M. le président. L'amendement n° 25 rectifié, présenté par MM. Maurey et Longeot, Mme Deseyne, M. Fouché, Mme Férat, M. Commeinhes, Mme Imbert, MM. Laurey, Médevielle et D. Bailly et Mme Joissains, est ainsi libellé :

Après l'article 4

Insérer un article ainsi rédigé :

Après l’article 8 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 … ainsi rédigé :

« Art. 8 … - Chaque assemblée détermine des règles destinées à contrôler l’effectivité du travail effectué par les collaborateurs employés par les parlementaires.

« Elle veille à la mise en œuvre de ces règles dans les conditions déterminées par son règlement. »

La parole est à M. Jean-François Longeot.

M. Jean-François Longeot. La suppression des emplois familiaux ne suffit pas à garantir la réalité de l’emploi de certains collaborateurs parlementaires. Le présent amendement tend donc à créer un système de contrôle de l’effectivité du travail des collaborateurs parlementaires.

Les récentes affaires impliquant des collaborateurs, également membres de la famille du parlementaire employeur, ont provoqué une forte réprobation parmi les citoyens. Néanmoins, cela a visé en premier lieu non pas la nature familiale de l’emploi, mais son caractère présumé fictif – il est important de le souligner –, ainsi que les niveaux de rémunération évoqués, lesquels ont amplifié le mécontentement de nos concitoyens.

Ainsi, l’interdiction des emplois familiaux prévue par le présent projet de loi, alors même que la plupart d’entre eux correspondent à de réels emplois rémunérés dans des conditions claires et déjà encadrées par les assemblées, ne répond pas au principal problème soulevé par les récentes affaires.

Cet amendement vise à instituer un contrôle de l’effectivité du travail réalisé par le collaborateur parlementaire dans des conditions fixées par les assemblées. En proposant un contrôle sur la réalité de l’emploi de l’ensemble des collaborateurs parlementaires, nous allons au-delà de l’objectif de probité prévu dans le présent projet de loi, qui vise seulement les emplois familiaux.

Notre amendement ne se satisfait pas d’« apparences » – dans son étude d’impact, le Gouvernement justifie l’interdiction des emplois familiaux au nom de la « théorie des apparences – et a pour objet d’apporter des garanties aux citoyens quant au bon usage des deniers publics.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat, avec beaucoup de réserves…

M. le président. Madame la garde des sceaux, pour la clarté de nos travaux, pourriez-vous préciser si l’avis du Gouvernement est favorable, défavorable, ou s’il s’agit d’un avis de sagesse ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Avis défavorable, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, pour explication de vote.

Mme Françoise Férat. J’aimerais m’arrêter un instant sur le contrôle que proposent les auteurs de l’amendement.

Je regrette que nous partions du postulat selon lequel il existerait une tricherie que je qualifierais de « quasiment organisée », dans la mesure où tous les emplois familiaux seraient des emplois frauduleux. Quelle faute ces assistants ont-ils commise pour être « virés » de la sorte ?

Les emplois familiaux ne sont pas une aubaine. Compétences et diplômes requis, salaires plafonnés : les licencier ressemble à une mesure de discrimination.

S’il existe bien quelques emplois fictifs, il est toutefois facile de les contrôler, que ce soit par l’intermédiaire de l’activité des permanences parlementaires ou par la mise en place d’un organisme extérieur.

Je ne vous ferai pas l’injure de définir le profil idéal d’un assistant parlementaire, mais ce type d’emploi requiert évidemment la confiance du parlementaire – on parle tellement de « confiance » dans ce projet de loi ! –, la confidentialité et une disponibilité de chaque instant.

Madame la garde des sceaux, le besoin de transparence a ses limites et ne doit pas entraîner la stigmatisation de personnes ayant effectué leur tâche avec exemplarité. Peut-être pourrions-nous les traiter avec un tout petit peu d’humanité.

Pour l’anecdote, et pour, je l’espère, vous faire sourire – et non pas rire jaune –, j’ai cru comprendre que le Président de la République était justement en train de définir les contours d’un emploi pour son épouse. (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.

M. Hervé Maurey. Je m’étonne que le Gouvernement et la commission soient défavorables à cet amendement.

Son objet n’est pas de traiter les emplois familiaux, puisque le dispositif relatif à ce type d’emplois a été rejeté par notre Haute Assemblée, ce dont je me réjouis. Il s’agit en revanche de créer un contrôle de la réalité du travail effectué par l’ensemble des collaborateurs parlementaires.

Ce qui a choqué l’opinion publique, à juste titre, ce n’est pas le fait qu’il existe des emplois familiaux, mais le fait que certains emplois ne correspondent à aucune réalité et qu’ils soient rémunérés de surcroît à un niveau largement supérieur à ce que l’on pourrait appeler le prix du marché.

Le montant des rémunérations est déjà encadré dans notre Haute Assemblée, ce dont je me félicite. En revanche, il n’existe aucun contrôle sur la réalité des emplois.

Cet amendement tend à créer un système qui laisse chacune des deux assemblées fixer les règles leur permettant de vérifier la réalité du travail des collaborateurs parlementaires.

Je suis sûr que l’AGAS exercerait très bien cette mission de contrôle. Ce n’est pas très compliqué et cela serait susceptible de lever le doute sur la réalité de ces emplois, qu’ils soient familiaux ou non.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 25 rectifié.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 105 :

Nombre de votants 335
Nombre de suffrages exprimés 334
Pour l’adoption 42
Contre 292

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 26 rectifié, présenté par MM. Maurey et Longeot, Mmes Deseyne et Férat, MM. Commeinhes et Rapin, Mme Imbert, MM. Laurey, Médevielle et D. Bailly et Mme Joissains, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 8 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, il est inséré un article 8 - … ainsi rédigé :

« Art. 8 –… Il est interdit à un député ou un sénateur d’employer en tant que collaborateur parlementaire au sens du règlement de l’assemblée dont il est membre, une personne également employée par un parti politique

« La violation de cette interdiction emporte la nullité du contrat. Cette nullité ne donne lieu à aucune restitution entre les parties.

« Le règlement de l’assemblée parlementaire détermine les modalités selon lesquelles le député ou le sénateur rembourse les sommes versées en vertu des contrats conclus en violation de l’interdiction mentionnée au premier alinéa ainsi que les autres sanctions qu’il encourt.

« Le fait, pour un député ou un sénateur, d’employer un collaborateur en méconnaissance de l’interdiction mentionnée au premier alinéa est puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.

« Lorsque le contrat de travail en cours au jour de la promulgation de la loi n° … du … pour la régulation de la vie publique méconnaît ces dispositions, il prend fin de plein droit dans les conditions prévues à cet article six mois après cette promulgation, sous réserve du respect des dispositions spécifiques à la protection de la grossesse et de la maternité prévues à l’article L. 1225-4 du code du travail.

« La rupture du contrat constitue un licenciement fondé sur la loi précitée. Ce motif spécifique constitue une cause réelle et sérieuse.

« Le parlementaire notifie le licenciement à son collaborateur, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, dans les quinze jours suivant la promulgation de la loi précitée. Il lui remet dans le même délai les documents prévus aux articles L. 1234-19 et L. 1234-20 du même code ainsi qu’une attestation d’assurance chômage.

« La période qui s’étend entre la notification du licenciement et la rupture de plein droit mentionnée au premier alinéa constitue le délai de préavis quelles que soient l’ancienneté du collaborateur et la durée de préavis prévue au contrat.

« Le collaborateur bénéficie des indemnités mentionnées aux articles L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 3141-28 du code du travail lorsqu’il remplit les conditions prévues. Les indemnités sont supportées par l’assemblée parlementaire dans les conditions fixées par son règlement.

« Le parlementaire n’est pas pénalement responsable de l’infraction prévue au présent article lorsque cette infraction est commise pendant les six mois suivant la promulgation de la loi précitée.»

La parole est à M. Hervé Maurey.

M. Hervé Maurey. Je regrette que la Haute Assemblée n’ait pas souhaité contrôler la réalité du travail des collaborateurs parlementaires : c’était le pendant logique de ce que nous avions voté peu de temps auparavant, c’est-à-dire la suppression de l’interdiction pure et simple, pour ne pas dire bête et méchante, pour les parlementaires de faire travailler des membres de leur famille.

Cet amendement vise à interdire à tout collaborateur parlementaire de travailler dans le même temps pour un parti politique. L’actualité récente a montré que l’on pouvait déplorer quelques dérives lorsque des collaborateurs se trouvaient dans cette situation. Il nous paraît plus raisonnable d’interdire un tel cumul d’emplois.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bas, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement est également défavorable à l’amendement.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Il me semble que le texte a atteint une forme d’équilibre et qu’il n’est pas nécessaire d’ajouter de nouvelles interdictions.

Le fait d’interdire à tout collaborateur parlementaire de travailler en même temps pour un parti politique me paraît contraire à notre souci de respecter la liberté des partis, qui est constitutionnellement protégée.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 26 rectifié.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des lois.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 106 :

Nombre de votants 336
Nombre de suffrages exprimés 249
Pour l’adoption 43
Contre 206

Le Sénat n'a pas adopté.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bas, rapporteur. Monsieur le président, mes chers collègues, nos différents votes posent un problème de cohérence. (Marques d’approbation sur les travées du groupe La République en marche et certaines travées du groupe socialiste et républicain.)

Nous avons voté en faveur de la suppression des emplois familiaux pour les membres du Gouvernement, contre la suppression des emplois familiaux des parlementaires, tandis qu’aucun amendement tendant à revenir sur la suppression des emplois familiaux dans les cabinets des exécutifs locaux n’a été déposé, si bien que le texte du Sénat est, en l’état, parfaitement contradictoire.

Je serai donc dans l’obligation de demander, en application de l’article 43, alinéa 4, du règlement du Sénat, une seconde délibération de l’article 4 avant le vote sur l’ensemble du projet de loi, en espérant que le Gouvernement acceptera cette demande. (Mme la garde des sceaux acquiesce.)

Il faut que chacun puisse prendre ses responsabilités en toute connaissance de cause sur la question des emplois familiaux. Je vous rappelle que la commission des lois avait adopté le principe d’interdiction de tels emplois pour les parlementaires à l’unanimité des groupes politiques présents en son sein. Je considère que le vote intervenu tout à l’heure revêt, à certains égards, un caractère accidentel. (Applaudissements sur les travées du groupe La République en marche et sur certaines travées du groupe socialiste et républicain.)

M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné 105 amendements au cours de la journée ; il en reste 99 sur le seul projet de loi…

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Articles additionnels après l’article 4 (début)
Dossier législatif : projet de loi pour la confiance dans la vie politique
Discussion générale

10

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 12 juillet 2017, à quatorze heures trente et le soir :

Suite du projet de loi rétablissant la confiance dans l’action publique (procédure accélérée) (n° 581, 2016-2017) et du projet de loi organique rétablissant la confiance dans l’action publique (procédure accélérée) (n° 580, 2016-2017) ;

Rapport de M. Philippe Bas, fait au nom de la commission des lois (n° 607, 2016-2017) ;

Textes de la commission (nos 609 et 608, 2016-2017) ;

Avis de M. Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances (n° 602, 2016-2017).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 12 juillet 2017, à une heure.)

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD