M. Guy-Dominique Kennel. Garantissez-leur du travail !

M. Dominique de Legge. Apprentissage !

M. Didier Guillaume. Le Premier ministre a annoncé, dans sa déclaration de politique générale, que moins de jeunes seront au chômage en 2017 qu’en 2012 : c’est une réalité, les chiffres sont vrais, il faut appeler un chat un chat ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand applaudit également.)

M. Didier Guillaume. Mes chers collègues, je mets au défi quiconque dans cette assemblée de nous présenter les chiffres du chômage des jeunes en 2012 et en 2017 et de réfuter l’annonce de M. le Premier ministre. Vous devriez vous en réjouir ! Un jeune qui n’est plus au chômage, c’est bon pour notre pays. Et ce qui est bon pour les jeunes est bon pour la France, nous devons nous retrouver unanimes sur ce point.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Ayez un peu d’humilité : 24 % des jeunes sont au chômage !

M. Didier Guillaume. Je pourrais continuer ainsi à développer le bilan du Gouvernement, mais, à l’évidence, c’est d’autant plus difficile que nous approchons de l’élection présidentielle.

J’ai entendu tout à l’heure beaucoup de critiques. Certes, c’est la vie démocratique. Mais nous aimerions réhabiliter le débat, sans nous montrer donneurs de leçons. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

M. Jean-Louis Carrère. Vous en avez pourtant besoin !

M. Didier Guillaume. J’ai écouté l’ensemble des orateurs sans dire un mot !

M. Philippe Dallier. Pas sûr ! (Sourires.)

M. Didier Guillaume. J’ai entendu beaucoup de discours à charge, bien des développements sur les prochaines élections, mais peu de commentaires sur la déclaration de politique générale du Premier ministre, que ce soit pour le soutenir ou le critiquer. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

Mme Catherine Procaccia. Ce n’était pas un discours de politique générale !

M. Jean Desessard. On fait le bilan de Manuel Valls !

M. Didier Guillaume. Je veux revenir à la réalité de ce qui a été dit.

Monsieur le Premier ministre, vous êtes, aux yeux de la représentation nationale, à nos yeux, un homme politique de très grand talent. Nous sommes fiers du ministre de l’intérieur que vous avez été. Je veux dire ici que le démantèlement de la jungle de Calais est un honneur pour la France, une fierté pour le Gouvernement et pour la gauche, et nous l’avons assumé ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand, Mme Aline Archimbaud et M. Patrick Abate applaudissent également.)

Dans le même temps, certains, à droite, aident les maires à ne pas accueillir de réfugiés : c’est une honte ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.) L’humanité a toujours eu besoin d’accueillir ceux qui bénéficient du droit d’asile. Je sais de quoi je parle : de telles démarches ont eu lieu dans la région Auvergne-Rhône-Alpes. Ce n’est pas digne d’un responsable politique d’agir de la sorte.

Lorsque vous avez mené, monsieur le Premier ministre, votre action comme ministre de l’intérieur, vous l’avez fait avec beaucoup de sérénité, de calme, de retenue et de précision ; tous l’ont reconnu. Permettez-moi de saluer votre successeur, M. Bruno Le Roux, nouveau ministre de l’intérieur. Je suis très heureux qu’il ait accédé à cette fonction, et je suis sûr que, dans vos pas, il continuera l’œuvre que vous avez accomplie.

Monsieur le Premier ministre, nous avons confiance dans la ligne politique que vous avez développée dans votre discours de politique générale. Nous avons confiance dans les femmes et les hommes qui vous entourent dans ce gouvernement. Nous avons confiance en vous pour diriger l’action du Gouvernement dans les cinq mois qui viennent.

Mais cette confiance politique et personnelle, c’est avant tout une confiance pour la France et pour l’œuvre que nous avons accomplie, que vous avez accomplie depuis 2012. Pour ce qui reste à faire jusqu’en 2017, je rappellerai un dicton qui existe, sous différentes formes dans toutes les régions de France. Dans le Sud-Ouest, on l’exprime ainsi : c’est à la fin du marché qu’on compte les oies. (Sourires.) En d’autres mots, ne vendons pas la peau de l’ours avant de l’avoir tué : l’élection présidentielle va arriver, et nous ferons tout pour ne pas laisser faire la droite.

Monsieur le Premier ministre, la confiance du groupe socialiste et républicain vous est entièrement acquise. Nous soutiendrons les projets de loi que vous nous présenterez jusqu’à la fin de ce quinquennat, et soyez sûr que nous serons fiers de défendre votre bilan, non pas par petits bouts, mais dans son ensemble ! Ainsi, nous serons fiers d’avoir conduit cette majorité aux côtés du Président de la République et des trois Premiers ministres successifs ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Aline Archimbaud et M. Alain Bertrand applaudissent également.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d’abord remercier l’ensemble des orateurs, sans exception, qui se sont exprimés à cette tribune avec sincérité, avec conviction et, pour la plupart d’entre eux, avec pondération. Bien entendu, je ne saurais répondre à l’ensemble des interpellations qui m’ont été adressées : ce serait vous infliger un nouveau discours de plusieurs dizaines de minutes, et certains d’entre vous ne méritent pas de subir un tel sort. (Rires sur de nombreuses travées.) J’irai donc à l’essentiel, me contentant d’évoquer deux ou trois sujets parmi les plus importants.

Vous avez tous rappelé, avec beaucoup de gravité, de profondeur et de sensibilité, la situation qui prévaut à Alep. Personne ici ne peut imaginer que, parmi les orateurs qui se sont exprimés, quiconque n’ait pas une conscience profonde de la tragédie humanitaire qui se joue, de la responsabilité internationale que cela appelle et de la responsabilité collective qui doit s’emparer de nous face à une telle tragédie.

Je voudrais vous dire, très sincèrement, comment je perçois le contexte et comment je lis ce que nous avons fait depuis près de trois ans sur cette question.

Monsieur Dallier, il est, selon vous, incorrect d’imputer au candidat que vous avez choisi, du fait de ses propos, la responsabilité des difficultés d’Alep. Vous avez raison : je ne peux à la fois appeler de mes vœux une relation différente entre la majorité et l’opposition, ce qui ne signifie pas que les débats ne doivent pas avoir lieu – ils doivent avoir lieu ! –, et, dans le même temps, après être descendu de cette tribune, me mettre à faire le contraire de ce que je crois nécessaire dans la République.

François Fillon ne gouverne pas ; on ne saurait donc le tenir comptable de ce qui se passe actuellement. En revanche, il a fait connaître certaines orientations de politique étrangère sur lesquelles il n’est pas interdit de nous interroger, tant dans son intérêt que dans le nôtre. Je veux être tout à fait clair sur ce point : il est injuste de dire que le Gouvernement n’a pas agi sur la question syrienne, alors qu’il a été le seul à le faire au sein de l’Union européenne.

Permettez-moi de retracer quelques étapes importantes de notre action.

En juillet 2013, le Président de la République et le ministre des affaires étrangères de l’époque, un homme qui ne manque ni de talent ni de conviction, M. Laurent Fabius, ont pris l’initiative de parler avec l’opposition modérée, alors que le silence prévalait partout en Europe. Ils considéraient qu’il n’y avait pas d’avenir pour la Syrie avec le gouvernement de Bachar al-Assad, et qu’il ne saurait y avoir de solution politique si l’on ne permettait pas à l’opposition modérée de se rassembler pour trouver une alternative. On nous a alors jugés très sévèrement, je vous le rappelle, monsieur Dallier : selon certains, la Russie comptait, et il fallait parler avec Bachar al-Assad, car, à les en croire, il était faux d’affirmer que son gouvernement s’en prenait à son peuple et était prêt à l’exterminer.

Nous pouvons nous dire collectivement ici – faisons-le sans aucune agressivité, car il s’agit de l’essentiel, de l’avenir de femmes, d’hommes et d’enfants qui sont enfermés dans Alep et ne peuvent en sortir ! – que ce raisonnement avait peut-être quelques limites et quelques failles. Comment considérer aujourd’hui que la lutte contre Daesh et l’avenir de la Syrie peuvent reposer sur l’alliance entre le gouvernement de Bachar al-Assad, l’Iran et la Russie, alors que l’on voit ce qui se passe à Alep ? Nous devons engager sur ce point une introspection collective.

Je ne suis pas du tout de ceux qui, sur de tels sujets, considèrent que l’on peut, dans l’outrance et l’emportement, porter des jugements politiciens à l’égard de grands leaders politiques français, sous prétexte que nous sommes en période électorale. Je le ferai d’autant moins à l’encontre de François Fillon que je suis bien déterminé, compte tenu de la nature de son projet, à le combattre, mais que j’ai pour l’homme de la considération et de l’estime. On peut à la fois ne pas être d’accord sur des projets et respecter ceux qui les portent. Dès lors, on ne peut pas dire, pour ce qui les concerne, n’importe quoi.

En outre, je subis trop, dans l’exercice de mes responsabilités actuelles, et j’ai trop subi, comme ministre de l’intérieur, les invectives et les outrances pour les utiliser à l’encontre de ceux que je combats : il faut savoir ce que l’on veut en politique ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur quelques travées du groupe CRC. – Mme Aline Archimbaud et M. Alain Bertrand applaudissent également.)

Je demande donc, sur la question syrienne, que l’on prenne conscience de la gravité du contexte, que l’on ne pratique pas l’amalgame à l’égard de ceux qui s’expriment, que l’on ne porte pas de jugement hâtif sur la politique du Gouvernement et que l’on essaie simplement, compte tenu de la gravité de la question, de faire en sorte que ce soit la voix de la France qui l’emporte sur toute autre considération. Les humanistes de ce pays, qui sont tout de même très majoritaires dans cet hémicycle, doivent pouvoir essayer de trouver, entre eux, des solutions à ce problème.

Le deuxième sujet sur lequel je voudrais intervenir concerne le site de Notre-Dame-des-Landes.

Ce sujet m’intéresse depuis que je suis Premier ministre, pour des raisons entomologiques ; je vais, monsieur Dallier, monsieur Zocchetto, vous en donner les raisons. Je me suis exprimé pour la première fois sur ce sujet depuis que j’ai été nommé Premier ministre, il y a exactement deux heures à l’Assemblée nationale. Je n’avais jusqu’à présent rien dit, et ce pour une raison très simple. Même si, comme moi, on est ardemment laïque, il faut garder à l’esprit la leçon de L’Ecclésiaste : il est un temps pour tout.

J’ai préparé une déclaration de politique générale. Ce sujet est complexe ; on ne le réglera pas à coups de « y a qu’à » « faut qu’on ». J’étais chargé, à la demande de mon prédécesseur, qui s’est exprimé clairement sur ce sujet, de déterminer les conditions dans lesquelles nous pouvions intervenir. J’étais donc particulièrement bien placé pour savoir que ce n’était pas par l’incantation ou la déclaration unilatérale qu’on parviendrait à trouver une solution.

Mon successeur au ministère de l’intérieur, en qui j’ai grande confiance lorsqu’il était président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, est chargé de définir, avec moi, les modalités d’une intervention.

Vous m’invitez, monsieur Zocchetto, à être comme on imagine que je suis : convenable et désireux de mettre en œuvre ce que j’ai annoncé. Vous avez raison ; c’est précisément la raison pour laquelle je n’entends pas, sur ce sujet, raconter n’importe quoi. Je vais donc vous dire très précisément ce que j’en pense, alors que, devant le Sénat et jusqu’à aujourd’hui, je ne me suis pas exprimé.

À Notre-Dame-des-Landes, les projets ont été élaborés, depuis plus de quatorze ans maintenant, par les collectivités territoriales et, notamment, l’État. Ils ont fait l’objet d’un ensemble de décisions qui, elles-mêmes, ont donné lieu à 169 recours. Tous les recours ont été gagnés. Nous sommes dans un État de droit.

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Par ailleurs, l’Europe a exprimé sur notre projet des interrogations et a engagé une démarche précontentieuse. Les collectivités locales de Loire-Atlantique, dont la démarche n’est pas inconséquente, ont intégré dans leur SCOT un certain nombre de modifications, qui seront délibérées le 19 décembre prochain – je parle sous votre contrôle, monsieur Trillard ! (M. André Trillard acquiesce.) Une fois que le SCOT aura été révisé, il faudra vérifier que le précontentieux est purgé. Ce n’est pas une manœuvre dilatoire : il ne s’agit pas de renvoyer ce dossier à des délais emphytéotiques.

Enfin, dans un État de droit, lorsque toutes les procédures ont été respectées, on ne peut pas – je ne peux pas, par conviction républicaine et comme républicain légaliste –, accepter que l’on puisse se considérer légitime à enfreindre le droit par la violence. Je suis donc enclin à faire en sorte que le droit soit respecté. Sinon, il n’y a plus d’État de droit. Considérer que l’on puisse remettre en cause, par la violence, les lois que le législateur adopte et que le juge applique, après qu’elles ont été interprétées, c’est la fin de la République. Je ne puis accepter cela !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Si nous étions empêchés et qu’un autre gouvernement – que je n’appelle pas de mes vœux, vous l’avez bien compris ! – était appelé à prendre une décision, il serait confronté exactement à la même situation.

M. Didier Guillaume. Évidemment !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Quelle est la vérité ?

Cette opération doit être réalisée. Il s’agit non pas de savoir si elle doit l’être ou pas, mais de déterminer si elle peut l’être dans de bonnes conditions, sans violence, sans blessés, a fortiori sans mort. Comme ministre de l’intérieur, j’ai vécu un événement qui m’a profondément marqué et, en tant que Premier ministre, je n’entends pas être à la tête d’un gouvernement qui engagerait des opérations tant que la manière dont elles doivent intervenir n’est pas parfaite. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme Nicole Bricq. Très bien !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Si certains, dans cet hémicycle, considèrent que l’on peut investir cette zone toutes troupes déployées, sans aucune autre considération, je leur dis très clairement que, de mon point de vue, ce ne serait pas raisonnable.

Monsieur Dallier, monsieur Zocchetto, nous sommes dans un contexte de menace terroriste extrêmement élevée. Ce n’est pas un problème de fêtes de fin d’année. Je connais cette situation pour avoir été ministre de l’intérieur pendant près de deux ans. Si nous voulons réussir cette opération, il faut pouvoir planifier l’utilisation de nos forces de telle sorte que leur intervention soit efficace et que le front antiterroriste ne soit pas pour autant désarmé.

J’ai à l’esprit cette autre considération importante. Monsieur Zocchetto, on ne peut pas affirmer que l’on a beaucoup demandé aux forces de l’ordre et qu’elles sont épuisées et, dans le même temps, exiger qu’elles soient envoyées sur des opérations extrêmement difficiles, sans autre considération. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand et Mme Aline Archimbaud applaudissent également.)

Par conséquent, si l’on veut que cette opération soit bien menée et que la vérité soit dite aux Français, il faut faire en sorte qu’elle soit méticuleusement préparée, en tenant compte de tous les paramètres.

Telle est ma position ; elle n’est rien d’autre que celle-là. Elle est celle d’un républicain sincère à la tête d’un gouvernement qui veut bien faire les choses et qui, parce qu’il est animé de cette volonté, n’entend absolument pas agir n’importe comment.

M. Didier Guillaume. Très bien !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Sur un sujet aussi important et aussi difficile que celui-ci, il n’est pas question non plus, sous prétexte d’échéances électorales dont je comprends l’importance pour préempter ce sujet à des fins politiques, de se lancer dans une opération qui ne serait pas maîtrisée.

Mesdames, messieurs les sénateurs, voilà très exactement ce que je pense. Si je n’ai pas pris d’engagements sur des dates ou des modalités, c’est parce que nous travaillons sérieusement sur ce sujet, qui, plus qu’aucun autre, interdit toute improvisation. C’est précisément parce que je ne veux pas faire le contraire de ce que j’aurais annoncé et que je n’ai pas l’intention de vous décevoir, puisque vous me prêtez un tempérament d’une certaine noblesse, que je resterai prudent. Prudent ne veut pas dire pusillanime : cela signifie méticuleux, précis, méthodique et pragmatique. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Bertrand et Mme Aline Archimbaud applaudissent également.)

MM. Jean-Louis Carrère et Didier Guillaume. Très bien !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Je terminerai mon propos en évoquant la menace terroriste, puisque nous aurons l’occasion de débattre des autres sujets au cours des prochains mois.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous exprimer ma très grande gratitude et ma reconnaissance pour la manière dont les débats sur l’état d’urgence et les lois antiterroristes se sont déroulés ces derniers mois.

Concernant l’état d’urgence, je salue le remarquable travail accompli par Michel Mercier – je ne veux pas le compromettre par un excès de compliments ! (Sourires.) –,…

M. Didier Guillaume. Il les mérite !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. … sous la direction de Philippe Bas, pour lequel j’ai également de l’estime, non pour ce qu’il pense, mais parce que c’est un élu de mon département et que les Normands ont tout intérêt à être solidaires tellement ils sont peu nombreux. (Nouveaux sourires.)

Sur toutes ces questions, j’ai pu constater que, lorsque l’essentiel était en jeu, la représentation nationale, l’Assemblée nationale comme le Sénat, avait su faire montre d’une certaine unité et d’une certaine cohérence.

Lors de l’examen du projet de loi sur le renseignement par exemple, les débats furent assez toniques, notamment avec Mme Benbassa ou, plus encore avec Mme Assassi, mais ont attesté d’un grand respect des sujets traités et d’une grande compréhension des contraintes du Gouvernement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, mes propos sont sincères et, en même temps, un peu intéressés. (Sourires.) En effet, deux projets de loi vous seront bientôt soumis, le texte prolongeant l’état d’urgence et un texte relatif aux forces de sécurité, qui traitera des questions de légitime défense, de conditions d’engagement des armes, d’anonymisation, etc. Il nous faudra, pour les forces de l’ordre, être animés du même souci d’unité et de rassemblement. (M. Alain Joyandet s’exclame.)

Pour ce qui concerne les forces de sécurité intérieure, je veux là aussi vous dire simplement les choses.

Je suis las de répéter toujours la même chose. Qui plus, je ne veux pas vous donner le sentiment d’être atteint du syndrome du cacatoès. (Sourires.) Quand je vous dis qu’il y a eu des suppressions d’emplois – près de 13 000 ! –, mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité sénatoriale, cela vous agace beaucoup. Mais il n’en demeure pas moins que cela n’a pas été sans impact sur le fonctionnement des forces de l’ordre.

M. Didier Guillaume. Bien sûr !

M. Bernard Cazeneuve, Premier ministre. Nous avons créé des postes, ce qui vous agace également. En effet, comme vous ne pouvez tout de même pas contester que vous avez supprimé des emplois, parfois vous contestez que nous en ayons créé, mais peu importe. Dépassons cela. Allons au-delà des échéances qui se présentent à nous et essayons de parler aux forces de l’ordre, qui, comme cela a été dit, sont très sollicitées et ont besoin que la représentation nationale, dans toute sa diversité, leur adresse des messages forts et éminemment républicains.

L’effort sur les forces de l’ordre devra être maintenu. Quel que soit le gouvernement aux responsabilités dans les années à venir, la politique de rehaussement des effectifs et des moyens d’investissement devra être poursuivie ; dans le cas contraire, vous aurez, collectivement, des difficultés.

Je tiens à profiter de mon passage à Matignon, d’abord, pour agir toutes les minutes et toutes les heures ; ensuite – je le dis sans ambages –, pour donner envie aux Français de continuer avec nous ; et, enfin, pour faire en sorte que ce que nous croyons nécessaire ne s’arrête pas avec l’arrivée d’un autre gouvernement.

Je le répète, il faut maintenir les efforts sur la sécurité à la fois en termes d’effectifs et de moyens d’investissement et le faire dans une perspective européenne. En effet, nombre des sujets relatifs à la lutte antiterroriste sont éminemment européens : système d’information Schengen, connexion des fichiers, directive sur les armes à feu, lutte contre la fraude documentaire, capacité de déclencher des exercices FRONTEX. Croyez-moi, sur tous ces sujets, l’Union européenne n’est pas unanime. Sans une France forte pour faire avancer les dossiers, comme nous avons essayé de le faire jusqu’à présent, ce sera extrêmement difficile.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie du fond du cœur de la qualité de ce débat. J’ai bien compris que je n’avais pas convaincu tout le monde ; je pense à Jean Desessard ou à Éliane Assassi. Ce n’est pas grave, car, dans les cinq mois à venir, nous aurons d’autres occasions de rencontres (Sourires.), et il est très mauvais, quand l’amitié est au rendez-vous, d’épuiser le sujet dès la première fois. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur plusieurs travées du groupe écologiste et du RDSE.)

M. le président. Nous en avons terminé avec le débat sur la déclaration du Gouvernement.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures vingt, sous la présidence de M. Claude Bérit-Débat.)