Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, auteur de la question n° 363, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Corinne Imbert. Madame la ministre, ma question porte sur le même sujet que celui que vient d’évoquer Dominique Watrin – nous ne nous sommes pourtant pas concertés… (Sourires) –, à savoir les ruptures de stock et d’approvisionnement en médicaments dans les pharmacies d’officine et dans les établissements de santé.

Depuis une dizaine d’années, on note une augmentation de cette tendance, qui a des conséquences importantes en matière de santé publique, vous l’avez rappelé, madame la ministre.

Concrètement, cela signifie qu’une pharmacie est dans l’incapacité de fournir un médicament à un malade dans les soixante-douze heures suivant la présentation d’une prescription. En 2015, 391 médicaments étaient indisponibles ou en rupture de stock, contre 530 pour l’année 2017. Selon un sondage récent, la moitié des Français a déjà été confrontée à une rupture de stock ou d’approvisionnement en médicament. Dans un cas sur cinq, ces pénuries concernent un vaccin.

Ces ruptures visent également des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur – pour certains, vous l’avez rappelé, le pronostic vital peut être engagé : médicaments anticancéreux, médicaments pour des pathologies liées au système nerveux, notamment l’épilepsie ou la maladie de Parkinson. La France se retrouve aujourd’hui confrontée à des dysfonctionnements sans précédent, qui, chaque jour, ont une incidence sur toute la chaîne de production, la chaîne de distribution, les répartiteurs, les officines et, surtout, au final, les patients.

Ce problème n’est pas nouveau, mais il a pris une ampleur considérable. Dès 2015, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé alertait sur des orientations dans l’organisation de la production qui pourraient conduire à une explosion du nombre de pénuries. Elle ne s’était pas trompée : les pénuries ont augmenté de 30 % en un an. Dans le département de la Charente-Maritime, environ 4 % des médicaments sont en rupture de stock ou d’approvisionnement. Cette moyenne départementale est quasi équivalente à la moyenne nationale, qui se situe à 5 %. Nous sommes donc bien loin des ruptures anecdotiques occasionnelles du siècle dernier.

Les explications sont plurielles. Au-delà d’un problème toujours possible sur une chaîne de production – vous l’avez évoqué dans votre réponse précédente, madame la ministre – ou d’un problème qualitatif, la France est surtout dépendante de l’approvisionnement en matières premières et de la production de nombreux médicaments sur le continent asiatique. Par ailleurs, la logique de production en flux tendus est en partie responsable de cette situation. Enfin, la France est, avec le Portugal, l’un des deux pays européens où le prix des médicaments est le moins cher, ce qui incite certains laboratoires à faire le choix de distribuer leurs médicaments dans des pays étrangers.

Pour toutes ces raisons, madame la ministre, je souhaite connaître les actions que le Gouvernement entend mener, afin d’endiguer ces ruptures de stock et ces difficultés d’approvisionnement.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Corinne Imbert, votre question me permet de compléter la réponse que je viens de fournir au sénateur Dominique Watrin.

Vous avez raison, le circuit de distribution des médicaments français est régulièrement touché par des dysfonctionnements, qui entraînent de nombreuses ruptures d’approvisionnement en médicaments.

En France, le nombre de ruptures et de risques de rupture de médicaments s’est accru de manière significative depuis 2008. L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, indique que les ruptures de stock ont touché près de 530 médicaments d’intérêt thérapeutique majeur à l’échelon national en 2017, soit une augmentation de plus de 30 % en un an. À titre de comparaison, en 2008, on dénombrait seulement 44 de ces médicaments en situation de rupture, soit plus de dix fois moins.

Néanmoins, ces difficultés récurrentes ne sont pas propres au système de santé français – elles ne sont donc pas liées au fait que la France pratique les prix parmi les plus bas – et touchent un très grand nombre de pays. Les causes des ruptures de stock sont multiples : elles peuvent résulter de difficultés relatives à l’approvisionnement en matières premières – je ne reprends pas l’exemple de Fukushima que j’ai cité tout à l’heure –, de défauts de qualité – s’il n’existe qu’une seule chaîne de production à l’échelon mondial, en cas d’arrêt, la rupture est mondiale –, ou encore de modifications des autorisations de mise sur le marché qui peuvent d’un moment à l’autre conduire à augmenter les besoins en médicaments, si les indications progressent considérablement.

En réponse à ces difficultés, la France a mis en œuvre des mesures de prévention des ruptures.

Le mécanisme juridique élaboré, depuis 2016, permet normalement de lutter contre les ruptures d’approvisionnement à l’échelle nationale et de garantir l’accès de tous les patients à leur traitement. Ces dispositions imposent notamment aux titulaires d’autorisation de mise sur le marché et aux exploitants des médicaments d’élaborer et de mettre en œuvre des plans de gestion des pénuries pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur – je pense notamment aux médicaments anticancéreux – et de les soumettre à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.

En complément, deux arrêtés des 26 et 27 juillet 2016 ont fixé la liste respectivement des vaccins et des classes thérapeutiques contenant des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur devant faire l’objet de plans de gestion des pénuries. Les services de mon ministère évaluent actuellement ces différents dispositifs et porteront une attention particulière aux plans de gestion des pénuries obligatoires, mis en œuvre depuis le 22 janvier 2017.

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour répondre à Mme la ministre.

Mme Corinne Imbert. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Je sais bien que vous ne prenez pas ce problème à la légère. Comment pourrait-il en être autrement, d’ailleurs ?

J’entends bien les dispositions que vous mentionnez, par exemple l’obligation de plans de gestion, notamment pour les médicaments d’intérêt thérapeutique majeur. Au quotidien, chez les répartiteurs comme dans les pharmacies d’officine, nous n’en ressentons pas les effets : nous rencontrons des difficultés pour obtenir des informations de la part des laboratoires, notamment sur les dates de retour de mise à disposition des médicaments. Or il nous faut apporter des réponses précises à la fois aux médecins prescripteurs et aux patients.

Il y a quelques années, les ruptures un petit peu durables qui surgissaient concernaient des nouveaux médicaments, qui venaient d’obtenir une autorisation de mise sur le marché et qui étaient soumis à quota ; en fin d’année, nous nous retrouvions alors dans l’impossibilité d’obtenir ces médicaments. Aujourd’hui, ces situations sont quotidiennes, non seulement pour les laboratoires, mais surtout pour les répartiteurs et pour les pharmacies d’officine. C’est pourquoi nous nous sentons un peu dépourvus.

conditions d’accueil dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Herzog, auteur de la question n° 382, adressée à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Christine Herzog. Madame la ministre des solidarités et de la santé, les conditions d’accueil des personnes âgées dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, se dégradent de jour en jour. C’est la conséquence, d’une part, de l’insuffisance des moyens financiers, matériels et en personnel mis à la disposition des EHPAD et, d’autre part, du fait que ces établissements accueillent un nombre croissant de personnes très âgées, souvent grabataires et réclamant de ce fait des soins beaucoup plus importants.

Or, si la France est aujourd’hui un pays développé, c’est grâce au travail des générations qui nous ont précédés. À l’époque, on travaillait beaucoup plus que 35 heures par semaine, il n’y avait pas de RTT ni cinq semaines de congés payés. Notre société a de ce fait l’obligation morale de faire tout son possible pour que les personnes âgées auxquelles nous sommes globalement tous redevables soient accueillies et accompagnées dans des conditions matérielles et humaines satisfaisantes. Hélas, ce n’est pas le cas : les gouvernements successifs n’ont pas débloqué les moyens nécessaires.

Dans le département de la Moselle, la situation est d’autant plus préoccupante que, outre l’aspect qualitatif de l’accueil, le nombre de places disponibles est insuffisant. En effet, à l’époque de la sidérurgie et des houillères, ce département comptait une population jeune, laquelle est aujourd’hui entrée dans le troisième âge. Ayant moins de besoins par le passé, la Moselle avait créé moins de places en EHPAD par rapport au ratio démographique. Le vieillissement accéléré de la population mosellane doit maintenant être pris en compte par un effort de rattrapage.

Madame la ministre, comment envisagez-vous de répondre aux besoins qualitatifs qui existent partout en France et aux besoins quantitatifs propres à certains départements comme la Moselle ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice Christine Herzog, je suis d’accord avec votre constat : les gouvernements successifs n’ont pas débloqué les moyens nécessaires.

Ma conviction, depuis maintenant un an, est que notre pays n’a pas encore su trouver un véritable modèle de prise en charge de la perte d’autonomie. L’attente de la société est pourtant légitime. Le vieillissement doit être anticipé et c’est le rôle des pouvoirs publics, au sens large, de préparer l’avenir, d’impulser le changement, de donner un cap. J’ai présenté voilà trois semaines une nouvelle feuille de route et annoncé des moyens supplémentaires.

Ainsi, 15 millions d’euros seront alloués en 2018 au financement de plans de prévention en EHPAD. Ces moyens seront portés à 30 millions d’euros à partir de 2019 pour la prévention de perte d’autonomie.

En outre, en 2019 et 2020, 100 millions d’euros seront consacrés à la refonte du mode de financement de l’aide à domicile.

Par ailleurs, les EHPAD recevront 360 millions d’euros supplémentaires de 2019 à 2021 pour recruter des personnels soignants.

Qui plus est, 1 000 places d’hébergement temporaire en EHPAD pour les personnes sortant d’hospitalisation seront financées à hauteur de 15 millions d’euros par l’assurance maladie dès 2019, l’objectif étant de réduire les durées d’hospitalisation et de faciliter le retour à domicile des personnes.

Enfin, un effort financier de 40 millions d’euros permettra de généraliser l’accès à la télémédecine en EHPAD.

À cela s’ajoute le recrutement d’infirmières de nuit pour couvrir l’ensemble des EHPAD d’ici à 2020.

S’agissant plus particulièrement du département de la Moselle, l’agence régionale de santé, conjointement avec le département, a engagé une démarche de rattrapage. Dans le cadre des restructurations hospitalières, un projet médico-social pour la Moselle-Est a été arrêté et a permis de créer 455 places sur les territoires du bassin houiller et de Sarreguemines, dont 163 places en EHPAD et 69 places de services de soins infirmiers à domicile.

Dans le secteur de Thionville, le programme interdépartemental d’accompagnement des handicaps et de la perte d’autonomie 2017-2021 prévoit également la création de 275 places en EHPAD.

Je vous confirme donc que la démarche de réajustement en termes d’équipement dans le département de la Moselle se poursuit, tout comme l’évolution et la transformation de l’offre, notamment par le biais des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens.

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Herzog, pour répondre à Mme la ministre.

Mme Christine Herzog. Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse.

Au mois de septembre dernier, dans le cadre d’un rapport parlementaire sur la problématique des EHPAD, plusieurs propositions ont été émises, notamment sur une nécessaire adaptation et évolution du tarif des EHPAD, ainsi que sur l’évolution du métier d’aide-soignant et des autres personnels pour adapter ces métiers et les revaloriser. Je souhaite vivement que ces différentes propositions soient prises en compte.

compteurs linky et maîtrise de la consommation d’énergie

Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, auteur de la question n° 311, adressée à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Frédérique Espagnac. Madame la secrétaire d’État, j’appelle l’attention du ministre d’État sur le déploiement des compteurs Linky en France et, plus précisément, sur les problématiques relatives aux objectifs de maîtrise de consommation d’énergie auxquels ces derniers étaient censés répondre.

Alors que, dans son rapport annuel publié au mois de février dernier, la Cour des comptes rappelle que le coût du déploiement des compteurs Linky est couvert dans « des conditions avantageuses pour Enedis » par les consommateurs, les magistrats relèvent également les insuffisances techniques du compteur. Ils rejoignent en cela les conclusions de l’association de consommateurs UFC-Que Choisir, laquelle avait déjà alerté sur le fait que les informations auxquelles auront accès les utilisateurs n’étaient ni assez nombreuses ni suffisamment accessibles pour faire du compteur Linky un véritable outil de maîtrise de consommation.

En effet, l’affichage déporté, permettant une information en temps réel plus complète et lisible, est limité aux seuls ménages précaires et les portails internet du distributeur et des fournisseurs ne permettent pas une information détaillée et circonstanciée. Comme le mentionnent pourtant les magistrats, « la connaissance par l’usager de sa consommation d’électricité à un [laps] de temps suffisamment court […] constitue un prérequis à la mise en place de toute action de MDE [maîtrise de la consommation d’énergie] à un niveau individuel. »

Cela étant, dès 2010, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, demandait déjà que le compteur dispose d’un afficheur déporté, solution d’information en temps réel en kilowattheures et en euros, comme cela a pu se faire ailleurs en Europe, notamment au Royaume-Uni. Le Médiateur national de l’énergie a également plaidé pour la généralisation d’un tel dispositif, réclamé par plus de 150 000 citoyens, qui ont signé une pétition en ce sens.

Aussi, madame la secrétaire d’État, je souhaite connaître les dispositions que le Gouvernement compte prendre afin de faciliter réellement l’accès des consommateurs au suivi en temps réel de leur consommation d’énergie et les améliorations qu’il entend apporter au dispositif.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Brune Poirson, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Frédérique Espagnac, les compteurs Linky constituent un outil au service de la transition énergétique. À la fin du mois d’avril dernier, environ 10,6 millions de compteurs de ce type avaient été installés par Enedis. Aujourd’hui, un consommateur sur trois est donc équipé d’un tel compteur et la contribution de ce dernier aux enjeux de maîtrise de la consommation que vous évoquez prend toute son importance.

Il convient de souligner de nouveau les bénéfices du compteur communicant. Il permet des opérations à distance, comme la relève des données de consommation. Il permet aussi d’éviter les facturations estimées, qui donnent parfois lieu à des rattrapages importants. Il favorise surtout le développement des énergies renouvelables, l’autoconsommation et améliore la gestion du réseau.

En matière de consommation, le compteur Linky peut permettre à chaque consommateur d’avoir une meilleure connaissance de sa consommation électrique, donc de participer à l’objectif de maîtrise de la consommation d’énergie. Ce sont des éléments indispensables pour accélérer la transition énergétique.

Afin de participer aux efforts de maîtrise de la demande, chaque consommateur peut accéder à ses historiques de consommation sur le site internet d’Enedis.

Il est vrai que des efforts de communication et d’accompagnement additionnels pourraient être mis en œuvre par Enedis.

Les informations disponibles sur le site d’Enedis sont, par exemple, données en énergie consommée et non en euros, ce qui est généralement peu lisible pour les consommateurs. Seuls les fournisseurs sont en mesure de faire part de consommations en euros, alors que ces dernières sont plus directement utilisables par le consommateur. Les fournisseurs d’énergie devraient être plus impliqués.

Comme vous l’indiquez, madame la sénatrice, les afficheurs déportés peuvent également contribuer de manière importante à la maîtrise de la consommation.

Plusieurs fournisseurs proposent déjà des offres associant de tels dispositifs et des entreprises indépendantes commencent également à commercialiser de tels produits.

Nous le constatons, un mouvement dans la bonne direction est engagé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

Mme Frédérique Espagnac. Madame la secrétaire d’État, je tiens à saluer l’honnêteté de votre réponse. Ce n’est pas si fréquent…

Néanmoins, vous le savez, 35 millions de compteurs Linky vont être installés, ce qui constitue une indéniable source de bénéfices pour le principal opérateur, comme l’a souligné la Cour des comptes. À ce titre, l’opérateur a des devoirs vis-à-vis du consommateur. C’est en cela que nous avons besoin de vous aujourd’hui : nous sommes un certain nombre d’élus dans cette enceinte en contact régulier avec les maires qui se sont opposés à l’installation – j’en ai moi-même soutenu et je l’assume complètement. Nous connaissons les problématiques de santé, qui, certes, à ce jour, ne sont pas confirmées, mais qui conduisent de nombreux citoyens à s’interroger. Par exemple, mon père est cardiaque et porte un pacemaker. Aujourd’hui, certains professeurs nous alertent.

Le Gouvernement doit faire respecter l’engagement premier d’Enedis. Or, madame secrétaire d’État, vous le savez, le mode opératoire d’installation de ces compteurs n’a pas toujours respecté les droits des citoyens : les compteurs ont souvent été installés de force ou en l’absence des abonnés.

En ce sens, l’État doit veiller à ce que soient respectés les droits et devoirs de chacun.

Par ma question, je lance un appel au ministre d’État, à vos services et donc à vous-même, madame la secrétaire d’État. Il faut qu’Enedis respecte sa parole et que, comme l’a souligné la Cour des comptes et puisque nous partageons tous la volonté de réaliser des économies d’énergie, cette société fasse en sorte que chaque citoyen puisse être alerté sur sa consommation. Ainsi, nos concitoyens pourront faire attention à leur facture d’électricité, mais aussi consommer de façon responsable. En effet, malheureusement, comme vous le savez, un certain nombre d’entre eux n’a pas toujours les moyens de consommer en grande quantité.

situation des chômeurs seniors

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Détraigne, auteur de la question n° 298, adressée à Mme la ministre du travail.

M. Yves Détraigne. Madame la secrétaire d’État, je souhaite appeler l’attention de Mme la ministre du travail sur la dispense de recherche d’emploi dont bénéficiaient certains demandeurs d’emploi âgés de 57 ans et plus jusqu’au 1er janvier 2012.

Le gouvernement actuel, comme le précédent, considère qu’il faut favoriser le retour à l’emploi des seniors, ce que doit permettre le plan senior, lancé à l’occasion de la grande conférence sociale de juillet 2014.

Or, pour ma part, j’ai reçu de nombreux témoignages de seniors, qui, sortis de l’emploi et malgré une recherche active, ne trouvent pas d’employeurs prêts à les embaucher à un ou deux ans de la retraite. Ils deviennent alors la « cible » de Pôle emploi, qui leur demande de prospecter dans d’autres domaines que celui de leurs compétences, de baisser leurs prétentions salariales, ou encore de suivre des formations pour ne pas être radiés des fichiers.

À quelques mois de leur retraite, il n’est ni réaliste ni socialement justifié de leur imposer des actions de recherche active d’emploi ou la participation à une formation inutile et souvent coûteuse.

Il conviendrait donc de rétablir la dispense de recherche d’emploi ou, du moins, d’étudier un aménagement de ce dispositif pour les chômeurs seniors proches de la retraite et de permettre, ainsi, à Pôle emploi de concentrer ses forces sur d’autres catégories de demandeurs d’emploi.

Par conséquent, je demande au Gouvernement s’il envisage de remettre en place ce dispositif de dispense de recherche d’emploi lors de l’examen du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Brune Poirson, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Yves Détraigne, Muriel Pénicaud, qui n’a malheureusement pas pu être présente ici ce matin, m’a chargée de répondre à sa place à votre question.

L’accès, le retour à l’emploi et le maintien dans l’emploi sont un objectif majeur pour le Gouvernement. Pour nous, il est essentiel de ne laisser personne au bord du chemin. Nous devons donc rendre la croissance non seulement riche en emplois, mais aussi inclusive. C’est pour cela que nous menons une politique volontariste, qui vise à favoriser le développement de l’emploi, notamment l’emploi des seniors, en renforçant les droits des salariés et des demandeurs d’emploi.

C’est le sens de la rénovation profonde de notre modèle social que nous avons engagée avec les ordonnances pour le renforcement du dialogue social. La ministre du travail, Muriel Pénicaud, la poursuit à présent avec le projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, dont le vote en première lecture à l’Assemblée nationale aura lieu cet après-midi.

L’ambition est de créer, pour la première fois, une véritable sécurité professionnelle, universelle, simple et efficace, qui accompagnera chacun tout au long de son parcours professionnel. Dans un monde où 50 % des emplois seront profondément transformés dans les dix années à venir, cela passe par un accès facilité à l’atout majeur du XXIe siècle : les compétences.

C’est pourquoi, en complément de l’effort sans précédent de 15 milliards d’euros consenti dans le cadre du plan d’investissement dans les compétences, nous transformons le système de la formation professionnelle pour le rendre plus réactif face aux mutations, plus lisible et plus juste.

S’agissant spécifiquement de l’assurance chômage, nous expérimenterons un dispositif de « journal de bord ». Il doit permettre de rendre les démarches de candidatures plus efficaces, de prévenir le découragement et de mieux préparer les entretiens avec les conseillers.

C’est par des moyens pragmatiques, qui remettent nos concitoyens au cœur des dispositifs, que nous poursuivrons l’amélioration de l’emploi des seniors, et non par le rétablissement d’une dispense de recherche d’emploi, qui ne ferait qu’accélérer leur retrait du marché du travail.

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Détraigne, pour répondre à Mme la secrétaire d’État.

M. Yves Détraigne. Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de votre réponse. Vous avez la foi. J’espère que cette foi se confirmera dans les résultats et le retour à l’emploi des seniors. Mais veillons à ne pas oublier les plus jeunes d’entre eux, dirais-je, ceux à qui il reste deux années avant la retraite et qui risquent de dépenser beaucoup d’énergie pour des résultats, je le crains, peu probants. Cela étant, il n’est pas interdit d’espérer, encore moins de réussir !

pollution dans le golfe de fos-sur-mer

Mme la présidente. La parole est à Mme Mireille Jouve, auteur de la question n° 263, adressée à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Mireille Jouve. Madame la secrétaire d’État, les conséquences sanitaires de la forte concentration d’industries lourdes dans le golfe de Fos, situé entre le delta du Rhône et l’étang de Berre, doivent retenir toute notre attention. Les élus et les populations concernés entreprennent depuis de nombreuses années d’interpeller l’État à ce sujet.

Le bassin industrialo-portuaire de Fos s’étend sur 10 000 hectares et regroupe près de 40 000 salariés au sein de 200 entreprises. On y recense pas moins d’une trentaine de sites classés Seveso. Depuis maintenant quatre décennies, 100 000 habitants sont exposés aux dangers sanitaires qu’une telle activité est susceptible de faire courir.

Le 20 mars dernier, l’ARS PACA, l’agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d’Azur, a reconnu que les habitants de Fos-sur-Mer connaissent « un état de santé fragilisé, dans une zone fragilisée par la pollution environnementale ». Dioxines, benzène, plomb, de récentes études entreprises par le milieu associatif relèvent une surimprégnation des personnes exposées quotidiennement.

Élus locaux et parlementaires des Bouches-du-Rhône sont conviés dans une semaine, à Istres, pour la restitution du rapport réalisé par le Conseil général de l’environnement et du développement durable sur la pollution de l’air dans ce secteur.

Madame la secrétaire d’État, le Gouvernement peut-il s’engager à poursuivre ce travail d’évaluation, en liaison étroite avec la population, afin de faire valoir l’inégalité environnementale et sanitaire existante et de prendre les mesures pour limiter les effets de celle-ci ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Mme Brune Poirson, secrétaire dÉtat auprès du ministre dÉtat, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Mireille Jouve, vous avez interrogé Nicolas Hulot, ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, qui, retenu aujourd’hui en Allemagne, m’a chargée de vous répondre.

Comme vous le mentionnez à juste titre, la zone de Fos-étang de Berre est l’une des plus importantes concentrations industrielles en France et les pollutions d’origine industrielle, résidentielle ou liées aux transports s’y cumulent.

Je tiens à vous assurer de la grande vigilance du Gouvernement sur la situation de Fos-sur-Mer. J’ai moi-même eu plusieurs échanges avec le préfet à ce sujet. Le Conseil général de l’environnement et du développement durable a d’ailleurs été saisi et rendra son rapport dans le courant de l’été.

Malgré la réduction des émissions industrielles ces dix dernières années, les efforts doivent absolument être poursuivis. C’est pourquoi nous avons demandé au préfet d’établir, en liaison avec les industriels concernés, un plan de réduction des émissions industrielles.

Par ailleurs, comme vous le savez, l’Association de défense et de protection du littoral du golfe de Fos a réalisé une étude sur les produits AOC du département, à partir de prélèvements effectués entre 2009 et 2015. Elle conclut dans son rapport que des polluants sont détectés dans les denrées alimentaires d’origine animale produites à proximité de la zone industrielle du golfe de Fos et que les résultats obtenus sont imputables à l’activité industrielle présente. Il y a donc un lien avéré.

Mais sur l’ensemble des échantillons prélevés et analysés, seuls deux résultats dépassent les teneurs maximales réglementaires. Par ailleurs, les services du ministère de l’agriculture ont réalisé en 2017, dans le cadre des plans de surveillance et des plans de contrôle, quarante prélèvements de recherche dans des denrées alimentaires. Tous les résultats obtenus se sont révélés conformes aux teneurs maximales pour certains contaminants dans les denrées alimentaires.

Néanmoins, aucun risque à l’égard de ces populations ne doit être négligé, nous en sommes bien conscients, madame la sénatrice. Une nouvelle campagne de prélèvements et d’analyses sera donc réalisée à proximité des installations industrielles du golfe de Fos. À cet effet, nous avons saisi l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, pour définir la méthodologie de prélèvement de cette campagne.

Vous le voyez, madame la sénatrice, nous sommes comme vous, ce dont je vous félicite, très vigilants sur cette question, qui, il est vrai, traîne depuis des décennies maintenant.