Sommaire

Présidence de Mme Hélène Conway-Mouret

Secrétaires :

Mme Catherine Deroche, M. Daniel Dubois.

1. Procès-verbal

Rappel au règlement

Mme Laurence Cohen ; Mme la présidente.

2. Financement de la sécurité sociale pour 2019. – Suite de la discussion d’un projet de loi

Troisième partie (suite)

Article 16

Amendement n° 60 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 434 rectifié ter de Mme Victoire Jasmin. – Devenu sans objet.

Adoption de l’article modifié.

Article 17

Amendements identiques nos 380 rectifié de Mme Nadine Grelet-Certenais et 508 de Mme Laurence Cohen. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article.

Articles additionnels après l’article 17

Amendement n° 201 de Mme Michèle Vullien. – Rejet.

Amendement n° 509 de Mme Laurence Cohen. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Article 18

Mme Cathy Apourceau-Poly

Adoption de l’article.

Article 19

M. Bernard Jomier

M. Yves Daudigny

M. Jean-Noël Cardoux

M. René-Paul Savary

M. Gérard Dériot, rapporteur de la commission des affaires sociales

M. Olivier Henno

M. Michel Amiel

Mme Laurence Cohen

M. Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics

Amendements identiques nos 382 rectifié bis de M. Yves Daudigny et 511 de Mme Laurence Cohen. – Rejet, par scrutin public n° 17, des deux amendements.

Amendement n° 512 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Amendement n° 357 rectifié de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Amendement n° 61 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 184 rectifié de Mme Évelyne Renaud-Garabedian. – Rejet.

Amendement n° 254 de M. Richard Yung. – Rejet.

Amendement n° 446 rectifié bis de Mme Claudine Lepage. – Rejet.

Amendements identiques nos 5 de M. Ronan Le Gleut, 8 rectifié ter de M. Christophe-André Frassa, 40 rectifié quater de Mme Jacky Deromedi, 140 rectifié de M. Jean-Yves Leconte, 187 rectifié ter de M. Olivier Cadic et 255 de M. Richard Yung. – Retrait de l’amendement n° 187 rectifié ter ; rejet des amendements nos 8 rectifié ter, 40 rectifié quater et 255, les amendements nos 5 et 140 rectifié n’étant pas soutenus.

Amendement n° 629 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 62 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Articles additionnels après l’article 19

Amendement n° 568 rectifié de M. Richard Yung. – Retrait.

Amendement n° 253 rectifié ter de Mme Évelyne Renaud-Garabedian. – Retrait.

Amendement n° 4 rectifié decies de M. Damien Regnard. – Rejet.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi

3. Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

4. Financement de la sécurité sociale pour 2019. – Suite de la discussion d’un projet de loi

Troisième partie (suite)

Article 20

M. Jean-Noël Cardoux

M. Éric Bocquet

Amendement n° 63 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 64 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 20 bis (nouveau)

M. Philippe Mouiller

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé

Adoption de l’article.

Article 20 ter (nouveau)

Amendement n° 122 rectifié bis de M. Alain Fouché. – Retrait.

Amendement n° 65 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 20 quater (nouveau) – Adoption.

Articles additionnels après l’article 20 quater

Amendement n° 466 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.

Amendement n° 468 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.

Article 21

Mme Cathy Apourceau-Poly

Adoption de l’article.

Article additionnel après l’article 21

Amendement n° 513 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Article 22 et annexe C – Adoption.

Articles 23 à 25 – Adoption.

Article 26 et annexe B

Amendements identiques nos 383 rectifié de M. Yves Daudigny et 514 de Mme Laurence Cohen. – Rejet des deux amendements.

Annexe B

Amendement n° 98 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’ensemble de l’article et de l’annexe, modifié.

Vote sur l’ensemble de la troisième partie

Adoption, par scrutin public n° 18, de l’ensemble de la troisième partie du projet de loi, modifié.

quatrième partie

Article 27

M. Bernard Jomier

Mme Esther Benbassa

M. Jean-Louis Tourenne

M. Philippe Mouiller

Mme Laurence Cohen

Amendement n° 515 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Amendement n° 455 rectifié de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.

Amendement n° 66 de la commission. – Retrait.

Amendement n° 67 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 437 rectifié ter de Mme Victoire Jasmin. – Retrait.

Amendement n° 119 rectifié de Mme Catherine Conconne. – Retrait.

Amendement n° 68 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Articles additionnels après l’article 27

Amendement n° 516 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Amendement n° 260 rectifié bis de Mme Corinne Imbert. – Retrait.

Article 28

Amendement n° 217 rectifié bis de M. Daniel Chasseing. – Retrait.

Amendement n° 351 rectifié bis de Mme Céline Boulay-Espéronnier. – Retrait.

Amendement n° 403 rectifié de M. Yves Daudigny. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 29

M. Bernard Jomier

M. Jean-Louis Tourenne

Amendement n° 517 de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Amendement n° 359 rectifié de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Amendement n° 129 rectifié quater de M. Vincent Segouin. – Adoption.

Amendements identiques nos 27 rectifié de Mme Christine Bonfanti-Dossat, 146 rectifié de M. Jean-Marie Morisset, 245 rectifié ter de M. Jean Sol et 579 de Mme Sophie Taillé-Polian. – Retrait des amendements nos 27 rectifié et 245 rectifié ter ; rejet des amendements nos 146 rectifié et 579.

Amendement n° 249 rectifié de M. Jean Sol. – Rejet.

Amendements identiques nos 360 rectifié de M. Jean-Claude Tissot et 595 rectifié de M. Jean-Pierre Corbisez. – Retrait des deux amendements.

Amendement n° 405 rectifié de Mme Corinne Féret. – Adoption.

Amendement n° 477 rectifié de M. Bernard Jomier. – Adoption.

Amendement n° 580 rectifié de Mme Sophie Taillé-Polian. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Articles additionnels après l’article 29

Amendement n° 126 rectifié ter de Mme Florence Lassarade. – Retrait.

Amendement n° 127 rectifié bis de Mme Florence Lassarade. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 394 rectifié de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.

Amendements identiques nos 51 rectifié bis de M. Olivier Paccaud, 110 rectifié ter de Mme Brigitte Micouleau et 584 rectifié de Mme Véronique Guillotin. – Adoption des trois amendements insérant un article additionnel.

Amendement n° 412 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.

Amendements identiques nos 397 rectifié bis de M. Jean-Louis Tourenne et 571 rectifié bis de Mme Corinne Imbert. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 572 rectifié bis de Mme Corinne Imbert. – Retrait.

Amendements identiques nos 124 rectifié ter de Mme Florence Lassarade et 178 rectifié ter de M. Roger Karoutchi. – Retrait des deux amendements.

Amendement n° 564 rectifié bis de M. Olivier Henno. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 109 rectifié bis de Mme Brigitte Micouleau. – Retrait.

Amendement n° 395 rectifié de Mme Monique Lubin. – Rejet.

Article 29 bis (nouveau)

Amendement n° 69 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 29 ter (nouveau)

Amendement n° 70 de la commission. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.

Article 29 quater (nouveau)

Amendements identiques nos 28 rectifié de Mme Christine Bonfanti-Dossat, 147 rectifié de M. Jean-Marie Morisset, 246 rectifié bis de M. Jean Sol et 577 rectifié ter de M. Michel Vaspart. – Retrait des amendements nos 28 rectifié, 147 rectifié et 577 rectifié ter, l’amendement n° 246 rectifié bis n’étant pas soutenu.

Amendement n° 582 rectifié de Mme Véronique Guillotin. – Retrait.

Amendement n° 461 rectifié de M. Bernard Jomier. – Adoption.

Amendements identiques nos 193 rectifié de Mme Brigitte Micouleau et 593 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Adoption des deux amendements.

Amendement n° 71 rectifié de la commission. – Rectification.

Amendement n° 71 rectifié bis de la commission. – Adoption.

Mme Laurence Cohen

Adoption de l’article modifié.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Philippe Dallier

Article 29 quinquies (nouveau)

Mme Laurence Cohen

Mme Cathy Apourceau-Poly

M. Bernard Jomier

M. Michel Amiel

Amendements identiques nos 1 rectifié bis de Mme Dominique Estrosi Sassone, 72 de la commission, 218 rectifié bis de M. Daniel Chasseing, 298 de M. Michel Amiel, 462 rectifié de M. Bernard Jomier, 518 de Mme Laurence Cohen et 583 rectifié de Mme Véronique Guillotin. – Adoption des sept amendements supprimant l’article.

Article 29 sexies (nouveau)

Mme Catherine Deroche, rapporteur de la commission des affaires sociales

Mme Agnès Buzyn, ministre

M. Michel Amiel

Mme Catherine Deroche, rapporteur

Mme Agnès Buzyn, ministre

Adoption de l’article.

Article additionnel après l’article 29 sexies

Amendement n° 538 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Rejet.

Article 29 septies (nouveau)

Amendement n° 73 de la commission. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.

Article 29 octies (nouveau)

Amendement n° 409 rectifié de M. Yves Daudigny. – Rejet.

Amendement n° 463 rectifié de M. Bernard Jomier. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 30

M. Jean-Louis Tourenne

Amendement n° 319 rectifié de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Non soutenu.

Mme Agnès Buzyn, ministre

Adoption de l’article.

Articles additionnels après l’article 30

Amendements identiques nos 164 rectifié ter de Mme Nadine Grelet-Certenais, 362 rectifié ter de M. Jean-Claude Tissot et 519 de Mme Laurence Cohen. – Rejet des trois amendements.

Amendement n° 165 rectifié bis de Mme Nadine Grelet-Certenais. – Rejet.

Amendements identiques nos 166 rectifié ter de Mme Nadine Grelet-Certenais et 365 rectifié quater de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet des deux amendements.

Amendement n° 366 rectifié bis de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.

Article 31

Mme Laurence Cohen

Amendements identiques nos 12 rectifié ter de Mme Dominique Estrosi Sassone, 192 rectifié bis de Mme Brigitte Micouleau et 591 rectifié de Mme Françoise Laborde. – Retrait des trois amendements.

Amendement n° 585 rectifié de Mme Véronique Guillotin. – Retrait.

Amendement n° 158 rectifié bis de M. Jean-Louis Tourenne. – Rejet.

Amendement n° 74 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 32

Amendements identiques nos 75 rectifié de la commission et 610 du Gouvernement. – Adoption.

Amendement n° 210 rectifié bis de Mme Corinne Imbert. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article additionnel après l’article 32

Amendement n° 132 rectifié quater de M. Alain Houpert. – Rejet.

Article 32 bis (nouveau)

M. Bernard Jomier

Amendement n° 586 rectifié de Mme Véronique Guillotin. – Adoption.

Amendement n° 625 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article additionnel après l’article 32 bis

Amendements identiques nos 46 rectifié quater de M. Philippe Mouiller, 287 rectifié ter de Mme Catherine Fournier, 475 rectifié bis de Mme Nadine Grelet-Certenais et 523 rectifié de Mme Laurence Cohen. – Retrait de l’amendement n° 46 rectifié quater ; rejet des amendements nos 287 rectifié ter et 475 rectifié bis et 523 rectifié.

Article 33

Mme Laurence Cohen

M. Yves Daudigny

Mme Agnès Buzyn, ministre

Amendement n° 377 rectifié bis de M. Bruno Gilles. – Retrait.

Amendement n° 616 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 76 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 44 rectifié bis de M. Philippe Mouiller. – Retrait.

Amendements identiques nos 148 rectifié de M. Jean-Marie Morisset et 374 rectifié ter de M. Philippe Dallier. – Retrait des deux amendements.

Amendement n° 78 de la commission. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Articles additionnels après l’article 33

Amendement n° 439 rectifié de M. Victorin Lurel. – Retrait.

Renvoi de la suite de la discussion.

5. Ordre du jour

Nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire

compte rendu intégral

Présidence de Mme Hélène Conway-Mouret

vice-présidente

Secrétaires :

Mme Catherine Deroche,

M. Daniel Dubois.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à dix heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Mme Laurence Cohen. Madame la présidente, je demande la parole pour un rappel au règlement.

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Madame la présidente, mes chers collègues, je souhaite intervenir sur le fondement de l’article 36 de notre règlement.

Entre minuit et une heure ce matin, le rapporteur général de la commission des affaires sociales a commis une erreur. En effet, il a émis un avis défavorable sur notre amendement n° 498 tendant à insérer, après l’article 11, un article additionnel prévoyant d’exonérer les établissements publics de santé de taxe sur les salaires, alors que la commission avait émis un avis favorable.

Notre collègue René-Paul Savary avait d’ailleurs soutenu cette disposition de simplification.

Je souhaiterais donc qu’il soit pris acte de cette rectification, car même si, compte tenu des arguments avancés par Mme la ministre, j’ai cru bon de retirer cet amendement, j’estime que cet avis a pu influencer la teneur de nos débats.

Mme la présidente. Acte vous est donné de ce rappel au règlement, ma chère collègue.

Il n’y a pas d’autre observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Article additionnel  après l'article 15 - Amendement n° 233 rectifié quinquies (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Troisième partie

Financement de la sécurité sociale pour 2019

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 16

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2019 (projet n° 106, rapport n° 111 [tomes I à III], avis n° 108).

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre II du titre Ier de la troisième partie, à l’article 16.

TROISIÈME PARTIE (suite)

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2019

TITRE Ier (suite)

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE

Chapitre II (suite)

Des règles de cotisations plus claires et plus justes

Troisième partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 17

Article 16

I. – L’article L. 131-6 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi rédigé :

« I. – Les cotisations de sécurité sociale dues par les travailleurs indépendants non agricoles ne relevant pas du dispositif prévu à l’article L. 613-7 sont assises sur une assiette nette constituée du montant des revenus d’activité indépendante à retenir, sous réserve des dispositions des II à IV, pour le calcul de l’impôt sur le revenu, diminuée du montant de cotisations calculé selon les modalités fixées au V. » ;

2° Le II est ainsi modifié :

a) Les deux premiers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« II. – Les revenus mentionnés au I sont établis avant déduction au titre de l’impôt sur le revenu des sommes suivantes : » ;

b) Les abcd et e deviennent, respectivement, les 1°, 2°, 3°, 4° et 5° ;

c) Le f est remplacé par un 6° ainsi rédigé :

« 6° Les cotisations versées à des régimes obligatoires, de base ou complémentaires, de sécurité sociale et les autres sommes mentionnées au I de l’article 154 bis du même code. » ;

3° Après le f du même II, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« III. – Les revenus mentionnés au I comprennent en outre : » ;

4° Les 2°, 3° et 4° dudit II deviennent, respectivement, des 1°, 2° et 3° ;

5° Le III devient le IV ;

6° Au premier alinéa du III, les mots : « de l’assiette prévue » sont remplacés par les mots : « des revenus mentionnés » ;

7° Il est ajouté un V ainsi rédigé :

« V. – Le montant de cotisations mentionné au I est égal au produit du montant des revenus établi en application des II à IV et de la somme des taux de cotisations en vigueur l’année au titre de laquelle les cotisations sont dues, applicables pour l’assiette nette mentionnée au I, rapporté à cette même somme de taux de cotisations augmentée de un.

« En vue de l’établissement des comptes des travailleurs indépendants dont le bénéfice est déterminé en application des articles 38 et 93 A du code général des impôts, les organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 du présent code communiquent à l’issue de la déclaration des revenus énumérés aux II et III du présent article le montant de cotisations calculé selon les modalités fixées au premier alinéa du présent V. Ces organismes mettent en place un téléservice permettant de procéder à tout moment à ce calcul. »

II. – Le premier alinéa de l’article L. 136-3 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° À la première phrase, après le mot : « dispositions », sont insérés les mots : « des II à IV » ;

2° À la seconde phrase, les mots : « cotisations personnelles de sécurité sociale mentionnées à l’article 154 bis du code général des impôts ainsi que les » sont supprimés.

III. – Au premier alinéa du XVII de l’article 15 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018, la date : « 30 juin 2019 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2019 ».

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 60, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 1 à 17

Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :

I. – L’article L. 131-6 du code de la sécurité sociale est complété par un IV ainsi rédigé :

« IV. – Les organismes mentionnés aux articles L. 213-1, L. 641-2, L. 651-1 et L. 752-4 du même code mettent en place un téléservice permettant aux travailleurs indépendants de procéder à tout moment au calcul du montant des cotisations mentionnées au I. »

II. – Alinéas 18 à 20

Supprimer ces alinéas.

III. – Alinéa 21

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

III – Le XVII de l’article 15 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, la date : « 30 juin 2019 » est remplacée par la date : « 31 décembre 2019 » ;

2° Le cinquième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il examine en particulier les modifications du code général des impôts et du code de la sécurité sociale nécessaires à la détermination de modalités de calcul harmonisées et intelligibles du montant des cotisations sociales demandées au travailleur indépendant. »

IV. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

… – Le I du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je vous présente mes excuses, madame Cohen, et, si j’ai réellement commis une erreur, j’accepte bien volontiers de la réparer, bien qu’il soit difficile de le faire après coup. Quoi qu’il en soit, soyez assurée qu’il n’y avait aucune volonté de ma part de transformer en défavorable un avis qui aurait été favorable en commission. Nous allons essayer de faire mieux aujourd’hui ! (Sourires.)

J’en viens à l’amendement.

Dans la continuité d’une réflexion qui a été engagée l’année dernière sur la suppression du RSI, le régime social des indépendants, le présent amendement vise à clarifier la situation des travailleurs indépendants et à apporter une simplification, qui nous apparaît nécessaire, des modalités de calcul et de recouvrement de leurs cotisations sociales.

Actuellement sont prévues deux dispositions s’agissant de ces cotisations sociales : une expérimentation d’auto-liquidation, c’est-à-dire la possibilité pour un travailleur indépendant de déclarer dans l’année ses revenus et de payer automatiquement ses cotisations, et la commande d’un rapport du Gouvernement au Parlement examinant les propositions retenues pour simplifier le calcul de l’assiette des cotisations.

Pour une raison que je ne m’explique pas, l’article 16 prévoit une première mesure destinée à simplifier le calcul des cotisations sociales des travailleurs indépendants, en inscrivant dans le code de la sécurité sociale une formule mathématique censée le simplifier.

En deux mots, le problème est le suivant : les cotisations sociales des travailleurs indépendants sont calculées sur une assiette de revenus dite nette, c’est-à-dire diminuée du montant des cotisations sociales que le travailleur est censé devoir payer. Le travailleur indépendant doit donc estimer les cotisations qu’il va devoir payer et les déduire de l’assiette lui permettant ensuite de les calculer à partir d’une assiette nette…

L’article 16 propose une formule qui permettrait de sortir de ce calcul quelque peu circulaire, et ce sans rien changer sur le fond du droit.

Cet article suscite néanmoins plus de difficultés qu’il n’en résout, dans la mesure où il introduit une formule mathématique inventée.

Bien que l’article prévoie la mise en place d’un téléservice pour aider les indépendants dans ce calcul, il faut avouer que l’on n’a pas vraiment le sentiment qu’il s’agit bien d’une simplification.

Peut-être allez-vous nous donner la formule magique, madame la ministre (Sourires.), mais j’avoue que je suis surpris de cette proposition.

L’amendement que nous proposons vise tout d’abord à supprimer la formule de calcul. En effet, cette dernière, outre son caractère peu intelligible alors qu’elle est censée simplifier le droit, n’est pas vraiment opérationnelle.

Ensuite, cet amendement a pour objet d’inviter le Gouvernement à engager une refonte ambitieuse du calcul de l’assiette des cotisations. Pouvez-vous à ce titre nous confirmer, comme cela est mentionné dans l’étude d’impact, que la piste de l’évolution de l’assiette nette vers l’assiette brute est sérieusement étudiée par vos services ? Il me semble qu’une telle évolution serait réellement de nature à simplifier les calculs.

Enfin, cet amendement vise à élargir aux caisses de retraite des professionnels libéraux la liste des organismes chargés de construire le téléservice, afin de permettre à ce dernier d’offrir une réponse consolidée à tous les travailleurs indépendants.

Mme la présidente. L’amendement n° 434 rectifié ter, présenté par Mme Jasmin, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Conconne, MM. Lurel, Daudigny et Kanner, Mmes Féret et Grelet-Certenais, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran, Mme Ghali, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 17, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et à la contestation de ce calcul par le travailleur indépendant

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. Bonjour à tous !

En complément des propos du rapporteur général, et dans la continuité de sa proposition, le présent amendement vise à permettre aux travailleurs indépendants de contester le calcul du montant de leurs cotisations au cas où ils ne seraient pas d’accord.

S’il est certain qu’il faut avoir recours aux nouvelles technologies, il faut également humaniser les relations et les échanges. Nous constatons, hélas ! que, faute de solutions, d’écoute et de médiation, de très nombreux travailleurs indépendants se suicident, dans notre pays. Une fois que leurs biens ont été saisis, ils n’ont plus aucun recours.

Le présent amendement vise à leur donner un recours, l’écoute d’une personne susceptible de les aider à trouver une solution, parce qu’ils sont vraiment trop nombreux à baisser les bras, parfois à se suicider, ou à mettre leur famille en très grande difficulté.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 434 rectifié ter ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Sur la forme, j’émets un avis défavorable, car la commission a adopté l’amendement que je viens de présenter et qui vise à réécrire les dispositions de l’article 16 que vous souhaitez amender, ma chère collègue. Je vous invite donc a minima à sous-amender l’amendement que nous proposons.

Sur le fond, je ne suis pas certain de la portée juridique du présent amendement. Le téléservice, fondé sur une déclaration de revenus des travailleurs indépendants, n’est qu’un instrument d’aide au calcul et ne peut servir en aucun cas de rescrit social. Il s’agit d’un simple calcul dépourvu de valeur juridique.

L’avis est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 60 et 434 rectifié ter ?

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. J’évoquerai d’abord l’amendement du rapporteur général. Nous avons l’intention, avec l’article 16, de mettre fin aux difficultés récurrentes de compréhension et aux divergences d’interprétation en fixant de manière claire les modalités de calcul des cotisations.

Je n’ai pas de formule magique, monsieur Vanlerenberghe, et je ne suis pas sûre qu’en matière de cotisations cela rassurait nos concitoyens ! (Sourires.) Je pense donc préférable d’inscrire clairement les choses dans la loi.

L’article 16 permet précisément d’inscrire dans la loi la formule de calcul qui est déjà en application aujourd’hui, mais qui n’est pas explicitement formulée dans les textes. Cela permettra justement de sortir de la pensée magique !

Il n’ajoute aucune complexité au système actuel, au contraire, puisqu’il clarifie le droit applicable. La formule de calcul sera désormais explicitement indiquée dans la loi, alors qu’elle ne peut actuellement qu’être déduite des différents renvois entre le code de la sécurité sociale et le code général des impôts.

Il s’agit donc réellement à nos yeux d’offrir une meilleure intelligibilité du mode de calcul.

Vous indiquez dans l’exposé des motifs de votre amendement que les taux de cotisations retenus dans la formule de calcul ne sont pas ceux qui sont applicables à l’assiette nette. C’est pourtant le cas, car les taux retenus permettent de prendre en compte les différentes réductions de cotisations, les exonérations ainsi que les cotisations minimales.

Vous m’interpellez sur le passage de l’assiette nette à l’assiette brute. Je vous confirme que nous souhaitons travailler dans cette direction et que nous envisageons de changer le mode de calcul dans ce sens, mais seulement à moyen terme. Nous ne sommes pas en mesure aujourd’hui de l’inscrire dans la loi.

Nous pensons donc que la suppression des évolutions rédactionnelles proposée conduirait à maintenir un flou sur les dispositions actuellement en vigueur et à faire perdurer pour les travailleurs indépendants une situation assez inintelligible, alors que l’article 16 permet de clarifier dans la loi les formules de calcul des cotisations.

J’émets donc un avis défavorable sur votre amendement.

J’en viens à l’amendement de Mme Jasmin.

De nombreuses mesures ont été prises pour les travailleurs indépendants, notamment par le transfert du RSI au régime général.

Actuellement, rien n’empêche les travailleurs indépendants d’adresser une demande d’information ou une réclamation à l’administration, par mail ou par téléphone.

Le transfert au régime général a permis d’améliorer le service rendu aux travailleurs indépendants, notamment grâce à la mise en place d’une médiation dans les URSSAF.

Les enquêtes récentes montrent que les trois quarts des travailleurs indépendants pensent que la réforme est une bonne chose, notamment parce qu’elle s’accompagne d’une meilleure relation avec les cotisants. Je pense à l’expérimentation de la relation personnalisée, qui permet à un travailleur indépendant de joindre facilement un agent en cas de litige sur le montant calculé des cotisations.

Tout va donc dans le sens de l’amélioration du service rendu.

L’avis est défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.

M. Jean-Noël Cardoux. Permettez-moi de rappeler certains principes de base en matière de régime social des indépendants.

Premièrement, en ce qui concerne le calcul provisionnel des cotisations, depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, tout travailleur assujetti aux cotisations peut, sous sa responsabilité, choisir de limiter les cotisations qu’on lui réclame, une sanction d’un montant de 5 % lui étant appliquée si ce calcul dévie de 30 % des cotisations dues. Cette disposition très libérale – je n’ai cessé de le répéter pendant des années – est malheureusement très mal appliquée.

Deuxièmement, aux termes du code général des impôts, les commerçants soumis aux bénéfices industriels et commerciaux, les BIC, doivent rattacher les charges d’un exercice à l’exercice pendant lequel elles ont été générées. Autrement dit, les cotisations de l’année N doivent être rattachées à l’exercice de l’année N.

Les professions libérales sont quant à elles assujetties de droit à un régime « recettes-dépenses », ou de comptabilité de caisse, en vertu duquel les cotisations sont prises en charge au moment où elles sont payées. Les travailleurs libéraux peuvent toutefois opter, sous leur responsabilité, pour le régime des commerçants et peuvent donc provisionner leurs cotisations. Cette option est bien sûr facultative, mais elle est souvent pratiquée.

Troisièmement, je rappelle que, depuis des années, la plupart des cabinets d’expertise comptable disposent de logiciels qui, lorsqu’ils déterminent un résultat, calculent instantanément les charges sociales afférentes, et permettent si nécessaire de les provisionner immédiatement dans l’exercice. Je crois que c’est la solution, même si je sais bien que tout le monde n’a pas d’expert-comptable.

Le rapporteur général propose certes un outil susceptible de simplifier le calcul des cotisations des professions indépendantes et de rendre ses modalités plus accessibles, mais je suis persuadé – c’est d’ailleurs l’une des conclusions du rapport d’information que j’avais réalisé avec M. Godefroy – que la solution d’avenir, et la plus efficace, est l’auto-liquidation, que de nombreux professionnels proposent depuis des années et que de plus en plus de professions indépendantes sollicitent. Le Gouvernement devrait y travailler, mais je crois que c’est déjà le cas.

Mme la présidente. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.

Mme Victoire Jasmin. J’entends vos éléments de langage, madame la ministre.

Vous dites que les trois quarts des travailleurs indépendants sont satisfaits. C’est donc qu’un quart d’entre eux ne le sont pas !

Je propose que nous adoptions l’amendement du rapporteur général, qui, dans son exposé des motifs, met en évidence un certain nombre de dysfonctionnements, afin de prendre en compte les difficultés de ces personnes qui sont volontaires pour créer dans notre pays et pour développer l’économie de notre pays. Donnons-leur les moyens de s’épanouir, et évitons les suicides !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 60.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 434 rectifié ter n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’article 16, modifié.

(Larticle 16 est adopté.)

Article 16
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 201

Article 17

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L’article L. 133-4-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 133-4-2. – I. – Le bénéfice de toute mesure de réduction ou d’exonération, totale ou partielle, de cotisations de sécurité sociale, de contributions dues aux organismes de sécurité sociale ou de cotisations ou contributions mentionnées au I de l’article L. 241-13 est supprimé en cas de constat des infractions mentionnées aux 1° à 4° de l’article L. 8211-1 du code du travail.

« II. – Lorsque l’infraction est constatée par procès-verbal dans les conditions déterminées aux articles L. 8271-1 à L. 8271-19 du même code, l’organisme de recouvrement procède, dans la limite de la prescription applicable à l’infraction, à l’annulation des réductions et exonérations des cotisations ou contributions mentionnées au I du présent article.

« III. – Par dérogation aux I et II du présent article et sauf dans les cas mentionnés au second alinéa du I de l’article L. 243-7-7, lorsque la dissimulation d’activité ou de salarié résulte uniquement de l’application du II de l’article L. 8221-6 du code du travail ou qu’elle représente une proportion limitée de l’activité, l’annulation des réductions et exonérations de cotisations de sécurité sociale ou de contributions est partielle.

« Dans ce cas, la proportion des réductions et exonérations annulées est égale au rapport entre le double des rémunérations éludées et le montant des rémunérations, soumises à cotisations de sécurité sociale, versées à l’ensemble du personnel par l’employeur, sur la période concernée, dans la limite de 100 %.

« IV. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions dans lesquelles la dissimulation peut, au regard des obligations mentionnées aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail, être considérée comme limitée pour l’application du III du présent article, sans que la proportion de l’activité dissimulée puisse excéder 10 % de l’activité. » ;

2° L’article L. 243-7-7 est ainsi modifié :

a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

b) Après le deuxième alinéa, sont insérés des II et III ainsi rédigés :

« II. – Sauf dans les cas mentionnés au III, la personne contrôlée peut bénéficier d’une réduction de dix points du taux de ces majorations de redressement si, dans un délai de trente jours à compter de la notification de la mise en demeure, elle procède au règlement intégral des cotisations, pénalités et majorations de retard notifiées ou si, dans le même délai, elle a présenté un plan d’échelonnement du paiement au directeur de l’organisme et que ce dernier l’a accepté.

« Cette réduction est notifiée par le directeur de l’organisme une fois le paiement intégral constaté.

« III. – En cas de nouvelle constatation de travail dissimulé dans les cinq ans suivant la notification d’une première constatation pour travail dissimulé ayant donné lieu à redressement auprès de la même personne morale ou physique, la majoration est portée à :

«1° 45 %, lorsque la majoration de redressement prononcée lors de la constatation de la première infraction était de 25 % ;

«2° 60 %, lorsque la majoration de redressement prononcée lors de la constatation de la première infraction était de 40 %. » ;

c) (nouveau) Au début du troisième alinéa, est ajoutée la mention : « IV. – ».

II. – Le présent article s’applique aux opérations de contrôle engagées à compter du 1er janvier 2019. Toutefois, le III de l’article L. 133-4-2 et le II de l’article L. 243-7-7 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction résultant du présent article s’appliquent aux procédures de contrôle en cours au 1er janvier 2019 ainsi qu’à toute annulation de réductions ou d’exonérations de cotisations de sécurité sociale ou de contributions n’ayant pas donné lieu à une décision de justice ayant un caractère irrévocable.

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 380 rectifié est présenté par Mme Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Taillé-Polian et Meunier, M. Kanner, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, M. Fichet, Mme Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, J. Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 508 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour présenter l’amendement n° 380 rectifié.

Mme Sophie Taillé-Polian. Je m’adresse à M. Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, qui vient de succéder à Mme la ministre des solidarités et de la santé au banc du Gouvernement.

Monsieur le ministre, je vous ai entendu à plusieurs reprises vanter les mérites de la société du risque, au nom de je ne sais quels effets sur l’innovation et la croissance que l’on attend toujours, d’ailleurs…

Or, dans vos politiques, les risques sont toujours portés par les mêmes, c’est-à-dire par les gens modestes et par les salariés. En l’espèce, c’est particulièrement manifeste.

Quelle est la situation actuelle ? Quand les entreprises fraudent – il n’est pas question ici de malentendus, mais de fraudes avérées – en se rendant coupables de travail dissimulé – qu’il s’agisse d’heures supplémentaires non payées, ou de recours à des emplois précaires, à des auto-entrepreneurs ou à d’autres modèles de travail indépendant, alors même qu’existe un lien unique entre la personne qui travaille et l’entreprise –, elles reçoivent un procès-verbal et perdent le bénéfice des exonérations de cotisations sociales.

Il s’agit d’une politique de dissuasion forte, et tout le monde trouve cela normal.

Vous nous proposez pourtant de moduler l’annulation des aides et des exonérations de cotisations sociales en cas de fraude, en cas de triche.

Cela revient à substituer, à un risque qui contribue à la dissuasion, un vulgaire calcul coûts-avantages, sur le dos des salariés et au détriment de leurs droits légitimes. Cela s’ajoutant à la diminution des moyens donnés à l’inspection du travail depuis au moins deux ans, la situation des salariés et la lutte contre le travail dissimulé vont en être affaiblies.

C’est pourquoi nous proposons la suppression de cette disposition.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 508.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise également à supprimer l’article 17, qui introduit une gradation des sanctions applicables en matière de travail dissimulé.

Cet article est révélateur de la volonté de l’État de dérégulation en faveur des entreprises, et s’inscrit à contre-courant des positions adoptées par la Cour des comptes.

En effet, dans un rapport de 2014, puis dans celui du 7 février 2018, la Cour insiste sur l’importance de relancer les politiques de lutte contre les fraudes aux cotisations sociales en raison de l’enjeu financier majeur qu’elles représentent.

Je rappelle que le travail illégal est non seulement une infraction pénale qui doit être sanctionnée comme telle, mais également une fraude qui vient grever lourdement le budget de la sécurité sociale. En effet, selon les estimations de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, le manque à gagner pour la sécurité sociale serait d’au moins 6 milliards d’euros.

Dans ces conditions, le bon sens voudrait que de nouvelles mesures soient prises pour que les contrôles soient plus fréquents et les sanctions, plus systématiques, suivant les recommandations de la Cour des comptes.

Pourtant, alors que les mesures visant à lutter contre la fraude aux prestations sociales sont sans cesse renforcées et que le Gouvernement multiplie les mesures austéritaires visant à diminuer la dette sociale, cet article vient adoucir les sanctions applicables en cas de travail dissimulé.

Nous nous interrogeons sur le message qui est ainsi envoyé. Cela donne en effet l’impression qu’il existe deux poids, deux mesures dans la sanction des fraudes, et nous nous y opposons.

Les entreprises doivent respecter la loi et être sanctionnées lorsqu’elles ne le font pas, d’autant que, comme la Cour des comptes le rappelle dans son rapport, la fraude aux cotisations sociales présente un élément intentionnel, bien loin de la simple erreur.

Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 17.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mesdames, vous proposez de supprimer l’article 17, alors que les dispositions qu’il introduit visent à mieux adapter les sanctions relatives à la lutte contre le travail illégal à la gravité du manquement constaté.

La notion de « travail illégal » recouvre toute une série de situations, allant de délits qui relèvent de l’esclavage moderne, pour lesquels il n’est évidemment pas question d’alléger les sanctions, à des requalifications de relations avec des sous-traitants en contrat de travail, qui, avouez-le, sont d’autant moins graves que le fautif est parfois de bonne foi.

Aujourd’hui, les agents qui constatent de tels manquements n’ont d’autre choix qu’appliquer la sanction maximale, qui n’est pas toujours adaptée, ou ne rien faire. Il faut l’avouer, ce n’est pas très satisfaisant.

C’est à ce type de situation concrète que l’article 17 prévoit de remédier.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre de laction et des comptes publics. Je suis évidemment en accord avec M. le rapporteur général et partage son argumentation.

Mesdames les sénatrices, le débat n’est pas entre ceux qui lutteraient contre la fraude et ceux qui ne le feraient pas. C’est bien la situation actuelle qui ne va pas.

La Cour des comptes pointe, dans son rapport, un manque dans les caisses des comptes sociaux évalué entre 3 et 6 milliards d’euros. C’est une somme très importante, et comme le rapporteur général l’a très bien dit, notre objectif est de mieux sanctionner.

Aujourd’hui, les agents chargés de sanctionner des erreurs ou des fraudes qui n’ont pas de caractère massif n’ont souvent d’autre choix que d’appliquer une sanction disproportionnée, qui tombe parce qu’elle est contestée, ou de ne pas sanctionner du tout.

Or la proportionnalité des peines, si vous me permettez cette expression tirée du domaine pénal, ou plutôt la proportionnalité des sanctions, est au fondement même de notre droit. On ne peut pas comparer l’omission de quelques heures travaillées par un ou deux salariés à des cas de fraude massive qui s’apparentent, comme le rapporteur général l’a très bien dit, à de l’esclavage moderne.

Que se passe-t-il actuellement ? En cas de fraude, la sanction peut aller jusqu’au remboursement de l’intégralité des exonérations prévues par la loi jusqu’à cinq ans en arrière. Aucune demi-mesure n’est prévue.

Le Gouvernement propose donc, d’une part, de renforcer la lutte contre les cas de fraude – certaines dispositions du présent PLFSS prévoient ainsi que le procès-verbal soit transmis directement au juge, afin d’attaquer plus rapidement et de faire condamner plus fortement les véritables fraudeurs, qui donnent des coups de poignard au pacte républicain et qui privent les personnes de la garantie essentielle que constitue la protection sociale –, et, d’autre part, conformément au principe de proportionnalité des sanctions et au droit à l’erreur, de moduler les sanctions.

L’article 17 me semble donc de bon sens. Il permettra non seulement d’être à l’écoute des entreprises en cas d’erreur ou d’oubli avant de prendre des sanctions proportionnées – il ne s’agit en aucun cas de passer l’éponge sur les oublis, qui doivent être sanctionnés conformément au droit -, mais aussi de lutter plus fortement contre les fraudeurs.

Il ne paraît donc pas souhaitable de le supprimer.

L’avis est défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.

Mme Sophie Taillé-Polian. Si le Gouvernement souhaitait véritablement lutter contre la fraude, notamment contre le travail dissimulé, il faudrait qu’il augmente les effectifs de l’inspection du travail.

Cela permettrait également aux inspecteurs du travail, plus nombreux, de s’investir davantage dans leur rôle de conseil et d’accompagnement, et d’éviter ces situations, malencontreusement fautives, où l’on demande à un salarié de devenir auto-entrepreneur…

Nous voyons bien, et ce n’est pas la première fois que vous le démontrez, que vous n’allez pas dans le sens de la protection des salariés.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Nous avons des philosophies différentes, madame la sénatrice. Votre réponse, c’est plus de contrôle, plus d’inspecteurs du travail.

Mme Sophie Taillé-Polian. Plus d’accompagnement, monsieur le ministre !

M. Gérald Darmanin, ministre. À ce compte, il y aura de moins en moins d’entreprises !

Le problème, avec votre politique, c’est qu’au bout d’un moment il n’y aura plus d’argent à distribuer – l’argent des autres. Il faut tout de même permettre aux entreprises de faire face à leurs obligations tout en protégeant les travailleurs vis-à-vis des vrais fraudeurs.

Permettez-moi de rappeler que le système fonctionne très bien, et cela quasiment depuis sa création, sous tous les gouvernements. Le taux de recouvrement des cotisations sociales est quasiment de 99 %. Le montant des fraudes potentielles est certes estimé par l’ACOSS entre 3 et 6 milliards d’euros, et il faut les combattre, mais les recettes s’élèvent tout de même à 500 milliards d’euros. Restons raisonnables, même l’impôt sur le revenu n’a pas un tel taux de recouvrement !

Oui, il y a encore des esclavagistes modernes, oui, il y a encore des gens qui fraudent, et il faut les condamner, y compris pénalement, mais on ne va pas rajouter des inspecteurs du travail, des contrôles et des sanctions parce que, par nature, vous êtes animée d’une véritable défiance vis-à-vis du monde économique !

Indépendamment de la défense du présent amendement, nous n’avons pas la même philosophie.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.

M. Olivier Henno. Permettez-moi un simple commentaire.

C’est une évidence qu’il faut pouvoir graduer les sanctions. À défaut d’une telle gradation, on renonce bien souvent à appliquer les sanctions. Or il me semble que c’est exactement ce qui se passe.

Le présent article étant de bon sens, je suivrai la logique du Gouvernement et l’avis du rapporteur général.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 380 rectifié et 508.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 17.

(Larticle 17 est adopté.)

Article 17
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 509

Articles additionnels après l’article 17

Mme la présidente. L’amendement n° 201, présenté par Mme Vullien, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 2° du III de l’article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …) La gratuité ou les avantages tarifaires accordés à leurs salariés par les opérateurs de transports publics urbains, en application d’une convention collective nationale, sur les réseaux qu’ils exploitent. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Michèle Vullien.

Mme Michèle Vullien. La convention collective nationale des réseaux de transports publics urbains de voyageurs prévoit, dans son article 24, la remise d’une carte personnelle de service aux salariés des opérateurs publics ou privés exploitant des réseaux de transports urbains qui permet à ces employés de circuler librement sur leurs propres réseaux.

Certaines URSSAF, les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales, contredisant leurs positions historiques, sont tentées, depuis quelques années, de requalifier cette disposition en avantage en nature. Or la carte de service constitue une disposition conventionnelle concernant un outil professionnel.

Le présent amendement de clarification vise à mettre fin à une insécurité et à une instabilité juridiques liées à des interprétations diverses et contradictoires de décisions judiciaires.

C’est dans cette logique qu’il convient de modifier l’article L. 136-1-1 du code de la sécurité sociale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’amendement vise à exclure de l’assiette de la CSG la gratuité et les avantages tarifaires accordés à leurs salariés par des opérateurs de transports urbains. Il nous paraît répondre à certains contentieux en cours entre les opérateurs de transports publics et les URSSAF.

S’il lui semble fondé, la commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement à son sujet.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Monsieur le rapporteur général, le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.

Son dispositif fait écho à la discussion sur les chèques cadeaux que nous avons pu avoir en début de semaine. Madame la sénatrice, il faut peut-être ouvrir une discussion globale sur cette question.

Comme vous l’avez expliqué, il existe des circulaires, des arrêtés, notamment de la direction de la sécurité sociale, et il y a des contentieux, parce que le régime qui couvre les actions de ces sociétés n’est pas clair.

Pour ma part, ce qui m’embête, si vous me permettez l’expression, ce sont les avantages dont jouissent les salariés des entreprises de transports publics urbains par rapport aux autres salariés. Pourquoi ferions-nous une exception à leur profit ? Le débat est intéressant, mais ne me paraît pas de nature à être tranché par le biais d’un amendement au présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Oui, manifestement un certain nombre d’actions et de contentieux sont en cours, comme il y en a, monsieur le rapporteur général, pour les chèques-vacances.

Mme Michèle Vullien. Cela n’a rien à voir ! C’est un outil de travail.

M. Gérald Darmanin, ministre. Si, madame la sénatrice ! La question est celle du régime social appliqué à ce que fait la société.

Si je comprends bien, vous proposez de supprimer le plafond d’exonération de cotisations et contributions sociales applicables aux avantages tarifaires accordés par les opérateurs de transports publics urbains à leurs salariés.

La question n’est pas de supprimer l’accord conclu entre les salariés et l’entreprise de transports publics urbains. Elle est de savoir si l’on doit supprimer les cotisations et contributions sociales liées à cet accord. C’est assez différent ! L’entreprise pourra toujours accorder un certain nombre d’avantages.

En revanche, les comptes sociaux doivent-ils exonérer les entreprises de transports publics urbains du versement des cotisations en lien avec l’accord qu’elles ont conclu avec les salariés ? Et au nom de quoi les sociétés de transports publics urbains pourraient-elles accorder un tel bénéfice à leurs salariés ? Cela créerait une inégalité assez évidente avec les salariés qui ne connaissent pas le bonheur ou la contrainte d’être employés par ces entreprises. D’ailleurs, je ne pense pas qu’un tel dispositif s’inscrive dans la philosophie qui nous guide depuis le début du quinquennat.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Cela étant, je veux bien ouvrir le débat sur les avantages que les sociétés offrent à leurs salariés et sur le régime social qui leur est applicable pour éviter les contentieux.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il faut clarifier cela !

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est une question intéressante, que nous avons déjà évoquée, mais je ne pense pas qu’il faille, aujourd’hui, décider d’une exception pour les sociétés et les salariés visés par l’amendement, car cela entraînerait une rupture d’égalité manifeste.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Pour ma part, je considère que l’avis du Gouvernement est fondé, même si je comprends l’interrogation de Mme Vullien. Il y aurait, sinon, beaucoup de cas analogues d’avantages en nature à soulever.

Par conséquent, la commission suit le Gouvernement, et émet un avis défavorable sur le présent amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles Revet, pour explication de vote.

M. Charles Revet. Je veux évoquer un cas précis.

Il se trouve que j’habite la Seine-Maritime et que je prends souvent le premier train qui va du Havre à Paris. J’y rencontre des mécaniciens qui se rendent à la capitale pour assurer leur service.

Ces salariés sont-ils susceptibles de se voir appliquer un tel dispositif ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ils ne paient pas !

Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle Vullien, pour explication de vote.

Mme Michèle Vullien. Permettez-moi, monsieur le ministre, de ne pas être du tout d’accord avec votre argumentaire.

Lorsque les salariés des entreprises de transports publics vont et viennent sur le réseau pour réaliser des contrôles, notamment, ils ne font qu’utiliser leur outil de travail !

À vous écouter, il faudrait requalifier le contrat du salarié d’une usine parce qu’il se sert d’une machine qui coûte plusieurs millions !

M. Gérald Darmanin, ministre. Non !

Mme Michèle Vullien. La comparaison avec les chèques-vacances ou d’autres avantages n’est pas raisonnable.

D’ailleurs, les URSSAF ne réagissent pas toutes de la même manière face à la difficulté que mon amendement tend à régler.

Je pense que, en changeant de politique, on cherche surtout à récolter trois sous !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Monsieur Revet, vous avez une vision concrète et politique des choses, mais, sans vouloir être trop technique, il me semble qu’il m’appartient d’éclairer le Sénat sur ce point.

En l’occurrence, l’amendement vise à exonérer de charges patronales les billets des salariés des sociétés de transports urbains, la RATP, par exemple. La RATP n’aurait pas de charges à payer pour la gratuité des transports qu’elle offre à ses collaborateurs, que ces derniers utilisent ces billets dans leur vie privée ou dans leur vie professionnelle.

La question que nous devons nous poser est la suivante : doit-on exonérer de charges patronales ces avantages ? Il m’avait semblé, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous cherchiez plutôt, collectivement, à combattre ces derniers, y compris s’agissant de la SNCF.

Pour revenir sur l’exemple très précis de M. le sénateur, dans le cas de la SNCF, les billets de train sont en partie gratuits et les charges sociales sont prises en charge par la SNCF elle-même.

Au reste, si tous les salariés de France bénéficient de la participation de leur employeur à leurs frais de transports, ceux qui ne travaillent pas dans une société de transports – SNCF, RATP ou autre – doivent régler une partie de ces frais.

M. Gérald Darmanin, ministre. Certes, mais pourquoi prévoir par la loi l’exonération de charges patronales pour les salariés des entreprises de transports publics ? Ce serait, à mon sens, une rupture d’égalité.

En revanche, je ne conteste pas que les sociétés puissent conclure des accords. Elles pourront continuer à le faire. La question est de savoir si l’on exonère la RATP, par exemple, de cotisations.

Il ne me semble pas que ce soit nécessaire de le faire, raison pour laquelle j’émets, je le répète, un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 201.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 201
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 18

Mme la présidente. L’amendement n° 509, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la fraude patronale aux cotisations sociales.

La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Cet amendement vise à demander un rapport au Gouvernement.

Nous savons l’enthousiasme délirant que les demandes de ce genre suscitent, en général, dans cet hémicycle (Sourires.), mais, en l’occurrence, cet amendement nous semble justifié, compte tenu de l’enjeu en matière de fraude sociale : le rapport que nous sollicitons pourrait permettre de récupérer des moyens considérables pour les comptes sociaux, dont l’équilibre nous préoccupe tous.

Apparemment, tout le monde s’accorde sur la réalité de cette fraude. Mais, si j’entends bien que le recouvrement est quasi total, des milliards d’euros continuent de se balader ici et là.

Selon le rapport publié en 2017 par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, 540 millions d’euros de redressement et 330 millions d’euros de pénalités ont été prononcés l’an dernier. Autrement dit, nous ne sommes pas très loin du milliard d’euros, chiffre en augmentation, mais encore très éloigné des 25 milliards d’euros que représenterait le total de la fraude aux cotisations sociales, selon l’estimation figurant dans le rapport de la Cour des comptes publié en février dernier.

Il s’agit donc bien de renforcer les moyens de la lutte contre cette fraude, alors que la convention d’objectifs et de gestion passée entre l’ACOSS et l’État pour la période 2018-2022 prévoit une réduction de 880 équivalents temps plein, obtenue notamment via la dématérialisation des services.

Rappelons tout de même que la fraude sociale concerne non seulement certaines entreprises, mais aussi l’État, qui a été sommé par la Cour des comptes, à l’occasion de la sortie de son rapport en février dernier, de régulariser les 500 millions d’euros dus au titre de l’emploi de collaborateurs occasionnels du service public.

Nous proposons donc qu’une évaluation soit réalisée par le Gouvernement, afin de cerner les contours exacts de la fraude aux cotisations sociales et, bien sûr, de formuler des recommandations et de dégager les moyens pour mettre fin à ces excès.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement tend à la remise d’un rapport sur la fraude patronale. Vous le savez, nous ne sommes pas favorables aux rapports en général.

Cela dit, le rapport demandé a pour objet de lutter contre la fraude. La commission souscrit évidemment à cet objectif. Dès lors, je sollicite l’avis du Gouvernement sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Monsieur le sénateur, comme vous le savez, nous partageons votre volonté de lutter contre la fraude fiscale et sociale.

Vous avez raison, si les montants sont peu importants en proportion, ils sont importants en volume. Il s’agit aussi d’un symbole. Le Gouvernement n’a rien à cacher sur ce point.

Si j’ai toujours considéré que l’évaluation était du ressort du Parlement, quitte à ce que le Gouvernement mette à sa disposition les informations dont il dispose, je ne voudrais pas que cette position soit interprétée comme une volonté de ne pas lutter contre la fraude sociale de la même manière que contre la fraude fiscale.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je ne m’opposerai pas à un rapport que M. le ministre consent à produire !

Cependant, on me signale que l’ACOSS réalise déjà un rapport sur le sujet. Nous aurons donc deux rapports, à moins que le Gouvernement ne fasse que copier celui de l’ACOSS.

Dans ces conditions, je m’en remets à la sagesse du Gouvernement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 509.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.

Article additionnel après l'article 17 - Amendement n° 509
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Article 19

Article 18

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa de l’article L. 114-6 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour l’établissement des comptes combinés, le directeur comptable et financier de l’organisme national identifie et enregistre celles des écritures d’inventaire comptables, afférentes aux opérations des organismes de base et établies à partir d’estimations, ayant vocation à être retracées dans les comptes de l’organisme national. » ;

2° Le chapitre IV ter du titre Ier du livre Ier est ainsi modifié :

a) L’intitulé est ainsi rédigé : « Dispositifs de contrôle et relatifs à la lutte contre la fraude » ;

b) Au début, est ajoutée une section 1 ainsi rédigée :

« Section 1

« Contrôle interne

« Art. L. 114-8-1. – Le directeur et le directeur comptable et financier d’un organisme de sécurité sociale conçoivent et mettent en place conjointement un plan de contrôle interne dont l’objet est d’assurer la maîtrise des risques de toute nature, notamment financiers, inhérents aux missions confiées à cet organisme. Ils élaborent et mettent en œuvre les plans d’action permettant de remédier aux déficiences constatées et d’améliorer l’efficience de la gestion des missions de leurs organismes. » ;

c) Est ajoutée une section 2 intitulée : « Contrôles et lutte contre la fraude » qui comprend les articles L. 114-9 à L. 114-22-1 ;

3° L’intitulé du chapitre II du titre II du livre Ier est ainsi rédigé : « Directeur et directeur comptable et financier » ;

4° Après le premier alinéa de l’article L. 122-2, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Le directeur comptable et financier veille à la cohérence des données issues de la comptabilité et des données d’exécution des budgets de gestion et de leur analyse au regard des objectifs votés par le Parlement en loi de financement de la sécurité sociale.

« Le directeur comptable et financier établit, sur la base des résultats des opérations de contrôle interne, la synthèse des risques financiers majeurs auxquels l’organisme est exposé et des conditions dans lesquelles ces risques sont maîtrisés. » ;

5° L’intitulé de la section 2 du chapitre III du même titre II est ainsi rédigé : « Agents de direction et directeurs comptables et financiers » ;

6° La seconde phrase du 1° des articles L. 221-1, L. 222-1 et L. 223-1 est ainsi modifiée :

a) Le mot : « consolidés » est remplacé par le mot : « combinés » ;

b) Après le mot : « règlement », sont insérés les mots : « et la comptabilisation » ;

7° Au 3° de l’article L. 225-1-1, après le mot : « loi », sont insérés les mots : « ou, pour les régimes obligatoires de sécurité sociale, par décret » ;

8° L’article L. 225-1-4 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est complété par les mots : « consentir, contre rémunération » ;

b) Au 1°, les mots : « Consentir, contre rémunération, » sont supprimés ;

c) Au 2°, au début, les mots : « À titre exceptionnel et contre rémunération, consentir » et, à la fin, les mots : «, dans la limite du montant prévisionnel des flux financiers de l’année en cours entre l’agence et le régime, l’organisme ou le fonds concerné » sont supprimés ;

d) Après le même 2°, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° Sans préjudice de l’exercice par l’agence des missions prévues aux 1° et 2°, des avances d’une durée inférieure à un mois aux organismes, dont la liste est fixée par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, dont elle centralise des recettes ou pour le compte desquels elle assure le recouvrement de tout ou partie des cotisations et contributions. » ;

e) À la première phrase du dernier alinéa, les références : « aux 1° et 2° » sont remplacées par la référence : « au présent article » ;

9° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 114-6, au troisième alinéa, deux fois, ainsi qu’aux quatrième et avant-dernier alinéas de l’article L. 122-2, aux deux dernières phrases du premier alinéa de l’article L. 122-3, à la première phrase, deux fois, et à la seconde phrase de l’article L. 122-9, à la première phrase de l’article L. 216-6, à la première phrase du deuxième alinéa des articles L. 217-3 et L. 217-3-1, à l’article L. 217-6, au neuvième alinéa de l’article L. 224-5-1 et à la fin du 2° de l’article L. 224-5-2, les mots : « l’agent comptable » sont remplacés par les mots : « le directeur comptable et financier » ;

9° bis Au début du premier alinéa et de la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 122-2, du second alinéa de l’article L. 281-2 ainsi que du III de l’article L. 641-3-1, les mots : « L’agent comptable » sont remplacés par les mots : « Le directeur comptable et financier » ;

9° ter À la première phrase du premier alinéa et, deux fois, du dernier alinéa de l’article L. 122-3, au second alinéa de l’article L. 122-7 et au premier alinéa de l’article L. 123-2, les mots : « de l’agent comptable » sont remplacés par les mots : « du directeur comptable et financier » ;

9° quater À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 382-2, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018, les mots : « de l’agent comptable » sont remplacés par les mots : « du directeur comptable et financier » ;

9° quinquies À la seconde phrase du dernier alinéa de l’article L. 122-2, à la fin de la première phrase du dernier alinéa de l’article L. 122-3, au second alinéa de l’article L. 122-7, au premier alinéa des articles L. 123-1 et L. 123-3, au premier alinéa, aux première et seconde phrases du troisième alinéa et à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 217-3, au premier alinéa de l’article L. 217-3-1, au troisième alinéa de l’article L. 217-5 et au second alinéa du I de l’article L. 641-7, les mots : « agents comptables » sont remplacés par les mots : « directeurs comptables et financiers » ;

10° À la fin du premier alinéa de l’article L. 122-1 et au second alinéa du I de l’article L. 641-7, les mots : « agent comptable » sont remplacés par les mots : « directeur comptable et financier » ;

10° bis À l’article L. 217-4, les mots : « d’agents comptables » sont remplacés par les mots : « de directeurs comptables et financiers » ;

11° À la fin du V de l’article L. 228-1, les mots : « agent comptable » sont remplacés par les mots : « de son directeur comptable et financier » ;

12° Au second alinéa de l’article L. 641-3, le mot : « comptable » est remplacé, deux fois, par les mots : « directeur comptable et financier ».

II. – L’ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l’amélioration de la santé publique, à l’assurance maladie, maternité, invalidité et décès, au financement de la sécurité sociale à Mayotte et à la caisse de sécurité sociale de Mayotte est ainsi modifiée :

1° À la première phrase de l’article 25-1, les mots : « de l’agent comptable » sont remplacés par les mots : « du directeur comptable et financier » ;

2° Au VI de l’article 26, la référence : « et L. 114-6-1 » est remplacée par les références : « , L. 114-6-1 et L. 114-8-1 ».

III. – Au b du 4° du XVI de l’article 15 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018, l’année : « 2020 » est remplacée par l’année : « 2019 ».

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.

Mme Cathy Apourceau-Poly. L’article 18 prévoit l’ensemble des transferts financiers entre les branches de la sécurité sociale et entre l’État et la sécurité sociale entraînés par les exonérations et diminutions de cotisations sociales.

Parmi les mesures prévues dans cet article, je retiens la modification de la destination de la taxe sur les salaires – actuellement destinée aux branches vieillesse, famille et maladie, elle ne bénéficierait plus qu’aux branches maladie et famille –, afin d’assurer la compensation de la suppression des exonérations de cotisations patronales du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE.

L’article 18 prévoit également une affectation de 6,6 % du produit de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, la CASA, au financement des établissements ou services sociaux et médico-sociaux accueillant des personnes handicapées et de 6,6 % de ce produit au financement des établissements accueillant des personnes âgées.

La part affectée à la section consacrée à la prestation d’allocation personnalisée d’autonomie passe de 70,5 % du produit de la CASA à 61,4 %, soit une baisse de 9,1 points, tandis que la part du produit de la CASA affectée aux concours versés aux départements pour les actions de prévention diminue de 4,1 points, pour s’établir à 23,9 %.

Pour 2018, l’Assemblée nationale a prolongé, à hauteur de 20 millions d’euros, la contribution de la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, à l’action conduite par l’Agence nationale de l’habitat, l’ANAH, afin d’adapter les logements à la perte d’autonomie.

La loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement prévoyait d’adapter 80 000 logements privés aux contraintes de l’âge et du handicap. Mais, entre 2015 et 2017, seuls 45 000 logements ont été adaptés, ce qui démontre la justesse des critiques que nous avons adressées au gouvernement d’alors sur le manque de moyens consacrés à la réalisation des objectifs prévus dans la loi.

Enfin, l’article 18 prévoit la revalorisation des petites retraites agricoles dans le plan 2014-2017. Cette disposition me permet de réitérer notre volonté d’une application de notre proposition de loi en faveur d’une retraite agricole minimale à 85 % du SMIC, afin de sortir les retraités agricoles de la précarité.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 18.

(Larticle 18 est adopté.)

TITRE II

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Article 18
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 19 - Amendement n° 568 rectifié

Article 19

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le dernier alinéa de l’article L. 131-7 est complété par les mots : « , et à l’exonération prévue à l’article L. 241-17 » ;

2° L’article L. 131-8 est ainsi modifié :

a) Le 1° est ainsi modifié :

– à la fin du deuxième alinéa, le taux : « 38,48 % » est remplacé par le taux : « 46,34 % » ;

– au troisième alinéa, le taux : « 48,87 % » est remplacé par le taux : « 36,09 % » ;

– à la fin du dernier alinéa, le taux : « 12,65 % » est remplacé par le taux : « 6,79 % » ;

– il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« – à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, pour une fraction correspondant à 10,78 % ; »

b) Le 3° est ainsi rétabli :

« 3° Le produit des contributions mentionnées aux 1° et 3° du I et aux II et III de l’article L. 136-8 du présent code est versé :

« a) À la Caisse nationale des allocations familiales, pour la part correspondant à un taux de 0,95 % ;

« b) Aux régimes obligatoires d’assurance maladie, en proportion des contributions sur les revenus d’activité acquittées par les personnes affiliées à chaque régime pour la contribution sur les revenus d’activité ou, pour la contribution assise sur les autres revenus, à la Caisse nationale de l’assurance maladie ou, lorsqu’un régime n’est pas intégré financièrement au sens de l’article L. 134-4, à ce même régime, dans des conditions fixées par décret et pour la part correspondant à un taux de :

« – de 5,97 % pour la contribution mentionnée au 1° du I de l’article L. 136-8 ;

« – de 7,35 % pour la contribution mentionnée au 3° du même I ;

« – de 4,65 % pour les revenus mentionnés au 1° du II du même article L. 136-8 ;

« – de 5,03 % pour les revenus mentionnés au 2° du même II ;

« – de 2,25 % pour les revenus mentionnés au III du même article L. 136-8 ;

« c) À la Caisse d’amortissement de la dette sociale instituée par l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, pour la part correspondant au taux de 0,60 %, à l’exception de la contribution mentionnée au 3° du I de l’article L. 136-8 du présent code, pour laquelle le taux est fixé à 0,30 % ;

« d) À l’organisme mentionné au premier alinéa de l’article L. 5427-1 du code du travail pour la contribution sur les revenus d’activité mentionnée au 1° du I de l’article L. 136-8 du présent code, pour la part correspondant à un taux de 1,45 % ;

« e) Au fonds mentionné à l’article L. 135-1 pour la contribution sur les revenus de remplacement mentionnée au 2° du II de l’article L. 136-8, pour la part correspondant à un taux de 1,72 % ;

« f) À la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie pour les contributions mentionnées au 1° du I de l’article L. 136-8, pour la part correspondant à un taux de 0,23 % ; »

c) Après le même 3°, sont insérés des 3° bis et 3° ter ainsi rédigés :

« 3° bis Le produit des contributions mentionnées au 2° du I de l’article L. 136-8 est versé :

« a) Au fonds mentionné à l’article L. 135-1, pour la part correspondant à un taux de 8,6 % ;

« b) À la Caisse d’amortissement de la dette sociale, pour la part correspondant à un taux de 0,60 % ;

« 3° ter Le produit de la contribution mentionnée au III de l’article L. 136-7-1 est ainsi réparti :

« a) À la branche mentionnée au 4° de l’article L. 200-2 pour 18 % ;

« b) À la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 pour 82 % ; »

d) Au 5°, les références : « L. 137-18 et L. 137-19 » sont remplacées par la référence : « et L. 137-18 » ;

3° L’article L. 135-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 135-3. – Les recettes du fonds sont constituées par une fraction du produit de la contribution sociale généralisée, dans les conditions prévues à l’article L. 131-8. » ;

4° Au deuxième alinéa du 2 de l’article L. 136-6-1, les mots : « , des prélèvements prévus à l’article 1600-0 S du code général des impôts et à l’article L. 245-14 du présent code et de la contribution additionnelle prévue à l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles » sont remplacés par les mots : « et du prélèvement prévu au 1° du I de l’article 235 ter du code général des impôts » ;

4° bis (nouveau) Après le I bis de l’article L. 136-6, il est inséré un I ter ainsi rédigé :

« I ter. – Par dérogation aux I et I bis, ne sont pas redevables de la contribution les personnes qui, par application des dispositions du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, relèvent en matière d’assurance maladie de la législation d’un autre État et qui au cours de l’année ne sont pas à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français.

« Pour l’application du premier alinéa du présent I ter aux gains mentionnés à l’article 150-0 B bis du code général des impôts et aux plus-values mentionnées au I de l’article 150-0 B ter du même code, la condition d’affiliation à un autre régime obligatoire de sécurité sociale s’apprécie à la date de réalisation de ces gains ou plus-values. » ;

4° ter (nouveau) Après le I bis de l’article L. 136-7, il est inséré un I ter ainsi rédigé :

« I ter. – Par dérogation aux I et I bis, ne sont pas redevables de la contribution les personnes qui, par application des dispositions du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, relèvent en matière d’assurance maladie de la législation d’un autre État et qui au cours de l’année ne sont pas à la charge d’un régime obligatoire de sécurité sociale français.

« L’établissement payeur mentionné au 1 du IV ne prélève pas la contribution assise sur les revenus de placement dès lors que les personnes titulaires de ces revenus justifient, selon des modalités définies par décret, des conditions définies au premier alinéa du présent I ter.

« En cas de prélèvement indu par l’établissement payeur, ce dernier peut restituer le trop-perçu à la personne concernée et régulariser l’opération sur sa déclaration ou la personne concernée peut solliciter auprès de l’administration fiscale la restitution de la contribution prélevée par l’établissement payeur.

« La contribution assise sur les plus-values mentionnées au 2° du I n’est pas due dès lors que les personnes titulaires de ces plus-values justifient, selon des modalités définies par décret, des conditions définies au premier alinéa du présent I ter. » ;

5° L’article L. 136-8 est ainsi modifié :

a) Au 2° du I, le taux : « 9,9 % » est remplacé par le taux : « 9,2 % » ;

b) Les IV, IV bis et V sont abrogés ;

c) Le 1 du VI est complété par la référence : « et à l’article L. 131-8 » ;

6° Au début du premier alinéa de l’article L. 138-21, les mots : « Les contributions et prélèvements sociaux définis aux articles L. 136-7 et L. 245-15 du présent code, au 2° de l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles pour son renvoi à l’article L. 245-15 du présent code, au 2° du I de l’article 1600-0 S » sont remplacés par les mots : « Les prélèvements définis à l’article L. 136-7 du présent code, à l’article 235 ter » ;

6° bis (nouveau) Au 9° du IV de l’article L. 241-2, la référence : « 4° du IV de l’article L. 136-8 » est remplacée par la référence : « b du 3° de l’article L. 131-8 » ;

6° ter (nouveau) Au 4° de l’article L. 241-6, les mots : « , L. 136-7-1, L. 245-14 et L. 245-15, dans les conditions fixées aux articles L. 136-8 et L. 245-16 » sont remplacés par les mots : « et L. 136-7-1, dans les conditions fixées à l’article L. 131-8 » ;

7° La section 5 du chapitre V du titre IV du livre II est abrogée.

II. – Le chapitre X du titre IV du livre Ier du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :

1° L’article L. 14-10-4 est ainsi modifié :

a) Le 2° est abrogé ;

b) Le 3° est ainsi rédigé :

« 3° Une fraction du produit de la contribution sociale généralisée, dans les conditions fixées à l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, et répartie entre les sections mentionnées à l’article L. 14-10-5 du présent code par arrêté conjoint des ministres chargés des personnes âgées, des personnes handicapées, de la sécurité sociale et du budget pris après avis du conseil mentionné à l’article L. 14-10-3 ; »

2° L’article L. 14-10-5 est ainsi modifié :

a) Le a du 1 du I est ainsi modifié :

– les mots : « des contributions visées aux 1° et 2° » sont remplacés par les mots : « de la contribution mentionnée au 1° » ;

– après la seconde occurrence de la référence : « L. 14-10-4 », sont insérés les mots : « , une fraction d’au moins 1,8 % du produit mentionné au 3° du même article L. 14-10-4 » ;

b) Le a du 2 du même I est ainsi modifié :

– les mots : « des contributions visées aux 1° et 2° » sont remplacés par les mots : « de la contribution mentionnée au 1° » ;

– après la seconde occurrence de la référence : « L. 14-10-4 », sont insérés les mots : « , une fraction d’au moins 7,1 % du produit mentionné au 3° du même article L. 14-10-4 » ;

b bis) (nouveau) Au dernier alinéa du même I, la référence : « 2° » est remplacée par la référence : « 3° » ;

c) Le a du 1° du II est ainsi modifié :

– les mots : « des contributions mentionnées aux 1° et 2° » sont remplacés par les mots : « de la contribution mentionnée au 1° » ;

– les mots : « comprise entre 74 % et 82 % » sont remplacés par les mots : « d’au moins 64,3 % » ;

d) Le a du III est ainsi modifié :

– les mots : « des contributions visées aux 1° et 2° » sont remplacés par les mots : « de la contribution mentionnée au 1° » ;

– sont ajoutés les mots : « et une fraction d’au moins 4,6 % du produit mentionné au 3° du même article L. 14-10-4. » ;

e) Au a du 1° du IV, les mots : « 4 % et 10 % » sont remplacés par les mots : « 3,3 % et 8,2 % » ;

f) Au b du même 1°, au début, les mots : « Une part de la fraction » sont remplacés par les mots : « Une part des fractions », la référence : « 2° » est remplacée par la référence : « 3° » et, à la fin, les mots : « de cette fraction » sont remplacés par les mots : « de ces fractions » ;

g) Il est ajouté un VIII ainsi rédigé :

« VIII. – Les sections mentionnées aux IV et V peuvent contribuer au financement du fonds prévu à l’article L. 1435-8 du code de la santé publique pour le soutien à des actions, des expérimentations, des dispositifs ou des structures qui participent à la prise en charge des personnes âgées et handicapées. » ;

3° (nouveau) Au deuxième alinéa du I de l’article L. 314-3, la référence : « 2° » est remplacée par la référence : « 3° ».

III. – Le livre Ier du code général des impôts est ainsi modifié :

1° La section VIII du chapitre III du titre Ier de la première partie est ainsi rétablie :

« Section VIII

« Prélèvements de solidarité sur les revenus du patrimoine et les produits de placement

« Art. 235 ter. – I. – Il est institué :

« 1° Un prélèvement de solidarité sur les revenus du patrimoine mentionnés à l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale ;

« 2° Un prélèvement de solidarité sur les produits de placement mentionnés à l’article L. 136-7 du même code.

« II. – Le prélèvement de solidarité mentionné au 1° du I du présent article est assis, contrôlé et recouvré selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que la contribution mentionnée à l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, sans qu’il soit fait application du I ter du même article L. 136-6.

« Le prélèvement de solidarité mentionné au 2° du I du présent article est assis, contrôlé et recouvré selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que la contribution mentionnée à l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, sans qu’il soit fait application du I ter du même article L. 136-7.

« III. – Le taux des prélèvements de solidarité mentionnés au I est fixé à 7,5 %. » ;

2° Les articles 1600-0 F bis et 1600-0 S sont abrogés.

IV. – Le titre III du livre VII du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Au 5° de l’article L. 731-2, le taux : « 55,77 % » est remplacé par le taux : « 53,08 % » ;

2° L’article L. 732-58 est ainsi modifié :

a) Au troisième alinéa, le taux : « 4,18 % » est remplacé par le taux : « 6,87 % » ;

b) (Supprimé)

IV bis (nouveau). – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :

1° Le premier alinéa du I de l’article 15 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les mots : « définis au I » sont remplacés par les mots : « désignés aux I et I bis » et, à la fin, les mots : « physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « redevables de la contribution prévue au même article L. 136-6 » ;

b) La seconde phrase est supprimée ;

2° La première phrase du I de l’article 16 est complétée par les mots : « et de ceux perçus par les personnes mentionnées au I ter du même article L. 136-7 ».

V. – À la fin du F du II de l’article 28 de la loi n° 2017-1775 du 28 décembre 2017 de finances rectificative pour 2017, les mots : « des prélèvements prévus à l’article 1600-0 S du code général des impôts et à l’article L. 245-15 du code de la sécurité sociale, de la contribution additionnelle prévue à l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles et, le cas échéant, de la taxe mentionnée à l’article 1609 nonies G du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « du prélèvement prévu au 2° du I l’article 235 ter du code général des impôts et, le cas échéant, de la taxe mentionnée à l’article 1609 nonies G du même code ».

VI. – Au deuxième alinéa du M du II de l’article 60 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, les mots : « , des prélèvements prévus à l’article 1600-0 S du code général des impôts et à l’article L. 245-14 du code de la sécurité sociale et de la contribution additionnelle prévue à l’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles » sont remplacés par les mots : « et du prélèvement prévu au 1° du I de l’article 235 ter du code général des impôts ».

VII. – Pour l’année 2019, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie contribue à la réforme du financement des services qui apportent au domicile des personnes âgées en perte d’autonomie et des personnes handicapées une assistance dans les actes quotidiens de la vie dans la limite de 50 millions d’euros prélevés sur ses ressources et dans des conditions définies par voie réglementaire. La section mentionnée au IV de l’article L. 14-10-5 du code de l’action sociale et des familles retrace cette somme en charges.

VIII. – La part des contributions à la charge de l’employeur dues au titre des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires mentionnés à l’article L. 921-4 du code de la sécurité sociale, donnant lieu à la réduction prévue à l’article L. 241-13 du même code, fait l’objet d’une prise en charge par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale pour les montants correspondant au niveau de la réduction sur les cotisations recouvrées.

Les montants correspondant à cette prise en charge sont versés aux régimes mentionnés à l’article L. 921-4 dudit code après transmission par ces derniers des justificatifs nécessaires à leur établissement.

La branche mentionnée au 3° de l’article L. 200-2 du même code assure l’équilibre financier de l’agence au titre de cette mission.

IX. – En 2019, les contributions mentionnées au 1° de l’article L. 5422-9 du code du travail, donnant lieu à la réduction prévue à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, font l’objet d’une prise en charge par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale pour les montants correspondant au niveau de la réduction sur les cotisations recouvrées.

L’Agence centrale des organismes de sécurité sociale assure la notification et le versement des contributions encaissées à l’organisme mentionné au premier alinéa de l’article L. 5427-1 du code du travail, sans tenir compte de la part de la réduction imputée sur celles-ci.

La prise en charge de la part exonérée des cotisations recouvrées en application des abde et f du même article L. 5427-1 et par l’organisme mentionné à l’article L. 133-9 du code de la sécurité sociale est centralisée, sur la base des informations transmises par les organismes chargés du recouvrement de ces contributions, par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, qui reverse les montants et notifie les produits correspondants à l’organisme mentionné au premier alinéa de l’article L. 5427-1 du code du travail.

Les branches mentionnées à l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale assurent l’équilibre financier de l’agence au titre de cette mission, selon une répartition fixée par arrêté des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale en fonction des soldes prévisionnels des branches.

X. – Le III de l’article 9 de la loi n° 2017-1836 de financement de la sécurité sociale pour 2018 est abrogé.

XI. – Lorsque le plafond prévu au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 mentionné au c de l’article 1001 du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … de finances pour 2019, n’est pas atteint, l’affectation prévue au même c est complétée au titre des années 2019 à 2021, dans la limite de ce plafond, par un prélèvement sur la fraction définie au b du même article 1001.

XII. – Les dispositions des I à VI, VIII et IX du présent article s’appliquent :

1° Sous les réserves et dans les conditions définies aux 2° à 4°, aux faits générateurs intervenant à compter du 1er janvier 2019 ;

2° À compter de l’imposition des revenus de l’année 2018 pour les prélèvements assis sur les revenus mentionnés à l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, sous réserve du II de l’article 34 de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016 ;

3° À compter de l’imposition des revenus de l’année 2019 pour le prélèvement prévu à l’article L. 136-6-1 du code de la sécurité sociale ;

4° Aux produits acquis ou constatés à compter du 1er janvier 2019 pour les prélèvements assis sur les produits visés aux C et D du V de l’article 8 de la loi n° 2017-1836 de financement de la sécurité sociale pour 2018.

XIII. – Les plus-values mentionnées au I de l’article 150-0 B ter du code général des impôts résultant d’opérations d’apports réalisées à compter du 1er janvier 2019 sont soumises aux contributions mentionnées à l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale et à l’article 15 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale et au prélèvement prévu au 1° du I de l’article 235 ter du code général des impôts selon leur taux en vigueur l’année de réalisation de ces plus-values.

XIV. – À compter du 1er janvier 2020, l’article L. 131-8 code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le 1° est ainsi modifié :

a) À la fin du deuxième alinéa, le taux : « 46,34 % » est remplacé par le taux : « 53,10 % » ;

b) À la fin du troisième alinéa, le taux : « 36,09 % » est remplacé par le taux : « 19,35 % » ;

c) À la fin de l’avant-dernier quatrième alinéa, le taux : « 6,79 % » est remplacé par le taux : « 16,77 % » ;

2° Le 3° est ainsi modifié :

a) Le b est ainsi modifié :

– au deuxième alinéa, le taux : « 5,97 % » est remplacé par le taux : « 5,86 % » ;

– au quatrième alinéa, le taux : « 4,65 % » est remplacé par le taux : « 4,54 % » ;

– à l’avant-dernier alinéa, le taux : « 5,03 % » est remplacé par le taux : « 4,87 % » ;

– au dernier alinéa, le taux : « 2,25 % » est remplacé par le taux : « 2,14 % » ;

b) Au c le taux : « 0,60 % » est remplacé par le taux : « 0,71 % » ;

c) Au e, le taux : « 1,72 % » est remplacé par le taux : « 1,77 % » ;

3° Le 3° bis est ainsi modifié :

a) À la fin du a, le taux : « 8,6 % » est remplacé par le taux : « 8,49 % » ;

b) À la fin du b, le taux : « 0,60 % » est remplacé par le taux : « 0,71 % ».

XV. – À compter du 1er janvier 2021, l’article L. 131-8 code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le 1° est ainsi modifié :

a) À la fin du deuxième alinéa, le taux : « 53,10 % » est remplacé par le taux : « 52,53 % » ;

b) À la fin du troisième alinéa, le taux : « 19,35 % » est remplacé par le taux : « 12,18 % » ;

c) À la fin de l’avant-dernier alinéa, le taux : « 16,77 % » est remplacé par le taux : « 24,51 % » ;

2° Le 3° est ainsi modifié :

a) Le b est ainsi modifié :

– au deuxième alinéa, le taux : « 5,86 % » est remplacé par le taux : « 5,74 % » ;

– au quatrième alinéa, le taux : « 4,54 % » est remplacé par le taux : « 4,42 % » ;

– à l’avant-dernier alinéa, le taux : « 4,87 % » est remplacé par le taux : « 4,69 % » ;

– au dernier alinéa, le taux : « 2,14 % » est remplacé par le taux : « 2,02 % » ;

b) Au c le taux : « 0,71 % » est remplacé par le taux : « 0,83 % » ;

c) Au e, le taux : « 1,77 % » est remplacé par le taux : « 1,83 % » ;

3° Le 3° bis est ainsi modifié :

a) À la fin du a, le taux : « 8,49 % » est remplacé par le taux : « 8,37 % » ;

b) À la fin du b, le taux : « 0,71 % » est remplacé par le taux : « 0,83 % ».

XVI. – À compter du 1er janvier 2022, l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le 1° est ainsi modifié :

a) À la fin du deuxième alinéa, le taux : « 52,53 % » est remplacé par le taux : « 52,30 % » ;

b) À la fin du troisième alinéa, le taux : « 12,18 % » est remplacé par le taux : « 8,93 % » ;

c) À la fin de l’avant-dernier alinéa, le taux : « 24,51 % » est remplacé par le taux : « 27,99 % » ;

2° Le 3° est ainsi modifié :

a) Le b est ainsi modifié :

– au deuxième alinéa, le taux : « 5,74 % » est remplacé par le taux : « 5,64 % » ;

– au quatrième alinéa, le taux : « 4,42 % » est remplacé par le taux : « 4,32 % » ;

– à l’avant-dernier alinéa, le taux : « 4,69 % » est remplacé par le taux : « 4,54 % » ;

– au dernier alinéa, le taux : « 2,02 % » est remplacé par le taux : « 1,92 % » ;

b) Au c, le taux : « 0,83 % » est remplacé par le taux : « 0,93 % » ;

c) Au e, le taux : « 1,83 % » est remplacé par le taux : « 1,88 % » ;

3° Le 3° bis est ainsi modifié :

a) À la fin du a, le taux : « 8,37 % » est remplacé par le taux : « 8,27 % » ;

b) À la fin du b, le taux : « 0,83 % » est remplacé par le taux : « 0,93 % ».

XVII (nouveau). – A. – Les articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction résultant de la présente loi, s’appliquent à compter de l’imposition des revenus de l’année 2018 en tant qu’ils concernent la contribution mentionnée à l’article L. 136-6 du même code, sous réserve du B du présent XVII, et aux faits générateurs d’imposition intervenant à compter du 1er janvier 2019 en tant qu’ils concernent la contribution mentionnée à l’article L. 136-7 dudit code.

B. – Les articles L. 136-6 et L. 136-7 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction résultant de la présente loi, s’appliquent aux gains et plus-values placés en report d’imposition à compter du 1er janvier 2018.

Par dérogation à l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, les exonérations prévues au I ter des articles L. 136-6 et L. 136-7 du même code ne donnent pas lieu à compensation à la sécurité sociale.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, sur l’article.

M. Bernard Jomier. Nous sommes tous satisfaits de l’évolution du déficit de l’assurance maladie : de 900 millions d’euros en 2018, il devrait s’établir à 500 millions d’euros en 2019, avec une perspective de retour à l’équilibre, à partir de 2020, puis d’excédent.

Cette embellie cache toutefois des fragilités sérieuses.

Premièrement, les perspectives de retour à l’équilibre sont en fait très corrélées à la conjoncture et, si l’activité économique se révélait, dans les années à venir, moins favorable que prévu, le risque qu’une dette sociale ne se reconstitue serait important.

Deuxièmement, si la situation s’améliore, c’est en réalité au prix de contraintes importantes qui pèsent sur les hôpitaux, dont le déficit s’est dramatiquement creusé – il s’élevait à 900 millions d’euros l’année dernière et atteindra probablement entre 1,3 milliard et 1,5 milliard d’euros cette année.

D’ailleurs, l’Académie de médecine, dans un avis exprimé à la fin du mois d’octobre, qualifie la hausse de l’ONDAM, l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, de « faux-semblant » et dénonce un jeu de vases communicants qui ne fait que transférer du déficit de la sécurité sociale vers des hôpitaux déjà en grande tension.

Par ailleurs, la fragilité de la situation financière de l’assurance maladie et la soutenabilité sur le long terme de notre système de santé sont de plus en plus préoccupantes, au regard de la transition épidémiologique, qui conjugue un accroissement des maladies chroniques avec le vieillissement de la population.

Je veux attirer l’attention sur le fait que nous ne répondrons pas à l’enjeu tendanciel de la hausse des dépenses sans réformes structurelles. Deux d’entre elles sont particulièrement absentes du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La première est la prévention et l’éducation à la santé. L’année dernière, le PLFSS comprenait des mesures sur la vaccination, la hausse de la fiscalité sur le tabac, ou encore le dépistage, mesures que nous avons toutes soutenues. En revanche, le PLFSS pour 2019 en est dépourvu. Et nous sommes toujours dans l’attente de mesures fortes sur les enjeux de santé environnementale, dont nous savons l’importance qu’ils sont en train de prendre.

La seconde réforme, celle du système de soins en faveur d’une prise en charge plus adaptée à la transition épidémiologique, de la réorganisation de l’hôpital, d’un renforcement des complémentarités entre médecine hospitalière et médecine de ville et d’une réflexion sur les parcours, qui figurait parmi les engagements que le Président de la République a affirmés au mois de septembre dernier et que nous approuvons, ne peut se passer d’investissements dédiés. Or le présent PLFSS en est très clairement dépourvu.

Monsieur le ministre, comment afficher un retour au vert des comptes de la sécurité sociale et transférer les excédents vers le budget de l’État quand l’hôpital va aussi mal et quand les réformes nécessaires pour transformer nos systèmes de santé exigent des investissements qui ne sont pas au rendez-vous ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny, sur l’article.

M. Yves Daudigny. Au-delà des mouvements financiers, l’article 19 pose deux questions. Quelle protection sociale pour le XXIe siècle ? Quel nouveau paradigme pour la sécurité sociale ?

Quatre décisions concourent, à mon sens, à une perte d’autonomie financière et décisionnelle de la sécurité sociale : la désindexation, la non-compensation des pertes de recettes, le remplacement de cotisations sociales par la CSG et la nouvelle trajectoire tracée pour les années 2020 à 2022.

Il est vrai que cette autonomie n’est aujourd’hui que relative : si nous recevons bien le président de la CNAV ou celui de la CAF, lorsque nous auditionnons la CNAM, c’est le directeur général qui est notre interlocuteur.

Par ailleurs, l’ONDAM fixe un cadre financier et la négociation conventionnelle entre la CNAM et les organisations professionnelles établit les règles de fonctionnement de la médecine de ville, mais les dispositions prévues pour 2019 me semblent aller beaucoup plus loin. Elles dessinent une double évolution : une interpénétration financière quasi totale, avec une fongibilité entre les comptes de l’État et ceux de la sécurité sociale, et une transformation de la sécurité sociale en une sorte de service public national de protection sociale comme, par exemple, l’éducation nationale ou la défense – je caricature exprès pour bien me faire comprendre –, qui serait régi par les décisions annuelles du budget de l’État, le budget de la sécurité sociale devenant, comme les autres budgets, une variable d’ajustement.

Vous le savez tous, mes chers collègues, la sécurité sociale, c’est une histoire et une autre ambition. C’est la volonté d’apporter une réponse de qualité aux accidents de la vie, dont le plus menaçant est, certainement, la maladie. C’est la volonté de construire cette réponse sur des critères qui ne sont pas seulement financiers, tels que l’efficacité, l’attente des patients, ou encore les progrès scientifiques.

La sécurité sociale n’a pas seulement pour objet de répondre aux besoins des plus démunis. Nous sommes en phase avec Mme la ministre des solidarités et de la santé, qui insiste régulièrement sur l’évolution des minima sociaux, mais la sécurité sociale a une ambition beaucoup plus vaste. Elle est aujourd’hui le ciment de notre cohésion sociale, et l’avenir de notre démocratie serait en grand danger s’il y était porté atteinte.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, sur l’article.

M. Jean-Noël Cardoux. En complément des propos que vient de tenir Yves Daudigny, je veux citer certains chiffres : en 2019, les recettes de la sécurité sociale seront assurées à hauteur de 52 % par des cotisations et de 45 % par des recettes fiscales, en particulier la CSG.

Le régime assurantiel, qui implique que l’on ait cotisé pour bénéficier de prestations, se dirige donc à grande vitesse vers un régime universel, dans lequel les recettes de la sécurité sociale seront assurées par des dispositions fiscales. C’est un glissement insidieux auquel nous assistons.

J’en prends pour preuve deux éléments ponctuels – on pourrait en citer d’autres : la volonté du Gouvernement de ne pas baisser les cotisations de l’assurance accidents du travail-maladies professionnelles, alors que les efforts de prévention sensibles ont fait diminuer les prestations, et la réforme en cours de l’assurance chômage. Pour ce qui concerne cette dernière, il a été clairement affiché que ce serait quasiment la fin du paritarisme et que les recettes de l’assurance chômage seraient assurées par la fiscalité. Voilà où nous en sommes.

Jusqu’à présent, les parlementaires pouvaient déceler cette évolution insidieuse dans les positions du Gouvernement, mais elle n’était pas clairement assumée.

Or, avant-hier, nous vous avons entendu dire ici même, monsieur le ministre, que le modèle de 1945 et le principe de base de la sécurité sociale, à savoir la cotisation en fonction des ressources et la perception de prestations en fonction des besoins, étaient totalement dépassés. Surtout, vous avez déclaré que nous allions passer d’un régime assurantiel à un régime universel. Telle est la feuille de route que vous nous adressez désormais et que vous assumez pleinement.

J’estime que, compte tenu de cette évolution, qui devient désormais à peu près claire, nous ne pouvons pas nous contenter de débats fragmentaires à l’occasion de l’examen de tel ou tel texte de loi. Il faut que ce changement de modèle de société, qui, me semble-t-il, conduira à une irresponsabilité accrue de nos citoyens, soit débattu par le Parlement et fasse l’objet d’une réflexion dans le cadre de la réforme constitutionnelle. (M. Michel Savin applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, sur l’article.

M. René-Paul Savary. Effectivement, nous assistons à une évolution de notre modèle social.

Celui-ci doit évidemment être transformé et adapté au XXIe siècle. Il n’empêche qu’il faut peut-être en conserver certains fondamentaux et certaines bases.

L’évolution est insidieuse ; elle a commencé voilà déjà un certain nombre d’années. Je rappelle que l’accord national interprofessionnel, l’ANI, la création des réseaux de soins ou même le CICE ont contribué à la transformation de notre modèle, en faisant reposer le financement sur l’impôt plus que sur les cotisations.

L’évolution du financement pose le problème de la solidarité en France. Or, monsieur le ministre, vous n’envoyez pas un bon signe aujourd’hui en remettant en cause l’examen différencié entre le PLFSS et le PLF et en annonçant, pour demain, un schéma tout à fait nouveau, dont découlerait, pour l’examen des dépenses sociales, sanitaires et médico-sociales, une vision beaucoup plus tournée vers les recettes, avec une mainmise de Bercy bien plus que du ministère des solidarités et de la santé !

Certes, notre modèle social mérite d’être changé – nous ne l’avons jamais nié. Cependant, les dispositions qui vont être prises montrent que cette évolution est inéluctable.

La réforme systémique des retraites en est un exemple : le système actuel, dans lequel les cotisations correspondent à des prestations, deviendra, demain, un système à cotisations définies. Celui-ci impliquera une universalité, mais il faudra, dans ce nouveau modèle de financement, repenser la solidarité.

Cette évolution est peut-être inéluctable. Quoi qu’il en soit, elle mérite d’être considérée sous un angle différent de celui que vous nous proposez aujourd’hui.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Dériot, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles. Je veux insister, en tant que rapporteur de la branche AT-MP, ou accidents du travail-maladies professionnelles, sur le siphonnage de cette branche au bénéfice de l’assurance maladie, que Jean-Noël Cardoux vient d’évoquer.

Cette méthode est tout à fait inadmissible. Si elle existe depuis un certain nombre d’années, elle atteint désormais son paroxysme.

Bien sûr, l’argument de la sous-déclaration des accidents du travail peut se justifier, mais l’estimation de ce phénomène doit garder des proportions limitées. Or nous en sommes aujourd’hui à transférer 1 milliard d’euros de la branche accidents du travail-maladies professionnelles à la branche maladie ! C’est inacceptable, puisque, au final, ce sont les cotisations des entreprises qui permettent d’équilibrer le pseudo-excédent de la branche maladie de la sécurité sociale.

M. le rapporteur général a rappelé la formule que les services de Bercy ont inventée pour essayer de calculer au mieux les cotisations des indépendants. Cela prouve bien qu’il est possible de trouver des solutions ! Pour ma part, je fais tout à fait confiance aux services de Bercy pour inventer une formule compréhensible. Pour le moment, c’est une simple commission qui se réunit tous les trois ans pour décider au doigt mouillé d’une fourchette de transfert, comprise entre 700 000 ou 800 000 euros et 1,5 milliard d’euros. Avouez tout de même, monsieur le ministre, que ces écarts sont tout à fait incompréhensibles !

Les pratiques actuelles doivent être encadrées et leur ampleur revue à la baisse, puisque ce sont finalement les entreprises elles-mêmes qui assurent un léger excédent à l’assurance maladie. Tant mieux pour celle-ci, mais ce n’est pas tout à fait normal !

Il faut vraiment faire quelque chose. On ne saurait continuer ainsi ! (M. Michel Savin applaudit.)

MM. Antoine Lefèvre et Bruno Sido. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, sur l’article.

M. Olivier Henno. Voilà un débat intéressant. Ce débat n’est, à mon sens, ni technique ni financier : il est véritablement politique et philosophique.

Si l’on fait preuve d’honnêteté intellectuelle, force est de reconnaître qu’il ne date pas d’aujourd’hui. Je rappelle qu’il fut un temps, pas si lointain, où le Parlement ne discutait même pas du budget de la sécurité sociale : c’était le rôle des seuls partenaires sociaux.

Il est évident que nous avons avancé sur cette question à petits pas, sans véritable débat national. C’est d’ailleurs si vrai que l’on parle souvent, aujourd’hui, de « tuyauterie » du PLFSS.

Les chiffres de la répartition à parts presque égales entre la logique assurantielle et celle de la solidarité universelle financée par l’impôt qui ont été avancés tout à l’heure démontrent que nous sommes arrivés au bout de la méthode consistant à avancer à petits pas.

Je ne me résous pas à cette inéluctabilité, parce que je suis attaché au dialogue social, au paritarisme et aux corps intermédiaires. Au point où on en est, et au-delà des débats propres au projet de loi de financement de la sécurité sociale, cette question mérite un vrai et grand débat national. À titre personnel, ma religion n’est pas totalement faite sur le sujet. En tout état de cause, il faut un grand débat national pour donner un cap au pays sur cette problématique.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Amiel, sur l’article.

M. Michel Amiel. Le sujet est d’importance et, comme vient de le dire M. Henno, on est en droit de se poser la question de savoir si l’on peut répondre à une telle question au détour de l’examen d’un article de texte législatif, fût-ce le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il faudrait évidemment conduire une réflexion globale et dédiée.

Il s’agit en fait de choisir le modèle de sécurité sociale que l’on veut : préfère-t-on un système paritaire fondé pour l’essentiel sur des cotisations ou un système étatique reposant sur la fiscalité, avec pour corollaire, sans doute, la fusion annoncée entre projet de loi de finances et projet de loi de financement de la sécurité sociale, au moins en matière de recettes ?

Cette dialectique entre cotisations et fiscalité est certainement au cœur du problème, du moins en matière financière. Mais, au-delà de ce sujet, se profile bien sûr la question du système de santé que nous voulons véritablement : système assurantiel ou système étatique ?

Certes, les choses ont changé, puisque nous ne sommes plus en 1946 au moment où la sécurité sociale a été créée par Ambroise Croizat mais, de toute façon, sans même évoquer les aspects techniques, l’État intervient aujourd’hui très massivement dans le champ de la sécurité sociale. Par exemple, l’ONDAM, dont certains dénoncent la dictature (M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales, et M. Martin Lévrier sourient.), est-il le bon outil ? Sinon, par quoi le remplacer ?

En même temps, si l’on regarde en détail le nombre d’actes inutiles ou redondants, qui seraient à hauteur de 20 % – je parle de la branche maladie – selon des chiffres de l’OCDE, on est en droit de se dire qu’il existe un véritable gisement d’économies. Encore faudrait-il amorcer des réformes de structure. Certaines me paraissent déjà engagées ; je pense en particulier, puisque j’évoque les actes inutiles ou redondants, au dossier médical partagé, le fameux DMP, vieux serpent de mer dont on commence à voir l’ébauche.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.

Mme Laurence Cohen. Je suis très intéressée par les interventions de mes collègues, parce qu’elles posent de nouveau la question que nous avions soulevée au travers de notre motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité. Je suis satisfaite d’entendre un certain nombre de choses, et je ne comprends pas pourquoi nos collègues n’ont pas voté notre motion et nos amendements. On touche là aux contradictions de chacun et de chacune.

Finalement, l’article 19 polarise le débat sur ce que doit être notre conception du système de protection sociale.

Il prévoit bien les différents transferts entre la sécurité sociale et l’État pour tirer les conséquences des multiples exonérations et abaissements de cotisations sociales patronales que nous n’avons pas cessé de dénoncer.

Par exemple, il prévoit la perte de 22,6 milliards d’euros pour la branche maladie du régime général, qui est compensée par l’État via le transfert d’une partie des recettes de la TVA. Quand on sait que la TVA est l’impôt le plus injuste pour nos concitoyennes et nos concitoyens, le transfert de ses recettes vers la sécurité sociale est un moyen supplémentaire de justifier le maintien de taxes, sous prétexte qu’elles sont indispensables, notamment au financement des hôpitaux.

Surtout, l’article 19 met fin au principe de compensation intégrale des exonérations de cotisations patronales par l’État. Sur les 38,4 milliards d’euros d’exonérations et d’abaissements de cotisations, seuls 36,3 milliards d’euros seront compensés. Donc 2,1 milliards d’euros ne seront pas compensés en 2019. Alors, en définitive, qui va payer la différence ? Ce sont les assurés eux-mêmes !

Cet article prolonge les politiques de l’État qui ont été mises en œuvre – il faut quand même le dire – avec les précédentes lois de financement de la sécurité sociale, et qui aboutissent progressivement à confondre le budget de la sécurité sociale avec celui de l’État. Je pense à la fiscalisation des recettes de la sécurité sociale avec la suppression des cotisations sociales et le financement par l’impôt, la non-compensation des pertes de la sécurité sociale par l’État, et l’affectation des excédents de la sécurité sociale au budget de l’État.

Je l’ai déjà dit, il s’agit finalement d’une manne assez extraordinaire que la santé. En fait, on s’aperçoit qu’il s’agit d’un budget de sous-financement qui porte un coup terrible à notre modèle social et au service public, d’une manière générale.

Monsieur le ministre, vous demandez plus à ceux qui ont moins. Les exonérations pleuvent au nom de l’emploi, alors que chacun sait qu’elles ont prouvé leur inefficacité en la matière. Je rappelle avec force que la sécurité sociale doit garantir à chacune et à chacun le même niveau élevé de droits. Ce n’est pas ce que vous proposez avec le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Après toutes ces prises de parole, je vous confirme que l’article 19, qui fait suite au rapport de MM. Charpy-Dubertret, est effectivement un article important.

Mme la ministre des solidarités et de la santé et moi-même avons déjà dit un mot sur le sujet lors de la discussion générale. Nous en avons également parlé au moment de l’examen de l’article 4, me semble-t-il.

Je me propose donc de répondre aux questions de principe, qui sont importantes, avant de m’exprimer peut-être plus rapidement sur les amendements qui visent à corriger, voire à supprimer les principes que le Gouvernement défend.

Plusieurs points ont été abordés. Il s’agit évidemment d’un débat – je rejoins en cela le sénateur Henno – très politique, mais c’est aussi, on ne peut pas l’oublier, un débat technique. Nous aurons d’ailleurs l’occasion de le démontrer tout à l’heure lorsque nous aborderons la discussion d’un certain nombre de dispositions.

D’abord, je veux vous rassurer, monsieur le sénateur Savary : je vous ai donné, non pas mon avis personnel, mais l’avis d’un homme politique, ce que vous êtes également.

Il est quand même assez étonnant qu’un débat public puisse avoir lieu à la fois sur le déficit, la dette publique, le taux des prélèvements obligatoires et le taux des dépenses publiques de notre pays, et que l’on me conteste le droit de raisonner sur 50 % de ces dépenses publiques – ce sont les dépenses de santé, qui font l’objet de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale – « toutes administrations publiques confondues ». (M. René-Paul Savary fait la moue.)

C’est pourtant ainsi que le rapporteur général de la commission des finances raisonne ; c’est ainsi que les candidats aux élections raisonnent ; c’est ainsi que la presse raisonne ; c’est ainsi que la Cour des comptes raisonne aussi. C’est également sur le fondement des dépenses « toutes administrations publiques confondues » que la politique du Gouvernement est jugée par la Commission européenne ou l’opinion publique.

Monsieur le sénateur, vous avez parlé de Bercy. Il me semble contradictoire de considérer que Bercy, qui est un peu le bouc émissaire moderne, serait le ministère devant régler tous les problèmes, celui du déficit, celui de la dette, ceux de la dépense publique et du taux des prélèvements obligatoires, tout en me contestant le droit de toucher à 50 % des dépenses publiques.

Ce sont en effet les mêmes (M. le ministre se tourne vers la droite de lhémicycle) qui me demandent à chaque fois de dépenser moins, de baisser les prélèvements obligatoires, de diminuer plus rapidement le déficit ou la dette, et qui me disent aujourd’hui que je n’ai pas le droit de toucher à 50 % de l’ensemble, parce qu’il s’agirait du champ de la sécurité sociale. (M. René-Paul Savary fait un geste de dénégation.)

Chacun doit en avoir conscience : sur les 100 % de dépenses publiques toutes administrations publiques confondues, on attribue 20 % des dépenses aux collectivités locales, 30 % à l’État, voire même un tout petit peu moins, et un peu plus de 50 % à la sécurité sociale.

Un ministre du budget qui ne serait pas ministre des comptes publics ne pourrait utiliser que 30 % des crédits publics, sachant en outre que vous nous demandez en ce moment même de ne pas toucher aux collectivités locales, opinion que je peux partager et que le Gouvernement dans son ensemble partage d’ailleurs, puisqu’aucune économie ne sera faite aux dépens des collectivités locales. Il ne resterait donc plus que 30 % des crédits pour atteindre les objectifs politiques que vous nous demandez d’atteindre.

J’ajoute que l’État a déjà fait énormément d’efforts. S’il peut encore en faire quelques-uns, je vous l’accorde, c’est bien entendu sur les 50 % de dépenses publiques dont nous débattons aujourd’hui.

Affirmer cela, ce n’est pas nier l’autonomie de la sécurité sociale, ce n’est pas nier le paritarisme. C’est simplement dire que l’on ne peut pas baisser la dépense publique, les prélèvements obligatoires, le déficit ou la dette si l’on ne parle pas également de ce que l’on peut économiser dans le champ de la sécurité sociale au sens large.

La moitié de ces 50 % de dépenses publiques est dévolue aux retraites. Par conséquent, si l’on veut diminuer les dépenses publiques ou changer de paradigme en matière de comptes publics, il faut proposer une réforme des retraites.

Certains ont proposé une réforme de bon gré, comme le président Chirac. D’autres l’ont fait contre leur gré : je rappelle que le président Sarkozy n’avait pas prévu la réforme des retraites qu’il a finalement déposée sur le bureau des assemblées, et qui a fait reculer l’âge légal de départ à la retraite. Il l’a fait parce qu’il fallait réaliser des économies.

C’est aussi le cas du président Hollande qui se refusait à mener une telle réforme et qui a finalement dû se résoudre à augmenter le montant des cotisations, confronté qu’il était au paradigme des comptes publics dont je vous parle. C’est enfin le cas du président Macron, qui a mis de côté la réforme de l’âge de départ à la retraite pour mettre en avant un système de retraite par points.

En vérité, la question de la dépense publique, du déficit public et du taux des prélèvements obligatoires relève aussi évidemment du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Ce que j’évoque, monsieur le sénateur, ce n’est pas la fusion des textes budgétaires, puisque le conseil des ministres ne l’a pas décidé et que ce n’est pas non plus ce que propose le Gouvernement dans le cadre de la future révision constitutionnelle. Ce que je veux dire – et je ne suis pas le premier à le faire, car on en débat depuis très longtemps déjà –, c’est que l’on pourrait peut-être avoir une discussion commune sur les recettes, avant d’aborder des questions différentes en matière de dépenses.

Le volet des dépenses est le second point que je veux évoquer : oui, le Gouvernement a toujours dit qu’il souhaitait passer progressivement d’un système assurantiel à un système universel. De ce point de vue, nous avons sans doute des opinions différentes, notamment avec le côté gauche de l’hémicycle.

En tout cas, l’important est non pas la fusion entre projet de loi de financement de la sécurité sociale et projet de loi de finances ou la fusion entre sécurité sociale et budget de l’État, mais de savoir comment on peut financer la solidarité sociale. Et ce n’est pas très grave de la financer par l’impôt plutôt que par les cotisations !

Mme Laurence Cohen. Mais si, c’est grave !

M. Gérald Darmanin, ministre. Non, ce n’est pas ce que nous pensons.

Mme Laurence Cohen. Oui, je l’avais remarqué !

M. Gérald Darmanin, ministre. Nous considérons, sans porter de jugement de valeur sur le système de l’époque, que le système a changé depuis 1945. Il n’y a plus le même rapport entre le nombre d’actifs et le nombre de retraités. Le montant des pensions a évolué. L’espérance de vie a augmenté. La pénibilité du travail a changé. Le taux de croissance ou le taux de chômage ne sont plus les mêmes non plus.

Aujourd’hui, vous connaissez bien le problème : il y a de moins en moins de personnes qui cotisent par rapport aux personnes à la retraite.

Il y a aussi la question de l’assurance maladie. À ce propos, je veux bien tout entendre et, de ce point de vue, je dois reconnaître que le groupe CRCE est particulièrement cohérent, mais je signale tout de même aux sénateurs du groupe Les Républicains qu’ils ont déposé une vingtaine d’amendements pour proposer des exonérations de charges.

Soit on considère que l’impôt peut effectivement contribuer à faire baisser le coût du travail via des exonérations de charges – c’est ce que nous défendons et c’est pourquoi nous proposons la transformation du CICE en allégements de charges –, soit on estime que les cotisations assurantielles doivent continuer d’être le mode de financement du système, mais, dans ce cas-là, on ne doit pas déposer vingt-trois amendements visant à créer des exonérations de charges !

M. Bruno Sido. Bien sûr !

M. Gérald Darmanin, ministre. Sinon, on risque de rencontrer un petit problème en termes de financement ! Il faut rester cohérent et, pour le coup, je reconnais bien volontiers de nouveau que le groupe CRCE est le plus cohérent de tous à propos des modalités de financement des dépenses sociales.

Qu’entend-on par dépenses sociales ? Il s’agit bien sûr des dépenses de la sécurité sociale, mais il ne s’agit pas que de cela : la prime d’activité est aussi une dépense sociale, même si elle relève des crédits de l’État ! Quand on dédouble les classes de CP et CE1 dans les quartiers prioritaires et, demain, dans les zones rurales – vous êtes les premiers à dire qu’il s’agit de dépenses sociales –, on agit en direction de personnes qui ont des difficultés sociales. Or il s’agit là encore de crédits de l’État !

Monsieur le sénateur, vous disiez que l’essentiel de notre système serait financé demain par les charges patronales. Mais enfin, si ces charges patronales, les masses salariales grâce auxquelles on collecte des cotisations ou la CSG existent, c’est bien parce que l’on a encouragé le travail et l’entreprise en supprimant des impôts d’État !

Nous avons baissé l’impôt sur les sociétés : cela nous permet de récupérer davantage d’impôts sociaux. Quand nous décidons de supprimer l’ISF – c’est aussi un point sur lequel on pourrait débattre, mais je ne veux pas le faire aujourd’hui –, nous pensons que cette mesure peut aider les PME, les ETI et les grandes entreprises à embaucher davantage et donc à accroître les recettes. Ne faisons pas semblant de croire que ce que fait l’État d’un côté, en diminuant sa fiscalité et en creusant son propre déficit, ne permet pas à la sécurité sociale, de l’autre, de percevoir davantage de recettes. Ce serait une contre-vérité que de ne pas le reconnaître.

La question à se poser à ce stade n’est pas de savoir comment on répartit la manne des enfants d’Israël se levant le matin. On est bien d’accord sur le fait que beaucoup d’efforts ont été faits précédemment pour parvenir aux 700 millions d’euros d’excédents de la sécurité sociale aujourd’hui.

Il faut le dire : on doit ce résultat aux réformes des retraites, d’abord la réforme Woerth, puis la réforme menée lors du précédent quinquennat, lesquelles ont permis de récupérer davantage de cotisations. On le doit aussi à l’hôpital public, qui a fait des efforts très importants, notamment ses personnels de santé. On le doit peut-être aussi à une bonne gestion plus générale du système et, avouons-le également, à l’augmentation de la CSG.

Après tout, tout le monde nous reproche aujourd’hui de ne pas avoir décalé la hausse de la CSG et des cotisations l’an dernier, mais cela a permis d’encaisser des recettes supplémentaires, même si elles sont en partie destinées à l’État !

L’ensemble des gouvernements ont pris des mesures courageuses, parfois impopulaires, qui n’étaient pas toujours prévues dans le programme du Président de la République de l’époque, mais qui ont permis de parvenir au résultat que nous observons aujourd’hui.

Il existe un léger excédent, mais une dette sociale importante, qui s’élève encore à 126 milliards d’euros, persiste aussi. Par ailleurs, nous avons une dette publique très élevée que, du fait de l’évolution des taux d’intérêt, nous devons essayer de réguler de façon notable.

Ce que propose le Gouvernement, à la suite de la remise du rapport de MM. Charpy et Dubertret, c’est de garantir une solidarité, mais une solidarité qui ne nie pas la nécessaire extinction de la dette sociale. Surtout, la question – des sénateurs de tous bords ont posé – est de savoir comment on peut faire pour garantir la protection sociale de demain, notamment et, indépendamment de ce que nous connaissons aujourd’hui, la dépendance, sujet sur lequel Mme la ministre travaille beaucoup.

Nous savons que nous avons l’obligation juridique d’affecter des impôts sociaux au champ social, et nous le ferons. Nous devons aussi éteindre cette dette sociale de 126 milliards d’euros : c’est pourquoi il faut continuer à faire des efforts et pas simplement reporter les réformes.

Alors, l’ONDAM est-il le bon instrument de mesure ? Je ne suis pas assez qualifié pour répondre à cette question. En tout cas, il faut bien que l’on en ait un. On peut toujours casser le thermomètre pour déclarer que l’on n’a pas de fièvre, mais la vérité, c’est que l’on dispose d’un instrument de mesure. Vous savez bien que la différence fondamentale est celle qui sépare l’ONDAM de ville et l’ONDAM de l’hôpital, sujet essentiel sur lequel Mme la ministre travaille beaucoup là encore.

Comment prendre en compte les besoins des professionnels de santé et ceux de la population tout en régulant les dépenses publiques ? Cette problématique est évidemment importante.

Pour en terminer et répondre ainsi à M. le sénateur Henno, je dirai que le débat n’est pas tant de connaître les tuyauteries du système, de savoir qui de l’État ou de la sécurité sociale le finance, ou de savoir si celui-ci est plutôt universel ou assurantiel, mais, à partir du moment où l’on sait aujourd’hui que la sécurité sociale va conserver son autonomie et que les comptes de celle-ci deviennent excédentaires, de réfléchir aux enjeux à venir en matière de protection sociale, et de trouver la meilleure manière de refaire 1945 en 2019, si je peux m’exprimer ainsi.

L’un des enjeux les plus importants dans le futur est sans doute celui de la dépendance. Comment financera-t-on la dépendance ?

Mme Sophie Taillé-Polian. Pas en baissant les taux d’imposition en tout cas !

M. Gérald Darmanin, ministre. C’est plutôt ce sujet qui devrait nous inciter à chercher collectivement une solution. Quels sont les moyens que l’on peut accorder à ce problème ? L’État et la sécurité sociale sont-ils les seuls à devoir mettre la main à la pâte ? Que font nos voisins dans ce domaine ? Quels sont les besoins en la matière ?

Ce débat me paraît encore plus intéressant que le simple fait de savoir si l’on garde notre système de sécurité sociale tel qu’il était exactement en 1945, malgré toutes les évolutions démographiques que j’évoquais.

Enfin, je veux rappeler que, par solidarité, l’État consacre 36 milliards d’euros de son budget à la sécurité sociale. Dans l’autre sens, le transfert ne s’élève qu’à 2 milliards d’euros. Cela devrait nous inciter à rester relativement mesurés dans un certain nombre de nos discussions.

Et puis, à la fin des fins, il n’y a de toute façon qu’un seul contribuable, un seul citoyen ! À la fin des fins, que celui-ci règle des prélèvements obligatoires pour l’État ou pour la sécurité sociale, c’est toujours de l’argent en moins qu’il aura sur son compte ! À la fin des fins, que les entreprises règlent leurs prélèvements à la sécurité sociale ou à l’État, ce sont toujours des charges et de la fiscalité qui les empêcheront de progresser !

Nous avons des débats techniques et politiques intéressants, mais n’oublions pas que, derrière ces débats, on parle des citoyens, et que ce sont eux qui paient à la fin, tout article budgétaire confondu, le prix de notre politique collective. Certes, ce coût leur assure une part de la solidarité, mais on ne doit pas ignorer que, à la fin des fins, il n’y a qu’un seul portefeuille, un seul compte en banque, un seul travailleur, une seule entreprise.

M. Bruno Sido. Exactement !

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 382 rectifié bis est présenté par MM. Daudigny, Raynal et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Botrel, Carcenac et Éblé, Mme Espagnac, MM. Féraud, Jeansannetas, P. Joly, Lalande et Lurel, Mmes Taillé-Polian et Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, J. Bigot, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 511 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Yves Daudigny, pour présenter l’amendement n° 382 rectifié bis.

M. Yves Daudigny. Ce débat est très intéressant. Si l’amendement que je défends est symbolique, il me permet de revenir sur un sujet sur lequel nous voulons montrer notre détermination.

L’article 19, nous le comprenons bien, est au cœur de ce que le Gouvernement s’évertue à appeler la rénovation des relations financières entre la sécurité sociale et l’État, soit l’institutionnalisation du principe des vases communicants entre les comptes de la sécurité sociale et le budget de l’État, soit encore la mise sous tutelle de la santé des Français par Bercy – d’autres que nous l’ont dit. C’est la fin de l’autonomie budgétaire de la sécurité sociale, qui avait été sanctuarisée, entre autres, par la loi Veil de 1994.

Madame la ministre, monsieur le ministre, vous vous êtes appuyés dès la discussion générale sur les exceptions qui ont eu cours par le passé en matière de non-compensation. Si la règle d’or de la loi Veil de 1994 a connu, il est vrai, quelques exceptions en vingt-quatre ans, celles-ci ne justifient en rien que vous en abandonniez le principe même aujourd’hui, que vous le remplaciez par un autre et élaboriez une nouvelle règle pour l’avenir.

Il s’agit d’un tournant pour l’assurance maladie que nous estimons antisocial, et qui est à rapprocher – vous l’avez d’ailleurs reconnu tout à l’heure – de la réforme de l’assurance chômage pour laquelle le Gouvernement exige 4 milliards d’euros d’économies des partenaires sociaux après le basculement de son financement par les cotisations sociales vers l’impôt. L’objectif prioritaire est la recherche d’économies aux dépens du modèle social.

Tout se tient pour dessiner les contours d’une protection sociale du XXIe siècle, qui a été annoncée par le Président de la République et qui serait donc largement rétrécie.

Votre conception de la protection sociale, nous le craignons, consiste en un basculement vers un système d’assistance universelle. Mais universalité ne doit pas vouloir dire baisse de la qualité : une prise en charge minimale par les pouvoirs publics et à compléter, si tant est que l’on en a les moyens, par des assurances complémentaires privées, généralisées à tous les pans de la protection, ce n’est pas notre conception de l’organisation de la protection sociale du XXIe siècle. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article 19.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 511.

Mme Laurence Cohen. Beaucoup de choses ont déjà été dites. Vous comprenez donc les raisons pour lesquelles nous voulons supprimer cet article.

Monsieur le ministre, vous évoquez le déficit de la sécurité sociale, mais il faut que nous nous parlions franchement : ce déficit est entretenu ! Vous nous dites que la situation d’aujourd’hui est différente de celle que l’on a connue au lendemain de la guerre. C’est vrai, mais elle est aussi différente pour les gros actionnaires et le grand patronat, compte tenu des cadeaux que vous pouvez leur faire !

Je suis désolée, mais le CICE coûte 20 milliards d’euros par an depuis 2013. Ce montant sera même multiplié par deux en 2019 à cause de votre politique. Il y a de l’argent, mais vous n’avez pas envie d’aller le chercher là où il est !

Quand vous nous dites que vous allez supprimer les cotisations sociales, en fait, vous remettez en cause la sécurité sociale, car ces cotisations sont justement au fondement de celle-ci ! Ce fondement, on le trouve donc au cœur de l’entreprise, là où sont produites les richesses. Mais non, vous persévérez à exempter les entreprises de payer leurs cotisations patronales, alors que vous savez pertinemment, votre gouvernement depuis qu’il est aux manettes comme les gouvernements antérieurs, que cette politique ne marche pas en matière d’emploi ! Sinon, cela se saurait : on observerait une diminution du taux de chômage !

Dans cet hémicycle, nous n’avons pas seulement critiqué un certain nombre de vos propositions ; nous vous en avons soumis de nouvelles. Simplement, vous les refusez, parce que ces propositions « cognent » sur le capital. Or cela ne vous convient absolument pas !

Le risque est extrêmement élevé, parce que vous remettez en cause un système qui va aussi remettre en cause in fine la qualité des soins et le droit à l’accès aux soins et à la santé pour toutes et tous. C’est ce qui nous semble le plus grave dans votre politique. Ce qui nous paraît également extrêmement grave, c’est votre façon de changer totalement les règles, de manière assez camouflée, en faisant en sorte que la manne que représente la sécurité sociale renfloue en fait, de manière artificielle et injuste, les caisses de l’État et comble leur déficit. Cela ne marche pas et c’est pourquoi nous demandons, je le répète, la suppression de cet article !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission est défavorable à ces deux amendements identiques de suppression, car les dispositions de l’article 19 sont nécessaires en pratique au bon fonctionnement de la sécurité sociale cette année.

Alors, je comprends bien que nous posions le débat sur le financement de la sécurité sociale par le biais de cet article. Vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, les uns et les autres ont posé un certain nombre de jalons pour engager un débat, mais on ne pourra évidemment pas régler le problème ce matin au détour de l’examen de l’article 19.

Beaucoup de questions se posent. En effet, on voit que l’on en est à une répartition à égalité en termes de financement entre cotisations, c’est-à-dire un système de type assurantiel, et impôt, c’est-à-dire un système fondé sur la solidarité. La sécurité sociale a donc bien changé de nature dans son financement.

Cette évolution ne s’est pas faite insidieusement, puisque c’est nous qui l’avons souhaitée, voulue et que les changements ont été mis en œuvre au fil du temps, en soixante-dix ans. Le moment est effectivement venu de poser le débat. Je ne sais pas exactement la forme que celui-ci pourrait prendre. Je ne sais pas si la révision institutionnelle nous permettra d’avancer à ce sujet : cela me paraît difficile, parce qu’il est clair que cette question ne pourra pas accaparer toutes les discussions sur la réforme institutionnelle.

Monsieur le ministre, il nous faudra donc trouver un moment pour réfléchir au financement à venir de la protection sociale et de la sécurité sociale. C’est en tous les cas la volonté de la commission : répondre aux interrogations qui ont été exprimées sur toutes les travées de cet hémicycle. (M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales, opine.)

Vous avez parlé de 36 milliards d’euros de compensation, versés cette année par l’État à la sécurité sociale. Vous compensez pour une large part des exonérations de cotisations sociales qui ont été décidées par différents ministères. Cela s’est fait au fil du temps, ce n’est pas uniquement le précédent gouvernement ou celui-ci qui en sont responsables.

M. Gérald Darmanin, ministre. Ce n’est pas idéologique !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cela fait déjà plusieurs dizaines d’années.

M. Gérald Darmanin, ministre. Depuis 1994 !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il faut parler de ce sujet, parce que nous en sommes arrivés à un point où on pourrait insidieusement basculer dans un système tout autre que celui qui a été voulu à l’origine, qui ne serait plus à proprement parler contrôlé par les acteurs et les partenaires sociaux ni par la représentation nationale. Il faut absolument engager une discussion plus au fond.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Tout d’abord, il est évident que je voterai contre ces amendements, suivant en cela la position de la commission. En effet, on ne peut pas se priver de l’article 19 dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Ensuite, je veux revenir sur les débats particulièrement intéressants qui viennent d’avoir lieu, en faisant deux petites observations.

Premièrement, il s’agit d’un débat de « sachants ». Il est important de le signaler, car cela veut dire qu’il n’est pas sûr que la population qui est derrière nous, qui nous suit, connaisse tout de ce débat. (M. le ministre opine.)

Il ne serait pas inutile que, dans l’avenir, s’il devait y avoir des orientations nouvelles par rapport à l’idéal qui a été mis en place en 1945, idéal qui risque d’évoluer en raison du changement du mode de financement de la sécurité sociale, nous en prévenions la population. Il faudrait demander à nos concitoyens s’ils sont d’accord avec ce changement de l’idéal de 1945. Cela me semble être extrêmement important.

Deuxièmement, je tiens quand même à dire, avec tout le respect que je vous dois, monsieur le ministre, et malgré tout le talent d’orateur que je vous reconnais, que Bercy n’est pas un centre de décision, et qu’il doit rester un outil permettant aux sachants de décider, et non décider à la place de ceux qui doivent le faire, c’est-à-dire le Parlement et le peuple. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) Cela me paraît évident.

M. Gérald Darmanin, ministre. Bien sûr !

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Or je ne suis pas sûr que dans le cadre de ce que nous faisons actuellement la population soit bien au courant des changements qui sont en train de se mettre en place en matière de financement de la sécurité sociale.

Progressivement, ceux qui encaissent les cotisations ou les impôts auront tendance avec le temps, peut-être pas sous ce gouvernement, peut-être pas ici et maintenant, mais dans l’avenir, à prendre les décisions à la place de la population.

Il me semble important de poursuivre nos réflexions et d’avoir un vrai débat populaire et démocratique sur ce sujet. Et quand je dis « populaire » – j’ai évoqué cette idée il y a quelque temps avec Mme Buzyn –, je veux dire qu’il faudrait essayer d’organiser des états généraux sur le financement et les idéaux qui fondent la sécurité sociale dans l’ensemble du territoire et avec tous nos concitoyens. (Applaudissements sur les mêmes travées.)

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Je souhaite expliciter la position de mon groupe concernant cet article 19, qui organise les flux financiers entre la sécurité sociale et l’État dans un contexte – M. le président de la commission vient d’y faire référence – de changement d’organisation.

Cette année, effectivement, une compensation est prévue pour la plupart des mesures concernant les charges, notamment le SMIC « zéro charge », le CICE 2018 et l’allégement de charges en remplacement du CICE 2019.

Mais je comprends bien que l’État a une dette publique, qu’il faut diminuer, et que l’objectif visé est de rendre nos entreprises compétitives, afin de leur permettre de vendre leurs produits à l’échelle de l’Europe et du monde. Ainsi, on crée des emplois, et l’on peut financer la sécurité sociale et les retraites.

Il y a donc compensation à l’UNEDIC, compensation de la réduction de 6 points de cotisations patronales jusqu’à 2,5 SMIC et, dans le cadre de la transformation du CICE, compensation des allégements de cotisations et contributions patronales jusqu’à 1,6 SMIC.

Pour notre part, nous ne sommes pas opposés au fait que ces compensations ne soient pas systématiques. Mais la revalorisation de 0,3 % des pensions de retraite nous est apparue trop faible et nous nous sommes dit que l’État pouvait compenser l’exonération des cotisations salariales sur les heures supplémentaires qu’il a décidée et affecter cette compensation au dispositif de retraite, afin de porter la revalorisation à 0,8 % ou, peut-être, 1 %.

Telle était notre position et nous pensions qu’un accord pouvait être trouvé, en commission mixte paritaire, sur cette question. Nous n’allions pas jusqu’au taux de 1,3 % d’inflation annoncé, mais nous nous en approchions et, en tout cas, nous faisions un peu plus pour les retraites.

Cela étant, nous voterons contre les deux amendements que nous examinons.

Mme Laurence Cohen. Quel dommage !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Tourenne. Je ne comprends pas bien l’argumentaire qui conduit à rejeter ces amendements. On nous sert l’argument de l’équilibre de la sécurité sociale. Mais c’est exactement l’inverse ! Il est question, ici, de ponctionner 2,3 milliards d’euros dans les caisses de la sécurité sociale pour alimenter les caisses de l’État !

Je veux également dire toute mon admiration… J’ai assisté, voilà quelques instants, au plus bel exercice d’enfumage que je connaisse ! (M. le président de la commission des affaires sociales sexclame.)

Ce que vous nous avez servi, monsieur le ministre, est tout à fait remarquable – je dois saluer la performance.

Au fond, vous nous avez dit : tout est dans tout, peu importe qui paie, c’est toujours le même. Non ! Ce n’est pas toujours le même ; ce ne sont pas toujours les mêmes sommes ; ce n’est pas toujours dans le même objectif ; ce n’est pas toujours en fonction de la même vision de la société ! Selon que l’on veut une assurance, de la charité ou de la solidarité, on se trouve dans des registres complètement différents.

En outre, vous ne pouvez pas, en permanence, utiliser cet élément de langage consistant à dire que l’État apporte 36 milliards d’euros, sans donner plus de précisions.

Je vous ai déjà fait la remarque, et je souhaiterais que vous nous indiquiez les raisons de ce versement. Que viennent compenser ces 36 milliards d’euros ? C’est bien ça, l’histoire, monsieur le ministre ! Nous parlons de 36 milliards d’euros, qui ne sont pas des cadeaux, mais qui sont dus à la sécurité sociale ! Et il n’est pas certain, d’ailleurs, que le compte y soit !

Enfin, vous ne cessez de répéter que le Gouvernement n’a pas fait de cadeaux aux riches et qu’il veut redynamiser l’économie. Mais la suppression de l’ISF n’est ni un cadeau ni une aide aux entreprises ! Elle a bénéficié à des particuliers, à des personnes déjà très riches, qui n’avaient nullement besoin que vous leur apportiez de l’argent supplémentaire – argent dont elles ne sauront sans doute que faire, sauf à aller le placer loin de chez nous ! (MM. Roland Courteau et Christian Manable applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.

Mme Sophie Taillé-Polian. Mon intervention sera un peu dans la même veine que celle de mon collègue Jean-Louis Tourenne.

Pour justifier le pot commun entre le budget de la sécurité sociale et celui de l’État, monsieur le ministre, vous souligniez qu’il n’y avait qu’une poche, celle du citoyen. Mais il y a différents types de poches ! Il y a les poches pleines et les poches moins pleines ! Il y a les poches qui débordent, même, et celles qui sont vides, désespérément vides, au quinze du mois !

Malheureusement, monsieur le ministre, ce sont de plus en plus les impôts les plus injustes, les moins redistributifs, qui financent le budget de l’État, à commencer, bien sûr, par la TVA !

Ce sont les consommateurs qui vont payer les mesures d’exonération sur les heures supplémentaires ! En fait, on prend aux uns et on donne aux mêmes ! On n’améliore pas la situation globale de la population, celle des plus modestes, alors que les plus privilégiés, eux, ont vu leur imposition largement baisser – je n’y reviens pas, puisque mon collègue s’est très bien exprimé sur ce point.

Comme le rappelait Bernard Jomier, l’équilibre du budget de la sécurité sociale se fait sur le dos de l’hôpital. L’équilibre du budget de l’État, lui, se fait sur le dos des consommateurs, des citoyens qui attendent, en vain, le maintien – ils n’osent même plus espérer leur développement – de services publics de qualité dans un rayon pas trop éloigné de leur lieu d’habitation.

Dans les deux cas, ce sont les plus modestes qui paient !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Je pense que nous nous éloignons un peu du débat sur l’article 19, mais très franchement, madame la sénatrice Taillé-Polian, monsieur le sénateur Tourenne, je n’ai pas de leçon à recevoir en matière sociale.

C’est vous qui avez augmenté la TVA au cours du mandat précédent ! Aujourd’hui que vous êtes dans l’opposition, vous trouvez cet impôt injuste, mais c’est vous qui l’avez augmenté !

Mme Sophie Taillé-Polian. Je n’ai rien augmenté, monsieur le ministre !

M. Gérald Darmanin, ministre. Le précédent gouvernement l’a fait ! Je me rappelle très bien, d’ailleurs, que la plupart des collectivités locales – vous en connaissez sans doute – ont dû répercuter cette hausse sur les tarifs sociaux, notamment pour les transports publics.

Des leçons en matière sociale, quand vous avez pris sur les familles comme jamais aucun gouvernement ne l’a fait… C’est vous qui avez changé le quotient familial !

Mme Sophie Taillé-Polian. Des familles les plus aisées ! Il s’agissait d’une mesure de redistribution !

M. Gérald Darmanin, ministre. Quels ont été les résultats concrets dans ma commune, où j’ai 43 % de la population en dessous du seuil de pauvreté, au RSA, le revenu de solidarité active ? Oui, madame la sénatrice, monsieur le sénateur, on a le droit d’être vertueux en matière sociale ; la difficulté, c’est qu’il faut pratiquer, aussi, de temps en temps ! Sinon vous êtes croyants, mais non-pratiquants !

Mme Sophie Taillé-Polian. C’était redistributif !

M. Gérald Darmanin, ministre. Dans ma commune, donc, j’ai dû augmenter les tarifications de solidarité dans les cantines, au moment où vous avez changé le quotient familial.

Vous faites de grandes leçons de social, mais, quand vous êtes aux responsabilités, vous mettez en place un impôt que vous jugez vous-mêmes injuste ! Je suis d’accord sur ce point, d’ailleurs, c’est pourquoi nous intervenons, non pas sur la TVA, mais sur la CSG, qui est proportionnelle et touche le capital.

Vous faites de grandes leçons de social, mais, quand vous êtes aux responsabilités, vous n’appliquez pas les mesures que vous défendez dans l’opposition !

Et puis, permettez-moi de vous le dire, monsieur le sénateur Tourenne, vous avez aussi beaucoup péché en matière de non-compensation de l’État à la sécurité sociale. Voici quelques exemples de mesures votées au cours des deux années de votre mandat où vous souteniez le gouvernement.

Vous avez mis en place la prime accordée en contrepartie des dividendes. Ce n’était pas vraiment une mesure sociale et, manifestement, elle n’a pas bénéficié aux poches les plus vides !

Vous avez également mis en œuvre la réduction de la cotisation minimale de maladie au régime social des indépendants, l’ancien RSI, tout comme l’exonération en faveur des personnes employées en chantier d’insertion.

Vous aussi, vous n’avez pas toujours décidé de compenser, car, comme M. le rapporteur général et M. le président de la commission l’ont dit, avec beaucoup d’honnêteté intellectuelle, c’est un vieux débat !

Oui, il faut avoir ce débat – je veux le souligner à l’attention de M. le président de la commission –, mais, bien évidemment, Bercy et tous les autres ministères se tiennent à la disposition du Parlement. Ce n’est pas nous qui votons les crédits !

D’ailleurs, si le Sénat a la place que la Constitution lui réserve, il ne faut pas oublier l’Assemblée nationale. Or c’est la volonté d’élus de la Nation qui s’est exprimée, de représentants qui, comme vous, mesdames, messieurs les sénateurs, ont été élus en 2017. Et ils l’ont été, M. Tourenne le sait bien pour avoir été le candidat de la majorité de l’époque aux élections sénatoriales, sur un programme proposant la suppression de certaines cotisations en échange d’une augmentation de CSG.

Peut-être faut-il donner plus d’explications à la population. Je l’entends. Peut-être faut-il évoquer ce sujet dans un cadre plus large que celui de l’article 19, qui ne traite que du changement de quelques tuyauteries à la suite de la parution d’un rapport. Oui, il faut veiller à ne pas avoir des états généraux de sachants, réunissant des sachants, mais, très certainement, organiser une grande consultation publique !

Quoi qu’il en soit, il y a eu un débat à l’occasion de l’élection présidentielle et, surtout, des élections législatives, et il était très clair que nous proposions de supprimer des cotisations et d’augmenter la CSG. Les oppositions ont très largement utilisé cette proposition.

On a tout à fait le droit d’être en défaveur d’une telle politique, mais reconnaissons que celle-ci n’a jamais été menée en catimini et il ne faudrait pas, non plus, sous-estimer le rôle important des campagnes présidentielles. C’était, je crois, la volonté du général de Gaulle : il a, certes, voulu la sécurité sociale, mais il a aussi voulu le suffrage universel du Président de la République !

Mme la présidente. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Je ne compte pas arbitrer le débat qui vient d’avoir lieu ; j’interviens pour soutenir les propos de mes collègues, notamment de Laurence Cohen, mais aussi ceux de M. le rapporteur général, qui, me semble-t-il, a su prendre de la hauteur et respecter nos débats.

Vous avez indiqué, monsieur le rapporteur général, que l’on pouvait basculer dans un autre système. Vous avez tout à fait raison ! Face à un tel enjeu, il faut faire preuve d’argumentation et de sens des responsabilités, car tout cela peut se retourner contre les acteurs sociaux ou, effectivement, se solder par un déficit de contrôle du Parlement.

Vous avez d’autant plus raison que je serai très curieux de savoir – et j’ai bien écouté, avec intérêt, toute votre argumentation, monsieur le ministre – pourquoi le Gouvernement décide, dans le futur projet de loi constitutionnelle, de remplacer les termes « sécurité sociale » par l’expression « protection sociale ».

Il faut bien comprendre pourquoi ce point appelle une vigilance de la part des parlementaires, indépendamment de leur sensibilité politique. Ce n’est pas faire de la sémantique pour de la sémantique ! Entre « sécurité sociale » et « protection sociale », le projet de société n’est pas du tout le même !

Ce que voulait dire ma collègue Laurence Cohen, et c’est le sens d’un certain nombre de nos amendements, c’est que nous ne sommes pas favorables à l’étatisation de la sécurité sociale.

Or, monsieur le ministre, vous vous engagez dans un processus d’étatisation de la sécurité sociale, et ce pour effacer un rapport qui s’appelle – on pourrait certes trouver d’autres mots – le rapport entre capital et travail !

Vous avez fait référence à d’autres époques. Je peux vous dire – mais vous le savez très bien – que, s’agissant de ce rapport capital-travail, on était dans d’autres proportions, voilà trente, quarante ou cinquante ans !

Pour notre part, nous voulons attirer l’attention, notamment de nos collègues, sur le fait que nous évoluons du droit commun à une sorte de droit privé. On « marchandise » la protection sociale par un processus d’individualisation, c’est-à-dire en réduisant le concours de l’État et en renvoyant à l’individu la responsabilité de se doter du meilleur régime assurantiel.

Est-ce un vrai système de solidarité ? Est-ce un système qui respecte un équilibre entre ceux qui accumulent du capital et réalisent des profits – c’est le but d’un patron, pour être très clair – et ceux qui produisent de la force, de la valeur ajoutée et contribuent, aussi, à la croissance et à notre économie ?

C’est un débat de société !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 382 rectifié bis et 511.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 17 :

Nombre de votants 342
Nombre de suffrages exprimés 342
Pour l’adoption 89
Contre 253

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 512, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° La première phrase du premier alinéa de l’article L. 231-3 est ainsi rédigée :

« Des élections sont organisées pour la désignation des représentants au conseil ou au conseil d’administration des organismes de sécurité sociale mentionnés aux titres Ier et II du présent livre. » ;

2° L’article L. 231-4 est ainsi modifié :

a) Les mots : « sa désignation » sont remplacés par les mots : « les élections » ;

b) Les mots : « nouvelles désignations » sont remplacés par les mots : « nouvelles élections » ;

3° Au premier alinéa de l’article L. 231-5, le mot : « désigné » est remplacé par le mot : « présenté ».

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Cet amendement tendant à réécrire l’article 19 vise, à l’encontre de la rédaction actuelle qui prévoit de supprimer l’autonomie financière de la sécurité sociale, à renforcer le lien entre les assurés sociaux et leur bien commun.

Nous devons reconnaître, monsieur le ministre, que la bataille d’idées que vous menez, main dans la main avec le patronat, contre les fameuses charges sociales et la détérioration de nos hôpitaux et de la qualité des soins prodigués, du fait des politiques de restriction budgétaire, ont détérioré le lien entre les assurés sociaux et leur sécurité sociale. Ajoutez à cela la création de la CSG et des lois de financement de la sécurité sociale, qui ont renforcé l’étatisation de la sécurité sociale, et la boucle est bouclée !

À cause de toutes ces mesures, nos concitoyennes et concitoyens ont de moins en moins conscience que la « sécu » est indépendante de l’État et gérée par des représentants des salariés et des employeurs.

Nous proposons donc, avec cet amendement, de revenir sur le remplacement des élections aux caisses de la sécurité sociale par la désignation des organisations syndicales et patronales. Cette proposition est un retour à la modernité d’un système fondé sur la démocratie et sur une gestion partagée des richesses entre les travailleuses et travailleurs, et les employeurs.

Nous sommes convaincus que le rétablissement de ces élections ouvrira le débat sur les dépenses de la sécurité sociale et les besoins de financement nouveaux, tout en favorisant le retour d’un sentiment de gérer soi-même ses propres affaires.

Hier, certains ont craint que, au travers d’un amendement quelque peu provocateur, il faut le reconnaître, tendant à revenir sur la participation des organisations d’employeurs, compte tenu des exonérations massives de cotisations patronales, nous ne remettions en cause le paritarisme. Vous voyez qu’il n’en est rien, mes chers collègues ! Vous voici rassurés ! Nous pouvons donc voter le présent amendement !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’entends la demande de mon collègue Fabien Gay, mais je crois que nous sortons un peu du champ de l’article 19, dont, en outre, l’amendement écrase le contenu pour rétablir les élections au conseil d’administration des organismes de sécurité sociale.

Comme je l’ai indiqué lors de l’examen des amendements précédents, nous avons besoin de l’article 19, qui règle les relations entre l’État et la sécurité sociale.

L’avis de la commission est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 512.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 357 rectifié, présenté par M. Tissot, Mme Taillé-Polian, M. Cabanel, Mmes Conway-Mouret et Jasmin, MM. Tourenne et Jacquin, Mme Espagnac, MM. Kerrouche et Duran, Mmes Ghali et Guillemot, M. P. Joly et Mme Préville, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

Mme Sophie Taillé-Polian. Cet amendement est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je ne vais pas m’étendre sur cette question, qui a été débattue, en tout cas exposée, en commission.

L’avis est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 357 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 61, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 12

Remplacer le taux :

0,95 %

par le taux :

2,40 %

II. – Alinéa 20

Supprimer cet alinéa.

III. – Après l’alinéa 48

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…° L’article L. 241-6-2 est ainsi rétabli :

« Art. L. 241-6-2.- Le taux des cotisations mentionnées au 1° de l’article L. 241-6 est réduit de 2,40 points pour les revenus d’activité des salariés au titre desquels l’employeur est soumis à l’obligation édictée par l’article L. 5422-13 du code du travail, dans la limite de quatre fois le montant du plafond défini au premier alinéa de l’article L. 241-3. »

IV. – Après l’alinéa 96

Insérer deux paragraphes ainsi rédigés :

… – L’article 54 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel est abrogé.

… – Pour l’année 2019, les contributions salariales prévues à l’article L. 5422-9 du code du travail sont prises en charge par leurs employeurs, dans des conditions définies par décret.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Sans recommencer le débat que nous avons eu précédemment, je soulignerai que cet amendement de principe illustre bien la nécessité de clarifier les relations entre l’État, les assurés et la sécurité sociale.

Depuis le 1er octobre, les salariés ne paient plus de contributions d’assurance chômage. Le 1er janvier 2019, ces contributions, qui ont été prises en charge par l’ACOSS, n’existeront plus.

Il s’agit d’un bouleversement majeur, car ce régime était, jusqu’à présent, d’essence assurantielle, à la fois financé par des contributions et versant, en cas de perte d’emploi involontaire, des prestations en fonction de l’ancien salaire, c’est-à-dire des contributions de l’intéressé.

Que va devenir ce régime, et que vont devenir ces prestations, une fois que les salariés ne contribueront plus et que l’impôt se substituera à eux ? Ceux-ci seront-ils toujours des assurés, disposant des droits acquis par eux-mêmes à travers des contributions versées par leur employeur ou bien n’auront-ils désormais droit qu’au traitement social que la société voudra bien leur accorder ?

Avouez que c’est tout de même une question de fond, monsieur le ministre, et que l’on a réglé le problème sans véritable débat de fond… On a eu une discussion à caractère financier, mais on n’a pas vraiment abordé le problème au fond, en cherchant à savoir ce qui se cachait derrière l’assurance chômage.

En d’autres termes, d’ici à quelques années, la différence de prestations en fonction du salaire sera-t-elle toujours légitime ? C’est une vraie question ! L’avenir de l’assurance chômage tient-il en une prestation uniforme, sur le modèle du filet de sécurité, financé par l’impôt, que percevront certains indépendants – je rappelle que la somme est modeste : 800 euros par mois ?

C’est bien en ces termes que s’est exprimé le Conseil d’État, d’ailleurs, dans son avis sur la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Il a invité le Gouvernement à approfondir sa réflexion, avant de gommer du droit des contributions salariales d’assurance chômage.

Et c’est bien le chemin que, en toute logique, les partenaires sociaux, qui en discutent actuellement, semblent emprunter.

Jusqu’à présent, le débat n’a été engagé que sous l’angle du pouvoir d’achat, je le redis. Je crois que l’essentiel nous échappe !

L’amendement n° 61 proposé par la commission vise à ressusciter, dans le droit, la totalité du dispositif des contributions des salariés à l’assurance chômage, pour au moins une année encore, afin de nous laisser le temps d’approfondir cette réflexion, pour reprendre les termes du Conseil d’État.

Pour assurer la neutralité de cette modification, nous proposons une mesure qui nous paraît, d’ailleurs, beaucoup plus logique. Elle consiste en la prise en charge des cotisations salariales par les employeurs, la baisse à due concurrence des cotisations patronales à la branche famille et un fléchage de la CSG destinée à l’UNEDIC vers la Caisse nationale des allocations familiales.

Il me semble que nous sommes nombreux, sur ces travées, à approuver ce montage.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Si la question posée par M. le rapporteur général est importante et complexe, par le montage proposé et l’importance des montants financiers concernés – quasiment 5 milliards d’euros –, ma réponse sera rapide : l’avis du Gouvernement est défavorable, car cet amendement est complètement orthogonal avec l’engagement de campagne du Président de la République. Faut-il refaire la campagne présidentielle maintenant ? Je ne sais pas, cela nous prendrait un peu de temps…

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. C’est un peu trop facile comme réponse !

M. Gérald Darmanin, ministre. Non, ce n’est pas le cas, et je m’étonne un peu de cette proposition, monsieur le rapporteur général. Encore une fois, vous étiez assez bien placé pour savoir que la suppression de cotisations et le passage d’un régime assurantiel à un régime universel – avec, évidemment, une autonomie de gestion au niveau de la sécurité sociale – constituaient une proposition très importante dans le programme du Président de la République.

D’ailleurs, je m’étonne également que M. le sénateur Fabien Gay – il a quitté l’hémicycle – puisse associer secteur privé et impôt. Depuis quand le fait de payer une imposition pour financer un dispositif universel revient-il à faire des dons au secteur privé ? On est assez loin, me semble-t-il, de la démonstration, mais je ne reviendrai pas sur le débat précédent.

Je peux comprendre, monsieur le rapporteur général, que, n’appartenant pas à la majorité, vous ne soyez pas favorable à cette promesse du Président de la République et reveniez dessus. Mais c’était un engagement important de sa part et de celle de la majorité parlementaire, d’où cet avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 61.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de neuf amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 184 rectifié, présenté par Mme Renaud-Garabedian, M. Magras, Mme Gruny, MM. de Nicolaÿ et del Picchia, Mmes Boulay-Espéronnier, Delmont-Koropoulis, Lherbier et Lamure et MM. H. Leroy et Babary, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 34 à 41

Remplacer ces alinéas par sept alinéas ainsi rédigés :

4° bis L’article L. 136-6 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du I, les mots « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4B du code général des impôts » sont remplacés par les mots « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de certains de leurs revenus et simultanément assujettis à quelque titre que ce soit à un régime obligatoire français d’assurance-maladie » ;

b) Le I bis est abrogé ;

4° ter L’article L. 136-7 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du I, les mots : « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de certains de leurs revenus et simultanément assujettis, à quelque titre que ce soit, à un régime obligatoire français d’assurance-maladie » ;

b) À la première phrase du troisième alinéa du I, les mots : « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France, à raison de l’origine de certains de leurs revenus et, simultanément assujettis à un régime obligatoire français d’assurance-maladie » ;

c) Le I bis est complété par les mots « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de certains de leurs revenus et simultanément assujettis à quelque titre que ce soit à un régime obligatoire français d’assurance-maladie » ;

II. – Alinéa 81

Supprimer les mots :

, sans qu’il soit fait application du I ter du même article L. 136-6

III. – Alinéa 82

Supprimer les mots :

, sans qu’il soit fait application du I ter du même article L. 136-7

IV. – Alinéas 90 à 94

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

… – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :

1° À la première phrase du premier alinéa du I de l’article 15, les mots : « fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts » sont remplacés par les mots : « qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de certains de leurs revenus et simultanément assujettis, à quelque titre que ce soit à un régime obligatoire français d’assurance-maladie » ;

2° À la première phrase du I de l’article 16, après la première occurrence du mot : « sociale », sont insérés les mots : « et payés à des personnes physiques qui sont à la fois redevables de l’impôt sur le revenu en France à raison de certains de leurs revenus et simultanément assujettis à quelque titre que ce soit à un régime obligatoire français d’assurance-maladie » ;

V. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Les 4° bis et 4° ter du I entrent en vigueur au 1er janvier 2019.

VI. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I, II, III et IV, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian.

Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Les Français de l’étranger ne bénéficient d’aucune protection sociale. Pourtant, les revenus fonciers qu’ils encaissent en France sont soumis à des prélèvements depuis 2012, à un taux de l’ordre de 17,1 %.

En 2015, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé contraire à la réglementation européenne ce type de prélèvements. Malgré un nouveau fléchage, l’État s’est de nouveau fait condamner en 2018 par la justice administrative française.

Pour anticiper une décision non favorable du Conseil d’État, nous étudions aujourd’hui cet article du PLFSS, tendant à supprimer la CRDS et la CSG sur les revenus fonciers encaissés par les Français de l’étranger à l’étranger, quand ils se trouvent dans l’Union européenne, dans l’espace économique européen et en Suisse.

Je tenais tout d’abord à saluer cette avancée considérable, monsieur le ministre. Mais, du fait de la limitation géographique de cette exonération, les Français de l’étranger qui vivent en dehors de l’Europe et de la Suisse ont le sentiment qu’il existe une double catégorie de Français : ceux de l’Europe et ceux du reste du monde. Moins bien traités, moins bien considérés, ils vivent cette décision comme une véritable injustice.

Or, monsieur le ministre, rien ne vous empêche d’étendre cette exonération à l’ensemble des Français vivant à l’étranger, indépendamment de leur communauté.

Le présent amendement vise, d’une part, au titre de l’égalité fiscale et de l’équité, à exonérer la totalité des Français vivant dans le monde de la CRDS et de la CSG sur les revenus fonciers qu’ils encaissent en France.

Il tend, d’autre part, à exonérer les non-résidents français du nouveau prélèvement de solidarité de 7,2 % sur les revenus fonciers, ainsi que sur les produits de placement. Cette imposition permet de financer partiellement la sécurité sociale, alors que, j’y insiste, les Français de l’étranger ne bénéficient pas de cette couverture.

Mme la présidente. L’amendement n° 254, présenté par MM. Yung, del Picchia et Regnard, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 34 à 41

Remplacer ces alinéas par sept alinéas ainsi rédigés :

4° bis L’article L. 136-6 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du I, après le mot : « impôts », sont insérés les mots : « et à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;

b) Le I bis est complété par les mots : « , et qui sont à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;

4° ter L’article L. 136-7 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du I, après le mot : « impôts », sont insérés les mots : « et à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;

b) À la première phrase du 3° du I, après le mot : « impôts », sont insérés les mots : « et à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;

c) Le I bis est complété par les mots : « qui sont à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;

II. – Alinéa 81

Supprimer les mots :

, sans qu’il soit fait application du I ter du même article L. 136-6

III. – Alinéa 82

Supprimer les mots :

, sans qu’il soit fait application du I ter du même article L. 136-7

IV. – Alinéas 90 à 94

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

IV bis. – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :

1° La première phrase du premier alinéa du I de l’article 15 est complétée par les mots : « qui sont à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français » ;

2° À la première phrase du I de l’article 16, après la première occurrence du mot : « sociale », sont insérés les mots : « et payés à des personnes physiques à la charge, à quelque titre que ce soit, d’un régime obligatoire de sécurité sociale français, ».

V. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Les 4° bis et 4° ter du I entrent en vigueur au 1er janvier 2019.

VI. – Pour compenser la perte de recettes résultant des I, II, III et IV, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Nous connaissons bien cette problématique, mes chers collègues. Nous connaissons la décision de la Cour de justice de l’Union européenne selon laquelle l’assujettissement à la CSG et à la CRDS ne devait pas s’appliquer, au moins à l’intérieur de l’Union européenne. Cette décision a évidemment été contournée, par une déviation du flux financier vers la cotisation au Fonds de solidarité vieillesse, le FSV. Autrement dit, rien n’était changé : on passait simplement d’un cadre contributif à un cadre non contributif.

L’Assemblée nationale a décidé de modifier ce système, ce qui constitue un progrès important. La décision de la Cour de justice de l’Union européenne est respectée : les ressortissants français qui se trouvent à l’intérieur de l’Union européenne et bénéficient d’un régime de sécurité sociale de l’Union européenne n’ont plus à payer de prélèvements sociaux sur les revenus du capital.

Reste, bien sûr, le problème des non-résidents qui ne se trouvent pas à l’intérieur de l’Union européenne. Prenons un retraité au Maroc ou à Madagascar – je ne vais pas faire pleurer Margot –, percevant une retraite modeste et acquittant un loyer mensuel pour un petit appartement de 500 ou 600 euros, il paiera pratiquement 50 % de contributions.

Je défends donc la même proposition que celle qui vient d’être exposée : élargir à nos compatriotes résidant en dehors de l’Union européenne la mesure adoptée par l’Assemblée nationale et conforme à la décision de la Cour de justice de l’Union européenne.

Mme la présidente. L’amendement n° 446 rectifié bis, présenté par Mme Lepage, M. Leconte, Mme Conway-Mouret, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, J. Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 34

Rédiger ainsi cet alinéa :

4° bis Le I bis de l’article L. 136-6 est ainsi rédigé :

II. – Alinéa 35 et 38

Remplacer les références :

aux I et I bis

par la référence :

au I

III. - Alinéas 35, 36, 38, 41, 81, 82, 94 et 163

Remplacer la référence :

I ter

par la référence :

I bis

IV. – Alinéa 37

Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :

4° ter L’article L. 136-7 est ainsi modifié :

a) Le I bis est ainsi rédigé :

V. – Après l’alinéa 41

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Le dernier alinéa est supprimé.

VI. – Après l’alinéa 48

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

6° quater L’article L. 245-14 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, les références : « aux I et II de » sont remplacées par le mot : « à » ;

b) La deuxième phrase est supprimée ;

6° quinquies Au premier alinéa de l’article L. 245-15, les références : « I à II » sont remplacés par les références : « I et II ».

VII. – Alinéa 92

Supprimer les mots :

les mots : « définis au I » sont remplacés par les mots : « désignés aux I et I bis » et,

VIII. – Alinéa 109

Remplacer les mots :

de l’année 2018

par les mots :

perçus à compter du 1er janvier 2012

IX. – Alinéa 161

Remplacer les mots :

de l’année 2018

par les mots :

par perçus à compter du 1er janvier 2012

X. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I au IX, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Corinne Féret.

Mme Corinne Féret. Cet amendement a été déposé par notre collègue Claudine Lepage, qui n’a pu être présente ce matin.

Depuis six ans, l’ensemble des représentants des Français de l’étranger ne cessent de répéter que la situation des Français établis hors de France vis-à-vis des prélèvements sociaux sur les revenus immobiliers n’est pas normale. Soumettre une personne à des prélèvements sociaux alors qu’elle ne bénéficie d’aucun régime de sécurité sociale et qu’elle relève d’une autre législation en cette matière est discriminatoire, en plus de heurter le principe d’égalité devant l’impôt.

Si Claudine Lepage se réjouit que cette requête ait enfin été entendue cette année et que les personnes dans cette situation aient été exonérées de contribution, il semble inacceptable de conditionner cette exonération au lieu de résidence. Vous projetez en effet de supprimer la CSG uniquement pour les personnes résidant dans l’Union européenne, alors que toutes les sommes prélevées entre 2012 et 2015 au titre des prélèvements sociaux sur les revenus immobiliers des non-résidents fiscaux français doivent être remboursées, et pas uniquement celles qui ont été prélevées sur les résidents de l’Union européenne.

L’objet de cet amendement est donc d’étendre la portée de cette exonération à toutes les personnes relevant de la législation d’un autre État en matière d’assurance maladie et qui ne sont pas soumises à un régime obligatoire de sécurité sociale français au cours de l’année, sans aucune distinction de résidence.

Le Gouvernement a choisi de ne pas écouter l’ensemble des représentants des Français établis hors de France qui l’alertaient cependant sur les risques juridiques liés aux prélèvements sociaux. En conséquence, 59 000 recours en remboursement ont été introduits contre l’État. Mme Genetet elle-même, qui est issue de votre propre parti, recommande dans son rapport de supprimer les prélèvements sociaux sans distinction du lieu de résidence. Elle qualifie par ailleurs le contentieux lié à ces prélèvements de véritable bombe à retardement. Je vous propose donc de désamorcer cette bombe ! (Mme Victoire Jasmin applaudit.)

Mme la présidente. Les six amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 5 est présenté par M. Le Gleut.

L’amendement n° 8 rectifié ter est présenté par M. Frassa, Mme Garriaud-Maylam, MM. del Picchia et Regnard, Mmes Gruny, Procaccia et Delmont-Koropoulis, MM. Cuypers, H. Leroy, Lefèvre, Dallier, Karoutchi, Courtial et Cambon, Mme L. Darcos, M. de Nicolaÿ, Mme Lherbier et M. Rapin.

L’amendement n° 40 rectifié quater est présenté par Mmes Deromedi et Di Folco, MM. Mouiller et Danesi, Mme Bruguière, MM. Kennel, D. Laurent, Calvet et Charon, Mme Chain-Larché, MM. Allizard, Revet et Grand, Mmes Boulay-Espéronnier, Lanfranchi Dorgal et Lamure et MM. Gremillet et Sido.

L’amendement n° 140 rectifié est présenté par M. Leconte et Mme Conway-Mouret.

L’amendement n° 187 rectifié ter est présenté par M. Cadic, Mme Billon, M. Guerriau, Mme Goy-Chavent, M. Laurey, Mmes Guidez et Tetuanui, MM. Maurey et Marseille et Mme C. Fournier.

L’amendement n° 255 est présenté par M. Yung.

Ces six amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéas 35 et 38

Supprimer les mots :

, par application des dispositions du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale,

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

L’amendement n° 5 n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié ter.

Mme Catherine Procaccia. Cet amendement de M. Frassa vise à modifier les alinéas 35 et 38 de l’article 19 ayant trait à l’assujettissement des Français établis hors de l’Union européenne au paiement des cotisations sociales. Je ne reviendrai pas sur cette discrimination à l’encontre de ces Français, mais, puisque M. Yung parlait des retraités, j’évoquerai pour ma part les salariés qui travaillent hors de l’Union européenne : la plupart reviennent en France, où ils sont propriétaires d’un appartement qu’ils louent ; pourquoi les obliger à payer des cotisations sociales alors qu’ils ne bénéficient d’aucun système de sécurité sociale ? D’ailleurs, lors de leur visite chez le médecin en France, y compris lors d’un bref passage, ils ne sont pas couverts par leur régime, puisqu’ils résident hors de l’Union. La Cour de justice de l’Union européenne a rendu un avis sur ce qui est de son ressort, à savoir l’Europe, mais, comme l’a dit Mme Féret avant moi, nous avons là une véritable bombe à retardement.

Il ne paraît pas possible d’établir une telle distinction entre les Français établis dans l’Union et ceux qui sont établis hors de l’Union, alors qu’ils ne bénéficient en aucune façon d’une protection sociale en France.

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Di Folco, pour présenter l’amendement n° 40 rectifié quater.

Mme Catherine Di Folco. J’étais le porte-parole de Mme Deromedi, sénateur représentant les Français établis hors de France, mais mes collègues ayant bien argumenté en faveur de cette mesure, je considère que cet amendement a été défendu.

Mme la présidente. L’amendement n° 140 rectifié n’est pas soutenu.

La parole est à Mme Annick Billon, pour présenter l’amendement n° 187 rectifié ter.

Mme Annick Billon. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l’amendement n° 255.

M. Richard Yung. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Depuis des années, nous avons régulièrement ce débat concernant l’assujettissement aux contributions sociales des revenus du capital de ceux de nos compatriotes qui sont établis hors de l’Union européenne.

À la suite de l’arrêt de Ruyter, le gouvernement de l’époque avait simplement procédé à la réaffectation du produit de ces contributions. J’avais d’ailleurs clairement souligné à cette occasion les limites du schéma retenu. Toutefois, les dispositions qui ont été insérées par l’Assemblée nationale au sein de l’article 19 changent la donne, puisqu’elles répondent rigoureusement au droit communautaire tel qu’il a été énoncé par la Cour de justice.

Nous ne nous situons donc plus sur le terrain du droit européen, mais dans le cadre politique purement français. Que sont la CSG et la CRDS ? Il s’agit d’impositions de toutes natures qui n’ouvrent pas de droits – c’est un point important –, mais se trouvent simplement affectées à la sécurité sociale. Leur objet même est de frapper la quasi-totalité des revenus perçus en France, dans une optique purement contributive.

Dès lors, le fait que certains de nos compatriotes acquittent ces contributions sans être inscrits à la sécurité sociale française ne diffère en rien du fait qu’ils aient à acquitter d’autres taxes ou prélèvements destinés au budget de l’État, alors même, par exemple, qu’ils n’empruntent pas les routes nationales ou que leurs enfants ne vont pas à l’école en France. Pour autant, estimerions-nous normal que ces Français ne paient aucun impôt français sur des revenus français ? Je ne le crois pas.

Dans cette affaire, la sécurité sociale a simplement constitué un cas particulier pour un nombre limité de personnes inscrites dans un autre régime européen, du seul fait qu’il existe un règlement communautaire spécifique sur ce sujet.

La France ayant finalement été condamnée – dont acte ! –, le présent article vise à répondre rigoureusement aux exigences de la CJUE. Je salue cette position du Gouvernement, et il convient d’en rester là, car au-delà du coût de ces amendements – 180 millions d’euros, tout de même ! –, c’est le caractère universel de la CSG et de la CRDS qu’il nous faut défendre. Ces impositions ne doivent pas subir le mitage qu’a subi l’impôt sur le revenu, devenu d’une complexité effarante.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. M. le rapporteur général a quasiment tout dit et je l’en remercie. Si ces amendements identiques sont adoptés en plus de ceux qui viennent d’être votés contre l’avis du Gouvernement, la détérioration du budget passera de 800 millions d’euros à 1 milliard d’euros. En effet, ces amendements ne sont pas véritablement gagés – le gage sur le tabac ayant essentiellement pour objet de permettre ce débat. À ce stade, la sécurité sociale est déjà en déficit cette année, puisque son excédent ne s’élève qu’à 700 millions d’euros et que les dépenses nouvelles que vous proposez atteignent 1 milliard d’euros.

Quant à la promesse faite par le Gouvernement l’année dernière, nous l’avons tenue aujourd’hui en réglant le cas des non-résidents établis dans l’Union européenne et en Suisse. Tout d’abord, l’arrêt de Ruyter n’a pas dit que l’on ne pouvait pas mettre en place de tels prélèvements, mais qu’il fallait les affecter à la protection sociale.

M. Gérald Darmanin, ministre. Ensuite, selon cet arrêt, puisque les États membres de l’Union européenne et la Suisse ont des règlements de sécurité sociale, il faut supprimer la CSG et la CRDS pour nos ressortissants qui y résident. C’est ce que nous avons fait et cela répond à une demande des parlementaires représentant les Français de l’étranger. Cela s’explique par le fait qu’il existe des règlements concordants au sein de l’Union européenne.

La CSG, contrairement à ce que j’ai entendu, n’ouvre pas droit à des prestations.

Mme Laurence Rossignol. Il y a quand même un lien !

M. Gérald Darmanin, ministre. Il s’agit bien d’un impôt universel : son affectation est sociale, mais il ne s’apparente pas à une cotisation, conformément au principe du financement que nous avons évoqué tout à l’heure. D’ailleurs, je le rappelle, les Français installés dans un État membre de l’Union européenne cotisent déjà à un système de sécurité sociale dans leur pays de résidence. Toutefois, ceux d’entre eux qui reviendraient sur le territoire national et qui, au bout de trois mois, deviendraient résidents auraient droit aux prestations sociales.

Pour ce qui est du financement des prestations sociales, la question qui se pose est importante : des Français qui ne résident pas sur le territoire national doivent-ils contribuer au bien national, qui comprend notamment le financement de la protection sociale, pour leurs compatriotes restés sur le territoire ou pour eux-mêmes après leur retour en France ? Je penche plutôt pour l’affirmative, sauf à considérer que l’on doit changer le principe même de notre modèle social et de son financement.

En raison du coût de ces amendements, dans la mesure où il n’y a plus de questions autour de l’arrêt de Ruyter, car c’est bien ce gouvernement qui a mis fin à de très nombreux contentieux et à l’insécurité juridique, mais aussi pour des raisons d’ordre plus « philosophique », j’émets un avis défavorable.

Mme la présidente. Madame Billon, l’amendement n° 187 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Annick Billon. Au vu des explications de M. le rapporteur général et de M. le ministre, je prends acte que des solutions différentes sont proposées. Concernant le coût de 180 millions d’euros, je regrette que les collègues qui ont inspiré ces amendements soient absents. Sachant néanmoins que l’adoption du premier amendement rendra les suivants sans objet, je retire mon amendement.

Mme la présidente. L’amendement n° 187 rectifié ter est retiré.

La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.

M. Richard Yung. Il est vrai que ce débat revient régulièrement depuis plus de dix ans. Mais aujourd’hui nous avons progressé dans la transcription, si j’ose dire, de la jurisprudence de Ruyter dans notre législation. Pour nous qui représentons les Français de l’étranger, le combat continue, puisque nous leur devons cela.

Quand vous résidez en dehors de l’Union européenne et que vous n’êtes pas adhérent à un régime de sécurité sociale européen, vous devez normalement cotiser à la sécurité sociale du pays de résidence et, en général, à la Caisse des Français à l’étranger, la CFE. Il serait délicat d’expliquer aux Français concernés qu’ils doivent en plus contribuer pour près de 47 % – je le dis de mémoire – au régime français, dont ils ne bénéficient pas, sauf dans les cas particuliers que vous avez mentionnés – le retour en France et la question de la cotisation d’assurance maladie, la COTAM, sur laquelle nous allons revenir.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 184 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 254.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 446 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 rectifié ter, 40 rectifié quater et 255.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 629, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 68

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) Au dernier alinéa du même III, les mots : « 40 % du produit des contributions visées aux 1° et 2° » sont remplacés par les mots : « 24 % du produit des contributions mentionnées aux 1° et 3° » ;

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il s’agit d’un amendement de coordination.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Favorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 629.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 62, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéas 129 à 160

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement a pour objet de rejeter le principe de réduction d’affectation de la TVA à la sécurité sociale, dont l’article 19 de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale entend tirer les conséquences sur la répartition du produit de la taxe sur les salaires et de la CSG entre organismes.

En effet, s’il est légitime que l’État puisse bénéficier, dans une certaine mesure, du retour à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale, ces coupes ne sont pas acceptables en l’état : en premier lieu, parce qu’elles préemptent dès à présent des excédents hypothétiques dont la réalité devra être constatée ; en deuxième lieu, parce qu’elles ne semblent pas compatibles avec le remboursement de la dette résiduelle de la branche maladie et du FSV d’ici à 2022, selon la trajectoire définie par le Gouvernement lui-même en annexe B ; en troisième lieu, parce qu’il est nécessaire que le Gouvernement et le Parlement s’entendent sur les principes qui régiront l’équilibre à long terme des comptes sociaux, par exemple lors de la réforme institutionnelle à venir ou d’un débat que nous organiserions en ce sens, avant de prendre des mesures jusqu’en 2022. À cet égard, la remise d’un rapport du Gouvernement ne saurait engager à elle seule l’ensemble des pouvoirs publics, même si ce point fondamental est versé au dossier.

Il est donc proposé de supprimer les réaffectations de ressources prévues pour les années 2021 et 2022 en ce qui concerne la TVA.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Même si cet amendement soulève des enjeux importants, il est le miroir de mesures ayant trait à la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, qui figurent dans le projet de loi de finances…

M. Gérald Darmanin, ministre. L’hypothèse est 2020, 2021 ou 2022. Le présent amendement visant à modifier profondément la structuration des mesures insérées par le Gouvernement dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale et dans le projet de loi de finances, j’émets un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 62.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 19, modifié.

(Larticle 19 est adopté.)

Article 19
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article addtionnel après l'article 19 - Amendement n° 253 rectifié ter

Articles additionnels après l’article 19

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 568 rectifié, présenté par M. Yung, est ainsi libellé :

Après l’article 19

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 18

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 131-9 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Par dérogation au premier alinéa du présent article, aucune cotisation d’assurance maladie, maternité, invalidité et décès n’est due au titre des avantages de retraite servis aux personnes dont le montant des revenus de l’avant-dernière année tels que définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts n’excède pas le seuil mentionné à la première phrase du 1° du III de l’article L. 136-8 du présent code.

« Par dérogation au premier alinéa du présent article, les avantages de retraite servis aux personnes dont le montant des revenus de l’avant-dernière année tels que définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts, d’une part, excède le seuil mentionné à la première phrase du 1° du III de l’article L. 136-8 du présent code et, d’autre part, est inférieur au seuil mentionné à la première phrase du 2° du III de l’article L. 136-8 du présent code se voient appliquer un taux réduit fixé par décret. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Richard Yung.

M. Richard Yung. Cet amendement complète les précédents en prévoyant que les retraités, à la fois fiscalement domiciliés à l’étranger et affiliés à un régime obligatoire de sécurité sociale français, y compris les adhérents à la Caisse des Français à l’étranger, ne sont pas assujettis à la CSG et à la CRDS dont nous avons parlé, au moins au titre de leurs pensions. Pourtant, ils doivent acquitter une taxe, la cotisation d’assurance maladie, au taux de 3 % à 4 %, en contrepartie de laquelle leur est garanti l’accès aux services de soins et de sécurité sociale à leur retour en France, qu’il s’agisse de soins programmés ou inopinés.

La COTAM s’applique de façon uniforme, sans distinction du montant de la pension, alors que les retraités qui résident en France et dont les pensions sont inférieures à un certain plafond sont soumis à des taux réduits.

Je vous propose, au travers de cet amendement, d’introduire une notion de dégressivité dans la COTAM, c’est-à-dire d’exonérer les retraités dont les revenus sont inférieurs ou égaux à 11 000 euros et de soumettre à un taux réduit les retraités dont les revenus sont compris entre 11 000 euros et 14 000 euros, à l’image de la dégressivité qui est appliquée en France sur la CSG et la CRDS.

Article additionnel après l'article 19 - Amendement n° 568 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article addtionnel après l'article 19 - Amendement n° 4 rectifié decies (début)

Mme la présidente. L’amendement n° 253 rectifié ter, présenté par Mme Renaud-Garabedian, M. Magras, Mme Gruny, MM. de Nicolaÿ et del Picchia, Mmes Boulay-Espéronnier, Delmont-Koropoulis et Lamure et MM. H. Leroy, Babary et Cadic, est ainsi libellé :

Après l’article 19

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 131-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 131-… ainsi rédigé :

« Art. L. 131-… – I. – Par dérogation au 1° de l’article L. 131-2, ne sont pas assujettis à une cotisation d’assurance maladie, maternité, invalidité et décès les avantages de retraite servis aux assurés du régime général domiciliés et établis hors de France, et dont les revenus de l’avant-dernière année, définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts sont inférieurs à 10 996 € pour la première part de quotient familial, majorée de 2 936 € pour chaque demi-part supplémentaire ;

« II. – Les avantages de retraite servis aux assurés du régime général domiciliés et établis hors de France, et dont les revenus de l’avant-dernière année, définis au IV de l’article 1417 du code général des impôts, sont supérieurs aux sommes mentionnées au I mais inférieurs à 14 375 € pour la première part de quotient familial, majorée de 3 838 € pour chaque demi-part supplémentaire, sont assujettis à une cotisation d’assurance maladie, maternité, invalidité et décès à un taux réduit fixé par décret.

« Les seuils mentionnés au présent article sont revalorisés au 1er janvier de chaque année, conformément à l’évolution en moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, constatée pour l’avant-dernière année et arrondis à l’euro le plus proche, la fraction d’euro égale à 0,50 étant comptée pour 1. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian.

Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Monsieur le ministre, il existe deux catégories de retraités résidant en France.

Ceux dont les revenus sont supérieurs à 900 euros mensuels s’acquittent de la CRDS, de la CSG, de la contribution annuelle de solidarité pour l’autonomie, la CASA, ainsi que d’une cotisation annuelle de sécurité sociale, l’ensemble représentant environ 10 %.

Ceux dont les revenus sont mensuellement inférieurs à 900 euros par mois sont exonérés des cotisations et prélèvements sociaux.

Quant aux retraités résidant à l’étranger, aucune distinction n’est prévue en fonction du niveau de retraite. Ils sont tous soumis à la COTAM, la cotisation de substitution aux prélèvements sociaux précédemment mentionnés, qui couvre leurs frais médicaux lorsqu’ils viennent temporairement en France – ils s’acquittent de cette taxation, quand bien même ils n’usent pas de ce droit. Ils cotisent également à la CFE, ou à un système équivalent, qui couvre la prise en charge de soins des Français de l’étranger quand ils se trouvent à l’étranger.

Cette double imposition dont le montant total représente environ 8 % est aujourd’hui due par l’ensemble des retraités français vivant à l’étranger, quel que soit le montant de leur retraite. Elle est évidemment lourde pour les non-résidents fiscaux percevant une « petite retraite » quand il s’agit de leur seule pension. J’en veux pour preuve le nombre d’associations et de consulats à l’étranger qui ont à gérer ces problèmes.

Cet amendement vise donc à exonérer de la COTAM les Français de l’étranger retraités qui encaissent tous les mois une somme inférieure à 900 euros. Il s’agit ainsi d’unifier la réglementation fiscale concernant l’ensemble de ces retraités modestes.

Monsieur le ministre, adopter cet amendement reviendrait à faire un geste pour ces petits retraités, qui se sentent souvent incompris et délaissés par la France.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je suis dubitatif sur cette explication, madame la sénatrice, car vous proposez un système progressif qui, bien qu’il ait certes des conséquences pour les petits retraités, substituera à un taux fixe un taux lié au revenu fiscal, tel qu’il résulte du système progressif de l’impôt sur le revenu. Ce dispositif me paraît d’autant plus complexe que nous ne sommes pas en mesure de connaître véritablement le revenu fiscal de référence des intéressés.

Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, ministre. Ce débat est intéressant mais complexe, comme l’a souligné à juste titre M. le rapporteur général. Le dispositif ne peut être accepté en l’état, puisqu’il fait référence au revenu fiscal de référence, le RFR. Or, à ma connaissance, les Français de l’étranger en sont dépourvus, puisqu’ils ne sont pas soumis, pour leur déclaration, au système fiscal français. C’est pourquoi, même si un tel amendement était adopté, nous ne pourrions pas l’appliquer.

Cela étant, je veux bien poursuivre avec vous le débat de fond. Je commencerai par évaluer la situation pour que chacun d’entre vous comprenne bien de quoi il s’agit. Les Français résidant en France doivent s’acquitter de la CSG et de la CRDS, et les non-résidents paient la COTAM, qui n’est pas progressive. Or certains sénateurs souhaitent mettre en place une progressivité de cet impôt social.

M. Richard Yung. C’est une contribution !

M. Gérald Darmanin, ministre. Merci de cette précision, monsieur le sénateur !

Est-il judicieux d’instaurer cette progressivité ? À mon sens, à moins de vouloir aggraver le déséquilibre de nos finances publiques, elle suppose une augmentation de la contribution de certains et une diminution, voire une suppression, pour d’autres. Madame la sénatrice, votre argumentation se heurte à deux difficultés. D’une part, le taux de la COTAM est plus faible que celui de la CSG acquittée par les résidents sur le territoire national.

M. Richard Yung. Près de 3 % !

M. Gérald Darmanin, ministre. D’autre part, en l’absence de RFR, le système devient inégalitaire, puisqu’il ne porte que sur les revenus des retraites. En effet, la CSG se déclenche pour toute forme de revenu, et pas simplement les retraites. Or il se peut que des retraités percevant 900 euros ou 1 000 euros par mois disposent par ailleurs de revenus fonciers ou de revenus du capital très importants – j’en connais dans ma commune ; il serait injuste de les exonérer de contribution. Et je connais des retraités qui perçoivent une pension moins modeste que d’autres, mais dont le revenu mensuel est inférieur, car ils n’ont pas de propriétés ou de revenus fonciers.

Trois questions se posent : premièrement, la cotisation ne peut porter sur le RFR, puisqu’il n’existe pas ; deuxièmement, si la cotisation est proportionnelle aux revenus, alors travaillons conjointement avec la commission des affaires sociales pour trouver une solution, même si l’on sait d’ores et déjà qu’une certaine inégalité persistera – je ne suis pas certain que ce soit votre objectif – ; troisièmement, il faut tenir compte de l’intégralité des revenus, et pas simplement des retraites, à moins que vous assumiez la différence de traitement entre les retraités non-résidents et les retraités résidents.

Telles sont les raisons pour lesquelles, même si ces amendements sont intéressants, ils ne peuvent être adoptés en l’état.

Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.

M. Richard Yung. Je suis assez sensible à vos critiques, monsieur le ministre, car tout cela n’est pas simple. Je suis prêt à retirer mon amendement, à condition que nous puissions travailler avec vos équipes, afin de mettre au point une mécanique qui « tourne ».

Mme la présidente. La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, pour explication de vote.

Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Si une séance de travail est prévue afin de réfléchir à cette question, je retirerai de bonne grâce mon amendement, comme mon collègue.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Gérald Darmanin, ministre. Madame Renaud-Garabedian, monsieur Yung, j’accepte bien volontiers cette suggestion de réfléchir ensemble à ce problème. À ce propos, votre collègue députée représentant les Français de l’étranger, Mme Genetet, a été missionnée par le Premier ministre pour établir un rapport sur la fiscalité des Français de l’étranger, mais elle a peu abordé la fiscalité sociale. Par conséquent, je suis prêt à évoquer cette question avec le Premier ministre afin que l’un d’entre vous approfondisse le sujet, notamment sur les différences entre les résidents de l’Union européenne et les autres.

Je voudrais maintenant souligner le fait que Mme la ministre des solidarités et de la santé et moi-même avons pris l’initiative de supprimer l’augmentation de la COTAM pour les Français de l’étranger, après avoir été interpellés par un certain nombre de sénateurs, dont M. Yung. Nous n’étions en effet pas en mesure de prévoir pour cette cotisation, dont l’augmentation aurait dû être le miroir de l’augmentation de la CSG en France, une augmentation proportionnelle suffisamment équitable en fonction des différents revenus, contrairement à ce que nous avions pensé.

Je vous propose d’organiser des réunions de travail entre nous et de confier au Sénat, s’il le souhaite, une mission sur le sujet complexe de la fiscalité sociale des Français de l’étranger, qui permettrait d’aboutir à un rapport, miroir de celui qu’a élaboré votre collègue députée.

Si vous acceptez de retirer vos amendements, je prendrai contact dès la fin de cette séance avec M. le Premier ministre.

Mme la présidente. Monsieur Yung, l’amendement n° 568 rectifié est-il maintenu ?

M. Richard Yung. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 568 rectifié est retiré.

Madame Renaud-Garabedian, l’amendement n° 253 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Non, je le retire, madame la présidente.

Article addtionnel après l'article 19 - Amendement n° 253 rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article addtionnel après l'article 19 - Amendement n° 4 rectifié decies (interruption de la discussion)

Mme la présidente. L’amendement n° 253 rectifié ter est retiré.

L’amendement n° 4 rectifié decies, présenté par M. Regnard, Mme Noël, MM. Karoutchi, H. Leroy, Danesi, Bazin, Frassa et Wattebled, Mme Deromedi, MM. Courtial, B. Fournier et J.M. Boyer, Mmes Dumas et Dindar, M. Duplomb, Mme Lherbier, MM. Charon, Moga, Paccaud et Perrin, Mme Bories et MM. Mayet, Babary, Segouin et Sido, est ainsi libellé :

Après l’article 19

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 1 du chapitre 3 du titre 2 du livre 1er du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 123-2-… ainsi rédigé :

« Art. L. 123-2-… – Les conventions collectives du travail prévues aux articles L. 123-1, L. 123-2 et L. 123-2-1, les accords collectifs nationaux et leurs avenants, pris en application des mêmes articles, ne peuvent pas avoir pour effet de permettre aux employeurs des agents auxquels s’appliquent ces conventions collectives ou accords collectifs de prendre en charge le premier jour de salaire non couvert par l’assurance maladie en application de l’article L. 323-1. »

La parole est à Mme Nassimah Dindar.

Mme Nassimah Dindar. Les organismes de sécurité sociale sont des organismes de droit privé chargés d’une mission de service public. Les personnels de ces organismes sont des agents de droit privé relevant, pour le régime général, de l’Union des caisses nationales de sécurité sociale, l’UCANSS. Comme tous salariés du secteur privé, les agents des organismes de sécurité sociale voient, en cas d’arrêt maladie, leur salaire maintenu par la sécurité sociale après trois jours de carence. Toutefois, comme dans de nombreux secteurs d’activité, la convention collective garantit un maintien de salaire dès le premier jour d’arrêt maladie.

Or le service public se caractérise par un fort absentéisme de courte durée qui a justifié l’instauration d’un jour de carence dans la fonction publique. La sécurité sociale est également connue pour son fort absentéisme de courte durée critiqué à de multiples reprises par la Cour des comptes.

La présente mesure vise à rendre effective l’application d’un jour de carence pour les agents des organismes de sécurité sociale, dans le prolongement de la décision d’instaurer un jour de carence dans la fonction publique. Il s’agit d’une mesure d’équité entre agents publics, d’autant plus justifiée que, dans un certain nombre d’organismes comme les agences régionales de santé, les ARS, se côtoient fonctionnaires et agents de droit privé d’organismes de sécurité sociale.

Cette mesure renforcera également l’efficience des organismes de sécurité sociale, leur permettant d’atteindre les objectifs de réduction des coûts de fonctionnement, sans pour autant remettre en cause le service rendu aux assurés sociaux.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. S’agissant de personnes chargées d’un service public, la question de la cohérence avec le traitement des fonctionnaires sur une telle question se pose.

Néanmoins, le procédé ne nous paraît pas très classique, puisqu’il revient à mêler le législateur à l’élaboration de conventions collectives applicables à des agents de droit privé et serait ainsi constitutif d’une rupture d’égalité avec les autres salariés du secteur privé.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Le Gouvernement émet le même avis que la commission, pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié decies.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.)

PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Article addtionnel après l'article 19 - Amendement n° 4 rectifié decies (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Discussion générale

3

Candidatures à une éventuelle commission mixte paritaire

M. le président. J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

4

Article addtionnel après l'article 19 - Amendement n° 4 rectifié decies (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Troisième partie

Financement de la sécurité sociale pour 2019

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 20

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2019.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du titre II de la troisième partie, à l’article 20.

TROISIÈME PARTIE (suite)

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2019

TITRE II (suite)

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

Troisième partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 20 bis (nouveau)

Article 20

L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :

1° Après le II sexies de l’article 4, il est inséré un II septies ainsi rédigé :

« II septies. – La couverture des déficits des exercices 2014 à 2018 des branches mentionnées aux 1°, 3° et 4° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale et du fonds mentionné à l’article L. 135-1 du même code, déduction faite de la part des déficits des exercices 2014 et 2015 couverte en application du II quinquies du présent article, est assurée par des transferts de la Caisse d’amortissement de la dette sociale à l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, dans la limite de 15 milliards d’euros.

« Dans le cas où le montant des déficits cumulés mentionnés au premier alinéa du présent II septies excède 15 milliards d’euros, les transferts sont affectés par priorité à la couverture des déficits les plus anciens et, pour le dernier exercice, dans l’ordre des branches fixé au même premier alinéa.

« Les montants et les dates des versements correspondants ainsi que, le cas échéant, de la régularisation au vu des montants définitifs des déficits de l’exercice 2018 sont fixés par décret. » ;

2° Au 2° de l’article 6, les références : « aux IV et IV bis de l’article L. 136-8 » sont remplacées par les références : « au c du 3° et au b du 3° bis de l’article L. 131-8 ».

M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, sur l’article.

M. Jean-Noël Cardoux. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, cet article a pour objet l’amortissement de la dette de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES.

Pendant plusieurs années, j’ai rappelé à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale qu’il serait prudent de transférer la totalité des déficits cumulés de l’ACOSS à la CADES. Le Gouvernement nous a entendus : cette année, il propose de transférer à la CADES 15 milliards d’euros des déficits résiduels de l’ACOSS. Toutefois, il ne s’agit que d’une écoute partielle. Au total, les déficits de l’ACOSS représentent 26 milliards d’euros ; quelque 11 milliards d’euros restent donc en déshérence. Pour l’heure, ils relèvent toujours de l’ACOSS.

Certes, on nous assure que ces 11 milliards d’euros seront amortis par les excédents à venir du régime général de la sécurité sociale. Mais ces excédents ont été calculés à un moment où la croissance était plus forte et où l’on constatait une augmentation de la masse salariale. Or, depuis quelques mois, on observe un ralentissement considérable à cet égard. On peut donc s’interroger : les 11 milliards d’euros dont il s’agit pourront-ils effectivement être amortis de cette manière, sachant que l’objectif est de ne pas dépasser la date d’expiration de la CADES ?

Parmi les sources d’alimentation de la CADES, vous prévoyez environ 5 milliards d’euros issus de la CSG – il faut espérer que les remboursements de la CADES se poursuivent au rythme actuel et que les taux d’intérêt n’augmentent pas.

À mon sens, il aurait été plus prudent de transférer la totalité de cette dette à la CADES. Conformément à la logique vertueuse d’équilibre des comptes de la sécurité sociale, mieux vaudrait épurer les déficits accumulés par l’ACOSS, sans modifier la date d’expiration de la CADES, et en utilisant l’outil mis en place pour abonder la CADES, à savoir la contribution au remboursement de la dette sociale, la CRDS. Une augmentation de taux de quelques dixièmes de point suffirait, quitte à réduire la CSG d’autant, de sorte que, pour les Français, le prélèvement soit à peu près identique.

Cette solution aurait eu la vertu, premièrement, de mettre les compteurs à zéro, et deuxièmement, de bien associer la CRDS à l’extinction de la dette sociale et à la fin de la CADES. En supposant, comme je le souhaite, que l’on parvienne à résorber intégralement la dette sociale en 2024, date d’expiration de la CADES, on pourrait ainsi adresser un signal fort aux Français en leur disant : « Nous avons amorti la dette sociale et nous supprimons la CRDS. »

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, sur l’article.

M. Éric Bocquet. Cet article pose la question cruciale de la dette, déjà évoquée à l’article 1er, et ses dispositions appellent tout notre intérêt : quelques informations méritent d’être révélées, et il est bon que nous ayons un échange sur ce sujet.

L’article 20 entend procéder à une forme de consolidation de la dette sociale, en soldant le report actuellement à nouveau négatif de l’ACOSS dans les écritures de la CADES. Je précise, à ce titre, que la CRDS constitue aujourd’hui l’impôt sur le revenu le plus large de notre droit positif.

À l’examen des documents financiers de la CADES, il semble que cette nouvelle consolidation assure pour environ une année et demie encore l’existence de la caisse comme des contributions qui l’alimentent, la CRDS ayant été rejointe pour partie par la CSG. Le tout, aujourd’hui, permet de totaliser plus de 15 milliards d’euros de recettes fiscales. Fin 2017, ces dernières ont dégagé un intéressant excédent permettant l’amortissement d’une partie de la dette sociale, qui atteignait alors 120 milliards d’euros et devrait s’établir aux alentours de 105 milliards d’euros cette année.

Toutefois, il convient de rappeler que la CADES est également émettrice de titres de créance. Elle est ainsi contrainte de consacrer, chaque année, environ 3 milliards d’euros de ses recettes au paiement des intérêts attachés aux emprunts et autres bons de caisse qu’elle place sur les marchés financiers.

Nos compatriotes ont donc, depuis 1996, consacré des sommes très élevées, entre 50 et 60 milliards d’euros, au remboursement des intérêts d’une dette sociale dont ils ne sont, à nos yeux, pas tout à fait responsables.

Puisque l’occasion nous en est donnée, nous avons voulu examiner ce sujet de près. Qui gère la dette de la sécurité sociale française ? Qui assure l’émission des titres de créance correspondants sur les marchés financiers ? Les cotisants le savent-ils ? Je n’en suis pas certain. Tous les membres du Sénat le savent-ils ? Je n’en suis pas certain non plus.

Cette mission est confiée à des spécialistes en valeurs du Trésor – c’est ainsi qu’on les appelle. En anglais, on les nomme dealers. (Sourires sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) Excusez-moi, c’est l’expression qui est utilisée dans le jargon financier anglo-saxon.

Les établissements dont il s’agit sont des banques très sérieuses : la Bank of America, la banque Barclays, le Crédit agricole, le Crédit suisse, la Royal Bank of Scotland. Enfin, l’arrangeur, le chef de file de ces opérations est UBS Limited. Aujourd’hui même s’achève le procès intenté à cette banque devant la 32e chambre correctionnelle de Paris, pour le motif que vous savez : blanchiment de fraude fiscale en bande organisée.

M. le président. Veuillez conclure, cher collègue.

M. Éric Bocquet. C’est donc la banque UBS qui gère le placement sur les marchés financiers des titres de dette de l’ACOSS. J’ai ici un document de mars 2018 qui l’atteste, pour un montant de 40 milliards d’euros, en euro commercial papers : tout un programme ! (M. Éric Bocquet brandit un document.) Cette banque est très bien évaluée par les agences de notations Fitch, Moody’s, Standard & Poor’s.

M. le président. Il faut vraiment conclure.

M. Éric Bocquet. Je souhaitais simplement offrir ce point à la réflexion de tous !

M. le président. L’amendement n° 63, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Remplacer les mots :

des branches mentionnées aux 1°, 3° et 4° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale et du fonds mentionné à l’article L. 135-1 du même code

par les mots :

de la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2 du code de la sécurité sociale, du fonds mentionné à l’article L. 135-1 du même code et de la branche mentionnée au 4° de l’article L. 200-2 dudit code

II. – Alinéa 4

Supprimer les mots :

des branches

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement a pour objet de transférer prioritairement à la CADES les déficits des branches et du fonds dont la trajectoire de solde rend le remboursement de la dette plus aléatoire.

Dans cette perspective, la branche maladie et le fonds de solidarité vieillesse, le FSV, doivent pouvoir transférer leur dette en priorité. La branche famille devrait pouvoir financer ses déficits par elle-même. Quant à la branche vieillesse, elle n’a pas besoin de transférer de dettes à la CADES. Je précise que ce fléchage prioritaire ne remet pas en cause le principe du transfert à la CADES.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le rapporteur général, vous l’avez bien compris, le Gouvernement s’est engagé à rembourser la totalité de la dette sociale d’ici à 2024.

Votre amendement tend à modifier l’ordre de priorité des déficits passés ; il s’agit, en fait, d’éviter de reconstituer des capitaux propres trop importants dans la branche famille, laquelle est déjà à l’équilibre, voire excédentaire. Nous sommes favorables à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 63.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 64, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Pour les années 2020 à 2023, la Caisse d’amortissement de la dette sociale instituée par l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale bénéficie du versement d’une fraction supplémentaire du produit des contributions mentionnées aux 1° et 3° du I et aux II et III de l’article L. 136-8 du code de la sécurité sociale correspondant, par rapport au produit perçu en 2019, à un montant de :

1° 1,5 milliard d’euros en 2020 ;

2° 3,5 milliards d’euros en 2021 ;

3° 5 milliards d’euros en 2023.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à tirer les conséquences de la suppression de la répartition de la CSG entre administrations de sécurité sociale pour les années 2021 et 2022, à laquelle a procédé la commission à l’article 19.

En revanche, il importe de conserver le principe d’une majoration de la part de TVA dévolue à la CADES pour permettre à cette caisse de financer la dette qui lui sera transférée en application de l’article 20.

Enfin, il est expressément indiqué que la CADES percevra un produit supplémentaire de 5 milliards d’euros en 2023 – cette disposition ne figure pas actuellement dans cet article – afin de boucler le financement de l’amortissement de cette nouvelle dette.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 64.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 20, modifié.

(Larticle 20 est adopté.)

Article 20
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 20 ter (nouveau)

Article 20 bis (nouveau)

I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° L’article L. 421-21 est abrogé ;

2° Le dernier alinéa de l’article L. 757-1 est supprimé.

II. – Le I entre en vigueur le 1er septembre 2019.

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, sur l’article.

M. Philippe Mouiller. Madame le ministre, l’article 20 bis a été adopté discrètement par l’Assemblée nationale, par le biais d’un amendement du Gouvernement. Il vise à abroger l’affiliation des élèves des lycées professionnels maritimes et des étudiants de l’École nationale supérieure maritime, l’ENSM, au régime des marins.

Pour l’heure, ces élèves et étudiants ne relèvent pas du régime spécifique des étudiants, mais sont affiliés au régime spécial des marins pour ce qui concerne la santé et la retraite. Il s’agit du régime de sécurité sociale obligatoire des marins du commerce, de la pêche et de la plaisance professionnelle, géré par l’Établissement national des invalides de la marine, l’ENIM.

Le présent article inclut donc les élèves des lycées professionnels maritimes et les étudiants de l’ENSM dans le dispositif de droit commun. Toutefois, le régime spécial des marins gère la caisse de retraite des marins du commerce, de la pêche et de la plaisance professionnelle. En adoptant cette disposition, on prive ce régime spécifique de nouveaux entrants.

Je comprends la volonté que traduisent ces dispositions. Mais, dans cette période de discussions relatives aux retraites, et à la veille d’une grande réforme dont la préparation est confiée à M. Delevoye, cette mesure ne vous semble-t-elle pas prématurée ? De plus, les intéressés ont-ils été associés à cette prise de décision ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur le sénateur, le régime des étudiants marins a fait l’objet de discussions avec le ministère des transports. Je vous rappelle que la loi relative à l’orientation et à la réussite des étudiants, ou loi ORE, a supprimé le régime de sécurité sociale étudiant et, avec lui, la cotisation à ce régime, ce qui représente, pour chaque étudiant, une économie annuelle de 217 euros dès cette année. Il s’agit évidemment d’une mesure très intéressante pour les familles.

Désormais, les étudiants sont maintenus au régime de leurs parents jusqu’à l’âge de vingt-quatre ans, au-delà duquel ils basculent vers le régime général. Jusqu’à présent, les étudiants marins conservent un régime dérogatoire, fondé sur le principe d’une cotisation. Ils sont les seuls dans ce cas. Grâce à l’amendement adopté par l’Assemblée nationale, ils pourront bénéficier, eux aussi, de la gratuité de la cotisation ; on leur appliquera le même régime qu’aux autres étudiants.

Enfin, je vous précise que cette mesure a fait l’objet d’une concertation au sein du Conseil supérieur des gens de mer.

M. le président. Je mets aux voix l’article 20 bis.

(Larticle 20 bis est adopté.)

Article 20 bis (nouveau)
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Article 20 quater (nouveau)

Article 20 ter (nouveau)

Le premier alinéa du 21° de l’article L. 311-3 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « , à l’exception des experts requis, commis ou désignés par les juridictions de l’ordre judiciaire ou par les personnes agissant sous leur contrôle afin d’accomplir une mission d’expertise indépendante ».

M. le président. L’amendement n° 122 rectifié bis, présenté par MM. Fouché et Guerriau, Mmes Goy-Chavent et Vullien, MM. Wattebled, Decool, Chasseing, Moga, Delcros, Bas, Vogel, Chatillon, Bouloux et Babary, Mmes Morin-Desailly et de la Provôté et MM. Malhuret et Cambon, est ainsi libellé :

Supprimer cet article

La parole est à M. Daniel Chasseing.

M. Daniel Chasseing. Depuis l’an 2000, les médecins et les psychologues experts judiciaires sont qualifiés de collaborateurs occasionnels du service public, ou COSP, et sont, en cette qualité, soumis au régime général. En 2014, un rapport a révélé que ces agents n’avaient jamais été déclarés par le ministère de la justice. Autrement dit, ce dernier a, pendant près de quinze ans, employé « au noir » des milliers de collaborateurs. On n’aurait sans doute pas attendu si longtemps pour un artisan…

M. Daniel Chasseing. Pour régulariser cette situation, Mme Taubira a, par décret du 11 décembre 2015, choisi d’exclure de ce régime les experts désignés par le juge judiciaire. Toutefois, ce décret a été annulé par le Conseil d’État en mars 2017.

M. Charles Revet. Toute cette affaire est incroyable !

M. Daniel Chasseing. À présent, l’article 20 ter a pour objet d’exclure du dispositif des COSP l’ensemble des experts judiciaires, sans distinction ni droit d’option. Cette situation affecte tout particulièrement les médecins légistes, les psychiatres et les psychologues, dont les honoraires au pénal sont tarifés.

À l’heure où l’on constate une grave pénurie de médecins experts près les tribunaux, cette exclusion du régime général sans revalorisation suffisante du montant des expertises aura des conséquences désastreuses sur le déroulement du procès pénal et sur l’application des peines. Voilà pourquoi nous proposons la suppression de cet article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement tend à supprimer l’article 20 ter, relatif à l’exclusion du régime général des experts psychiatres au titre des rémunérations qu’ils perçoivent en qualité d’experts requis par la justice.

Monsieur Chasseing, la commission éprouve elle aussi la préoccupation que vous exprimez. Elle propose d’ailleurs que cette exclusion concerne uniquement les experts déjà affiliés à un régime de travailleurs non salariés ; ainsi, chacun resterait dans son régime d’origine.

En conséquence, je vous demande de vous rallier à l’amendement de la commission, que nous allons examiner dans un instant.

M. Daniel Chasseing. Je retire mon amendement, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 122 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 65, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Compléter cet article par les mots :

et qui sont affiliés à un régime de travailleurs non salariés

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement a pour objet de maintenir les experts relevant du régime général dans ce même régime quand ils sont requis, commis ou désignés par l’autorité judiciaire. Comme le prévoyait l’article D. 311-1 du code de la sécurité sociale avant son annulation par le Conseil d’État, seuls les experts déjà affiliés à un régime de travailleurs non salariés ne relèveraient pas du régime général.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous estimons que la commission a trouvé une solution judicieuse, et nous sommes favorables à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 65.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 20 ter, modifié.

(Larticle 20 ter est adopté.)

Article 20 ter (nouveau)
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Article additionnel après l'article 20 quater - Amendement n° 466 rectifié bis

Article 20 quater (nouveau)

I. – L’ordonnance n° 2018-470 du 12 juin 2018 procédant au regroupement et à la mise en cohérence des dispositions du code de la sécurité sociale applicables aux travailleurs indépendants est ratifiée.

II. – L’ordonnance n° 2018-474 du 12 juin 2018 relative à la simplification et à l’harmonisation des définitions des assiettes des cotisations et contributions de sécurité sociale est ratifiée.

III. – Au premier alinéa de l’article L. 313-1 du code de la construction et de l’habitation, après le mot : « activité », sont insérés les mots : « versés par eux au cours de l’exercice écoulé, ».

IV. – Au I de l’article L. 131-6 du code de la sécurité sociale, la référence : « L. 133-6-8 » est remplacée par la référence : « L. 613-7 ». – (Adopté.)

Article 20 quater (nouveau)
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Art.icle additionnel après l'article 20 quater - Amendement n° 468 rectifié bis

Articles additionnels après l’article 20 quater

M. le président. L’amendement n° 466 rectifié bis, présenté par Mme Rossignol, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, J. Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 20 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du dernier alinéa du XVI de l’article 50 de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017, les mots : « Dans un délai de six mois à compter de la remise de ce rapport » sont remplacés par les mots : « Au plus tard le 31 décembre 2019 ».

La parole est à Mme Laurence Rossignol.

Mme Laurence Rossignol. En vertu de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, la CIPAV, caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse des professions libérales, a vu son périmètre redéfini. Près de 400 professions réglementées et non réglementées relevaient de son régime ; désormais, elle ne comprend plus que 21 professions réglementées.

Concrètement, en dehors de ces 21 professions, les créations d’activité sont, dès 2018, affiliées au régime général, pour ce qui concerne les microentrepreneurs. Toutes les autres suivront en 2019.

En conséquence, la CIPAV ne bénéficie plus du flux de cotisations lié à ces créations d’activité. Cette caisse gère actuellement 16 milliards d’euros d’engagements de retraite. L’opération de transfert de près de 80 % de sa population adhérente risque de déstabiliser durablement le régime complémentaire dont il s’agit et, plus largement, le régime de base des professions libérales ; au regard des effectifs, la CIPAV est la plus importante des sections professionnelles composant l’organisation autonome d’assurance vieillesse des professions libérales.

Par son article 50, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 a prévu un mécanisme de compensation financière, lequel doit être organisé par une convention-cadre conclue entre les régimes concernés.

À travers cet amendement, nous proposons donc d’organiser la compensation financière, par le biais d’une convention-cadre, avant le 31 décembre 2019, afin de neutraliser l’impact financier provoqué par le transfert des adhérents de la CIPAV vers le régime général.

Mes chers collègues, divers groupes de pression nous envoient régulièrement des amendements. Dans un souci de transparence, je vous précise que ces dispositions m’ont été suggérées à l’issue d’un entretien avec les représentants de la CIPAV. Ces derniers m’ont expliqué la complexité de l’affaire dont il s’agit, et j’ai compris à la fois l’intérêt, la cohérence et la justesse de leur proposition. Voilà pourquoi j’ai décidé de déposer cet amendement avec mes collègues du groupe socialiste et républicain. Il ne s’agit pas pour autant d’un amendement lobbyiste : certes, ces dispositions défendent les intérêts d’un régime, mais, ce faisant, elles en défendent l’équilibre.

En outre, nous sommes dans une période de refonte et d’universalisation des régimes de retraite. Dès lors, il me paraîtrait plus juste d’aligner les décisions relatives à la CIPAV sur les mesures prises dans le cadre de la réforme globale des régimes de retraite.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La question que Mme Rossignol soulève à travers cet amendement nous paraît légitime, même si, sur le fond, nous ne souhaitons pas que la réforme de la CIPAV soit encore retardée. Nous avons, nous aussi, reçu nombre de propositions sur ce sujet, émanant en particulier de la CIPAV. À mon sens, les questions posées à ce titre sont parfaitement recevables.

Madame la ministre, pouvez-vous nous dire où en sont les négociations, quand aura lieu la signature de la convention organisant le transfert financier dont il s’agit et quels sont les enjeux soulevés par la fin des cotisations de la CIPAV ?

La commission attend votre réponse. Néanmoins, elle n’entend pas remettre en cause le calendrier établi. Pour ne pas rouvrir un dossier déjà compliqué, elle émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. À nos yeux, il n’est pas opportun de remettre en cause l’échéance du 31 décembre 2023, en optant pour une remise de rapport au 31 décembre 2019.

Le transfert vient de commencer, le changement vient d’être mis en œuvre : il convient de garder le recul suffisant pour disposer d’une bonne visibilité quant au point d’atterrissage. Or, si l’on rapprochait l’échéance, on ne pourrait plus apprécier les effets du changement du périmètre d’affiliation et, en définitive, on aboutirait à des transferts inéquitables. Nous sommes donc défavorables à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 466 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 20 quater - Amendement n° 466 rectifié bis
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Article 21

M. le président. L’amendement n° 468 rectifié bis, présenté par Mme Rossignol, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, J. Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 20 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 8° du XVI de l’article 15 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase du quatrième alinéa, l’année : « 2019 », est remplacée par l’année : « 2021 » ;

2° Le sixième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Jusqu’à la date effective de la nouvelle affiliation, les travailleurs indépendants des professions libérales restent affiliés à la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales et à la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à Mme Laurence Rossignol.

Mme Laurence Rossignol. Sans revenir sur la réforme que je viens d’évoquer, j’apporte simplement cette précision : il est prévu de mettre en œuvre un droit d’opter pour un transfert d’affiliation au régime général, au profit des adhérents actuels de la CIPAV qui exercent une profession ne relevant pas du nouveau champ d’affiliation.

Ce droit d’option pourra s’exercer pendant une période limitée, entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2023. À titre préalable, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 prévoit plusieurs dispositions réglementaires devant être prises avant le 31 décembre 2018. Ces mesures sont indispensables à la mise en œuvre du droit d’option dont il s’agit.

Il semblerait – Mme la ministre nous le précisera – que, à deux mois de l’échéance fixée, aucune modalité d’application n’ait encore été prise ni publiée. Cet amendement vise donc à préciser que, jusqu’à la date effective de la nouvelle affiliation, les travailleurs indépendants continueront de cotiser auprès de ces deux caisses et d’en recevoir les prestations. Ainsi, les réseaux de recouvrement de l’assurance retraite pourront se coordonner et répondre aux enjeux opérationnels.

Pour résumer, ces mesures réglementaires doivent être prises avant le 31 décembre 2018. Nous sommes le 15 novembre 2018 et, de toute évidence, elles ne sont pas publiées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Là encore, la question posée par Mme Rossignol est tout à fait légitime.

Mme Laurence Rossignol. Merci, monsieur le rapporteur général !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, quand sera publié le décret précisant les modalités du droit d’option ? Le délai laissé entre sa publication et le 1er janvier 2019 est-il, à vos yeux, suffisant pour que les assurés et les services aient le temps de s’approprier ces nouvelles règles ?

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement,…

Mme Laurence Rossignol. Pourquoi, alors que vous êtes d’accord avec moi ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. … mais je souhaite obtenir des précisions à cet égard.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur le rapporteur général, madame Rossignol, je suis en mesure de vous rassurer : les textes d’application relatifs à ce droit d’option sont actuellement à la signature du ministre et devraient être publiés dans les jours à venir. Le droit d’option pourra donc entrer en vigueur le 1er janvier 2019.

En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 468 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Art.icle additionnel après l'article 20 quater - Amendement n° 468 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 21 - Amendement n° 513

Article 21

Est approuvé le montant de 5,6 milliards d’euros correspondant à la compensation des exonérations, réductions ou abattements d’assiette de cotisations ou contributions de sécurité sociale, mentionné à l’annexe 5 jointe au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.

Mme Cathy Apourceau-Poly. L’article 21 porte approbation du montant de la compensation des exonérations, réductions ou abattements de cotisations ou de contributions de sécurité sociale, qui figurent à l’annexe 5.

Ces « niches sociales », qui se sont multipliées depuis les années 1990, sont censées permettre d’atteindre des objectifs de politiques publiques, comme la baisse du coût du travail, en faveur de l’emploi ou de l’augmentation du pouvoir d’achat.

Aujourd’hui, leur coût atteint un record, puisqu’il est estimé à 63 milliards d’euros au titre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 ; et le dispositif dont il s’agit ici est un cadeau supplémentaire offert aux grands patrons, que le Gouvernement chérit tant… (M. Martin Lévrier manifeste son exaspération.) Or, vous le savez, ce projet de budget tout entier a été construit autour de l’idée de désendettement de la sécurité sociale.

Lorsqu’on voit l’importance de ce manque à gagner pour notre sécurité sociale, on ne peut s’empêcher de penser que la dette sociale résulte de choix politiques.

Madame la ministre, mes chers collègues, vous le savez, ces choix ne sont pas les nôtres. Du côté des entreprises, rien ne prouve l’efficacité des allégements de cotisations en faveur de la création d’emplois ; et, du côté des salariés, nous n’approuvons pas non plus cette politique d’exonérations. Le gain de pouvoir d’achat qu’elle est censée permettre compense difficilement les diverses mesures d’austérité que ce gouvernement a imposées aux classes les plus populaires.

De plus, vider les caisses de la sécurité sociale, ce n’est pas enrichir les salariés : les cotisations sociales sont un investissement pour l’avenir, une protection contre les mauvais jours.

Madame la ministre, si vous voulez réellement donner du pouvoir d’achat aux salariés, il faut vous attaquer au cœur du problème : la répartition des richesses, qui est de plus en plus inégalitaire en France.

Si, depuis quelques instants, nous reprenons les mêmes arguments, c’est parce qu’à nos yeux l’heure est grave pour nos concitoyens. Votre réforme mériterait un large débat de concertation. Pourquoi ne pas retenir la proposition formulée ce matin par M. Alain Milon, à savoir l’organisation d’états généraux ?

On le vérifie au fur et à mesure du débat : le projet de votre gouvernement rompt complètement avec les fondements de la sécurité sociale.

M. le président. Je mets aux voix l’article 21.

(Larticle 21 est adopté.)

Article 21
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Article 22 et annexe C

Article additionnel après l’article 21

M. le président. L’amendement n° 513, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 21

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d’un an à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l’impact des mesures d’exonération de cotisations sociales sur l’emploi, les salaires et l’investissement.

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Il s’agit, évidemment, d’un amendement d’appel ; nous demandons ici un rapport évaluant l’impact des mesures d’exonération de cotisations sociales sur l’emploi, les salaires et l’investissement.

Les premières politiques d’allégement de charges patronales sont apparues dans les années 1990. Le but était de lutter contre le chômage de masse en réduisant le coût du travail : les entreprises étaient censées utiliser cet argent supplémentaire pour embaucher de nouveaux salariés ou pour augmenter le traitement de leurs salariés déjà en poste.

Ces mesures se sont multipliées depuis les années 1990, et leur coût atteint un chiffre record dans le PLFSS pour 2019, avec un manque à gagner de plus de 40 milliards d’euros pour la sécurité sociale. Pour les dix dernières années, le montant cumulé des exonérations de cotisations s’élève à 210 milliards d’euros.

Pourtant, plus de trente ans après le début de ces politiques, le chômage de masse persiste, et les chercheurs, économistes comme sociologues, sont incapables d’affirmer unanimement que ces exonérations sont de nature à favoriser la création d’emplois.

Enfin, le comité de suivi du CICE lui-même a annoncé, dans son rapport de 2018, que ce dispositif avait un effet « modéré » sur l’emploi, alors qu’il a coûté la bagatelle de 99 milliards d’euros en six ans, auxquels vont s’ajouter les exonérations de cotisations patronales qui vont être doublées dès 2019. Savez-vous à combien ce comité évalue le nombre de créations d’emplois ? Entre 10 000 et 200 000. Ce n’est pas le groupe communiste qui le dit, mais France Stratégie ! 99 milliards d’euros pour 10 000 à 200 000 emplois. Il me semble qu’il y a là matière à organiser un petit débat politique !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. L’avis de la commission est constant : il s’agit d’une demande de rapport, cela ne nous semble pas nécessaire.

En revanche, nous sommes intéressés par les chiffres. Vous en citez, mon cher collègue, le ministre des comptes publics, Gérald Darmanin, en avançait d’autres à propos des transferts destinés à compenser les exonérations. Il serait utile en effet de disposer des chiffres que vous demandez, mais il ne me semble pas qu’un rapport soit nécessaire pour cela, il suffit d’interroger le Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur le sénateur, le Gouvernement est évidemment favorable à la transparence envers les parlementaires. Je comprends votre désir d’obtenir un rapport, mais les dispositifs d’exonération de cotisations sociales sur lesquels celui-ci porterait font déjà l’objet d’un suivi annuel et sont détaillés dans l’annexe 5 de ce PLFSS. Le Gouvernement effectue également des évaluations régulières ; il a, par exemple, présenté un rapport au Parlement sur le sujet en 2015.

De plus, les dispositifs de baisse du coût du travail que vous remettez en cause sont analysés de manière indépendante dans le cadre du comité de suivi des aides publiques aux entreprises. Celui-ci a d’ailleurs remis au début du mois d’octobre un rapport sur le CICE. Un nouveau rapport me semble donc inutile et je suis défavorable à votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Monsieur le rapporteur général, j’ai ici le rapport du comité de suivi de France Stratégie. Il n’y a qu’une seule manière de le lire ! La commission des affaires économiques a auditionné le ministre de l’économie et des finances, Bruno Le Maire. J’ai évoqué devant lui le chiffre que je viens de vous donner et il ne m’a pas contredit.

Que dit ce rapport que cite madame la ministre ? Que le CICE a coûté 99 milliards d’euros sur six ans. Souvenons-nous qu’il a été créé, non par le gouvernement auquel vous appartenez madame la ministre, mais par le précédent, sous la pression du patronat. Nous n’avons pas oublié le badge jaune de M. Pierre Gattaz, qui disait : « Donnez-nous de l’argent, vous aurez un million d’emplois ! »

M. Bernard Jomier. C’était une blague !

M. Fabien Gay. Au départ, ce dispositif a été mis en place pour l’emploi et l’innovation. Un an après, le président Hollande a expliqué qu’il allait être compliqué de vérifier que ces fonds étaient bien consacrés à l’emploi.

France Stratégie dit également qu’il est très difficile de calculer le nombre d’emplois concernés, et fournit une fourchette de 1 à 20 : entre 10 000 et 200 000. Je propose donc que nous organisions un débat politique sur le thème suivant : pour créer entre 10 000 et 200 000 emplois, est-il nécessaire de subventionner les entreprises à hauteur de 99 milliards d’euros ?

Votre gouvernement a choisi de prolonger ce dispositif. Nous en avons discuté avec le ministre, qui, s’agissant de l’exonération des cotisations patronales, nous a dit la main sur le cœur : « Ne vous inquiétez pas, si cet argent n’est pas consacré à l’innovation et à l’emploi, l’État prendra ses responsabilités dès 2020. » Je lui ai demandé comment, j’attends toujours la réponse.

Prendre ses responsabilités, qu’est-ce que ça veut dire ? Débattons-en ! Est-ce que cela signifie, par exemple, que si cet argent n’est pas affecté à l’emploi et à l’innovation, l’État exigera des entreprises qu’elles le remboursent ? C’est ce que nous proposons, mais certains ici ne seront pas d’accord avec nous. Madame la ministre, pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ce point ? Comment devons-nous entendre l’affirmation selon laquelle « l’État prendra ses responsabilités » à propos des exonérations ?

Monsieur le rapporteur général, si vous disposez d’autres chiffres ou que vous faites une lecture différente de ceux du comité de suivi de France Stratégie, je suis également preneur de vos explications !

Mme Laurence Cohen. Très bien !

M. Roger Karoutchi. Il a raison !

M. le président. Mes chers collègues, je vous prie de respecter le temps de parole qui vous est imparti.

Je mets aux voix l’amendement n° 513.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 21 - Amendement n° 513
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 23

Article 22 et annexe C

Pour l’année 2019, sont approuvées les prévisions de recettes, réparties par catégories dans l’état figurant en annexe C à la présente loi, et le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

 

(En milliards deuros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

217,5

218,0

-0,5

Accidents du travail et maladies professionnelles

14,7

13,5

1,2

Vieillesse

241,4

241,2

0,3

Famille

51,5

50,3

1,2

Toutes branches (hors transferts entre branches)

511,3

509,1

2,2

Fonds de solidarité vieillesse

16,6

18,4

-1,8

Toutes branches (hors transferts entre branches), y compris Fonds de solidarité vieillesse

509,9

509,6

0,4

Annexe C

État des recettes, par catégorie et par branche, des régimes obligatoires de base et du régime général ainsi que des recettes, par catégorie, des organismes concourant au financement de ces régimes

I. – Régimes obligatoires de base

 

(En milliards deuros)

Maladie

Vieillesse

Famille

Accidents du travail maladies professionnelles

Régimes de base

Fonds de solidarité vieillesse

Régimes de base et Fonds de solidarité vieillesse

Cotisations effectives

74,2

141,2

30,6

14,0

258,2

0,0

258,2

Cotisations prises en charge par l’État

2,5

2,4

0,6

0,1

5,5

0,0

5,5

Cotisations fictives d’employeur

0,5

40,9

0,0

0,3

41,7

0,0

41,7

Contribution sociale généralisée

73,3

0,0

12,0

0,0

84,9

16,8

101,7

Impôts, taxes et autres contributions sociales

60,8

20,9

7,8

0,0

89,6

0,0

89,5

Charges liées au non-recouvrement

-1,3

-1,1

-0,5

-0,2

-3,2

-0,1

-3,3

Transferts

2,9

36,6

0,2

0,1

28,1

0,0

10,1

Produits financiers

0,0

0,1

0,0

0,0

0,1

0,0

0,1

Autres produits

4,6

0,5

0,8

0,5

6,4

0,0

6,4

Recettes

217,5

241,4

51,5

14,7

511,3

16,6

509,9

II. – Régime général

 

(En milliards deuros)

Maladie

Vieillesse

Famille

Accidents du travail maladies professionnelles

Régime général

Fonds de solidarité vieillesse

Régime général et Fonds de solidarité vieillesse

Cotisations effectives

73,4

90,9

30,6

13,0

206,3

0,0

206,3

Cotisations prises en charge par l’État

2,5

2,0

0,6

0,0

5,2

0,0

5,2

Cotisations fictives d’employeur

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

Contribution sociale généralisée

73,3

0,0

12,0

0,0

84,9

16,8

101,7

Impôts, taxes et autres contributions sociales

60,8

16,5

7,8

0,0

85,1

0,0

85,1

Charges liées au non-recouvrement

-1,3

-1,0

-0,5

-0,2

-3,1

-0,1

-3,2

Transferts

2,9

28,9

0,2

0,0

20,9

0,0

4,0

Produits financiers

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

Autres produits

4,3

0,3

0,8

0,4

5,8

0,0

5,8

Recettes

216,0

137,6

51,5

13,3

405,2

16,6

404,9

III. – Fonds de solidarité vieillesse

 

(En milliards deuros)

Fonds de solidarité vieillesse

Cotisations effectives

0,0

Cotisations prises en charge par l’État

0,0

Cotisations fictives d’employeur

0,0

Contribution sociale généralisée

16,8

Impôts, taxes et autres contributions sociales

0,0

Charges liées au non-recouvrement

-0,1

Transferts

0,0

Produits financiers

0,0

Autres produits

0,0

Recettes

16,6

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble constitué de l’article 22 et de l’annexe C.

(Larticle 22 et lannexe C sont adoptés.)

Article 22 et annexe C
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 24

Article 23

Pour l’année 2019, sont approuvés les prévisions de recettes, réparties par catégories dans l’état figurant en annexe C à la présente loi, et le tableau d’équilibre, par branche, du régime général et des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

 

(En milliards deuros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

216,0

216,4

-0,5

Accidents du travail et maladies professionnelles

13,3

12,2

1,1

Vieillesse

137,6

136,9

0,7

Famille

51,5

50,3

1,2

Toutes branches (hors transferts entre branches)

405,2

402,7

2,5

Fonds de solidarité vieillesse

16,6

18,4

-1,8

Toutes branches (hors transferts entre branches), y compris Fonds de solidarité vieillesse

404,9

404,2

0,7

(Adopté.)

Article 23
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 25

Article 24

I. – Pour l’année 2019, l’objectif d’amortissement de la dette sociale par la Caisse d’amortissement de la dette sociale est fixé à 16,0 milliards d’euros.

II. – Pour l’année 2019, les prévisions de recettes par catégorie affectées au Fonds de réserve pour les retraites sont fixées à :

 

(En milliards deuros)

Prévisions de recettes

Recettes affectées

0

Total

0

 

III. – Pour l’année 2019, les prévisions de recettes par catégorie mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse sont fixées à :

 

(En milliards deuros)

Prévisions de recettes

Recettes

0

Total

0

(Adopté.)

Article 24
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 26 et annexe B

Article 25

Sont habilités en 2019 à recourir à des ressources non permanentes afin de couvrir leurs besoins de trésorerie les organismes mentionnés dans le tableau ci-dessous, dans les limites indiquées :

 

(En millions deuros)

Encours limites

Agence centrale des organismes de sécurité sociale

38 000

Caisse centrale de la mutualité sociale agricole

4 900

Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF -

période du 1er au 31 janvier

600

Caisse de prévoyance et de retraite du personnel de la SNCF -

période du 1er février au 31 décembre

330

Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines

470

Caisse nationale des industries électriques et gazières

420

Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales - période du 1er janvier au 31 juillet

800

Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales - période du 1er août au 31 décembre

1 200

(Adopté.)

Article 25
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Explications de vote sur l'ensemble de la troisième partie

Article 26 et annexe B

Est approuvé le rapport figurant en annexe B à la présente loi décrivant, pour les quatre années à venir (2019 à 2022), les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 383 rectifié est présenté par MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, M. Fichet, Mme Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, J. Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 514 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Yves Daudigny, pour présenter l’amendement n° 383 rectifié.

M. Yves Daudigny. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’article 26 présente la trajectoire pluriannuelle des recettes et des dépenses de la sécurité sociale, ainsi que de l’ONDAM, de 2019 à 2022.

Nous rejoignons tout à fait l’analyse du rapport de la commission des affaires sociales sur cet article : « Le rabotage dès à présent de la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale, dans des proportions très significatives et sans un quelconque accord du Parlement sur les principes devant régir, à l’avenir, les relations financières entre l’État et la sécurité sociale, est a minima prématuré. »

C’est une manière édulcorée de pointer à nouveau ce que nous avons déjà affirmé dans les différentes travées de notre hémicycle : notre refus de la participation de la sécurité sociale à la prise en charge du renforcement des allégements généraux et du transfert des éventuels futurs excédents de la sécurité sociale vers les caisses de l’État.

Deux problèmes majeurs sont devant nous : la situation critique de l’hôpital et la question de la perte d’autonomie. Si excédents il y a demain, ceux-ci devront être consacrés à ces enjeux d’avenir pour notre pays.

Par ailleurs, la hausse de l’ONDAM, prévue pour les quatre années à venir à 2,3 %, permettra-t-elle de financer la réforme du système de santé présentée récemment par le Président de la République ?

Notre amendement, en cohérence avec la position que nous défendons depuis le début de ce débat, vise donc à supprimer cet article et, ainsi, à promouvoir l’autonomie financière de la sécurité sociale.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 514.

Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise également à supprimer l’article 26 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, lequel approuve le rapport figurant en annexe B, qui décrit l’évolution de l’ONDAM pour les quatre années à venir.

Pour l’année 2019, l’augmentation de l’ONDAM a été fixée à 2,5 %, soit une amélioration de 0,2 point par rapport à l’année 2018, ce dont le Gouvernement ne manque pas de se féliciter. Pourtant, depuis le début de nos débats, nous pointons le fait que ce chiffre est largement insuffisant. En effet, le taux de croissance naturelle des dépenses de santé est de l’ordre de 4,5 % par an. Que pèse donc cette augmentation en comparaison ? Un taux inférieur à 4,5 % impose nécessairement des mesures non pas d’économie, mais de restriction budgétaire.

Ce sera le cas cette année avec un niveau d’ONDAM que je qualifierai de famélique. Les syndicats, mais aussi les fédérations hospitalières et toutes les catégories de professionnels de santé ont des mots beaucoup plus durs que les miens à ce sujet.

Le rapport économique, social et financier publié début octobre par la direction du Trésor pointe également cela en affirmant que les économies devront atteindre 3,8 milliards d’euros en 2019 pour que l’ONDAM soit respecté, c’est-à-dire 1,1 milliard d’euros sur le médicament, quasiment 2 milliards d’euros pour le régime général, à cause des faibles revalorisations des prestations sociales et des pensions de retraite – nous en avons beaucoup parlé hier – et presque 1 milliard d’euros pour les hôpitaux, dont tout le monde dit pourtant qu’ils se trouvent dans une situation extrêmement difficile.

Mes chers collègues, il me semble que l’on ne peut se réjouir de cet ONDAM lorsque l’on connaît les besoins dans nos territoires. Quand on rencontre les personnels de santé, quand on visite les services ou les hôpitaux, on entend qu’il faut créer des emplois et dégager des moyens financiers et humains. Bien sûr, en parallèle, une réorganisation est nécessaire, mais elle n’améliorera pas l’état très grave dans lequel se trouvent les hôpitaux et ne renforcera pas la lutte contre les déserts médicaux. Au niveau auquel il est fixé, l’ONDAM n’y contribuera pas plus.

Madame la ministre, nous l’avions déjà constaté sur différents sujets, nous nous heurtons à une certaine surdité de votre part lorsque nous critiquons cette trop faible augmentation, qui sera prolongée dans les années à venir.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cette annexe contient des informations utiles ; en revanche, la commission a déposé un amendement qui montre clairement son opposition à la diminution programmée du flux de TVA vers la sécurité sociale, auquel je souhaite que nos collègues se rallient.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. La présence de cet article, qui ne fait que constater les équilibres résultant des mesures et des lois financières de l’année, dans la loi de financement de la sécurité sociale est obligatoire.

Sa suppression entraînerait évidemment une censure par le Conseil constitutionnel et n’aurait, surtout, aucune influence sur les mesures présentes dans le projet de loi, pas plus que sur les équilibres eux-mêmes.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 383 rectifié et 514.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Annexe B

Rapport décrivant les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses par branche des régimes obligatoires de base et du régime général, les prévisions de recettes et de dépenses des organismes concourant au financement de ces régimes ainsi que l’objectif national des dépenses d’assurance maladie pour les quatre années à venir

La présente annexe décrit l’évolution des agrégats de dépenses, de recettes et de soldes du régime général, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse pour la période 2019-2022. Cette période sera marquée dès 2019 par le retour à l’équilibre de l’ensemble constitué par les régimes obligatoires de base et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV), permettant d’amplifier le désendettement de la sécurité sociale (I). Le financement de la sécurité sociale sur cette période évoluera substantiellement sous l’effet des nouvelles mesures de baisse pérenne des cotisations sociales qui en feront évoluer la structure (II). S’agissant de la branche maladie du régime général, la limitation de la progression de l’ONDAM permettra sur la période de continuer de dégager des économies tout en finançant les priorités du Gouvernement telles que l’accès aux soins et au droit à un remboursement intégral (III). L’équilibre financier des autres branches prestataires sera conforté sur la période quadriennale en vue de permettre le désendettement et le financement des priorités du Gouvernement (IV).

I. – Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 consolide le retour à l’équilibre des comptes sociaux et permet de garantir le désendettement de la sécurité sociale malgré des hypothèses macroéconomiques revues à la baisse.

Pour 2019, le Gouvernement retient des hypothèses de croissance du PIB et de la masse salariale privée identiques à la prévision pour 2018 (respectivement 1,7 % et 3,5 %) et une hypothèse d’inflation en léger repli (1,3 %).

Pour les années 2020 à 2022, les hypothèses du Gouvernement sont basées sur une consolidation de la croissance (avec un PIB qui progresse en volume chaque année de 1,7 %) et une accélération progressive de l’inflation (+1,8 % à partir de 2021), qui aurait à son tour un effet à la hausse sur les salaires se traduisant par une accélération de la masse salariale (+3,7 % en 2022).

Le Haut Conseil des finances publiques a rendu un avis sur ces prévisions macroéconomiques lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2019 au Conseil des ministres, et considère que ce scénario macroéconomique est crédible pour 2018 et plausible pour 2019.

Le tableau ci-dessous détaille les principaux éléments retenus pour l’élaboration des prévisions de recettes et objectifs de dépenses décrits dans la présente annexe.

 

Principales hypothèses retenues

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

PIB volume

1,2 %

2,2 %

1,7 %

1,7 %

1,7 %

1,7 %

1,7 %

Masse salariale privée

2,4 %

3,5 %

3,5 %

3,5 %

3,7 %

3,8 %

3,7 %

ONDAM

1,8 %

2,1 %

2,3 %

2,5 %

2,3 %

2,3 %

2,3 %

Inflation

0,2 %

1,0 %

1,6 %

1,3 %

1,4 %

1,8 %

1,8 %

Cette reprise favorise le redressement financier des régimes de sécurité sociale.

L’amélioration de la conjoncture économique et la maîtrise des dépenses entraînent une réduction significative des déficits sociaux, et permettent d’envisager un retour à l’équilibre de la sécurité sociale dès 2019, après 18 années de déficit. Le régime général devrait ainsi être en excédent dès 2018 et l’ensemble constitué par le régime général et le FSV dès l’année suivante. Ces bons résultats tiennent à la fois à la réalisation des économies prévues et au choix fait de compenser à la sécurité sociale les pertes de recettes qu’elle a supportées du fait de la politique de baisse du coût du travail, dans un contexte où l’État continuera de présenter des déficits conséquents.

Ce contexte de redressement doit être mis à profit afin de préparer l’avenir en consolidant la situation des finances sociales et des finances publiques de manière plus générale.

La trajectoire financière offre tout d’abord la possibilité d’achever le remboursement de la dette sociale dans le respect du terme fixé à 2024 et sans aucune hausse des prélèvements. Il s’agit d’un engagement fort du Gouvernement pour la préservation et la pérennisation de notre système de protection sociale, afin de ne pas faire peser l’effort sur les générations futures. Le remboursement de l’ensemble de la dette transférée à la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES), jusqu’en 2016 (soit 260 milliards d’euros) est en effet financé et garanti jusqu’à cette date. Il reste toutefois à prévoir le remboursement de la dette non reprise accumulée à l’ACOSS, dont la dette de trésorerie s’élève à près de 27 milliards d’euros.

Or cette dette peut être remboursée sans reporter l’échéance de 2024 ni augmenter les prélèvements obligatoires. Pour ce faire, il est proposé de transférer à compter de 2020, et jusqu’en 2022, 15 milliards d’euros de la dette restant accumulée à l’ACOSS à la CADES, ainsi que les ressources de contribution sociale généralisée (CSG) permettant cet apurement d’ici 2024, soit 1,5 milliard d’euros de CSG supplémentaire à compter de 2020, 2 milliards d’euros supplémentaires l’année suivante, augmentés enfin de 1,5 milliard à compter de 2022 soit au total une affectation de 5 milliards d’euros sur trois ans. Ce transfert des ressources rendues disponibles par les prévisions d’excédents sera réalisé sans aucun impact pour les contribuables.

Ce transfert autorise le maintien à l’équilibre durable de la sécurité sociale tout en permettant de faire évoluer les modalités d’application du principe de compensation intégrale des pertes de recettes de la sécurité sociale, comme le Gouvernement l’a proposé dans le rapport remis au Parlement en application de l’article 27 de la loi de programmation des finances publiques 2018-2022. Ce rapport recommande que, pour l’avenir, les baisses de prélèvements obligatoires seront supportées par l’État ou la sécurité sociale, en fonction de l’affectation de ces derniers, sans qu’il soit nécessaire ensuite de procéder à des transferts de compensation dans un sens ou dans l’autre.

Le projet de loi fait application de ce principe, qui conduit à faire une exception à l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale pour les pertes de recettes consécutives à l’exonération de cotisations salariales au titre des heures supplémentaires, à l’exonération de forfait social au titre de l’intéressement dans les petites et moyennes entreprises et des mesures en faveur de la participation prévue par la loi relative au plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises (dite loi « PACTE »), à la suppression de la taxe sur les farines et à l’application des réductions de cotisations d’allocations familiales et d’assurance maladie dans les régimes spéciaux.

La trajectoire financière pluriannuelle tient compte de la réduction des recettes fiscales affectées par l’État à la sécurité sociale au titre des allègements généraux de cotisations afin de répartir leur coût entre l’État et la sécurité sociale. Le projet de loi de finances prévoit ainsi de réduire de 1,5 milliard d’euros en 2020, de 2 milliards supplémentaires l’année suivante, et 1,5 milliard à compter de 2022, soit dans une proportion exactement identique à celle consacrée à l’accélération du désendettement, le montant des ressources de TVA affectées à la sécurité sociale.

Les ressources correspondant à ces deux mouvements de désendettement et de partage du coût des exonérations avec le budget de l’État sont réparties entre les branches en fonction de leur capacité contributive.

La trajectoire d’excédents présentée dans le cadre du présent projet de loi tient compte de ces mouvements tout en garantissant l’équilibre durable de la sécurité sociale.

II. – Les mesures du PLFSS 2019 en faveur de la compétitivité se traduisent par des modifications importantes des modalités de financement de la sécurité sociale

1. Le remplacement du CICE et du CITS par une réduction uniforme des cotisations d’assurance maladie et des allègements généraux renforcés

Conformément aux dispositions votées en PLFSS et PLF pour 2018, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et le crédit d’impôt de taxe sur les salaires (CITS) seront remplacés dès le 1er janvier 2019 par une exonération renforcée des cotisations sociales comprenant deux volets. Il s’agit, d’une part, d’un allègement uniforme de 6 points des cotisations sociales d’assurance maladie pour l’ensemble des salariés relevant du régime général de sécurité sociale et du régime des salariés agricoles, applicable sur les salaires dans la limite de 2,5 fois le SMIC. À la différence du CICE et du CITS, cet allègement bénéficiera à tous les employeurs dans des conditions identiques, qu’ils soient ou non assujettis à l’impôt sur les sociétés ou à la taxe sur les salaires.

D’autre part, à compter du 1er octobre 2019, ces allégements généraux de cotisations sociales seront renforcés au niveau du SMIC afin d’encourager la création d’emploi. Ces allègements généraux porteront également sur les contributions d’assurance chômage et de retraite complémentaire. Ainsi, au niveau du SMIC, plus aucune cotisation ou contribution sociale, payée habituellement par toutes les entreprises, ne sera due, à la seule exception de la cotisation au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles pour la part correspondant à la sinistralité des entreprises.

2. La rationalisation des dispositifs d’exonération spécifiques

Ce renforcement très significatif pour la grande majorité des entreprises appelle par ailleurs un réexamen des dispositifs d’exonérations ciblées et spécifiques en vue d’une révision ou d’une extinction de ces dispositifs.

Ainsi, les contrats de formation en alternance (hors contrats dans le secteur public), les structures d’insertion par l’activité économique (associations intermédiaires et ateliers et chantiers d’insertion) ainsi que les contrats uniques d’insertion (à l’exception des contrats au sein des employeurs publics) bénéficient désormais des allégements généraux, plus favorables que les dispositifs existants.

Le dispositif spécifique applicable à l’outre-mer est quant à lui recentré et simplifié, conformément aux recommandations fixées par le livre bleu des outre-mer, en renforçant le niveau des exonérations pour les plus bas salaires et en réduisant le nombre de barèmes d’exonération de 6 à 2.

L’exonération applicable aux aides à domicile auprès d’une personne fragile employées par un organisme prestataire, actuellement indépendante du niveau de rémunération, sera rationalisée à coût inchangé pour les finances publiques, avec la mise en place d’un barème dégressif permettant de renforcer les effets incitatifs en faveur de l’emploi et une exonération totale jusqu’à 1,1 fois le SMIC.

Enfin, les exonérations de cotisations patronales pour l’emploi de travailleurs occasionnels et de demandeurs d’emploi (TO-DE) applicable pour le régime agricole sont supprimés au profit des allègements généraux renforcés de droit commun entrant en vigueur au 1er janvier 2019 pour les entreprises du secteur de la production agricole.

III. – La LFSS pour 2019 reflète un engagement du Gouvernement en faveur de la transformation de notre système de santé

En 2018, la croissance des dépenses d’assurance maladie serait de 2,3 % à champ constant. Les recettes seraient en forte hausse (+4,3 %), soutenues notamment par la masse salariale (+3,5 %). La branche se rapprocherait ainsi de l’équilibre, son déficit se réduisant à -0,9 milliard d’euros. Ainsi que le précise le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2018, l’ONDAM 2018, dont la progression est limitée à 2,3 %, devrait être respecté pour la neuvième année consécutive.

La progression de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (ONDAM) en 2019 est fixée à 2,5 %. Ce taux est relevé de 0,2 point par rapport à l’ONDAM 2018 afin de renforcer l’effort d’investissement dans la santé dans le cadre du plan « Ma santé 2022 » présenté le 18 septembre par le Président de la République. Le niveau de progression des dépenses sera ensuite limité à 2,3 % sur la période 2020-2022.

Le tendanciel de dépenses restant à un niveau élevé (4,5 %), le respect de l’objectif fixé pour 2019 nécessitera un effort d’économie de 3,8 milliards d’euros. Cet effort sera partagé par l’ensemble des acteurs de l’offre de soins et accompagné dans le cadre du plan ONDAM pluriannuel 2018-2022 qui s’organise autour des thématiques suivantes : structuration de l’offre de soins ; pertinence et efficience des produits de santé ; pertinence et qualité des actes ; pertinence et efficience des prescriptions d’arrêt de travail et de transports ; contrôle et lutte contre la fraude.

Les recettes de la branche Maladie de la sécurité sociale évoluent significativement dans leur composition. À la suppression de la cotisation salariale d’assurance maladie de 0,75 % en 2018 s’ajoute en effet à compter de 2019 l’effet de la réduction de 6 points des cotisations sociales patronales sous 2,5 SMIC pour un montant de 22,6 milliards d’euros. La branche bénéficiera en contrepartie de l’attribution d’une part de l’effet de la hausse de la CSG d’une part et de l’affectation d’une fraction de TVA à hauteur de près de 36 milliards d’euros d’autre part.

La progression de l’ONDAM représente 4,9 milliards d’euros de dépenses nouvelles prises en charge en 2019 par la collectivité sur le champ de la maladie. Ces ressources permettront la mise en œuvre des priorités du Gouvernement pour la transformation du système de santé. L’effort en direction de la prévention sera poursuivi avec le renforcement des moyens de lutte contre les addictions, le développement des actions de prévention à destination des enfants et des jeunes et l’extension de la couverture vaccinale. L’amélioration de l’accès aux soins dans les domaines de l’optique, de l’audiologie et du dentaire se concrétisera, en vue de la mise en œuvre d’une offre sans reste à charge en 2020 et 2021.

En outre, à compter du 1er novembre, la complémentaire universelle contributive (CMU-c) et l’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS) seront fusionnés en un seul dispositif dans un objectif de facilitation de l’accès aux droits. L’accès aux soins sera également soutenu dans le secteur du médicament pour les produits les plus innovants et bénéfiques pour les patients.

Le PLFSS met en œuvre les engagements pris par le Gouvernement dans le cadre de la feuille de route grand âge et autonomie pour mieux répondre aux besoins des personnes âgées en EHPAD, et dans le cadre de la stratégie pour l’autisme pour notamment améliorer le parcours de soins des enfants dès le plus jeune âge.

Plusieurs mesures contribueront également à la réforme de l’organisation des soins (extension du champ des expérimentations prévues par l’article 51 de la LFSS pour 2018) et de la tarification (développement des financements au forfait et à la qualité). Enfin, le congé maternité des travailleuses indépendantes et des exploitantes agricoles sera renforcé, dans un objectif de préservation de la santé de la mère et de l’enfant, tout en restant adapté aux spécificités de leurs activités.

IV. – La revalorisation maîtrisée des prestations sociales contribuera à l’équilibre des branches famille et vieillesse sur la période

La revalorisation différenciée des prestations limitera la progression des dépenses des branches prestataires, et conduira en 2019 à réduire de 1,5 milliard d’euros la progression des dépenses de pensions de retraite à la charge de la branche Vieillesse du régime général.

Afin de compenser à cette branche le coût de l’exonération des cotisations salariales au titre des heures supplémentaires et complémentaires et de préserver ses recettes l’assurance vieillesse, bénéficiera en contrepartie de l’affectation de ressources aujourd’hui affectées à la branche Famille. Les recettes de la branche Vieillesse seront toutefois affectées par la réduction du forfait social sur l’intéressement et la participation.

La revalorisation de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) sera supportée par le fonds de solidarité vieillesse (FSV). Cette mesure forte de solidarité représente un effort estimé à 525 millions d’euros sur 3 ans.

La branche Vieillesse du régime général sera excédentaire, après prise en compte des transferts à l’État et liés au désendettement, sur l’ensemble de la période.

La branche Famille bénéficiera également en 2019 de l’effet de la revalorisation différenciée des prestations, permettant une économie de 260 millions d’euros. L’évolution du solde en 2019 sera affectée négativement par le transfert d’une partie des recettes de taxe sur les salaires à la branche Vieillesse. Le solde de la branche restera équilibré, après prise en compte des transferts à l’État et liés au désendettement, jusqu’en 2022.

 

Recettes, dépenses et soldes du régime général

(En milliards deuros)

2018

2019

2020

2021

2022

Maladie

Recettes

210,4

216,0

221,0

225,7

230,6

Dépenses

211,3

216,4

221,0

225,7

230,6

Solde

-0,9

-0,5

0,0

0,0

0,0

Accidents du travail et maladies professionnelles

Recettes

12,8

13,3

13,4

13,6

13,8

Dépenses

12,0

12,2

12,2

12,4

12,5

Solde

0,8

1,1

1,2

1,3

1,3

Famille

Recettes

50,5

51,5

50,4

50,9

51,9

Dépenses

50,1

50,3

50,5

51,0

51,9

Solde

0,4

1,2

0,0

0,0

0,0

Vieillesse

Recettes

134,5

137,6

140,9

145,3

150,2

Dépenses

133,7

136,9

140,2

144,9

150,2

Solde

0,8

0,7

0,8

0,4

0,0

Régime général consolidé

Recettes

395,2

405,2

412,5

422,0

432,6

Dépenses

394,1

402,7

410,6

420,4

431,4

Solde

1,1

2,5

1,9

1,6

1,2

 

Recettes, dépenses et soldes de l’ensemble des régimes obligatoires de base

(En milliards deuros)

2018

2019

2020

2021

2022

Maladie

Recettes

211,9

217,5

222,6

227,3

232,2

Dépenses

212,8

218,0

222,6

227,3

232,2

Solde

-0,9

-0,5

0,0

0,0

0,0

Accidents du travail et maladies professionnelles

Recettes

14,2

14,7

14,8

15,1

15,3

Dépenses

13,3

13,5

13,6

13,8

14,0

Solde

0,9

1,2

1,2

1,3

1,3

Famille

Recettes

50,5

51,5

50,4

50,9

51,9

Dépenses

50,1

50,3

50,4

51,0

51,9

Solde

0,4

1,2

0,0

0,0

0,0

Vieillesse

Recettes

236,9

241,4

246,2

252,6

259,5

Dépenses

236,6

241,2

245,7

252,8

260,9

Solde

0,4

0,3

0,6

-0,2

-1,3

Régimes obligatoires de base consolidés

Recettes

499,9

511,3

520,1

531,6

544,3

Dépenses

499,2

509,1

518,3

530,6

544,4

Solde

0,7

2,2

1,8

1,0

-0,1

 

Recettes, dépenses et soldes du Fonds de solidarité vieillesse

(En milliards deuros)

2018

2019

2020

2021

2022

Recettes

16,8

16,6

17,1

17,7

18,3

Dépenses

18,9

18,4

17,8

18,0

18,2

Solde

-2,1

-1,8

-0,7

-0,3

0,1

Recettes, dépenses et soldes du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse

(En milliards deuros)

2018

2019

2020

2021

2022

Recettes

394,6

404,9

413,2

423,2

434,3

Dépenses

395,7

404,2

412,0

421,9

432,9

Solde

-1,0

0,7

1,2

1,3

1,3

Recettes, dépenses et soldes des régimes obligatoires de base et du Fonds de solidarité vieillesse

(En milliards deuros)

2018

2019

2020

2021

2022

Recettes

498,2

509,9

519,8

531,8

544,9

Dépenses

499,6

509,6

518,7

531,1

544,9

Solde

-1,4

0,4

1,0

0,7

0,1

M. le président. L’amendement n° 98, présenté par M. Vanlerenberghe, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 15

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéa 43, tableau

1° Troisième ligne

a) Avant-dernière colonne

Remplacer le nombre :

225,7

par le nombre :

229,2

b) Dernière colonne

Remplacer le nombre :

230,6

par le nombre :

235,6

2° Cinquième ligne

a) Avant-dernière colonne

Remplacer le nombre :

0,0

par le nombre :

3,5

b) Dernière colonne

Remplacer le nombre :

0,0

par le nombre :

5,0

3° Dix-neuvième ligne

a) Avant-dernière colonne

Remplacer le nombre :

422,0

par le nombre :

425,5

b) Dernière colonne

Remplacer le nombre :

432,6

par le nombre :

437,6

4° Dernière ligne

a) Avant-dernière colonne

Remplacer le nombre :

1,6

par le nombre :

5,1

b) Dernière colonne

Remplacer le nombre :

1,2

par le nombre :

6,2

III. - Alinéa 44, tableau

1° Troisième ligne

a) Avant-dernière colonne

Remplacer le nombre :

227,3

par le nombre :

230,8

b) Dernière colonne

Remplacer le nombre :

232,2

par le nombre :

237,2

2° Cinquième ligne

a) Avant-dernière colonne

Remplacer le nombre :

0,0

par le nombre :

3,5

b) Dernière colonne

Remplacer le nombre :

0,0

par le nombre :

5,0

3° Dix-neuvième ligne

a) Avant-dernière colonne

Remplacer le nombre :

531,6

par le nombre :

535,1

b) Dernière colonne

Remplacer le nombre :

544,3

par le nombre :

549,3

4° Dernière ligne

a) Avant-dernière colonne

Remplacer le nombre :

1,0

par le nombre :

4,5

b) Dernière colonne

Remplacer le nombre :

- 0,1

par le nombre :

4,9

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement tire les conséquences du refus de notre commission de diminuer dès à présent le flux de TVA affectée à la sécurité sociale en 2021 et 2022. Il tend ainsi à réajuster le tableau afin de tenir compte de nos votes.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. L’avis du Gouvernement est évidemment défavorable. Nous nous opposons à la mesure et donc au réajustement du tableau, monsieur le rapporteur général.

À l’issue de tous ces débats sur les recettes, je souhaite récapituler devant vous le bilan des mesures qui ont été adoptées depuis trois jours et qui représentent un coût supplémentaire de quelque 700 millions d’euros pour la sécurité sociale.

Je vous rappelle donc que vous avez voté l’exonération des cotisations patronales pour les employeurs de pompiers volontaires, créant une charge supplémentaire pour la sécurité sociale pouvant atteindre jusqu’à 500 millions d’euros à terme, selon notre compréhension de l’amendement adopté, dont plus de 100 millions d’euros pour l’année prochaine.

M. Philippe Mouiller. Cette mesure coûtera 50 millions d’euros, vos calculs ne sont pas exacts !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous ne sommes pas d’accord sur ces chiffres, madame la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Vous avez voté 250 millions d’euros d’exonérations supplémentaires pour les outre-mer, notamment 20 millions d’euros pour le barème de compétitivité issu de la loi pour le développement économique des outre-mer, dite « LODEOM », auxquels il faut ajouter 30 millions d’euros liés au changement des barèmes de compétitivité renforcée ; vous avez également choisi d’appliquer le barème de compétitivité renforcée au secteur du nautisme, aux services aéroportuaires, aux liaisons aériennes entre pays voisins, aux activités de comptabilité, de conseil aux entreprises, d’ingénierie et d’études techniques. Cela représente un coût d’au moins 200 millions d’euros. Vous avez, enfin, adopté un renforcement des exonérations des particuliers en outre-mer, pour un coût que nous ne savons pas déterminer.

Vous avez souhaité étendre la mesure d’atténuation du franchissement des seuils de CSG, pour un montant de 100 millions d’euros ; vous avez également voté la baisse du taux de la première part de la contribution « vente en gros », pour 75 millions d’euros de plus ; vous avez supprimé le dispositif transitoire TO-DE – travailleurs occasionnels-demandeurs d’emploi – et le rétablissement du dispositif antérieur coûtera, pour sa part, plus de 50 millions d’euros.

À cette facture, s’ajoutent 40 millions d’euros pour le renforcement des exonérations pour les chambres consulaires, 7 millions d’euros pour les porteurs de presse, 10 millions d’euros pour les médecins en cumul emploi-retraite et 10 millions d’euros pour l’abaissement à 8 % du taux de forfait social.

Je n’évoque ici que les seize mesures dont nous avons chiffré le coût. Celles-ci grèvent les recettes de la sécurité sociale de 700 millions d’euros et remettent donc en cause les équilibres globaux.

Tentons de tirer les conséquences de ces votes, au risque de faire un peu de provocation, même si je suis certaine que ce n’est pas votre souhait. Pour rétablir la situation, il serait nécessaire de réaliser des économies équivalentes. Nous pourrions, par exemple, ramener la progression de l’ONDAM à 2,1 % contre 2,5 %. Je me doute bien que ce n’est pas ce que vous voulez. Le Gouvernement pourrait également vous suggérer de ne pas adopter les modifications que vous proposez à l’article 44.

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Monsieur le président, madame la ministre, ce ne sont pas mes amendements qui ont tant coûté (Rires.), puisqu’aucun d’entre eux, les chers pas plus que les moins chers, n’a été adopté !

Avec tout le respect que j’ai pour le Gouvernement et pour vous-même, madame la ministre, permettez-moi de vous faire observer, quand vous nous dites : « Rendez-vous compte de ce que vous avez voté ! », que nous sommes le Parlement !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Tout à fait !

M. Roger Karoutchi. Sauf changement constitutionnel imprévu, c’est encore le Parlement qui vote l’impôt et la loi. C’est lui qui décide. Le Gouvernement propose, le Parlement vote. Par conséquent, madame la ministre, il est peut-être très ennuyeux pour vous que le Parlement ait voté toutes ces mesures, mais dans le système constitutionnel français, c’est ainsi que fonctionne l’équilibre des pouvoirs.

On a peut-être une conception différente de cela dans le nouveau monde, mais ceux qui défendent le Parlement font en sorte que ce que celui-ci vote s’applique ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je parlerai avec moins de talent et d’humour que Roger Karoutchi, mais, madame la ministre, vous parvenez à un total de 700 millions d’euros de dépenses supplémentaires votées par le Sénat. Nous ne sommes pas d’accord sur le chiffre concernant les pompiers. Vous annoncez un coût de 100 millions d’euros, nous l’évaluons à 55 millions d’euros. Cela fait tout de même une différence.

Enlevons donc ces 100 millions d’euros et nous ne sommes plus qu’à 600 millions d’euros supplémentaires. Je vous rappelle que vous avez accordé deux fois 200 millions d’euros en plus à l’Assemblée nationale, soit 400 millions d’euros. Respectez, s’il vous plaît, les demandes du Parlement : 600 millions ici et 400 millions là, cela fait 1 milliard d’euros. Sait-on jamais, peut-être pourriez-vous mettre à contribution les organismes complémentaires d’assurance maladie, les OCAM ?

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je pourrais effectivement reprendre à mon compte les propos du président Milon ou de M. Karoutchi.

Madame la ministre, j’ai déjà entendu ce discours de la part du gouvernement précédent,…

M. Philippe Dallier. Et de tous les autres, également ! (Sourires.)

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. … des gouvernements précédents, d’une manière générale. (Sourires.)

À mon sens, ces propos sont graves, et dénotent un dévoiement de la lecture de nos institutions et de leur fonctionnement. Ce n’est pas le Gouvernement qui vote la loi, c’est le Parlement. Si le Gouvernement se concertait un peu plus avec les parlementaires et dépassait le seul périmètre de ses cabinets, il pourrait peut-être obtenir des votes moins généreux.

Mme Éliane Assassi. Tout à fait !

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vous avez l’impression que nous dépensons inconsidérément l’argent public, mais ce n’est pas le cas. En commission, nous avons cherché à équilibrer le budget. C’est le rôle du Parlement que d’envisager de le répartir différemment. Vous avez proposé un certain nombre de mesures, qui ne sont d’ailleurs pas forcément populaires, mais celles-ci n’ont pas obtenu notre approbation.

J’ai le sentiment que l’on marche sur la tête. Je vous respecte, mais je vous le dis comme je l’ai dit à vos prédécesseurs : on trouve dans ces travées du talent et de l’expérience, aussi bien à droite qu’à gauche. Je ne conteste en rien les compétences des membres des cabinets, mais ils ne bénéficient pas toujours de la connaissance du terrain qui est rassemblée ici. Selon moi, vous auriez tout intérêt à écouter et à partager nos réflexions. Nous n’y parviendrons pas à l’instant, dans l’émotion et dans la précipitation où nous nous trouvons parfois, cela requiert une construction progressive en amont de l’élaboration de votre budget – de notre budget, devrais-je dire.

Il serait opportun, pour le Gouvernement que vous représentez, de tenir compte de cela à l’avenir et de marquer ainsi, par ce progrès essentiel, une différence importante avec l’ancien monde que vous refusez, tout en proposant une lecture plus positive de la constitution de la Ve République, laquelle, je le rappelle tout de même, a toujours considéré que le Parlement faisait la loi ! (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – Mme Victoire Jasmin applaudit également.)

M. le président. Mes chers collègues, je vous invite à regarder le minuteur et à respecter le temps qui vous est imparti.

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, vous avez présenté les choses avec humour, restons donc dans ce ton léger. Il est vrai que le Parlement a proposé un certain nombre de dépenses.

M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas ma faute ! (Sourires.)

Mme Laurence Cohen. C’est dommage pour vous, monsieur Karoutchi, mais vous n’êtes malheureusement pas le seul dont les amendements n’ont pas été couronnés de succès.

Le groupe communiste a fait des propositions de recettes nouvelles, mais aucun de ses amendements n’a été accepté non plus.

Madame la ministre, vous vous saisissez de votre règle à calcul et vous déplorez que le Sénat ait complètement déséquilibré le budget auquel vous avez travaillé dans votre ministère avec beaucoup de compétence et de sérieux, je n’en doute pas. Cela pourrait prêter à sourire si ce n’était pas si grave ! Le jeu parlementaire – qui n’en est pas un – consiste précisément à réfléchir sur le budget et à essayer de faire des propositions, voire des contre-propositions. Sinon, à quoi bon avoir un Parlement, une Assemblée nationale et un Sénat ? Il suffirait de les dissoudre, et vos budgets seraient toujours parfaits, il ne leur manquerait ni une virgule ni un centime ! Soyons sérieux, là n’est pas le débat.

Les amendements qui ont été défendus plutôt dans les travées de droite allaient dans votre sens et partageaient votre logique consistant à continuer à alléger les cotisations patronales. Nos propositions, en revanche, allaient en sens inverse. Vous les avez refusées, alors qu’elles permettaient de créer de nouvelles recettes.

Vous n’êtes pas allée chercher la fraude aux cotisations sociales patronales avec la même détermination que celle dont vous avez fait preuve à propos des exonérations, alors que son coût atteint tout de même 25 milliards d’euros ! Il en va de même en ce qui concerne les sanctions frappant le travail dissimulé.

Cela signifie donc que vous avez contribué à assécher les finances de la sécurité sociale à hauteur de plus 5 milliards d’euros, la privant ainsi des moyens d’agir. Vous nous demandez de l’argent pour compenser les nouvelles dépenses, voilà quelques exemples dont vous pouvez vous saisir en soutenant nos amendements !

Mme Éliane Assassi. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Michel Magras, pour explication de vote.

M. Michel Magras. Madame la ministre, vous avez évoqué les amendements votés l’autre soir à propos des outre-mer.

Je voudrais rappeler ici que, lorsque le Gouvernement a choisi de transformer le CICE en exonérations de charges, rien ne l’obligeait à revenir sur les dispositifs issus de la LODEOM, qui étaient en train de porter leurs fruits et dont les résultats étaient remarquables. Notre démarche, dès lors, avait pour unique objectif de nous rapprocher de l’existant, rien de plus.

Je rappelle que des études sérieuses ont prouvé que, par cette transformation, le Gouvernement a gentiment mis dans la poche de Bercy plus de 180 millions d’euros. Je sais que les amendements que nous avons adoptés l’autre soir ont un coût, mais celui-ci reste bien inférieur au coût réel des dispositions en vigueur jusqu’à l’an dernier.

S’il est vrai que nous avons augmenté les dépenses, en ce qui concerne l’outre-mer, celles-ci diminuent par rapport à l’année précédente. Il faut avoir le courage de le dire, c’est la réalité ! Vous alliez faire disparaître du budget des outre-mer des aides absolument fondamentales pour le développement économique de ces territoires, nous ne pouvions pas laisser passer cela.

Puisque l’occasion m’en est donnée et qu’il me reste encore quelques minutes,…

M. Michel Amiel. Quelques secondes…

M. Roger Karoutchi. … tout au plus !

M. Michel Magras. … je rappelle que le choix du Gouvernement d’orienter les aides nouvelles uniquement vers les bas salaires va à l’encontre du développement économique des outre-mer et risque de les « smicardiser ». Cette démarche prend le contre-pied de toutes les études qui prouvent que, pour sortir du chômage, construire une économie solide et équilibrer le budget de la sécurité sociale, il faut que les salaires augmentent. Ce constat n’est pas seulement valable pour l’outre-mer, mais également pour la France métropolitaine.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je soutiendrai l’amendement présenté par le rapporteur général de la commission des affaires sociales.

Madame la ministre, vous avez fait valoir l’aridité des chiffres, en avançant que nous avions voté quelque 700 millions d’euros de dépenses supplémentaires. Il est vrai que nous votons toujours les recettes avant les dépenses. Cette somme résulte des réflexions de beaucoup de nos collègues, qui ont déposé des amendements tout à fait respectables, conformément à la mission du Sénat comme de l’Assemblée nationale.

La commission des affaires sociales a réalisé un travail de fond : les deux rapports produits sur ce projet de loi de financement de la sécurité sociale sont tout de même des pavés de près de 400 pages ! Cela requiert de l’expertise, celle que les élus siégeant à la commission partagent avec l’ensemble du personnel. J’ai pu le constater en participant modestement à ses travaux à mon arrivée au Sénat en 2007.

Plusieurs de nos collègues ont évoqué le rôle de législateur que notre Parlement bicaméral joue légitimement. Nous l’illustrons jour après jour. Certes, 700 millions d’euros, ce n’est pas rien, mais nous soutenons l’outre-mer comme la métropole.

Monsieur le président Magras, vous êtes venu il y a quelques semaines à Charleville-Mézières, dans les Ardennes, pour participer, avec notre collègue de Guadeloupe, notamment, aux assises des intercommunalités de l’outre-mer. Cela m’a permis de mesurer l’ampleur de votre tâche, et les contraintes géographiques, climatiques, mais aussi, nous le rappelions hier soir, numériques, que vous subissez.

Je voterai donc cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.

M. Michel Amiel. Monsieur Karoutchi, pour vous répondre avec le même humour, mais au fond très sérieusement, vous me paraissez plus fort en équilibre des pouvoirs qu’en équilibre des budgets… (Sourires.)

Pour ma part, je n’ai pas entendu Mme la ministre remettre en cause, de quelque manière, le rôle du Parlement. Bien entendu, le Sénat et l’Assemblée nationale sont là pour présenter des amendements.

Mme la ministre nous a présenté une addition, relativement lourde, au point de déséquilibrer le budget. Moyennant quoi, le Sénat est libre de voter ce qu’il veut. Revenons donc aux faits, en évitant les polémiques stériles.

J’ai l’impression qu’on balaie d’un revers de main deux données importantes : la disparition du déficit, une première, et l’apurement de la dette à l’horizon de 2024. Je pense que tous, sur ces travées, ou à peu près, nous sommes d’accord sur cela.

Mme Cohen, qui a parlé au nom de nos amis communistes, a au moins le mérite de la cohérence. Elle a souligné que, bien que l’ONDAM tendanciel – pour parler en termes techniques, même si je ne suis pas un financier – soit de 4,5 %, nous avons voté un ONDAM de 2,5 %.

L’écart est en effet important, mais, comme je l’ai expliqué plusieurs fois, l’année dernière, dans la discussion générale et ce matin encore, la seule suppression des actes inutiles ou redondants, y compris les hospitalisations, permettrait largement de revenir à 2,5 %, et ce sans faire d’économies inutiles.

Madame la ministre, je ne doute pas que vous nous présentiez l’année prochaine un beau projet de loi détaillant les mesures que vous proposez. En tout état de cause, nous ne ferons pas l’économie d’une réforme de structure de la santé. Cette réforme est indispensable : c’est à ce prix, à ce prix seulement, que nous pourrons être aussi bien soignés en ville qu’à l’hôpital, sans dépenses excessives !

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Madame la ministre, vous annoncez un total de 700 millions d’euros, mais ce chiffre inclut toutes les taxes que vous imposez aux Français ! Quand on retire un certain nombre de dispositifs, on n’obtient pas tout à fait les mêmes chiffres – ou alors il y a eu, entre hier et aujourd’hui, une inflation extraordinaire…

Pour les pompiers, vous parliez de 500 millions d’euros – en fait, sur plusieurs années. Aujourd’hui, vous êtes plus raisonnable : 100 millions d’euros. Notre chiffrage est différent : si la mesure était appliquée intégralement, avec ces exonérations pour l’emploi de pompiers volontaires, qui répondent à une préoccupation des territoires, elle coûterait 52 millions d’euros. Il y a tout de même une différence !

Hier soir, nous avons longuement discuté de la suppression du dispositif TO-DE. Nous avons estimé le rétablissement de cette exonération à 39 millions d’euros, ce qui n’a pas été contesté par M. Darmanin. Et vous, cet après-midi, parlez de 50 millions d’euros !

S’agissant des exonérations pour les chambres consulaires, vous évaluez nos propositions à 40 millions d’euros. C’est important, mais ce n’est rien en comparaison des prélèvements que vous avez infligés à ces organismes l’an dernier, en tapant directement dans les caisses des chambres de commerce et d’industrie. En réalité, nous ne proposons qu’un retour léger par rapport à cette ponction importante.

En ce qui concerne les médecins, il s’agit d’un amendement d’appel, qui mérite d’être discuté. S’il faut 10 millions d’euros pour arriver au plafond de 90 000 euros dont nous avons parlé hier, en effet, cela interpelle. On peut en discuter.

Madame la ministre, nous vous donnons des pistes pour répondre aux préoccupations des Français et nous arrivons à un chiffre moindre. Essayez donc d’écouter ces propositions sénatoriales !

En fait, dans cette tuyauterie qu’est la sécurité sociale, nous avions des tuyaux percés – des déficits –, mais, maintenant, on a l’impression qu’il y a des tuyaux bouchés, avec, déjà, une régurgitation pour mesures non compensées, à hauteur de 2,6 milliards d’euros. Vos ponctions sont donc bien supérieures aux mesures que nous proposons : 700 millions d’euros pour les secondes, 2,6 milliards pour les premières !

Quant à l’article 44, madame la ministre, il y a une vraie divergence entre vos propositions et les nôtres, qui, me semble-t-il, répondent aux préoccupations des Français, s’agissant notamment du niveau de vie des retraités, que vous prévoyez, vous, d’accabler encore davantage.

Nous aurons l’occasion d’en discuter, mais, par pitié, révisez vos chiffres !

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. À la fin de votre intervention, madame la ministre, vous avez anticipé que votre propos susciterait des réactions. Vous voilà servie !

Je ne reviendrai pas sur les pouvoirs du Parlement, mais j’appuierai l’argument de mon collègue Savary. Si l’État compensait totalement à la sécurité sociale le coût des exonérations qu’il accorde, il n’y aurait pas de problème, et nous aurions encore de la marge.

Or, dans le schéma actuel – jusqu’à ce que l’on change les règles du jeu pour, peut-être, fusionner un jour le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale –, si la règle fondamentale avait été respectée, la question des 700 millions d’euros dont le Parlement a décidé ne se poserait même pas.

Madame la ministre, que le Gouvernement revienne donc aux anciennes pratiques ! Peut-être cela aurait-il, en faisant votre affaire, compliqué la tâche de votre collègue Darmanin dans le cadre du projet de loi de finances… Mais telle était la règle du jeu.

Parce que cela devient compliqué, on ne l’applique plus, on met en difficulté la sécurité sociale, pour, ensuite, reprocher au Parlement les 700 millions d’euros qu’il a décidés. Eh bien, non, madame la ministre. On peut envisager les choses différemment : que l’État trouve les moyens de compenser les exonérations qu’il accorde, et le problème sera réglé ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Éric Bocquet applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je sens que j’ai touché une corde très sensible, en essayant simplement de faire un trait d’humour… (Exclamations amusées sur de nombreuses travées.)

Mme Agnès Buzyn, ministre. Quand j’ai fait mon addition, mon propos n’était évidemment pas que nous nous mettions d’accord sur 700 ou 600, voire 500 millions d’euros. J’ai simplement dit que je sais la Haute Assemblée sensible au retour à l’équilibre des comptes de la sécurité sociale. C’est la première fois depuis dix-huit ans, et nous pouvons tous nous en réjouir pour nos enfants.

Vous avez voté un certain nombre de mesures, et vous êtes plus que légitimes pour le faire. À aucun moment il ne viendrait à mon esprit ni à celui du Gouvernement de remettre en cause les pouvoirs des parlementaires que vous êtes.

Mon propos était qu’il est toujours plus facile, pour nous tous, de voter des mesures en plus. Mais, si nous voulons garantir l’équilibre des comptes, nous allons maintenant devoir passer aux économies.

J’ai fait un trait d’humour sur l’ONDAM, parce que je sais que nous tous, moi la première, sommes sensibles à cette question de l’ONDAM par rapport aux besoins. Il ne s’agissait vraiment pas, monsieur Karoutchi, d’une remise en cause de la séparation des pouvoirs ; je ne me permettrais pas de la remettre en cause.

Je n’ai pas la légitimité d’un élu : je viens avec ma compétence professionnelle, que vous connaissez, mais je n’ai pas la légitimité que vous avez face aux électeurs et que je reconnais.

J’ai fait une addition pour dire simplement : passons aux économies. En réalité, nous avons tous beaucoup plus de difficultés à voter des économies que des dépenses supplémentaires.

Monsieur Dallier, s’agissant de l’opposition permanente dont vous avez parlé entre le ministre des affaires sociales et le ministre des comptes publics, je suis d’accord avec Gérald Darmanin pour penser que les ressources publiques, qu’elles alimentent la sécurité sociale et les dépenses sociales ou les dépenses de l’État, servent les Français, des poches desquels elles viennent.

Vouloir établir une dichotomie absolue entre la dette de l’État et celle de la sécurité sociale, ou les dépenses sociales et les dépenses de l’État, n’a pas de sens quand on finance des routes ou des écoles comme l’AAH, l’ASPA, c’est-à-dire le minimum vieillesse, ou la prime d’activité – qui ne sont pas des dépenses assurantielles, mais des dépenses sociales – sur le budget de l’État.

Ainsi, il est fondé de penser la taxation des Français, la dette publique et les dépenses publiques de façon intégrée, parce que, au bout du compte, ce sont les mêmes Français qui paient. La dette, qu’elle soit sociale ou étatique, nous concerne tous.

Je n’ai donc pas d’opposition frontale avec Gérald Darmanin sur ce sujet : j’assume pleinement le fait que je cherche à réduire les déficits de la France en général, pour nos enfants, qu’il s’agisse de la dette de l’État ou de celle de la sécurité sociale.

Mon intention n’était pas de heurter les parlementaires que vous êtes et que je respecte. Je disais simplement avec humour : passons aux économies. Eh bien, je suis ravie que nous passions ensemble à l’examen des dépenses ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 98.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’ensemble constitué de l’article 26 et de l’annexe B, modifié.

(Larticle 26 et lannexe B sont adoptés.)

Vote sur l’ensemble de la troisième partie

Article 26 et annexe B
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Quatrième partie

M. le président. Mes chers collègues, je vais mettre aux voix la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.

Je vous rappelle que, lorsque le Sénat n’adopte pas les dispositions de cette partie, la quatrième partie du projet de loi est considérée comme rejetée.

Y a-t-il des demandes d’explication de vote ?…

Je mets aux voix l’ensemble de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

Explications de vote sur l'ensemble de la troisième partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 27

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 18 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 343
Pour l’adoption 232
Contre 111

Le Sénat a adopté.

QUATRIÈME PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES ET À L’ÉQUILIBRE DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2019

TITRE IER

TRANSFORMER LE SYSTÈME DE SOINS

Quatrième partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 27 - Amendement n° 516

Article 27

I. – L’article L. 162-23-15 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;

b) Après la référence : « 1° », est insérée la référence : « , 2° » ;

c) Les mots : « satisfont aux critères liés à l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, mesurés chaque année » sont remplacés par les mots : « atteignent des résultats évalués à l’aide d’indicateurs liés à la qualité et la sécurité des soins, mesurés tous les ans » ;

d) (nouveau) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Ces indicateurs prennent en compte les résultats et les expériences rapportés par les patients. » ;

2° Après le même premier alinéa, il est inséré un II ainsi rédigé :

« II. – Pour certains des indicateurs liés à la qualité et la sécurité des soins mentionnés au I, un seuil minimal de résultats est requis. Ce seuil est fixé par indicateur en fonction de la répartition des résultats de l’ensemble des établissements concernés. Lorsqu’un établissement mentionné au même I n’atteint pas, pendant trois années consécutives, un tel seuil minimal pour un même indicateur, l’établissement concerné fait l’objet d’une pénalité financière notifiée par le directeur général de l’agence régionale de santé, après qu’il a été mis en demeure de présenter ses observations. Toutefois, le directeur général de l’agence régionale de santé peut estimer, par décision spécialement motivée, qu’il n’y a pas lieu à sanction au regard de circonstances particulières propres à l’établissement concerné.

« Le montant de la pénalité financière globale est apprécié en fonction du nombre d’indicateurs concernés et de la gravité des manquements constatés. La pénalité financière globale ne peut excéder un montant équivalent à 0,5 % des recettes annuelles d’assurance maladie de l’établissement.

« Lorsque, pour une année donnée, un établissement n’atteint pas le seuil minimal requis pour un indicateur, il en est alerté par le directeur général de l’agence régionale de santé qui lui indique la pénalité financière encourue en cas de manquement constaté pendant trois années consécutives.

« Cette pénalité s’accompagne d’un plan d’amélioration de la qualité présenté par l’établissement concerné. » ;

3° Le dernier alinéa est remplacé par un III ainsi rédigé :

« III. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités de détermination et de mise en œuvre de la dotation complémentaire et de la pénalité financière, les catégories des indicateurs liés à la qualité et la sécurité des soins recueillis annuellement par chaque établissement mentionné au premier alinéa du I et définit les modalités de détermination des seuils minimaux de résultats requis pour certains indicateurs.

« Avant le 31 décembre de chaque année, un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale dresse la liste des indicateurs liés à la qualité et la sécurité des soins, fixe les seuils minimaux de résultats requis pour certains indicateurs et prévoit les modalités de calcul de la dotation complémentaire et de la pénalité financière. »

II. – A. – Les 2° et 3° du I entrent en vigueur le 1er janvier 2020.

B. – Le b du 1° du I entre en vigueur le 1er janvier 2020.

La première année d’entrée en vigueur du même b est une année de recueil des indicateurs qui ne donne pas lieu au versement de la dotation complémentaire mentionnée au I de l’article L. 162-23-15 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la présente loi.

(nouveau). – Le d du 1° du I entre en vigueur le 1er janvier 2020 pour les activités mentionnées au 4° de l’article L. 162-22 du code de la sécurité sociale ainsi que pour les structures d’hospitalisation à domicile, et le 1er janvier 2021 pour les activités mentionnées au 2° du même article L. 162-22.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, sur l’article.

M. Bernard Jomier. L’article 27 porte sur le paiement des établissements de santé en fonction de la qualité des soins.

Madame la ministre, vous avez fixé à 300 millions d’euros pour 2019 la dotation reposant sur des indicateurs de qualité. À l’Assemblée nationale, le rapporteur général et vous-même avez précisé le dispositif : un développement des indicateurs après négociations en 2019, le recueil des indicateurs « à blanc », puis leur intégration au modèle de financement la première année, financement dont la première année est fixée à 2020 pour les établissements de soins de suite et pour l’hospitalisation à domicile et à 2021 pour la psychiatrie.

Avant d’entamer la discussion des amendements, il me paraît nécessaire que vous nous précisiez le calendrier : cette dépense importante de 300 millions d’euros étant conditionnée au recueil et à l’établissement des indicateurs, prévus pour 2019, la somme sera-t-elle réellement dépensée l’année prochaine ?

Par ailleurs, comment ce dispositif s’articulera-t-il avec l’actuel contrat d’amélioration de la qualité et de l’efficience des soins, ou CAQES, qui prévoit déjà une rémunération sur des objectifs de qualité et de permanence des soins, y compris un système de malus ?

Je le répète : ce sont 300 millions d’euros qui sont en jeu. Sauf à faire écho au débat précédent – vous auriez alors beaucoup anticipé… –, comment pourrez-vous, alors que l’établissement des indicateurs prendra du temps, mettre en place pleinement ce dispositif en 2019 ?

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa, sur l’article.

Mme Esther Benbassa. Depuis 2016, un système de rémunération du secteur hospitalier est généralisé qui dépend du respect de certains critères en matière de qualité et de sécurité des soins dispensés. Le même dispositif prévoit aussi une rémunération en fonction de l’équilibre budgétaire obtenu par les cliniques hospitalières, incitant celles-ci à faire des économies.

Le présent article tend non seulement à élargir ce dispositif aux hôpitaux psychiatriques d’ici à trois ans, mais également à mettre en place, à partir de 2020, un système de pénalités pour les centres hospitaliers ne parvenant pas à respecter ces critères, tant budgétaires que de qualité.

Mes chers collègues, la revendication d’un système de santé plus efficient et plus efficace nous est, à toutes et tous, commune. Mais la méthode punitive du Gouvernement ne saurait être la plus efficace.

Si aujourd’hui certains hôpitaux ne peuvent dispenser des soins de qualité, c’est tout simplement parce qu’ils n’en ont pas les moyens, soit que leurs dotations aient baissé, soit qu’ils aient dû faire des choix de restrictions budgétaires. Ainsi, pénaliser pécuniairement les centres de soins qui ne bénéficient pas des fonds nécessaires à la validation de ces critères de qualité ressemble fortement à une double peine inique.

Madame la ministre, au lieu d’aider ces établissements en difficulté, vous proposez de les sanctionner d’une manière particulièrement contre-productive : j’ai bien peur que, avec cette méthode, vous n’obteniez des résultats opposés à ceux que vous escomptez !

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, sur l’article.

M. Jean-Louis Tourenne. J’ai pris conscience qu’il y a trois types d’amendements : ceux qui ont le bonheur d’aller vers le succès et l’adhésion de notre assemblée, ceux qui se soldent par un échec et ceux dont le destin est totalement obscur, qui n’accèdent jamais à la lumière, parce qu’ils sont frappés d’irrecevabilité. (M. Philippe Dallier sexclame.)

C’est d’un amendement de cette troisième catégorie que je souhaite vous parler. Il s’agissait d’autoriser à titre expérimental, dans certaines régions et pour une durée de cinq ans, la création d’infirmières référentes.

Si j’avais pu défendre cet amendement, je vous aurais expliqué que la prise en charge du grand âge prend une importance croissante pour tous les acteurs de santé, plus particulièrement pour les 116 800 infirmières libérales, dont 90 % de l’activité est réalisée à domicile et qui visitent quotidiennement 700 000 patients en situation de dépendance, soit 1 % de la population.

C’est bien le manque d’organisation autour de la personne âgée, souvent atteinte de polypathologies, et les allers-retours entre l’hôpital et le domicile qui sont la principale cause de dépenses, conclut dans ses travaux sur le vieillissement le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie.

Il existe des éléments importants de non-qualité liés au cheminement de ces personnes fragiles : recours inapproprié à l’hôpital, mauvais usage du médicament, manque de réactivité dans l’adaptation des traitements médicamenteux, carences dans l’éducation thérapeutique et la prévention.

Dans ce contexte, il serait très pertinent de mettre en œuvre le concept d’infirmière de famille, ou d’infirmière référente, adopté par tous les États européens et inscrit dans le programme Santé 21 de l’Organisation mondiale de la santé. En France, l’infirmière de famille apparaît comme le chaînon manquant dans le panorama de la santé publique.

Consultation, évaluation de la dépendance, visite de médication, élaboration d’un plan d’aide et de soins, mais aussi coordination sociale et soignante : telles seraient les principales missions de l’infirmière référente.

La recherche de coordination est une vraie constante de toutes les politiques de santé menées au cours des dernières années : je pense au coordonnateur créé en 1982, aux réseaux gérontologiques, aux centres locaux d’information et de coordination, les CLIC, aux maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades Alzheimer, les MAIA, et aux programmes Personnes âgées en risque de perte d’autonomie, ou PAERPA, et j’en passe. Le recours systématique aux infirmières de familles identifiées comme référentes apporterait enfin une réponse claire !

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, sur l’article.

M. Philippe Mouiller. Malgré les évolutions de l’ONDAM en 2019, les hôpitaux français connaissent une situation de tension extrême, du fait d’un manque criant de moyens, notamment de personnel. Afin de mettre fin à cette situation, des moyens supplémentaires doivent être octroyés aux hôpitaux.

Il est impératif de proposer des réformes de fond, afin de prendre des mesures financières d’urgence pour certains établissements, de donner un coup d’arrêt dès 2019 à la baisse des tarifs de la régulation prix-volume dans un contexte d’activité stable et de restituer les crédits des établissements de santé non consommés, pour ne plus faire de l’hôpital une variable justement.

Il convient aussi de prendre des mesures afin de répondre immédiatement à la situation de crise sans précédent, notamment dans la psychiatrie publique, et de réduire les inégalités territoriales en santé.

Dans le département des Deux-Sèvres, que je représente, le centre hospitalier de Niort pâtit de ce manque de moyens, notamment dans le service de psychiatrie, qui connaît une situation très difficile : les personnels sont en grève pour dénoncer le manque de moyens humains et réclamer des locaux de qualité pour accueillir les patients les plus fragiles. Madame le ministre, ce centre hospitalier témoigne de l’inégalité de traitement constatée entre les territoires, en ce qu’il dispose, comparativement, de moins de moyens financiers que d’autres établissements de même taille.

J’espère que, à la faveur du projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais aussi des prochains textes qui seront examinés dans le cadre de la réforme de la santé, nous pourrons trouver des solutions rapides. L’équilibre des comptes publics, oui, mais à quel prix ?

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.

Mme Laurence Cohen. Comme l’a très bien expliqué ma collègue Esther Benbassa, l’incitation financière à l’amélioration de la qualité, ou IFAQ, va être étendue à la psychiatrie.

Or, madame la ministre, je veux attirer votre attention sur l’état de la psychiatrie. Nous avons toutes et tous en mémoire l’état des hôpitaux psychiatriques, leurs difficultés et leurs appels au secours. Cette situation s’inscrit dans le contexte des difficultés générales de l’hôpital, mais avec des problèmes particuliers.

Je pense notamment aux personnels de l’établissement du Vinatier, à Bron, qui dénoncent la dégradation des conditions de prise en charge des patients. Je pense également aux personnels du centre hospitalier Alpes-Isère de Saint-Égrève, qui dénoncent la maltraitance institutionnelle, et à ceux de l’hôpital Philippe Pinel d’Amiens, qui ont tout récemment mené une lutte pendant plus de cent jours pour obtenir des postes supplémentaires.

Les luttes qui se développent visent, à chaque fois, à obtenir des postes supplémentaires, tant il est difficile de continuer à prodiguer des soins aux patients avec des moyens restreints.

Je pense aussi à la fusion des établissements psychiatriques parisiens.

L’hôpital psychiatrique est le lieu d’une grande souffrance ; les exemples ne manquent pas. Étendre l’IFAQ à la psychiatrie, non seulement ne résoudra rien, mais, à mon avis, aggravera encore la situation.

La démarche qualité ne mesure que la qualité de la mise en œuvre de protocoles, qui ne permettent au mieux qu’un soin standardisé, centré sur le symptôme, en contradiction, selon moi, avec un soin de qualité centré sur le sujet, impliquant une clinique individualisée. C’est vrai en général, mais beaucoup plus encore en psychiatrie.

Madame la ministre, il est extrêmement regrettable que le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne contienne pas vraiment de mesures en faveur de la psychiatrie, hormis cet article, dont je viens d’évoquer les limites.

Comment comptez-vous répondre aux cris d’alerte des soignants en établissements psychiatriques et des patients, qui ont de plus en plus de mal à trouver une place et des soins dans ces structures ? J’en ai moi-même reçu à ma permanence, qui étaient en très grande difficulté. Quelles mesures concrètes êtes-vous en mesure d’annoncer à la représentation nationale en faveur de la santé mentale, afin de faire revivre la psychiatrie humaine et de secteur dont nous avons éminemment besoin ?

M. le président. L’amendement n° 515, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. L’article 27 étend le dispositif de paiement à la qualité des établissements de santé, voté dans le cadre du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La qualité et la sécurité des soins du service public hospitalier sont contrôlées par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. En complément des règles sanitaires existantes, vous proposez d’améliorer la qualité des soins par l’incitation financière à l’amélioration de la qualité, l’IFAQ.

Il s’agit d’attribuer aux établissements entre 15 000 et 500 000 euros, selon les résultats d’indicateurs comme le bon usage des médicaments dans les hôpitaux, la qualité de la lettre de liaison à la sortie et la satisfaction des patients hospitalisés.

Nous sommes évidemment favorables à la prise en compte de l’avis des patients, qui passe notamment par une démocratie sanitaire revalorisant la place des représentants des usagers au sein des hôpitaux. Mais les critères de validation des indicateurs de qualité et de sécurité des soins sont aujourd’hui détournés pour justifier la fermeture des établissements de santé de proximité.

Ces critères ne prennent pas en compte les conséquences des politiques d’austérité en matière de santé menées depuis des décennies et qui ont dégradé la qualité des soins. C’est la double peine pour les hôpitaux : d’une part, ils subissent depuis des années le désinvestissement budgétaire de la sécurité sociale par rapport à l’évolution des besoins ; d’autre part, si cet article est adopté, ils subiront des pénalités pour ne pas avoir réalisé les investissements indispensables à la modernisation des services, alors que la réduction du nombre de personnels diminue nécessairement la qualité des soins.

Étendre l’IFAQ aux activités de psychiatrie à partir de 2020 aggravera encore les difficultés rencontrées par les établissements psychiatriques. Alors non, madame la ministre, la transformation du système de soins que vous proposez ne résoudra pas les difficultés d’accès aux soins et de qualité des soins ; au contraire, elle aggravera les inégalités financières et la mise en concurrence des établissements !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur de la commission des affaires sociales pour lassurance maladie. La commission est favorable à une plus large prise en compte de la qualité des soins dans le financement des établissements de santé. Le président Alain Milon la préconisait déjà dans son rapport de 2012 sur la tarification à l’activité, la T2A.

L’expérience des patients est déjà prise en compte via l’indicateur e-Satis développé par la Haute Autorité de santé. Bien sûr, on doit toujours être vigilant avec ce type d’indicateurs, de façon à ne pas introduire de biais. Néanmoins, l’article 27 nous semble aller dans le bon sens, et nous sommes défavorables à sa suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je suis évidemment défavorable à la suppression de l’article.

Nous souhaitons faire monter en charge l’incitation financière à la qualité, un dispositif qui encourage les établissements à faire mieux dans leurs organisations au bénéfice des patients. L’entrée en vigueur de ce dispositif est fixée au 1er mars 2019.

Les indicateurs, qui sont en préparation, seront réévalués tous les trois ans par la Haute Autorité de santé, qui vérifiera scientifiquement la capacité des établissements à les recueillir de façon quasiment automatique, pour que la charge de travail de ceux-ci ne soit pas alourdie. La modification des indicateurs tous les trois ans permettra d’éviter les biais qui aboutiraient progressivement à ce que les systèmes s’adaptent et dérivent pour satisfaire à un indicateur au lieu de remplir un objectif de qualité.

Ce travail est effectué sous la responsabilité de la Haute Autorité de santé, dont l’un des services est dédié aux indicateurs, lesquels sont étudiés et évalués sur le terrain généralement pour une année blanche, puis mis en place et déployés de façon générale s’ils s’avèrent robustes.

Aujourd’hui, il existe dix indicateurs au maximum par champ – MCO, médecine chirurgie obstétrique, SSR, soins de suite et de réadaptation, ou HAD, hospitalisation à domicile. Ces indicateurs sont arrêtés par le ministère, après avis de la HAS. L’idée est de faire basculer une partie du financement issu de la T2A vers un financement à la qualité, afin d’inciter les établissements à faire mieux plutôt qu’à produire de plus en plus d’actes.

C’est, je le pense, une philosophie à laquelle vous adhérez. Il n’y a donc pas aujourd’hui d’inquiétude à avoir sur notre volonté d’améliorer les indicateurs pour qu’ils soient davantage axés sur les résultats des pratiques que sur une démarche qualité, comme l’évoquait Mme Cohen.

Les indicateurs de qualité sont réévalués. Ils font d’ailleurs l’objet de travaux internationaux, car nous ne sommes pas le seul pays à développer de tels indicateurs. Ils font l’objet de partages, leurs biais sont examinés… : tout cela va dans le sens d’une amélioration de la qualité au niveau international.

Madame Cohen, vous faisiez part de votre inquiétude quant à l’extension de ces indicateurs à la psychiatrie, au vu de l’état de cette spécialité dans notre pays. Cet état est lié à trois éléments différents.

D’abord, le faible investissement dans les établissements ces dernières années : j’y travaille et j’ai prévu notamment dans le plan « Ma santé 2022 » qu’une partie du financement et de l’investissement aille vers les hôpitaux psychiatriques.

Ensuite, la faible démographie des psychiatres, notamment à l’hôpital : elle s’explique par la rémunération extrêmement avantageuse des psychiatres en ville, liée à la pénurie de ces spécialistes. Il est donc très difficile de recruter des psychiatres hospitaliers. Beaucoup des établissements que vous citez ont en réalité des postes ouverts : le problème est donc non pas financier, mais lié aux difficultés de recrutement.

Enfin, le dernier sujet est plus préoccupant. Les deux précédents sont à ma main : former des psychiatres, c’est mon travail. Avec Frédérique Vidal, nous avons d’ailleurs ouvert dix postes de chefs de clinique en pédopsychiatrie l’année dernière, et j’ai demandé à tous les doyens de médecine d’ouvrir des postes de PU-PH, c’est-à-dire de professeur des universités-praticien hospitalier, en pédopsychiatrie afin de former des internes. Dans huit régions françaises, il n’y a plus de pédopsychiatre ! À mon arrivée, la situation était, dirais-je, assez sinistrée, et il faut le temps de former les personnes. Nous y travaillons d’arrache-pied.

Ce troisième sujet est celui de la dérive des pratiques. Pour avoir longtemps présidé la HAS, j’ai pu prendre connaissance des certifications d’un certain nombre d’hôpitaux psychiatriques. Dans certains d’entre eux subsistent des pratiques d’un autre siècle, pour ne pas dire d’un autre millénaire. Ce que nous leur demandons, c’est de la qualité, c’est-à-dire un changement de leurs pratiques. Parmi les hôpitaux que vous citez, certains – je ne dirai pas lesquels – ont du mal à recruter des psychiatres, parce qu’ils ont maintenu des pratiques du siècle dernier. Plus personne ne veut y travailler !

À un moment donné, il faut mettre le holà. Cela passe par la non-certification d’un certain nombre d’établissements, par la mise en place d’indicateurs de qualité qui leur permettront de faire évoluer leurs pratiques et puis, quand ils ne veulent rien changer à ces dernières parce qu’ils estiment bien faire, par des sanctions financières. Sur ce dernier point, je serai intraitable, parce que ce que j’ai vu dans certains hôpitaux est absolument affligeant.

Je travaille sur ces trois leviers, mais je ne veux pas que nous nous privions de ces indicateurs de qualité dans nos hôpitaux psychiatriques. Il n’y a aucune raison qu’ils échappent à notre devoir d’améliorer la qualité des soins.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Madame la ministre, je n’ai pas bien compris comment faire mieux, surtout lorsqu’il y a moins de moyens et qu’il faut réduire le déficit, ce qui passe par la suppression d’emplois, comme cela a été le cas dans l’EPSM, l’établissement public de santé mentale, de Saint-Venant, que je vous invite à visiter.

Faire mieux, c’est bien, mais je veux tout de même rappeler que les personnels sont submergés de travail, qu’ils prennent beaucoup sur eux-mêmes et que, comme souvent dans ce type d’endroits, ils sont en souffrance. En effet, les restrictions budgétaires et les déficits comblés par des suppressions de personnel font qu’autant les familles que les patients et les personnels sont en souffrance.

Je le redis, je ne vois pas, madame la ministre, comment faire mieux avec moins…

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.

M. Michel Amiel. Madame la ministre, je vous remercie d’avoir pris en charge la question de la pédopsychiatrie, en retenant en particulier la préconisation sur la création de postes de PU-PH qu’Alain Milon et moi-même avions faite dans notre rapport. Sans PU-PH, on ne peut pas former de pédopsychiatres ; sans pédopsychiatre, les services ne peuvent plus être alimentés.

Mais il est vrai que la psychiatrie reste une spécialité sinistrée – le mot est peut-être un peu fort – en France. C’est aussi le fruit de l’histoire : la psychiatrie telle qu’elle existe aujourd’hui découle de certaines pratiques des années 1950 et 1960 – je pense en particulier à la fermeture de lits hospitaliers.

J’en reviens à la pédopsychiatrie – vous savez que ce sujet m’est cher –, qui concerne également les mineurs sous main de justice internés en psychiatrie : elle a besoin de moyens supplémentaires, et pas seulement hospitaliers. C’est le cas des CMP, les centres médico-psychologiques, des CMPP, les centres médico-psycho-pédagogiques, des centres d’action médico-sociale précoce, les CAMSP, bref de toutes ces structures qui s’occupent d’enfants pour lesquels une prise en charge précoce pourrait éviter l’évolution vers une morbidité beaucoup plus importante. Ainsi, même sur le plan financier, on s’y retrouverait.

Nous comptons sur vous pour que cette spécialité, qui est quelque peu délaissée, y compris – vous l’avez dit – par les praticiens eux-mêmes, soit encouragée.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je voudrais réagir aux propos de Mme Apourceau-Poly, qui se demande comment faire mieux avec moins. On ne peut pas dire qu’il y ait moins ! Même si un ONDAM en augmentation de 2,5 % me semble, à titre personnel, insuffisant, cela représente tout de même près de 4 milliards d’euros de dépenses supplémentaires autorisées l’année prochaine… Ce n’est pas rien, même si, je le répète, cela peut paraître insuffisant. C’était le premier point que je souhaitais relever.

Deuxième point, il est vrai que la psychiatrie est en état d’urgence et qu’il existe un véritable problème. Mais je voudrais rappeler que les hôpitaux psychiatriques sont non pas à la T2A, mais à la dotation annuelle de fonctionnement, la DAF. Cette dotation n’est finalement peut-être pas le meilleur système pour permettre aux hôpitaux d’évoluer.

La T2A a quelques défauts, notamment parce qu’elle est peut-être inflationniste. Elle a aussi le défaut de la France : lors de sa création, nous avions mis en place des tarifs, puis on s’est aperçu que les hôpitaux avaient compris qu’ils pouvaient gagner plus en augmentant leur activité. On a alors baissé les tarifs au lieu de jouer le jeu. Nous aurions dû maintenir ces tarifs et dire aux hôpitaux d’augmenter leur activité dans des domaines différents de ceux dans lesquels ils gagnaient beaucoup d’argent.

Quand Jacky Le Menn et moi-même avons fait notre rapport sur la T2A, nous avions établi une comparaison particulièrement intéressante. La T2A a été créée aux États-Unis en 1984 et en France en 2004. Notre rapport date de 2012 : vingt-quatre ans après la mise en place de cette tarification, il y avait aux États-Unis 180 tarifs stables. En France, huit ans après la mise en application de la T2A, il y avait 253 tarifs en diminution annuelle. Cette situation empêche les hôpitaux et les professionnels de santé de travailler dans la stabilité. C’est aussi le cas dans d’autres domaines, puisque l’on constate, lors de la discussion de la loi de finances, que des règles mises en place une année peuvent être, si cela arrange, modifiées un ou deux ans après.

Il ne faut pas modifier les règles. On peut évidemment dire que la T2A et la DAF ne marchent pas, mais ce n’est, à mon sens, pas vrai. Ce qui est vrai en revanche, c’est que l’on modifie les règles tous les ans, et c’est ce qui ne marche pas !

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Nos échanges montrent que, s’agissant de la psychiatrie, il est vraiment nécessaire non seulement d’avoir un débat, mais aussi de le conduire à son terme.

Madame la ministre, vous dites que la pédopsychiatrie est sinistrée et que les pédopsychiatres manquent. Nous l’avons constaté avec Michel Amiel lors du travail qui a été mené ici au Sénat.

Il faut réfléchir à la manière dont sont organisés les prises en charge et les soins. On retrouve la logique des groupements hospitaliers territoriaux dans les CMP. Dans le cadre de notre tour de France des hôpitaux et EHPAD publics, les responsables que j’ai rencontrés m’ont fait part de leur volonté de regrouper les CMP pour les rendre plus proches des populations. C’est complètement contre-productif, puisque les CMP ont été créés dans les quartiers justement pour être au plus près des populations ! Si on les regroupe, certains quartiers seront déshérités. Il faut y réfléchir.

Je suis d’accord avec vous, madame la ministre, il ne faut pas caricaturer les positions : nous ne devons pas caricaturer les vôtres et vice versa. Bien sûr, une réorganisation est nécessaire. Le monde hospitalier n’est pas le pays des Bisounours, où tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil. Certaines pratiques sont effectivement condamnables, comme dans toute profession.

Quand on parle des moyens, il faut aussi évoquer la formation. Dans un certain nombre d’établissements psychiatriques, les personnels dénoncent le recours à la contention – ce n’était pas le cas auparavant –, qui est une façon rapide et immédiate d’intervenir lorsque l’on manque de bras. Cet aspect n’est peut-être pas le seul à devoir être pris en compte, mais il ne faut pas l’oublier. Il faut également aborder la formation des médecins, des infirmiers et des infirmières. C’est un tout !

On voit là que la psychiatrie est quand même le parent pauvre de la médecine. Il faut une loi pour que nous puissions débattre et donner les moyens humains et financiers, et peut-être le cadrage, qui permettront de revivifier la psychiatrie pour en faire une spécialité moderne digne du XXIe siècle. De nombreux malades n’ont pas de place à l’hôpital : on les retrouve malheureusement dans les prisons.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Actuellement, trois quarts des établissements de santé ont des difficultés financières. Une tarification totale en T2A n’est bien sûr pas totalement satisfaisante, même si, dans un nombre assez important de cas, des directeurs d’établissements sont favorables au maintien d’une partie de celle-ci.

Tout cela peut effectivement entraîner une diminution du personnel et peut-être une dégradation, parce que la T2A n’a pas augmenté la rémunération.

L’article 27, qui vise à étendre le dispositif de rémunération à la qualité aux services de psychiatrie, nous paraît aller totalement dans le bon sens. Dans certains départements, il n’y a aucun lit de pédopsychiatrie, ce qui est extrêmement préjudiciable.

De cet article, je retiendrai que, plutôt que de mettre en place des sanctions, il faudrait, comme vous l’avez indiqué, madame la ministre, proposer des mesures d’accompagnement si le seuil requis n’est pas atteint, après la refonte des critères et des indicateurs, mais, surtout, accompagner les services et les hôpitaux pour parvenir à des soins de qualité.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous avons abordé la question de la psychiatrie en évoquant les indicateurs.

Je souhaite d’abord rappeler ce que sont les indicateurs de qualité. Je veux bien que tout soit lié aux moyens et aux personnels, mais il existe tout de même des fondamentaux en médecine. Un indicateur de qualité, c’est par exemple se laver les mains avant de rentrer dans la chambre d’un malade ou disposer d’une check-list au bloc opératoire avant d’opérer. Ce sont des prérequis indispensables. Qu’il y ait beaucoup de personnel ou non, si l’on ne lave plus les mains, c’est qu’il y a vraiment un problème ! Je tiens à ce que les indicateurs de qualité restent en place.

Monsieur Chasseing, la sanction est vraiment, dans notre idée, une mesure exceptionnelle. C’est le bâton à utiliser si un établissement ne montre pas de volonté de travailler, et il y en a quelques-uns qui n’en ressentent pas le besoin… J’entends votre désir d’accompagnement, nous aurons l’occasion d’en reparler lors de la discussion d’un amendement de Mme Deroche notamment.

Pour ce qui concerne la psychiatrie, j’ai présenté une feuille de route le 28 juin dernier à l’occasion d’un comité stratégique de la santé mentale et de la psychiatrie, que j’ai mis en place et que je préside moi-même, et qui se réunit tous les six mois pour améliorer la situation.

Je l’ai dit, des moyens financiers sont prévus, qui figurent dans le plan « Ma santé 2022 ». Cela ne suffit pas, car la prise en charge sur les territoires pose aussi des problèmes organisationnels. Ainsi, de la même façon qu’une coordination est nécessaire s’agissant des parcours des patients pour les soins somatiques, il faut obliger les territoires à avoir un programme de santé mentale coordonné.

Nous travaillons aujourd’hui avec les ARS et l’ensemble des professionnels de la psychiatrie, qu’elle soit hospitalière ou libérale, à établir des parcours coordonnés. Cela figure dans la feuille de route, tout comme l’engagement que j’ai pris de créer des postes d’infirmières et d’infirmiers de pratique avancée en psychiatrie dès le mois de septembre 2019. J’ouvre les pratiques avancées à la psychiatrie, parce que je pense qu’elles seront très utiles à l’amélioration des prises en charge. Les personnels seront formés pendant deux ans à des pratiques qui évitent la contention des patients agressifs. Je sais bien, comme vous, que cela prend du temps.

Enfin, nous travaillons avec les professionnels à un programme de montée en charge des indicateurs de qualité pour améliorer les pratiques quand elles sont déviantes. Un travail est aussi mené avec les doyens de médecine pour améliorer la couverture territoriale en psychiatres et pédopsychiatres.

Tout cela fait donc l’objet d’une feuille de route et est suivi par un comité stratégique. La loi ne règle pas tout. J’ai fait de la psychiatrie ma priorité en arrivant au ministère, et j’y travaille de façon très concertée avec les acteurs. Vous pouvez être certains, mesdames, messieurs les sénateurs, de mon engagement sur ce sujet.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 515.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 455 rectifié, présenté par Mme Rossignol, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin et Meunier, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, J. Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Compléter cet alinéa par les mots :

Ces indicateurs prennent en compte :

II. – Après l’alinéa 6

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

…) Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés.

« - le programme relatif à la prévention des violences sexuelles et à l’accès aux soins des victimes de ces violences prévu dans le cadre du schéma régional de santé par l’article L. 1434-2 du code de la santé publique ;

« - la mise en place d’une politique interne de prévention et de lutte contre les comportements des personnels pouvant être perçus comme préjudiciables par les patients et les patientes, en particulier dans les domaines gynécologiques et obstétricaux. » ;

La parole est à Mme Laurence Rossignol.

Mme Laurence Rossignol. Depuis le rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes sur les violences sexuelles durant le suivi gynécologique et obstétrical, on sait que ces violences existent et qu’elles s’exercent dans le cadre médical, de manière parfois consciente, mais souvent de façon involontaire. Ces violences concernent aussi bien d’ailleurs les patientes que les personnels en raison de la manière dont les pratiques sont exercées.

Le dispositif mis en place à l’article 27 vise à améliorer la qualité des soins. C’est la raison pour laquelle nous proposons par cet amendement que, parmi les indicateurs visés, soient aussi retenus, d’une part, la mise en place d’une politique de prévention contre les comportements des personnels préjudiciables aux patientes et aux patients, en particulier dans le domaine gynécologique et obstétrical, ainsi que, d’autre part, la référence au programme relatif à la prévention des violences sexuelles.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Vous l’avez dit, ma chère collègue, le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes a en effet récemment consacré un rapport aux actes sexistes durant le suivi gynécologique et obstétrical, qui a été publié en juin dernier.

Notre commission souhaite bien sûr que les recommandations formulées soient mises en œuvre pour objectiver le phénomène et condamner les pratiques qui doivent l’être, sans jeter néanmoins l’opprobre sur le corps médical dans son ensemble. Le recueil des expériences des patients, qui est prévu, pourra d’ailleurs y contribuer, de même que les indicateurs transverses de qualité des soins.

Toutefois, il n’a pas semblé opportun à la commission de cibler la dotation avec le critère que vous proposez. L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous sommes évidemment tous concernés par les questions des violences faites aux femmes. Je crois que ce gouvernement a démontré à quel point il était engagé sur la question. Le rapport contient des préconisations, mais ce que vous proposez, c’est-à-dire l’inclusion d’un indicateur relatif aux violences obstétricales dans les indicateurs de qualité en obstétrique, me paraît compliqué à mettre en place.

En effet, les indicateurs reposent par principe sur l’automaticité du recueil de l’information. Les seuls éléments que l’on peut obtenir aujourd’hui sont dans la déclaration sur la satisfaction des patients, c’est-à-dire le dispositif e-Satis, mis en place par la Haute Autorité de santé, lequel est inclus dans les critères de qualité des établissements donnant droit à l’IFAQ.

Dans e-Satis figurent des questions relatives à la façon dont les patients ont été traités, qui concernent aussi bien les violences obstétricales que toute violence institutionnelle dans le cadre de la pratique du soin. Ce qu’on appelle aujourd’hui les violences obstétricales sur des femmes en situation de vulnérabilité peut aussi se retrouver aussi dans d’autres situations de vulnérabilité au sein des établissements.

En réalité, cet indicateur est déjà inclus dans le dispositif qui recueille le niveau de satisfaction des patients et dans les critères de qualité des établissements. Je suis donc défavorable à la mise en place d’un indicateur supplémentaire.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 455 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 66, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les indicateurs pris en compte ne peuvent être identiques à ceux fixés par le contrat mentionné à l’article L. 162-30-2 du code de sécurité sociale pour l’application de la sanction financière prévue par le premier alinéa de l’article L. 162-30-4 du même code.

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. On l’a dit, l’article 27 renforce la portée de la dotation IFAQ des établissements de santé en assortissant la non-atteinte des résultats d’un mécanisme de pénalité financière.

Nous partageons cet objectif, puisque nous avons souhaité adopter l’article. Toutefois, l’articulation des différents instruments d’incitation à la qualité devient peu lisible. En 2016, nous avons mis en place les CAQES, qui sont également assortis d’un mécanisme d’intéressement et de sanction.

Même si les deux outils peuvent être complémentaires, il n’est pas exclu qu’ils reposent sur des indicateurs communs. L’amendement vise alors à éviter toute possibilité de double peine pour les établissements de santé.

De plus, il semble nécessaire de clarifier l’articulation entre tous les outils existants, lesquels deviennent illisibles. Il faut, en effet, renforcer la lisibilité si l’on veut une meilleure qualité et pertinence des soins.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Les deux indicateurs que vous évoquez sont très différents, puisqu’ils n’ont pas du tout le même objet.

Le CAQES est un contrat passé avec l’établissement sur des objectifs de qualité au sens très large : cela peut être, par exemple, l’usage des génériques dans l’établissement ou la régulation des transports. Il fait l’objet d’une discussion au cas par cas entre l’ARS et un établissement dont les pratiques apparaissent peu efficientes.

À l’inverse, l’IFAQ repose sur des indicateurs nationaux qui sont communs à tous les établissements et qui visent véritablement la qualité des actes et des pratiques.

Le risque qu’un établissement soit sanctionné au titre des deux dispositifs est très faible, parce que leurs objets, leurs objectifs et leurs modes de raisonnement ne sont pas du tout les mêmes. Les ARS seront évidemment attentives à ce que des hôpitaux ne soient pas pénalisés, mais, je le répète, le risque de subir une double peine est très faible.

Je vous propose de ne pas inscrire ce point dans la loi, parce que le CAQES est un mode de contractualisation des ARS avec les établissements de santé, alors que l’IFAQ est un instrument géré par le ministère qui doit permettre d’améliorer la qualité globale des établissements français.

Je vous suggère donc de retirer cet amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. J’ai entendu vos propos, madame la ministre. Ce qui est important pour nous, c’est de montrer que, s’agissant des dispositifs de qualité – l’IFAQ et le CAQES –, les établissements ne doivent pas être soumis à une double peine.

Si vous nous assurez que les indicateurs ne sont pas les mêmes et qu’il n’y aura pas de double sanction, je veux bien retirer l’amendement. Nous verrons l’année prochaine si j’ai eu raison de le faire ; si ce n’est pas le cas, je le redéposerai.

M. le président. L’amendement n° 66 est retiré.

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 67, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 10

Compléter cet alinéa par les mots :

et propose des mesures d’accompagnement

II. – Alinéa 11

Rédiger ainsi cet alinéa :

« L’établissement faisant l’objet d’une pénalité financière présente un plan d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, élaboré dans les conditions prévues aux articles L. 6144-1 ou L. 6161-2-2 du code de la santé publique. » ;

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Cet amendement vise à assortir l’avertissement donné par l’ARS à l’établissement n’atteignant pas, une année donnée, les objectifs de qualité de la proposition de mesures d’accompagnement, afin d’aider l’établissement à atteindre les objectifs fixés.

Il s’agit ensuite de confirmer le principe d’un plan d’amélioration de la qualité présenté par l’établissement faisant l’objet d’une pénalité financière – voté par l’Assemblée nationale –, tout en associant la commission ou la conférence médicale d’établissement à son élaboration.

M. le président. L’amendement n° 437 rectifié ter, présenté par Mme Jasmin, MM. Antiste et J. Bigot, Mme Conconne, MM. Lurel, Daudigny et Kanner, Mmes Féret et Grelet-Certenais, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran, Mme Ghali, M. Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Compléter cet alinéa par les mots :

et il lui fait des préconisations correctives soutenables et personnalisées en fonction de l’établissement concerné

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. Madame la ministre, mon amendement concerne les démarches de certification et d’accréditation qui sont déjà entreprises par bon nombre d’établissements. La plupart du temps, les moyens manquent pour poursuivre ces démarches.

La majorité de nos établissements répondent à des normes et à des référentiels qui sont déjà établis. Malheureusement, ces démarches d’amélioration continue de la qualité sont soumises à des critères qui devraient sans doute être plus pertinents et cohérents au regard de ce que vous souhaitez désormais.

Il faudrait aussi une prise en compte systémique : nous devons intégrer les services supports et les plateaux techniques des établissements, nécessaires pour avoir des soins de qualité, dans les critères d’appréciation. Je pense aussi à la traçabilité qui est imposée par exemple au circuit des médicaments.

Nous devons également habiliter des personnels et qualifier les équipements. La plupart du temps, avec les nouvelles normes, on nous demande d’avoir des systèmes de back up afin de pouvoir assurer la continuité du service, quel que soit l’état d’un appareil donné, par exemple pour l’analyse des gaz du sang ou un certain nombre d’autres choses.

Alors que les moyens manquent, vous voulez en quelque sorte taxer les établissements. J’aurais souhaité que vous puissiez poursuivre la démarche qualité en regardant les choses dans l’autre sens, pour voir ce qui se fait déjà. Il faut permettre aux établissements, qui sont pour la plupart volontaires, mais manquent de moyens, de poursuivre leurs efforts en leur donnant les moyens de faire ce que vous souhaitez. Vous voulez taxer les établissements alors qu’ils sont déjà dans des situations dramatiques, comme l’ont montré les différentes interventions précédentes. Mais, je le répète, beaucoup d’établissements manquent de moyens humains, matériels, financiers pour poursuivre leurs démarches d’amélioration.

Prendre en charge un patient, c’est tenir compte non seulement des critères que vous avez évoqués, mais de bien d’autres encore. Par exemple, en matière de surveillance des infections nosocomiales, si l’on ne dispose pas d’un laboratoire doté du personnel et des moyens nécessaires pour mener la démarche interne de qualité et faire les vérifications, il n’est pas possible de fournir des résultats de qualité. C’est la même chose pour tous les équipements, notamment l’imagerie.

Il faudrait une véritable prise en compte au niveau systémique de l’interdépendance des différents services et des différentes volontés. En effet, tout le monde est d’accord pour améliorer la qualité, puisque nous sommes tous de potentiels patients.

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Victoire Jasmin. Cependant, il faudrait vraiment que vous fassiez preuve de cohérence, car beaucoup de personnels de ces établissements souffrent du manque de moyens.

M. le président. Concluez, ma chère collègue !

Mme Victoire Jasmin. Cela, il faut l’entendre également !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. La présentation de Mme Jasmin était relativement détaillée, mais, en réalité, l’objet de son amendement est similaire à celui de la commission : accompagner les établissements dès le stade de l’avertissement.

Je demande donc le retrait de son amendement au bénéfice du nôtre.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, j’entends votre souhait d’être rassurés quant au fait que les ARS accompagnent bien les établissements les plus en difficulté au regard des indicateurs et que les présidents de CME et la communauté médicale soient informés.

Sincèrement, je pense que cela relève de la bonne pratique et qu’en réalité les ARS accompagnent déjà les établissements. Vous souhaitez l’inscrire dans la loi, pourquoi pas ?

De toute façon, le fait de prévenir et d’intégrer les commissions médicales dans l’élaboration du plan d’amélioration me semble une bonne chose.

Je propose donc le retrait de l’amendement de Mme Jasmin au profit de celui de la commission des affaires sociales, auquel je suis favorable.

M. le président. Madame Jasmin, l’amendement n° 437 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Victoire Jasmin. Madame la ministre, j’accepte de retirer mon amendement, mais je souhaite que mon message soit entendu, compris et traduit en actes.

M. le président. L’amendement n° 437 rectifié ter est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 67.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 119 rectifié, présenté par Mme Conconne, M. Antiste, Mme Jasmin, MM. Lurel et Iacovelli, Mme G. Jourda, M. Duran, Mme Conway-Mouret, M. Lalande, Mmes Guillemot et N. Delattre, MM. Manable et P. Joly et Mme Artigalas, est ainsi libellé :

Alinéa 15

Compléter cet alinéa par les mots :

et le 1er janvier 2022 pour les collectivités de Martinique, de Guadeloupe et de Guyane

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. Cet amendement concerne les centres hospitaliers de la Martinique, de la Guadeloupe et de la Guyane qui traversent des difficultés financières et matérielles de grande ampleur.

En Martinique, certains travaux ont été négligés pendant des années, ce qui a entraîné un certain nombre de surcoûts qui sont aujourd’hui pris en compte.

En Guadeloupe, comme vous le savez, le CHU a été durement touché par un incendie. Les travaux de réorganisation en cours font l’objet d’un accompagnement de l’État.

Dans la mesure où des travaux sont entrepris pour la reconstruction du CHU de Pointe-à-Pitre et pour la remise à niveau du centre hospitalier de Martinique, nous ne souhaitons pas pénaliser davantage ces établissements.

La commission des affaires sociales du Sénat a publié un rapport, au début de l’année 2018, sur la situation de ces établissements que je vous invite à lire et qui vous apportera des éléments de réflexion complémentaires, madame la ministre.

Par ailleurs, la stratégie de transformation du système de soins d’ici à 2022 qui est en cours en Guadeloupe – les choses se passent de manière collégiale, avec l’ARS – va également entraîner de nouveaux travaux.

Pour ces raisons, je souhaiterais qu’une certaine tolérance s’installe dans la durée pour nos établissements en cours de reconstruction et en recherche de complémentarité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Madame Jasmin, comme vous l’avez souligné, la commission a pris la mesure des difficultés auxquelles sont confrontés les établissements de santé ultramarins. Une délégation s’est d’ailleurs déplacée en avril dernier en Guadeloupe et en Guyane.

Le texte permet déjà au directeur de l’ARS d’apprécier la pertinence de la sanction au regard de circonstances particulières propres à l’établissement.

Il me semble que cette disposition laisse la latitude nécessaire pour éviter de sanctionner des établissements dont les difficultés de fonctionnement sont aggravées par des événements exceptionnels, comme à Pointe-à-Pitre, par exemple, en raison de l’incendie qui a frappé le CHU voilà juste un an.

Nous souhaiterions que Mme la ministre nous donne des assurances en ce sens. Si tel était bien le cas, la commission vous demanderait de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Madame la sénatrice, je souhaite que mes propos soient bien compris.

La situation que vivent nos territoires ultramarins en termes d’accès à la santé est compliquée, particulièrement en Guadeloupe. Je suis évidemment très sensible à la réorganisation que vous avez dû effectuer à la suite de l’incendie du CHU.

Pour autant, je pense que l’adoption de votre amendement enverrait un mauvais signal, laissant à penser que nous serions plus tolérants envers une forme de mauvaises pratiques dans ces établissements plutôt que dans ceux de métropole, ce qui me pose un problème au regard de la qualité de soins que nous devons à nos concitoyens dans les DOM.

Je pense que les ARS – et Dieu sait combien elles sont en accompagnement aujourd’hui, en particulier en Guadeloupe pour la réorganisation du CHU et les problématiques qui en découlent – se montreront bien évidemment très vigilantes à appliquer les sanctions au regard des circonstances, comme le texte leur en laisse déjà la faculté.

Je rappelle enfin que le malus ne se met en place que très progressivement : les deux premières années, l’ARS adresse une alerte à l’établissement qui n’atteint pas un certain seuil en termes d’indicateurs, la sanction n’arrivant qu’à l’issue de la troisième année.

L’ARS, qui a accompagné l’établissement tout au long de la procédure et qui lui a fait part de ses préconisations, n’appliquera de sanction qu’en cas de dérive avérée ou de réelle « malfaçon ».

Je sais combien les ARS sont attentives à la situation spécifique des DOM. Je préfère ne pas inscrire dans la loi une disposition qui laisserait croire que l’on travaille moins bien dans les DOM et qu’il faut donc attendre deux ans de plus qu’ailleurs pour atteindre le niveau de qualité requis. Je préfère cette tolérance face à des événements exceptionnels à une disposition actant un niveau qualitatif moindre.

Pour ces raisons, madame la sénatrice, je vous demanderai de retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Madame Jasmin, l’amendement n° 119 rectifié est-il maintenu ?

Mme Victoire Jasmin. Madame la ministre, j’entends bien et je comprends parfaitement votre propos. Il m’appartenait de vous alerter, de façon transparente, pour que tout le monde dispose de la même information.

Je ne vais pas faire obstruction, bien au contraire. Toutefois, le rapport qu’ont rédigé mes collègues de la commission après leur déplacement doit servir à quelque chose.

Retirer mon amendement ne me pose aucun problème. Je souhaitais simplement m’inscrire dans la transparence. Il ne s’agissait aucunement d’envoyer un mauvais signal en termes de qualité des soins dans les DOM. J’avais d’ailleurs pris la précaution d’évoquer la mise en place de la stratégie 2022, en partenariat avec l’ARS, dont j’ai encore rencontré la directrice à Pointe-à-Pitre, lundi dernier.

Je m’inscris dans la cohérence et dans la transparence. Je veux simplement m’assurer du meilleur niveau d’information de tous ceux qui suivent nos travaux.

Je retire l’amendement.

M. le président. L’amendement n° 119 rectifié est retiré.

L’amendement n° 68, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 17

Compléter cet alinéa par les mots :

, et n’est pas prise en compte pour l’appréciation de la pénalité financière mentionnée au II du même article

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. L’année « blanche » prévue en 2020 pour le test des indicateurs de qualité et de sécurité de soins dans le secteur de la psychiatrie ne donnera pas lieu au versement de la dotation IFAQ pour les établissements les plus « vertueux » ; il n’y a pas lieu, non plus, qu’elle soit prise en compte pour l’appréciation de la sanction attachée à la non-atteinte des résultats pendant trois années.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Madame la rapporteur, tout cela va sans dire, mais cela va encore mieux en le disant : bien évidemment, nous ne tiendrons pas compte de l’année blanche pour l’appréciation d’éventuelles sanctions.

Le Gouvernement est favorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 68.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 27, modifié.

(Larticle 27 est adopté.)

Article 27
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 27 - Amendement n° 260 recitfié bis

Articles additionnels après l’article 27

M. le président. L’amendement n° 516, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 27

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’avant-dernier alinéa de l’article L. 162-30-2 du code de la sécurité sociale est supprimé.

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Dans la suite logique de notre amendement précédent visant à supprimer le dispositif IFAQ, nous proposons de supprimer l’article L. 162-30-2 du code de la sécurité sociale, relatif au contrat d’amélioration de la qualité et de l’efficience des soins, alias CAQES, issu du PLFSS pour 2016. Nous avions déjà, à l’époque, dénoncé cette disposition.

En effet, cet article dispose que le contrat a pour objet d’améliorer la qualité, la sécurité et la pertinence des soins et des prescriptions et de permettre une diminution des dépenses de l’assurance maladie.

L’objectif, et c’est bien le fil rouge de votre PLFSS, est de faire des économies, pour ne pas dire des restrictions.

Comme vous l’avez souligné, et nous en sommes en partie d’accord, ce serait une question d’organisation – mais pas seulement. Il faudrait donc de nouveaux indicateurs pour mesurer la qualité, la sécurité, la pertinence des soins.

Le problème est que vous ne vous contentez pas de ces seuls indicateurs. Vous y ajoutez des sanctions en cas de non-respect des objectifs. Or votre attitude sur les sanctions me pose un petit problème : vous êtes ici très ferme sur ce point, mais quand nous proposons, à notre tour, de sanctionner les entreprises, vous préférez bien souvent des incitations. Il y aurait donc deux poids, deux mesures…

De manière générale, le problème ne vient pas des professionnels de santé : leur engagement et la qualité des soins qu’ils prodiguent sont au rendez-vous.

Comme vous, je vais faire d’un peu d’humour, sinon de provocation : pourquoi ne pas créer des indicateurs portant sur la qualité des conditions de travail, sur le mal-être au travail dans les établissements de santé, dans les établissements médico-sociaux ou sur la qualité du dialogue social ? Je pense que les personnels hospitaliers, notamment les infirmiers et les infirmières, apprécieraient.

Il s’agit d’un manque criant que j’ai entendu lors de notre tour de France des hôpitaux. Et encore n’avons-nous pas visité tous les établissements…

Je ne crois pas que les personnels aient besoin de plus d’indicateurs. Comme nous l’avons déjà souligné à maintes reprises, ils ont surtout besoin de moyens et de soutien. Or c’est justement ce qui manque dans ce PLFSS.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Nous nous étions interrogés l’an passé sur l’application des sanctions aux établissements n’ayant pas conclu un CAQES, car cette démarche rencontrait des difficultés dans certaines régions, avec un nombre d’indicateurs parfois déraisonnable.

Nous souhaiterions que Mme la ministre nous renseigne sur la façon dont se poursuit cette démarche : le gel annoncé des sanctions est-il toujours appliqué ?

Il nous paraît toutefois utile de conserver un moyen de pression, en dernier recours, à l’encontre d’établissements qui se montreraient réfractaires à s’engager dans une démarche qualité. Pour ces raisons, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Madame Cohen, j’avais annoncé l’année dernière qu’il n’y aurait pas de sanction jusqu’en 2020 : aucune sanction n’a donc été prise pour l’instant. Il s’agit d’un bâton éventuel à l’encontre d’établissements qui feraient réellement preuve de blocage en matière d’amélioration de la qualité.

J’avais souhaité que la Haute Autorité de santé profite de la révision du manuel de certification en cours pour travailler sur la façon dont nous pouvions évaluer la gestion des ressources humaines et la qualité de vie au travail dans les établissements.

Depuis, j’ai quitté la Haute Autorité. J’ignore où en sont les travaux, mais ils avaient été engagés. Je n’ai donc pas attendu votre remarque pour m’intéresser aux conditions de travail des personnels qui ne font pas, aujourd’hui, l’objet d’un indicateur IFAQ.

Il s’agit d’une question compliquée : les indicateurs doivent être objectifs et leur pertinence scientifiquement démontrée. Ils doivent être facilement récupérables, de manière quasi automatique, pour éviter une surcharge de travail dans les établissements. Plus ils sont qualitatifs, plus il est compliqué pour la HAS de définir des indicateurs scientifiquement robustes.

La qualité de vie au travail peut être évaluée dans le cadre de la certification, mais il s’agit d’une autre démarche : des experts visiteurs se rendent dans les établissements et rencontrent les professionnels.

Ne pouvant vous répondre plus précisément dans l’instant, je vais interroger mes services sur l’état d’avancement de la nouvelle version de la certification 2020 qui devrait inclure ce type d’évaluation.

Je suis défavorable à votre amendement, même si votre remarque est évidemment pertinente.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. J’apprécie que vous entendiez nos remarques et que vous en releviez la pertinence, madame la ministre. Elles viennent de notre connaissance du terrain et de nos rencontres avec les personnels.

Les personnes que nous avons rencontrées nous ont maintes fois sollicités et nous ont fait part d’une grande souffrance au travail en raison d’une dérive que vous devez sentir, madame la ministre : beaucoup trop d’hôpitaux sont gérés comme des entreprises, avec un « management » qui n’est pas adapté à des établissements de santé.

Il nous semble important de continuer à alerter. Nous n’avons pas envie, encore une fois, d’avoir raison avant tout le monde. Nous avions dénoncé, en son temps, les inconvénients de la T2A : vous êtes en train de réfléchir à un autre système de tarification, preuve que nous étions dans le vrai. De même, cela fait un moment que nous dénonçons le numerus clausus, aujourd’hui remis en cause : encore une fois, nous avons eu raison avant la prise de conscience générale…

On nous taxe souvent de jusqu’au-boutisme, mais nous aimons voir que les petites lampes que nous allumons au fil du temps finissent par convaincre. C’est dans cet esprit-là que nous allons maintenir notre amendement, dans l’espoir d’attirer l’attention et d’inciter tout le monde à la vigilance sur les conditions de travail dans les établissements hospitaliers.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. On m’informe à l’instant que la Haute Autorité de santé a bien écouté les demandes que j’avais formulées avant de la quitter, puisqu’elle a intégré l’indicateur de qualité de vie au travail dans la version actuelle de la certification, sans attendre 2020.

Madame la sénatrice, j’ai passé heureusement – ou malheureusement – vingt-cinq années de ma vie dans les hôpitaux publics : qu’il s’agisse de la qualité de vie au travail ou de la T2A, croyez que j’avais une bonne idée de la façon dont nos établissements étaient gérés avant de proposer une transformation du système de santé.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je partage certains des propos de Mme Cohen, mais je n’irai pas jusqu’à voter son amendement.

Madame la ministre, vous connaissez bien ces questions, mais faites attention à ne pas créer une nouvelle usine à gaz. Les choses sont déjà suffisamment compliquées et les équipes qui se consacrent à toutes ces certifications ne se consacrent pas aux malades. Plus on ajoute de critères de qualité, moins les soins sont de qualité. Soyons très attentifs.

Je suis membre du conseil de surveillance du CHU de Reims et de celui d’un petit groupement hospitalier de la Haute-Marne. Je connais bien les différences qu’il peut y avoir entre un centre hospitalier régional et un hôpital de proximité. Et pourtant, la préoccupation principale est la même dans les deux cas : le temps consacré aux malades n’est pas suffisant.

Je partage bien évidemment votre souci de la qualité des soins et de la performance de nos hôpitaux publics, mais on en arrive à consacrer de moins en moins de temps aux patients. Il faut donc trouver le juste milieu pour faire en sorte que les critères retenus ne soient si compliqués qu’ils en deviennent chronophages pour le personnel médical ou paramédical.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 516.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 27 - Amendement n° 516
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 28

M. le président. L’amendement n° 260 rectifié bis, présenté par Mmes Imbert et Micouleau, M. Morisset, Mme Gruny, MM. Vaspart, D. Laurent et Bouchet, Mme Bruguière, MM. Lefèvre, Mouiller et Magras, Mmes Deromedi, M. Mercier, Garriaud-Maylam et Lassarade, MM. Chaize, Sol et Mandelli, Mmes A.M. Bertrand et Deseyne, MM. del Picchia et Laménie, Mmes Lherbier, Delmont-Koropoulis et Berthet, MM. Poniatowski et Dériot et Mme Lamure, est ainsi libellé :

Après l’article 27

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 162-30-4 du code de la sécurité sociale est abrogé.

La parole est à Mme Corinne Imbert.

Mme Corinne Imbert. Cet amendement vise à supprimer la partie « sanction » du CAQES.

Avec la mise en place d’un système de sanction, introduit dans le dispositif IFAQ par l’article 27 du présent projet de loi, une double sanction pourrait désormais exister avec le CAQES.

J’ai bien entendu vos propos, madame la ministre. Vous nous avez expliqué que les sanctions étaient exceptionnelles et que le risque de double peine était très faible, ce qui ne veut pas dire qu’il soit nul.

J’ai également bien écouté ce que vous avez dit lors de l’examen de l’amendement n° 66 présenté par Mme la rapporteur.

Il me semble nécessaire de clarifier tout cela. Je partage les propos de M. Savary tout comme votre volonté de disposer d’indicateurs relatifs à la qualité. Il faut pouvoir mesurer le risque infectieux, le risque médicamenteux et le risque de rupture de parcours de soins du patient.

J’anticipe un peu en disant que j’accepterai de retirer mon amendement. Je souhaitais simplement souligner que nous avons parfois le don de faire compliqué quand on pourrait faire simple. Cherchons à faciliter le travail des équipes tout en restant intransigeants sur un certain nombre d’indicateurs de qualité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. L’amendement précédent visait à supprimer les sanctions en cas de non-conclusion. Ici, il s’agit de supprimer les sanctions en cas de non-réalisation des objectifs fixés pour éviter le risque de doublon avec l’IFAQ que nous évoquions voilà quelques instants.

Cet amendement illustre bien la complexité des dispositifs de qualité demandés aux hôpitaux soit par le biais des contrats soit par le biais des dotations. Le Gouvernement doit s’efforcer de mettre en place un dispositif suffisamment lisible pour tout le monde.

En ce qui concerne l’IFAQ, madame la ministre, vous dites que les indicateurs seront assez précis et réduits, ce dont nous nous réjouissons. Par contre, en ce qui concerne les CAQES, force est de constater que les ARS ont demandé des indicateurs hyper nombreux et totalement inefficients que les établissements étaient bien incapables de respecter.

La commission demande le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. La complexité du système est en partie liée au fait que l’on utilise le terme « qualité » pour désigner des objets très différents : le CAQES concerne la gestion de l’hôpital, l’utilisation de génériques, la rationalisation des achats, la performance de l’établissement et la pertinence de l’organisation ; l’IFAQ vise la qualité des pratiques, la qualité des soins, avec un impact direct sur la sécurité des malades…

Il s’agit d’objectifs très différents et donc d’indicateurs très différents, mais que l’on a regroupés sous le même terme de « qualité », ce qui donne ce sentiment d’amoncellement du même dispositif.

Encore une fois, l’IFAQ concerne les pratiques des professionnels, la façon dont ils travaillent ; le CAQES s’intéresse davantage à la gouvernance de l’hôpital, à la meilleure organisation possible, au sens large. Il ne s’agit pas du tout des mêmes indicateurs. Je pense que l’on aurait dû retenir le terme de « pertinence » ou de « performance » pour le CAQES plutôt que celui de « qualité ».

Monsieur Savary, je suis absolument d’accord avec vous : il faut éviter de créer des usines à gaz. C’est la raison pour laquelle les indicateurs IFAQ – c’est là que réside toute la difficulté – devront être à la fois scientifiquement validés et faciles à récupérer. L’objectif n’est sûrement pas de retourner dans les dossiers des malades et de tout remplir à la main. Je crois que la Haute Autorité de santé est parfaitement consciente de cette nécessaire automaticité.

Enfin, les procédures de certification, qui permettent de mesurer l’engagement d’un hôpital, sont renouvelées tous les six ans pour les établissements certifiés de niveau A et tous les quatre ans pour les autres.

Certes, cette démarche mobilise un hôpital, mais pas tous les ans. Lorsque j’étais à la Haute Autorité de santé, j’ai fait évoluer la certification pour la simplifier et la rapprocher des pratiques médicales.

Comme vous, monsieur Savary, dans tout ce que j’entreprendrai, ma volonté sera de rendre du temps médical, d’arrêter les usines à gaz et les millefeuilles. Je serai extrêmement attentive à tout ce qui peut recentrer le corps médical sur la pratique de soins.

Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je vous remercie de partager mes préoccupations, madame la ministre, qui relèvent du bon sens. Je ne doutais pas que vous vous inscriviez dans cette philosophie : vous connaissez bien le terrain.

L’accréditation des laboratoires qui s’est greffée à tout cela a également conduit les hôpitaux périphériques à se réorganiser, à changer complètement les pratiques, à organiser des déplacements, ce qui a aussi pris du temps et complexifié les choses.

Je voudrais proposer une mesure simple à inscrire dans l’IFAQ. Mme Imbert a évoqué le risque infectieux : la transmission des maladies nosocomiales se réduit considérablement avec l’utilisation de poignées de porte en alliage de cuivre.

Nous avons mené des expérimentations locales dans un certain nombre de crèches et de maisons pour personnes âgées. Ces poignées permettent de limiter la transmission des virus et des bactéries : l’hiver, on a moins de gastro-entérites et moins de grippes. Voilà une disposition simple qui ne nécessite de recourir à aucun critère. Il y a des choses à faire, mais cela suppose des moyens et du sens pratique.

Je ne peux que vous inviter, madame la ministre, à vous rapprocher de ce que nous avons fait dans la Marne.

M. le président. Madame Imbert, l’amendement n° 260 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Corinne Imbert. Je vais faire confiance à Mme la ministre. Toutefois, une clarification sur ces fameux indicateurs dans le CAQES et dans l’IFAQ serait importante pour les établissements et bénéfique pour les patients.

Je retire donc mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 260 rectifié bis est retiré.

Article additionnel après l'article 27 - Amendement n° 260 recitfié bis
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 29

Article 28

La sous-section 3 de la section 5 du chapitre II du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifiée :

1° Après l’article L. 162-22-6-1, il est inséré un article L. 162-22-6-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 162-22-6-2. – Afin d’améliorer le parcours de soins des patients atteints de pathologies chroniques dont la liste est précisée par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, la prise en charge par l’assurance maladie obligatoire des prestations mentionnées aux articles L. 162-22-6, L. 162-26 et L. 162-26-1 peut donner lieu, par dérogation aux mêmes articles L. 162-22-6, L. 162-26 et L. 162-26-1, à une rémunération forfaitaire. » ;

2° Le I de l’article L. 162-22-10 est ainsi modifié :

a) Le 2° est complété par les mots : « ainsi que du forfait mentionné à l’article L. 162-22-6-2 » ;

b) Le 5° est abrogé ;

c) Au dernier alinéa, les références : « aux 2° et 5° » sont remplacées par la référence : « au 2° » ;

3° À l’article L. 162-22-12, après le mot : « montant», sont insérés les mots : « du forfait mentionné à l’article L. 162-22-6-2, » ;

4° Le premier alinéa de l’article L. 162-22-15 est ainsi modifié :

a) Les mots : « annuels, la dotation complémentaire et les dotations de financement des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation mentionnés, respectivement, » sont remplacés par les mots : « et dotations mentionnés » ;

b) Après la première occurrence du mot : « articles », est insérée la référence : « L. 162-22-6-2, ».

M. le président. L’amendement n° 217 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, Capus, Guerriau, Wattebled, A. Marc et Decool, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Bonhomme, Louault, Huré et Magras, Mme Malet, M. Nougein, Mme Lopez, MM. L. Hervé, del Picchia et H. Leroy, Mme Perrot et MM. Gremillet et Malhuret, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 1

Insérer les trois alinéas ainsi rédigés :

…° Après l’article L. 162-1-13, il est inséré un article L. 162-1-13-… ainsi rédigé :

« Art. L. 162-1-13-… – Afin d’améliorer le parcours de soins pour des patients atteints de pathologies chroniques, la prise en charge par l’assurance maladie obligatoire des prestations mentionnées aux articles L. 162-1-7, L. 162-5, L. 162-9, L. 162-12-2, L. 162-12-9, L. 162-14, L. 162-14-1, L. 162-16-1 et L. 162-22-1, peut donner lieu, par dérogation aux mêmes articles, à une rémunération forfaitaire, lorsque les professionnels exercent dans le cadre de structures coordonnées.

« Les modalités en sont définies par l’accord conventionnel interprofessionnel mentionné à l’article L. 162-14-1. » ;

La parole est à M. Daniel Chasseing.

M. Daniel Chasseing. L’article 28 du PLFSS prévoit la mise en place d’une rémunération au forfait pour les pathologies chroniques telles que le diabète et l’insuffisance rénale, dans les hôpitaux.

Cet amendement tend à étendre ce forfait aux professionnels libéraux, qui suivent 90 % du parcours des patients atteints de ces maladies, lesquels ne restent pas exclusivement en milieu hospitalier.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Nous savons que la prise en charge des pathologies chroniques repose en grande partie sur les professionnels de ville.

C’est notamment le cas du diabète, par exemple, qui a été choisi pour la forfaitisation dans les établissements. Nous souhaitons que cette forfaitisation soit rapidement étendue à la médecine de ville pour éviter des actes redondants et améliorer la coordination entre tous les acteurs de la prise en charge.

Nous avions évoqué ce sujet en commission, madame la ministre, lorsque nous vous avions reçue pour préparer ce PLFSS. Vous nous aviez fait part de votre souhait d’étendre le dispositif assez rapidement.

Par ailleurs, les auteurs de cet amendement prévoient la forfaitisation entre les seuls acteurs de la prise en charge en ville, parallèlement au dispositif proposé pour l’hôpital, ce qui va cloisonner encore plus les deux secteurs que nous cherchons justement à décloisonner depuis des années.

En outre, il existe des modes de rémunération qui valorisent l’exercice coordonné, notamment dans les maisons de santé pluriprofessionnelles.

Pour ces raisons, monsieur Chasseing, la commission vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous partageons votre constat, monsieur Chasseing : les pathologies chroniques ont un parcours à la fois hospitalier et de ville, notamment le diabète et l’insuffisance rénale chronique.

Nous avons commencé par tarifer au forfait le parcours au sein de l’établissement, parce que nous étions prêts. Nous avions délimité ce que devait être le parcours de soins dans l’établissement.

Pour étendre le dispositif à la ville, il nous fallait un temps de concertation avec les professionnels. Nous avons prévu d’entreprendre les démarches en 2019 pour inscrire cette extension dans le PLFSS pour 2020.

Votre amendement est en quelque sorte satisfait par avance, la démarche étant engagée. Nous n’étions simplement pas prêts à présenter cette extension en 2019. Il s’agit de la poursuite logique de la tarification au parcours.

À mon tour, je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Chasseing, l’amendement n° 217 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Daniel Chasseing. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 217 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 351 rectifié bis, présenté par Mmes Boulay-Espéronnier et Dumas, M. Danesi, Mme L. Darcos, MM. Bonhomme, Sido et Cambon, Mme Deromedi, MM. Grand, Mandelli, Bascher et Brisson, Mme Gruny, M. Priou, Mme N. Delattre, M. Gremillet et Mme Renaud-Garabedian, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

dont la liste est précisée par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale

par les mots :

mentionnées à l’article L. 324-1

La parole est à M. Max Brisson.

M. Max Brisson. Cet amendement, déposé par Mme Boulay-Espéronnier, vise à élargir le dispositif de rémunération forfaitaire, défini à l’article 28, à l’ensemble des affections de longue durée.

L’intention développée à l’article 28 de garantir une meilleure prise en charge des pathologies chroniques, par-delà l’épisode aigu, en prévention de son apparition, constitue un progrès significatif.

L’incitation des professionnels et des structures à développer les actions de prévention, d’éducation du patient et à assurer la fonction de coordination des soins est aujourd’hui indispensable pour assurer une prise en charge de qualité et un parcours de soins plus efficient.

Les patients atteints de pathologies chroniques reconnues par la sécurité sociale comme affection de longue durée, ou ALD, et requérant le diagnostic et le suivi de multiples spécialistes pourraient grandement bénéficier de cette initiative. Il convient, par conséquent, de leur ouvrir uniformément les mêmes droits.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. La mise en place de financements forfaitaires doit reposer notamment sur des référentiels de prise en charge. La HAS a ainsi défini un tel référentiel pour l’insuffisance rénale chronique ; une expérimentation avait été engagée sur le fondement de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.

La volonté d’étendre le dispositif à l’ensemble des ALD est évidemment louable ; il n’est pas certain, néanmoins, que cette généralisation puisse être effectivement mise en œuvre. L’inscrire dans le présent PLFSS nous semble en tout cas impossible. Il faut avancer avec pragmatisme, pathologie par pathologie. C’est long, certes, mais les premiers référentiels sont toujours les plus difficiles à mettre en place ; après, c’est plus simple.

La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, son avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Mon avis est le même que celui de la commission.

En réalité, nous prévoyons d’élargir progressivement le dispositif à davantage de pathologies. Simplement, ce travail nécessite énormément de concertations avec les professionnels, qui sont en train d’établir les référentiels de parcours pour la plupart des pathologies chroniques.

Monsieur le sénateur, je vous ferai la même réponse qu’à M. Chasseing : aujourd’hui, s’agissant de l’élargissement de cette tarification forfaitaire à l’ensemble des ALD, nous ne sommes pas prêts. Mais l’idée est bien que nous élargissions progressivement le champ des rémunérations forfaitaires, tout en maintenant évidemment une part de rémunération à l’acte ou à l’activité – il ne s’agit pas de supprimer complètement cette dernière, mais simplement de diversifier les modes de financement.

Une telle diversification aura évidemment des effets sur les professionnels et les établissements. Il nous semble donc qu’il faut y aller progressivement, afin d’éviter de déséquilibrer complètement, du jour au lendemain, un mode de tarification sans prendre le temps de modéliser tous les risques financiers qu’une telle évolution ferait courir aux professionnels et aux établissements.

C’est prévu, donc, et les choses se font petit à petit : les conseils nationaux professionnels de chaque discipline travaillent, chacun dans leur champ de compétence – les cardiologues sur l’insuffisance cardiaque, les néphrologues sur l’insuffisance rénale, par exemple –, à définir pour nous le bon parcours, le bon référentiel, pour que, l’année prochaine, nous puissions intégrer de nouvelles pathologies dans le champ de la forfaitisation.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable, parce que nous ne sommes pas prêts.

M. le président. Monsieur Brisson, l’amendement n° 351 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Max Brisson. Monsieur le président, au vu des propos de Mme la rapporteur et des engagements de Mme la ministre, et en accord avec Céline Boulay-Espéronnier, je le retire.

M. le président. L’amendement n° 351 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 403 rectifié, présenté par MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, M. Fichet, Mme Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, J. Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Dès 2019, cette liste de pathologies chroniques comprend le diabète et l’insuffisance rénale. Dans le cas de cette dernière, trois rémunérations forfaitaires sont créées afin de couvrir les trois parcours de soins des patients, à savoir la prévention, la dialyse et la transplantation. »

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. Je reviens sur un sujet déjà évoqué l’an dernier.

L’insuffisance rénale, selon le rapport sur les charges et produits de l’assurance maladie pour 2019, affectait 79 160 patients en 2016. Elle impacte fortement la vie de ces patients, et représente en outre un coût de 3,4 milliards d’euros pour l’assurance maladie.

Le présent projet de loi comprend un certain nombre de mesures destinées à transformer la prise en charge des patients souffrant de maladies chroniques, et notamment, donc, d’insuffisance rénale chronique.

Jusqu’à présent, dans le traitement des patients ayant besoin d’une dialyse, l’adaptation des modalités thérapeutiques au projet de vie du patient n’a pas été suffisamment prise en compte, avec une sous-représentation des dialyses à domicile : celles-ci concernent 6,3 % des patients seulement, soit la moitié du taux moyen constaté dans les pays de l’OCDE.

Ce point a d’ailleurs été relevé par la Cour des comptes qui, dans un rapport de 2015, recommandait, s’agissant de l’insuffisance rénale chronique terminale, de « favoriser des prises en charge plus efficientes » et notait que « les modalités qui favorisent une meilleure qualité de vie ne sont pas assez développées » et que leur développement pourrait dégager des marges de manœuvre financières importantes pour la sécurité sociale.

Dans ce contexte, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, comme le plan « Ma santé 2022 », ouvre de nouvelles perspectives : il prévoit dès 2019 la création de financements au forfait pour la prise en charge à l’hôpital des pathologies chroniques, dont l’insuffisance rénale.

L’article L. 162-22-6-2 inséré dans le code de la sécurité sociale prévoit une rémunération forfaitaire des prestations, dans le cadre d’un parcours de soins, pour la prise en charge des patients atteints d’une pathologie chronique. Dès 2019, la prise en charge de l’insuffisance rénale sera assurée par ce nouveau mode de financement.

Toutefois, ce nouveau dispositif incitera les établissements de santé à privilégier les prises en charge les plus lourdes, qui sont aussi les plus rémunératrices.

Par conséquent, afin d’éviter une telle situation, à la fois pour le confort des patients et du point de vue économique, il nous semble impératif que les trois parcours de soins des patients, à savoir la prévention, la dialyse et la transplantation, soient forfaitisés simultanément.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Il s’agit en effet d’un sujet important. Lier les trois parcours nous semble essentiel si l’on veut éviter ce que l’on constate, à savoir la prépondérance d’une prise en charge hospitalière de traitements lourds et coûteux.

Nous souhaitons entendre l’avis du Gouvernement sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur le sénateur Daudigny, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

Nous avons centré la forfaitisation sur la pré-suppléance, c’est-à-dire sur le stade qui précède la dialyse. Nous considérons en effet qu’il n’y a pas lieu, aujourd’hui, de mettre en place une rémunération à l’acte, s’agissant du traitement des patients atteints d’insuffisance rénale terminale, pour le bilan pré-suppléance et l’équipement en cathéters, fistules, etc.

Ceci étant dit, notre volonté est bien d’étendre progressivement la forfaitisation à la suppléance. Mais, là aussi, une telle extension nécessite un travail préalable avec les professionnels pour établir un référentiel de bonnes pratiques. Si nous proposons d’emblée, de façon verticale, un forfait aux professionnels, sans avoir travaillé en amont sur ce qu’ils estiment nécessaire pour prendre en charge correctement un malade, on nous opposera que nous jetons sur le coût de la santé un regard administratif, alors que tel n’est vraiment pas notre choix aujourd’hui – notre regard est au contraire centré sur la qualité des soins.

Il est donc bien prévu d’élargir progressivement la forfaitisation à la suppléance elle-même ; aujourd’hui – je vous fais la même réponse qu’à vos collègues, monsieur le sénateur –, c’est trop tôt.

Par ailleurs, je pense que nous ne pouvons pas faire figurer dans la loi une disposition qui relève clairement du domaine réglementaire.

Le dispositif doit en effet pouvoir évoluer avec le temps. On peut inscrire dans la loi – c’est ce que nous faisons – le principe de la rémunération forfaitaire pour certaines pathologies ; mais ne commençons pas à figer les modalités d’application de ce principe en précisant dans la loi chaque pathologie et chaque stade du parcours de soins. Nous nous compliquerions considérablement la tâche pour les cas où nous devrons faire évoluer les dispositifs.

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.

M. Michel Amiel. La rémunération forfaitaire définie à l’article 28 me paraît une excellente chose. Merci de préciser que l’approche retenue tiendra compte de la diversité des professionnels de santé, et en particulier du lien entre médecine de ville et hôpital. Il y va de la bonne coordination – je n’irai pas jusqu’à parler de gouvernance – de ce qui doit être fait dans le cadre de ce qui constitue quand même une petite révolution – je sais que de tels dispositifs existent déjà dans d’autres pays, mais, en France, on n’a pas encore l’habitude de ces pratiques qui me paraissent aller dans le bon sens.

Je profite également de la discussion de cet article 28 pour évoquer à nouveau un sujet qui me tient à cœur : la rémunération forfaitaire dans le cadre de soins palliatifs.

Gérard Dériot et moi-même, lorsque nous étions rapporteurs du projet de loi créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie – la loi fut promulguée en 2016 –, nous étions aperçus que le traitement des malades en fin de vie posait de véritables problèmes de coordination, en particulier dans les cas où l’on voulait maintenir le patient à domicile, mais aussi dans ceux où l’on souhaitait l’héberger en EHPAD.

S’agissant d’un sujet aussi global, complexe et sensible que celui de la fin de vie, la notion de rémunération forfaitaire me paraît constituer un bon levier pour essayer d’améliorer les choses.

M. le président. Monsieur Daudigny, l’amendement n° 403 rectifié est-il maintenu ?

M. Yves Daudigny. Monsieur le président, pourrais-je savoir quel est l’avis de Mme la rapporteur après l’intervention de Mme la ministre ?

M. le président. Madame la rapporteur, quel est donc l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. J’ai entendu ce que nous a dit Mme la ministre, à savoir qu’il n’était pas utile d’introduire dans la loi les modalités précises de la forfaitisation.

Même s’il s’agit d’un vrai sujet, je demande donc plutôt, au nom de la commission, le retrait de cet amendement. Mais il faut vraiment que l’engagement que vous avez pris, madame la ministre, d’avancer sur la suppléance, soit concrétisé assez rapidement.

M. le président. Monsieur Daudigny, l’amendement n° 403 rectifié est-il donc maintenu ?

M. Yves Daudigny. Au vu de l’avis de Mme la rapporteur, je vais le retirer.

Madame la ministre, c’est la deuxième fois, depuis le début de l’examen de ce PLFSS, que je retire un amendement sur la foi d’un engagement que vous prenez. Je souhaite vraiment que vous étudiiez ce sujet avec intérêt – je ne doute pas que vous le ferez – et dans les meilleurs délais.

Il existe aujourd’hui plusieurs parcours de soins possibles et les circonstances font que, en France beaucoup plus que dans les autres pays, c’est le parcours de soins le plus coûteux, le plus lourd, et celui qui, en définitive, a le plus de conséquences sur la vie des patients, qui est retenu. Il est donc nécessaire que nous puissions prendre des dispositions pour inverser cette répartition du choix entre dispositifs lourds et dispositifs à domicile.

Madame la ministre, je retire cet amendement en comptant sur votre engagement.

M. le président. L’amendement n° 403 rectifié est retiré.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je regrette que M. Daudigny ait retiré un peu vite son amendement ; j’aurais peut-être fini, une fois données certaines précisions, par souscrire à cette demande de retrait, mais je voulais intervenir sur ce même sujet.

L’insuffisance rénale est un sujet important – vous le savez, madame la ministre : je vous ai contactée par courrier et par question écrite, et René-Paul Savary, un jour où je ne pouvais être présent en séance, vous a posé une question sur ce thème dans le cadre des questions au Gouvernement.

L’insuffisance rénale concerne des milliers de personnes et, surtout, représente des dépenses assez considérables pour l’assurance maladie.

Madame la ministre, vous avez annoncé que la forfaitisation prévue à l’article 28 du PLFSS, dont les modalités seront précisées par voie réglementaire, ce qui me semble normal, concernera dans un premier temps les actions de prévention en direction des patients souffrant de diabète ou d’insuffisance rénale chronique.

S’agissant de cette dernière affection, je regrette, madame la ministre, que le Gouvernement n’aille pas au bout de sa logique en appliquant dès 2019 la forfaitisation à l’ensemble des parcours, y compris, donc, à la transplantation et à la dialyse.

En effet, 85 % des dépenses liées à cette pathologie, ce qui représente quand même près de 4 milliards d’euros pour l’assurance maladie, concernent la dialyse et les transports liés aux traitements les plus lourds – je rejoins, de ce point de vue, Yves Daudigny.

Le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, dans son rapport de 2016, note que « les établissements souhaitent avant tout “remplir” leur centre de dialyse ». Les tarifs sont en effet très favorables au développement des thérapies les plus lourdes et les plus coûteuses. Une baisse uniforme des tarifs de dialyse conduirait à accentuer ce biais.

La Cour des comptes, dans son rapport sur l’insuffisance rénale chronique terminale de septembre 2015, préconise le développement de la greffe et de la dialyse à domicile. Telle est aussi la conclusion de l’évaluation médico-économique des stratégies de prise en charge de l’insuffisance rénale chronique terminale en France réalisée par la Haute Autorité de santé en 2014.

Il est donc essentiel, madame la ministre, que la baisse annoncée des tarifs de dialyse épargne la dialyse à domicile, afin de maintenir cette option thérapeutique qui correspond à l’intérêt des patients et à celui de l’assurance maladie.

Pouvez-vous donc, dans le cadre réglementaire, exclure la dialyse à domicile des baisses de tarifs – je connais la réponse, madame la ministre, mais je vous pose quand même la question ? Ainsi éviterait-on de condamner ce mode de traitement, et même pourrait-on lui redonner de l’attractivité.

Enfin, quand pensez-vous ouvrir la forfaitisation à la dialyse et à la greffe ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur le président Milon, notre objectif est bien de forfaitiser la dialyse en 2020, sur une période mensuelle, en intégrant par exemple – pourquoi pas ? – les transports au forfait.

Les travaux ont déjà débuté en interne, au ministère, et les sociétés savantes seront prochainement contactées en vue d’une concertation. De la même façon, nous allons travailler sur le suivi post-transplantation sur une base forfaitaire.

Nous avançons donc pas à pas pour construire des parcours qui se tiennent.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je ne suis pas contre.

M. le président. Je mets aux voix l’article 28.

(Larticle 28 est adopté.)

Article 28
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 126 rectifié ter

Article 29

L’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le 2° du II est complété par des e à j ainsi rédigés :

« e) Le 3° de l’article L. 6122-2, en tant qu’il impose la satisfaction des conditions techniques de fonctionnement prévues à l’article L. 6124-1 relatives à l’organisation et à la dispensation des soins, pour la durée de l’expérimentation ;

« f) Les articles L. 6154-2 et L. 6154-3, afin de permettre, dans les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés d’accès aux soins, à un praticien de réaliser, sans dépassement d’honoraires, une activité libérale hors de l’établissement où il est nommé ou exerce à titre principal son activité ;

« g) Les articles L. 4041-2 et L. 4042-1, afin de permettre à des sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires d’adapter leur statut pour la durée de l’expérimentation pour rendre possible l’encaissement sur le compte de la société de tout ou partie des rémunérations des activités de prise en charge sanitaire, sociale ou médico-sociale de ses membres et le reversement de ces rémunérations à chacun d’eux ;

« h) Le dernier alinéa de l’article L. 6133-1, afin de permettre la redistribution d’un intéressement collectif aux membres d’un groupement de coopération sanitaire, pour la durée de l’expérimentation ;

« i) Le deuxième alinéa de l’article L. 6312-4, afin de permettre aux agences régionales de santé d’adapter les autorisations de mise en service de véhicules sanitaires affectés aux transports terrestres aux besoins des établissements de santé ;

« j) (nouveau) L’article L. 5125-1-1 A, afin de permettre aux pharmaciens d’officine, en dehors du cadre des coopérations prévues à l’article L. 4011-1, d’être désignés comme correspondants au sein d’une équipe de soins par le patient, à la demande ou avec l’accord du médecin traitant, et ainsi de renouveler des traitements chroniques ou d’ajuster leur posologie. Le médecin traitant et le pharmacien correspondant sont signataires d’un projet de santé au sens des articles L. 1411-11-1, L. 1434-12, L. 6323-1-10 ou L. 6323-3 ; »

1° bis (nouveau) Au 3° du même II, après le mot : « tarification », sont insérés les mots : « et d’organisation » ;

2° Les IV, V et VI deviennent respectivement les V, VI et VII ;

3° Le IV est ainsi rétabli :

« IV. – Pour les expérimentations mentionnées au I dérogeant à une ou plusieurs règles mentionnées au II et comportant une démarche de coopération telle que celles visées à l’article L. 4011-1 du code de la santé publique, les dispositions des articles L. 4011-2 à L. 4011-3 du même code ne sont pas applicables, sous réserve des deux premiers alinéas de l’article L. 4011-3 dudit code.

« Les expérimentations mentionnées au I du présent article dérogeant à une ou plusieurs règles mentionnées au II et comportant la réalisation d’actes de télésurveillance tels que ceux mentionnés au V de l’article 54 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 sont soumises à la procédure et au financement prévus au III du présent article, qui se substituent à la procédure et au financement prévus au V de l’article 54 de la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 précitée. »

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, sur l’article.

M. Bernard Jomier. L’article 29 porte sur la transformation de notre système de santé par l’innovation et fait écho à l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Madame la ministre, mes chers collègues, je souhaitais attirer votre attention sur un problème de santé très présent dans le territoire dont je suis l’élu, Paris, à savoir l’épidémie d’infections sexuellement transmissibles, et notamment la permanence de l’épidémie de VIH. Nous avons organisé, ici, au Sénat, au mois de juin, des rencontres nationales avec les différents acteurs des territoires les plus concernés, l’Île-de-France, les territoires ultramarins, la région PACA, sur les outils à mettre en œuvre pour mettre fin à l’épidémie de VIH, qui stagne depuis un certain nombre d’années.

Un consensus s’est dégagé entre les acteurs pour porter des mesures de simplification, en matière notamment de politique de dépistage. Comme vous le savez, en effet, l’une des principales raisons de la permanence de l’épidémie est l’existence d’un délai très long entre l’infection et le dépistage : ce délai est en moyenne de quatre ans pour les hommes hétérosexuels, de trois ans pour les femmes et de deux ans pour les hommes ayant des rapports avec d’autres hommes. Cela entraîne une permanence de la circulation du virus.

Je ne détaillerai pas ici les outils de simplification qu’exige le traitement de cette pathologie : ils sont connus. Ils figurent d’ailleurs dans la stratégie nationale de santé sexuelle que vous portez, madame la ministre : leur mise en œuvre est prévue. Ces nouveaux outils relèvent par excellence de l’innovation qui était l’objet de l’article 51.

Pourtant, à la fin de 2018, les projets n’émergent toujours pas. En particulier, dans votre stratégie, vous pointez très justement la nécessité de mettre en place, dans les villes et les territoires à forte prévalence, de nouveaux services – on sait ce qui se fait à Londres ou aux États-Unis – afin de simplifier l’accès au dépistage et à une prise en charge globale des infections sexuellement transmissibles.

Je souhaitais attirer votre attention, madame la ministre, sur le fait que les acteurs du secteur sont dynamiques ; ils ont bien noté la volonté que vous avez exprimée dans le cadre de la stratégie nationale de santé sexuelle, et attendent que les mesures soient mises en œuvre le plus rapidement possible. Nous savons comment faire ; il ne manque plus que les outils réglementaires.

Merci, donc, madame la ministre, de votre engagement sur cette question.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, sur l’article.

M. Jean-Louis Tourenne. Je veux évoquer rapidement la situation des ophtalmologistes et les délais d’attente que subissent ceux qui veulent les consulter.

Dans le département d’Ille-et-Vilaine, il faut attendre entre huit mois et un an pour obtenir soit des lunettes pour la première fois, soit un changement de lunettes.

Un certain nombre d’expériences, d’initiatives, de réflexions, ont été conduites pour essayer de remédier à cette situation et de raccourcir ces délais, sans grand succès jusqu’à présent. Je pense notamment au système de coopération entre les professionnels de santé testé par plusieurs agences régionales de santé, qui peine à trouver son chemin – et c’est bien fait.

La solution pourrait consister à alléger les charges des ophtalmologistes, en autorisant notamment les optométristes ou les orthoptistes à prescrire des lunettes, dès lors qu’ils sont parfaitement capables de faire les mesures et d’apporter l’ensemble des corrections nécessaires. Les opticiens seraient bien entendu écartés d’un tel dispositif, afin d’éviter tout conflit d’intérêts. Cette piste, me semble-t-il, mérite réflexion.

J’ajoute que la Cour des comptes, dans son dernier rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, fait ce genre de préconisation, en recommandant de réserver cette faculté à ceux qui pourraient se prévaloir d’une formation de niveau bac+5 au moins – c’est le cas des optométristes.

À ma connaissance, rien ne s’oppose à la mise en œuvre d’une telle procédure qui allégerait largement le travail des ophtalmologistes. Il va de soi qu’il n’est pas question de laisser les optométristes accomplir quelque travail thérapeutique ou de diagnostic que ce soit.

M. le président. L’amendement n° 517, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Fabien Gay.

M. Fabien Gay. Cet amendement tend à supprimer l’article 29, qui amplifie la portée du dispositif d’innovation du système de santé introduit dans le cadre du précédent PLFSS.

Ce dispositif d’innovation avait pour objectif de permettre l’émergence d’organisations innovantes dans les secteurs sanitaire et médico-social et de favoriser une prise en charge pertinente de la part de l’assurance maladie. L’objectif était, entre autres, d’améliorer l’accès aux soins dans les zones médicalement sous-dotées.

Vous vous en doutez : nous soutenons ce dernier objectif. Cependant, nous nous sommes opposés, il y a un an, à ce cadre d’expérimentation, et nous nous opposons à son extension cette année. En effet, le cadre d’expérimentation adopté l’an dernier prévoyait la suppression de l’opposabilité des conventions collectives de travail dans les établissements et services du social et du médico-social, ainsi que la possibilité de déroger aux règles de rémunération et d’organisation des services.

Cet article 29 confirme cette volonté de dérégulation ; il prévoit la possibilité de déroger aux conditions techniques de fonctionnement, c’est-à-dire aux normes applicables aux organisations, aux équipements, aux locaux, aux ratios de personnel. Nous considérons que l’amélioration de la prise en charge des plus fragiles et la lutte contre les déserts médicaux ne doivent pas se faire au détriment des personnels de santé. La lutte contre les déserts médicaux passe, d’une part, par l’augmentation des financements permettant la création de centres de santé et l’embauche de personnels, et, d’autre part, par des dispositifs incitant les médecins à s’installer dans les zones sous-dotées.

Par « incitation », nous ne parlons pas de permettre aux médecins salariés de travailler en libéral, comme cela est proposé dans cet article. Cette mesure injuste permet aux médecins de cumuler deux rémunérations sans pour autant installer de médecine de proximité stable.

Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. La commission s’était montrée, dès l’an dernier, favorable à la mise en place d’un cadre d’expérimentation pour l’innovation en santé. Il s’agit là d’en renforcer la portée afin d’introduire – c’est ce que nous souhaitons – plus de souplesse dans notre système de santé. Plusieurs dispositions de l’article répondent aux enjeux de l’accès aux soins dans les territoires qui, on le sait, tiennent au cœur de chaque sénateur.

L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. J’émets un avis défavorable sur cet amendement, dont l’adoption remettrait en cause une démarche d’expérimentation importante pour notre système de santé qui a soulevé un grand enthousiasme de la part des acteurs de terrain – cet article permet de lever les verrous organisationnels et de faciliter les exercices mixtes.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 517.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 359 rectifié, présenté par M. Tissot, Mme Taillé-Polian, M. Cabanel, Mmes Conway-Mouret et Jasmin, MM. Tourenne et Jacquin, Mme Espagnac, MM. Kerrouche, Iacovelli et Duran, Mme Ghali, M. P. Joly et Mme Préville, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Angèle Préville.

Mme Angèle Préville. À l’alinéa 4, le Gouvernement propose d’étendre les possibilités d’exercice libéral pour les praticiens hospitaliers salariés d’un hôpital public, dans les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante.

L’article ne précise pas comment ces zones sont caractérisées, ce qui laisse un flou législatif qui peut conduire à des excès.

En outre, un problème non négligeable demeure : les données publiées par certaines commissions de l’activité libérale révèlent une hausse significative des honoraires liés à l’activité libérale. Ainsi, pour l’AP-HP, l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, les honoraires ont progressé de 6 % sur une année. Malgré les avancées permises en la matière par la loi de modernisation de notre système de santé, les interrogations pointées en 2012 par l’IGAS, l’Inspection générale des affaires sociales, en matière de transparence et de suivi demeurent.

Pour illustrer mon propos, je vais lire un extrait du dernier rapport de la commission centrale de l’activité libérale, ou CCAL, de l’AP-HP : « Afin d’analyser la part d’activité libérale par rapport à l’activité publique, il est nécessaire que les données d’activité publique soient connues. La CCAL note encore à de trop nombreuses reprises la difficulté rencontrée […] à répertorier l’activité publique. La CCAL souhaite que ces difficultés soient rapidement levées et être informée des dispositions prises pour assurer un suivi de l’activité publique des praticiens exerçant une activité libérale. »

Ce commentaire illustre les difficultés de suivi du respect des obligations prévues par la loi, s’agissant en particulier du non-dépassement d’honoraires, puisque le décompte des heures effectuées dans le cadre du service public et en activité libérale semble difficile à mettre en œuvre.

Cet amendement vise donc à supprimer l’alinéa 4.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Il semble à la commission, au contraire de ce qui vient d’être dit, que les possibilités d’exercice mixte, à l’hôpital et en libéral, vont dans le bon sens, celui du renforcement de la présence médicale dans les zones sous-dotées.

On le sait très bien : il n’y a pas de recette miracle pour résoudre les difficultés d’accès aux soins, quel que soit le territoire – il n’existe pas, ou presque, de zone surdotée ; certaines zones sont seulement moins fragiles que d’autres. Et toutes les méthodes sont bonnes pour trouver des solutions adaptables à chaque territoire.

L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Il est également défavorable, monsieur le président.

Il me semble que les auteurs de cet amendement n’ont pas compris l’objectif que traduisent les dispositions de l’alinéa 4 : il est de rendre plus attractifs certains hôpitaux qui ont beaucoup de mal à recruter des praticiens hospitaliers, en donnant aux professionnels recrutés la possibilité d’exercer une activité en libéral, en dehors de l’hôpital, un jour par semaine par exemple, sans dépassement d’honoraires.

Ce que vous avez dénoncé, madame la sénatrice, n’a donc rien à voir avec ce que nous proposons : vous dénoncez les dépassements d’honoraires dans les activités libérales au sein de l’hôpital.

Ce que nous avons en vue, c’est un dispositif dans lequel un médecin exerçant une activité de praticien hospitalier standard à l’hôpital serait autorisé à exercer en libéral à l’extérieur, sans dépassement d’honoraires, afin que son poste soit rendu plus attractif. Il s’agit donc simplement de lui permettre d’avoir une activité mixte.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 359 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 129 rectifié quater, présenté par MM. Segouin, Bonhomme et Courtial, Mme Garriaud-Maylam, MM. J.M. Boyer, Paccaud, Grosdidier et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, M. Mandelli, Mmes Gruny et de Cidrac, M. Charon, Mmes A.M. Bertrand et Boulay-Espéronnier, MM. Darnaud, Genest et Laménie, Mmes Delmont-Koropoulis et Procaccia, MM. Babary, Sido et Gremillet et Mme Noël, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …) L’article L. 6323-1-5, afin de permettre, dans les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés d’accès aux soins, à un praticien de réaliser une activité libérale au sein d’un centre de santé. Les honoraires sont reversés au praticien par le centre de santé après déduction des frais de fonctionnement du centre liés à la prestation ;

La parole est à M. Vincent Segouin.

M. Vincent Segouin. Le département de l’Orne, avec une densité de 59 médecins généralistes libéraux pour 100 000 habitants, est en train de devenir un véritable désert médical, où près du quart des affiliés à l’assurance maladie n’ont aujourd’hui pas de médecin traitant.

Afin d’apporter à ce problème des solutions pragmatiques, nous avons proposé, avec les élus du conseil départemental, une solution innovante permettant de créer, à partir du centre de santé, une médecine libérale simplifiée.

Cette expérimentation est sur le point d’aboutir : nous disposons des locaux, des professionnels de santé, du centre de santé, des médecins. Nous avons donc demandé l’accord de l’ARS de Normandie ; elle y est favorable et attend le feu vert du ministère.

Toutefois, il semblerait, madame la ministre, que l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, qui autorise des expérimentations, ne soit pas assez précis pour permettre celle-ci.

Cet amendement a donc pour objet de préciser le dispositif. Nous croyons qu’il y a là une piste immédiatement applicable, en attendant les effets du plan « Ma santé 2022 », dont il rejoint la philosophie, avec la mise en place d’assistants médicaux.

L’adoption de cet amendement permettrait d’expérimenter un exercice libéral simplifié à partir d’un centre de santé. Les jeunes médecins y trouveraient d’importants facteurs d’attractivité : il s’agit d’un mode d’exercice médical en équipe, qui ne nécessite pas d’installation ni n’impose de contraintes immobilières, informatiques, administratives ou de gestion des personnels affectés.

Cette expérimentation permettrait aussi de gagner du temps médical avec le patient, de l’ordre de 40 % par médecin, améliorant d’autant l’accès aux soins pour les très nombreux patients n’ayant aujourd’hui pas de médecin traitant.

Mes chers collègues, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, madame la rapporteur, nous avons besoin, dans l’Orne et dans les territoires ruraux, de votre compréhension et de votre soutien. Nous devons tout tenter pour lutter contre la désertification médicale ; on doit donc nous permettre d’expérimenter cette médecine libérale simplifiée qui, nous en sommes convaincus, portera ses fruits.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Une telle mesure va dans le sens de la souplesse et de la promotion des exercices mixtes. Elle peut effectivement répondre à des besoins dans les territoires sous-dotés. La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. L’exercice salarié est consubstantiel à la définition d’un centre de santé. La très large concertation qui a été menée avec ces derniers a acté qu’ils étaient exclusivement en exercice salarié.

Aujourd’hui, rien n’empêche un professionnel libéral d’exercer à mi-temps sous la forme d’exercice salarié dans un centre de santé et à mi-temps en libéral à l’extérieur, voire dans une maison de santé pluriprofessionnelle. Nous ne souhaitons pas modifier cet équilibre. C’est aujourd’hui la seule différence entre un centre de santé et une maison de santé pluriprofessionnelle ; cela a fait l’objet d’une très vaste concertation.

Le Gouvernement sollicite donc le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis serait défavorable.

M. le président. Monsieur Segouin, l’amendement n° 129 rectifié quater est-il maintenu ?

M. Vincent Segouin. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 129 rectifié quater.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 27 rectifié est présenté par Mme Bonfanti-Dossat, M. Brisson, Mmes Puissat et Micouleau, MM. Bascher et Courtial, Mmes Deromedi et Chauvin, MM. Cardoux, Calvet et Panunzi, Mmes Estrosi Sassone et Delmont-Koropoulis, MM. Vaspart, Cornu, Schmitz, Pierre et Paccaud, Mmes Duranton et Morhet-Richaud, MM. Bouchet et Milon, Mme L. Darcos, M. Karoutchi, Mme A.M. Bertrand, MM. Piednoir et Chaize, Mme Lopez, MM. Lefèvre et Revet, Mme Gruny, M. Dufaut, Mme Lanfranchi Dorgal, M. Perrin, Mme Thomas, MM. Mayet, Daubresse et Raison, Mme Bories et MM. Husson, Laménie, Segouin, Sido et Gremillet.

L’amendement n° 146 rectifié est présenté par MM. Morisset et Mouiller.

L’amendement n° 245 rectifié ter est présenté par M. Sol, Mme Vullien, M. Pellevat, Mmes Goy-Chavent et Bruguière, MM. Détraigne, Magras et Babary, Mme Lherbier, M. Guené et Mme F. Gerbaud.

L’amendement n° 579 est présenté par Mmes Taillé-Polian et G. Jourda et M. Tissot.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 8

1° Première phrase

a) Après la référence :

L. 5125-1-1 A

insérer les mots :

et l’article L. 4311-1

b) Après les mots :

pharmaciens d’officine

insérer les mots :

et aux infirmiers

2° Seconde phrase

Remplacer les mots :

et le pharmacien

par les mots :

, le pharmacien et l’infirmier

La parole est à M. Max Brisson, pour présenter l’amendement n° 27 rectifié.

M. Max Brisson. Cet amendement déposé par notre collègue Christine Bonfanti-Dossat vise à ouvrir aux infirmiers l’expérimentation permettant aux pharmaciens d’officine d’intervenir auprès d’un patient pour renouveler leurs traitements chroniques ou en adapter la posologie, en concertation étroite avec le médecin traitant. Cette expérimentation peut être fort utile dans les territoires touchés par la désertification médicale.

L’infirmier, qui intervient le plus souvent à domicile, est tout à fait qualifié pour exercer un tel suivi quotidien, surveiller l’observance du traitement et recueillir des informations cliniques utiles.

Afin de garantir une bonne collaboration avec le médecin prescripteur, ces infirmiers devront être adhérents ou signataires du projet de santé d’une maison de santé pluriprofessionnelle ou d’une équipe de soins primaire.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour présenter l’amendement n° 146 rectifié.

M. Jean-Marie Morisset. Cet amendement est identique à celui qui vient d’être présenté. Au sein des maisons de santé qui sont mises en place dans nos territoires, l’équipe est constituée des médecins et des infirmiers, le pharmacien étant souvent à plusieurs kilomètres. Madame la ministre, nous défendons, tout comme vous, la présence des maisons de santé dans nos communes rurales ; il faut, me semble-t-il, prendre en compte cette nouvelle organisation.

M. le président. La parole est à Mme Michèle Vullien, pour présenter l’amendement n° 245 rectifié ter.

Mme Michèle Vullien. Cet amendement est défendu.

M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour présenter l’amendement n° 579.

Mme Sophie Taillé-Polian. Les infirmiers peuvent assurer la gestion des stocks de médicaments. Ils voient les évolutions, puisqu’ils font au quotidien en sorte que les patients puissent prendre leurs médicaments. Il nous semble donc très positif d’étendre l’expérimentation à ces professionnels.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Le nouveau champ d’expérimentation ouvert sur l’initiative de l’Assemblée nationale reprend une possibilité qui existe déjà pour les pharmaciens d’officine. Un protocole de coopération avait été prévu par la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi HPST, mais, compte tenu de sa lourdeur, aucun protocole n’a été conclu jusqu’à présent. La mesure votée à l’Assemblée nationale vise à y remédier.

Il n’a pas semblé opportun à la commission d’élargir le dispositif aux infirmiers. Cela semble plus éloigné de leurs missions. La pratique avancée leur confère déjà des prérogatives.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces quatre amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Les infirmières de pratique avancée qui se sont inscrites en master à partir de 2019 auront la possibilité, dans leurs missions, d’effectuer des renouvellements d’ordonnance. Cela fait aujourd’hui partie du champ d’investigation des pratiques avancées dans le cadre de coopérations avec les médecins.

En outre, dans le cadre des communautés professionnelles territoriales de santé, les CPTS, comme dans les maisons de santé, nous allons proposer des protocoles de délégation de tâches.

Il ne nous semble pas opportun d’ouvrir une telle possibilité aujourd’hui. La place des infirmières est entière dans la réforme « Ma santé 2022 », notamment pour le suivi des pathologies chroniques. Mais, pour l’instant, nous n’avons pas franchi le cap des prescriptions. Nous préférons attendre de voir ce que donneront les pratiques avancées.

Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces quatre amendements identiques.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je crois que Mme la ministre a bien résumé l’affaire.

Pour l’instant, il y a des protocoles de modélisation dans le suivi des malades. Nous savons qu’un malade atteint de cholestérol doit avoir une prise de sang tous les six mois ; d’autres ont des pathologies différentes. Le renouvellement des médicaments en fonction des pathologies est bien cadré. Adopter les amendements qui nous sont proposés signifierait remettre ces pratiques en cause.

Par ailleurs, si vous ne voyez votre malade que tous les ans, vous risquez de constater trop tardivement des pathologies qui se sont développées insidieusement.

Les pratiques avancées reposent sur la confiance entre le médecin prescripteur et l’infirmier effecteur de l’acte. Attendons de voir ce que donne ce dispositif.

Ce qui est proposé soulève tout de même un problème de responsabilité. Une fois l’ordonnance renouvelée, qui est responsable en cas de problème pour le malade ? L’infirmier qui a accordé le renouvellement ou le médecin qui a fait la prescription ?

Nous le voyons, il faut progresser par paliers. Les pratiques avancées sont une évolution positive qu’il faut prendre avec précaution et évaluer. Certes, cela va dans le bon sens. Mais n’allons pas trop vite non plus.

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.

M. Michel Amiel. Notre collègue René-Paul Savary m’a devancé : il y a effectivement un problème de responsabilité.

S’agissant des médecins et pharmaciens, nous avons déjà une coresponsabilité par rapport à une ordonnance donnée ; c’est habituel, et cela se gère en général assez bien.

La mise en place des pratiques avancées dans différents domaines – nous avons évoqué tout à l’heure la psychiatrie – me semble être une excellente chose. Mais, pour la prescription, avançons doucement et restons très prudents. Il s’agit d’une question non pas de prérogatives, mais de sécurité.

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.

M. Max Brisson. J’espère que ma collègue Christine Bonfanti-Dossat, qui a exercé les fonctions d’infirmière libérale, ne m’en voudra pas, mais au vu des explications de Mme la rapporteur et de Mme la ministre, ainsi que des interventions de mes collègues, je retire l’amendement n° 27 rectifié.

M. le président. L’amendement n° 27 rectifié est retiré.

La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Je m’associe aux propos de nos collègues René-Paul Savary et Michel Amiel. La prescription relève évidemment de la responsabilité du médecin et du pharmacien, qui en contrôle l’exécution et a accès au dossier médical partagé.

Peut-être les amendements qui nous sont proposés iront-ils dans le bon sens dans un deuxième temps. Mais, dans l’immédiat, ce sont bien le médecin et le pharmacien qui sont responsables de la prescription.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Morisset. Je reste assez serein. J’ai entendu que l’élargissement du dispositif aux infirmiers n’était pas opportun « aujourd’hui ». Je suppose donc que cette question fera partie des réflexions à venir.

On met en place des maisons de santé dans des communes rurales, qui ont parfois 8 000 habitants. Je présume que les infirmiers et les médecins s’y voient tous les jours. Il faudra en tenir compte et élargir le dispositif.

M. le président. La parole est à M. Serge Babary, pour explication de vote.

M. Serge Babary. Au nom de notre collègue Jean Sol, je retire l’amendement n° 245 rectifié ter.

M. le président. L’amendement n° 245 rectifié ter est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 146 rectifié et 579.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 249 rectifié, présenté par M. Sol, Mme Vullien, MM. Bascher, Morisset, Daubresse et Pellevat, Mmes Goy-Chavent et Bruguière, MM. Détraigne, Magras et Calvet, Mmes Deromedi, Malet et Gruny, MM. Brisson et Laménie, Mmes Boulay-Espéronnier, Lherbier et Delmont-Koropoulis et MM. Moga et Sido, est ainsi libellé :

Alinéa 8, première phrase

Après les mots :

traitements chroniques

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

pour une durée ne pouvant excéder six mois en incluant la primo-prescription.

La parole est à Mme Michèle Vullien.

Mme Michèle Vullien. Cet amendement a pour objet d’établir un cadre temporel raisonnable pour le renouvellement des traitements chroniques par les pharmaciens. Seul le médecin traitant doit pouvoir ajuster la posologie des traitements des patients atteints de pathologies chroniques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Il reviendra au médecin traitant et au pharmacien correspondant de s’accorder, dans le cadre du projet de santé prévu, sur la durée de renouvellement des traitements par le pharmacien. Il ne semble pas opportun de fixer une limite et un délai. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Une telle disposition nous semble relever du domaine non pas législatif, mais réglementaire. Nous allons travailler à un cahier des charges avec les parties prenantes sur l’expérimentation. Cette précision figurera dans le cahier des charges, sachant que les médecins ont déjà la possibilité de faire des prescriptions de douze mois.

On peut imaginer des renouvellements de douze mois. La limitation à six mois pour des traitements chroniques n’est peut-être pas le choix qui sera retenu lors des discussions.

Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j’y serais défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 249 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les amendements nos 360 rectifié et 595 rectifié sont identiques.

L’amendement n° 360 rectifié est présenté par M. Tissot, Mme Taillé-Polian, M. Cabanel, Mmes Conway-Mouret et Jasmin, MM. Tourenne et Jacquin, Mme Espagnac, M. Iacovelli, Mmes Ghali et Guillemot, M. P. Joly et Mme Préville.

L’amendement n° 595 rectifié est présenté par MM. Corbisez, Arnell, A. Bertrand et Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Guillotin et Laborde et MM. Léonhardt, Requier, Roux et Vall.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …) Les articles L. 1111-6-1, L. 4311-1 et L. 4311-29 en ce qu’ils limitent les possibilités d’organiser des délégations de soins dans le cadre d’une prise en charge par un établissement de santé ou par un établissement ou service social ou médico-social ; »

II. – Alinéa 9

Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :

« 1° bis Le 3° du II est ainsi rédigé :

« 3° Aux dispositions suivantes du code de l’action sociale et des familles :

« a) Les règles de tarification et d’organisation prévues par le code de l’action sociale et des familles applicables aux établissements et services mentionnés à l’article L. 312-1 du même code ;

« b) L’article L. 313-26, afin de redéfinir les modalités de qualification entre actes d’aide et actes de soins lors d’une prise en charge par un établissement ou service social ou médico-social. » ;

La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 360 rectifié.

Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à étendre les dérogations sur deux points : d’une part, les règles d’organisation des établissements et services sociaux et médico-sociaux, afin de favoriser les innovations organisationnelles et de permettre d’expérimenter de nouvelles formes de coopération entre les acteurs sociaux, médico-sociaux et sanitaires au service du parcours de santé et de vie des personnes ; d’autre part, les modalités de qualification entre actes d’aide et actes de soins dans le cadre d’un accompagnement par un établissement ou service social ou médico-social.

Sur ce deuxième point, l’actuel cloisonnement des métiers de l’aide et du soin conduit à une étanchéité des missions, en particulier à domicile, entre aide à domicile, titulaire du diplôme d’État d’accompagnant éducatif et social, et aide-soignant, titulaire du diplôme d’État d’aide-soignant. Ce cloisonnement obère la qualité et la pertinence de l’accompagnement dans son objectif de préservation ou de renforcement de l’autonomie des personnes dépendantes d’un tiers pour la réalisation de gestes de soins rendus nécessaires du fait d’un handicap ou de l’avancée en âge.

Par ailleurs, les acteurs développent aujourd’hui des organisations complexes et coûteuses en coordination pour compenser ce cloisonnement des métiers de l’accompagnement des personnes en perte d’autonomie.

En expérimentant de nouvelles répartitions entre actes d’aide et actes de soins en fonction des besoins des personnes elles-mêmes, lors d’un accompagnement par un établissement ou service social ou médico-social, il sera possible d’identifier les « fongibilités de compétences » sociales et de soins en fonction des situations.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 595 rectifié.

M. Jean-Claude Requier. Cet amendement déposé par Jean-Pierre Corbisez est identique en tout point à celui qui vient d’être excellemment défendu par notre collègue lotoise Angèle Préville.

M. le président. L’amendement n° 405 rectifié, présenté par Mme Féret, MM. Daudigny, Tourenne et Kanner, Mmes Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et Blondin, M. Fichet, Mme Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, J. Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …) Les articles L. 1111-6-1, L. 4311-1 et L. 4311-29 en ce qu’ils limitent les possibilités d’organiser des délégations de soins dans le cadre d’une prise en charge par un établissement de santé ou par un établissement ou service social ou médico-social. »

La parole est à Mme Corinne Féret.

Mme Corinne Féret. Cet amendement est dans le même esprit que les deux précédents.

Il s’agit d’étendre le cadre des expérimentations pour l’innovation. Mais nous prenons en compte le fait que l’article 29 ajoute déjà aux règles de tarification celle d’organisation dans les possibilités de dérogation à l’alinéa 9, afin de pouvoir ainsi développer des expérimentations organisationnelles dans le secteur médico-social.

Notre amendement vise ainsi à étendre les possibilités de dérogation prévues à l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale pour l’expérimentation dans le secteur sanitaire et médico-social et à permettre des délégations de soins en matière d’aide et d’éducation des personnes porteuses de handicap et également de soins infirmiers.

Cela permettra notamment de dépasser les cloisonnements entre aide et soins dans l’accompagnement à l’autonomie des personnes dépendantes du fait d’un handicap ou de l’âge.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Les trois amendements portent sur les délégations d’actes infirmiers au profit du personnel aide-soignant ou accompagnant éducatif et social travaillant au sein d’établissements et de services médico-sociaux.

Il est vrai que la mesure introduit une souplesse de gestion bienvenue dans une structure où, nous le voyons, le manque de personnels et la crise des vocations font d’importants ravages.

Les dispositions visées au II des amendements identiques nos 360 rectifié et 595 rectifié sont déjà satisfaites par le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale. En revanche, les auteurs de l’amendement n° 405 rectifié ont pris en compte ce qui a été voté à l’Assemblée nationale.

Je demande donc le retrait des amendements identiques nos 360 rectifié et 595 rectifié au profit de l’amendement n° 405 rectifié, sur lequel la commission a émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. La première partie, c’est-à-dire l’élargissement du champ des dérogations organisationnelles au champ médico-social, est déjà satisfaite, l’article 29 ayant été amendé à l’Assemblée nationale.

L’autre partie consiste en une autorisation de transfert d’activité entre soignants et non-soignants. Cela touche directement la définition des métiers d’aide-soignant et d’aide à domicile. Pour nous, une telle mesure se prête mal à une expérimentation locale et nécessite une réflexion plus globale que nous aurons sur ces professions dans le cadre de la consultation sur les métiers de la perte d’autonomie. Nous travaillons aux évolutions potentielles des métiers et à d’éventuelles délégations de tâches. Je ne souhaiterais pas accompagner des expérimentations dans ce champ.

Je sollicite donc le retrait de ces trois amendements, faute de quoi l’avis du Gouvernement serait défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.

Mme Angèle Préville. Je retire l’amendement n° 360 rectifié, au profit de l’amendement n° 405 rectifié.

M. le président. L’amendement n° 360 rectifié est retiré.

Qu’en est-il de l’amendement n° 595 rectifié, monsieur Requier ?

M. Jean-Claude Requier. Je le retire également, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 595 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 405 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 477 rectifié, présenté par MM. Jomier, Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais, Jasmin, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. J. Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …) L’article L. 4311-1, afin de permettre aux infirmières et infirmiers, en dehors du cadre des coopérations prévues à l’article L. 4011-1, d’être désignés comme référents au sein d’une équipe de soins par le patient en perte d’autonomie ou en affection de longue durée, et ainsi d’assurer la coordination clinique de proximité en lien étroit avec le médecin traitant et le pharmacien correspondant. L’infirmière ou l’infirmier référent, le médecin traitant et le pharmacien correspondant sont signataires d’un projet de santé au sens des articles L. 1411-11-1, L. 1434-12, L. 6323-1-10 ou L. 6323-3 ; »

La parole est à M. Bernard Jomier.

M. Bernard Jomier. Cet amendement a pour objet d’ouvrir la possibilité d’expérimenter la désignation d’infirmières « référentes » ou « de famille », afin de constituer autour du patient un trio efficient avec le médecin traitant et le pharmacien correspondant, ce dernier ayant été introduit à l’alinéa précédent par nos collègues députés.

L’amélioration de la coordination des parcours de soins est un enjeu majeur de santé publique face au vieillissement de la population et à l’augmentation importante des maladies chroniques. C’est également un enjeu financier, comme l’ont montré les travaux sur le vieillissement du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie. Les recours inappropriés à l’hôpital, le manque de réactivité dans l’adaptation des traitements médicamenteux ou le manque de prévention et d’éducation thérapeutique appellent de nouvelles réponses.

Nous avons du mal à opérer la mue de notre système de soins pour accompagner qualitativement le cheminement des personnes fragiles.

Alors que, en France, nous cherchons à inventer de nouveaux métiers autour du soin, nous voyons que les infirmières demeurent un chaînon insuffisamment reconnu du panorama des professionnels concourant à la santé publique.

Le concept d’infirmière « référente » ou « de famille » est recommandé par l’Organisation mondiale de la santé. Il s’applique d’ailleurs déjà chez nombre de nos voisins. Il permet de redonner au chaînon que sont ces professionnels toute leur importance pour la qualité et l’efficacité dans la prise en charge des personnes.

Je crois que cette mesure marquerait un pas non négligeable dans l’évolution stratégique de notre système de soins vers davantage de coordination, de reconnaissance des complémentarités au sein des équipes de soins, de qualité et d’efficacité dans le suivi des personnes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. À mon sens, aujourd’hui, le problème n’est pas le statut de tel ou tel professionnel.

Aujourd’hui, la prévention des hospitalisations et la prise en charge des parcours complexes coordonnés reviennent – c’est le changement de paradigme que nous souhaitons opérer avec la transformation du système de santé – à charger des communautés de professionnels de s’organiser pour définir le bon parcours de soins et désigner les professionnels qui coopèrent autour du patient. Nous ne sommes donc pas favorables au retour d’un référent unique de parcours. Mieux vaut favoriser une organisation pluriprofessionnelle.

En plus des dispositifs d’appui de coordination des parcours complexes, il existe différentes plateformes. Nous souhaitons d’ailleurs les rassembler, car elles sont nombreuses. Elles reposent souvent sur des infirmières.

Il y a aujourd’hui une expérimentation dans onze départements pour évaluer le bilan de soins infirmiers. Il s’agit d’améliorer l’évaluation par l’infirmier des besoins en soins de patients dépendants. Nous pensons que c’est la voie du dialogue entre l’assurance maladie et les syndicats de représentants des infirmiers qui sera privilégiée pour envisager le devenir de cette expérimentation.

L’une des missions des communautés professionnelles de territoires de santé que nous créons est le maintien à domicile des personnes âgées polypathologiques. Pour nous, dans ces communautés professionnelles territoriales de santé, les infirmiers libéraux auront leur rôle à jouer autour de cette mission spécifique et de l’organisation dédiée.

Nous venons de créer les infirmiers de pratique avancée, qui répondent en partie à une telle préoccupation. Leurs compétences sont élargies et ils auront la responsabilité du suivi régulier des pathologies chroniques.

Il nous apparaît donc préférable d’évaluer le bilan de soins infirmiers, c’est-à-dire l’expérimentation, de soutenir de façon volontariste le déploiement des infirmiers de pratique avancée et de renforcer tous les dispositifs de coordination déjà existants, au lieu de créer un nouveau statut, ce qui ne correspond pas à notre philosophie. Nous pensons que les infirmiers, notamment les infirmiers libéraux, sont indispensables à la transformation. Ils auront toute leur place dans le dispositif de soins coordonnés, mais nous ne l’envisageons pas sous l’angle de l’infirmier référent.

Je suggère donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Madame la ministre, j’entends bien votre réponse. Mais, dans une petite ville de quelques milliers d’habitants, avec plusieurs médecins généralistes, un ou deux pharmaciens et des infirmières, l’infirmière de pratique avancée ne va pas répondre à la problématique de l’organisation et la coordination des soins au quotidien autour du patient.

La réponse dépend de l’ensemble des pathologies du patient, de son parcours de soins et de sa perte d’autonomie. Elle est conçue avec le médecin traitant et le pharmacien correspondant.

Vous avez accepté à l’Assemblée nationale cette expérimentation sur le pharmacien correspondant. Il s’agit non pas de créer un nouveau statut, mais de prendre acte du fait que le pharmacien est de plus en plus – c’est heureux – un acteur de santé essentiel dans la coordination du parcours autour du patient.

Il est légitime de reconnaître, en expérimentation, dans le cadre de ce trio de professionnels autour du patient, le rôle de l’infirmière « référente », « de famille » ou « correspondante » ; je n’ai aucun fétichisme des mots. Il ne s’agit certainement pas d’enfermer la définition de l’infirmière dans une référence unique. Mais nous voulons envoyer le message que c’est bien dans l’articulation de ces trois professions de santé de proximité que se joue la qualité de la prise en charge et du parcours de soins des patients.

Pour toutes ces raisons, je maintiens mon amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 477 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 580 rectifié, présenté par Mmes Taillé-Polian et G. Jourda et M. Tissot, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 8

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« …) Les articles L. 6327-1 et L. 6327-2, afin d’ouvrir à certains professionnels de santé impliqués dans le parcours de santé la possibilité d’assurer la coordination clinique de ce dernier. » ;

La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

Mme Sophie Taillé-Polian. MM. Tourenne et Jomier ont fort bien défendu le concept d’infirmière « de famille » ou « référente ». Je me réjouis que l’amendement n° 477 rectifié ait pu être adopté.

Cet amendement, qui, par un certain miracle, a échappé à l’article 40 de la Constitution, a pour objet la mise en place de cette infirmière « de famille » ou « référente ».

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que celles que j’ai développées au sujet de l’amendement précédent.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 580 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 29, modifié.

(Larticle 29 est adopté.)

Article 29
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 127 rectifié bis

Articles additionnels après l’article 29

M. le président. L’amendement n° 126 rectifié ter, présenté par Mme Lassarade, M. Milon, Mmes Micouleau et Deromedi, M. Sol, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Mouiller et Mayet, Mmes L. Darcos et Bruguière, MM. Lefèvre, Paccaud et Morisset, Mme Malet, MM. Bonhomme et Bascher, Mme Garriaud-Maylam, MM. Rapin et Husson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Chaize et Brisson, Mmes Bories, Renaud-Garabedian et Lherbier, MM. Genest, Laménie et Darnaud, Mme Berthet et MM. Segouin et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 29

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 162-14-1-2 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-14-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 162-14-1-… – Une commission de la télémédecine est créée auprès de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie. Cette commission, présidée par le directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie, est composée de représentants des médecins libéraux et hospitaliers, de représentants des fédérations hospitalières représentatives publiques et privées, ainsi que de représentants de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie et de l’Union nationale des organismes des caisses d’assurance maladie complémentaire. Ses membres ne sont pas rémunérés et aucun frais lié au fonctionnement de cette commission ne peut être pris en charge par une personne publique.

« Un représentant de l’État assiste à ses travaux.

« Cette commission rend un avis motivé sur les propositions présentées par l’Union nationale des caisses d’assurance maladie prévues à l’article L. 162-14-1.

« La composition et les règles de fonctionnement de la commission sont fixées par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. »

La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis.

Mme Annie Delmont-Koropoulis. Cet amendement, que je présente au nom de Mme Lassarade, vise à créer une commission de télémédecine.

L’intégration dans le droit commun tarifaire des actes de télémédecine et de téléconsultation est une excellente option. Pour autant, il est indispensable que cette thématique nouvelle, créatrice de liens renouvelés entre la ville et l’hôpital, au service des parcours de soins et de vie des patients à domicile, associe d’emblée les professionnels libéraux et hospitaliers et les fédérations hospitalières représentatives, publiques et privées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. À la suite de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, un avenant a été négocié cette année entre l’UNCAM et les représentants des médecins pour inscrire les actes de télémédecine dans le droit commun. Il ne semble pas dès lors opportun d’instituer, alors que ces négociations sont passées, une telle commission ; nous avions jugé l’an passé que ce fonctionnement, calqué sur celui des équipements matériels lourds, était sans doute trop contraignant.

S’il importe de ne pas laisser de côté l’hôpital dans la mise en œuvre de la télémédecine, l’instauration d’une telle commission ne paraît pas, toutefois, le moyen le plus approprié. La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous avons fait entrer la télémédecine dans le droit commun. Une commission serait superfétatoire par rapport à notre décision d’avancer résolument. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Delmont-Koropoulis, pour explication de vote.

Mme Annie Delmont-Koropoulis. Au nom de Mme Lassarade, je retire l’amendement.

Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 126 rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 394 rectifié

M. le président. L’amendement n° 126 rectifié ter est retiré.

L’amendement n° 127 rectifié bis, présenté par Mme Lassarade, M. Milon, Mmes Micouleau et Deromedi, MM. Karoutchi et Mouiller, Mme Delmont-Koropoulis, M. Mayet, Mmes Bruguière, L. Darcos et Guillotin, MM. Lefèvre, Morisset, Paccaud, Bascher et Bonhomme, Mmes A.M. Bertrand et Malet, M. Rapin, Mmes Garriaud-Maylam et Bonfanti-Dossat, MM. Chaize et Brisson, Mme Lherbier, MM. Genest, Laménie et Darnaud, Mme Berthet et M. Segouin, est ainsi libellé :

Après l’article 29

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article L. 162-23-13 du code de la sécurité sociale est complétée par les mots : « , d’une part, et de représentants des fédérations hospitalières représentatives publiques et privées, d’autre part. »

La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis.

Mme Annie Delmont-Koropoulis. Cet amendement vise à assurer une composition paritaire des commissions de contrôle de la tarification à l’activité, entre représentants des financeurs et des fédérations hospitalières publiques et privées, à l’instar du dispositif existant pour les professionnels de santé libéraux, afin de favoriser la compréhension et la diffusion optimale de l’information entre les parties prenantes, tout en garantissant tant la justesse que la légitimité des avis produits.

Le dispositif de contrôle de la tarification à l’activité est marqué d’imperfections significatives et de déséquilibres sérieux. Cette situation nourrit de très nombreux contentieux et alimente en permanence des discussions intenses entre les fédérations hospitalières publiques et privées, d’une part, et les pouvoirs publics, d’autre part.

Le présent amendement a pour objet d’apporter une contribution apaisante au débat, en prévoyant que la commission de contrôle compétente pour avis soit constituée à parité de représentants des financeurs et de représentants des fédérations hospitalières publiques et privées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. La commission de contrôle de la T2A, composée de représentants de l’ARS et de l’assurance maladie, est saisie pour avis par l’ARS avant de prononcer toute sanction en cas de manquement aux règles de facturation ou d’erreur de codage. Il pourrait être en effet utile d’y associer les fédérations hospitalières sachant qu’il ne s’agit que d’un cadre consultatif, car cela faciliterait l’appropriation des règles par les acteurs hospitaliers. L’avis est donc favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable, car les fédérations hospitalières deviendraient juges et parties au moment des contrôles.

Nous préférons nous en tenir au dispositif actuel, d’autant que les procédures – assez longues au demeurant – permettent énormément de recours. Les fédérations hospitalières sont associées au processus de contrôle dans d’autres cadres, parce qu’elles sont membres de l’Observatoire économique de l’hospitalisation publique et privée, qui examine l’application du contrôle de la T2A et les problématiques qu’il soulève sur un plan générique et non au moment de chaque contrôle. Elles sont également associées à la révision du guide de contrôle externe de la T2A et elles sont surtout invitées à participer à une réunion de présentation du plan de contrôle en amont du lancement des campagnes de contrôle.

En tout état de cause, cet amendement nous semble aller trop loin et fait courir le risque, je le répète, qu’une fédération hospitalière devienne à la fois juge et partie du contrôle.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 127 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 127 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 29 - Amendements n° 51 rectifié bis, n° 110 rectifié ter et n° 584 rectifié

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 29.

Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 394 rectifié, présenté par MM. Tourenne, Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et Blondin, M. Fichet, Mme Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, Joël Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 29

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 162-21-2 du code de la sécurité sociale est abrogé.

La parole est à Mme Sabine Van Heghe.

Mme Sabine Van Heghe. Cet amendement vise à laisser les transports inter-établissements à la charge de l’enveloppe des soins de ville. Laisser les frais et la gestion des transports entre les établissements à la charge des hôpitaux et des autres établissements de santé engendre de grandes difficultés. En outre, un tel dispositif a un impact financier négatif et s’accompagne d’une importante perte de temps. Par conséquent, il doit être supprimé.

Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 394 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 412 rectifié

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 51 rectifié bis est présenté par MM. Paccaud et Babary, Mme A.M. Bertrand, M. Bouchet, Mme Bruguière, M. Cuypers, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Deromedi, Duranton et Garriaud-Maylam, MM. Lefèvre et H. Leroy, Mme Malet et MM. Piednoir, Poniatowski, Revet et Schmitz.

L’amendement n° 110 rectifié ter est présenté par Mmes Micouleau, Deseyne et Bories, MM. Chatillon, B. Fournier, Grand et Gremillet, Mme Gruny, MM. Houpert, D. Laurent et Mandelli, Mme Morhet-Richaud et MM. Morisset, Segouin et Sol.

L’amendement n° 584 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Arnell, A. Bertrand, Castelli, Collin et Corbisez, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier, Roux et Vall.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 29

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après la première phrase de l’article L. 162-21-2 du code de la sécurité sociale, est insérée une phrase ainsi rédigée : « La publication ou la notification annuelles de ces tarifs et dotations aux établissements de santé fait apparaître la part représentée dans leur montant par le financement des transports susmentionnés. »

II. – L’article 80 de la loi n° 2016-1827 du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Avant le 1er février 2019, le Gouvernement procède à l’évaluation de l’impact financier pour les établissements de santé issu de l’application de l’article L. 162-21-2 du code de la sécurité sociale afin de permettre, le cas échéant, l’ajustement des tarifs, des prix de journées et des dotations ; la prise en compte des activités isolées ; la prise en compte des activités de recours. Cette évaluation est transmise au Parlement. »

La parole est à Mme Laure Darcos, pour présenter l’amendement n° 51 rectifié bis.

Mme Laure Darcos. L’article 80 de la loi du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017 a introduit l’article L. 162-21-2 du code de la sécurité sociale aux termes duquel tous les transports inter-établissements devraient être pris en charge par les établissements de santé, en lieu et place d’une facturation directe à l’assurance maladie.

Force est de constater que cette réforme radicale n’a pas suffisamment été anticipée. Ce désengagement de la solidarité nationale crée des inégalités importantes en fonction des territoires et des établissements concernés. Le coût ne sera pas le même en ville qu’à la campagne.

Certains établissements font directement payer les transports aux familles. Or ces dernières ne disposent pas toujours des moyens suffisants.

Cet amendement vise à prévoir que ce montant figure expressément dans les arrêtés relatifs aux dotations et tarifs de tous les établissements de santé et qu’une évaluation du dispositif permette de revoir les tarifs calculés en 2018. Il vise également à prendre en compte des facteurs d’augmentation des coûts des transports : activités isolées, activités de recours.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Micouleau, pour présenter l’amendement n° 110 rectifié ter.

Mme Brigitte Micouleau. L’article 80 de la loi du 23 décembre 2016 de financement de la sécurité sociale pour 2017 a introduit un nouvel article qui a posé le principe selon lequel tous les transports inter-établissements devraient être pris en charge par les établissements de santé.

Cette réforme radicale du financement des transports inter-établissements, entrée en vigueur le 1er octobre 2018, n’a pas été suffisamment anticipée en amont et crée des inégalités importantes entre les établissements concernés.

Cet amendement tend à prévoir, d’une part, que ce montant figure expressément dans les arrêtés relatifs aux dotations et tarifs de tous les établissements de santé et, d’autre part, qu’une évaluation du dispositif permette de revoir les tarifs calculés en 2018. Il vise également à prendre en compte les facteurs d’augmentation des coûts des transports.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 584 rectifié.

Mme Véronique Guillotin. Cet article confère effectivement aux établissements prescripteurs, les hôpitaux et les cliniques, la charge financière et organisationnelle des transports inter-établissements pour motif thérapeutique. L’enjeu mis en avant est de mieux structurer la commande et de favoriser une meilleure adéquation entre le type de transport et l’état de santé. Nous ne pouvons qu’y adhérer.

Pour la sécurité sociale, indéniablement, c’est une source d’économie qui sera toutefois transférée sur les établissements. Le secteur est dynamique. Les économies attendues ne sont pas moindres, puisqu’elles ont été évaluées à 135 millions d’euros pour 2019. Cependant, dans la vie réelle, ce transfert soulève de vives inquiétudes. Elles sont unanimes dans le milieu hospitalier, puisque toutes les fédérations en ont fait état et appellent à une clarification quant au montant de l’enveloppe. Elles craignent en effet que le compte n’y soit pas.

La situation particulière des hôpitaux de proximité, éloignés des centres techniques, doit être prise en compte. Il convient également de mettre l’accent sur la crainte des entreprises de transport, notamment les plus petites d’entre elles, qui seront soumises à des appels d’offres sur un segment de leur activité. Elles devront ainsi face aux grosses boîtes, ce qui pourrait déstabiliser leur économie. Sans compter les demandes qui leur sont faites de répondre aux appels vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Selon moi, il importe de faire attention à ces petites entreprises, qui répondent à un ancrage territorial nécessaire dans l’optique d’un meilleur accès aux soins. Faisons attention à ne pas les fragiliser.

Nous craignons également, dans le cas où l’enveloppe ne suivait pas, d’assister à des reports de soins.

Vous l’aurez compris, nous ne sommes vraiment pas opposés à ce dispositif : des économies sont encore possibles, et il existe des marges sur ce segment, qui demeure très dynamique. La rationalisation et l’organisation pourraient, selon nous, être plus optimales. Toutefois, nous proposons que le montant desdits transports figure dans les arrêtés relatifs aux dotations et tarifs des établissements de santé et que ce dispositif soit suivi de très près sur le territoire, accompagné et évalué.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. L’an passé, nous avions eu ce débat sur le transfert de la prise en charge des transports sanitaires. Nous aurions souhaité le report de cette réforme, considérant qu’elle n’était pas encore au point. Toutefois, ce transfert a eu lieu au 1er octobre 2018. Dans ce contexte l’amendement n° 394 rectifié de suppression viendrait mettre de la confusion dans une situation déjà délicate. La commission a donc émis un avis défavorable.

En revanche, la commission est favorable aux amendements identiques nos 51 rectifié bis, 110 rectifié ter et 584 rectifié, qui visent à traduire des préoccupations réelles des acteurs hospitaliers. Une plus grande transparence dans la mise en place de cette réforme ainsi qu’une évaluation précise de son impact financier seraient en effet souhaitables.

Nous attendons parallèlement de votre part, madame la ministre, des précisions sur les modalités de ce transfert et sur son suivi, notamment en ce qui concerne l’accompagnement proposé aux établissements de santé.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je rappelle qu’il n’y a aucun désengagement en termes de solidarité nationale sur la question du transport sanitaire. Il y a juste eu transfert d’une enveloppe budgétaire de la CNAM vers les établissements pour que ces derniers gèrent eux-mêmes cette problématique. Cette enveloppe s’élève aujourd’hui à 287 millions d’euros. Pour tenir compte du tendanciel du coût des transports dans notre pays, elle a été majorée de 10 % par rapport à l’année précédente. Je le répète donc : il n’y a aucun désengagement de la part de l’État. Nous avons simplement voulu rationaliser les transports inter-établissements et non ceux qui vont du domicile à l’établissement.

La mise en œuvre de cette réforme fait l’objet d’un suivi, d’une part, avec les fédérations hospitalières et, d’autre part, avec les fédérations de transporteurs. Nous avons prévu un comité de suivi paritaire, si je puis dire, entre ces deux fédérations – hospitalières et de transporteurs –, qui se tiendra le 22 novembre prochain, sur la mise en œuvre du dispositif depuis le 1er octobre. Face à une réforme de ce type, il est normal de prévoir des ajustements. Tout l’objet de ce comité de suivi sera de mieux cadrer la façon dont les établissements se sont emparés de cette nouvelle mission. Quoi qu’il en soit, ces derniers ont été largement informés dès le mois d’avril de sa mise en œuvre en octobre.

Nous avons prévu, sur la partie SSR et sur la partie psychiatrie, de faire évoluer le modèle de façon à tenir compte de ces domaines spécifiques. Notre ambition est de nous rapprocher du modèle de financement MCO, avec une possibilité de versement de l’assurance maladie à chaque transport.

Nous faisons confiance au comité de suivi et nous ne souhaitons pas revenir sur cette réforme, qui date du 1er octobre. Nous travaillons avec l’ensemble des parties prenantes pour améliorer sa mise en œuvre sur le terrain et tenir compte des spécificités. Nous avons notamment reçu les petites sociétés de transport.

Je suis donc défavorable à l’ensemble de ces amendements. C’est une réforme qui se met en œuvre, elle est très importante pour les établissements de santé et la rationalisation des transports entre établissements. Nous sommes sensibles aux remontées du terrain, très proactifs dans l’accompagnement des établissements et des transporteurs, et nous travaillons avec eux.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Madame la ministre, vous ne voulez pas revenir sur le dispositif, mais nous avons voté à l’article 29 une expérimentation permettant aux ARS d’autoriser, par dérogation, les établissements à acheter directement des véhicules afin qu’ils puissent tester les modalités alternatives de transport inter-établissements dont ils ont désormais la charge. Que pensent les transporteurs de cette demande de dérogation supplémentaire ? Soit on considère qu’il n’y a pas de problème et que l’on évaluera le dispositif plus tard, et on ne touche à rien ; soit on repense le dispositif comme le proposent les auteurs de ces amendements et comme il a été prévu de le faire avec cette expérimentation, qui va à l’encontre du statu quo. Qu’en est-il, madame la ministre ?

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.

Mme Véronique Guillotin. Je précise que nous n’avons pas demandé le report de cette réforme. Le modèle des transports inter-établissements payés par les établissements eux-mêmes a déjà existé il y a quelques années, mais il s’est éteint en raison des nombreuses difficultés rencontrées. Il revenait notamment très cher aux établissements de gérer en propre les transports, qui ont alors été pris en charge par la sécurité sociale.

Aujourd’hui, il s’agit de mettre en place un système intermédiaire, c’est-à-dire géré sur le plan organisationnel et financier par les établissements, mais reposant sur des appels d’offres auprès du secteur privé. Cela suscite quelques inquiétudes.

La gestion de ces transports par les établissements pourrait effectivement aboutir à une meilleure coordination. Néanmoins, cette rationalisation des dépenses relatives aux déplacements inter-établissements s’accompagnera pour les établissements hospitaliers d’une masse de travail supplémentaire.

Notre objectif n’est ni de revenir sur la réforme ni de la modifier de fond en comble. Notre ambition est double : il s’agit à la fois d’assurer aux établissements, par le biais d’une notification, que les tarifs resteront corrects et de garantir aux petites entreprises que le prix des transports ne sera pas inférieur au coût réel, car il y a là un vrai risque. Notre amendement vise à donner cette assurance et à permettre la transformation sereine de ce type de transport.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 394 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 51 rectifié bis, 110 rectifié ter et 584 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Article additionnel après l'article 29 - Amendements n° 51 rectifié bis, n° 110 rectifié ter et n° 584 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 29 - Amendements n° 397 rectifié bis et n°571 rectifié bis

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 29.

L’amendement n° 412 rectifié, présenté par Mmes Lubin et Grelet-Certenais, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe, Tocqueville et Blondin, M. Fichet, Mme Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, Joël Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 29

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Un comité technique composé de représentants de l’assurance maladie, de l’assurance vieillesse, des ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé, des agences régionales de santé, des conseils départementaux et de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie émet un avis sur ces expérimentations, leur mode de financement ainsi que leurs modalités d’évaluation et détermine leur champ d’application territorial. » ;

2° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour chaque projet d’expérimentation permettant, conformément au 1° du I du présent article, participent aux délibérations du comité technique le représentant de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie et le représentant des conseils départementaux au conseil stratégique dont la composition est fixée par les dispositions de l’article R. 162-50-3 du présent code. » ;

3° Avant le dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour chaque projet d’expérimentation permettant, conformément au 1° du I du présent article, l’émergence d’organisations innovantes dans le secteur médico-social, le comité technique saisit pour avis la conférence des financeurs mentionnée à l’article L. 233-1 du code de l’action sociale et des familles compétente en fonction de la territorialité du projet. Un décret en Conseil d’État précise la liste des dispositions auxquelles il ne peut être dérogé qu’après avis de la conférence des financeurs et le délai dans lequel son avis est rendu. »

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Le comité technique de l’innovation en santé est composé de huit membres représentant la Caisse nationale de l’assurance maladie, le secrétariat général des ministères sociaux, les directions du ministère chargé de la santé et des agences régionales de santé. Il émet un avis sur les projets d’expérimentation qui lui sont soumis, sur leur mode de financement, ainsi que sur leurs modalités d’évaluation.

Ce comité doit également saisir pour avis la Haute Autorité de santé lorsque les projets d’expérimentation comportent des dérogations à des dispositions du code de la santé publique relatives à l’organisation ou à la dispensation des soins. Il est en outre destinataire des rapports d’étape rédigés par les porteurs de projet et des rapports d’évaluation sur la base desquels il rend un avis sur l’opportunité et les modalités d’une généralisation.

Le présent amendement vise à assurer une représentation plus juste et plus équilibrée au sein du comité technique de l’innovation en santé afin que les différents cofinanceurs de l’action médico-sociale puissent y figurer et participer à ses travaux. C’est la raison pour laquelle il est proposé d’associer aux travaux du comité technique de l’innovation en santé des acteurs de l’assurance vieillesse, des représentants des conseils départementaux et de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, ainsi que la conférence des financeurs mentionnée à l’article L. 233-1 du code de l’action sociale et des familles, compétente en fonction de la territorialité du projet. De la sorte, dans un esprit respectueux du principe de décentralisation et des spécificités de chaque secteur d’intervention concerné, il sera possible de promouvoir des expérimentations répondant effectivement à des besoins identifiés, selon des modalités qui en garantissent les meilleures chances de succès pour un coût adapté.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Nous avions eu ce débat l’an passé, et nous avons considéré que le comité technique de pilotage des expérimentations devait rester restreint, tandis que le conseil stratégique avait un champ plus large : installé en début d’année, ce conseil stratégique compte un représentant de la CNSA, un autre de l’ADF et des acteurs du champ médico-social.

Au niveau régional, la Conférence régionale de la santé et de l’autonomie placée auprès des ARS doit être consultée, comme nos débats l’avaient mis en évidence.

Cela permet d’associer les acteurs de la sphère médico-sociale à la conduite des expérimentations. L’amendement semblant satisfait, la commission en demande le retrait.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. J’en reviens un instant à la question de M. Savary : seules les entreprises qui utilisent des véhicules autorisés peuvent répondre aux appels d’offres. Nous ne souhaitons pas sortir de ce cadre.

Nous avons examiné l’année dernière, lors de la création du comité dédié à l’innovation en santé, un amendement similaire à l’amendement n° 412 rectifié. Je rappelle que ce comité technique est une instance d’instruction administrative des dossiers. Par conséquent, seules les administrations centrales sont représentées, par exemple la DGCS.

En revanche, les conseils départementaux et la CNSA sont bien représentés au comité stratégique, où peuvent siéger des instances politiques, des fédérations hospitalières… Il y a beaucoup plus de parties prenantes. Le comité technique reste technique au sein des administrations centrales, et nous ne souhaitons pas élargir le champ de ses représentants. Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 412 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 412 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 572 rectifié bis

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 397 rectifié bis est présenté par MM. Tourenne, Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier, Rossignol, Van Heghe et Blondin, M. Fichet, Mmes Préville et Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, Joël Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 571 rectifié bis est présenté par Mmes Imbert, Micouleau et Gruny, MM. Morisset, Brisson et Lefèvre, Mme M. Mercier, MM. Charon, Bonhomme, Guené et Chatillon, Mme Lavarde, M. de Nicolaÿ, Mmes Morhet-Richaud et Lamure, M. D. Laurent, Mme Berthet, M. H. Leroy, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Poniatowski et Babary, Mme Lopez et MM. Gremillet et Dériot.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 29

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le dernier alinéa du III de l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Eu égard à leur fonction d’appui et de soutien auprès de leurs adhérents, les fédérations hospitalières les plus représentatives peuvent être porteuses de projets d’expérimentation entrant dans le champ défini au I du présent article dans des conditions précisées par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé. »

La parole est à Mme Sabine Van Heghe, pour présenter l’amendement n° 397 rectifié bis.

Mme Sabine Van Heghe. Cet amendement vise à offrir la possibilité aux fédérations hospitalières de devenir porteuses de projets d’expérimentation dont les modalités sont renvoyées à un arrêté ministériel, de sorte que le Gouvernement puisse établir un mécanisme conforme aux aspirations de la réforme. Ainsi, l’innovation dans le système de santé sera davantage motivée.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour présenter l’amendement n° 571 rectifié bis.

Mme Corinne Imbert. L’objet de cet amendement est de permettre que les fédérations hospitalières les plus représentatives qui ont été confrontées à une impossibilité de candidater comme porteur de projets au sens des dispositions de l’article R. 162-50-5 et suivants du code de la sécurité sociale puissent répondre et candidater à un projet d’expérimentation. Cela favoriserait le succès du dispositif comme son appréhension par les acteurs du système de santé.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Les fédérations sont demandeuses d’être porteuses de projets d’expérimentation pour l’innovation en santé, ne serait-ce que pour apporter un appui aux équipes médicales ou d’établissements du fait de la lourdeur administrative que cela représente. Rien ne l’empêche, a priori, dans la rédaction de l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, mais il est clair qu’elles ne peuvent dans les faits recevoir de crédits à ce titre.

Dans ces conditions, je sollicite l’avis du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. L’article 51 tel que nous l’avons rédigé s’adresse directement aux acteurs de l’offre de soins. Nous voulions que tout cela parte du terrain et des professionnels eux-mêmes. Le financement des expérimentations leur est réservé dès lors qu’ils y participent.

En réalité, un projet d’expérimentation peut tout à fait être porté par une fédération, si tant est qu’un acteur proposant le projet fasse partie d’une fédération. Ce qui compte pour nous, c’est qu’il y ait un professionnel, un acteur de terrain identifié. Les fédérations sont évidemment impliquées ; elles apportent déjà leur appui au quotidien aux côtés des acteurs de terrain.

Ces deux amendements identiques semblent donc satisfaits. En outre, dans la mesure où nous ne voudrions pas qu’il s’agisse uniquement de projets portés par des administrations des fédérations hospitalières, la rédaction proposée nous gêne un peu, car elle tend à écarter les professionnels. À tout le moins, elle ne tient pas suffisamment compte du fait qu’un projet est porté par un professionnel de terrain.

Les fédérations sont largement représentées dans tous les projets, elles les cogèrent avec les professionnels, mais nous ne souhaitons pas un portage trop administratif et désincarné par rapport à ce qui avait été envisagé dans le cadre de l’article 51. Je demande donc le retrait de ces deux amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est maintenant l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Je partage l’idée que les projets d’expérimentation doivent être conduits par des acteurs de terrain.

Nous avons reçu les fédérations. Elles nous ont dit qu’elles participaient à ces actions, mais que, à un moment, elles s’en trouvaient exclues. Quoi qu’il en soit, il est important que des projets d’expérimentations et d’innovations locales soient portés par des acteurs directs. Je me range donc à l’avis du Gouvernement.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 397 rectifié bis et 571 rectifié bis.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 29 - Amendements n° 397 rectifié bis et n°571 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 29 - Amendements n° 124 rectifié ter et n° 178 rectifié ter

M. le président. L’amendement n° 572 rectifié bis, présenté par Mmes Imbert, Micouleau et Gruny, MM. Morisset, Brisson et Lefèvre, Mme M. Mercier, MM. Charon, Bonhomme, Guené et Chatillon, Mme Lavarde, M. de Nicolaÿ, Mmes Morhet-Richaud et Lamure, M. D. Laurent, Mme Berthet, M. H. Leroy, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Poniatowski et Babary, Mme Lopez et MM. Gremillet et Dériot, est ainsi libellé :

Après l’article 29

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La première phrase de l’article L. 162-33 du code de la sécurité sociale est complétée par les mots : « , les fédérations nationales représentatives des établissements et services sanitaires et médico-sociaux, publics et privés ».

La parole est à Mme Corinne Imbert.

Mme Corinne Imbert. La présente proposition de modification législative vise à soumettre pour avis préalable aux fédérations hospitalières publiques et privées les mesures conventionnelles qui ont des répercussions significatives sur le pilotage et la gestion des établissements de santé, dans le cadre des concertations précédant le mécanisme d’approbation tacite ou d’opposition expresse du ministre chargé de la sécurité sociale.

La loi du 13 août 2004 confie aux représentants des médecins libéraux et à l’UNCAM le soin de hiérarchiser et de fixer les tarifs des actes médicaux. Les fédérations hospitalières ne sont pas consultées ni même parfois informées des discussions engagées dans ce cadre alors qu’elles sont directement concernées par les résultats de ces négociations. En effet, elles ont un impact dans la construction du PMSI et sa valorisation dans le cadre de la tarification à l’activité, qui repose sur la classification commune des actes médicaux.

En outre, la valorisation des actes médicaux a des conséquences directes sur les choix d’exercice des médecins entre une pratique dans le secteur libéral et une pratique à l’hôpital public. Cela est d’autant plus vrai que la loi permet aux médecins libéraux d’être employés dans les établissements publics de santé.

Dans ce contexte, il importe que les fédérations hospitalières puissent être concertées en amont de l’élaboration des conventions annexes et des avenants conclus entre l’UNCAM et les professionnels de santé.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Les établissements de santé peuvent en effet être impactés par les mesures définies dans un cadre conventionnel. Toutefois, la commission s’est longuement interrogée sur la participation des fédérations aux négociations au même titre que les représentants des professionnels concernés. Il pourrait à un moment y avoir mélange entre l’administratif et les professionnels de santé qui vont négocier au sein de la convention avec la CNAM. La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

Madame la ministre, comment peut-on aider les fédérations à gérer les décisions prises dans le cadre des négociations conventionnelles ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous ne sommes pas favorables à cette participation, car nous pensons qu’elle créerait un déséquilibre dans le jeu conventionnel. De plus, cette mesure vaudrait pour toutes les professions. Or l’enjeu n’est pas le même pour les professionnels libéraux et pour les établissements. C’est le ministère de la santé qui se porte garant des conséquences des négociations conventionnelles sur les établissements de santé.

Je comprends la nécessité pour les gestionnaires d’établissements d’anticiper les conséquences des accords conventionnels passés avec les professions libérales, par exemple sur les actes et les tarifs des consultations externes. Toutefois, ces modalités de transposition des évolutions de tarifs des actes pour les établissements de santé sont d’ores et déjà clairement définies par les textes réglementaires.

En outre, les négociations conventionnelles ne sont rendues publiques et n’entrent en vigueur que six mois après la signature de l’accord, ce qui permet d’anticiper toute évolution. Nous pensons que ce dispositif serait trop déséquilibrant pour le fonctionnement du système.

L’avis est donc défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour explication de vote.

Mme Corinne Imbert. J’ai entendu les explications de Mme la ministre et de Mme la rapporteur. Je vais donc retirer l’amendement. Reste que tout est lié. Si l’on pouvait faire évoluer un peu le système, j’en serais ravie.

Je retire l’amendement, mais le sujet est sur la table.

Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 572 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 564 rectifié bis

M. le président. L’amendement n° 572 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 124 rectifié ter est présenté par Mme Lassarade, M. Milon, Mmes Deseyne, Micouleau, Deromedi et Procaccia, MM. Sol et Mouiller, Mmes Delmont-Koropoulis et L. Darcos, MM. Morisset, Paccaud, Bascher et Bonhomme, Mmes A.M. Bertrand et Malet, M. Rapin, Mmes Garriaud-Maylam et Bonfanti-Dossat, M. Genest, Mmes Lherbier et Bories, MM. Brisson, Chaize et Laménie, Mme Berthet et M. Darnaud.

L’amendement n° 178 rectifié ter est présenté par MM. Karoutchi, Hugonet, Poniatowski et Cambon, Mme Gruny, MM. Mayet, Daubresse, Courtial, Revet, Lefèvre et Ginesta, Mme Thomas, MM. de Legge et Dallier, Mmes Raimond-Pavero et Di Folco et MM. B. Fournier, Calvet, de Nicolaÿ, Magras, Mandelli, Meurant, Sido, Vaspart, Vogel, Regnard et Buffet.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 29

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 174-18 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 174-18-… ainsi rédigé :

« Art. L. 174-18-… – Les caisses mentionnées à l’article L. 174-18 consentent, à compter de la date de la mise en œuvre de la nouvelle classification des prestations prise en application de l’article L. 162-22-6, des avances de trésorerie aux établissements de santé mentionnés aux a, b, c et d du même article L. 162-22-6 et aux professionnels de santé exerçant dans ces établissements, en raison de la non-transmission par voie électronique ou de l’impossibilité de traitement des bordereaux de facturation liée à la mise en œuvre de cette nouvelle classification. »

La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour présenter l’amendement n° 124 rectifié ter.

Mme Chantal Deseyne. Les tarifs des établissements de santé doivent être publiés le 1er mars de chaque année. Or ils sont régulièrement publiés avec retard – on l’a constaté lors des deux précédentes années –, ce qui provoque une tension sur la trésorerie des établissements. En effet, l’absence de publication de l’arrêté tarifaire à cette date règlementaire empêche les caisses primaires d’assurance maladie d’accepter les factures émises pour les patients à compter du 1er mars de l’année concernée, tant que la nouvelle classification n’est pas publiée.

Selon les années, des dispositifs d’avances sont consentis sur l’initiative des caisses ou à la demande des établissements. Cependant, en l’absence d’une disposition législative pérenne et claire, cette situation met chaque année les établissements dans une incertitude qui désorganise leur gestion. Cet amendement prévoit donc d’acter un dispositif automatique d’avance de trésorerie dans le cas où les tarifs ne sont pas publiés le 1er mars.

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour présenter l’amendement n° 178 rectifié ter.

M. Roger Karoutchi. Je n’épiloguerai pas sur l’amendement lui-même : il est identique à celui qui vient d’être présenté.

Depuis hier, j’essaie désespérément de faire adopter un de mes amendements. (Sourires.) J’espère que, cette fois-ci, la commission l’acceptera, d’autant que l’amendement identique n° 124 rectifié ter est cosigné par le président de la commission des affaires sociales. Je devrais donc recueillir un succès non négligeable auprès de la commission…

Madame la ministre, si vous donniez également, dans un geste de générosité essentielle, un avis favorable sur cet amendement, dont le coût ne doit pas être très élevé, ma soirée en serait embellie. (Nouveaux sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Ces amendements visent à remédier aux difficultés financières rencontrées par des établissements de santé du fait de la publication avec retard de l’arrêté tarifaire, en uniformisant des pratiques. Ils apportent une solution de dernier recours, même si les dysfonctionnements constatés mériteraient d’être traités plus en amont. Mme la ministre exposera les raisons des difficultés et les mesures qu’elle envisage de prendre pour y remédier.

La commission a émis dès hier, sans attendre la supplique de M. Karoutchi, un avis favorable. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. J’entends la supplique de M. Karoutchi, mais la mesure proposée n’est peut-être pas du niveau de la loi.

L’arrêté doit être publié chaque année le 1er mars. Il l’est parfois avec quelques jours de retard, ce qui peut mettre en difficulté des établissements. Normalement, les CPAM font l’avance de trésorerie lorsque les établissements le demandent.

Je vous propose, plutôt que d’inscrire cette disposition dans la loi, ce qui paraîtrait bizarre, de demander à la Caisse nationale d’assurance maladie d’envoyer une circulaire aux CPAM afin de leur recommander d’être attentives en cas de retard de publication au Journal officiel de cet arrêté et de s’engager à faire des avances de trésorerie aux établissements qui le souhaitent. Si cela vous convenait, monsieur le sénateur, nous pourrions en rester là.

Je demande donc le retrait des amendements.

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Il est dit que, sur ce PLFSS, je ne parviendrai à faire voter aucun de mes amendements. Je rejoins le groupe communiste ! (Sourires.)

Je reconnais bien volontiers, madame la ministre, que cette disposition n’est pas du niveau de la loi. Je vous remercie infiniment de prendre l’engagement de faire envoyer cette circulaire. L’amendement, qui ne relève pas du niveau législatif, est ainsi satisfait. Je le retire.

M. le président. Madame Deseyne, l’amendement n° 124 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Chantal Deseyne. Non, monsieur le président, je le retire. Je partage l’analyse de notre collègue Karoutchi.

Article additionnel après l'article 29 - Amendements n° 124 rectifié ter et n° 178 rectifié ter
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 109 rectifié bis

M. le président. Les amendements nos 124 rectifié ter et 178 rectifié ter sont retirés, mais je crois que M. Karoutchi est content malgré tout. (Sourires.)

L’amendement n° 564 rectifié bis, présenté par MM. Henno, Mizzon et Moga, Mmes C. Fournier et Loisier, M. Maurey, Mme Goy-Chavent, M. Longeot, Mme Vullien, MM. Janssens et Kern, Mme Létard et M. D. Dubois, est ainsi libellé :

Après l’article 29

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la dernière phrase du dernier alinéa de l’article L. 1435-10 du code de la santé publique, après les mots : « contient notamment », sont insérés les mots : « une évaluation nationale de la répartition des crédits et de leur impact sur les situations sanitaires régionales ».

La parole est à M. Olivier Henno.

M. Olivier Henno. Nous avons évoqué au cours de ce débat la réalité des territoires et les expérimentations qui y sont menées. Or les décisions des ARS ont un impact important sur la situation sanitaire dans les territoires.

Lorsque j’étais maire, j’ai fait l’expérience d’un manque de transparence et de concertation de la part de l’ARS : une décision avait en effet été prise concernant un GHT la veille de la prise de fonctions du directeur de l’ARS dans une autre région.

Cet amendement a pour objet de renforcer la coproduction en amont, avant la prise de décision des ARS, ainsi que l’évaluation et le dialogue démocratique en aval, vis-à-vis tant des pouvoirs locaux et des parlementaires que de nos concitoyens. Il s’agit de mieux mesurer l’impact de la répartition des crédits et celui des décisions d’ordre sanitaire dans les territoires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Cet amendement vise à renforcer l’information du Parlement, en appréciant l’impact des actions conduites sur les crédits du FIR, même s’il est vrai que l’on peut également obtenir cette information auprès des ARS. La globalisation nous paraît intéressante pour la représentation nationale. L’avis est donc favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur Henno, je comprends votre souhait d’avoir une vision consolidée des crédits du FIR et de l’impact de la répartition des financements sur la situation sanitaire. Mais, en réalité, cela existe déjà, et je vais vous expliquer comment nous procédons.

Aujourd’hui, les ARS produisent un rapport annuel du FIR, ce qui les mobilise fortement. Le rapport est rendu public, et il est accessible sur le site internet des agences ainsi que sur celui du ministère. Il comporte une ventilation des crédits par destination. En parallèle existent des indicateurs de santé par région qui sont publiés par Santé publique France. Nous croisons toutes ces données lorsque nous établissons un projet régional de santé. Je vous rappelle que le PRS est négocié avec l’ensemble des parties prenantes, sur la base de ces indicateurs sanitaires et en fonction des crédits du FIR alloués à toutes les destinations. Ce projet est élaboré pour cinq ans et réévalué tous les cinq ans.

Nous disposons donc déjà d’une vision régionale et d’une vision nationale des crédits du FIR, par consolidation ou par agrégation, et de l’évolution de la part de chaque mission au sein du fonds. Une tendance au renforcement des missions de prévention et de coordination des parcours est d’ailleurs observée, elle est lisible. Par ailleurs, chaque ARS produit annuellement un rapport d’activité qui comporte les éléments relatifs à la gestion des crédits alloués dans le cadre du Fonds d’intervention régional.

Il nous semble que la mesure proposée ajouterait du travail aux ARS, alors que les éléments d’information existent d’ores et déjà. Je souhaite que nous mobilisions ces agences autour de l’accompagnement des projets régionaux et locaux de santé. Elles ont ainsi l’ensemble du plan « Ma santé 2022 » à mettre en œuvre.

Vous le savez, leurs moyens sont plutôt en diminution et elles ont énormément de missions à accomplir. Leur demander d’établir un nouveau rapport, lequel existe déjà et croise des données venant de différents établissements, ne semble pas très pertinent, eu égard aux enseignements que nous sommes capables de tirer de ces rapports.

Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Monsieur Henno, l’amendement n° 564 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Olivier Henno. Je maintiens l’amendement, qui a reçu un avis favorable de la commission, non parce que j’ai la dent dure vis-à-vis des ARS, mais parce qu’il existe, me semble-t-il, un besoin de transparence.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 564 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 564 rectifié bis
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Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 395 rectifié

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 29.

L’amendement n° 109 rectifié bis, présenté par Mmes Micouleau, Deseyne et Bruguière, MM. Chatillon et Cuypers, Mme L. Darcos, M. Daubresse, Mmes Deromedi, Duranton et Garriaud-Maylam, MM. Grand, Gremillet, Houpert, D. Laurent, Lefèvre et Mandelli, Mme Morhet-Richaud et MM. Morisset et Segouin, est ainsi libellé :

Après l’article 29

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 1er septembre 2019, un rapport est remis par le Gouvernement au Parlement portant sur les modalités de prise en charge par l’assurance maladie de la participation des établissements et services exerçant une activité de soins à domicile à l’organisation de la continuité des soins assurée par les structures autorisées sous la forme d’alternatives à l’hospitalisation complète mentionnées à l’article D. 6124-301 du code de la santé publique.

La parole est à Mme Brigitte Micouleau.

Mme Brigitte Micouleau. En application des dispositions de l’article D. 6124-304 du code de la santé publique, les structures autorisées sous la forme d’alternatives à l’hospitalisation complète « sont tenues d’organiser la continuité des soins en dehors de leurs heures d’ouverture, y compris les dimanches et jours fériés ». Les structures d’hospitalisation à temps partiel de jour ou de nuit et les structures pratiquant l’anesthésie ou la chirurgie ambulatoires doivent ainsi s’organiser en interne pour ce faire.

Dans le cas où l’une de ces structures ne serait pas en mesure d’assurer elle-même la continuité des soins, le même article prévoit qu’« elle est tenue de conclure une convention avec un autre établissement de santé accueillant en hospitalisation à temps complet des patients relevant de la ou des disciplines pratiquées par la structure ».

Cette disposition limite inutilement aux seuls établissements autorisés en hospitalisation complète la participation à la continuité des soins des patients admis dans des structures alternatives à cette même hospitalisation complète. Le présent amendement vise donc à favoriser leur implication dans cette prise en charge, afin qu’ils puissent contribuer, au même titre que les autres établissements de santé, à la continuité des soins des patients admis initialement dans les structures autorisées.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. La commission suit une forme de jurisprudence, qui pourrait se résumer ainsi : demander le moins possible de rapports. Un nombre important de ces demandes demeure cependant, car, lorsqu’un amendement est déclaré irrecevable, cela se termine en général par une demande de rapport. Qui plus est, les rapports demandés sont rarement produits.

En l’occurrence, le champ étant très ciblé, la commission a souhaité entendre l’avis du Gouvernement. Mme la ministre pourra ainsi apporter des réponses aux interrogations formulées par notre collègue.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Madame Micouleau, je partage votre souhait de soutenir l’hospitalisation à domicile. Toutefois, la chirurgie ambulatoire s’inscrit aujourd’hui dans un cadre très défini.

Un séjour de chirurgie ambulatoire doit ainsi être impérativement organisé de manière à permettre un retour à domicile suffisamment sécurisé pour le patient, afin qu’il ne soit pas nécessaire d’assurer un relais via une nouvelle hospitalisation, y compris en HAD. Ce que vous proposez est donc quelque peu antinomique par rapport à ce que nous souhaitons pour développer la chirurgie ambulatoire.

Ce n’est pas ce type de prestations que nous attendons de l’HAD, laquelle doit être un véritable relais d’hospitalisation. Nous ne sommes pas d’accord sur la définition de ce que doit être la chirurgie ambulatoire à l’avenir, et qui fait l’objet de consensus internationaux.

Je vous demande de retirer votre amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Madame Micouleau, l’amendement n° 109 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Brigitte Micouleau. Non, monsieur le président, je le retire.

Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 109 rectifié bis
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Article 29 bis (nouveau)

M. le président. L’amendement n° 109 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 395 rectifié, présenté par Mmes Lubin et Grelet-Certenais, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe, Tocqueville et Blondin, M. Fichet, Mmes Préville et Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, Joël Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 29

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Conformément à l’esprit de l’article 27 de la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 exigeant une évaluation prévisionnelle pour chaque exercice du coût des mesures catégorielles, le chiffrage des mesures relatives au personnel médical et non médical ayant un impact sur l’exercice concerné est annexé à la loi de financement de la sécurité sociale ou publié, et présenté lors de la consultation des instances nationales de dialogue social sur ces mesures.

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Le Gouvernement présente annuellement un rapport sur l’évolution des dépenses de personnels des établissements de santé. C’est un outil indispensable pour caractériser la politique de santé mise en œuvre par les gouvernements successifs. Ce document met en évidence leurs priorités et permet de se confronter aux conséquences des grandes orientations adoptées. Il s’agit aussi d’une incitation à faire évoluer ces politiques et à les réviser si besoin est.

Les éléments qui sont présentés ne sont cependant plus suffisants pour avoir une bonne appréciation de l’évolution de la situation des personnels. On observe en effet qu’une inquiétude grandit sur leurs conditions de travail, lesquelles ne peuvent qu’impacter la qualité de l’offre de soins et d’accompagnement.

Le manque de moyens humains dont souffrent les établissements de santé fragilise ainsi la confiance des patients en un système de santé et un monde hospitalier qui demeurent pourtant remarquablement performants, et ce malgré l’extraordinaire pression à laquelle ils sont soumis. Les conditions dégradées dans lesquelles travaillent les personnels, trop souvent débordés, en sous-effectif, confronté au burn-out et, plus généralement, victimes d’une fatigue morale et psychique, ne peuvent qu’altérer, à terme, leur capacité à mener leurs missions, malgré tout le dévouement du monde. C’est la raison pour laquelle les acteurs du secteur réclament une évolution des politiques de ressources humaines en direction de ces personnels de santé qui soit orientée dans le sens d’une véritable politique sociale.

Il s’agit aussi de promouvoir des parcours professionnels cohérents, construits, qui fassent sens, permettent l’épanouissement des personnels et favorisent l’accomplissement de leur mission dans les meilleures conditions possible. Pour ce faire, il est indispensable de disposer d’une photographie la plus précise possible des conditions dans lesquelles s’effectue leur parcours professionnel.

Dans cette optique et dans l’objectif d’améliorer l’information et le contrôle du Parlement sur l’évolution des dépenses de personnels des établissements de santé, nous proposons d’annexer à la loi de financement de la sécurité sociale le chiffrage des mesures catégorielles relatives aux personnels médical et non médical. Les acteurs professionnels concernés doivent aussi pouvoir bénéficier de cette amélioration de l’information en ayant accès à ce chiffrage lors de la consultation des instances nationales de dialogue social.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Cette demande rejoint des préoccupations déjà exprimées par la commission des affaires sociales, visant à mieux étayer l’information du Parlement lors de l’examen du PLFSS. Toutefois, ces dispositions n’ont pas à figurer dans la loi. L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 395 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 29 - Amendement n° 395 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 29 ter (nouveau)

Article 29 bis (nouveau)

I. – Le premier alinéa de l’article L. 6122-5 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette évaluation prend en compte le respect de référentiels mentionnés au premier alinéa de l’article L. 162-30-3 du code de la sécurité sociale et, le cas échéant, les résultats du programme mentionné à l’avant-dernier alinéa du même article L. 162-30-3. »

II. – L’article L. 162-30-3 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce plan identifie les écarts significatifs entre le nombre ou l’évolution du nombre d’actes, de prestations ou de prescriptions réalisés par les établissements de la région ou les professionnels y exerçant et les moyennes régionales ou nationales pour une activité comparable. » ;

2° Après le mot : « elle », la fin du troisième alinéa est ainsi rédigée : « saisit l’établissement concerné et lui enjoint d’élaborer un programme d’amélioration de la pertinence des soins. L’agence régionale de santé peut proposer à cet établissement de conclure un avenant au contrat d’amélioration de la qualité et de l’efficience des soins mentionné à l’article L. 162-30-2. »

M. le président. L’amendement n° 69, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après les mots :

pertinence des soins

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

, servant de base à la conclusion d’un volet additionnel au contrat mentionné à l’article L. 162-30-2. »

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. L’article 29 bis, issu d’un amendement du Gouvernement, affiche l’objectif louable de « dynamiser » les actions conduites dans le domaine de la pertinence des soins. Ce faisant, il introduit un nouvel instrument, le programme d’amélioration de la pertinence des soins, dont on comprend mal l’articulation avec les outils existant déjà pour intervenir auprès des établissements identifiés pour leurs pratiques « atypiques », à savoir notamment la conclusion d’un volet additionnel au CAQES, le contrat d’amélioration de la qualité et de l’efficience des soins.

L’amendement vise donc à clarifier l’articulation entre ces outils.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. L’amendement que vous proposez vise à préciser que le nouveau programme d’amélioration de la pertinence des soins sert de base à la mise en place d’un volet additionnel.

Dans les faits, les données qui servent à l’établissement du programme d’action et à un éventuel CAQES sont les mêmes, et les deux procédures sont complémentaires. L’amendement viserait donc à systématiser ce volet dans la contractualisation, alors que l’article tel qu’il est rédigé laisse le libre choix de recourir ou non à une contractualisation, en plus du programme d’amélioration de la pertinence.

Personnellement, je préfère éviter de trop rigidifier les procédures et m’en tenir à la rédaction initiale. Cela étant, je m’en remets à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 69.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 29 bis, modifié.

(Larticle 29 bis est adopté.)

Article 29 bis (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 29 quater (nouveau)

Article 29 ter (nouveau)

Après le II de l’article L. 6145-16-1 du code de la santé publique, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis. – Le taux maximal applicable aux nouveaux emprunts consentis dans le cadre d’une sécurisation des emprunts structurés détenus par les établissements publics de santé est égal au taux de rendement de l’obligation assimilable du Trésor de maturité la plus proche de la durée de vie moyenne initiale de l’emprunt structuré faisant l’objet de la renégociation, constaté à la date à laquelle celui-ci a été initialement consenti, majoré de cent cinquante points de base.

« Les catégories d’emprunts structurés concernés sont arrêtées par les ministres chargés de la santé, de l’économie et du budget. »

M. le président. L’amendement n° 70, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. L’article 29 ter, qui est assez complexe, vise à permettre aux établissements publics de santé de contracter de nouveaux emprunts en dérogeant au taux d’usure pour sécuriser des emprunts toxiques.

Il ne s’agit pas de rejeter le dispositif proposé dans son principe. Toutefois, ces dispositions gagneraient à faire l’objet d’un projet de loi spécifique assorti d’une étude d’impact détaillée, afin que le Parlement puisse se prononcer en connaissance de cause.

Les établissements concernés devraient pouvoir patienter encore quelques semaines avant de restructurer leur dette, leur cas n’ayant, par définition, pas été traité depuis le lancement du premier plan d’aide, en 2014.

Par ailleurs, cet article ne semble pas s’inscrire dans le périmètre des lois de financement de la sécurité sociale.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Vous souhaitez supprimer cet article, car vous considérez que ses dispositions devraient faire l’objet d’un projet de loi spécifique et qu’elles n’ont pas leur place dans le PLFSS. Je vous rappelle qu’une mesure identique avait été prévue pour les collectivités locales dans le cadre de la loi de finances et qu’elle n’avait pas été censurée par le Conseil constitutionnel.

Sur le fond, le Gouvernement tient beaucoup à cette disposition importante pour les hôpitaux qui connaissent une situation financière très difficile. Près d’une centaine d’hôpitaux sont concernés, pour un montant représentant environ 450 millions d’euros de dettes toxiques, c’est-à-dire plusieurs millions d’euros par établissement. Le risque pour ces établissements est évidemment l’augmentation brutale des taux d’intérêt, qui pourrait conduire à tripler le montant des frais financiers à la charge des établissements.

Nous ne créons pas d’obligation, nous ouvrons simplement la possibilité aux établissements de faire des arbitrages entre taux d’intérêt et encours de dette, afin qu’ils puissent sécuriser leur situation financière. Il nous semble important de leur donner les outils pour sortir de cette situation très insécurisante avant que le risque ne se réalise et ne vienne dégrader encore plus la situation déjà fragile de nos hôpitaux.

Nous avons vraiment besoin de cette disposition. Pour cette raison, je suis défavorable à l’amendement.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Je peux comprendre le souhait de la commission des affaires sociales de supprimer cet article, mais, en relisant son très épais rapport, on trouve un rappel historique de la situation financière de certains établissements.

Madame la ministre, vous avez rappelé que les emprunts toxiques auxquels ont été exposées un certain nombre de collectivités territoriales ont touché aussi, malheureusement, de nombreux établissements publics de santé qui étaient en situation d’endettement. La Cour des comptes en a fait état dans son rapport annuel. Ont ainsi été passés 60 contrats, avec un encours de 299 millions d’euros. Avec les indemnités de remboursement anticipé, on atteint 609 millions d’euros, soit un montant plus de deux fois supérieur.

Certains établissements ont pu sécuriser leurs dettes il y a quelques années en bénéficiant de plusieurs millions d’aides de la part de l’assurance maladie et du fonds de soutien à l’investissement des collectivités locales, l’ex-Dexia.

D’habitude, je soutiens les positions de la commission des affaires sociales, mais, compte tenu des explications données par Mme la ministre, je ne voterai pas cet amendement de suppression.

Je reconnais que le sujet est hyper technique. Sur le plan des finances publiques, supprimer cet article reviendrait à remettre en cause son enjeu financier.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. J’entends la comparaison avec le projet de loi de finances, dont relève le budget des collectivités territoriales. Mais la loi de financement de la sécurité sociale doit-elle prendre en charge les intérêts des emprunts contractés par les hôpitaux ? C’est autre chose ! Le Conseil constitutionnel nous le dira…

Il faut savoir que ce qui a été mis en place et que nous souhaitons pérenniser pour les établissements de santé avait été fait de façon très discrète, sans que l’on demande l’avis du Parlement. Il nous est proposé de faire perdurer le dispositif, ce qui peut s’analyser comme un moyen de diminuer artificiellement le taux d’endettement des établissements publics de santé concernés, puisqu’un taux d’intérêt serait majoré de manière atypique. Le suivi de la situation financière de chaque établissement n’en serait pas forcément facilité.

Dans le court laps de temps qui a séparé l’adoption du texte à l’Assemblée nationale de son arrivée au Sénat, nous n’avons pas été en mesure de savoir si une nouvelle vague d’aides était envisagée pour les établissements ayant contracté des emprunts à risque et dans quelles conditions, quels établissements seraient concernés par le nouveau dispositif, pour quel montant de prêt et pour quel niveau maximum de taux, et si les établissements pourront bénéficier de l’expertise de la Banque de France pour sécuriser leur emprunt dans les meilleures conditions financières. Nous n’avons pas non plus de comparatif de la situation financière qui résulterait, pour un établissement type donné, de la conversion des indemnités de remboursement anticipé en montant d’un nouvel emprunt ou en taux majoré.

La commission n’a pas dit qu’elle était défavorable au système, mais, pour une fois qu’on lui demande son avis, elle préférerait disposer de davantage de renseignements avant de le donner. Je maintiens donc l’amendement.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Madame la rapporteur, le budget de la sécurité sociale est concerné, car, lorsque ces hôpitaux connaissent de grandes difficultés financières, c’est bien nous qui faisons les avances de trésorerie ou les rallonges pour la construction des établissements. In fine, c’est grâce à l’ONDAM que l’on peut venir au secours de ces hôpitaux. Oui, cela nous concerne !

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Je suis un peu étonné de voir que certains établissements se trouvent encore dans cette situation si longtemps après que cette affaire des emprunts toxiques est sortie.

Intéressons-nous aux collectivités territoriales, puisque le parallèle est possible : il faut savoir que certaines d’entre elles ont engagé des procès contre des établissements bancaires et les ont d’ailleurs parfois gagnés, au motif que certains contrats étaient tellement mal ficelés et tellement illisibles que les tribunaux ont considéré que ceux-ci devaient être cassés. D’autres contrats étaient cependant mieux ficelés et ont tenu devant les tribunaux.

À mon avis, l’état des lieux est connu à la fois du côté des collectivités territoriales et des hôpitaux. J’imagine que ceux qui gèrent ces dossiers dans les hôpitaux ont été accompagnés et savent s’il existe des possibilités d’en sortir quand le contrat tient. En tout cas, je l’espère, parce qu’il faut quand même une certaine technicité en la matière.

Je le répète, j’ai un peu de mal à comprendre la raison pour laquelle on en est encore à demander aux parlementaires d’accorder aux établissements de santé, un peu à l’aveugle, comme Mme la rapporteur vient de nous l’expliquer, le droit de déroger au taux d’usure si longtemps après que ces emprunts ont été contractés. C’est pourquoi je suis assez partagé : d’un côté, on aurait envie de vous suivre, madame la ministre, dans l’hypothèse notamment où la remontée des taux pourrait à nouveau fragiliser certains établissements, mais, de l’autre, on se demande pourquoi on est si peu éclairé au moment de prendre notre décision.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Pour les collectivités locales, une disposition similaire avait été adoptée dans la loi de 2016. Aucun équivalent n’avait en revanche été voté pour les hôpitaux dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale de l’année. C’est la raison pour laquelle nous vous proposons d’adopter une disposition de cette nature dans le présent projet de loi de financement.

J’en suis désolée, mais je ne suis arrivée à la tête du ministère que l’année dernière. Il a fallu un peu de temps avant de réagir face à ces emprunts toxiques. La réalité, c’est que nous manquons aujourd’hui de l’outil législatif qui nous permettrait de faire ce que l’on a fait pour les collectivités locales il y a deux ans.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je souhaiterais poser une question à Mme la ministre : les emprunts souscrits par les directeurs financiers de certains hôpitaux l’ont-ils été pour acheter du matériel médical ou pour construire des bâtiments ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Construire des bâtiments !

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Si le but avait été d’acheter du matériel médical, j’aurais compris qu’il incombe à l’assurance maladie de prendre en charge ces emprunts, quand bien même il s’agit d’emprunts toxiques. Dans la mesure où ils devaient servir à la construction de bâtiments, nous devrions mener une réflexion – pas aujourd’hui, évidemment – pour déterminer si c’est bien au secteur de la santé et à l’assurance maladie de prendre en charge leur remboursement.

Je crois en avoir déjà parlé : dans l’éducation nationale, les enseignants exercent dans des écoles, dans des collèges, dans des lycées, qui sont payés par les communes, les départements ou les régions. Ils enseignent dans des universités, qui sont payées par l’État. Il me semble donc anormal que, pour les hôpitaux, ce soit à l’assurance maladie de prendre en charge les investissements immobiliers. Il serait plus logique que ce soit la Caisse des dépôts et consignations, par exemple, qui les finance, puisque celle-ci en a largement les moyens, ou encore une autre banque dont le rôle serait de financer spécifiquement les investissements immobiliers hospitaliers, en dehors de la santé.

En matière de remboursement d’emprunts contractés par les hôpitaux – on l’a vu en particulier dans le cadre du plan Hôpital 2012 et du plan Hôpital 2013 –, les amortissements sont considérables et grèvent d’une manière extrêmement importante le budget des hôpitaux et, donc, la santé.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Votre réflexion est intéressante. Je comprends l’analogie que vous avez faite avec l’éducation nationale. Effectivement, ce n’est pas le budget de l’éducation nationale qui finance la construction des bâtiments.

Il se trouve que, dans le secteur de la santé, tel qu’il fonctionne aujourd’hui – j’entends bien que l’on peut remettre en cause le système –, quand un hôpital veut se moderniser et reconstruire, il peut s’appuyer sur le budget de l’assurance maladie. Dans l’ONDAM, il existe en effet un budget d’investissement et, en général, le ministère finance à peu près 30 % de l’investissement immobilier des nouveaux hôpitaux. Le reste du financement résulte de la capacité d’autofinancement de l’hôpital, dont le budget est alimenté par les recettes issues de la T2A. Il ne provient donc pas directement d’un tuyau de l’assurance maladie ; c’est bien la capacité de l’établissement à dégager des ressources propres issues de la T2A qui explique que, aujourd’hui, les hôpitaux construisent leurs bâtiments.

En somme, il y a une partie du financement qui émane directement du ministère, alors que l’autre partie vient de l’autofinancement des hôpitaux eux-mêmes. En réalité, nos hôpitaux sont construits aujourd’hui grâce à des budgets issus de l’ONDAM.

M. René-Paul Savary. Ça paraît clair !

Mme Agnès Buzyn, ministre. On pourrait décider de remettre en cause le système et, pourquoi pas, d’en discuter. Mais, aujourd’hui, l’intégralité des emprunts toxiques est bien à la charge des établissements. Or nous nous portons quelque part garants de la capacité d’un hôpital à continuer à payer lorsqu’il est en déficit et n’est plus capable d’avoir de la trésorerie. C’est alors nous qui payons.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 70.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 29 ter est supprimé.

Article 29 ter (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 29 quinquies (nouveau)

Article 29 quater (nouveau)

I. – Le chapitre II du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L’article L. 162-5 est complété par un 27° ainsi rédigé :

« 27° Les conditions et modalités de participation financière au recrutement de personnels salariés intervenant auprès de médecins exerçant dans le cadre d’un exercice coordonné et ayant vocation à les assister dans leur pratique quotidienne et améliorer ainsi l’accès aux soins. » ;

2° L’article L. 162-14-1 est ainsi modifié :

a) Le I est complété par un 7° ainsi rédigé :

« 7° Les conditions de modulation de la rémunération des professionnels de santé en fonction de leur participation à un cadre d’exercice coordonné. » ;

b) Le dernier alinéa du II est ainsi modifié :

– à la première phrase, après le mot : « soins », sont insérés les mots : « des communautés professionnelles territoriales de santé, des équipes de soins primaires » ;

– à la deuxième phrase, après le mot : « avec », sont insérés les mots : « des communautés professionnelles territoriales de santé, des équipes de soins primaires, ».

II. – Le directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie engage, dans un délai d’un mois à compter de la promulgation de la présente loi, des négociations conventionnelles en vue de déterminer des mesures visant à inciter au développement de l’exercice coordonné et au recrutement de personnels salariés ayant vocation à assister les médecins dans leur pratique quotidienne.

III. – Le directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie engage, dans un délai d’un mois à compter de la promulgation de la présente loi, des négociations conventionnelles en vue de déterminer, dans le cadre d’un accord conventionnel interprofessionnel, les mesures visant à accompagner le déploiement sur l’ensemble du territoire des communautés professionnelles territoriales de santé, conformément au II de l’article L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale.

IV. – Le délai d’entrée en vigueur mentionné au premier alinéa du I de l’article L. 162-14-1-1 du code de la sécurité sociale n’est pas applicable aux mesures conventionnelles prises conformément aux II et III du présent article.

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 28 rectifié est présenté par Mme Bonfanti-Dossat, M. Brisson, Mme Micouleau, MM. Bascher et Courtial, Mmes Deromedi et Chauvin, MM. Cardoux, Calvet et Panunzi, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Cornu, Schmitz, Pierre et Paccaud, Mmes Morhet-Richaud, L. Darcos et A.M. Bertrand, MM. Piednoir et Revet, Mmes Gruny, Lanfranchi Dorgal et Thomas, MM. Mayet, Babary et Daubresse, Mme Bories et MM. Laménie et Sido.

L’amendement n° 147 rectifié est présenté par MM. Morisset et Mouiller.

L’amendement n° 246 rectifié bis est présenté par M. Sol, Mme Vullien, M. Pellevat, Mmes Goy-Chavent et Bruguière, MM. Détraigne et Magras, Mme Malet, M. Houpert et Mme Lherbier.

L’amendement n° 577 rectifié ter est présenté par M. Vaspart, Mme Lamure, MM. Perrin, Raison, Darnaud, J.M. Boyer et Kennel, Mme N. Delattre, MM. de Nicolaÿ et Paul, Mme Duranton et MM. H. Leroy et Gremillet.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Max Brisson, pour présenter l’amendement n° 28 rectifié.

M. Max Brisson. C’est encore au nom de notre collègue Christine Bonfanti-Dossat que je vais m’exprimer.

La création des assistants médicaux a été introduite par voie d’amendement à l’Assemblée nationale. La responsabilité de définir les contours de ce dispositif est renvoyée à une convention entre l’assurance maladie et les médecins. Or aucune discussion n’a eu lieu afin de s’interroger sur l’opportunité d’une telle création ou sur son articulation avec les professions existantes. Cet amendement vise donc à supprimer le présent article dans l’attente d’études plus approfondies.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour présenter l’amendement n° 147 rectifié.

M. Jean-Marie Morisset. L’article 29 quater crée une nouvelle profession de santé, celle d’assistant médical, sans aucune concertation préalable et dans le flou le plus complet sur le champ de compétences de cette profession.

L’exposé des motifs et les informations que l’on a pu obtenir lors de l’audition de Mme la ministre devant la commission, ainsi que de celle du directeur général de la CNAM, nous laissent un peu perplexes. En effet, on nous a dit que ces assistants médicaux pourraient effectuer certains actes de soins, peut-être même des actes invasifs, tels que des vaccinations, et qu’ils seraient à même d’accéder au dossier médical du patient pour l’alimenter.

Madame la ministre, la création d’une profession de santé relève de la loi. Ainsi, la création récente des assistants dentaires a été introduite par la loi de 2016 de modernisation de notre système de santé, qui a fixé le cadre de compétences et prévu les dérogations à l’exercice illégal de l’art dentaire. Or, dans le cas présent, l’article 29 quater se contente de renvoyer à une convention entre l’assurance maladie et les médecins le soin de définir le cadre de compétences de cette profession. Cette disposition escamote toute concertation avec le Parlement, ainsi que toute concertation avec les autres professions de santé qui peuvent pourtant être sérieusement affectées par la création de ce nouveau métier.

Nous proposons de supprimer cet article, afin de renvoyer à un débat qui nous paraît être un minimum. Cela permettrait de voir comment s’organise cette profession d’assistant médical dans tous nos territoires, y compris nos territoires ruraux.

M. le président. L’amendement n° 246 rectifié bis n’est pas soutenu.

La parole est à M. Michel Vaspart, pour présenter l’amendement n° 577 rectifié ter.

M. Michel Vaspart. Je reprends à mon compte l’argumentaire qui vient d’être exposé, mais je souhaite le compléter.

Il a été annoncé la création de 4 000 assistants médicaux. L’année dernière, madame la ministre, vous m’aviez répondu qu’il était difficile de dresser une carte précise des secteurs sous-dotés, surdotés ou normalement dotés. Comment allez-vous répartir ces 4 000 assistants médicaux et sur le fondement de quels critères ? Il s’agit d’une question intéressante.

Par ailleurs, le directeur général de la CNAM a affirmé qu’il n’envisageait pas de financement pérenne pour ces 4 000 assistants médicaux. Cela signifie que les médecins auront à rémunérer eux-mêmes leurs assistants médicaux, peut-être en partie seulement dans un premier temps, puis en totalité ensuite.

Dans le contexte de désertification médicale que connaît notre pays, la création de cette profession ne me semble pas de nature à constituer une solution. Une extension du champ des pratiques avancées, définies dans un décret récent au profit des professionnels de santé déjà habilités, constituerait bien davantage un progrès en déchargeant les médecins d’actes qu’ils n’ont pas toujours le temps de réaliser.

Enfin, madame la ministre, le mécontentement des territoires ne porte pas uniquement sur la fiscalité, mais sur la première préoccupation des Français : l’accès aux soins. On ne peut plus accepter la situation actuelle, qui ne fait que se dégrader. Au Sénat, nous sommes attachés aux territoires et devons collectivement être courageux dans nos propositions. Je le dis notamment à mes collègues qui sont sénateurs et médecins.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Comme je l’ai dit lors de la discussion générale, en dépit du flou qui entoure l’annonce de la création de ces 4 000 assistants médicaux – vous l’avez présentée dans le plan « Ma santé 2022 » et l’avez évoquée devant nous, madame la ministre, tout comme le directeur de la CNAM, lorsque nous vous avons auditionnée –, la commission n’a pas souhaité s’opposer à l’ouverture des négociations conventionnelles avec les professionnels de santé.

Dans la mesure où ces négociations devront définir les profils de ces assistants, nous n’avons pas souhaité que cet article soit supprimé. La commission est donc défavorable aux amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Si la mission des assistants médicaux est floue, c’est parce que nous confions à la négociation conventionnelle le soin de la définir.

Nous ne créons pas une nouvelle profession, nous créons une fonction qui, je dois le dire, parle à beaucoup de médecins. Nous savons qu’une partie de leur temps est consacrée à des tâches administratives : vérifier que le dossier est à jour, que les coordonnées du malade le sont aussi, que son poids et sa tension ont bien été pris, que certains paramètres paracliniques ont été contrôlés et que le dossier de vaccination et de dépistage est à jour.

Quand j’étais encore médecin hospitalier, j’ai le souvenir que, à partir du jour où l’on m’a retiré mon infirmière, qui était avec moi dans le box de consultation, la durée de mes consultations a augmenté de 20 % et que j’ai vu 20 % de patients en moins. L’hôpital a peut-être considéré que cette décision était rentable… De mon côté, j’ai plutôt constaté que cela affectait ma capacité à recevoir des malades.

Les syndicats de médecins réclamaient cette mission auprès d’eux, de façon à pouvoir recentrer le temps médical sur ce qui a une forte valeur ajoutée. Aujourd’hui, nous avons un déficit de temps médical sur tout le territoire. Le nombre de postes créés correspond en gros à 4 000 postes dédiés à des exercices coordonnés. En effet, si nous considérons que ces missions vont décharger les médecins en améliorant leur temps médical de 15 % à 20 %, encore faut-il qu’elles concernent trois, quatre, voire cinq professionnels pour que cela soit rentable. Sinon, on paiera un salaire pour assez peu de temps dévolu à la mission.

Quels sont les professionnels qui pourront s’inscrire ? L’idée n’est évidemment pas de faire concurrence à des professions de santé existantes. Les infirmières ont des rôles évidemment bien supérieurs, bien plus larges que ce que pourrait être la mission des assistants médicaux. On verra bien ce que la négociation conventionnelle donnera, mais nous imaginons que cela pourrait être un type de poste proposé à des aides-soignantes en deuxième partie de carrière. Nous savons que nous manquons de solutions pour gérer correctement la fin de carrière de ces personnels, dont la profession se caractérise par une forte pénibilité. Voilà un exemple de ce que cela pourrait être.

Vous me demandez si ces assistants médicaux s’installeront dans les zones sous-dotées. Aujourd’hui, il existe des zones sous-dotées identifiées par zonage, qui figurent évidemment dans la cartographie des régions et permettent d’être incitatives. Toutefois, nous pensons que ces professionnels auront vocation à se rendre partout sur le territoire pour des exercices regroupés.

Pourquoi le financement n’est-il pas pérenne ? Si nous proposons ces postes, c’est pour que les médecins gagnent du temps et puissent voir davantage de malades. Voilà l’engagement que doivent prendre les médecins avec cette mesure. Nous leur mettons le pied à l’étrier. Nous verrons ce que la convention médicale proposera en termes d’accompagnement, mais il est probable qu’une partie du poste, et peut-être même la totalité, pourra être absorbée par la hausse d’activité des cabinets médicaux. Nous avons calculé que cela permettrait de gagner 15 % à 20 % de temps médical. Si trois ou quatre médecins gagnent 15 % de patientèle supplémentaire dans leur cabinet, cela pourra permettre de financer un salaire.

Je le répète, si nous n’avons pas été au-delà dans la définition de la fonction, s’il y a un flou, c’est parce que nous avons considéré que c’était aux professionnels eux-mêmes et à l’assurance maladie de s’en charger. Leur réflexion ne devrait pas durer trop longtemps, puisque les négociations conventionnelles vont démarrer et que nous avons demandé qu’elles aboutissent avant la fin du premier trimestre de 2019.

Il me semble qu’il s’agit d’une bonne mesure, qui a été accueillie de façon quasi unanime par les médecins. J’ai en revanche ressenti quelques petites tensions chez les personnels infirmiers, parce qu’ils ont considéré que cette nouvelle mission risquait de recouper les leurs. À l’évidence, les assistants médicaux ne feront aucun soin. Ils ne devraient pas faire de pansements, de piqûres ou de vaccins. Tel n’est pas l’objet de cette mesure. La disposition vise plutôt à décharger les médecins d’un certain nombre de missions, à la frontière entre le secrétariat amélioré et la prise de quelques constantes.

Je laisse le soin aux négociations conventionnelles de définir les besoins des médecins, mais je ne vois pas pourquoi nous supprimerions une disposition qui vise à redonner du temps médical aux territoires, alors que c’est le principal objectif du plan « Ma santé 2022 ». Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements de suppression.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Morisset. Madame la ministre, vous ne pouvez pas nous décrire exactement le contenu des postes, la mission que les assistants médicaux exerceront, leur organisation. C’est tout à fait normal, puisque c’est la convention qui en décidera.

En revanche, une fois que les négociations auront abouti, il faudra nous dire comment tout cela fonctionne, parce j’ai connu des dispositifs gérés par les ARS pour lesquels je me demandais comment les nouvelles missions créées étaient affectées, la raison pour laquelle elles s’installaient sur tel ou tel territoire. Il faudra effectivement bien clarifier le dispositif.

Si j’insiste beaucoup, c’est parce qu’on a encouragé les territoires ruraux à créer des maisons de santé dans lesquelles se regroupent des médecins, des dentistes, des kinés et des psychologues. Il faudra créer un lien et apporter un soutien à nos maisons de santé par l’intermédiaire de cette nouvelle mission.

En attendant avec impatience de connaître le fonctionnement de cette nouvelle mission, je retire mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 147 rectifié est retiré.

La parole est à M. Michel Amiel, pour explication de vote.

M. Michel Amiel. J’irai dans le même sens que Mme la ministre : il serait dommage de ne pas saisir cette occasion de redonner du temps médical aux médecins.

Que le dispositif fasse l’objet de négociations entre la caisse d’assurance maladie et les praticiens, cela me semble normal. Reste qu’on entend parfois que la notion de temps administratif serait exclue des missions exercées par les assistants. Ce serait dommage ! Vous le disiez à l’instant, madame la ministre, cela représente 15 % à 20 % du temps de consultation. Je peux le dire pour l’avoir vécu personnellement.

À mon avis, il ne faut pas non plus trop médicaliser cette fonction. Certes, la prise de tension est un acte qu’on peut effectivement confier aux assistants médicaux, mais le fait qu’un médecin généraliste prenne lui-même la tension de son patient a une valeur symbolique qui n’est pas négligeable.

M. le président. La parole est à M. Michel Vaspart, pour explication de vote.

M. Michel Vaspart. La commission et le Gouvernement ayant tous deux émis un avis défavorable, mon amendement a peu de chances d’être adopté. Dans ces conditions, je le retire, mais, j’y insiste, je souhaite qu’une attention spécifique soit portée aux territoires, que nous défendons ici tout particulièrement.

M. le président. L’amendement n° 577 rectifié ter est retiré.

La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Comme l’a dit notre collègue Vaspart, le Sénat est très attaché aux territoires.

Madame la ministre, il faut du cousu main. Je partage ce que dit le docteur Amiel : il existe des tâches administratives paramédicales. Si vous avez une bonne collaboratrice, elle sait que, quand un patient dit « donnez-moi un rendez-vous quand le docteur aura le temps », il faut lui répondre « monsieur, il va vous voir ce soir » et que, quand un autre veut un déplacement tout de suite, il faut lui répondre « on verra quand il aura le temps ». Pour ça, il faut du personnel bien formé.

Jusqu’à présent, dans les cabinets médicaux, la secrétaire médicale, quand elle avait quelques années d’expérience, savait distinguer les malades qui nécessitaient des soins et ceux qui avaient besoin d’une approche plus sociale que médicale. Il faudra donc du sur mesure, c’est-à-dire que ces assistants médicaux soient vraiment formés en fonction des besoins

La souplesse prévue me convient bien, mais j’espère qu’on disposera bientôt d’une évaluation, que des discussions auront lieu et qu’on aura l’occasion d’en reparler. À ce moment-là, on verra s’il faut généraliser ou non le dispositif. Si celui-ci répond à des besoins réels, la création de 4 000 postes ne sera pas suffisante pour l’ensemble du territoire. Mais n’allons pas trop vite…

Madame la ministre, là encore, nous vous faisons confiance pour cette nouvelle mission. C’est l’esprit qui a animé la commission, et nous aurons, je pense, l’occasion d’en reparler. C’est pourquoi je ne voterai pas les amendements de suppression.

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.

M. Max Brisson. Je vais également retirer l’amendement de Mme Bonfanti-Dossat, en espérant que notre collègue, qui a été infirmière pendant très longtemps en zone rurale, ne m’en voudra pas trop…

Plus j’écoutais M. Amiel aller dans le sens de la ministre, moins j’avais envie de retirer l’amendement, tellement il a atteint les limites de l’exercice. Mais comme j’ai entendu mes collègues Vaspart et Morisset, ainsi que René-Paul Savary, en appeler aux engagements de la ministre pour préciser ce dispositif, je retire l’amendement de ma collègue, en espérant ne pas trop me faire enguirlander ce soir. (Sourires.)

M. le président. L’amendement n° 28 rectifié est retiré.

L’amendement n° 582 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Arnell, Castelli, Collin et Corbisez, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Après le mot :

ainsi

insérer les mots :

la prévention et

La parole est à Mme Véronique Guillotin.

Mme Véronique Guillotin. Notre groupe est toujours favorable, comme l’ensemble de cette assemblée je pense, aux mesures qui peuvent libérer du temps médical auprès du patient. Cela va dans le sens de la lutte contre la désertification médicale, qu’on appelle tous de nos vœux. De plus, la création de postes d’assistants médicaux donnera un cadre légal à des pratiques qui existent déjà dans des cabinets. On sait bien que certaines secrétaires médicales qui ont de nombreuses années d’expérience ne font pas que du secrétariat.

Toutefois, à ce jour, un flou persiste – on en a déjà pas mal parlé – en ce qui concerne les missions et la formation de ce personnel. Il faut évidemment un personnel bien formé qui puisse faire du secrétariat. J’ai relu ce que j’ai pu glaner ici ou là au sujet des missions confiées à ces assistants : on parle d’accueil du patient, de répondre au téléphone, de prendre des rendez-vous, y compris extérieurs, de mettre à jour des dossiers médicaux. C’est essentiel, puisque cela correspond à un travail administratif qui prend un temps important sur la consultation.

Cela étant, les assistants médicaux peuvent aussi aider lorsque les médecins ont une patientèle un peu âgée. Madame la ministre, vous l’avez dit vous-même : lorsque la patiente ou le patient doit se déshabiller et se rhabiller, cela peut prendre dix à quinze minutes du temps de consultation. Il n’est pas utile que le médecin se retrouve seul face à ce type de difficultés. Parmi les missions dont j’ai pris connaissance, on trouve la réalisation de petits actes médicaux : prise de tension artérielle, poids…C’est dans ce domaine qu’on manque un peu de précisions.

Je veux mettre en perspective ou rappeler au travers de cet amendement d’appel que le plan national de santé publique Priorité prévention a été présenté en mars dernier et qu’il a été unanimement soutenu par notre assemblée comme devant figurer au rang de nos priorités. Ces postes d’assistants médicaux ne pourraient-ils pas constituer une belle opportunité pour la médecine de ville ? Ne serait-ce pas un acte fort que d’inscrire dans la loi cette mission de prévention ? Tel est l’objet de cet amendement, qui est à coût zéro pour les finances de la sécurité sociale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Même si elle considère la prévention comme un élément important, la commission a trouvé prématuré, alors que l’on est en pleine discussion des profils et des missions des assistants médicaux dans le cadre des négociations conventionnelles, de leur confier une mission générale de prévention dans le présent texte. Nous vous demandons donc de bien vouloir retirer votre amendement, ma chère collègue.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Madame Guillotin, je comprends votre démarche, mais je conçois plutôt votre amendement comme un amendement d’appel. Nous sommes en effet tous favorables à la prévention.

Parmi les missions que pourraient exercer ces assistants médicaux, nous avons identifié la vérification des vaccins et des dépistages. On est vraiment là dans la prévention primaire ou secondaire. Cependant, comme nous avons confié aux négociations conventionnelles le soin de définir le périmètre de ces missions, je ne souhaite pas que nous inscrivions une telle disposition dans la loi aujourd’hui. Cela romprait avec la méthode que nous avions décidé d’utiliser avec les professionnels.

Cela étant, je donnerai évidemment pour instruction de tenir compte de cet objectif. En attendant, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. Madame Guillotin, l’amendement n° 582 rectifié est-il maintenu ?

Mme Véronique Guillotin. Je me doutais bien de votre réponse. Il s’agissait en effet d’un amendement d’appel, car je pense qu’il était important d’orienter un peu les choses pour que l’on puisse tenir compte de la prévention.

Je retire donc mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 582 rectifié est retiré.

L’amendement n° 461 rectifié, présenté par MM. Jomier, Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais, Jasmin, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, Joël Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La condition d’exercice coordonné ne s’applique pas aux médecins exerçant dans les zones mentionnées au 1° de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique.

La parole est à M. Bernard Jomier.

M. Bernard Jomier. Je souscris à la création de postes d’assistants médicaux. Ce projet va maintenant faire l’objet de négociations et être mieux défini, ainsi que vous l’avez expliqué. Vous prévoyez toutefois dans la loi une condition impérative, à savoir l’exercice coordonné. Quand le chef de l’État a rendu public sa décision de créer des assistants médicaux en septembre dernier, il l’a justifiée par la nécessité de libérer du temps médical pour les médecins. Or où est-il le plus nécessaire de libérer du temps médical ? C’est bien sûr là où il en manque le plus, c’est à dire dans les zones sous-dotées.

Il me semble donc que, dans ces zones sous-dotées, on devrait lever cette condition. Ce médecin ou même ces médecins – l’exercice coordonné n’a en effet pas de rapport avec le nombre de médecins dans un cabinet – qui sont déjà en difficulté dans une zone rurale, où aucun interne ne souhaite venir, contrairement à un médecin en zone urbaine qui aura plus facilement des internes susceptibles de lui libérer du temps médical, doivent pouvoir bénéficier d’assistants médicaux.

Si l’on veut libérer du temps médical de la façon la plus juste et la plus efficiente possible, il ne faut pas imposer à ces médecins qui sont dans les territoires les plus désertifiés de remplir cette condition d’exercice coordonné. Cela n’est pas du tout une mise en cause de la nécessité de développer l’exercice coordonné, puisque je souscris totalement à cette politique.

N’élevons pas une barrière infranchissable. Levons cette condition absolue pour regarder de façon pragmatique, dans chaque territoire, si certains médecins ne pourraient pas bénéficier de ces assistants médicaux, même lorsqu’ils ne satisfont pas à la condition d’exercice coordonné, simplement parce qu’ils se trouvent dans des zones particulièrement difficiles.

Tel est l’objet de mon amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. La commission a entendu les arguments développés par notre collègue Jomier.

Même si nous sommes tous attachés à l’exercice coordonné – on l’encourage lorsqu’on soutient les maisons de santé, lorsque les élus s’engagent dans des projets de cette nature –, il est certain que les assistants médicaux tels qu’ils sont définis aujourd’hui pourraient répondre aux besoins d’un praticien isolé. Cela étant, si le dispositif s’appuie sur une participation financière appelée à s’éteindre, il faudra sûrement que le médecin puisse le financer tout seul, ce qui n’est pas forcément évident au vu de ce que nous a dit Mme la ministre.

Néanmoins, il nous semble que cette mesure pourrait constituer un soutien important aux médecins qui exercent dans ces territoires très défavorisés. C’est pourquoi la commission a émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je comprends bien évidemment votre argument, monsieur le sénateur Jomier. Nous savons que, dans certains territoires, il est très compliqué de s’inscrire dans un exercice coordonné.

Nous avons souhaité, dans le plan, donner un signal fort : l’exercice isolé dans son cabinet sans penser « coordination des soins », sans penser « coopération avec les autres professionnels », sans s’inscrire dans une démarche de parcours de soins coordonné ne peut plus être l’avenir de la médecine. C’est notre vision.

Le signal que nous avons donné a donc été d’encourager cet exercice coordonné et de prévoir que ceux qui ont la volonté réelle de participer à des délégations de tâches, de mieux travailler avec les infirmières, les kinés, les pharmaciens puissent bénéficier plus facilement d’aides que ceux qui restent dans un exercice très « à l’ancienne ». C’est évidemment respectable, mais, parfois, cela peut aussi conduire à une moins bonne prise en charge de pathologies chroniques que celle qui serait délivrée dans le cadre d’un exercice coordonné, tel que le conçoit, aujourd’hui, la Haute Autorité de santé.

Nous pouvons imaginer qu’il y aura des exceptions, mais le signal était bien celui-là.

J’ai proposé de laisser une certaine liberté aux partenaires, dans le cadre de la négociation conventionnelle, afin qu’ils puissent identifier des situations particulières. L’idée n’est pas de créer un dispositif trop rigide. Toutefois, si nous inscrivons dans la loi que n’importe quel médecin, indépendamment de sa pratique ou de sa localisation, peut bénéficier d’un assistant médical, nous perdons, je pense, la force du message de transformation que nous voulons porter dans le plan. C’est pourquoi je préfère laisser aux partenaires de la négociation le soin de repérer un certain nombre de situations particulières, sans inscrire dans la loi que n’importe quel médecin et n’importe quel type d’exercice peuvent donner lieu à l’attribution d’un temps d’assistant médical, et ce d’autant plus que cet assistant médical ne pourra pas être occupé à temps plein si l’on considère le niveau de gain de temps médical de 15 %.

Soyons prudents dans le message que nous délivrons aux professionnels. L’avis est donc défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.

M. Jean-Louis Tourenne. Je suis quelque peu étonné de votre façon d’aborder cet amendement, madame la ministre.

D’un côté, vous nous annoncez que vous allez créer des assistants médicaux pour libérer du temps médical et que, ne sachant pas très bien quel sera le contenu de leurs missions, vous vous en remettez à la négociation professionnelle. Cela me semble tout à fait louable et acceptable. De l’autre, vous nous expliquez que, certes, vous ne savez pas si ces assistants médicaux travailleront à mi-temps, à tiers-temps ou à temps complet, mais que, d’ores et déjà, vous inscrivez dans la loi qu’ils seront obligatoirement présents là où l’on pratique la médecine coordonnée. Et vous nous dites qu’il y aura une certaine souplesse… Non ! Il n’y en aura pas ! Si vous en voulez, il faut inscrire dans la loi la possibilité d’une affectation ailleurs.

En outre, comme Bernard Jomier l’a expliqué tout à fait justement, ces assistants médicaux ont aussi vocation à aider des médecins surchargés, qui ont des distances importantes à parcourir, qui, ayant accepté de s’installer en milieu rural, ont besoin d’être secondés le mieux possible. Une des vertus collatérales du dispositif – je reconnais que ce n’est pas leur vocation première –, c’est qu’ils vont contribuer à l’aménagement du territoire et donner envie à certains médecins d’exercer en milieu rural, en leur garantissant un appui.

Par conséquent, je ne comprends pas votre position et m’oppose – très fermement – à l’idée même d’affecter, de façon unique et obligatoire, les assistants médicaux là où se pratique la médecine coordonnée.

M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.

Mme Nadia Sollogoub. Je partage totalement les propos qui viennent d’être tenus.

J’ai la chance de participer à un groupe de travail sur la désertification médicale. Nous avons auditionné des représentants du Conseil national de l’Ordre des médecins, qui nous ont précisément dit qu’il fallait vraiment tenir compte des difficultés d’exercice des médecins qui se trouvent dans une grande situation d’isolement. Leur appliquer une double, voire une triple peine ne serait pas une façon pédagogique de les amener vers un exercice coordonné de la médecine. Toujours selon ces représentants, il faut absolument entendre leurs difficultés quotidiennes. Ce sont eux, en priorité, qui ont besoin d’être soutenus et aidés.

M. le président. La parole est à M. Bernard Bonne, pour explication de vote.

M. Bernard Bonne. Je soutiens totalement l’amendement de Bernard Jomier.

J’ai exercé pendant un bon nombre d’années en cabinet de groupe. Nous disposions d’un secrétariat, qui, sur le plan administratif, rendait de nombreux services, mais il n’aurait pas pu intervenir comme assistant médical. S’il avait dû aider un patient à se déshabiller, le peser et le mesurer dans une salle, l’aider à se rhabiller avant qu’il ne retourne dans la salle d’attente des trois ou quatre médecins, puis qu’il se déshabille de nouveau, je ne suis pas sûr que nous aurions gagné beaucoup de temps ; je pense même que nous aurions perdu du temps de parole directe avec le patient.

Il n’en va pas de même pour le médecin qui exerce seul. Dans nos campagnes, les médecins isolés sont les plus nombreux – avec la meilleure volonté du monde, on ne parvient pas toujours à créer une maison de santé ou à attirer un médecin dans un endroit complètement désertique. Ce médecin-là, je l’avais moi-même envisagé à un moment de ma carrière, doit pouvoir bénéficier de l’aide d’un assistant médical ou d’une assistante médicale, qui, grâce un système de double cabinet – le médecin passant d’une pièce à l’autre –, lui permettra vraiment de gagner du temps médical.

Sans cette souplesse dans l’installation des assistants médicaux, nous perdrons tout le bénéfice que la disposition pourrait apporter à la lutte contre la désertification médicale. Dans nos campagnes – j’ai tout de même vécu assez longtemps en milieu rural –, cette aide serait bien appréciée. À nous, médecins qui nous étions installés, elle nous aurait fait gagner un temps très précieux – en économisant ce temps de déshabillage, de rhabillage et de pesée –, sans pour autant nous faire multiplier par deux le nombre de consultations. Il est important que les médecins dont je parle puissent savoir qu’ils auront la possibilité, à l’avenir, de disposer d’assistants médicaux.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Je partage totalement votre position, madame la ministre, s’agissant de la direction vers laquelle il faut tendre pour l’exercice des professions de santé. Je n’ai aucune réserve par rapport à ce que vous avez exprimé, sauf lorsque vous annoncez votre intention de faire preuve de souplesse. Vous ne le pouvez pas, puisque vous gravez dans la loi la condition d’exercice coordonné.

Ce que nous vous disons, c’est de ne pas en faire un principe intangible. Ouvrez la porte, pour que les situations que Bernard Bonne et d’autres collègues viennent de décrire soient prises en compte. Ce n’est pas un contre-message ! Suffisamment de dispositions conventionnelles poussent les médecins à travailler en exercice coordonné pour qu’il ne soit pas nécessaire d’en rajouter. Vous savez que les jeunes sont demandeurs d’exercices coordonnés. Au sortir de la faculté, les internes ne souhaitent pas se retrouver seuls. Ils ont compris qu’ils travailleraient mieux, qu’ils auraient une meilleure qualité de vie, en collaborant avec d’autres professionnels de santé, dans le cadre d’un partage de tâches.

Je n’ai donc pas d’inquiétude quant à une évolution vers l’exercice coordonné de la médecine, mais encore beaucoup de médecins sont isolés. Il faut penser à eux, car ils exercent dans les territoires les plus difficiles. Prévoir une exception, ce n’est pas indiquer une volonté de comportement majoritaire. Et c’est bien une exception que nous demandons d’inscrire dans la loi !

J’y insiste, madame la ministre, nos philosophies ne sont pas opposées. Nous voulons simplement que cette adaptation soit prévue ; les partenaires conventionnels décideront ensuite. S’il y a des dérives, nous modifierons la loi.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je pense avoir créé une sorte de confusion, que je vais tenter de dissiper.

Lorsque nous avons pensé le système, et que nous avons présenté le plan « Ma santé 2022 », nous avons indiqué que les assistants médicaux seraient réservés à des médecins respectant trois conditions : l’exercice devait être regroupé afin que ces assistants médicaux puissent dédier leur temps à plusieurs professionnels travaillant dans le même lieu ; l’exercice devait se faire en coordination avec d’autres professionnels de santé ; les médecins devaient s’engager à recevoir plus de patients.

Dans la loi, nous inscrivons comme seul critère la nécessité d’un exercice coordonné. Nous n’imposons pas le regroupement sur un même lieu ; nous écrivons que les médecins doivent faire partie d’une CPTS, d’un réseau ou d’une maison de santé.

Attention au message envoyé ! Tous les médecins, aujourd’hui, doivent envisager leur activité sous la forme d’un exercice coordonné, au moins via une CPTS. Une communauté professionnelle territoriale de santé, c’est tous les professionnels d’un même bassin de vie qui font en sorte de se connaître entre eux et d’identifier les filières de soins. Le critère est donc très peu restrictif : nous n’exigeons pas que l’exercice soit regroupé ; simplement qu’il soit coordonné !

L’amendement, tel qu’il est rédigé, tend à prévoir que « la condition d’exercice coordonné ne s’applique pas aux médecins exerçant dans les zones mentionnées au 1° de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique ». Ces zones représentent 20 % du territoire français. Admettre que les médecins exerçant sur 20 % du territoire français bénéficient de cette disposition sans s’inscrire dans un exercice coordonné, c’est perdre le signal que nous souhaitons donner.

J’y insiste, nous n’avons pas été restrictifs, dans la loi, sur l’exercice regroupé – j’ai créé une confusion en employant ce terme, mais la loi est très claire et ne mentionne que l’exercice coordonné –, alors que, pour une question de rationalisation du temps, c’était notre idée initiale. Mais là, nous allons un peu trop loin : je maintiens mon avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 461 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 193 rectifié est présenté par Mmes Micouleau, Deseyne et Bonfanti-Dossat, MM. Chatillon et del Picchia, Mmes Delmont-Koropoulis, Deromedi et Garriaud-Maylam, MM. Grand et Lefèvre, Mmes Lherbier et Malet et MM. Morisset et Pellevat.

L’amendement n° 593 rectifié est présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, A. Bertrand, Castelli et Collin, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Guillotin et MM. Menonville, Requier, Roux et Vall.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 6

1° Remplacer le mot :

modulation

par le mot :

majoration

2° Remplacer les mots :

un cadre d’exercice coordonné

par les mots :

une prise en charge coordonnée

La parole est à Mme Brigitte Micouleau, pour présenter l’amendement n° 193 rectifié.

Mme Brigitte Micouleau. L’article 29 quater a pour objet d’inciter les professionnels de santé libéraux, via leurs conventions avec l’assurance maladie, à développer les prises en charge coordonnées en tant que de besoin.

Il ne serait pas acceptable que, tel que le laisse pressentir la rédaction actuelle de l’article, avec les termes « modulation » et « cadre d’exercice », seules certaines formes d’exercice coordonné se voient valorisées.

Le nouvel accord-cadre interprofessionnel, signé le 10 octobre 2018 entre l’Union nationale des professionnels de santé et l’assurance maladie, prévoit, outre la mise en œuvre des dispositifs issus de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, le développement d’autres formes d’organisations pluriprofessionnelles capables d’apporter une réponse coordonnée de proximité aux besoins de prise en charge des patients. Je citerai, notamment, les équipes ouvertes non formalisées de professionnels de santé libéraux.

Ainsi, tout professionnel de santé engagé dans une prise en charge coordonnée, quel que soit son mode d’exercice, doit recevoir une rémunération en sus pour le temps dédié à cette coordination. Le présent amendement tend donc à ouvrir la rémunération de la coordination à l’ensemble des professionnels de santé.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 593 rectifié.

M. Jean-Claude Requier. L’article 29 quater, inséré par l’Assemblée nationale, vise à inciter les professionnels de santé libéraux, via leurs conventions avec l’assurance maladie, à développer les prises en charge coordonnées. Or, tel qu’il est rédigé, seules certaines formes d’exercice coordonné seraient valorisées.

Aussi, par cet amendement, qui rejoint celui de Mme Micouleau, nous proposons d’ouvrir la rémunération de la coordination à l’ensemble des professionnels de santé. Nous estimons en effet que tout professionnel de santé engagé dans une prise en charge coordonnée, quel que soit son mode d’exercice, doit recevoir une rémunération en sus pour le temps dédié à cette coordination.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Ces deux amendements tendent à remplacer le terme « modulation » par le terme « majoration », étant entendu qu’une modulation peut effectivement être à la baisse ou à la hausse, et à employer l’expression « prise en charge coordonnée » plutôt que « cadre d’exercice coordonné ».

Je partage les propos de Mme la ministre : il faut que les médecins privilégient la coordination. Soit dit par parenthèse, l’expression « maison de santé » est très mauvaise. Les gens ont l’impression que c’est forcément un lieu unique et que l’on construit des murs… Non ! Une maison de santé peut être sur plusieurs sites. L’essentiel, c’est qu’il y ait un projet de santé à l’échelle du territoire.

Cela étant, on le sait bien, et c’est la raison pour laquelle nous avons soutenu l’amendement n° 461 rectifié de M. Jomier, sur certains territoires, des médecins en fin de carrière – certes, ils travaillent avec l’infirmière ou le pharmacien – pourraient bénéficier, avec l’assistant médical, d’un coup de pouce, ce qui les aiderait à trouver un successeur ou un associé et à entrer dans un cadre d’exercice coordonné.

La commission militant pour la souplesse, elle a émis un avis favorable sur ces deux amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. L’avis est défavorable, car, là encore, ces amendements dévoient l’esprit dans lequel nous construisons le système de santé de demain. Nous souhaitons que les professionnels s’inscrivent dans un cadre donné, notamment les CPTS, qui constitueront des communautés de professionnels ayant une responsabilité territoriale.

Les CPTS seront financées sur la base d’un cahier des charges, au travers duquel nous allons leur demander d’assurer à chaque citoyen un médecin traitant, de proposer une permanence des soins non programmés et de réaliser différentes missions, par exemple des missions de prévention.

Un financement soumis au respect d’un cahier des charges, tel est le cadre que nous souhaitons promouvoir. C’est donc clairement une organisation territoriale, imposant une responsabilité supplémentaire aux médecins. Celle-ci se situe au-delà de la responsabilité individuelle d’un médecin vis-à-vis de sa patientèle ; il s’agit d’une responsabilité, assumée collectivement par des professionnels, consistant à bien couvrir un territoire et s’assurer que la population reçoit le service qu’elle est en droit d’attendre.

La formule « prise en charge coordonnée » serait un recul, car un médecin qui se coordonnerait avec une infirmière et un kiné pourrait bénéficier de cette rémunération de l’assistant médical. Ce n’est pas ainsi que nous voyons les choses ! Nous souhaitons réellement favoriser des coordinations structurées et à l’échelle des bassins de vie. Je suis opposée à ce changement sémantique, car, derrière, c’est un véritable changement structurel que vous feriez vivre à la réforme que je souhaite mener.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 193 rectifié et 593 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 71 rectifié, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 9

Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :

3° L’article L. 162-16-1 est ainsi modifié :

a) Le début du quinzième alinéa est ainsi rédigé :

« 12° Des mesures…(le reste sans changement) » ;

b) Après le quinzième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 13° Les conditions de modulation de la rémunération des pharmaciens en fonction de leur participation à un cadre d’exercice coordonné. »

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Cet amendement vise à compléter les conventions passées avec l’ensemble des professionnels de santé, en étendant le dispositif aux pharmaciens, dans la mesure où ceux-ci ont toute leur place dans l’exercice coordonné des soins de ville.

Cela étant, je rectifie l’amendement pour tenir compte des deux amendements identiques que nous venons d’adopter. Il faut remplacer le terme « modulation » par « majoration » et l’expression « cadre d’exercice coordonné » par « prise en charge coordonnée ».

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 71 rectifié bis, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, et ainsi libellé :

Après l’alinéa 9

Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :

3° L’article L. 162-16-1 est ainsi modifié :

a) Le début du quinzième alinéa est ainsi rédigé :

« 12° Des mesures…(le reste sans changement) » ;

b) Après le quinzième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 13° Les conditions de majoration de la rémunération des pharmaciens en fonction de leur participation à une prise en charge coordonnée. »

Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous n’avons jamais pensé exclure les pharmaciens d’officine de la participation à un cadre d’exercice coordonné, qui concerne la totalité des professionnels de santé. Je suis donc favorable à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 71 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’article.

Mme Laurence Cohen. Je ne sais pas si vous l’avez remarqué, madame la ministre, mes chers collègues, mais notre groupe n’a pas présenté d’amendement de suppression ou de réécriture de cet article. Nous trouvons effectivement la mesure intéressante, même si des flous demeurent. Le débat a permis de lever certaines incertitudes, mais il en reste encore un nombre certain.

Je regrette que cette proposition soit venue par voie d’amendement à l’Assemblée nationale. Il aurait été préférable d’anticiper un peu afin de permettre une discussion plus approfondie.

Parmi les incertitudes, outre les points soulignés par mes collègues, le fait qu’on demande au dispositif de participer à l’accroissement du nombre de patients pris en charge demeure tout de même extrêmement vague… Que signifie « plus de patients » ? Dans quel contexte ?

Il s’agit donc d’une mesure intéressante, qui a besoin d’être précisée. C’est pourquoi nous nous abstiendrons sur cet article.

M. le président. Je mets aux voix l’article 29 quater, modifié.

(Larticle 29 quater est adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Philippe Dallier.)

PRÉSIDENCE DE M. Philippe Dallier

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion des articles du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2019.

Article 29 quater (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 29 sexies (nouveau)

Article 29 quinquies (nouveau)

À titre expérimental, pour une durée de trois ans et sur autorisation de l’État, la réorientation d’un patient effectuée par un service ou une unité d’accueil et de traitement des urgences peut donner lieu à la facturation, par certains établissements de santé mentionnés à l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale, d’une prestation d’hospitalisation mentionnée au 1° du même article L. 162-22-6.

Par dérogation à l’article L. 160-13 du même code, la prestation mentionnée au présent article est intégralement prise en charge par les régimes obligatoires d’assurance maladie pendant une durée de trois ans à compter du début de l’expérimentation. Un décret en Conseil d’État précise les modalités de mise en œuvre de cette expérimentation, notamment les conditions de désignation des établissements retenus pour y participer ainsi que ses conditions d’évaluation en vue d’une éventuelle généralisation.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.

Mme Laurence Cohen. Je veux dire d’emblée notre opposition à cet article introduit sur proposition du rapporteur à l’Assemblée nationale. Je tiens d’autant plus à le dire – c’est là ma petite particularité sur cet article – que, l’an dernier, j’ai été rapporteur, avec mon collègue René-Paul Savary et notre ancienne collègue Catherine Génisson, d’une mission d’information sur les urgences hospitalières et que cette disposition faisait partie de nos recommandations.

Alors pourquoi, me direz-vous, rejeter un an après cette disposition ? Tout simplement, parce que, d’une part, telle qu’elle est proposée par le rapporteur Véran, elle est sortie de son contexte – il faut la mettre en regard avec les dix-neuf autres propositions – et, que, d’autre part, l’article 29 quinquies ne reprend qu’une partie de ce qui figure dans notre rapport, comme l’a tout à fait bien exprimé la rapporteur Catherine Deroche. Je la cite : « Cet article tel que rédigé repose sur la reprise d’un seul des trois éléments constitutifs de la recommandation de la mission, qui avait été conçue comme un tout. Le choix du seul forfait de réorientation, qui fait l’économie d’une réflexion plus générale sur le mode de financement des urgences, ne saurait constituer qu’une solution de “bricolage” transitoire venant complexifier encore la tuyauterie du financement des services d’urgences, sans y apporter de solution de redressement pérenne. »

Je rappelle que cette proposition n° 1 envisageait la conservation d’un financement mixte incluant une part de financement à l’activité et une part forfaitaire, la modulation du montant du financement à l’activité en fonction de la gravité des pathologies et de la technicité des actes réalisés et, enfin, la création d’un forfait de réorientation visant à inciter les services à réadresser les patients ne nécessitant pas de prise en charge hospitalière vers les acteurs de ville de la prise en charge en urgence.

Il est impossible de soutenir la proposition du député Véran, tant elle contrevient à l’esprit même du serment d’Hippocrate. Comment ignorer que beaucoup de patients se rendent aux urgences, car ils n’ont pas d’autre solution médicale ? Comment ignorer les difficultés financières de nombre d’entre eux, ce qui entraîne un accroissement du nombre de renoncements aux soins ?

L’accueil de chaque patient faisant partie intégrante des missions des hôpitaux, il est irresponsable de prendre le risque de renvoyer un patient vers un médecin de ville qu’il ne trouvera sans doute pas en temps voulu, faute d’effectif, faute de place.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous demanderons la suppression de l’article 29 quinquies.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l’article.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Pour appuyer les propos de ma collègue Laurence Cohen, je souhaiterais vous parler d’un bassin de vie qui rassemble 700 000 personnes à une heure de Paris.

Dans le département du Pas-de-Calais, ce que nous appelons le bassin minier est en souffrance sur bien des points. En termes de santé, la situation sanitaire y est révoltante.

On meurt plus à Lens qu’ailleurs. La surmortalité ou mortalité évitable y est de 76 % supérieure à la moyenne nationale. Les causes de cette hécatombe sont multiples : on pourra citer les addictions pour se donner bonne conscience, mais la prévention y est très en retard, notamment en ce qui concerne les dépistages des cancers. Le peu de médecins, la saturation des hôpitaux, la situation sociale dégradée de la population sont surtout à mettre en cause.

Cet article propose de réorienter les patients accueillis aux urgences vers la médecine de ville en fonction de leur pathologie. Mais si la médecine de ville était suffisante, les patients n’iraient pas s’entasser parfois plus de vingt-quatre heures aux urgences !

À Lens, l’hiver dernier, la combinaison gel plus grippe a complètement saturé les urgences, les soignants étant obligés de planter des clous dans les couloirs pour suspendre les perfusions. Les personnels sont exténués.

Le non-recours aux soins devient la règle. Des personnes âgées préfèrent rester chez elles plutôt que de se laisser transférer à l’hôpital et ne se soignent donc pas du tout.

Les services du SMUR ont été complètement déshabillés limitant la possibilité d’intervention, à tel point que, lorsque vous êtes venue la semaine dernière, madame la ministre, vous avez insisté sur l’urgence de rouvrir la deuxième équipe du SMUR, malheureusement fermée la nuit depuis un certain temps. Le vrai problème des urgences et des hôpitaux, c’est davantage le sous-investissement que la réorientation.

À l’occasion de votre déplacement, vous avez évoqué le nouvel hôpital avec les élus de notre territoire. M. le préfet a signé le permis de construire. Cet équipement, je le rappelle, est vital pour notre territoire, même s’il ne sera pas suffisant.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, sur l’article.

M. Bernard Jomier. Je ne ferai pas injure à l’auteur de cette proposition de ne pas y avoir réfléchi.

Le problème de l’engorgement des urgences est ancien et appelle des solutions qui ne sont pas simples, sinon cela fait longtemps qu’il aurait été réglé. De plus, il relève de plusieurs niveaux.

Il y a bien sûr la question, intrinsèque à l’hôpital, des moyens, mais ce n’est pas suffisant. Quand on regarde les urgences d’un hôpital, on s’aperçoit qu’elles servent aussi à régler des questions sociales ou sociétales, qui devraient être prises en charge d’une autre façon.

Il y a aussi la question de l’aval. Je me rappelle que le rapport du professeur Carli préconisait de désengorger l’aval des urgences pour que la situation s’améliore.

Il y a en outre la question de l’amont, qui est fondamentale. Depuis quinze ou vingt ans des mesures ont été prises, telles que la fin de l’obligation déontologique de garde des médecins, dont je ne dis pas qu’il faut revenir dessus, qui sont le point de départ du désengagement de la médecine de ville et de la médecine ambulatoire de la prise en charge des soins non programmés. Il faut absolument mettre l’accent sur ces solutions en amont.

Ce qui m’inquiète dans cette mesure, c’est qu’elle semble être le reflet d’une attitude qui consiste à baisser les bras : Olivier Véran a inventé la tarification à l’inactivité ! C’est stupéfiant ! Si une telle mesure produisait des résultats, je ferai un effort philosophique pour m’y rallier, mais il n’y a pas grand-chose à attendre de ce forfait de réorientation des urgences : il ne réglera rien du tout. Cela me pose un vrai problème, parce que c’est une entorse au principe selon lequel on rémunère ceux qui soignent et on ne rémunère pas ceux qui ne soignent pas. De plus, le budget serait pris sur l’enveloppe de l’hôpital, et non sur celui de la ville, ce qui affecterait d’autres activités soignantes. Non, vraiment, cette mesure n’est pas bonne ! (Mme Michelle Meunier applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, sur l’article.

M. Michel Amiel. Pour avoir pratiqué autant les urgences hospitalières que celles de ville, je suis moi aussi très surpris par cette mesure.

Nous le savons tous, les urgences sont saturées par des consultations non programmées, qui n’y ont évidemment pas leur place. Toutefois, dans le cadre d’un hypothétique parcours de soins, pour réorienter un patient qui a été admis aux urgences, encore faut-il qu’il ait été examiné. Par qui ? Par un médecin urgentiste ? Par une infirmière d’orientation ? Et le réorienter vers qui et à quelle heure ?

Prenons un cas très concret plutôt que de partir sur de grandes théories.

Une maman qui se présente aux urgences le soir avec son enfant qui a mal à l’oreille et 39 de fièvre, ce n’est pas une urgence ; c’est une consultation non programmée. Après avoir ausculté l’enfant – il faut bien savoir ce qu’il a –, on va dire à la maman que cela ne relève pas de l’hôpital, ce qui est vrai, et qu’il faut retourner en ville. Encore faut-il trouver un médecin dans un hypothétique – encore une fois – parcours de soins.

Le problème, c’est ce qui se passe en amont – et je rejoins totalement les propos de mon collègue et confrère Bernard Jomier. On a fait l’erreur, à un moment donné, de supprimer du code de déontologie l’obligation, pour les praticiens, de s’inscrire à un tableau de garde. Chaque métier a ses contraintes – la contrainte et la grandeur, soit dit en passant, des médecins, c’est de participer de cette logique. Or ce n’est certainement pas en créant des consultations, qui n’en sont pas et qui vont être rémunérées, qu’on va régler le problème. On va renvoyer le patient à un autre praticien dont l’acte sera facturé moins cher que le forfait de réorientation…

Madame la ministre, vous le savez, je partage quasiment à 100 % vos orientations, mais la proposition de notre confrère Olivier Véran est une fausse bonne idée.

M. le président. Je suis saisi de sept amendements identiques.

L’amendement n° 1 rectifié bis est présenté par Mmes Estrosi Sassone et Micouleau, M. Bonhomme, Mme Deromedi, MM. de Nicolaÿ, Daubresse, Morisset, Bascher et Panunzi, Mme Bruguière, MM. Grosdidier et Pillet, Mmes Raimond-Pavero et Lopez, M. Cardoux, Mmes Gruny, A.M. Bertrand et Lanfranchi Dorgal, M. Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, M. Cuypers, Mme Dumas, MM. Pellevat, Kennel, J.M. Boyer et Cambon, Mme Garriaud-Maylam, MM. Bouchet, Duplomb et Saury, Mme L. Darcos, MM. Karoutchi, Priou, Piednoir et Paccaud, Mme M. Mercier, MM. Pointereau, Lefèvre, Revet, B. Fournier, Mayet et Vaspart, Mme Thomas, MM. Babary, Rapin, Husson, Laménie et Genest, Mmes Canayer et Lamure et MM. Sido et Gremillet.

L’amendement n° 72 est présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales.

L’amendement n° 218 rectifié bis est présenté par MM. Chasseing, Malhuret, Decool, Capus, Guerriau, Wattebled, A. Marc et Lagourgue, Mme Mélot, MM. Louault, Huré et Magras, Mme Malet, MM. Nougein, L. Hervé, del Picchia et H. Leroy et Mme Perrot.

L’amendement n° 298 est présenté par M. Amiel.

L’amendement n° 462 rectifié est présenté par MM. Jomier, Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais, Jasmin, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, Joël Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 518 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

L’amendement n° 583 rectifié est présenté par Mme Guillotin, MM. Arnell, Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes et MM. Gabouty, Gold, Menonville, Requier, Roux et Vall.

Ces sept amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Brigitte Micouleau, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié bis.

Mme Brigitte Micouleau. Inséré par l’Assemblée nationale, cet article crée un forfait de réorientation et un forfait de consultation aux urgences.

Les conséquences de cet article peuvent être extrêmement graves pour la santé des Français, sous couvert de vouloir réduire le temps d’attente dans les services d’urgences hospitalières. En effet, en établissant un nouveau mode de tarification aux urgences, qui pourrait s’élever de 20 à 60 euros par établissement et par réorientation de patient vers un médecin de ville pour une consultation ultérieure ou bien au sein d’un autre service hospitalier, deux risques sont encourus.

Le premier est d’envoyer un mauvais signal comptable ; le second risque est médical, car si, pour certaines pathologies simples, le dispositif peut être pertinent, comment prendre la décision de réorienter certains patients et avoir la certitude que toute urgence vitale est écartée, d’autant que, lors des passages aux urgences, les antécédents et les informations de santé sont généralement parcellaires ?

Enfin, l’article est lui-même parcellaire, puisque se pose la question de la responsabilité de la direction des établissements de soins et des personnels soignants. Sur qui reposeront les conséquences d’une éventuelle erreur de diagnostic ou de posologie pour un traitement ou bien d’un retard de prise en charge dû à la réorientation chez un médecin de ville plusieurs jours après le passage aux urgences, qui aura peut-être fait perdre un temps précieux dans la réalisation du diagnostic ?

En théorie, si le refus de réorientation par le patient est prévu, la pratique ne laissera guère le choix et sera source d’une prise en charge complexifiée.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur, pour présenter l’amendement n 72.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Cette mesure a fait l’objet d’une campagne de presse importante. Pour autant, comme vous pouvez le constater, madame la ministre, elle recueille au Sénat une opposition unanime, ce qui peut paraître paradoxal, puisqu’elle a été présentée, à tort me semble-t-il, comme étant issue d’un rapport du Sénat de 2017 sur les urgences hospitalières rédigé par René-Paul Savary, Laurence Cohen et Catherine Génisson.

La commission des affaires sociales du Sénat ne peut que partager la préoccupation qui a conduit à l’adoption de cet article. En effet, le mode actuel de financement des urgences hospitalières est par nature incitatif à l’activité, alors qu’une proportion non négligeable de patients qui s’y présentent ne relève pas de la compétence de ces services.

En conséquence, la commission recommandait une évolution du mode de financement des urgences reposant sur trois piliers : la conservation d’un financement mixte incluant une part de financement à l’activité et une part forfaitaire ; la modulation du montant du financement à l’activité en fonction de la gravité des pathologies, afin d’inciter les services à se concentrer sur la prise en charge des patients classés CCMU 3, 4 ou 5 ; la création d’un forfait de réorientation visant à inciter les services à réadresser les patients ne nécessitant pas de prise en charge hospitalière vers les acteurs de ville.

Le dispositif qui a été présenté à l’Assemblée nationale par le rapporteur général Olivier Véran apparaît problématique à quatre titres au moins.

En premier lieu, il reprend un seul des trois éléments constitutifs de la recommandation de la mission, qui avait été conçue comme un tout. Le choix du seul forfait de réorientation, qui fait l’économie d’une réflexion plus générale sur le mode de financement des urgences, ne saurait constituer qu’une solution de « bricolage » transitoire venant complexifier encore la tuyauterie de financement des services d’urgences sans y apporter de solution de redressement pérenne.

En deuxième lieu, le dispositif pose une question d’organisation des soins. Quand bien même la réorientation du patient passerait par une consultation préalable, cette réorientation s’analyse au total comme un acte médical non accompli et pour autant rémunéré. Le patient devra donc être pris en charge par un autre professionnel de santé, le plus souvent de ville, qui, lui, ne percevra aucune rémunération supplémentaire.

En troisième lieu, on peut s’interroger sur le caractère réellement incitatif de cette disposition, dans la mesure où la facturation d’une consultation et d’examens complémentaires emporte généralement des montants plus élevés que ceux qui sont envisagés pour le forfait de réorientation – 20 et 60 euros, selon les informations transmises par la DSS. De plus, comment le professionnel de ville sera-t-il incité à dégager son planning pour accueillir un patient venu des urgences ?

En quatrième lieu, le succès du dispositif devrait reposer sur une coopération forte entre la ville et l’hôpital, dont les contours restent encore largement à construire.

Pour l’ensemble de ces raisons, même si cette solution paraît innovante, elle ne répond que partiellement aux enjeux.

M. le président. La parole est à Mme Viviane Malet, pour présenter l’amendement n° 218 rectifié bis.

Mme Viviane Malet. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, pour présenter l’amendement n° 298.

M. Michel Amiel. Je n’ai rien d’autre à ajouter.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour présenter l’amendement n° 462 rectifié.

M. Bernard Jomier. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 518.

M. Fabien Gay. Je ne vais pas intervenir longtemps, puisqu’il y a unanimité. Je veux juste dire que les déserts médicaux, on n’en trouve pas que dans les territoires ruraux. En Seine-Saint-Denis, il y en a aussi. Je vais donner un exemple précis.

Chacun ou chacune peut avoir besoin de se rendre chez le docteur. Si ça vous arrive un dimanche, le cabinet de votre médecin traitant n’est évidemment pas ouvert. Or si votre enfant a mal, vous êtes inquiet. Vous pouvez toujours appeler SOS médecins, mais, en Seine-Saint-Denis, ils ne se déplacent pas. Dans ce cas, vous n’avez qu’une solution : aller à l’hôpital.

Comme l’a dit notre collègue, certains cas ne relèvent pas des urgences, et on sait bien qu’on va les surcharger en y allant, mais, quand vous êtes papa pour la première fois et que votre enfant de trois mois a 40 de fièvre, vous flippez. Si ça lui arrive une autre fois, vous le mettez dans l’eau, et ça va passer… (Rires.) Il ne faut pas le noyer, c’est juste pour faire baisser la température. (Sourires.) Si vous le savez, c’est parce qu’on vous l’a dit la première fois, mais, pour ça, vous aviez besoin d’un avis médical. Or, je le redis, SOS médecins ou les pompiers ne se déplacent pas, surtout la nuit, en Seine-Saint-Denis. Voilà pourquoi vous allez aux urgences.

Enfin, puisqu’il faut s’attaquer au nœud du problème, j’entends que ça représente 300 millions d’euros d’économies. Et on va encore nous dire qu’il faut bien qu’on trouve de l’argent ! On va donc vous ressortir le même argument : de l’argent, il en existe beaucoup, mais il faut le prendre là où il y en a. La dernière fois, je vous ai parlé de l’ISF. Maintenant, je vous donne un autre exemple : 80 milliards d’euros d’évasion fiscale ! Évidemment, ce n’est pas l’objet du PLFSS, c’est le PLF. Mais l’argent existe dans ce pays !

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour présenter l’amendement n° 583 rectifié.

Mme Véronique Guillotin. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Tel que c’est parti, je n’imagine pas vous convaincre… Je vais tout de même, au risque de vous embêter, vous raconter l’histoire.

Le problème de l’engorgement des urgences, vous l’imaginez bien, ne va pas se régler avec cet article. Dans le cadre de la transformation de notre système de santé, nous souhaitons agir en profondeur sur l’offre de soins, notamment l’offre de proximité, afin de la rendre plus accessible, ce qui suppose de travailler sur l’amont.

Les CPTS que nous allons créer auront pour mission de mettre en place une permanence des soins non programmés. Cette permanence, qui n’existe pas dans leur cahier des charges, va réapparaître via une incitation financière. Nous espérons que le collectif de professionnels s’organisera pour améliorer cette permanence des soins.

Nous allons également équiper tous les EHPAD en télémédecine. Cet équipement, nous l’avons financé dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cela évitera des transports inutiles aux urgences des personnes âgées.

Sur l’aval – le rapport Carli en parlait beaucoup, comme vous l’avez rappelé, monsieur Jomier –, nous travaillons sur des filières de prise en charge dans les territoires, notamment via les CPTS.

Nous allons équiper tous les GHT du fameux logiciel de gestion des lits, qui permettra aux gestionnaires de lits et aux directions de trouver beaucoup plus facilement des lits disponibles, de faire des bascules de patients, etc.

Nous allons également développer l’offre de soins de suite et de réadaptation dans les hôpitaux de proximité. Nous savons que les SSR sont souvent saturés et trop centralisés. Notre objectif est de les rapprocher des territoires.

Nous augmentons évidemment le nombre d’urgentistes. Nous sommes passés à plus de 400 internes formés par an depuis la réforme du troisième cycle des études de médecine.

La réforme holistique vise donc à travailler sur l’amont, sur les urgences elles-mêmes et sur l’aval.

À cela s’ajoute la proposition d’Olivier Véran. Je ne reviendrai pas sur l’historique du rapport, mais l’idée est que nous devons faire de la pédagogie auprès de nos concitoyens qui se rendent aux urgences par facilité. Ils sont à peu près 20 % à n’avoir rien à y faire, mais, parmi ces 20 %, il n’y a qu’un petit pourcentage qui exagère vraiment, comme ceux qui viennent juste pour un renouvellement d’ordonnance.

On peut caricaturer cette mesure à l’envi, en se demandant qui va examiner les malades, en disant qu’on va renvoyer ceux qui font un infarctus… Il s’agit d’une expérimentation, avec un cadrage, pour favoriser la pertinence des soins et la financer.

D’une certaine façon, la pertinence, cela veut dire accepter de ne pas être rémunéré pour un acte qu’on ne fait pas. Ce n’est pas très incitatif d’être pertinent dans notre métier. Quand on veut changer les modes de tarification, il faut donc accepter de financer ceux qui ne font pas, parce que, pour la personne qui va renvoyer quelqu’un en disant « vous n’avez rien à faire aux urgences, on va vous trouver une maison de santé pluriprofessionnelle ouverte dans votre quartier », cela représente un temps de négociation.

Nous souhaitons mettre en œuvre ce dispositif dans les territoires où existe une offre de soins. Nous ne sommes pas idiots ! Nous n’allons pas le mettre en œuvre là où l’offre de soins est inexistante. Nous devons donc faire de la pédagogie dans les quelques territoires où cela peut avoir un intérêt et cadrer la mesure pour qu’il n’y ait aucune perte de chance pour les malades, l’enjeu n’étant évidemment pas de passer à côté d’un diagnostic grave. Mais enfin, il y a tout de même des gens qui viennent pour de la bobologie, qu’il s’agisse d’une petite plaie ou d’une entorse de cheville banale ! Quand il existe une offre de soins non programmés accessibles, il me paraît de bonne pratique de réadresser les malades.

J’ai entendu que vous souhaitiez faire une description assez caricaturale de cette mesure, alors qu’elle s’ajoute, vous l’avez bien compris, à un plan de transformation en profondeur de notre système de santé. C’est une petite cerise sur un énorme gâteau.

J’ai bien compris que vous souhaitiez supprimer cet article, mais je voulais vous expliquer pourquoi je l’ai accepté. Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je n’ajouterai pas aux propos de nos collègues mon propre désappointement face à cette mesure présentée par un collègue neurologue – par ailleurs médecin de qualité – Olivier Véran.

Madame la ministre, nous vivons dans une société où, parfois, de bonnes intentions sont exploitées médiatiquement, d’une manière contraire aux objectifs recherchés. D’ailleurs, les hommes politiques au plus haut niveau profitent des médias pour faire passer des messages, qui parfois passent bien et parfois passent mal.

En l’occurrence, le problème est qu’il est dit partout que quelqu’un qui arrivera aux urgences sans que ce soit justifié sera renvoyé vers un autre praticien et que celui qui n’aura rien fait d’autre que de le renvoyer touchera entre 20 et 60 euros de commission – veuillez me pardonner ce terme. Moi qui suis à la retraite, je rouvre mon cabinet demain si c’est pour refouler tous mes patients en gagnant à chaque fois 20 euros. Ce sera plus facile que de soigner. (Sourires.)

M. Michel Amiel. Ça, c’est de la caricature ! (Nouveaux sourires.)

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je sais bien, mais comme tout ce qui a été dit avant, selon Mme la ministre.

Nous vivons dans un monde où, malheureusement, parfois, les bonnes intentions peuvent ne pas être comprises par la population, faute d’explications adéquates ou parce qu’elles sont trop complexes.

En fait, le désengorgement des urgences passe plus par des maisons médicales au pied des urgences, peut-être aussi par l’embauche, par les hôpitaux, de médecins généralistes qui feraient le tri pour laisser passer les vraies urgences et pratiquer eux-mêmes les autres soins. Il s’agit davantage de ce genre de travail que de refouler les gens – c’est l’image qui en a été donnée – qui n’ont rien à faire aux urgences.

Soit on considère qu’il s’agit d’une forme de médiatisation pure et on en rigole un peu, soit on accepte la proposition et nombreux sont ceux qui risquent d’être choqués. Un autre exemple des victimes de la médiatisation, c’est ce que nous avons fait hier avec les OCAM.

Aujourd’hui, la médiatisation est particulièrement complexe, et votre collègue Gérald Darmanin l’a un peu exploitée hier soir. On dit partout que le prélèvement de 1 milliard d’euros va entraîner des augmentations de cotisations pour les retraités et pas pour les autres. Nous sommes tous, à un moment ou à un autre, victimes de ce genre de médiatisation.

Là, honnêtement, on ne peut ici, au Sénat, laisser passer une telle proposition, qui est probablement sérieuse, mais qui, d’un point de vue médiatique, est catastrophique. Je le redis, l’une des solutions serait de prévoir des maisons médicales à l’entrée des urgences,…

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. … avec des médecins généralistes et des spécialistes libéraux – il y en a quelques-uns dans les hôpitaux –, ou d’embaucher des médecins généralistes, qui feraient le travail avant les urgentistes.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je rejoins tout à fait les propos du président Milon : c’est en amont qu’il faut traiter le problème.

Deux solutions s’offrent à nous : des maisons de garde, qui se développent, mais pas encore assez – il faut encourager le mouvement, madame la ministre –, et la création d’un numéro unique des médecins de ville. Qu’attend-on pour le mettre en place ? Il paraît qu’une étude a été engagée : un membre de l’IGAS m’a confié avoir été chargé par Mme la ministre d’étudier la mise en place de ce numéro unique. Cela fait des années que j’en entends parler !

Il existe donc des solutions simples. Là où elles sont mises en œuvre, les urgences sont désengorgées.

Par ailleurs, se pose le problème du coût. Nombreux sont ceux qui viennent aux urgences parce que cela ne coûte rien. Il faut aussi trouver des solutions de nature à inciter les gens à ne pas passer aux urgences. Peut-être pourrait-on prévoir un tarif préférentiel la nuit ou, en tout cas, un remboursement de la sécurité sociale de nature à inciter les patients à ne pas passer aux urgences.

Il s’agit là de mesures de bon sens. Aussi, je m’étonne qu’on ne les ait pas encore testées. Vous parlez d’expérimentations. Expérimentez-les !

M. Michel Amiel. Ça existe à Marseille !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 rectifié bis, 72, 218 rectifié bis, 298, 462 rectifié, 518 et 583 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l’article 29 quinquies est supprimé.

Article 29 quinquies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 29 sexies - Amendement n° 538 rectifié

Article 29 sexies (nouveau)

La sous-section 3 de la section 5 du chapitre II du titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 162-22-17 ainsi rédigé :

« Art. L. 162-22-17. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités de récupération des sommes indûment facturées par des établissements de santé au titre des activités pour lesquelles ils ne disposent pas d’autorisation au sens de l’article L. 6122-1 du code de la santé publique. »

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Nous n’avons pas déposé d’amendements sur cet article, et nous proposons de l’adopter en l’état. Néanmoins, il soulève certaines interrogations que je souhaite vous soumettre.

Notre commission ne peut que souscrire aux objectifs visés : la garantie de la sécurité et de la qualité des soins dans les services hospitaliers, qui est une impérieuse nécessité. Le mécanisme prévu par cet article, à savoir la possibilité de récupérer auprès des établissements de santé les sommes indûment facturées au titre des activités pour lesquelles ils ne disposent pas d’autorisation, constitue un instrument supplémentaire pour inciter les établissements à respecter les seuils d’activité. Cependant, on comprend mal que des établissements puissent continuer de pratiquer des activités de soins sans respecter les seuils d’activité de sécurité. Pourquoi proposer une mesure financière plutôt que la fermeture de services qui n’offrent pas toutes les garanties de sécurité ?

Par ailleurs, on se demande comment des procédures de contrôle pourraient être plus efficaces en matière financière si elles ne permettent pas aujourd’hui d’intervenir auprès des établissements problématiques. Il me semble donc que c’est plus sur la bonne conduite des contrôles qu’il conviendrait de se pencher. Or les modifications apportées par l’ordonnance du 3 janvier 2018 au régime de visite de conformité des ARS nous conduisent à nous interroger sur la volonté de s’assurer du strict respect de ces règles par les établissements de santé. Ces visites devaient jusqu’alors être obligatoirement réalisées dans les six mois suivant la délivrance d’une autorisation d’activité ou d’équipement ; elles sont désormais facultatives.

En outre, les auditions ont fait émerger la question de l’adéquation de la définition des seuils fixés par voie réglementaire avec les conditions réelles de l’activité des établissements de santé. En effet, la définition du seuil se fait au niveau de l’établissement, mais elle ne rend pas compte en particulier de la réalité de l’activité pratiquée de manière individuelle par chacun des professionnels de santé y exerçant.

Une réforme des autorisations est en cours. Aussi, je vous demande, madame la ministre, de prendre en compte nos observations, et nous vous serions reconnaissants de nous donner quelques éléments d’information sur les questions que je viens d’évoquer.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Cet article me tient particulièrement à cœur. Il concerne un sujet sur lequel nous butons depuis de très nombreuses années.

Il apparaît dans la littérature internationale que, pour un certain nombre de cancers, le fait d’être opéré soit par un chirurgien qui n’a pas l’activité suffisante, soit par une équipe insuffisamment formée, soit par un hôpital ne disposant pas du plateau technique adapté – cela dépend du type de cancer : dans certains cas, c’est vraiment la responsabilité du chirurgien qui importe, dans d’autres, c’est le plateau technique –, a des conséquences sur les chances de guérison de certains malades.

Le plan Cancer 2014-2019 – il se trouve que je l’ai rédigé – avait pointé du doigt trois cas de figure assez dramatiques : le cancer de l’œsophage, certains cancers gynécologiques, celui de l’utérus, par exemple. Nous avions alors indiqué que ces activités ne pouvaient pas être réalisées en dehors des établissements ayant un seuil d’activité suffisant.

Force est de constater que, si certains hôpitaux ont les autorisations parce qu’ils atteignent les seuils d’activité, d’autres ne les ont pas, mais continuent malgré tout de pratiquer ces activités – nous le voyons au travers du codage du PMSI – et, parfois, en nombre important.

Il est possible que certains chirurgiens découvrent un cancer lors d’une intervention réalisée en urgence : un cancer du côlon, par exemple, alors qu’ils traitent une occlusion intestinale. Dans ce cas, on ne peut pas leur reprocher d’avoir opéré le patient. On peut le comprendre s’il y a un ou deux cas par an, pas s’il y en a des dizaines. Cela signifie qu’un certain nombre d’établissements, d’équipes ou de chirurgiens s’autorisent à pratiquer des interventions alors qu’ils n’en ont pas l’autorisation. Or toute la communauté nationale et internationale de professionnels sait que ces malades perdent entre 10 % et 20 % de chances de survie.

Nous n’avons pas trouvé d’autre moyen d’intervenir, car des autorisations existent déjà et ils ne les respectent pas. Nous ne pouvons pas fermer ces services, car, outre la faible activité consacrée à l’opération d’un cancer, ceux-ci ont une activité de chirurgie générale. Si nous fermons le service, la population locale perdra une compétence chirurgicale pour les autres pathologies habituelles. La fermeture n’est donc pas la solution.

Avec cet article, issu d’un amendement parlementaire que j’ai accepté, nous pensons que le fait de ne plus payer ces établissements ou ces professionnels pour ces actes-là était une bonne façon de diminuer une activité qui n’a pas lieu d’être et qui est problématique pour les quelques malades soignés dans ces établissements peu scrupuleux.

Je suis franchement favorable à cet article. Nous n’avons pas d’autres armes. Là aussi, c’est vraiment une question de pertinence.

M. le président. La parole est à M. Michel Amiel, sur l’article.

M. Michel Amiel. Je ne cherche pas à me rattraper, mais, cette fois, je vous donne mille fois raison, madame la ministre. Vous dites : là aussi, c’est une question de pertinence. Non, cette fois-ci, c’est de la pertinence, de la vraie pertinence !

Pour avoir longtemps été maire, j’ai pu parler de ces questions avec des collègues. C’est anecdotique, c’est vrai, mais le maire qui, pour des raisons qu’on peut imaginer, défend bec et ongles son hôpital de proximité ira évidemment se faire soigner dans un hôpital disposant du meilleur plateau technique s’il a un cancer un peu compliqué.

Il est évident qu’il ne s’agit pas de fermer de façon sèche, comme vous venez très justement de le dire, madame la ministre, tel ou tel établissement, mais il faut faire en sorte que le plateau technique soit adapté au type de chirurgie pratiqué, le cancer étant l’exemple par excellence. Cette mesure va véritablement dans le bon sens. Sur ce point, cela ne me pose aucun problème.

M. René-Paul Savary. Vous vous rattrapez bien ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Je partage tout à fait cette notion de pertinence.

Lors des auditions, on a parlé des seuils par établissement. Envisagez-vous la possibilité de prévoir des seuils individualisés ? Je prends au hasard le seuil de quarante ou quarante-cinq actes : ce n’est pas bien si quarante actes sont pratiqués, sauf si, sur trois chirurgiens, l’un pratique quarante actes et les deux autres très peu.

Avec un seuil par établissement, on ne tient pas compte du nombre de praticiens : l’un d’entre eux pourra ne pas faire beaucoup d’actes, mais il en fera suffisamment pour être considéré comme compétent. On bute donc un peu sur la notion de seuils globalisés.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. C’est toute la complexité du sujet : tout dépend du type de cancer.

Pour le cancer de l’œsophage, ce qui compte, c’est la qualité du plateau technique. Dans ce cas, le seuil au niveau de l’établissement est important. Pour d’autres cancers – je pense au cancer de l’ovaire –, c’est vraiment l’expérience du chirurgien qui compte.

Nous avons saisi la HAS pour définir le type de seuil que nous devons appliquer pour tel type d’intervention. En réalité, il n’y a pas de réponse binaire, d’où la complexité de la mesure. Cependant, nous devons, me semble-t-il, envoyer un signal : n’autorisons pas ce type de pratique.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Nous sommes d’accord !

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Aucun problème pour envoyer ce signal !

M. le président. Je mets aux voix l’article 29 sexies.

(Larticle 29 sexies est adopté.)

Article 29 sexies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 29 septies (nouveau)

Article additionnel après l’article 29 sexies

M. le président. L’amendement n° 538 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 29 sexies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 6111-3-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 6111-3-… ainsi rédigé :

« Art. L. 6111-3-… – I. – Aucun service ou établissement public de santé ne peut être fermé ou se voir retirer son autorisation, sans l’avis favorable du conseil de surveillance de l’établissement et de la conférence de santé du territoire, jusqu’à ce qu’une offre de santé au moins équivalente, pratiquant le tiers payant et les tarifs opposables soit garantie à la population concernée. La commission médicale d’établissement et le comité technique d’établissement sont également consultés. Leur avis est joint à ceux prononcés par le conseil de surveillance de l’établissement et la conférence de santé du territoire et adressé au directeur de l’Agence régionale de santé qui en tire toutes conséquences utiles.

« II. – Le I n’est pas applicable aux services et établissements publics de santé qui présentent un risque grave et imminent pour la santé et la sécurité des personnels, de ses usagers ou des personnes présentes à d’autres titres dans l’établissement.

« III. – Un décret en Conseil d’État précise les conditions dans lesquelles le directeur de l’Agence régionale de santé fait application du I, ainsi que les voies de recours devant l’autorité administrative. »

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Mon intervention va à l’encontre des arguments développés à l’article précédent. Avec mon groupe, nous présentons un amendement visant à instaurer un moratoire sur les fermetures d’établissements et de services de santé.

Je vous ai entendue, comme tout un chacun, madame la ministre, dire sur France Info que la réforme du système de santé ne prévoyait aucune fermeture d’un hôpital de proximité, ajoutant même qu’il y avait un mythe autour des fermetures des services d’urgences. Je cite vos propos : « Il y a parfois des services d’urgences qui ferment, mais il faut savoir que, globalement, nous avons 78 services d’urgences qui ont ouvert ces dernières années. »

Or on constate dans des territoires, qu’ils soient ruraux ou urbains, un recul du nombre de médecins, ce qui aboutit à des déserts médicaux. Dans le Lot, par exemple – mais je pourrais citer d’autres départements –, les gens rencontrent de grosses difficultés pour se soigner, y compris pour avoir accès à des établissements de proximité. Il est donc, selon moi, dangereux de parler de mythe.

Pouvez-vous dire aux patients et aux personnels des hôpitaux Bichat-Claude Bernard et Beaujon à Paris que la fermeture des services de l’hôpital et de la maternité est un mythe ? Pouvez-vous dire aux parents d’enfants malades de l’hôpital Raymond-Poincaré à Garches que les suppressions de lits sont un mythe ? Pouvez-vous dire aux habitantes et aux habitants ainsi qu’aux élus que la fermeture du Blanc est un mythe ? Pouvez-vous dire au personnel et au collectif de défense des hôpitaux de Longjumeau, Juvisy et d’Orsay que la fermeture de ces centres est un mythe ?

Ces fermetures conduisent à des difficultés importantes dans l’accès aux soins pour ces populations. Nous pensons qu’il serait bon, à un moment donné, de mettre les choses à plat avant de fermer un service ou un hôpital, en engageant une concertation avec les personnels, avec les patients, en vue de trouver les solutions qui s’imposent. Or ce n’est pas le cas aujourd’hui.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Même si l’on entend les difficultés que peut représenter, dans les territoires, la fermeture d’établissements, il faut aussi tenir compte des enjeux sanitaires. C’est toujours, il est vrai, un cruel dilemme entre la proximité et la qualité des soins. Toutefois, nous ne sommes pas favorables à cette demande de moratoire sur les fermetures d’établissements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Il s’agit d’un sujet très douloureux pour nos concitoyens.

Madame Cohen, cela m’étonne que j’aie utilisé le mot « mythe », car cela ne me ressemble pas de dire qu’il y a un mythe concernant la fermeture de services des urgences. Il y a des services d’urgences qui ferment, je ne le nie pas. Je disais simplement que, au total, il y a eu plus d’ouvertures de services des urgences que de fermetures. En outre, des adaptations de notre offre de soins peuvent simplement être liées à un flux de population : on le sait, certains territoires sont en « déprivation », tandis que d’autres sont plutôt en augmentation.

Cela étant dit, nous nous heurtons parfois à des difficultés de fonctionnement des hôpitaux, faute de pouvoir recruter des professionnels. J’hérite malheureusement d’une situation – j’aurais été ravie de ne pas avoir à gérer cela – qui découle de décisions qui ont été prises il y a vingt ans.

Vous me parlez de la fermeture de la maternité du Blanc. Je ne souhaite pas fermer cette maternité ; d’ailleurs, je ne souhaite fermer aucune maternité. Mon objectif dans la vie n’est ni de fermer une maternité ni de supprimer l’accès aux soins pour nos concitoyens. Les seuls cas où des fermetures ont été demandées concernent les établissements où la sécurité des patients est en jeu : quand il y a des trous dans le tableau de garde d’un service d’urgence ou d’un service d’obstétrique un jour sur deux, quand on ouvre un service d’obstétrique, mais sans pédiatre… Je me dois d’être garante de la sécurité des gens. Je ne peux pas me satisfaire de telles situations et considérer qu’elles ne présentent pas de risques, sous prétexte que les élus font pression – même si je comprends la douleur que ces fermetures représentent.

Concernant la maternité du Blanc, on m’a expliqué qu’elle fonctionne avec deux obstétriciens de plus de soixante-dix ans à la retraite… Je veux simplement dire aux élus qu’ils n’enverraient peut-être pas leur fille accoucher dans cette maternité.

Le seul engagement que je prends devant les Français, c’est de leur assurer la même qualité de soins que celle que je demande pour ma famille. Je pense que c’est le contrat que j’ai avec eux. Il serait effectivement beaucoup plus facile de dire aux élus : ne vous inquiétez pas, je ne ferme rien. Mais il n’y a pas de professionnels pour accepter les postes, et on met les patients en danger. Nous devons gérer cette situation collectivement.

Je veux bien qu’on m’attaque sur le fait que je veuille fermer des maternités et des services d’urgences, mais je n’ai pas accepté le ministère de la santé pour fermer des services ! Simplement, face à une démographie catastrophique dans certaines disciplines, que je n’ai pas souhaitée et dont je ne suis pas responsable, je prends des décisions plutôt courageuses, malheureusement, parce que je n’ai pas le choix pour la sécurité des patients.

Nous essayons évidemment de prendre ces décisions en concertation avec les conseils de surveillance et les élus, mais, dans certains départements, elles passent mal. Nous essayons de trouver des solutions de repli, d’aménagement, des alternatives de façon à permettre aux citoyens d’être rassurés sur notre capacité à les prendre en charge : ce peut être une offre en matière de transport ou, en obstétrique, des lits en périnatalité, par exemple, un service qui prépare très bien les grossesses et gère très bien l’après-accouchement.

J’entends ce que vous me dites, mais, sincèrement, vous me faites un mauvais procès. La seule politique que je mène aujourd’hui, c’est une politique en faveur de la qualité. Je ne fais rien sans prendre l’attache des conseils de surveillance, et les ARS ont ordre, de ma part, de prendre l’attache des élus, de négocier. J’entends bien que les élus sont face à leurs concitoyens et qu’ils expriment leurs demandes. Mais nous avons la responsabilité collective, me semble-t-il, d’assumer une situation particulièrement compliquée.

Je persiste à le dire, la totalité de mes décisions n’est jamais dictée, je peux vous le promettre, par des raisons financières pour ce qui concerne la fermeture de services de proximité ; elles sont uniquement prises pour des raisons de sécurité. Voilà pourquoi je suis défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Troendlé, pour explication de vote.

Mme Catherine Troendlé. Madame la ministre, je vous fais confiance. Je pense que vous êtes sincère. Néanmoins, permettez-moi de prendre la situation particulière du Haut-Rhin.

On a commencé à fermer la maternité du petit hôpital de Saint-Louis. Dont acte ! Cette décision a été prise en concertation, les élus l’ont acceptée. Récemment, on a fermé le service des urgences de l’hôpital de Thann, un hôpital de proximité se trouvant sur un territoire routier accidenté à une heure trente de Mulhouse. Nous avons réussi à faire basculer les urgences vers l’hôpital de Mulhouse, en signant une convention avec le SDIS : ce sont les sapeurs-pompiers qui vont assurer les transferts.

M. René-Paul Savary. À quel prix ?

Mme Catherine Troendlé. Désormais, au nom d’une réorganisation, l’ARS veut fermer la maternité. Il en est de même pour le petit hôpital de proximité d’Altkirch.

Sur notre territoire, il n’y aura plus de maternités de proximité ; tout sera à Mulhouse. Certes, il y a un très grand hôpital, un très grand bâtiment a ouvert pour abriter un pôle mère-enfant, mais j’ai quand même l’impression – pardonnez-moi de le dire – qu’il faut remplir ce nouveau bâtiment !

Derrière tous ces projets, je n’ai pas l’impression, pour connaître des personnels de santé, que les moyens sont là pour assurer la prise en charge ; je pense, notamment, aux médecins, aux infirmières et aux puéricultrices. Vous êtes certainement sincère, madame la ministre, mais les ARS, j’en suis certaine, sont quand même dans une démarche purement financière. Avec l’exemple du Haut-Rhin, prenez le temps de le vérifier, vous verrez que je ne suis pas loin de la réalité : la décision est surtout dictée par le financier.

Madame Cohen, je voterai votre amendement. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Nadia Sollogoub applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour explication de vote.

Mme Patricia Schillinger. Ma collègue Catherine Troendlé, qui est sénatrice du même territoire que moi, a très bien expliqué notre problématique. Pour ma part, je tiens à dire que, quand une maternité disparaît, les gynécologues partent aussi. Se pose donc la question de la prévention.

Vous le savez très bien, quand le gynécologue se trouve à trente kilomètres, les femmes qui vivent au fin fond de la vallée ne font plus de prévention. Entre cinquante-cinq et quatre-vingts ans, elles ne vont pas chez le généraliste et elles ne font plus les examens, parce qu’il est compliqué d’aller en ville.

L’ARS nous a dit que la fermeture était décidée et qu’il n’y aura plus de maternité au printemps. Pour nous organiser, ça va être très compliqué ; il faudrait nous laisser du temps. Je sais que le président de la région Grand Est a indiqué qu’il voulait travailler sur ce dossier. Au lieu de fermer en trois mois, on pourrait prendre au moins un an ou deux pour nous permettre de nous organiser dans les territoires.

Cet amendement est un appel. On sait très bien que la prévention est une question importante. Or, on vit cette situation depuis quelques mois dans nos territoires, on ne prête plus d’attention à la prévention. Nous attendons de vous une réponse, madame la ministre. La question se pose surtout pour les ARS, qui prennent des décisions beaucoup trop rapidement.

On nous annonce la fermeture de deux maternités ; à Mulhouse, il y aura 3 500 accouchements pour 7 salles d’accouchement. Pour moi, c’est la chaîne.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Je n’avais pas l’intention de parler de mon territoire – je ne confonds pas le débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale et les questions orales sans débat –, mais je veux intervenir, car vous avez dit, madame la ministre, que vous n’étiez pas là pour fermer des maternités. Je vous en fais crédit – ce n’est effectivement pas la conception que vous avez de votre fonction. Pour autant, ces fermetures n’ont pas lieu sans votre accord, en dehors de votre tutelle.

Vous avez affirmé qu’il n’y avait aucune fermeture de maternité, sauf cas particulier de mise en danger des patientes ou de difficultés précises. Je prendrai un exemple, celui du département de l’Oise, proche de l’Île-de-France, mais sans en faire partie.

Deux maternités sont en voie de fermeture. J’insisterai surtout sur celle de Creil, une maternité de niveau 2, ce qui signifie qu’elle n’est pas en difficulté, avec 1 700 accouchements par an. Il s’agit donc d’une maternité dont l’activité est importante et se situe bien au-delà du seuil de rentabilité des maternités. Cette maternité va être déplacée pour fusionner avec une autre, qui compte, elle aussi, 1 700 accouchements par an. À vingt-cinq kilomètres de là, des menaces très lourdes pèsent depuis longtemps sur la maternité de Clermont.

Dans un rayon de vingt-cinq kilomètres, ce sont donc deux maternités qui vont fermer. J’appelle votre attention sur les conséquences de ces fermetures en termes de politique de la ville : imaginez ce que cela signifie dans le bassin du Creillois, qui compte 80 000 habitants, où 40 % de la population est très pauvre et n’a pas de véhicule, en termes de prise en charge, de prévention, d’accompagnement des familles, de demander aux femmes de se rendre dans une maternité qui se trouve à quinze kilomètres de leur ville, sans transports en commun. Cette décision est inutile sur le plan fonctionnel, dramatique sur le plan social et dangereuse sur le plan sanitaire.

Des menaces importantes pèsent donc bien aujourd’hui sur les maternités. C’est pourquoi je voterai l’amendement de Mme Cohen.

M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour explication de vote.

M. Max Brisson. Je n’avais pas moi non plus l’intention d’intervenir. J’ai beaucoup de respect pour vous, madame la ministre, je vous l’ai dit lorsque vous êtes venue à Biarritz, mais vos propos m’ont beaucoup choqué parce qu’ils sont démagogiques.

Vous avez affirmé que vous vouliez donner aux Français la même qualité de soins que celle que vous voulez pour votre famille. Je veux vous demander à vous, madame la ministre, qui avez fermé la maternité d’Oloron-Sainte-Marie, si vous pensez, très raisonnablement, qu’une future maman habitant Urdos, qui, un jour de brouillard, doit aller accoucher à Pau, a le même accès aux soins qu’un membre de votre famille ? Vos propos sont profondément choquants. Non, ce n’est pas le cas ; elle ne bénéficie pas du même accès aux soins. En fermant des maternités sur les territoires français, vous creusez les inégalités en matière d’accès aux soins.

Jean Lassalle vous l’a dit avec beaucoup de force – je n’ai pas son talent, et je ne chanterai pas dans l’hémicycle –, le maire d’Oloron et tous les élus se sont battus pour empêcher la fermeture de cette maternité : la vallée d’Aspe, la vallée d’Ossau, des villages, ainsi que des familles, madame la ministre. Ces dernières sont maintenant à trois heures de la maternité de Pau et ne bénéficient donc pas d’une qualité de soins identique à celle que vous demandez pour votre famille.

M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour explication de vote.

Mme Nadia Sollogoub. Madame la ministre, nous en sommes tous conscients, vous faites des choix difficiles. Je pose la question – je vous en ai déjà parlé – de l’installation des généralistes dans des milieux ruraux, qui sont, on nous le reproche parfois, difficilement attractifs.

Les élus consentent beaucoup d’efforts : on se met en quatre pour leur trouver des maisons, des secrétaires ; on est prêt à leur payer la voiture, tout ce qu’ils veulent, le restaurant, etc. ; on leur organise des week-ends d’intégration ; on met en place des maisons de santé. Mais, techniquement, si le service des urgences est trop éloigné, ils ne peuvent pas prendre en charge les patients en première instance. Si l’on ne peut pas transférer le service des urgences dans leur périmètre d’activité, ils se trouvent dans des situations beaucoup trop difficiles en termes d’assurances et de sécurité dans l’exercice de leur profession, et on perd directement notre attractivité.

On ne peut donc pas faire venir des généralistes si les urgences ne sont pas accessibles pour les patients : ils ne prendront pas le risque de venir s’installer chez nous. C’est un véritable problème.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Pour ma part, je soutiens pleinement les propos de Mme la ministre.

Mme Schillinger et Mme Troendlé ont pris la parole pour protester contre la fermeture de services de maternité en Alsace. Que je sache, la caisse d’assurance maladie d’Alsace n’est pas déficitaire, contrairement à la Caisse nationale d’assurance maladie. Les décisions n’ont donc pas été prises pour des raisons financières ; c’est uniquement des questions de sécurité et de plateau technique qui sont en jeu.

Mme la ministre a dressé un constat que la commission des affaires sociales rappelle souvent : on ne peut pas se permettre de maintenir des maternités sans obstétricien, et, quand il y a des obstétriciens – certains ont quand même un peu moins de soixante-dix ans –, sans anesthésiste…

Mme Catherine Troendlé. Il faut donc laisser les femmes faire deux heures de route ?

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. … ou sans sages-femmes en nombre suffisant pour assurer une ouverture vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Puisque chacun a parlé de sa région, je vais parler un instant du département dont je suis l’élu. Depuis l’origine, je suis favorable aux deux fermetures de maternités proposées par l’ARS de Provence-Alpes-Côte d’Azur. Mme la ministre est d’ailleurs allée inaugurer un service d’urgences dans l’un des hôpitaux où je me suis prononcé pour la fermeture de la maternité.

On ne peut pas prendre le risque qu’un incident survienne dans une maternité, faute de médecins en nombre et en qualité suffisants. Imaginez un seul instant que l’on maintienne la maternité de Valréas et que, dans ce service, une rupture utérine ait lieu. Imaginez que la femme dont il s’agit, et dont l’accouchement était eutocique à l’origine, décède dans l’hôpital, parce que l’on n’avait ni chirurgien ni anesthésiste, mais uniquement une sage-femme : c’est absolument inadmissible. (Mme la ministre acquiesce.)

Honnêtement – je le dis, au risque de choquer un peu –, je préfère un accouchement eutocique normal dans une ambulance des pompiers, lors du transport vers un hôpital où le plateau technique est complet, à une rupture utérine dans un hôpital ne disposant pas du plateau technique suffisant.

Il ne s’agit pas d’embêter les élus et les populations ou de prendre des décisions de nature financière. Il s’agit simplement d’assurer la sécurité des femmes enceintes qui accouchent, un point c’est tout !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur le président de la commission, je vous remercie de votre honnêteté, et je vous sais gré de dire la vérité.

Monsieur Brisson, je suis navrée, et même meurtrie, de la fermeture de la maternité que vous évoquez. Mais, si l’on ferme des maternités aujourd’hui, c’est tout simplement faute d’obstétriciens.

M. Max Brisson. Il vous en a été présenté un !

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je ne peux pas aborder chaque cas particulier : tous les orateurs ont mentionné une maternité, un service d’urgences bien précis.

Mme Patricia Schillinger. Il faut seulement du temps et de l’organisation !

Mme Agnès Buzyn, ministre. Aujourd’hui, dans certains hôpitaux, nos services d’urgences ou nos services d’obstétrique travaillent avec des listes de garde incomplètes. Ainsi, des personnes peuvent débarquer en toute bonne foi aux urgences ou dans une maternité où elles trouveront des infirmières, une sage-femme, mais pas de médecin !

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Pas de personnel compétent !

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je ne peux pas prendre le risque de laisser ouverts de tels services ; ce sont des enjeux de sécurité. J’y insiste : le sujet n’est en aucun cas financier. Les postes sont ouverts.

J’ajoute que nous ne sommes pas le seul pays à subir cette situation. Nos voisins européens en souffrent aussi. Je m’en suis entretenue avec mon homologue allemand : l’Allemagne connaît la même problématique de démographie. De toute évidence, aucun pays n’a anticipé le fait que les médecins allaient travailler différemment ; qu’ils allaient, tout simplement, changer leur temps de travail, leurs habitudes de vie. Aucun pays européen n’a vu cette transition arriver.

Tous ces États souffrent donc de problèmes démographiques, qui imposent des réorganisations en profondeur. C’est ce que j’essaye en toute bonne foi de mettre en place, en m’efforçant d’accélérer le rythme.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à rassurer les quelques-uns d’entre vous qui ont affaire à la transformation de services d’obstétrique en services de périnatalité. Un service de périnatalité, c’est un plus pour les femmes : il permet une prise en charge très attentionnée, très attentive, en amont et en aval de l’accouchement, grâce à du temps dédié, grâce à la présence de psychologues. La relation mère-enfant est travaillée.

Nous essayons de trouver des solutions. Mais, aujourd’hui, mon seul sujet à ce titre est d’ordre démographique. Je ne ferme pas une maternité pour la fermer ; je la ferme tout simplement parce qu’il n’y a pas de professionnels. Dans beaucoup d’endroits, nous n’en trouverons pas avant plusieurs années, malgré notre souhait d’accélérer les formations. Le numerus clausus a été doublé. Les médecins vont arriver, mais il faut dix à quinze ans pour former un professionnel.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. En effet, il faut du temps !

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, simplement une question : quand vous prenez votre voiture, exigez-vous qu’il y ait un hôpital à l’endroit où vous avez un accident ?

Mme Patricia Schillinger. On ne peut pas comparer !

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Avant que nous ne procédions au vote, j’insiste sur le moratoire que tend à instaurer cet amendement : il s’agit de bloquer les fermetures d’établissements.

Bien sûr, j’entends ce que disent nos collègues. Mais, Mme la ministre l’a souligné, on ne peut pas maintenir des établissements où la sécurité n’est pas assurée. Qui sera responsable en cas d’accident ?

Mes chers collègues, j’appelle vraiment votre attention sur la notion de moratoire.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Mme Laurence Cohen. Madame la ministre, ce débat montre que tout ne se passe pas sous un ciel serein. Je crois en votre parole, je crois tout à fait en l’honnêteté de vos propos : à aucun moment je ne la mets en doute. Mais, quand vous opérez des choix, ils se répercutent, ils sont mis en œuvre, et ils ne sont pas appliqués au cas par cas.

Personne ici ne souhaite mettre en danger la santé de qui que ce soit. Personne ne souhaite que les femmes qui vont accoucher ne disposent pas d’une sécurité totale. Mais les quelques exemples qui vous sont donnés, et qu’on pourrait multiplier, montrent que les décisions que vous prenez posent quand même un petit problème. En effet, on concentre dans quelques établissements un nombre d’accouchements extrêmement élevé.

Mme Laurence Cohen. Sur le papier, on affirme qu’il est possible de procéder ainsi. Mais, géographiquement, les réalités sont différentes : on ne se déplace pas de la même façon dans tous les territoires. Laurence Rossignol a parlé de populations précaires, qui n’ont pas de véhicule, même si, objectivement, ce constat ne vaut pas pour tout le territoire français. Une autre de mes collègues a cité un exemple précis dans le département du Haut-Rhin. Il faut que vous entendiez cela.

Les professionnels que j’ai rencontrés, et qui m’ont alertée sur ces cas, connaissent le terrain, connaissent les patients et ont intérêt à leur bonne santé. Ils sont très inquiets ; c’est ce qui m’a le plus frappée.

Monsieur le président de la commission, je vous le dis avec tout le respect que je vous dois : un accouchement dans une voiture, c’est tout sauf sûr !

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Pas dans une voiture, dans une ambulance des pompiers !

Mme Laurence Cohen. À ce titre, je trouve qu’on est aussi un peu léger… Et, au-delà des maternités, d’autres services sont en danger.

Enfin, madame la ministre, j’ai mentionné un article bien précis, qui cite vos propos entre guillemets en signalant que vous avez parlé de mythe. Si vous n’aviez pas employé ce terme, il faudrait, le cas échéant, engager des poursuites contre les journalistes ; mais je ne me serais pas permis de déformer vos propos.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. La phrase a été sortie de son contexte !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 538 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 29 sexies - Amendement n° 538 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 29 octies (nouveau)

Article 29 septies (nouveau)

Le 1° du I de l’article L. 162-31-1 du code de la sécurité sociale est complété par un e ainsi rédigé :

« e) Développer la compréhension des patients et leur participation active à leur parcours de soins, tant à titre préventif que curatif, notamment via l’éducation thérapeutique ; ».

M. le président. L’amendement n° 73, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’article 29 septies, qui a été inséré par l’Assemblée nationale et qui vise à étendre le champ des expérimentations pour l’innovation au sein du système de santé aux initiatives en matière d’éducation thérapeutique.

Nous ne sommes pas opposés à ces dispositions en tant que telles, mais il nous a semblé que l’objectif était déjà pris en compte par l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018. On ne peut optimiser le parcours de santé et la qualité des prises en charge sans associer étroitement le patient. Le présent article nous semble donc redondant, et nous demandons sa suppression afin de ne pas charger la loi.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 73.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 29 septies est supprimé.

Article 29 septies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 30

Article 29 octies (nouveau)

I. – L’article 24 de la loi n° 68-690 du 31 juillet 1968 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier est abrogé.

II. – Le chapitre X de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière est ainsi modifié :

1° L’article 116 est ainsi modifié :

a) Le deuxième alinéa est supprimé ;

b) À la première phrase du troisième alinéa, le mot : « également » est supprimé ;

2° Il est ajouté un article 116-2 ainsi rédigé :

« Art. 116-2. – L’École des hautes études en santé publique mentionnée à l’article L. 756-2 du code de l’éducation perçoit des ressources comprenant des subventions, avances, fonds de concours et dotation de l’État. Elle perçoit également une dotation des régimes obligatoires d’assurance maladie composée de deux parts : l’une au titre du financement des traitements et indemnités, y compris les indemnités à caractère familial, ainsi que les charges sociales afférentes, versés par l’école aux personnels des établissements mentionnés à l’article 2 de la présente loi, astreints à un stage de formation professionnelle, et l’autre au titre de la contribution de l’assurance maladie au fonctionnement de l’établissement, dont le montant est fixé chaque année par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. La participation des organismes d’assurance maladie est versée et répartie entre les régimes dans des conditions fixées par décret. »

III – Les I et II entrent en vigueur le 1er janvier 2020.

M. le président. L’amendement n° 409 rectifié, présenté par MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, M. Fichet, Mme Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, Joël Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. Nous abordons à présent un sujet un peu moins grave que celui dont nous venons de débattre.

Les auditions que nous avons pu mener pour préparer l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale nous conduisent à penser qu’il n’y a pas lieu de changer le mode de financement de l’École des hautes études en santé publique, l’EHESP, et du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière, le CNG.

Aujourd’hui, ce mode de financement semble convenir aux acteurs concernés. En effet, les établissements souhaitent rester financeurs. Ils craignent que la fin du lien financier ne présage celle du lien organique et fonctionnel, à terme.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Cet amendement a pour objet de supprimer l’article 29 octies, lequel porte sur le financement de l’EHESP et du CNG. Actuellement, 2 300 établissements de santé leur doivent une contribution. Il s’agit là d’un processus lourd, complexe, impliquant l’émission de plusieurs milliers de titres de recettes. Pour la commission, un financement direct par les organismes d’assurance maladie, tel qu’il est détaillé dans cet article, paraît préférable. À nos yeux, il est plus opérationnel et plus sécurisant financièrement pour les établissements.

Certes, les établissements financeurs ont pu craindre que le lien existant entre eux et les établissements financés ne soit rompu. Mais ce ne sera pas le cas : ils continueront de disposer de représentants au conseil d’administration de l’EHESP et du CNG. En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je confirme les propos de Mme Deroche : il ne s’agit en aucun cas de modifier la gouvernance de ces établissements. Les représentants des hôpitaux et des fédérations continueront d’y participer comme aujourd’hui. Nous proposons simplement une simplification administrative. La tuyauterie de financement était complexe – elle reposait notamment sur des taxes. D’autres établissements sont d’ores et déjà financés exclusivement par l’assurance maladie. À nos yeux, ce choix est plus sain et plus simple.

Aussi, le Gouvernement demande lui aussi le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. Monsieur Daudigny, l’amendement n° 409 rectifié est-il maintenu ?

M. Yves Daudigny. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 409 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 463 rectifié, présenté par MM. Jomier, Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais, Jasmin, Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet, Antiste, Joël Bigot et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…) la dernière phrase du troisième alinéa est ainsi rédigée : « Un décret fixe les modalités de participation des organismes d’assurance maladie, de versement et de répartition entre les régimes, ainsi que les conditions de représentation des établissements mentionnés à l’article 2 de la présente loi dans les organes de gouvernance du centre national de gestion. » ;

II. – Alinéa 7, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Un décret fixe les modalités de participation des organismes d’assurance maladie, de versement et de répartition entre les régimes, ainsi que les conditions de représentation des établissements mentionnés à l’article 2 de la présente loi dans les organes de gouvernance de l’École des hautes études en santé publique.

La parole est à M. Bernard Jomier.

M. Bernard Jomier. Cet amendement a lui aussi pour objet l’EHESP et le CNG. Toutefois, Mme la ministre vient de nous donner des assurances quant au maintien des établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, qui représentent en quelque sorte les employeurs, dans la gouvernance de ces établissements. Aussi, je retire mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 463 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 29 octies.

(Larticle 29 octies est adopté.)

Article 29 octies (nouveau)
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Article additionnel après l'article 30 - Amendement n° 164 rectifié ter, n° 362 rectifié ter et n° 519

Article 30

I. – Le 5° bis de l’article L. 213-1 du code de la sécurité sociale est complété par la référence : « et à l’article L. 642-4-2 ».

II. – La section 1 du chapitre II du titre IV du livre VI du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 642-4-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 642-4-2. – I. – Les médecins exerçant leur activité à titre de remplacement ainsi que les étudiants en médecine remplissant les conditions prévues à l’article L. 4131-2 du code de la santé publique mentionnés à l’article L. 646-1 du présent code et dont les rémunérations issues de l’activité de remplacement sont inférieures à un seuil fixé par décret peuvent opter pour un taux global et le calcul mensuel ou trimestriel de l’ensemble des cotisations et contributions sociales dont ils sont redevables. Le taux global, fixé par décret, est appliqué par référence aux taux des contributions et cotisations sociales applicables aux revenus des médecins mentionnés au 1° du même article L. 646-1 au montant de leur rémunération après abattement prévu à l’article 102 ter du code général des impôts. Ce décret fixe également les règles d’affectation des sommes versées entre les différents régimes ou branches concernés.

« II. – L’option pour l’application des dispositions mentionnées au I est exercée auprès de la caisse mentionnée aux articles L. 211-1 et L. 752-4 dans la circonscription de laquelle sont exercées les activités de remplacement. Cette caisse assure, en lien avec les médecins ou les étudiants concernés et les organismes mentionnés au III du présent article, la réalisation des déclarations nécessaires à ces activités.

« III. – La déclaration des rémunérations et le paiement des cotisations et des contributions sociales qui en découlent sont effectués par les médecins et les étudiants remplaçants mentionnés au I au moyen d’un téléservice mis en place à cette intention par les organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4. »

III. – À la seconde phrase de l’article L. 644-2 du code de la sécurité sociale, après le mot : « conjoints-collaborateurs », sont insérés les mots : « et les personnes ayant fait valoir l’option prévue à l’article L. 642-4-2 ».

IV. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2020.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, sur l’article.

M. Jean-Louis Tourenne. Madame la ministre, je tiens à évoquer un sujet que, comme la plupart de nos collègues, vous connaissez bien : il s’agit des médecins dits « intérimaires », quand on veut être bienveillant, ou « mercenaires », quand on l’est moins et que l’on s’attache davantage à la réalité.

Ces médecins coûtent extrêmement cher aux hôpitaux. Ils ont des exigences énormes, tout simplement parce que l’on a besoin d’eux. Soit ils viennent en remplacement, et l’on n’a pas d’autre choix que de recourir à eux ; soit les services, notamment les urgences, traversent une période difficile, et l’on est également contraint de les solliciter.

Ces praticiens peuvent se faire payer entre 2 000 et 3 000 euros par jour, ce qui est totalement excessif. En outre, quand il a été décidé de plafonner leur rémunération dans les hôpitaux publics, leurs syndicats ont décidé de boycotter ces établissements. Il s’agit là d’un déni du serment d’Hippocrate, qui pose de graves questions morales.

Je le sais, vous êtes convaincue de la nécessité d’intervenir. Où en est-on aujourd’hui, parvient-on à résoudre le problème ? Je vous pose la question, même si je sais qu’il s’agit d’un problème extrêmement délicat et difficile.

M. le président. L’amendement n° 319 rectifié, présenté par Mmes Lienemann et Cukierman, n’est pas soutenu.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur Tourenne, j’ai effectivement souhaité réguler la rémunération de ces « mercenaires » des hôpitaux publics. À cette fin, j’ai publié, en octobre 2017, un décret visant à imposer un plafond de 1 500 ou 1 800 euros – je n’ai plus le chiffre exact en tête. En tout cas, le montant était dégressif d’année en année, le but étant d’éviter des rémunérations outrancières, de l’ordre de 2 000 ou 3 000 euros, qui grèvent considérablement le budget des établissements concernés.

Vous le savez, j’ai fait face à la fronde d’un certain nombre de syndicats. Aujourd’hui, est paru dans la presse le fait que le ministère portait plainte contre ces syndicats de médecins remplaçants, qui ont décidé de boycotter nos hôpitaux publics. À mon sens, cette attitude n’est pas déontologique. (Mme Michelle Meunier opine.)

C’est un rapport de force qui s’est engagé. Pour l’instant, je tiens bon. Mais il faut que tous les hôpitaux jouent le jeu : si certains pratiquent des tarifs hors normes,…

M. Guillaume Arnell. C’est ce qui se passe !

Mme Agnès Buzyn, ministre. … je n’y arriverai pas. Il faut que le service public tout entier, notamment les ARS et les hôpitaux, tienne compte du décret que j’ai publié. S’il y a le moindre trou dans la raquette, les médecins en question vont évidemment en profiter.

M. le président. Je mets aux voix l’article 30.

(Larticle 30 est adopté.)

Article 30
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Article additionnel après l'article 30 - Amendement n° 165 rectifié bis

Articles additionnels après l’article 30

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L’amendement n° 164 rectifié ter est présenté par Mme Grelet-Certenais, MM. Bérit-Débat et Cabanel, Mmes Conconne et Conway-Mouret, M. Duran, Mme Espagnac, M. Fichet, Mme M. Filleul, M. Jacquin, Mmes Jasmin, G. Jourda et Lubin, MM. Madrelle, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Préville, M. Roger, Mme Taillé-Polian et MM. Todeschini et Vaugrenard.

L’amendement n° 362 rectifié ter est présenté par MM. Tissot et Tourenne, Mme Ghali et MM. Iacovelli, P. Joly et Raynal.

L’amendement n° 519 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 30

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 4131-6 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 4131-6-… ainsi rédigé :

« Art. L. 4131-6-… – Dans les zones définies par les agences régionales de santé en concertation avec les organisations syndicales représentatives des médecins au plan national dans lesquelles est constaté un fort excédent en matière d’offre de soins, le conventionnement à l’assurance maladie d’un médecin libéral ne peut intervenir qu’en concomitance avec la cessation d’activité libérale d’un médecin exerçant dans la même zone.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. »

La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour présenter l’amendement n° 164 rectifié ter.

Mme Nadine Grelet-Certenais. Avec cet amendement, nous retrouvons le véritable serpent de mer de nos débats relatifs au PLFSS.

Notre proposition est la suivante : dans certaines zones, définies par les ARS en concertation avec les syndicats médicaux, présentant une densité médicale qui permet une offre de soins satisfaisante, un nouveau médecin libéral ne peut s’installer en étant conventionné à l’assurance maladie que lorsqu’un médecin libéral de la même zone cesse son activité. Le principe de la liberté d’installation demeure donc, mais le conventionnement n’est possible que de manière sélective pour les nouvelles installations.

Il s’agit bien de traiter une problématique profonde de nos territoires, notamment ruraux. Je veux bien sûr parler de la désertification médicale ; il n’est question que de cela.

Il faut apporter une réponse politique forte à cet enjeu majeur. Ces dispositions, que notre assemblée a déjà adoptées par le passé, pourraient changer la donne pour nos territoires qui souffrent cruellement de ce sentiment d’abandon. Ce serait là un message très fort.

Les maisons de santé peuvent quelquefois être de véritables points d’appui, des relais de soins et des structures complémentaires lorsqu’elles sont implantées à proximité d’un hôpital. C’est le cas, au Bailleul, du pôle santé Sarthe et Loir, le PSSL, où quelques spécialistes peuvent assurer des rendez-vous décentralisés.

Lorsque les hôpitaux de proximité n’ont plus les moyens de fonctionner, faute de professionnels ou par suite de difficultés liées aux plateaux techniques, les populations en subissent les conséquences, à savoir la perte de soins.

Madame la ministre, vous le savez, c’est un vrai sujet, dans la Sarthe comme ailleurs. Ce PLFSS ne répond malheureusement pas à la détresse de nos concitoyens. Je vous avais déjà interpellée l’été dernier quant au problème de l’accès aux soins, notamment à l’IVG, qui a déclenché une vive polémique médiatique.

On constate quotidiennement les ravages que provoque le manque de médecins dans nos campagnes. À ce titre, l’exemple de l’hôpital de Saint-Calais est très marquant. Toute la population est mobilisée pour préserver le service des urgences. Le problème du recrutement a, en l’occurrence, un impact direct sur le maintien de l’accès aux soins, sujet dont nous avons débattu il y a quelques instants.

Je peux comprendre que cet amendement inspire quelques réticences. Mais, dans ce cas, pourquoi ne pas accepter le principe d’une expérimentation ? C’est ce que nous vous proposerons à travers l’amendement n° 165 rectifié bis. La démographie médicale est une affaire politique dont il faut que nous nous saisissions.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 362 rectifié ter.

M. Jean-Louis Tourenne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 519.

M. Fabien Gay. Entre 2012 et 2016, l’accès aux médecins spécialistes s’est réduit pour 38 % des Français, pour ce qui concerne les ophtalmologistes. Ce taux est de 40 % pour ce qui concerne les pédiatres. Il atteint même 59 % pour ce qui concerne les gynécologues.

Face à la désertification médicale, aux délais de rendez-vous de plus en plus longs et à la pénurie de spécialistes, la majorité promet des mesures incitatives. Pourtant, comme le démontre le rapport de la commission d’enquête sur l’égal accès aux soins, aucune des multiples mesures incitatives des dernières décennies n’a fonctionné.

Nos collègues députés ont déjà proposé cet amendement, en vertu duquel, dans les zones présentant un fort excédent en matière d’offre de soins, un nouveau médecin libéral ne peut s’installer en étant conventionné à l’assurance maladie que lorsqu’un médecin libéral de la même zone cesse son activité. Madame la ministre, vous leur avez répondu : « Le conventionnement sélectif n’a fonctionné nulle part en Europe, ni en Allemagne ni aux Pays-Bas, non plus qu’au Canada, en dépit des sommes phénoménales qui y ont été consacrées. »

Permettez-nous de nous inscrire en faux et de citer le rapport que la commission du développement durable du Sénat a consacré, en 2013, aux déserts médicaux. L’exemple allemand y est mentionné comme un système efficace, dès lors que les mesures de régulation sont couplées à des mesures d’incitation.

Cela étant, nous sommes d’accord avec vous sur un point : derrière la question de l’implantation des médecins, c’est le problème de l’attractivité territoriale qui se pose.

À cet égard, nous sommes cohérents avec nos combats en faveur du maintien, non seulement des caisses primaires d’assurance maladie, mais aussi des bureaux de poste et, plus largement, des services publics de proximité, notamment les écoles : c’est là une condition pour attirer les jeunes médecins. Ces derniers ne souhaitent pas s’installer dans un désert de services publics.

Article additionnel après l'article 30 - Amendement n° 164 rectifié ter, n° 362 rectifié ter et n° 519
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 30 - Amendements n° 166 rectifié ter et n° 365 rectifié

M. le président. L’amendement n° 165 rectifié bis, présenté par Mme Grelet-Certenais, MM. Bérit-Débat et Cabanel, Mmes Conconne et Conway-Mouret, M. Duran, Mme Espagnac, MM. Féraud et Fichet, Mme M. Filleul, M. Jacquin, Mmes Jasmin, G. Jourda et Lubin, MM. Madrelle, Manable et Mazuir, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Préville, M. Roger, Mme Taillé-Polian et MM. Tissot, Todeschini et Vaugrenard, est ainsi libellé :

Après l’article 30

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À titre expérimental et pour une durée de trois ans, dans des zones définies par les agences régionales de santé, en lien avec les conseils territoriaux de santé mentionnés à l’article L. 1434-10 du code de la santé publique et en concertation avec les organisations syndicales représentatives des médecins au plan national, le conventionnement à l’assurance maladie d’un médecin libéral peut être limité aux seuls cas où ce conventionnement intervient en concomitance avec la cessation d’activité libérale d’un médecin.

II. – Les modalités d’application de l’expérimentation sont définies par décret en Conseil d’État.

III. – Au plus tard six mois avant la fin de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un bilan de cette expérimentation, qui porte notamment sur l’opportunité de la généralisation du dispositif.

La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.

Mme Nadine Grelet-Certenais. Cet amendement tend à engager une expérimentation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Nous avons déjà débattu à plusieurs reprises de cette question en séance publique. La commission suit une position constante : elle n’est pas favorable au conventionnement sélectif des médecins.

Dans un rapport de la MECSS relatif à l’offre de soins dans les zones sous-dotées, nos collègues Jean-Noël Cardoux et Yves Daudigny ont noté que cette mesure, non seulement était rejetée par les médecins, notamment les internes, les plus jeunes, qui seraient les premiers concernés, mais pourrait être contre-productive : sans négociation avec les professionnels de santé concernés, sans leur assentiment, ce dispositif pourrait détourner de jeunes médecins de l’exercice libéral, voire de l’exercice de la médecine tout court.

Certes, le principe d’une installation pour un départ dans les zones surdotées paraît séduisant, mais il n’apporte nullement la garantie d’un rééquilibrage géographique de l’offre de soins au profit des zones sous-dotées. Surtout, je défie quiconque de trouver une zone surdotée en médecins généralistes.

Les ARS ont récemment publié, dans chaque région, des cartes détaillant les zones les plus fragiles, que les dispositifs financiers incitatifs doivent mieux cibler. Certaines zones sont effectivement très sous-dotées. D’autres le sont moins. Mais, quand on va dans les territoires, quand on connaît la situation et quand on creuse le sujet, on constate qu’il n’y a pas de zones surdotées.

On ne peut donc pas déshabiller de prétendues zones surdotées pour habiller des zones sous-dotées : cela ne marchera pas. On peut, à la rigueur, gérer un trop-plein, mais, comme on le dit souvent, on ne gère pas une pénurie par des mesures coercitives. Il s’agit, à nos yeux, d’une fausse bonne idée.

J’émets donc un avis défavorable sur les amendements identiques nos 164 rectifié ter, 362 rectifié ter et 519, ainsi que sur l’amendement n° 165 rectifié bis, qui tend à mettre en œuvre une expérimentation.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je n’ai pas grand-chose à ajouter à l’avis de la commission : sur ce sujet, nous sommes pleinement en phase.

Monsieur Gay, je pense comme vous que les mesures incitatives, essentiellement financières, pratiquées au cours des dernières années ne suffisent pas aujourd’hui pour assurer l’installation d’un médecin. D’ailleurs, mon plan ne mise pas tout sur l’installation des médecins. Il mise beaucoup sur une meilleure répartition du temps médical, avec éventuellement du temps médical projeté dans les territoires sous-dotés.

L’année dernière, dans le cadre du plan d’accès aux soins, nous avons revalorisé de 25 % la consultation des médecins qui viendraient donner un coup de main dans les zones sous-dotées, une ou deux journées par semaine. Ces dispositifs sont autant d’incitations à projeter du temps médical, à développer les exercices partagés entre deux cabinets. Nous avons pris en compte le fait que l’incitation financière se résumait souvent à un effet d’aubaine, et que les médecins repartaient dans un second temps.

De plus, toute l’organisation que je propose dans le cadre du plan « Ma santé 2022 » vise à mieux répartir la prise en charge des patients atteints de pathologies chroniques entre différents professionnels de santé. Ces derniers pourront s’organiser en vue d’une meilleure surveillance des patients souffrant, par exemple, d’insuffisance cardiaque ou de diabète. Ainsi, on évitera que la charge supplémentaire ne repose uniquement sur le médecin.

Enfin, vous soulignez le manque général d’attractivité dont souffrent certains territoires. Le Gouvernement est persuadé, comme vous, qu’il faut rendre les territoires plus attractifs, en y redéployant des services publics de proximité.

Pendant des années, on a suivi, en la matière, une tendance de centralisation : pour les services publics, c’était un moyen de rationaliser les coûts, dans une logique d’économies que l’on peut comprendre. Mais, aujourd’hui, on voit les dégâts qu’ont provoqués ces choix.

M. Fabien Gay. Vos actes contredisent vos paroles !

Mme Agnès Buzyn, ministre. Dans ces territoires, nous essayons de rassembler les services publics en pôles, où figurent notamment les caisses primaires d’assurance maladie.

Nous sommes d’accord, il faut réinvestir la proximité, et nous allons y arriver. Nous pensons comme vous qu’il s’agit là d’un enjeu fondamental pour redonner espoir à ces territoires, qui, comme vous le soulignez, ont été largement abandonnés.

Cela étant, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.

Mme Véronique Guillotin. Comme les incitations financières, les mesures coercitives n’ont jamais fait la preuve de leur efficacité. La région Grand Est, dont je suis élue, comprend un département très rural, la Meuse, qui, il y a quelques années encore, était particulièrement marqué par la désertification médicale. Or, dans ce territoire, les exercices en commun, les maisons de santé pluriprofessionnelles ont commencé à se développer il y a une bonne dizaine d’années.

Aujourd’hui, le maillage du département est presque complet. Sans être surdoté, ce territoire très rural, qui était le plus sous-doté, est celui qui, dans la région Grand Est, attire le plus de jeunes praticiens. Ainsi, en dix ans, ce département a réussi à renverser la situation. De jeunes praticiens viennent s’y installer, parce qu’ils y trouvent un projet médical et des professionnels qui les accueillent : voilà pourquoi la Meuse est devenue, pour eux, très attractive.

Je reste donc très optimiste quant au plan qui commence à se déployer. À mon sens, il faut accélérer les exercices coordonnés. Je voterai donc contre ces amendements.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 164 rectifié ter, 362 rectifié ter et 519.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 165 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 30 - Amendement n° 165 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 30 - Amendement n° 366 rectifié bis

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 166 rectifié ter est présenté par Mme Grelet-Certenais, MM. Bérit-Débat et Cabanel, Mmes Conconne et Conway-Mouret, M. Duran, Mme Espagnac, MM. Fichet et Jacquin, Mmes Jasmin et G. Jourda, MM. Madrelle, Manable, Mazuir et Montaugé, Mme Préville, M. Roger, Mme Taillé-Polian et MM. Todeschini et Vaugrenard.

L’amendement n° 365 rectifié quater est présenté par MM. Tissot et Tourenne, Mme Ghali et MM. Iacovelli et P. Joly.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 30

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

En vue d’assurer le respect du principe posé à l’article L. 111-2-1 du code de la sécurité sociale, qui définit les objectifs de la politique de santé publique et garantit l’accès effectif des assurés aux soins sur l’ensemble du territoire, le ministre chargé de la santé prend les mesures nécessaires lorsque l’évaluation établie par le directeur général de l’agence régionale de santé et prévue à l’article L. 1434-8 du code de la santé publique fait apparaître que les besoins d’accès aux médecins généralistes pour la population ne sont pas satisfaits.

Un décret en Conseil d’État définit les conditions dans lesquelles ces mesures concilient le respect de la libre installation et les besoins d’installation. Il prévoit notamment les modalités selon lesquelles les prestations effectuées par les praticiens ne respectant pas ces conditions peuvent faire l’objet de restrictions dans le remboursement par les organismes de l’assurance maladie.

La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour présenter l’amendement n° 166 rectifié ter.

Mme Nadine Grelet-Certenais. Cet amendement, comme ceux que j’ai précédemment défendus, vise à ce que le Gouvernement prenne ses responsabilités.

Des mesures relatives au niveau du remboursement des soins pourraient être raisonnablement envisagées lorsque l’installation du praticien n’a pas permis de remédier à la désertification, en dépit des propositions d’installation qui lui ont été faites. Ces mesures doivent se fonder sur l’évaluation établie par le directeur général de chaque ARS. Les conséquences de cette évaluation, aujourd’hui sans effet contraignant, pourraient faire l’objet d’un décret en Conseil d’État définissant les cas et les conditions dans lesquels, après concertation avec la profession, on pourrait décider de ne pas rembourser, ou de ne rembourser que partiellement les prestations assurées par des praticiens qui auraient refusé jusqu’à trois propositions successives d’installation.

Mes chers collègues, c’est ce que nous vous proposons à travers cet amendement, pour remédier aux inégalités d’accès aux soins. Il suffit de mettre fin au bricolage de mesures et de tenir un discours ferme et clair afin de respecter l’égalité des territoires.

La dématérialisation des consultations ne peut être qu’une réponse d’appoint. Les ruraux ou les périurbains ne doivent pas servir de cobayes à la robotisation de la médecine.

Le rapport de notre collègue député Philippe Vigier, déposé en juillet dernier, se prononce très clairement pour des solutions de régulation. Cette mesure est d’intérêt général, et le législateur que nous sommes se doit de proposer des réponses concrètes aux Français qui n’ont pas, ou qui n’ont plus, accès aux soins.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour présenter l’amendement n° 365 rectifié quater.

M. Jean-Louis Tourenne. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Ces amendements poursuivent le même objectif que les précédents : mettre en place des dispositifs pénalisants en cas de non-installation. Or les patients seraient les premiers à pâtir de mesures de restriction de prise en charge par l’assurance maladie.

L’avis de la commission est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 166 rectifié ter et 365 rectifié quater.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 30 - Amendements n° 166 rectifié ter et n° 365 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 31

M. le président. L’amendement n° 366 rectifié bis, présenté par M. Tissot, Mmes Taillé-Polian et G. Jourda, M. Cabanel, Mmes Conway-Mouret et Jasmin, MM. Tourenne, Jacquin et Duran, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme Ghali, MM. Iacovelli et P. Joly, Mme Préville et M. Raynal, est ainsi libellé :

Après l’article 30

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur les besoins médicaux du pays. Ce rapport réalise un état des lieux poste par poste aussi bien dans les établissements publics que privés du manque de médecins. Aussi, il évalue les besoins en médecins région par région en lien avec les agences régionales de santé.

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.

M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement tend à demander au Gouvernement de fournir au Parlement un état des lieux relatif aux besoins médicaux poste par poste dans les établissements publics et privés du pays. Il a des chances d’aboutir, puisqu’il s’agit d’un état des lieux et non d’un rapport !

Ce rapport permettra d’informer la représentation nationale grâce à une analyse précise des besoins en médecins région par région, afin de travailler à une meilleure couverture médicale en France.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. La commission ne s’est pas fait avoir par cette tentative de bluff. (Sourires.)

La documentation sur la démographie médicale et son adaptation aux besoins en santé est abondante : les études et les projections de la DREES, les travaux de l’Observatoire national de la démographie des professions de santé… Nous disposons tous, en outre, des rapports des observatoires régionaux de la santé dans nos territoires. Enfin, la demande formulée semble déjà relever des missions des ARS.

Un nouveau rapport remis dans un délai d’un an sur le sujet ne changera rien à la problématique de l’accès aux soins, et nous pouvons obtenir cet état des lieux par d’autres moyens. L’avis de la commission est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Il me semble que les besoins sont déjà couverts par les rapports de la DREES, de l’Ordre des médecins ou de l’ONDPS. Le zonage établi par les ARS est également disponible. Nous savons tout de la démographie médicale dans les territoires et de l’état des lieux.

Je serais ravie que ce savoir me fournisse une solution pour trouver les médecins qui manquent, notamment les obstétriciens et les urgentistes. Malheureusement, un avis favorable de ma part ne réglerait aucun problème, car nous disposons déjà de ces données.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 366 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 30 - Amendement n° 366 rectifié bis
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Article 32

Article 31

I. – Le titre IV du livre préliminaire de la quatrième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Après le 2° de l’article L. 4041-2, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° Sous réserve que ses statuts le prévoient, l’exercice de la pratique avancée par des auxiliaires médicaux, tels que définis à l’article L. 4301-1. » ;

2° Au second alinéa de l’article L. 4041-3, après le mot : « ambulatoires », sont insérés les mots : « à l’exception de celles dont l’objet comprend l’exercice de la pratique mentionnée au 3° de l’article L. 4041-2, » ;

3° Au premier alinéa de l’article L. 4042-1, les mots : « de l’activité professionnelle des associés dont les statuts prévoient un exercice en commun » sont remplacés par les mots : « des activités professionnelles mentionnées aux 2° et 3° de l’article L. 4041-2 ».

II. – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale, après la troisième occurrence du mot : « santé », sont insérés les mots : « , en maison de santé ».

III (nouveau). – Le ministre chargé de la santé remet au Parlement, avant le 31 décembre 2021, un rapport sur le déploiement des pratiques avancées sur le territoire et sur leur impact en termes d’accès aux soins.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.

Mme Laurence Cohen. Cet article vise à permettre aux maisons de santé pluriprofessionnelles constituées en sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires de salarier des auxiliaires médicaux en pratique avancée, afin d’accompagner le développement de ce mode d’exercice. J’avoue ne pas comprendre son utilité.

Dans le débat sur la difficulté à trouver des professionnels de santé et sur les déserts médicaux, notre groupe défend une complémentarité entre l’exercice en ville, les hôpitaux, les centres de santé et les maisons de santé. Nous ne les opposons pas. Pourquoi nous proposez-vous un article permettant aux maisons de santé, qui sont des lieux où l’exercice est libéral, d’embaucher des personnels salariés ? Pourquoi ne trouve-t-on pas plutôt dans ce PLFSS un article renforçant les centres de santé ?

Sauf erreur de ma part, le développement des maisons comme des centres de santé figure, à juste titre, parmi les objectifs que vous avez annoncés. Vous n’opposez donc pas ces structures, et je partage cette approche. Toutefois, ce PLFSS ne prévoit pas la moindre aide à l’implantation de centres de santé.

Dans les territoires, les maires de toutes les sensibilités politiques ont de plus en plus recours à ces centres pour résoudre leurs problèmes, parce que ceux-ci correspondent à la volonté des professionnels et parce qu’on y pratique le tiers payant. Or nous savons que ces structures rencontrent des difficultés. Elles ne bénéficient pas, par exemple, du remboursement des frais de gestion des dossiers. En corrigeant cela, vous leur donneriez un sérieux coup de pouce.

Je ne comprends donc pas la justification de cet article tourné vers les maisons de santé, lesquelles, à mon sens, ne souffrent pas de manques particuliers.

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L’amendement n° 12 rectifié ter est présenté par Mme Estrosi Sassone, M. Bonhomme, Mme Deromedi, M. de Nicolaÿ, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Daubresse, Morisset, Bascher et Panunzi, Mme Bruguière, MM. Grosdidier et Pillet, Mmes Raimond-Pavero, Gruny, A.M. Bertrand et Lanfranchi Dorgal, M. Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, M. Cuypers, Mme Dumas, MM. Pellevat, J.M. Boyer et Cambon, Mme Garriaud-Maylam, M. Bouchet, Mme L. Darcos, MM. Priou, Piednoir et Paccaud, Mme M. Mercier, MM. Lefèvre et Revet, Mme Berthet, MM. B. Fournier, Mayet et Vaspart, Mme Thomas, MM. Rapin, Husson, Laménie et Genest, Mmes Canayer et Lamure et M. Sido.

L’amendement n° 192 rectifié bis est présenté par Mmes Micouleau et Deseyne, MM. Chatillon, del Picchia et Grand et Mmes Lherbier et Malet.

L’amendement n° 591 rectifié est présenté par Mme Laborde, MM. Arnell, Collin, Gabouty et Guérini, Mme Jouve et MM. Requier, Roux et Vall.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour présenter l’amendement n° 12 rectifié ter.

M. Jean-Marie Morisset. L’article 31 entend permettre le salariat d’auxiliaires médicaux par les sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires, structures juridiques des maisons de santé.

Dans l’exposé des motifs du projet de loi, il est noté que les professionnels de santé souhaitent une diversification de leur mode de rémunération au sein des structures libérales. Cette interprétation est fausse, si l’on en croit toutes les enquêtes menées auprès des étudiants en santé et des professionnels eux-mêmes. L’exercice libéral en maison de santé est l’un des premiers arguments en faveur d’un choix d’installation.

En outre, cet article ne concerne que les auxiliaires médicaux. Or il ne peut y avoir une discrimination entre eux et les professions médicales. Les deux doivent avoir la possibilité de disposer du même statut dans une même structure.

Enfin, l’argument selon lequel le salariat d’auxiliaires médicaux par les SISA permettrait d’améliorer l’accès aux soins est une aberration. À ce jour, l’exercice salarié de l’ensemble des auxiliaires médicaux est dans une situation critique en raison de l’absence de revalorisation de leurs grilles salariales. Cet article prônant le salariat risque donc de provoquer une vacance des postes d’auxiliaires médicaux dans les maisons de santé.

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Micouleau, pour présenter l’amendement n° 192 rectifié bis.

Mme Brigitte Micouleau. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Arnell, pour présenter l’amendement n° 591 rectifié.

M. Guillaume Arnell. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. L’article 31 rend possible l’exercice salarié en pratique avancée au sein des maisons de santé pluriprofessionnelles qui sont constituées sous le statut de SISA.

L’exercice en maison de santé est bien libéral par principe, mais cet article offre une nouvelle possibilité d’exercice aux auxiliaires médicaux en pratique avancée, sous forme de salariat. Il s’agit seulement d’offrir une faculté supplémentaire et non de revenir sur le mode d’exercice libéral, lequel sera toujours possible, y compris pour les auxiliaires médicaux en pratique avancée.

Sur nos territoires, on voit de plus en plus de centres de soins infirmiers travaillant en libéral qui, face à l’absence de médecins libéraux dans certains secteurs, recrutent des médecins salariés. J’étais moi-même plutôt favorable à l’exercice libéral, mais il apparaît que certains territoires bénéficient de la coexistence de professionnels de santé salariés et libéraux, de maisons de santé et de centres de santé – à condition que ceux-ci pratiquent un exercice pluriprofessionnel et participent à la permanence des soins. Tous les moyens sont bons, et il est absolument indispensable d’offrir un peu de souplesse pour répondre aux défis auxquels sont confrontés les territoires.

J’ai le sentiment que ces amendements de suppression découlent d’une mauvaise compréhension du dispositif proposé dans cet article. La commission demande donc leur retrait ; à défaut, son avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Il s’agit simplement de laisser le choix aux infirmières de pratique avancée, qui sont en train d’être formées, de rejoindre une maison de santé pluriprofessionnelle située sur le territoire où elles veulent exercer, de manière libérale ou salariée, selon leur préférence.

Cet article n’est pas particulièrement disruptif. Il donne de la liberté à quelques professionnelles qui sont éminemment dépendantes du type de structures existant déjà sur le territoire où elles souhaitent vivre. Dans certains cas, elles trouveront des centres de santé ; dans d’autres, des maisons de santé pluriprofessionnelles où tout le monde exerce en libéral. Si elles veulent être salariée d’une équipe médicale, pourquoi pas ? Il ne me semble pas que cela mérite ces amendements de suppression.

Je souhaite répondre à Mme Cohen à propos des centres de santé. À chaque fois que je parle d’exercice coordonné, je pense indifféremment aux maisons de santé et aux centres de santé. Les aides à l’installation des centres et des maisons de santé sont mises en avant de la même façon par les ARS. Je ne fais aucun distinguo, car, ce qui compte à mes yeux, c’est l’exercice coordonné sur le territoire.

Selon vous, je ne ferais pas la promotion des centres de santé. Peut-être ne l’avez-vous pas remarqué, mais, dans le plan Pauvreté que j’ai présenté, la partie dédiée à la santé prévoit l’ouverture de cent centres de santé dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, afin de répondre aux besoins d’accès aux soins de populations en situation de précarité. Mon idée est bien de créer des centres avec des responsabilités populationnelles particulières dans ces quartiers. J’ai pour eux le même respect que pour les maisons de santé.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur ces amendements.

M. le président. Monsieur Morisset, l’amendement n° 12 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Jean-Marie Morisset. Compte tenu des arguments de Mme la rapporteur et de Mme la ministre – je les ferai connaître à Mme Estrosi Sassone –, je retire cet amendement.

M. le président. Madame Micouleau, que décidez-vous ?

Mme Brigitte Micouleau. Je retire également mon amendement, monsieur le président.

M. le président. Monsieur Arnell, je vous pose la même question, qu’en est-il de votre amendement ?

M. Guillaume Arnell. Je retire moi aussi l’amendement, monsieur le président.

M. le président. Les amendements identiques nos 12 rectifié ter, 192 rectifié bis et 591 rectifié sont retirés.

L’amendement n° 585 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Arnell et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 3° Sous réserve que les statuts le prévoient, l’exercice par des professionnels de santé non associés ;

II. – Alinéa 4

Remplacer les mots :

de la pratique mentionnée au 3° de l’article L. 4041-2

par les mots :

par des professionnels de santé non associés

La parole est à Mme Véronique Guillotin.

Mme Véronique Guillotin. Dans les SISA, on trouve des professionnels libéraux, surtout des médecins. Pourquoi ne serait-il pas possible d’y salarier des médecins à temps partiel ou à temps complet ?

Je défends cette mesure pour des raisons simples. Aujourd’hui, les jeunes professionnels ont parfois du mal à se jeter directement dans le bain de l’exercice libéral à temps plein, qu’ils ne connaissent pas. Un homme ou une femme qui veut travailler à temps partiel, voire quelqu’un qui souhaite reprendre son activité, pourrait bénéficier d’un passage transitoire comme salarié dans une maison de santé pluriprofessionnelle. Après cette période de salariat, ces personnes pourraient peut-être envisager un exercice libéral plutôt que de repartir à l’hôpital. Il s’agit donc de mettre en place un tremplin afin de mobiliser des médecins dans les maisons de santé sur les territoires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. L’objectif de cet amendement est un peu moins ciblé que celui de l’article 31, lequel porte sur la pratique avancée.

Nous souhaitons connaître l’avis du Gouvernement, parce que nous craignons qu’un tel élargissement du champ de cette disposition complexifie la gestion des MSP.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Les structures des maisons de santé pluriprofessionnelles ont vraiment été pensées pour promouvoir l’exercice libéral. Cet amendement tend à en changer complètement la philosophie, au risque d’introduire de la complication, voire de la confusion. Pour une équipe, salarier des médecins, ce n’est pas tout à fait la même chose que de salarier une infirmière de pratique avancée. Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Madame Guillotin, l’amendement n° 585 rectifié est-il maintenu ?

Mme Véronique Guillotin. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 585 rectifié est retiré.

L’amendement n° 158 rectifié bis, présenté par M. Tourenne, Mmes Conconne et Conway-Mouret, MM. Duran, Houllegatte, P. Joly et Marie, Mme Préville, MM. Vaugrenard, Assouline, Joël Bigot, Cabanel et Daudigny, Mme Grelet-Certenais et MM. Jacquin, Kerrouche, Lozach et Tissot, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 6

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Le 3° de l’article L. 162-12-9 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « et celles relatives à la durée minimum d’expérience professionnelle acquise en équipe de soins généraux au sein d’un établissement sanitaire, social ou médico-social ».

La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.

M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement vise à remédier aux difficultés de recrutement de kinés dans les EHPAD et en milieu rural.

Le chemin qui conduit à la désertification ressemble au début d’une descente aux enfers : dès l’instant où un certain nombre de services disparaissent, le territoire devient moins attractif, entraînant inévitablement le départ d’autres acteurs.

À l’intérieur d’un EHPAD, lorsqu’un kiné s’en va, ses collègues doivent supporter une charge plus importante et sont eux aussi très rapidement amenés à partir.

Pour les infirmières, une solution très intelligente a été trouvée, et elle porte ses fruits : 90 % d’entre elles exercent en libéral, mais elles ont été contraintes de travailler auparavant en milieu hospitalier ou en établissement médico-social. N’est-il pas possible d’envisager la même chose pour les kinés ? Cette expérience leur sera sans aucun doute utile et contribuera à résoudre certains des problèmes de recrutement que connaissent les établissements médico-sociaux.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Il nous semble difficile d’instaurer une telle disposition sans concertation avec les représentants des professions concernées.

Il y a juste un an, un avenant à la convention des masseurs-kinésithérapeutes a été signé, qui prévoit déjà des mesures de régulation démographique.

Je vous invite donc à retirer cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Même avis.

M. le président. Monsieur Tourenne, l’amendement n° 158 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jean-Louis Tourenne. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 158 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 74, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. L’Assemblée nationale a demandé la remise d’un rapport au Parlement sur le déploiement des pratiques avancées sur le territoire et sur leur impact en termes d’accès aux soins. Ce thème très vaste nous semble dépasser le champ de l’article 31 ainsi que celui du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nous avons donc souhaité supprimer cette disposition.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous étions favorables à la rédaction d’un rapport sur cette nouvelle pratique. Nous sommes donc défavorables à cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 74.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 31, modifié.

(Larticle 31 est adopté.)

Article 31
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 32 - Amendement n° 132 rectifié quater

Article 32

Le titre VI du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L’article L. 161-38 est ainsi modifié :

a) À la seconde phrase du premier alinéa du II, après le mot : « génériques », sont insérés les mots : « , au registre des médicaments hybrides » ;

b) Le deuxième alinéa du IV est ainsi modifié :

– les mots : « sont rendues obligatoires » sont remplacés par les mots : « peuvent être demandées par les éditeurs » ;

– après le mot : « médicaments », la fin est ainsi rédigée : « , produits de santé et prestations éventuellement associées, le cas échéant par les pharmacies d’officine ou les pharmacies à usage intérieur. Les fonctionnalités qui doivent être fournies par le logiciel en vue d’obtenir la certification sont fixées par décret en Conseil d’État. » ;

– le dernier alinéa est supprimé ;

c) Le V est ainsi rédigé :

« V. – Les éditeurs de logiciels demandant une certification en application du IV s’engagent à faire évoluer leur logiciel pour en assurer la conformité avec les évolutions des fonctionnalités mentionnées au second alinéa du même IV.

« En cas de retard de la mise à jour d’un logiciel certifié ou de non-respect des éléments de certification, hors les cas d’impossibilité technique, le ministre en charge de la sécurité sociale peut prononcer une pénalité financière à l’encontre de l’entreprise éditant le logiciel qui n’a pas respecté les engagements mentionnés au premier alinéa du présent V, après mise en demeure et recueil des observations de celle-ci.

« Le montant de la pénalité est fixé en fonction de la gravité et de la durée du manquement constaté et, le cas échéant, du nombre de réitérations des manquements, sans pouvoir être supérieur à 10 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France par l’entreprise au titre du dernier exercice clos pour le ou les logiciels concernés par le manquement.

« La pénalité recouvrée par les organismes mentionnés à l’article L. 213-1 désignés par le directeur de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Les articles L. 137-3 et L. 137-4 sont applicables au recouvrement de la pénalité. Son produit est affecté à la Caisse nationale de l’assurance maladie.

« En cas de manquement répété de l’éditeur à ses engagements, les logiciels concernés peuvent perdre leur certification. » ;

2° Après l’article L. 162-2-2, il est inséré un article L. 162-2-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 162-2-3. – Dans le cadre des actions de prévention ou participant à la pertinence de soins identifiés, mises en œuvre dans le cadre des missions mentionnées au 3° de l’article L. 221-1 et aux III bis et IV de l’article L. 315-1, l’assurance maladie peut transmettre aux médecins et aux pharmaciens certaines données personnelles des patients traités par ces professionnels, sauf opposition des patients dûment informés par ces professionnels ou par l’assurance maladie, dans le respect des dispositions du chapitre IX de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

« Les informations transmises ont un lien direct avec l’objet des actions mentionnées au premier alinéa et sont nécessaires à une meilleure prise en charge du patient, en termes de qualité ou de pertinence. Elles peuvent comprendre des données administratives relatives aux patients, des données liées au remboursement par l’assurance maladie ou encore des données à caractère médical dont dispose l’assurance maladie. L’information peut être transmise aux professionnels à l’aide de services dématérialisés par l’assurance maladie, directement par ses agents dûment habilités, ou à l’aide du système d’information prévu à l’article L. 6113-7 du code de la santé publique. » ;

3° L’article L. 162-5 est ainsi modifié :

a) Le 21° est abrogé ;

b) À la deuxième phrase du 22°, après le mot : « prescription, », sont insérés les mots : « l’utilisation d’un logiciel d’aide à la prescription certifié suivant la procédure prévue à l’article L. 161-38, » ;

4° L’article L. 162-5-15 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « mentionnés à l’article L. 6155-1 du code de la santé publique » sont remplacés par les mots : « exerçant en totalité ou pour partie leurs fonctions, à titre libéral ou salarié, dans les établissements mentionnés à l’article L. 162-22-6 du présent code, », les mots : « même code » sont remplacés par les mots : « code de la santé publique » et, après les mots : « ils exercent », sont insérés les mots : « , au moins en partie, » ;

b) Au second alinéa, les mots : « figure obligatoirement » sont remplacés par les mots : « personnel ainsi que le cas échéant le numéro identifiant la structure au sein de laquelle l’acte, la consultation ou la prescription a été réalisé figurent » ;

5° À l’article L. 162-5-16, après le mot : « identification », il est inséré le mot : « exacte » et, après les mots : « à l’article L. 162-5-15 », sont insérés les mots : « et par le numéro identifiant la structure, » ;

6° La sous-section 3 de la section 1 du chapitre II est complétée par un article L. 162-5-18 ainsi rédigé :

« Art. L. 162-5-18. – Le pharmacien exécutant l’ordonnance comportant ou devant comporter le numéro personnel et le numéro identifiant la structure mentionnés à l’article L. 162-5-15, est tenu de reporter ces numéros sur les documents transmis aux caisses d’assurance maladie.

« Le non-respect de cette obligation ou la transmission d’éléments erronés peuvent donner lieu à une procédure de recouvrement de l’indu, selon les modalités prévues à l’article L. 133-4 du présent code, auprès du pharmacien. » ;

7° À la deuxième phrase du 8° de l’article L. 162-16-1, après les mots : « sur la dispensation, », sont insérés les mots : « l’utilisation d’un logiciel d’aide à la dispensation certifié suivant la procédure prévue à l’article L. 161-38, ».

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 75 rectifié est présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales.

L’amendement n° 610 est présenté par le Gouvernement.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 25

Après les mots :

ces numéros

insérer les mots :

, ou le cas échéant leur absence,

La parole est à Mme la rapporteur, pour présenter l’amendement n° 75 rectifié.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Cet amendement vise à lever les doutes sur la responsabilité d’un pharmacien qui ne reporterait pas le numéro RPPS du médecin prescripteur ou l’identifiant de sa structure d’exercice sur les documents transmis à l’assurance maladie. Il s’avère que ce numéro n’existe pas toujours. C’est le cas, notamment, lorsque les prescriptions sont faites par des internes en établissement.

Afin d’éviter toute ambiguïté vis-à-vis des pharmaciens à cet égard, nous avons souhaité ajouter la possibilité de signaler simplement cette absence.

M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 610.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Il est identique à celui de la commission.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 75 rectifié et 610.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 210 rectifié bis, présenté par Mmes Imbert et Micouleau, MM. Morisset et Vial, Mme Gruny, MM. Vaspart, D. Laurent et Bouchet, Mme Bruguière, MM. Lefèvre, Mouiller et Magras, Mmes Deromedi, M. Mercier, Garriaud-Maylam et Lassarade, MM. Chaize, Sol et Mandelli, Mme A.M. Bertrand, M. Buffet, Mme Deseyne, MM. del Picchia et Laménie, Mmes Lherbier, Delmont-Koropoulis et Morhet-Richaud, M. Babary, Mme Berthet, MM. Poniatowski, Gremillet et Dériot et Mme Lamure, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 26

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Cette mesure prend effet au 1er janvier 2021, date à laquelle les hôpitaux devront fournir des ordonnances comportant le numéro RPPS de chaque médecin. » ;

La parole est à Mme Corinne Imbert.

Mme Corinne Imbert. Madame la ministre, madame la rapporteur, je vous remercie d’avoir présenté les amendements qui viennent d’être adoptés. Malheureusement, ceux-ci ne règlent pas tout, parce que l’obligation de porter une mention – le numéro ou son absence – sur l’ordonnance est maintenue.

Je ne trouve pas cela très pragmatique, alors même que les pharmaciens ont plutôt joué le jeu : 60 % des transmissions des numéros RPPS sont de leur fait. On ne peut pas, aujourd’hui, les rendre responsables sous peine d’une procédure de recouvrement de l’indu, car, même si ce n’était pas votre intention, il s’agit bien de cela. Le pharmacien n’est pas en cause dans l’absence de numéro RPPS sur les ordonnances, notamment sur celles qui proviennent des hôpitaux.

Cet amendement tend donc à retarder l’application de cette mesure au 1er janvier 2021, afin de laisser aux hôpitaux le temps de faire apparaître le numéro RPPS sur leurs ordonnances, de sorte que les pharmaciens puissent le transmettre. Il n’est pas juste de pénaliser les pharmaciens, qui n’y sont pour rien et qui, jusqu’à présent, ont fait ce qu’il faut.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. L’adoption de l’amendement de la commission qui vient d’avoir lieu permettra ne pas pénaliser les pharmaciens.

Vous le voyez, ma chère collègue, nous partageons la même préoccupation, mais vous allez un peu plus loin en demandant de laisser aux hôpitaux des années supplémentaires pour se mettre en conformité et fournir des ordonnances comportant le numéro RPPS.

Sur cet amendement, que l’on aurait pu considérer comme satisfait par l’adoption des amendements précédents, nous souhaitons entendre l’avis de Mme la ministre.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Aucune sanction n’est prévue en cas d’absence du numéro RPPS. Ce numéro est aujourd’hui le seul moyen d’améliorer la pertinence des prescriptions et le bon usage des médicaments en renforçant notre visibilité des processus à l’œuvre. Il n’y a malheureusement pas d’autre solution.

Il s’agit d’un aspect important et symbolique de la réforme, auquel nous sommes très attentifs et que nous souhaitons voir mis en place. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour explication de vote.

Mme Corinne Imbert. Je suis d’accord, la transmission du numéro RPPS est importante. Comme je l’ai dit, les pharmaciens y ont contribué à hauteur de 60 %. Ce qui me gêne, c’est l’alinéa 26, qui évoque une procédure de recouvrement de l’indu auprès du pharmacien, alors que celui-ci n’est pas responsable de l’absence du numéro.

La participation des pharmaciens à la remontée des numéros RPPS ne fait pas débat, mais nous ne voulons pas de procédure de recouvrement de l’indu si le numéro ne se trouve pas sur la prescription. Si vous ne pouvez pas accepter cet amendement, madame la ministre, je vous suggère de supprimer l’alinéa 26.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Les amendements précédents précisent qu’il n’y aura pas de sanction. C’est simplement une question de pertinence et de bon usage.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 210 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 32, modifié.

(Larticle 32 est adopté.)

Article 32
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 32 bis (nouveau)

Article additionnel après l’article 32

M. le président. L’amendement n° 132 rectifié quater, présenté par MM. Houpert, Daubresse et Grosdidier, Mmes Lavarde, N. Delattre, Guillotin, Vullien, Bruguière, Deromedi et Procaccia, M. Pellevat, Mme Loisier, MM. Détraigne, D. Laurent, Decool, B. Fournier et Menonville, Mmes Delmont-Koropoulis, Morhet-Richaud et Billon, M. Sol, Mme L. Darcos, MM. Kern et Charon, Mme Imbert, MM. Bascher et Paccaud, Mmes Gruny et Goy-Chavent, MM. Lefèvre et Chasseing, Mmes Thomas, Lopez et M. Mercier, MM. Cambon et Revet, Mme Garriaud-Maylam, MM. Mayet, Rapin et Babary, Mme Bories, M. Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bazin, Dériot, Grand, Piednoir, Delcros, Laménie et Marseille, Mme Morin-Desailly et MM. Buffet, Moga, Wattebled, H. Leroy et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 32

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 6316-1 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La définition des actes de téléradiologie ainsi que leurs conditions de mise en œuvre et de prise en charge financière sont fixées par décret. »

La parole est à M. Alain Houpert.

M. Alain Houpert. La télémédecine va permettre de pallier la carence de professionnels de santé dans certains territoires. On ne peut que s’en réjouir. Néanmoins, il convient que l’exercice de cette médecine à distance soit précisément encadré, afin d’offrir aux patients une qualité de diagnostic. Cela concerne, notamment, la téléradiologie, instaurée par la loi HPST de Mme Bachelot.

Flairant la bonne aubaine, des sociétés low cost situées au diable vauvert sont apparues pour proposer des actes de téléradiologie, qui sont préoccupants à plusieurs niveaux.

Les patients n’ont aucune assurance sur la qualification des professionnels qui réalisent ces actes ou les interprètent ; le suivi est aléatoire ; la relation médecin-patient est inexistante, alors même que le radiologue est le premier maillon de la chaîne dans la révélation de pathologies lourdes, comme les cancers – brillamment évoqués par Mme la ministre. Enfin, aucune garantie n’est fournie quant au devenir des données médicales collectées : on ne sait rien des moyens mis en œuvre pour les protéger et les rendre anonymes, et on ne peut exclure leur revente.

Les radiologues risquent de voir leur expertise dévaluée en simple prestation de service et s’exposent à la dérégulation et au non-respect des tarifs médicaux réglementaires.

Il faut donc définir des règles communes, ainsi que je l’avais expliqué devant vous il y a exactement un an. On doit déplorer que nos collègues de l’Assemblée nationale n’aient pas pris la mesure de cette nécessité.

Il est beaucoup question de traçabilité en agriculture, mais il me semble que les patients ont droit à la traçabilité et à la qualité des actes de radiodiagnostic. Il serait injuste que leurs images soient interprétées à Singapour ou à Dubaï, les privant de tout recours, au risque de faire fortement reculer le diagnostic médical.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Nous avons déjà eu ce débat l’an dernier. Le Sénat avait alors adopté cet amendement, même si la commission n’y était pas très favorable.

Les pratiques low cost sont un vrai sujet, mais il semble difficile de distinguer les actes de téléradiologie des autres actes de télémédecine, notamment en matière de téléexpertise.

L’avenant conventionnel sur la télémédecine qui a été signé cette année a permis de mieux définir la nature de ces actes et devrait nous aider à lutter contre les mauvaises pratiques. Nous souhaiterions que vous nous indiquiez, madame la ministre, quelles assurances vous pouvez nous apporter, puisque, lorsque la question avait été abordée l’an passé, vous aviez pris un engagement.

La commission, quant à elle, n’est pas convaincue que l’adoption de l’amendement tel qu’il est rédigé puisse conduire à mieux encadrer des pratiques contestables si celles-ci ont encore cours. Elle demande donc son retrait ; à défaut, son avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur le sénateur Houpert, je peux vous rassurer : nous avons le même objectif, à savoir garantir la qualité et éviter que des plateformes, qu’elles soient low cost ou non, interviennent dans le cadre que nous avons défini pour la téléexpertise ou la téléconsultation.

La convention qui a été négociée pour le remboursement des actes de télémédecine, c’est-à-dire la téléexpertise ou la téléconsultation – les actes de téléradiologie en font partie –, impose que les praticiens soient bien définis pour que les actes soient remboursés. Je ne vois donc pas comment une plateforme à Singapour employant des médecins inconnus de l’assurance maladie pourrait bénéficier d’un remboursement d’actes de téléexpertise. Cela n’est pas possible dans le champ conventionnel en vigueur aujourd’hui. On ne peut empêcher des gens de payer pour ces pratiques, mais, je le répète, la négociation a parfaitement encadré ce qui est remboursé par l’assurance maladie, et ce type de pratiques en est exclu.

Je m’étais engagée devant vous, l’année dernière, à saisir la Haute Autorité de santé de l’élaboration d’un guide des bons usages et de la qualité des actes de télémédecine. Ses travaux devraient m’être rendus au début de l’année 2019 et comprendront une partie sur l’imagerie médicale.

Les engagements pris sont donc tenus, la négociation conventionnelle a encadré les pratiques, et celles que vous dénoncez ne peuvent pas faire l’objet d’un remboursement aujourd’hui.

M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote.

M. Alain Houpert. Je n’ai pas l’esprit de corporation, mais je suis radiologue : je sais donc combien la profession est inquiète devant le développement de ces pratiques.

Nous entrons dans l’ère de l’intelligence artificielle, des algorithmes, et la France a une part à prendre. Dans cet esprit, la Fédération nationale des médecins radiologues est en train d’unir tous les diagnostics qui existent en France, ce qui représente plusieurs dizaines de millions d’images. Ne passons pas à côté de ce défi !

J’étais en Israël il y a quelque temps : ce pays est très en avance en matière d’intelligence artificielle. Au-delà de Singapour, la Chine est en train de prendre le pas.

L’intelligence artificielle est un domaine d’avenir : il faut que la France en soit le pays phare, comme elle a été le pays phare au XIXe siècle grâce à Pasteur. C’est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, d’adopter cet amendement : ce serait un grand pas pour la radiologie et pour l’avenir.

Après avoir honoré Marie Curie, lors des célébrations du centième anniversaire de la guerre de 1914, honorons les radiologues qui travaillent actuellement pour promouvoir la télémédecine et faire de la France l’un des leaders de l’intelligence artificielle !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je tiens à rassurer Mmes et MM. les sénateurs : nous avons bien conscience que l’intelligence artificielle dans le champ de la santé peut être un point fort de la France.

Lors de la remise du rapport de M. Cédric Villani, le Président de la République s’est engagé à développer l’intelligence artificielle dans deux champs prioritaires : la médecine et les transports. Mon ministère a été chargé de proposer une organisation qui permette de centraliser toutes les données de santé.

Nous construisons cet outil de centralisation, qui s’appellera le « Health Data Hub » : il permettra à nos start-up et à nos autres entreprises, mais aussi aux chercheurs, de disposer de l’ensemble des données remboursées par l’assurance maladie – anonymisées, bien entendu – pour développer des algorithmes sur la base des patients français traités avec la qualité de la médecine française. Il s’agit de ne pas dépendre d’algorithmes décisionnels issus d’autres pratiques médicales : cet enjeu de la qualité de la donnée est très important.

Nous sommes donc parfaitement d’accord avec vous, monsieur Houpert : c’est un projet d’avenir que nous construisons avec ce Health Data Hub, qui devrait être prêt au premier semestre de 2019. Il centralisera les données du système national d’information inter-régimes de l’assurance maladie, le SNIIRAM, soit toutes les données d’assurance maladie, et les très nombreuses données issues des hôpitaux, qu’on appelle les entrepôts de données. Toute cette information sera accessible aux chercheurs et aux entreprises qui souhaitent investir dans ce domaine.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. J’entends l’appel que lance notre collègue Alain Houpert au nom de ses confrères radiologues : il faut prévenir la réalisation d’actes par des sociétés low cost.

Seulement, la disposition dont l’introduction dans le code de la santé publique est proposée correspond à peu près à ce qui se passe actuellement avec les négociations conventionnelles et la charte qui va être préparée par la Haute Autorité de santé.

Si je comprends les préoccupations exprimées, je ne vois pas comment l’adoption de l’amendement, tel qu’il est rédigé, pourrait répondre à ces inquiétudes, que nous partageons. Je maintiens donc ma position : retrait, sinon avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 132 rectifié quater.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 32 - Amendement n° 132 rectifié quater
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 32 bis - Amendements n° 46 rectifié quater, n° 287  rectifié ter, n° 475 rectifié bis et n° 523 rectifié

Article 32 bis (nouveau)

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L’article L. 161-35 est ainsi modifié :

a) Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les arrêts de travail sont prescrits de manière dématérialisée, via un service mis à la disposition des professionnels de santé par les organismes d’assurance maladie. » ;

b) Au II, les mots : « de l’obligation de transmission électronique par les professionnels et centres de santé » sont remplacés par les mots : « des obligations définies au I » ;

2° L’article L. 323-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 323-3. – L’indemnité journalière prévue à l’article L. 321-1 est servie, en cas de travail à temps partiel pour motif thérapeutique, dans les cas suivants :

« 1° Le maintien au travail ou la reprise du travail et le travail effectué sont reconnus comme étant de nature à favoriser l’amélioration de l’état de santé de l’assuré ;

« 2° L’assuré doit faire l’objet d’une rééducation ou d’une réadaptation professionnelle pour recouvrer un emploi compatible avec son état de santé.

« Les modalités de calcul de l’indemnité journalière versée en cas de travail à temps partiel pour motif thérapeutique ainsi que sa durée de versement sont déterminées par décret en Conseil d’État. »

II. – Le deuxième alinéa du I de l’article L. 161-35 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant de la présente loi entre en vigueur, et au plus tard le 31 décembre 2021, à des dates fixées, selon les prescripteurs, par les conventions mentionnées aux articles L. 162-5 et L. 162-9 du même code. Si la convention n’a pas fixé un tel calendrier avant le 30 juin 2019, un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale y procède dans un délai de deux mois.

III. – Les ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé arrêtent les dates, qui ne peuvent être postérieures au 31 décembre 2021, auxquelles les organismes d’assurance maladie des régimes autres que le régime général et le régime agricole sont tenus de mettre à la disposition des prescripteurs le service leur permettant de prescrire les arrêts de travail de manière dématérialisée. Avant ces dates, les prescripteurs sont déchargés de l’obligation fixée à l’article L. 161-35 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant de la présente loi pour les assurés relevant de ces régimes.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, sur l’article.

M. Bernard Jomier. Cet article, introduit à l’Assemblée nationale sur l’initiative du Gouvernement, prévoit notamment l’obligation de télétransmission des arrêts de travail.

Alors que les feuilles de soins électroniques sont télétransmises par les médecins à plus de 80 %, pour les arrêts de travail, ce taux oscille entre 20 % et 25 % chez les médecins libéraux. Pourquoi est-il si bas ?

Parce qu’une feuille de soins électronique, il ne faut pas plus de temps pour la remplir qu’une feuille de soins papier, voire moins, mais qu’un arrêt de travail électronique demande au médecin au moins autant de temps qu’un arrêt de travail papier, alors même que l’on parle de libérer du temps médical. Pis, une fois l’arrêt de travail électronique établi, le prescripteur doit imprimer la notice d’information et remettre les documents papier au patient.

Il ne faut pas chercher midi à quatorze heures : si l’arrêt de travail électronique ne se développe pas, c’est que le process n’est pas satisfaisant.

Dans ces conditions, la méthode la plus logique serait de demander à l’assurance maladie d’élaborer un process qui ne soit pas chronophage et prenne tout simplement moins de temps ; moyennant quoi, naturellement, les 80 % à 85 % de médecins qui font des feuilles de soins électroniques feraient aussi, sans aucune difficulté, des arrêts de travail dématérialisés.

Au lieu de cela, le Gouvernement demande au législateur d’instaurer une obligation. Je suis extrêmement dubitatif sur cette façon de procéder : quand la méthode n’est pas la bonne, il faut modifier la méthode ! Il importe, simplement, je le répète, qu’un arrêt de travail par voie électronique ne prenne pas plus de temps au médecin qu’un arrêt de travail papier.

Enfin, alors que le Premier ministre a demandé un rapport sur la question du nombre trop élevé d’arrêts de travail et d’indemnités journalières, rassurez-moi, madame la ministre : on ne va tout de même pas maintenir une méthode complexe pour dissuader, pour participer d’un mouvement de régulation des arrêts de travail ?

M. le président. L’amendement n° 586 rectifié, présenté par Mme Guillotin, MM. Arnell, A. Bertrand, Castelli, Collin et Corbisez, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier, Roux et Vall, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Après les mots :

sont prescrits

insérer les mots :

sauf exception

II. – Alinéa 11, après la première phrase

Insérer une phrase ainsi rédigée :

Ces dernières définissent également les situations dans lesquelles la dématérialisation des arrêts de travail ne peut s’appliquer.

La parole est à M. Guillaume Arnell.

M. Guillaume Arnell. Nous partageons tout à fait les préoccupations formulées par M. Jomier. Nous avons souhaité les traduire dans cet amendement, qui ne vise nullement à revenir sur la dématérialisation des arrêts de travail pour cause de maladie – une avancée majeure en termes de simplification et de traitement rapide de ces arrêts de travail, nonobstant ce qu’a dit M. Jomier –, mais tend à préciser que, dans certains cas, la dématérialisation ne peut pas se faire, par exemple dans le cadre de la permanence de soins, ou tout simplement lorsque l’arrêt maladie est réalisé au domicile du patient.

Inscrire l’exception dans la convention médicale évitera que cette avancée ne se transforme en charge supplémentaire pour les médecins.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. L’article 32 bis prévoit que les régimes de sécurité sociale ont l’obligation de mettre à la disposition des prescripteurs des services leur permettant de prescrire des arrêts de travail de manière dématérialisée, ce qui supposera sans doute, monsieur Jomier, de simplifier les formulaires en question.

Ces questions doivent être réglées par voie conventionnelle, et il n’est pas forcément nécessaire d’inscrire une telle précision dans la loi. Néanmoins, au vu des difficultés exprimées et des inquiétudes suscitées par l’obligation de dématérialiser, la commission a émis un avis de sagesse.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Il est vrai, monsieur Jomier, que le Gouvernement a demandé un rapport pour essayer de comprendre la progression extrêmement rapide des arrêts de travail.

Une partie de cette progression peut s’expliquer par le vieillissement de la population active lié au décalage de l’âge de départ à la retraite : il s’agit de l’augmentation du nombre d’arrêts de travail longs, souvent liés à des pathologies chroniques. Cette partie-là du phénomène, nous la considérons comme totalement légitime.

Seulement, nous constatons aussi une augmentation des arrêts de travail de courte durée, indépendante de l’état de santé de la population, compte tenu des déterminants de santé. Nous voulons savoir si elle résulte de mauvaises pratiques des entreprises, des citoyens ou de certains médecins. Probablement l’explication est-elle multifactorielle.

Nous cherchons à améliorer notre capacité à ralentir cette progression très rapide. Dans le rapport qui nous a été fourni sur les arrêts de travail, un rapport qui a fait l’objet de concertations avec les organisations syndicales, différentes pistes sont proposées. Nous en attendons la version finale, mais, d’ores et déjà, nous avons voulu inscrire dans le PLFSS la dématérialisation, qui, sans être extrêmement disruptive, permet d’avancer sur cette question.

La dématérialisation permet, grâce à une transmission quasi instantanée, d’améliorer la capacité de contrôle de ceux qui veulent contrôler un certain nombre d’arrêts de travail. Quand vous recevez au bout de trois jours des arrêts de travail qui en font quatre, vous n’avez plus le temps de diligenter un contrôle. Cette instantanéité de l’information est donc importante si l’on veut réduire un certain nombre de pratiques.

En outre, la dématérialisation permet à la CNAM de connaître le type d’entreprise et même le nom de l’entreprise, informations grâce auxquelles on peut capitaliser sur la compréhension de ce qui se passe : savoir, par exemple, si une entreprise est vraiment très défavorable à la qualité de vie au travail de ses salariés.

La dématérialisation a été prônée par les trois auteurs du rapport sur les arrêts de travail ; nous vous proposons de l’inscrire dans la loi. Il est évident, monsieur Arnell, qu’il y a des situations d’exception, mais cela va probablement mieux en le disant. J’émets donc un avis de sagesse sur votre amendement.

M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. J’entends bien les arguments en faveur de la dématérialisation, et ils ne me posent aucun problème ; ce sont ceux que la CNAM expose de façon tout à fait juste. J’ai vu que la dématérialisation faisait partie des pistes des trois rapporteurs, et je suis tout à fait d’accord sur ce point.

Néanmoins, madame la ministre, cela ne répond pas à la question de l’outil. Je le répète : l’outil actuel n’est pas adapté !

Alors que vous menez une politique de libération de temps médical qui est juste, l’outil consomme du temps médical. C’est pour cela que 23 % seulement des généralistes télétransmettent les arrêts de travail, alors qu’ils sont plus de 80 % à réaliser des feuilles de soins électroniques – preuve qu’ils ne sont pas rétifs ou de mauvaise volonté.

Il faut donc que l’outil soit amélioré. En attendant, par principe, je voterai l’amendement de nos collègues Guillaume Arnell et Véronique Guillotin, pour préciser qu’il y a des exceptions ; mais, par pitié, madame la ministre, demandez à la CNAM que, dans le cadre conventionnel, cet outil soit amélioré !

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je ne comprends pas qu’on en fasse autant sur les statistiques. Depuis des années, avec les relevés du système national inter-régimes, dits SNIR, le médecin généraliste reçoit tous les trois mois, notamment, le nombre d’actes qu’il a fait et les indemnités journalières correspondantes.

Ce document permet de voir les ratios d’indemnités journalières prescrites par médecin, en fonction de la population. Avec la modélisation, on arrive véritablement à repérer celui qui prescrit plus d’arrêts de travail que d’autres, et on peut ensuite analyser la population concernée. Il n’est donc pas compliqué d’identifier les cas où il peut y avoir des excès d’indemnités journalières à corriger.

Par ailleurs, s’il est bien évident que la télétransmission des arrêts de travail, c’est l’avenir, aujourd’hui, un certain nombre de zones ou de dispositions font qu’on ne peut pas toujours télétransmettre. Je voterai donc l’amendement.

Madame la ministre, il faut se tourner vers la télétransmission et la modélisation des données, mais, dès à présent, vous avez les moyens d’agir !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 586 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 625, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 5

Compléter cet alinéa par les mots :

du présent article

II. – Après l’alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° À l’article L. 161-35-1, les mots : « premier alinéa » sont remplacés par les mots : « du I » et la référence : « au 1° » est remplacée par les références : « aux 1° et 2° » ;

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 625.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 32 bis, modifié.

(Larticle 32 bis est adopté.)

Article 32 bis (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article 33

Article additionnel après l’article 32 bis

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.

L’amendement n° 46 rectifié quater est présenté par M. Mouiller, Mme Deromedi, M. Sol, Mme Chauvin, M. Bonhomme, Mme Bruguière, M. Guerriau, Mme L. Darcos, MM. Milon, Daubresse, Kern, Kennel, A. Marc et B. Fournier, Mmes Malet et Lanfranchi Dorgal, MM. Morisset et Canevet, Mme Puissat, MM. Bascher, Bazin, Revet, Frassa et Henno, Mmes Gruny et Micouleau, MM. Cuypers, Bouloux, Lefèvre, Pierre, Poniatowski, Perrin et Raison, Mme A.M. Bertrand, MM. Rapin, D. Laurent, Nougein, Chasseing et Saury, Mme Lassarade, MM. Piednoir, Karoutchi, Gilles, Decool, L. Hervé, Brisson et Wattebled, Mme Canayer, MM. Mandelli et Laménie, Mme Bories, MM. J.M. Boyer, Genest, Darnaud, Moga et Gremillet, Mme Duranton et M. Sido.

L’amendement n° 287 rectifié ter est présenté par Mmes C. Fournier, Guidez et Dindar et M. Mizzon.

L’amendement n° 475 rectifié bis est présenté par Mmes Grelet-Certenais et Féret, MM. Daudigny et Kanner, Mme Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, M. Fichet, Mme Bonnefoy, MM. Antiste et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mmes S. Robert et M. Filleul, MM. Tissot, J. Bigot, P. Joly, Mazuir, Jacquin, Duran et les membres du groupe socialiste et républicain.

L’amendement n° 523 rectifié est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 32 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L’article L. 323-6 est ainsi modifié :

a) Le 4° est ainsi rédigé :

« 4° De s’abstenir de toute activité professionnelle donnant lieu à des revenus d’activité ou rémunération ; »

b) Au dernier alinéa, les mots : « En outre, si l’activité mentionnée au 4° a donné lieu à des revenus d’activité » sont remplacés par les mots : « En cas de méconnaissance de l’obligation mentionnée au 4° » ;

2° Le 3° de l’article L. 324-1 est ainsi rédigé :

« 3° De s’abstenir de toute activité professionnelle donnant lieu à des revenus d’activité ou rémunération ; ».

La parole est à M. Philippe Mouiller, pour présenter l’amendement n° 46 rectifié quater.

M. Philippe Mouiller. Cet amendement a pour objet de préciser la notion d’activité autorisée en cas d’arrêt de travail donnant lieu au versement d’indemnités journalières.

Un certain nombre de médecins sont amenés à proposer à leurs patients d’exercer des activités pendant leur arrêt de travail, notamment dans certaines situations d’affection psychique ou mentale, ou en cas de maladie chronique ou de longue durée. Dans ces cas, l’activité est préconisée comme un facteur d’amélioration de l’état de la personne.

Or, en l’état actuel du droit, la notion d’activité autorisée ou non autorisée pendant les arrêts de travail n’est pas définie ; je parle, bien entendu, des activités pratiquées pendant les heures autorisées. C’est pourquoi nous proposons de sécuriser la situation.

M. le président. La parole est à Mme Nassimah Dindar, pour présenter l’amendement n° 287 rectifié ter.

Mme Nassimah Dindar. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° 475 rectifié bis.

Mme Corinne Féret. Il est également défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 523 rectifié.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement vise à préciser la notion d’activité autorisée en cas d’indemnités journalières pour faciliter le maintien d’activités en dehors de l’activité professionnelle.

La notion d’activité autorisée ou non autorisée pendant les arrêts de travail n’est pas juridiquement définie. Il peut s’agir d’activités de loisirs, d’activités sportives, politiques ou sociales, voire familiales.

À ce propos, la Cour de cassation a interprété les dispositions du code de la sécurité sociale comme interdisant à un salarié en arrêt de travail pour une maladie ou un accident d’exercer toute activité qui n’aurait pas été expressément autorisée par son médecin, sous peine de devoir restituer les indemnités journalières perçues. Or, même si de nombreux médecins encouragent les personnes arrêtées à mener des activités extraprofessionnelles, rares sont ceux qui l’inscrivent noir sur blanc sur les arrêts de travail.

L’indemnité journalière a pour objectif d’assurer des revenus au salarié qui ne peut plus travailler, parce qu’il est malade ou victime d’un accident. Dans ce contexte, il paraît logique qu’il ne puisse cumuler ses indemnités avec les revenus d’une activité professionnelle.

Toutefois, rien ne justifie d’exclure la possibilité d’exercer toute autre activité, celle-ci pouvant même être bénéfique pour l’amélioration de la santé du salarié et accélérer sa reprise d’activité professionnelle. C’est le cas notamment pour les arrêts liés à une affection psychique ou mentale, ou encore à une maladie chronique.

Pour ces raisons, nous proposons d’assouplir le dispositif en prévoyant que seules sont interdites les activités professionnelles donnant lieu à des revenus d’activité ou des rémunérations.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Ces amendements identiques visent à autoriser la pratique d’une activité non rémunérée à caractère social aux horaires de sortie autorisés par un médecin dans le cadre d’un arrêt de travail. La commission y est favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. La notion d’activité autorisée ou non autorisée est très difficile à préciser juridiquement. En effet, il est très difficile de déterminer ex ante l’activité qui pourra être autorisée ou non ; cela dépend de la pathologie dont souffre la personne : il est bénéfique de jardiner quand on a une dépression, pas quand on a un trouble musculo-squelettique. Le régime doit donc être adapté à chaque patient, en fonction des pathologies de celui-ci.

Par ailleurs, si le médecin peut fixer les conditions de l’arrêt de travail, par exemple, en prescrivant un temps partiel thérapeutique ou en énumérant certaines activités autorisées, il ne peut pas dresser la liste exhaustive des activités autorisées patient par patient : cela augmenterait considérablement sa charge administrative.

Dès lors, limiter les activités non autorisées aux seules activités de nature professionnelle donnant lieu à des revenus d’activité ou à une rémunération ne nous paraît pas pertinent. Cela reviendrait à autoriser toute activité non professionnelle durant un arrêt maladie, ce qui, d’une certaine manière, ne serait pas favorable au patient qui doit s’arrêter pour raison de santé.

Durant un arrêt maladie, le principe doit demeurer que l’activité autorisée est l’exception, et qu’elle est autorisée sur décision médicale. La mission en cours relative aux indemnités journalières sera l’occasion de réexaminer globalement la législation en vigueur sur ce sujet.

Nous sommes donc défavorables aux quatre amendements identiques.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. L’objet de notre amendement, soutenu par beaucoup sur ces travées, est de permettre à une personne en arrêt maladie de pratiquer une activité non rémunérée. Les médecins eux-mêmes encouragent ces personnes à retrouver de l’activité pendant leur arrêt de travail, car cela participe à leur bien-être physique, psychique et mental, voire, dans certaines pathologies, à un rétablissement plus rapide.

Il ne faut pas oublier que bon nombre de salariés en activité professionnelle sont, à titre bénévole, représentants d’usagers ou membres d’associations de malades. Cela voudrait-il dire que, tout le temps qu’ils sont en arrêt maladie, ils ne pourraient pas participer aux activités de ces associations, alors que leur démarche est tout à fait liée à leur arrêt de travail et à la pathologie dont ils souffrent ?

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur ces amendements identiques, parce que nous avions été sensibles à l’objectif de continuation de la vie sociale. Toutefois, compte tenu des explications de Mme la ministre et de la difficulté posée par une précision trop générale par rapport à des cas particuliers, à titre personnel, je ne voterai pas les amendements.

M. le président. La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

M. Philippe Mouiller. Je vais retirer l’amendement n° 46 rectifié quater, au regard notamment de la mission que vous avez évoquée, madame la ministre, mais certainement pas au regard de l’argument que vous avez avancé. Le jardinage, en effet, est une activité pratiquée à la maison : personne n’ira vérifier si une personne qui a un lumbago jardine ou pas. Cet exemple n’est donc absolument pas pertinent.

Pour ma part, j’ai à l’esprit les différentes interventions que j’ai pu avoir, notamment en milieu psychiatrique. Dans ce domaine, dans 90 % des cas, on préconise que le patient ait une activité adaptée à sa situation.

Je comprends la complexité de la question, mais ayons en tête qu’un certain nombre de dossiers sont aujourd’hui devant les tribunaux, dans lesquels on demande le remboursement d’indemnités journalières à une personne ayant pratiqué une activité non rémunérée.

De fait, il n’est pas rare que des tribunaux demandent le remboursement des indemnités journalières lorsque des activités non rémunérées ont été pratiquées aux heures de sortie autorisées. Il y a donc urgence à regarder de très près ces situations relativement nombreuses, pour que la loi oriente les jugements.

Je retire mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 46 rectifié quater est retiré.

La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais, pour explication de vote.

Mme Nadine Grelet-Certenais. J’ai un cas de cette nature à signaler : la Cour de cassation a validé l’obligation faite à un salarié de restituer les indemnités journalières perçues pour un arrêt de travail, parce que ce salarié s’est rendu à quelques réunions de conseil municipal et d’associations pendant sa période d’arrêt, dans le cadre des horaires de sortie autorisés.

Le maintien d’une vie sociale est, comme il a été souligné, un bienfait moral et psychique. Pensons simplement au fait d’aller chercher ses enfants à l’école. Les personnes ne se rétablissent que plus rapidement lorsqu’elles sont libres de vaquer à quelques occupations qui ne sont pas du tout incompatibles avec les raisons pour lesquelles elles ont été arrêtées.

Nous maintenons donc notre amendement, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 287 rectifié ter, 475 rectifié bis et 523 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Article additionnel après l'article 32 bis - Amendements n° 46 rectifié quater, n° 287  rectifié ter, n° 475 rectifié bis et n° 523 rectifié
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 33 - Amendement n° 439 rectifié (début)

Article 33

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L’article L. 133-4 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après le mot : « tarification », sont insérés les mots : « , de distribution » ;

b) Au quatrième alinéa, après les mots : « du professionnel », sont insérés les mots : « , du distributeur » et, après le mot : « santé », sont insérés les mots : « , à un distributeur » ;

c) À la fin du dernier alinéa, les mots : « des quatre alinéas qui précèdent » sont remplacés par les mots : « du présent article » ;

1° bis (nouveau) Au 6° de l’article L. 160-8, les mots : « à l’examen de prévention bucco-dentaire mentionné » sont remplacés par les mots : « aux examens de prévention bucco-dentaire mentionnés » ;

2° Au 3° de l’article L. 162-9, la référence : « 3° » est remplacée par la référence : « 2° » ;

3° L’article L. 165-1 est ainsi modifié :

a) À la fin de la dernière phrase du premier alinéa, les mots : « et d’utilisation » sont remplacés par les mots : « , d’utilisation et de distribution » ;

b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’inscription sur la liste peut distinguer au sein d’une même catégorie de produits ou de prestations plusieurs classes, définies, d’une part, en fonction du caractère primordial du service rendu et, d’autre part, en fonction du rapport entre ce service et le tarif ou le prix envisagé. L’une au moins de ces classes a vocation à faire l’objet d’une prise en charge renforcée, par l’application des dispositions des articles L. 165-2, L. 165-3 ou L. 871-1. » ;

c) (nouveau) Au troisième alinéa, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « troisième » ;

4° Après l’article L. 165-1-3, il est inséré un article L. 165-1-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 165-1-4. – I. – Les règles de distribution mentionnées au premier alinéa de l’article L. 165-1 peuvent comporter l’obligation, pour le fabricant ou pour le distributeur, de proposer et de disposer de certains produits ou prestations appartenant aux classes à prise en charge renforcée définies en application du deuxième alinéa du même article L. 165-1.

« II. – La distribution, en vue de leur prise en charge par l’assurance maladie, de produits ou prestations inscrits sur la liste mentionnée à l’article L. 165-1 peut donner lieu à l’obligation pour le distributeur de participer à un dispositif d’évaluation visant à établir la qualité de la prise en charge du patient et la mise en œuvre conforme des modalités de prise en charge et de distribution des produits ou prestations, notamment au regard des exigences fixées par la liste mentionnée à l’article L. 165-1 et de celles fixées au I du présent article, ainsi que la satisfaction des patients.

« III. – Les sommes dues en application des dispositions de l’article L. 133-4 sont recouvrées auprès du distributeur concerné lorsqu’elles résultent du non-respect des dispositions du I du présent article ou de l’article L. 165-9 par ce distributeur.

« IV. – Le directeur de l’organisme d’assurance maladie compétent peut prononcer à l’encontre du fabricant ou du distributeur, après que celui-ci a été mis en mesure de présenter ses observations, une pénalité financière :

« 1° D’un montant maximal de 5 % du chiffre d’affaires hors taxe total réalisé en France en cas de méconnaissance des obligations mentionnées au I ;

« 2° D’un montant maximal de 10 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France pour les produits ou prestations pour lesquels les obligations mentionnées au II ou à l’article L. 165-9 ont été méconnues.

« Le montant de la pénalité est fixé en fonction de la gravité, de la durée et de la réitération éventuelle des manquements.

« V. – Le distributeur qui n’entend pas mettre en œuvre les obligations mentionnées au présent article et à l’article L. 165-9 en informe les assurés sociaux selon des modalités appropriées, définies par le décret mentionné au VI. L’ensemble des produits et prestations qu’il distribue ne peuvent alors être admis au remboursement.

« VI. – Un décret en Conseil d’État définit les conditions d’application du présent article. » ;

5° L’article L. 165-2 est ainsi modifié :

a) Le dernier alinéa du I est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle peut également tenir compte, à la demande des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, de l’appartenance aux classes définies en application du deuxième alinéa de l’article L. 165-1. » ;

b) Après le 7° du II, il est inséré un 8° ainsi rédigé :

« 8° L’appartenance du produit ou de la prestation à une classe autre que les classes à prise en charge renforcée définies en application du deuxième alinéa de l’article L. 165-1 du présent code. » ;

c) Il est ajouté un V ainsi rédigé :

« V. – Par dérogation aux I et II, le tarif de responsabilité des produits et prestations n’appartenant pas aux classes à prise en charge renforcée définies en application du deuxième alinéa de l’article L. 165-1 peut être fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. » ;

6° L’article L. 165-9 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi modifié :

– les mots : « et de chaque prestation proposés » sont remplacés par les mots : « proposé, incluant la fourniture du produit et précisant les prestations indissociables, » ;

– est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Le devis comporte au moins un équipement d’optique médicale ou une aide auditive appartenant à l’une des classes à prise en charge renforcée définies en application du deuxième alinéa de l’article L. 165-1, sous réserve qu’il existe un tel équipement ou une telle aide qui réponde au besoin de santé. » ;

b) Au troisième alinéa, les mots : « et les informations d’identification et de traçabilité sont transmises » sont remplacés par les mots : « est transmise » ;

c) Les deux derniers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« Le contenu et la présentation du devis et de la note, y compris les informations permettant d’assurer l’identification et la traçabilité, sont fixés par arrêté des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et de l’économie, après consultation du Conseil national de la consommation mentionné à l’article L. 112-1 du code de la consommation. » ;

7° La deuxième phrase du dernier alinéa de l’article L. 871-1 est ainsi modifiée :

a) Les mots : « peuvent être » sont remplacés par le mot : « sont » ;

b) Sont ajoutés les mots : « et les aides auditives ».

II. – Le titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 2132-2-1 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « sixième et leur douzième » sont remplacés par les mots : « troisième, leur sixième, leur neuvième, leur douzième et leur quinzième » et la deuxième phrase est supprimée ;

b) Après le même premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Dans l’année qui suit leur dix-huitième, leur vingt et unième et leur vingt-quatrième anniversaire, les assurés bénéficient d’un examen bucco-dentaire de prévention réalisé par un chirurgien-dentiste ou un médecin qualifié en stomatologie.

« Les examens prévus aux deux premiers alinéas du présent article ainsi que, le cas échéant, les soins consécutifs sont pris en charge dans les conditions prévues à l’article L. 162-1-12 du code de la sécurité sociale. » ;

c) Le second alinéa est ainsi modifié :

– à la fin de la première phrase, les mots : « de cet examen » sont remplacés par les mots : « de ces examens » ;

– est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « À défaut d’accord sur la nature, les modalités et les conditions de mise en œuvre de ces examens et sur la prise en charge des soins consécutifs, ces dernières sont définies par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale. » ;

2° L’article L. 2134-1 est abrogé.

III. – A. – Les I et II entrent en vigueur le 1er janvier 2019, sous réserve des dispositions du B du présent III.

B. – Les dispositions prises pour l’application de l’article L. 871-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant de la présente loi s’appliquent aux contrats souscrits ou renouvelés à compter du 1er janvier 2020.

Les organisations liées par une convention de branche ou un accord professionnel permettant aux salariés de bénéficier de la couverture minimale prévue à l’article L. 911-7 du code de la sécurité sociale engagent une négociation afin que la convention ou l’accord soient rendus conformes, avant le 1er janvier 2020, aux conditions prévues à l’article L. 871-1 du même code, dans sa rédaction résultant de la présente loi.

Les accords d’entreprise et les décisions unilatérales des employeurs permettant de faire bénéficier leurs salariés de cette couverture minimale sont adaptés dans les mêmes conditions, dans le respect, pour les décisions unilatérales, de l’article 11 de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l’article.

Mme Laurence Cohen. L’article 33 instaure le « 100 % santé », une mesure phare du Gouvernement qui permet une prise en charge renforcée par l’assurance maladie obligatoire et complémentaire des frais optiques, aides auditives et prothèses dentaires.

L’annonce de ce dispositif a suscité de grands espoirs, car ces trois postes de dépenses de santé sont très faiblement remboursés par la sécurité sociale. Ils induisent donc à eux seuls des phénomènes de renoncement aux soins – entre 10 % et 35 % de la population, selon les soins.

Mais ce dispositif n’a pas encore été mis en place que, déjà, un certain nombre de doutes et de critiques se font jour.

La première critique adressée au « 100 % santé » porte sur son impact tarifaire. Cette ouverture n’étant possible que par le recours à des complémentaires santé, on peut raisonnablement craindre que cette hausse des coûts ne soit répercutée, via soit l’augmentation des tarifs des contrats, soit la réduction des paniers de soins proposés. Cette crainte est d’ailleurs confirmée par les nombreuses études de cabinets de courtiers portant sur le dispositif : elles annoncent une hausse des coûts de 7 % à 10 %.

Certes, les complémentaires se sont engagées à ne pas augmenter leurs prix, mais quels mécanismes permettront de contrôler le respect de leurs engagements ? Des sanctions sont-elles prévues si elles ne les respectent pas ?

La deuxième critique adressée à ce dispositif est de laisser de côté les nombreux Français qui ne disposent pas d’une complémentaire santé, soit entre 4 millions et 5 millions de personnes. Cette inquiétude, nous l’avions déjà exprimée lors des auditions préparatoires à l’examen de ce PLFSS.

À cette occasion, madame la ministre, vous nous avez assuré que la CMU contributive permettrait à toutes ces personnes d’accéder à une complémentaire. Je veux bien vous croire, mais, actuellement, il existe déjà des dispositifs visant à permettre aux personnes en situation de précarité d’accéder à une protection complémentaire. Pourtant, elles sont des millions à ne pas avoir recours à leur droit à cette protection, et rien n’indique que cette situation change.

Si l’on ne peut que reconnaître que cette mesure va dans le bon sens, le Gouvernement ne va pas au bout de la logique, faute de donner à la sécurité sociale des financements suffisants. Nous proposons, nous, le « 100 % sécu » !

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, sur l’article.

M. Yves Daudigny. La mise en place du « 100 % santé » est une avancée importante, qui répond à une problématique majeure : l’accès aujourd’hui insuffisant à trois types de prestations. Il suffit d’avoir à l’esprit les restes à charge après intervention des complémentaires : 22 % pour l’optique, 25 % pour les soins prothétiques dentaires, 56 % pour les aides auditives.

Le dispositif prévu devrait redistribuer un milliard d’euros à l’ensemble de nos concitoyens, dont les deux tiers pris en charge par l’assurance maladie.

Toutefois, il est vrai que des questions subsistent, au moins quatre.

Premièrement, les professionnels de santé vont-ils jouer le jeu ? Un certain nombre d’entre eux ne seront-ils pas tentés de présenter aux patients, au motif d’une meilleure qualité, un panier de soins supérieur au panier « RAC 0 » ?

Deuxièmement, quel sera le comportement des patients ? Comment vont-ils juger de la qualité de ce panier de soins ? Toutes les personnes âgées qui devraient être équipées d’un matériel d’audioprothèses vont-elles se précipiter chez les audioprothésistes pour bénéficier du dispositif ?

Troisièmement, les tarifs des contrats des complémentaires vont-ils augmenter ? Nous verrons rapidement si cette question, qui dépend des deux premières, se posera ou non.

Les complémentaires sont aujourd’hui plutôt rassurantes sur le sujet. Néanmoins, une question précise se pose : celle des personnes allocataires de ce qu’on appelle les petits contrats, ou les contrats à ticket modérateur, qui ne prévoient pas aujourd’hui un remboursement à hauteur du panier de soins « 100 % santé ». Comment ces personnes y auront-elles accès ? Les mutuelles pourront-elles le prendre en charge sur leur financement général ? Ces petits contrats devront-ils être augmentés de 3 %, 4 %, 5 % ou 7 % ?

Enfin, la quatrième question – je me dépêche, monsieur le président, car je vois le temps passer ! – porte sur le plancher, qui sera modifié, pour les contrats responsables, en particulier dans le domaine de l’optique.

De façon paradoxale, des personnes qui bénéficient aujourd’hui d’équipements d’un certain niveau verront leur reste à charge augmenter de 50 euros, voire davantage, du fait de la modification du plancher.

C’est la raison pour laquelle, et je conclurai sur ce point, le comité de suivi aura un rôle très important pour analyser les événements et, éventuellement, proposer des évolutions.

M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, il est minuit. Je vous propose de prolonger la séance jusqu’à zéro heure trente, afin de poursuivre plus avant l’examen de ce texte.

Il n’y a pas d’observation ?…

Il en est ainsi décidé.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Agnès Buzyn, ministre. Je présenterai le dispositif dans sa globalité, ce qui répondra aux questions de Mme Cohen et de M. Daudigny.

Madame Cohen, vous êtes – comme toujours ! – cohérente : vous choisissez de changer notre système de santé et de décroiser les complémentaires de l’assurance maladie. Nous avons décidé de proposer cette offre dans le cadre du système français, dans lequel l’assurance maladie rembourse environ 75 % des dépenses de santé et les complémentaires les 25 % restants.

Nous nous sommes inscrits dans ce système et avons donc réparti l’effort d’absorption du reste à charge de un milliard d’euros, qui incombe aujourd’hui aux Français, entre l’assurance maladie pour les trois quarts, soit 750 millions d’euros, et les complémentaires santé pour un quart, soit 250 millions d’euros.

Nous avons eu cette discussion hier ou avant-hier, si l’on rapporte les 250 millions d’euros à absorber aux 36 milliards d’euros de leur chiffre d’affaires, cela représente 0,14 %. Dans la négociation que nous avons menée avec l’ensemble des professionnels, nous avons vérifié qui pouvait faire un effort et sur quoi.

Nous avons d’abord travaillé à définir ce que devait être un panier de soins de qualité auquel les Français pouvaient accéder dans le cadre du « 100 % santé ».

Ensuite, nous avons regardé où se trouvaient les marges de manœuvre dans chaque filière avec l’ensemble des professionnels concernés, et leur avons demandé à tous de faire un effort : à ceux qui fabriquent les lunettes sur le prix de celles-ci, aux opticiens sur leurs marges, etc.

Les assureurs nous ont garanti qu’ils intégreraient ces 250 millions d’euros dans les augmentations habituelles des prix des complémentaires liées à l’accroissement annuel du coût de la santé en raison du vieillissement de la population. L’ONDAM croît de 2,5 % par an. De la même façon que l’assurance maladie augmente son budget, les complémentaires accroissent les leurs.

Par ailleurs, je rappelle que les complémentaires ont en quelque sorte « bénéficié » du fait que nous vivons plus longtemps, avec davantage de pathologies chroniques : de plus en plus de malades en ALD sont pris en charge à 100 % par la sécurité sociale, ce qui conduit à une diminution en tendance de la part des complémentaires dans le budget total des soins. Les coûts sont aujourd’hui, me semble-t-il, pris en charge à 76 % par l’assurance maladie et à 24 % seulement par les complémentaires. Celles-ci ont également des marges de manœuvre sur leurs frais de gestion.

Nous avons donc eu l’assurance que l’effort serait intégré dans les hausses naturelles de prix, si cela peut vous rassurer, mesdames, messieurs les sénateurs.

Ensuite, sur le panier de soins, comment s’assurer que toutes les parties prenantes vont jouer le jeu ? Un comité de suivi est mis en place, qui se substitue à l’observatoire des prix, et dont les travaux seront rendus publics. Dans notre idée, si certains ne jouent pas le jeu, nous irons vers des mesures peut-être un peu plus « coercitives », si je puis dire.

Ensuite, vous avez fait part de votre inquiétude, monsieur Daudigny, quant aux petits contrats. Mais 100 % des contrats comprendront le « 100 % santé ». Leur périmètre sera modifié, ce qui demande un peu de travail. Effectivement, vous avez raison, ceux qui ne voudraient pas le « 100 % santé » mais souhaiteraient accéder à une offre de lunettes libre – je parle des montures – verront leur plafond de remboursement diminuer de 50 euros.

C’était une façon d’absorber le coût de la réforme : nous avons cherché des équilibres globaux, que nous avons obtenus, puisque tous les professionnels ont signé avec moi l’engagement autour du « 100 % santé » au mois de juin dernier.

M. le président. L’amendement n° 377 rectifié bis, présenté par MM. Gilles et Grand, Mme Gruny, MM. Morisset, Brisson et Charon, Mmes A.M. Bertrand, Lanfranchi Dorgal et Delmont-Koropoulis et M. H. Leroy, est ainsi libellé :

Alinéa 15

Après le mot :

distributeur

insérer les mots :

défini à l’article L. 4361-1 du code de la santé publique

La parole est à M. Jean-Marie Morisset.

M. Jean-Marie Morisset. Cet amendement tend à mettre en cohérence la disposition sur le dispositif d’évaluation prévu à l’alinéa 15 et les accords sur le « 100 % santé » conclus par votre ministère, madame la ministre, avec les secteurs de l’optique et des audioprothèses. L’alinéa visé prévoit l’obligation pour le distributeur de participer au dispositif d’évaluation. Si cela est conforme avec l’accord dans le secteur des audioprothèses, cela n’est pas le cas dans celui de l’optique.

En effet, le projet de nomenclature sur le « 100 % santé », en discussion entre votre ministère et les représentants des opticiens, prévoit la transmission au patient d’un questionnaire de satisfaction, qui lui sera adressé en dehors du magasin, une fois l’équipement correcteur acquis. L’opticien ne pourra ainsi pas participer à ce dispositif d’évaluation de la délivrance de l’offre « 100 % santé », tel qu’il est prévu à l’alinéa 15.

Cette précision est d’autant plus importante que l’article 33 prévoit une sanction pour le distributeur si celui-ci ne participe pas à ce dispositif d’évaluation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Dans le secteur de l’optique, pour lequel un dispositif d’évaluation a été mis en place, les choses seront difficiles. En effet, l’évaluation reposera sur un questionnaire portant sur le ressenti des patients quant aux choix proposés dans le panier de soins.

Néanmoins, il nous semble difficile d’exclure l’optique du dispositif d’évaluation pour les raisons présentées dans l’amendement. Pour ce qui concerne le dispositif de sanction, je vais proposer dans quelques instants un amendement qui vise à répondre aux préoccupations exprimées sur le système tel qu’il est prévu et dont les modalités sont en cours de discussion.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur le sénateur, vous craignez en réalité que les opticiens, du fait de la méthode d’évaluation, puissent être sanctionnés. Avec notre façon de procéder pour l’évaluation de la réforme, il n’y a en fait pas de risque.

Dans le protocole d’accord que nous avons signé, il revient à l’opticien de déclencher l’envoi du questionnaire au domicile du patient, en utilisant un service en ligne. Cette action de l’opticien est la première étape pour que le questionnaire puisse être rempli. Les opticiens sont donc pleinement concernés et associés à cette mesure d’évaluation, qui est indispensable au suivi de la réforme.

Pour autant, ils ne seront évidemment pas tenus responsables si le patient ne répond pas. Nous leur demandons simplement d’envoyer le questionnaire : il suffira de montrer qu’ils l’ont fait pour qu’il n’y ait pas de risque de sanction.

J’ai oublié de répondre précédemment à M. Daudigny sur la question de l’offre et de l’accessibilité de l’offre. Nous avons prévu dans le protocole d’accord que toutes les offres seraient précédées d’un devis, lequel devra contenir une offre « 100 % santé », et que tous les opticiens devront proposer au minimum trente montures différentes entrant dans le cadre du « reste à charge zéro ».

Nous avons pris des mesures de cadrage, qui feront l’objet de contrôles de la DGCCRF, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. L’évaluation nous permettra d’avoir une vision de la montée en charge du dispositif.

Nous proposons donc le retrait de l’amendement n° 377 rectifié bis ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Monsieur Morisset, l’amendement n° 377 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Jean-Marie Morisset. Madame la ministre, je retire mon amendement, d’autant que les termes employés à l’alinéa 15 sont « peut donner lieu à l’obligation ». Comme ce n’est pas une obligation, les opticiens peuvent être rassurés.

M. le président. L’amendement n° 377 rectifié bis est retiré.

L’amendement n° 616, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 17

Après le mot :

financière

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

d’un montant maximal de 5 % du chiffre d’affaires hors taxe total réalisé en France, dans la limite de 10 000 euros, en cas de méconnaissance des obligations mentionnées au I.

II. – Alinéas 18 et 19

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Le projet de loi prévoit un dispositif de sanction en cas de non-respect par les fabricants ou les distributeurs des obligations instituées par le texte pour la mise en œuvre des offres « 100 % santé ».

Le montant en cas de sanction nous apparaît comme disproportionné. Nous avons donc souhaité le plafonner.

Par ailleurs, nous avons voulu supprimer la sanction reposant sur le non-respect du dispositif d’évaluation et des règles en matière de présentation des devis. En effet, les contours du dispositif d’évaluation ne sont pas assez clairement définis pour permettre d’apprécier le rôle joué par les distributeurs dans sa mise en œuvre. En outre, l’article L. 165-9-1 du code de la sécurité sociale fixe déjà une amende administrative en cas de manquement aux obligations relatives à la présentation des devis.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Il nous semble très important d’avoir une sanction qui aille de pair avec l’obligation, et que l’offre « 100 % santé » soit présentée dans les devis. Sinon, les Français n’y accéderont pas et ce droit ne sera que formel.

Si nous supprimons toute sanction, nous pouvons être quasiment certains que les devis ne comprendront pas d’offre « 100 % santé ».

L’objectif est non pas de sanctionner, mais de mettre en œuvre une nouvelle façon de pratiquer l’accès à l’offre de soins en prothèses auditives ou en lunettes.

Madame la rapporteur, nous vous proposons donc de retirer votre amendement, ou nous y serons défavorables.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 616.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 76, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéas 27 et 28

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Le texte du projet de loi ouvre la possibilité de déroger à la procédure « classique » de négociation des tarifs de responsabilité des produits et prestations éligibles au remboursement par l’assurance maladie, fixés par convention entre le fabricant ou le distributeur et le CEPS, le Comité économique des produits de santé, ou, à défaut, par décision de ce comité. Par dérogation, les tarifs des produits hors panier « 100 % santé » pourraient être fixés par arrêté ministériel.

Nous avons souhaité supprimer la possibilité de fixation unilatérale des tarifs, car la commission préfère privilégier, d’une manière générale, les procédures de conventionnement entre les acteurs du système de santé.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Vous proposez, madame la rapporteur, de supprimer la fixation par les ministres des tarifs forfaitaires pour les produits hors champ du « 100 % santé ».

Cette disposition est effectivement dérogatoire aux règles habituelles de fixation des tarifs, qui passent généralement par un accord entre le CEPS et les entreprises. Mais, dans le cas présent, il nous semble qu’une procédure simplifiée par arrêté est pleinement justifiée.

Dans le secteur de l’optique, les bases de remboursement par la sécurité sociale des équipements hors « 100 % santé » seront tellement faibles et symboliques qu’il est préférable de passer par un forfait. Cela ne mérite pas une négociation conventionnelle entre les lunettiers et le CEPS.

Nous pensons qu’il n’y a pas d’enjeu de négociation au vu des sommes en jeu. Nous préférons donc que les tarifs soient fixés forfaitairement par les ministres. Mais je peux vous rassurer, la voie conventionnelle reste bien la voie de droit commun pour tous les dispositifs médicaux. Dans le cas précis de l’optique, en dehors du « 100 % santé », elle n’a pas de justification.

Je vous demande donc de retirer votre amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

M. le président. Madame la rapporteur, l’amendement n° 76 est-il maintenu ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 76.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 44 rectifié bis, présenté par M. Mouiller, Mme Deromedi, M. Sol, Mme Chauvin, M. Bonhomme, Mme Bruguière, M. Guerriau, Mme L. Darcos, MM. Milon, Daubresse, Kern, Kennel, A. Marc et B. Fournier, Mmes Malet et Lanfranchi Dorgal, MM. Morisset et Canevet, Mme Puissat, MM. Bascher, Bazin, Revet, Frassa et Henno, Mmes Gruny et Micouleau, MM. Cuypers, Bouloux, Lefèvre, Pierre, Poniatowski, Perrin et Raison, Mme A.M. Bertrand, MM. Rapin, D. Laurent, Nougein, Chasseing, Vaspart, Pointereau et Saury, Mme Lassarade, M. Piednoir, Mme Guidez, MM. Gilles, Decool, Mayet, L. Hervé, Brisson et Wattebled, Mme Canayer, MM. Mandelli, Laménie, J.M. Boyer, Genest, Darnaud, Moga et Gremillet, Mme Duranton et M. Sido, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 31

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

- les mots : «, le cas échéant » sont supprimés ;

La parole est à M. Philippe Mouiller.

M. Philippe Mouiller. Par cet amendement, il est proposé que tout devis remis par un professionnel de santé à un assuré lors de la vente comporte obligatoirement les modalités de prise en charge par les organismes d’assurance maladie complémentaire.

Dans le cadre de la mise en place du « 100 % santé », ces organismes complémentaires se sont engagés à améliorer la lisibilité des contrats et leur comparaison, afin de faciliter un choix éclairé du consommateur. Ainsi, tous les contrats comporteront un tableau de garanties avec des libellés communs pour les grands postes de soins et un tableau d’exemples de remboursement en euros.

Toutefois, l’absence de caractère contraignant de la mesure limite l’impact de cet engagement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Tous les contrats de complémentaire santé ne comportent pas de couverture des frais d’optique ou d’aide auditive. C’est la raison pour laquelle, dans le texte, figurent les mots « le cas échéant ». Il n’est pas assuré que leur suppression dans cet article améliore la lisibilité des contrats, puisque, en l’état, l’obligation reposerait sur les professionnels assurant la distribution des produits et non sur les complémentaires.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Même avis.

M. Philippe Mouiller. Je le retire, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 44 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 148 rectifié est présenté par MM. Morisset, Mouiller et Adnot.

L’amendement n° 374 rectifié ter est présenté par M. Dallier, Mme Deromedi, M. Savin, Mmes Malet et L. Darcos, MM. Joyandet et Brisson, Mmes Bonfanti-Dossat, Dumas, Chain-Larché et Lopez, MM. D. Laurent, Houpert et Cuypers, Mmes Thomas et Estrosi Sassone, M. Ginesta, Mme Garriaud-Maylam, M. J.M. Boyer, Mme Lassarade, MM. Paccaud, Magras, Karoutchi, Cambon et Grand, Mmes Di Folco et Gruny, MM. Lefèvre et Bonhomme, Mme Procaccia, MM. Laménie, Piednoir et Duplomb, Mmes Duranton, Delmont-Koropoulis et N. Delattre, M. Gremillet et Mme Imbert.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 51

Remplacer l’année :

2020

par l’année :

2021

La parole est à M. Jean-Marie Morisset, pour présenter l’amendement n° 148 rectifié.

M. Jean-Marie Morisset. La réforme du « 100 % santé » devra nécessairement être transposée dans les entreprises sous la forme de nouvelles décisions unilatérales des employeurs ou d’accords collectifs d’entreprise renégociés, afin de pouvoir continuer à bénéficier des exonérations sociales liées aux contrats de frais de santé.

En effet, si les entreprises ne respectent pas l’échéance du 1er janvier 2020, elles perdent, d’une part, le bénéfice de l’exclusion de l’assiette des cotisations du financement patronal, et, d’autre part, l’application du taux réduit de taxe de solidarité additionnelle, la TSA, fixé à 13,27 %, ainsi que le crédit d’impôt de TSA dans le cadre de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé.

Pour ces raisons, compte tenu de la charge pesant sur les entreprises, cet amendement tend à reporter le dispositif de mise en œuvre au 1er janvier 2021.

M. le président. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour présenter l’amendement n° 374 rectifié ter.

Mme Annie Delmont-Koropoulis. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Le délai prévu par le PLFSS pour l’adaptation des contrats responsables et solidaires et la renégociation, le cas échéant, des accords collectifs d’entreprises paraît trop court aux représentants de l’entreprise. Certains appellent à une appréciation bienveillante pour l’année 2020. Il est par ailleurs nécessaire que les décrets paraissent tôt, pour laisser le temps de faire les adaptations nécessaires.

Il est vrai que le report d’un an, tel que proposé, conduirait à différer d’autant l’entrée en vigueur de la réforme. Nous souhaiterions connaître l’avis du Gouvernement, pour obtenir des assurances quant à ces modalités d’entrée en vigueur.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Les décrets seront publiés à la fin de l’année 2018.

L’amendement que vous proposez, monsieur Morisset, n’est conforme ni à la négociation que j’ai menée avec l’ensemble des parties prenantes ni aux engagements que j’ai pris devant les Français. Je ne peux y être que défavorable.

M. le président. Monsieur Morisset, l’amendement n° 148 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Marie Morisset. J’ai pris bonne note de votre argumentaire, madame la ministre, mais la mise en place de ce dispositif n’a pas fait l’objet d’une consultation ni d’une concertation avec les petites entreprises, s’agissant des charges de travail.

Ce qui m’étonne, c’est que j’ai cru comprendre que la mise en œuvre des accords prévoyait un déploiement progressif, généralisé au 1er janvier 2021. Notre rapport évoque bien les dates de 2020 et 2021. Je ne vois pas pour quelle raison on ne pourrait pas autoriser nos entreprises à reporter l’application de la réforme au 1er janvier 2021.

Néanmoins, je retire mon amendement.

Mme Annie Delmont-Koropoulis. Je retire également le mien, monsieur le président !

M. le président. Les amendements identiques nos 148 rectifié et 374 rectifié ter sont retirés.

L’amendement n° 78, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Le Gouvernement présente au Parlement, au plus tard le 1er janvier 2022, un bilan de la mise en place des offres à prise en charge renforcée en matière d’optique, de prothèses dentaires et d’aides auditives, présentant l’équilibre financier de cette réforme et son impact en termes d’accès aux soins.

La parole est à Mme la rapporteur.

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Une fois n’est pas coutume, la commission demande au Gouvernement de présenter au Parlement, au plus tard le 1er janvier 2022, un bilan de la mise en place des offres à prise en charge renforcée en matière d’optique, de prothèses dentaires et d’aides auditives, présentant l’équilibre financier de cette réforme et son impact en termes d’accès aux soins.

Certes, un comité de suivi est mis en place, mais le sujet est vraiment majeur et soulève des questions. Nous sommes favorables à l’article tel qu’il est rédigé et aux engagements qui ont été pris. Vous avez pu le constater, madame la ministre, nous n’avons d’ailleurs déposé que des amendements « réduits » sur cet article, qui, je le répète, a un impact important et a été très médiatisé.

Nous souhaitons néanmoins, au-delà du comité de suivi, disposer d’un réel bilan au 1er janvier 2022.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Comme vous le savez, madame la rapporteur, nous allons mettre en place un comité de suivi de la réforme, qui sera créé par décret avant la fin de l’année puisqu’il tiendra sa première réunion le 18 décembre prochain. Ce comité aura pour objectif d’évaluer la mise en œuvre de la réforme et ses effets, tant sur les marchés concernés que sur le recours aux soins ou encore sur les niveaux de couverture complémentaire. Il réunira la totalité des acteurs concernés par la réforme : les représentants des organismes complémentaires de l’assurance maladie, les assurés, les fabricants et les distributeurs.

Il est prévu dans le décret que le comité nous remette un rapport tous les deux ans, portant notamment sur les pratiques constatées et dressant un bilan de la mise en œuvre des réformes.

Je sais votre Haute Assemblée soucieuse d’éviter les rapports inutiles. Votre proposition étant satisfaite, nous vous suggérons de retirer votre amendement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Madame la ministre, je souhaiterais d’abord savoir qui fera partie du comité de suivi. Le Parlement y sera-t-il représenté ?

Ensuite, je vous ferai remarquer que nous avons, ce matin, estimé qu’il n’était pas nécessaire de présenter un rapport qui existait déjà dans le cadre du ministère des finances. M. Darmanin nous a répondu qu’il disposait déjà d’un document sur cette question, mais que si nous demandions un rapport supplémentaire, cela ne le dérangeait pas de le faire.

En l’espèce, vous nous dites que le comité de suivi fera déjà un rapport et, alors qu’on en vous demande un autre, vous nous répondez que cela vous dérange de le faire.

La commission des affaires sociales fait preuve de continuité en ne demandant que peu de rapports, jugeant qu’ils ne sont pas toujours d’une utilité absolue et qu’ils encombrent le travail des ministres. Mais là il n’y a pas de continuité dans les réponses des ministres : ce matin, on nous dit qu’un rapport existe déjà, mais qu’on peut nous en faire un si on le veut ; ce soir, on nous dit le contraire !

J’aimerais obtenir de votre part la même réponse que celle de M. Darmanin ce matin.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 78.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 33, modifié.

(Larticle 33 est adopté.)

Article 33
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Article additionnel après l'article 33 - Amendement n° 439 rectifié (interruption de la discussion)

Articles additionnels après l’article 33

M. le président. L’amendement n° 439 rectifié, présenté par MM. Lurel, Antiste et J. Bigot, Mmes Conconne et Jasmin, MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret et Grelet-Certenais, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, MM. Fichet et Cabanel, Mme Guillemot, MM. Kerrouche et Magner, Mme Monier, M. Montaugé, Mme S. Robert, M. Tissot, Mme M. Filleul, MM. P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 33

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 3° du I de l’article L. 162-22-10 du code de la sécurité sociale, après le mot : « spécifiques », sont insérés les mots : « liés notamment à l’éloignement, à l’insularité, aux risques naturels, à la dépendance économique vis-à-vis d’un petit nombre de produits et au surcoût des dépenses de personnel ».

La parole est à Mme Victoire Jasmin.

Mme Victoire Jasmin. Cet amendement tend à intégrer dans le code de la sécurité sociale, à l’article L. 162-22-10, des critères relatifs à l’éloignement, à l’insularité, aux risques naturels, à la dépendance économique à l’égard d’un petit nombre de produits et au surcoût des dépenses de personnel.

L’objectif est, en fait, de prendre en compte les coefficients géographiques appliqués dans les départements d’outre-mer, lesquels sont majorés par rapport à ceux qui sont pratiqués dans l’Hexagone. La majoration est de 26 % pour la Guadeloupe et la Martinique, et de 31 % pour la Réunion et la Guyane.

Des financements sont octroyés chaque fin d’année dans certains établissements, en raison des difficultés de trésorerie. Il serait important pour nous de prendre en compte ces difficultés non plus a posteriori, comme c’est le cas, mais a priori, en majorant d’emblée les coefficients, afin de permettre aux différents établissements publics de santé de fonctionner convenablement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Catherine Deroche, rapporteur. Le fait de préciser dans la loi les principaux facteurs à prendre en compte pour la définition des coefficients de majoration des tarifs outre-mer ne sera pas forcément la garantie d’une réponse efficace aux problèmes réels qui se posent.

Néanmoins, il est vrai qu’une évaluation précise des besoins et de la situation dans chaque territoire serait nécessaire.

Partageant cette préoccupation, la commission a émis un avis de sagesse.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Agnès Buzyn, ministre. Madame Jasmin, les coefficients géographiques qui s’appliquent aujourd’hui à ces hôpitaux tiennent compte évidemment de nombreux facteurs, dont les surcoûts liés à des dépenses de personnel, aux risques assurantiels qui sont pris en charge par les établissements, à la cherté de la vie, au coût des transports du matériel ou des médicaments, par exemple. Tous ces éléments sont déjà intégrés dans les coefficients géographiques, qui font l’objet de revalorisations régulières. Les dernières modifications ont été faites en mars 2017 pour la Corse, la Guyane et les Antilles.

Nous pensons que raisonner uniquement en termes de coefficients géographiques pour penser l’équilibre du budget des hôpitaux des DOM n’est pas la bonne formule.

D’abord, parce que chaque hôpital et chaque département souffrent de problématiques diverses : par exemple, à la Martinique, nous savons que la déprivation démographique est un facteur important de diminution de l’activité. On pourrait toujours augmenter les tarifs, mais il faudrait, en réalité, redimensionner l’hôpital, y compris en termes de structures, pour s’adapter à une population quelque peu différente de ce qu’elle était au moment où l’hôpital a été construit.

De la même façon, certains établissements font face à des difficultés de prise en charge de populations très particulières, qui sont mal identifiées par la tarification à l’activité, la T2A. Or le coefficient géographique ne s’applique qu’aux groupes homogènes de séjour, les GHS, et à la T2A.

Nous pensons, au contraire, qu’il faut diversifier les modes de rémunération de ces établissements, pour qu’ils puissent prendre en charge correctement un certain nombre de pathologies spécifiques. Je pense notamment à Saint-Martin, qui connaît des problématiques très importantes d’addictions, de grossesses précoces, etc.

Aujourd’hui, nous sommes très attentifs aux questions de tarification dans les DOM. J’ai d’ailleurs demandé à la mission de Jean-Marc Aubert, qui travaille sur les nouveaux modes de tarification des hôpitaux, d’inclure une réflexion spécifique sur les DOM ; les solutions seront probablement différentes pour chacun d’entre eux.

Néanmoins, il ne me semble pas opportun aujourd’hui de continuer à réfléchir uniquement sur le coefficient géographique, qui ne répond qu’à une partie des problèmes.

Je vous propose de retirer cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Madame Jasmin, l’amendement n° 439 rectifié est-il maintenu ?

Mme Victoire Jasmin. J’ai bien compris les explications que vous avez apportées, madame la ministre, mais je souhaiterais vraiment que vous puissiez tenir compte de la situation que j’ai décrite.

À défaut d’agir sur les majorations comme je le proposais, il faudrait éventuellement prendre en compte les critères que j’ai évoqués pour les différents établissements concernés, afin d’effectuer des réajustements. Comme vous le savez, à chaque fois, des dotations sont accordées en fin d’année, et cela ne peut pas durer. Il conviendrait donc d’agir autrement.

Je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 439 rectifié est retiré.

Madame la ministre, mes chers collègues, nous avons examiné 129 amendements au cours de la journée ; il en reste 123.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

Article additionnel après l'article 33 - Amendement n° 439 rectifié (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019
Discussion générale

5

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, vendredi 16 novembre 2018, à neuf heures trente, quatorze heures trente et le soir :

Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019, adopté par l’Assemblée nationale (n° 106, 2018-2019) ;

Rapport de M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général, Mme Catherine Deroche, MM. Bernard Bonne, Gérard Dériot, René-Paul Savary et Mme Élisabeth Doineau, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 111, 2018-2019) :

- Tome I : exposé général ;

- Tome II : examen des articles ;

- Tome III : tableau comparatif ;

Avis de M. Alain Joyandet, fait au nom de la commission des finances (n° 108 ; 2018-2019).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le vendredi 16 novembre 2018, à zéro heure trente.)

 

nomination de membres dune éventuelle commission mixte paritaire

La liste des candidats désignés par la commission des affaires sociales pour faire partie de léventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 a été publiée conformément à larticle 12 du règlement.

Aucune opposition ne sétant manifestée dans le délai dune heure prévu par larticle 9 du règlement, cette liste est ratifiée. Les représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire sont :

Titulaires : M. Alain Milon, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Catherine Deroche, M. René-Paul Savary, M. Yves Daudigny, Mme Michelle Meunier, M. Guillaume Arnell ;

Suppléants : M. Michel Amiel, M. Bernard Bonne, Mme Laurence Cohen, M. Gérard Dériot, Mme Élisabeth Doineau, M. Jean-Louis Tourenne, M. Alain Joyandet.

 

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD