trompons pas : c’est l’ensemble du continent qui est traversé par une crise de défiance sans précédent vis-à-vis de l’Europe de Bruxelles. Il n’y a plus que 38 % des Français qui lui soient favorables.

Quelle que soit l’issue du scrutin, si nous voulons sauver l’Europe, il est urgent de proposer un nouveau projet aux Européens. Et ce ne sont pas des réponses technocratiques que les peuples attendent, mais une réponse politique.

Depuis des mois, François Hollande annonce une grande initiative franco-allemande pour la zone euro ! Rien de concret n’a pour l’instant été avancé.

Pourquoi le Président de la République est-il si discret sur le sujet ? Monsieur le Premier ministre, la France est-elle en mesure de faire des propositions à ses partenaires pour redonner un indispensable second souffle à l’Union européenne ? Et, si oui, quelles sont-elles ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des affaires européennes.

M. Harlem Désir, secrétaire d’État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Pascale Gruny, les Britanniques sont en train de se prononcer et nous devons respecter le déroulement de ce scrutin, même si, nous le redisons, nous souhaitons que la voix de l’unité européenne l’emporte, et que le Royaume-Uni reste au sein de l’Union.

Nous devons aussi, ensemble, être fiers de ce que la France apporte à la construction européenne. Depuis sa fondation, la France a été de toutes les grandes étapes de la construction européenne : la Communauté européenne du charbon et de l’acier a vu le jour grâce à la France et l’Allemagne, notre pays figure parmi les six fondateurs du marché commun et de la politique agricole commune, nous avons contribué à la mise en œuvre de la monnaie unique, des accords de Schengen et de toutes les percées qui ont pu être réalisées dans divers domaines et qui, parfois, suscitent la réticence de certains de nos partenaires. Ainsi, si l’Union a désormais plus de responsabilités en matière d’actions extérieures et de politique de défense, c’est grâce aux initiatives françaises.

C’est le Président de la République qui, après les attentats du mois de novembre en France, a invoqué pour la première fois dans l’histoire de la construction européenne l’article 42-7 du traité de Lisbonne, entraînant une réponse de l’Allemagne et des autres États membres qui sont venus s’engager avec nous en Irak, en Syrie, mais aussi au Sahel – nous étions intervenus au Mali pour la sécurité de ce pays, mais aussi pour celle de l’Europe, dans un contexte de lutte contre le terrorisme.

C’est grâce à la France que, depuis 2012, le soutien à la croissance et à l’investissement, et non plus l’austérité, sont placés au cœur des politiques européennes, que le plan Juncker a été lancé – nous soutenons le président de la Commission, et la majorité sénatoriale devrait faire de même ! –, qu’une certaine flexibilité est autorisée dans l’interprétation du pacte de stabilité, pour que l’on cesse d’imposer l’austérité aux pays d’Europe du Sud. Il y a, aujourd’hui, une nouvelle approche de ce que doit être la priorité de la relance européenne pour la croissance, l’emploi, la jeunesse, la responsabilité internationale et l’Europe de la défense.

C’est cela, la voix de la France ! Et la voix de la France est et sera entendue ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour la réplique.

Mme Pascale Gruny. Vous avez raison, monsieur le secrétaire d’État, la France est à l’origine de la construction de l’Union européenne. Mais, depuis 2012, on n’entend plus la France ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Le leadership que nous exercions au côté de l’Allemagne n’existe plus. On attend effectivement, pas seulement des propositions, mais que l’Union européenne soit derrière la France et, pour cela, il faut une France forte ! Or la France a tout perdu au niveau de la croissance. J’entends qu’il y a aujourd’hui un petit mieux, mais, depuis 2012, combien avons-nous perdu ?

Chaque fois que vous avez été aux manettes, la croissance a augmenté partout en Europe, sauf chez nous !

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ce n’est pas vrai !

Mme Pascale Gruny. Comment expliquez-vous cela ? Nous avons besoin d’une France forte pour une Europe forte ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Didier Guillaume. Ce n’est pas la réalité !

référendum notre-dame-des-landes (I)

M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour le groupe socialiste et républicain.

M. Yannick Vaugrenard. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Dimanche prochain, en Loire-Atlantique, une consultation se tiendra, afin que les électeurs nous disent si, oui ou non, ils souhaitent le transfert de l’aéroport de Nantes-Atlantique à Notre-Dame-des-Landes. Ils devront dire aussi, après de multiples recours et enquêtes publiques, si notre État de droit se doit d’être respecté. Ils devront dire, enfin, quelle est leur conception de la société : une infime minorité squattant une ZAD peut-elle décider pour le compte d’une majorité ?

Monsieur le Premier ministre, je connais votre détermination sur ce dossier, qui, au-delà de nous-mêmes, concerne également notre vie démocratique et le respect de notre République.

Oui, ce projet va créer des emplois en Loire-Atlantique et bien au-delà ; oui, ce projet va être utile au développement de la filière aéronautique ; oui, ce projet s’accompagne de mesures environnementales et agricoles tout à fait exceptionnelles, et même inédites pour certaines d’entre elles.

Le trafic de l’aéroport de Nantes a doublé en moins d’une décennie. Pourtant, voilà presque dix ans, les opposants nous annonçaient la baisse du trafic, l’explosion du prix du kérosène et même, à terme, la fin du trafic aérien !

Aujourd’hui encore, ils parlent d’un projet inutile. Après la consultation du dimanche 26 juin, et si le oui l’emporte, pouvez-vous nous confirmer et nous assurer, monsieur le Premier ministre, que les travaux commenceront bien en octobre de cette année 2016 ?

Les parties concernées attendent une réponse à la fois de bon sens, mais aussi de nécessaire fermeté. L’ensemble de nos concitoyens, quel que soit par ailleurs leur avis, attendent une ligne claire et utile pour ce projet, mais aussi pour d’autres qui seraient à venir sur l’ensemble de notre territoire. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain, de l’UDI-UC et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur Vaugrenard, je connais la conviction avec laquelle vous défendez ce projet de Notre-Dame-des-Landes et vous avancez des arguments qui, me semble-t-il, s’imposent.

Nous sommes maintenant à quelques jours de la consultation, qui a déjà le mérite d’avoir lieu. Le Conseil d’État a rejeté leur recours, mais il est assez étonnant de constater qu’un certain nombre d’associations ont saisi le Conseil d’État pour tenter de faire annuler cette consultation démocratique, qui permet, au fond, de régler une question qui nous occupe depuis maintenant plusieurs années.

Les habitants et les électeurs de la Loire-Atlantique, votre département, monsieur Vaugrenard, auront donc l’occasion de « sortir par le haut » de ce dossier, depuis longtemps sur la table, en disant s’ils souhaitent ou non ce transfert de l’aéroport vers Notre-Dame-des-Landes.

Nous respecterons la décision : si le non l’emporte, le projet sera abandonné, il faut être clair ; en revanche, si le oui l’emporte, les travaux devront commencer le plus vite possible, dès l’automne prochain, puisque c’est en effet cette date qui a été choisie.

Il faudra faire en sorte que l’on respecte le choix des électeurs : en cas de victoire du « oui », tous ceux qui occupent cet espace de manière totalement illégale devront être évacués ; c’est ainsi que l’autorité de l’État, dont on a beaucoup parlé aujourd’hui, se fait respecter. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

référendum notre-dame-des-landes (II)

M. le président. La parole est à M. André Trillard, pour le groupe Les Républicains.

M. André Trillard. Ma question, très proche de celle de M. Vaugrenard, s’adresse également à M. le Premier ministre.

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, le 11 février dernier, le président Hollande annonçait le référendum local pour ou contre l’implantation de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes !

Le Conseil d’État a rejeté lundi le recours déposé par des associations et des particuliers contre le décret du 23 avril 2016 relatif à cette consultation, ultime péripétie d’un projet dont l’idée remonte aux années 1960 et le début d’exécution à 1974 !

Dimanche prochain, le référendum aura bien lieu.

Nous n’avons jamais été d’accord avec la méthode utilisée. Signe que le Gouvernement est lui-même divisé sur ce projet, au-delà du dilemme dans lequel ses alliés verts l’ont enfermé, cette consultation est une nouvelle marque de faiblesse de l’exécutif. Vous aviez en main tous les instruments légaux vous permettant de faire appliquer le droit et de construire cet aéroport.

Respectueux des procédures, nous nous soumettons néanmoins à cette consultation !

Monsieur le Premier ministre, quelles décisions prendrez-vous dès lundi matin, sitôt le résultat connu, quel qu’il soit ?

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre, qui est à la tâche aujourd’hui. (Sourires.)

M. Manuel Valls, Premier ministre. Pas seulement aujourd’hui, monsieur le président, mais j’interviens avec plaisir : c’est une tâche exaltante, et l’on ne reçoit que des compliments ! (Nouveaux sourires.)

Monsieur le sénateur, quoi que l’on pense de cette consultation, le référendum organisé dimanche porte sur un sujet important, le transfert de l’aéroport actuel de Nantes vers Notre-Dame-des-Landes. Ce projet, soutenu par l’ensemble des acteurs institutionnels et économiques, correspond à n’en pas douter aux intérêts du département et de la région.

Il appartient maintenant aux électeurs de se prononcer. Nous avons fait en sorte qu’ils disposent de tous les éléments d’information, et je veux saluer à cet égard le travail remarquable et impartial de la Commission nationale du débat public.

N’ayons pas peur du choix des électeurs. S’ils disent non, le projet sera abandonné. S’ils disent oui, l’aéroport se fera, chacun doit en être conscient. On ne pourra pas remettre en cause un projet qui tirera alors sa légitimité, non seulement du parcours administratif que vous évoquiez, monsieur Trillard, mais aussi du choix des électeurs de ce département.

Dans ce cas, toutes les procédures qui conduisent au début des travaux et à l’évacuation du territoire seront engagées dès le lendemain. Ceux qui occupent illégalement le territoire devront être évacués. Fort du choix des électeurs, l’État sera alors totalement légitime pour mener ce dossier à son terme. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et républicain, du RDSE et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. André Trillard, pour la réplique.

M. André Trillard. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le Premier ministre.

Il est temps de rétablir l’État de droit. Plus de 150 décisions de justice ont été prises en faveur du projet, zéro en sa défaveur.

Il est temps de mettre fin à l’insécurité qui règne sur la ZAD et jusque dans le centre-ville de Nantes.

Il est temps d’écouter les élus du département : 116 maires de tous bords politiques, représentant 85 % de la population du département, y sont favorables.

Il est temps de répondre à la saturation du trafic de passagers : 250 vols ont été refusés l’an dernier pour saturation de l’aéroport.

Il est temps de donner au Grand Ouest, situé à la périphérie de l’Europe, les moyens de son développement, et de permettre une réelle mobilité à ses 8 millions d’habitants ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

redécoupage de la carte des intercommunalités

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.

M. Jean Louis Masson. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.

Monsieur le ministre, une personnalité éminente vient de rappeler que la politique conduite depuis dix ans par les gouvernements successifs, de droite comme de gauche, a pour but de remplacer le couple historique commune-département par une organisation reposant sur les grandes régions et les grandes intercommunalités. Ce processus est déjà largement engagé et le vote de la loi NOTRe puis de la dotation globale de fonctionnement territoriale sont, hélas, de nouvelles étapes vers la transformation des communes en coquilles vides à l’échéance de 2020.

J’ai clairement voté contre la loi NOTRe et contre la DGF territoriale, car je défends le rôle des communes pour la gestion de proximité en milieu rural. Cela étant, je ne me fais pas d’illusion sur les chances de revenir en arrière.

Dans ces conditions, il faut donc que la nouvelle organisation ait un minimum de cohérence territoriale, ce qui pose tout particulièrement le problème des intercommunalités qui s’étendent sur deux départements.

La réforme conduira sans doute à la dissolution des départements au sein des grandes régions. Toutefois, le département continuera à exister en tant que cadre d’organisation des services de l’État et de ressort des préfets. Les intercommunalités ayant vocation à jouer un rôle prépondérant dans la gestion locale au quotidien, il est donc regrettable qu’on ne se soucie pas d’ajuster les limites départementales en conséquence.

Monsieur le ministre, est-il pertinent d’avoir des chevauchements entre le territoire des intercommunalités et celui des départements ? Envisagez-vous d’ajuster les limites départementales avec le nouveau découpage des intercommunalités ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des collectivités territoriales.

Mme Estelle Grelier, secrétaire d’État auprès du ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Masson, vous vous interrogez sur les communautés interdépartementales en cours de constitution dans le cadre de la refonte de la carte intercommunale. Comme vous l’avez rappelé, la loi n’exclut pas la solution transdépartementale, qui permet parfois que les périmètres intercommunaux correspondent aux bassins de vie du territoire et au vécu des habitants. D’ailleurs, plusieurs projets de création de communautés transdépartementales sont aujourd’hui soumis à la validation des conseillers municipaux et des conseillers communautaires concernés.

Il existe déjà des communautés transdépartementales. Certaines sont même à cheval sur deux régions et trois départements et ont démontré la pertinence de leur fonctionnement.

Vous évoquez néanmoins quelques-unes des difficultés rencontrées par cette catégorie d’établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Nous ne les ignorons pas, mais, comme vous le savez, nous ne pensons pas que la solution consiste à redessiner les frontières des départements.

D’un point de vue juridique, les communautés de communes et les intercommunalités ne sont pas des collectivités territoriales de plein exercice. Ce qui est nécessaire pour les communes, notamment dans le cas de communes nouvelles, ne l’est donc pas pour les intercommunalités. Si plusieurs communes décident de constituer une commune nouvelle, les frontières des communes doivent coïncider avec celles des départements et la frontière du département doit être revue selon le code général des collectivités territoriales, le CGCT. Tel n’est pas le cas pour les intercommunalités.

Je reste, monsieur le sénateur, à votre disposition pour étudier toutes les mesures de souplesse qui pourraient s’attacher à la création de ces communautés transdépartementales.

J’ajoute deux points, pour terminer.

La loi NOTRe, votée par le Sénat, a réaffirmé le rôle de proximité des communes, puisque c’est le seul échelon qui bénéficie de la clause générale de compétence.

La DGF territorialisée fait débat au Sénat comme à l’Assemblée nationale et n’a pas été retenue, à ce stade, dans l’architecture de la réforme de la DGF votée l’an passé à l’article 150 de la loi de finances pour 2016. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour la réplique.

M. Jean Louis Masson. Il y a quand même un problème de cohérence, même si vous feignez de l’ignorer. Une intercommunalité qui s’étend sur deux départements, c’est déjà un peu bizarre, mais une intercommunalité qui s’étend sur trois départements et deux régions, c’est totalement saugrenu !

Je suis un peu surpris qu’un ministre de la République puisse se contenter de renvoyer au silence du CGCT. Si je vous ai posé la question, c’est bien parce que je sais qu’aucune obligation n’est formulée dans le code général des collectivités territoriales. Et je voulais savoir si vous envisagiez de faire quelque chose !

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

7

Hommage à trois anciens sénateurs

M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, il me revient de vous apprendre le décès de trois de nos anciens collègues, François Delga, Daniel Millaud et Edgard Pisani.

François Delga a été sénateur du Tarn de 1986 à 1995 et, pendant plus de trente ans, maire de Lautrec, commune à laquelle il était très attaché.

Je l’avais rencontré il y a moins de deux ans. Phlébologue, il siégea au sein de la commission des affaires sociales et rédigea notamment un rapport marquant sur le système de santé américain et ses projets de réforme au temps de la présidence Clinton.

Daniel Millaud fut sénateur de la Polynésie française jusqu’en 1998 et secrétaire du Sénat. Il fut également conseiller municipal de la ville de Papeete et membre de l’assemblée territoriale. Chirurgien-dentiste de profession, il fut membre du groupe de l’Union centriste.

Il siégea notamment au sein de la commission des lois et de la commission des affaires économiques, où il rédigea un rapport sur l’avenir de l’association des pays et territoires d’outre-mer à la Communauté européenne.

Ceux qui l’ont connu, comme moi, se souviennent d’un sénateur très présent, aux interventions toujours courtoises et empreintes d’humour, qui alliait cette double culture propre à nos compatriotes de Polynésie.

Résistant de la première heure, Edgard Pisani fut sénateur de la Haute-Marne de 1954 à 1961, député de Maine-et-Loire de 1967 à 1968, puis de nouveau sénateur de la Haute-Marne de 1974 à 1981.

Au Sénat, il publia dès 1956 un rapport favorable à la mise en place d’une politique de dissuasion nucléaire, avant d’être ministre du général de Gaulle de 1961 à 1967, notamment à l’agriculture, où il laissa une œuvre importante, défendant des lois qui modernisèrent le secteur agricole et participant à la création de la politique agricole commune.

Commissaire européen de 1981 à 1985, chargé du développement, il devint en 1985 haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, dans une période douloureuse, puis ministre de François Mitterrand.

Avec la disparition d’Edgard Pisani, c’est une page d’histoire de la République qui se tourne.

Au nom du Sénat tout entier, je veux honorer la mémoire de nos anciens collègues et dire combien leur apport à la vie de notre pays a été marquant. Nous leur rendrons ultérieurement l’hommage solennel qui leur revient, mais je voulais, dès à présent, montrer que le Sénat n’oublie pas celles et ceux qui ont œuvré pour notre institution, quelles que soient les travées sur lesquelles ils ont siégé. (Applaudissements.)

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants ; ils seront repris à seize heures vingt-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de Mme Isabelle Debré.)