M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Très bien !

Mme Frédérique Vidal, ministre. J’attire votre attention sur le fait que les EESPIG sont, eux aussi, bénéficiaires de la CVEC, qui leur permettra de percevoir dès cette année environ 3 millions d’euros supplémentaires au profit de la vie étudiante. Avec l’effort en gestion assumé par l’État, ils bénéficieront ainsi de 5 millions d’euros supplémentaires pour 2018. Je tenais tout particulièrement à rassurer le Sénat sur ce point.

Les services universitaires de médecine préventive et de promotion de la santé, les SUMPPS, comme les services universitaires des activités physiques et sportives, ou SUAPS, sont gérés par les universités. C’est ce qui justifie la répartition que nous avons choisi d’opérer pour la CVEC.

Le Gouvernement est parvenu, pour la première fois, à réduire de manière significative le coût de la rentrée universitaire, notamment par la suppression de la cotisation de 217 euros au régime de la sécurité sociale des étudiants et par la mise en place du paiement à date des bourses. En 2018, la rentrée universitaire a donc coûté 100 millions d’euros de moins qu’en 2017 à l’ensemble des étudiants et à leurs familles.

En 2019, je veillerai aussi à ce que nous nous donnions les moyens d’aller plus loin dans l’autonomie des universités.

Avant la fin de cette année, nous publierons l’ordonnance relative aux regroupements expérimentaux. De plus, en complément de ce texte, j’expérimente depuis la rentrée un dialogue stratégique de gestion avec neuf établissements. Le but est de pouvoir échanger directement avec eux quant à leurs besoins, à leurs projets et au développement de leur propre signature. C’est un élément fondamental de modernisation du pilotage des opérateurs du programme 150, et j’espère pouvoir le généraliser dès que possible. Comme vous, j’estime qu’il est nécessaire de soutenir les établissements dans leur stratégie, y compris les établissements ultramarins : Annick Girardin et moi-même y veillons.

Comme vous le savez, nous avons élargi le principe de spécialité l’année dernière, à l’occasion de la loi de finances pour 2018, afin de permettre aux universités de mieux valoriser leur patrimoine. Une seconde vague de dévolution est en cours d’achèvement. Elle concernera les universités de Bordeaux, Marseille, Caen et Tours.

J’en viens à l’attractivité dont doivent bénéficier nos établissements aux yeux des étudiants internationaux. Au-delà du triplement des bourses, 10 millions d’euros ont été mis à disposition des établissements au titre du fonds « Bienvenue en France ». De surcroît, 10 millions d’euros du ministère des affaires étrangères permettront de développer les campus internationaux. N’oublions pas non plus que, pour la première fois, des titres de séjour seront accordés pour la durée des cycles universitaires où les étudiants sont inscrits. De plus, les étudiants internationaux disposant d’un diplôme de master ou de doctorat pourront travailler en France sans être obligés de rentrer dans leur pays pour demander de nouveaux visas de travail.

C’est donc bien une véritable politique d’attractivité pour les étudiants internationaux que nous souhaitons mener. En effet, il est extrêmement important que nous prenions en considération les attentes de ces étudiants en matière d’accueil. C’est pourquoi nous allons travailler, notamment, avec Campus France pour définir ce label « Bienvenue en France ».

Les délibérations des conseils d’administration fixeront les règles d’exonération dont pourront bénéficier les étudiants internationaux. Je vous le confirme, c’est sur cette base que les droits perçus permettront aux établissements de soutenir leur stratégie d’attractivité.

Parce qu’elle est tout aussi prioritaire que l’enseignement supérieur, la politique de recherche et d’innovation conduite par ce gouvernement sous-tend également la construction de la MIRES 2019. Afin de faire face à une concurrence internationale renouvelée par le volontarisme, en la matière, de la Chine ou de l’Inde, mes priorités sont simples : soutien à la recherche fondamentale, mobilisation des forces scientifiques pour répondre aux grands défis sociétaux et renforcement du partenariat entre universités et organismes de recherche.

Il me semble indispensable de renforcer les missions nationales des organismes de recherche en leur confiant des programmes prioritaires de recherche à l’échelle nationale, à l’instar du programme pour le climat ou du programme dédié à l’intelligence artificielle. Au total, 29 millions d’euros, issus de la MIRES et du PIA financeront le volet « recherche » de ces programmes en 2019. Ces financements monteront en puissance année après année pour atteindre, au total, 665 millions d’euros sur la durée du quinquennat.

Ce travail devra être mené en encourageant l’excellence scientifique de demain. Ainsi, le CNRS recrutera 300 nouveaux doctorants d’ici à 2020 pour renforcer les laboratoires.

Au service de cette ambition, le budget de la recherche augmentera de 2,5 % cette année, soit une hausse de près de 8 % en deux ans. Cet effort souligne le caractère stratégique de la recherche pour notre pays. Le programme 172 disposera d’une hausse de 171 millions d’euros pour s’établir à 6,9 milliards d’euros. En matière spatiale, le programme 193 sera établi à 1,8 milliard d’euros, en hausse de 205 millions d’euros.

Nous travaillons activement à la définition de la préférence européenne pour les lanceurs, et le conseil informel de Madrid a permis des avancées en ce sens. L’observation des débris constitue également un enjeu de plus en plus important. Plusieurs leviers sont actionnés, avant, pour limiter par la réglementation la constitution de ces débris, pendant, pour surveiller l’espace et éviter les collisions, et après, pour se débarrasser de ces débris. Plusieurs projets sont en cours, notamment chez Thales Alenia Space, qui considère cette question comme un véritable sujet d’avenir.

Parce que la santé est l’une des plus urgentes préoccupations de nos concitoyens, mon ministère consacrera 17 millions d’euros en gestion au financement des plans Santé, qui sont, pour la plupart, menés par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM.

Le Sénat a, comme l’Assemblée nationale, souhaité s’emparer de la question du cancer pédiatrique, et je l’en remercie. Le budget soumis à votre examen ce soir a été amendé par vos collègues députés, à l’unanimité des suffrages, pour mobiliser et mieux coordonner la recherche fondamentale dans la lutte contre les formes les plus résistantes des cancers des enfants. Nous mobiliserons ainsi 5 millions d’euros supplémentaires par an pour mieux valoriser les travaux de nos chercheurs.

Pour ce qui concerne l’Institut français du pétrole-Énergies nouvelles, l’IFPEN, 1 million d’euros seront ajoutés en gestion : cet engagement a été pris devant l’Assemblée nationale, et je souhaite le confirmer devant vous aujourd’hui. Quant au plan Hydrogène, il recevra près de 100 millions d’euros de la part du ministère de la transition écologique et solidaire. Ces fonds seront consacrés au soutien à l’innovation, via le PIA, et au soutien au premier déploiement, au travers d’appels à projets. L’accompagnement et le conseil seront fournis par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME.

Au titre des méthodes, j’ai la conviction qu’il ne faut pas opposer le financement sur projet au financement dit « de base ». Il faut recourir aux deux procédés, et il faut les employer au bon niveau, quel que soit le vecteur. C’est pourquoi j’ai décidé de reconduire en 2019 le financement direct « en base » aux laboratoires à hauteur de 25 millions d’euros. La rémunération des personnels des établissements publics à caractère scientifique et technologique, les EPST, bénéficiera également d’une revalorisation à hauteur de 28 millions d’euros dans le cadre du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations », ou PPCR.

Pour ce qui concerne le financement sur projet, le redressement du financement de l’Agence nationale de la recherche, l’ANR, se poursuit. Le budget traduit cet effort : 33 millions d’euros supplémentaires en autorisations d’engagement sont inscrits pour 2019. L’effort atteint ainsi 65 millions d’euros en deux ans. À ces montants correspond un engagement ferme de l’État en termes de crédits de paiement : 86 millions d’euros en 2019, soit 220 millions d’euros supplémentaires en deux ans. C’est bien la preuve de mon engagement dans la durée pour assurer à la fois plus de visibilité et, comme l’a noté Mme Procaccia, plus de simplicité pour nos chercheurs.

Je renouvellerai aussi mon soutien aux initiatives vertueuses permettant d’associer le meilleur de l’initiative privée et le meilleur de la recherche publique. C’est pourquoi, en 2019, l’effort de 5 millions d’euros déjà réalisé en 2018 au profit des instituts Carnot sera reconduit.

Après avoir régularisé la situation de la France auprès des organisations scientifiques internationales à hauteur de 300 millions d’euros en 2018, dont plus de 170 millions d’euros hors secteur spatial, mon ministère restera, en 2019, pleinement engagé dans le financement des très grandes infrastructures de recherche, les TGIR. Les crédits dédiés à ces organisations internationales et aux TGIR seront en hausse de 23 millions d’euros. C’est un choix lourd, exigeant, mais fondamental pour repousser les frontières de la connaissance.

Vous le savez, l’Europe joue un rôle essentiel dans ce domaine. C’est non seulement le lieu géographique naturel de la coopération scientifique et universitaire, mais aussi celui dans lequel se dessinent l’université et la recherche de demain. Nous devons projeter nos politiques et nos pratiques à l’échelle européenne, dans le cadre de la préparation du programme Horizon Europe, le premier programme mondial en matière de recherche.

Vous le savez également, le Conseil Compétitivité volet « recherche », qui s’est tenu le 30 novembre dernier et auquel j’ai participé, nous a permis d’adopter une orientation générale partielle à propos du règlement établissant le futur programme Horizon Europe.

Les principaux éléments de cette orientation confirment que la structure du programme viendra dans la continuité du programme Horizon 2020, avec un premier pilier « excellence », un deuxième pilier « problématiques mondiales », portant notamment sur les questions climatiques et sur la compétitivité industrielle de l’Europe, et un troisième pilier « innovation ouverte ».

La négociation nous a permis d’obtenir une orientation générale partielle conforme aux grandes lignes attendues. Je songe en particulier à la création de l’agence européenne de l’innovation de rupture, l’EIC, avec un outil spécifique permettant l’émergence de start-up et un outil d’accélération dont la majorité des moyens sera dédiée à la croissance rapide, en combinant plusieurs types de soutien financier.

La Commission européenne a lancé l’appel à propositions « Universités européennes ». Je m’en réjouis d’autant plus que cette initiative répond à un engagement du Président de la République. Il s’agit d’un jalon indispensable pour affirmer clairement que notre avenir commun n’est pas concevable en dehors du cadre européen.

Cet appel à propositions, doté de 30 millions d’euros pour six projets pilotes, permettra à des consortiums d’établissements français et européens d’au moins trois pays de bâtir les premiers projets pilotes des universités européennes. Dans ce cadre, la France apportera son soutien à hauteur de 100 millions d’euros sur dix ans à la constitution de ces projets. Bien sûr, j’appelle tous les établissements français qui le souhaitent à se saisir de cette chance sans précédent, pour voir les premières universités européennes émerger dès la rentrée 2019.

Mesdames, messieurs les sénateurs, telles sont les principales priorités du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation en perspective de l’année à venir et la façon dont elles sont traduites dans le budget de la mission « Recherche et enseignement supérieur ». Pour conclure, je tiens à remercier les différents rapporteurs de la qualité du travail fourni, tant dans la rédaction de leurs rapports qu’au titre des auditions. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe Union Centriste.)

Recherche et enseignement supérieur
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2019
Article 78

M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », figurant à l’état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

Recherche et enseignement supérieur

27 953 884 660

28 146 420 984

Formations supérieures et recherche universitaire

13 523 258 788

13 599 389 277

Dont titre 2

526 808 533

526 808 533

Vie étudiante

2 703 272 712

2 704 657 912

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

6 831 308 963

6 931 219 918

Recherche spatiale

1 817 940 214

1 817 940 214

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

1 763 263 758

1 722 927 442

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

673 458 636

728 818 603

Dont titre 2

105 851 219

105 851 219

Recherche duale (civile et militaire)

179 519 167

179 519 167

Recherche culturelle et culture scientifique

110 499 410

109 722 718

Enseignement supérieur et recherche agricoles

351 363 012

352 225 733

Dont titre 2

222 244 448

222 244 448

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-134, présenté par M. Ouzoulias, Mme Brulin, MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

700 000 000

700 000 000

Vie étudiante

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

700 000 000

700 000 000

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

700 000 000

700 000 000

700 000 000

700 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

M. Pierre Ouzoulias. Mes chers collègues, avec cet amendement, nous proposons la suppression de l’ANR. La radicalité de cette mesure m’est inspirée non par les événements en cours (M. Jérôme Bascher sexclame.),…

M. André Gattolin. Pas encore !

M. Pierre Ouzoulias. … mais par une analyse logique, que je vais vous exposer maintenant, sans gilet jaune.

Madame la ministre, votre objectif est que les projets déposés devant l’ANR atteignent un taux de réussite de 20 %. Or, comme l’ont souligné nos rapporteurs, cette proportion est extrêmement faible : elle est de l’ordre de 40 % en Suisse et de 35 % en Allemagne. Surtout, d’après nos calculs, ce taux ne pourrait être obtenu, à la fin du mandat – si vous parvenez à son terme –, que par une baisse tendancielle du budget moyen.

En effet, le taux de financement moyen des programmes, qui était de 487 000 euros en 2009, est tombé à 360 000 en 2017. Pour atteindre les 20 %, il faudrait que cette diminution continue.

À mon sens, une telle évolution n’est pas de bonne politique : si, aujourd’hui, les chercheurs consentent énormément d’efforts à ce titre, c’est aussi parce que le jeu en vaut la chandelle. Si le taux moyen de financement baisse, les demandes baisseront également. Mais peut-être est-ce votre but ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Non !

M. Pierre Ouzoulias. À ce sujet, notre ancien collègue Michel Berson avait bien posé les termes du débat, soulignant très justement que des structures comme l’ANR ne peuvent fonctionner, en France, sans un budget annuel d’environ 1 milliard d’euros. On en est loin ! Sincèrement, le demi-régime, tel que vous l’avez calculé et qui constitue votre objectif, ne peut fonctionner en l’état.

En d’autres termes, soit il faut consacrer 1 milliard d’euros à cette agence, ce qui n’est pas le cas, soit il faut la supprimer : les financements dont il s’agit seront dédiés au préciput des équipes, qui aujourd’hui fait défaut.

M. le président. L’amendement n° II-176 rectifié bis, présenté par M. Sol, Mmes Noël et Gruny, MM. Paccaud, Daubresse et Calvet, Mme Garriaud-Maylam, M. Sido, Mme Deromedi, MM. Moga et Mandelli, Mmes Vullien, Lanfranchi Dorgal, F. Gerbaud et Lamure et MM. B. Fournier, Grand, Babary, Charon, Genest, Delcros, L. Hervé et Piednoir, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

266 000 000

266 000 000

Vie étudiante

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

266 000 000

266 000 000

Recherche spatiale

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

Recherche duale (civile et militaire)

Recherche culturelle et culture scientifique

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

TOTAL

266 000 000

266 000 000

266 000 000

266 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à M. Stéphane Piednoir.

M. Stéphane Piednoir. Cet amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. Monsieur Ouzoulias, au travers de l’amendement n° II-134, vous suggérez purement et simplement de supprimer les crédits de l’ANR : ce faisant, vous allez à l’encontre du programme proposé par le Gouvernement et par la commission.

Je l’ai déjà dit cette année, comme l’année dernière, lors de la discussion générale : à mon sens, et au regard de la courte expérience dont je dispose en la matière, il est important de faire progresser les crédits de l’ANR. À cet égard, vous avez cité un chiffre très intéressant, à savoir 1 milliard d’euros. Il faut encore nous donner un peu de temps pour atteindre cet objectif, mais nous y arrivons progressivement. Nous verrons si, de manière corrélée, le nombre de projets reçus augmente significativement.

Je vous signale également un petit problème technique au sujet du transfert de crédits. Au sein du programme 172, vous mentionnez une action n° 09. Nous ne l’avons pas trouvée ; en revanche, nous avons trouvé une action n° 17, qui correspond mieux au sujet traité.

M. Jean-François Rapin, rapporteur spécial. Cette précision étant faite, à la lecture de votre amendement, l’on ne perçoit pas non plus les éléments qui pourraient tendre à remplacer les missions actuellement exercées par l’ANR. Non seulement cette agence distribue des crédits à différents projets, mais elle dispose de diverses attributions, comme la gestion des crédits du PIA. Il faudrait également tenir compte de toutes les conséquences qu’entraînerait sa suppression.

Laissons encore une chance de progression au Gouvernement : Mme la ministre reviendra sans doute l’année prochaine avec des crédits en augmentation et, certainement, avec un meilleur taux de réussite. Nous pourrons alors reparler de ce sujet, mais, pour l’heure, je suis très défavorable à cet amendement de suppression de l’ANR.

Au travers de l’amendement n° II-176 rectifié bis, M. Sol vise un objectif tout à fait intéressant, et pour cause : à l’encontre de la précédente proposition, il s’agit d’augmenter les fonds dévolus à l’ANR. Le seul problème, c’est que le transfert de crédits serait opéré aux dépens de la sécurisation et de l’équipement des bâtiments universitaires. Si ce budget était grevé de 20 %, l’on s’exposerait à des conséquences inquiétantes, et même catastrophiques.

De plus, l’un des points figurant dans l’objet de l’amendement me paraît contestable : il s’agit du traitement réservé au crédit d’impôt recherche, le CIR. Au regard des auditions que nous avons menées, il me semble que ce dispositif doit être préservé. De plus, dans l’exercice de mes mandats de sénateur et conseiller régional, je visite régulièrement des entreprises. Or beaucoup de PME bénéficient du CIR, grâce auquel elles atteignent un taux de croissance intéressant, en particulier au titre de la recherche.

Je sollicite donc le retrait de cet amendement ; de toute manière, la commission et de Gouvernement défendent déjà l’augmentation progressive des crédits de l’ANR, que proposent ses auteurs.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Au titre de l’amendement n° II-134, je signale que l’ANR permet à de jeunes équipes d’obtenir des financements propres, donc d’émerger en créant leur laboratoire. De plus, les crédits de cette agence viennent abonder les laboratoires de recherche : d’une manière ou d’une autre, ces derniers sont donc bien destinataires des fonds.

À propos de l’amendement n° II-176 rectifié bis, je rappelle que l’urgence climatique est, bien entendu, une priorité absolue de ce gouvernement. C’est pourquoi nous avons d’ores et déjà ouvert un programme prioritaire de recherche. Nous avons également veillé à ce que le programme Horizon Europe puisse dédier des crédits spécifiques à la question de la transition énergétique et du climat.

Sur ces deux amendements, le Gouvernement émet donc les mêmes avis que la commission.

M. le président. La parole est à Mme la rapporteur pour avis.

Mme Laure Darcos, rapporteur pour avis de la commission de la culture. Sans vouloir prolonger les débats, je tiens à apporter mon témoignage.

Monsieur Ouzoulias, votre amendement, qui est radical, m’a surprise. Pour avoir passé près de quatre heures à l’ANR, je peux vous dire que M. Thierry Damerval et la nouvelle équipe font tout pour rationaliser les projets. J’en ai également discuté avec le cabinet de Mme la ministre. L’ANR peut sectoriser les thématiques de recherche, et repérer ainsi ce qui n’a pas été entrepris. En même temps, elle recense toutes les thématiques génériques. Sur les spécificités importantes pour les années à venir, l’ANR est en mesure d’avoir plus de visibilité qu’une autre structure.

Je ne vois vraiment pas comment vous pourriez distribuer directement les crédits aux laboratoires, par quels biais. Ce serait, dirais-je, un peu « foutraque » ! (Murmures amusés.) Dans la situation actuelle, on espère dépasser le taux de 20 % de réponses positives. Quoi qu’il en soit, c’est bien l’intention de l’équipe, et j’aimerais vraiment lui laisser le bénéfice du doute pour les deux ou trois années à venir.

Je voterai bien évidemment contre l’amendement de mon collègue et néanmoins ami Pierre Ouzoulias.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote sur l’amendement n° II-134.

M. Pierre Ouzoulias. Foutraque, non ; dialectique, sans doute ! (Sourires.)

Manifestement, entre zéro et un milliard, les termes médians ne sont pas satisfaisants. Pour qu’une agence de moyens fonctionne bien, il faut qu’elle ait un gros volume. Sinon, les taux d’insatisfaction sont trop élevés. Cela demande énormément de travail aux chercheurs, pour de faibles résultats.

Monsieur le rapporteur spécial, j’ai parfaitement entendu votre argumentation très détaillée, et je vous en remercie. Je vous fais simplement remarquer qu’avec le rythme de progression actuelle nous n’atteindrons pas 1 milliard d’euros en 2022. Nous en serons à 866 millions d’euros.

Par ailleurs, à titre d’exemple, j’indique que le programme prioritaire de recherche sur les solutions alternatives aux pesticides, s’il a été confié à l’INRA par l’État, sera mis en œuvre par voie d’appels à projets de l’ANR. Ainsi, tout doucement, le Gouvernement tend à considérer l’ANR comme une nouvelle agence de moyens pour financer des projets nouveaux, qu’elle confie à des opérateurs sans leur donner de moyens de financement : autant d’argent qui ne va pas aux jeunes chercheurs évoqués par Mme la ministre.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bascher, pour explication de vote.

M. Jérôme Bascher. Je dois chercher dans mes très vieux souvenirs pour me remémorer la création de l’ANR. À l’époque, le groupe communiste s’y était opposé, en s’appuyant exactement sur les mêmes arguments. On peut donc vous féliciter, mon cher collègue, de rester fidèle, en tant qu’archéologue et spécialiste de l’histoire ancienne, à une certaine vérité historique. Simplement, ce n’est pas forcément celle-là qui trouve à s’appliquer à ce que vivent concrètement nos chercheurs.

À l’époque, il s’agissait de dénoncer le fait que l’État, tout en distribuant des crédits de soutien aux laboratoires, n’était plus stratège et ne décidait plus de grands projets de recherche, comme au bon temps du général de Gaulle. Moi aussi, j’ai un côté archéologue ! (Sourires.)

C’est la raison pour laquelle l’ANR doit continuer à vivre. Certes, elle a sans doute, comme toute structure, à évoluer et à s’améliorer, à l’instar du CNU que nous évoquions tout à l’heure.

Selon moi, il est donc raisonnable de ne pas suivre l’amendement déposé par nos amis communistes.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-134.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° II-176 rectifié bis est-il maintenu, monsieur Piednoir ?

M. Stéphane Piednoir. En concertation avec mon collègue Didier Mandelli, je retire cet amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° II-176 rectifié bis est retiré.

Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° II-135, présenté par M. Ouzoulias, Mme Brulin, MM. Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Formations supérieures et recherche universitaire

dont titre 2

 

81 895 852

 

81 895 852

Vie étudiante

81 895 852

 

81 895 852

 

Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires

 

 

 

 

Recherche spatiale

 

 

 

 

Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables

 

 

 

 

Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle

dont titre 2

 

 

 

 

Recherche duale (civile et militaire)

 

 

 

 

Recherche culturelle et culture scientifique

 

 

 

 

Enseignement supérieur et recherche agricoles

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

81 895 852

81 895 852

81 895 852

81 895 852

SOLDE

0

0

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.