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Candidature à une commission

Mme le président. J’informe le Sénat qu’une candidature pour siéger au sein de la commission des affaires européennes a été publiée.

Cette candidature sera ratifiée si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Pierre Laurent.)

PRÉSIDENCE DE M. Pierre Laurent

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

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Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Bruno Retailleau, pour un rappel au règlement.

M. Bruno Retailleau. Ce rappel au règlement, monsieur le ministre, me donne l’occasion d’exprimer ma stupéfaction.

À l’occasion de l’examen du PLFSS, nous n’avons eu droit qu’à une courte apparition du ministre des solidarités et de la santé, mais, aujourd’hui, on atteint des sommets, puisque le ministre chargé du budget et des finances de notre nation, M. Le Maire, n’a pas participé à la discussion générale, et qu’il n’est toujours pas présent, alors que nous allons entamer une discussion importante sur la mission « Plan de relance ».

Ce n’est pas contre vous, monsieur le ministre, que ce rappel au règlement est dirigé : vous êtes un ministre consciencieux, présent et respectueux de nos débats. En revanche, il n’est pas normal, à trois titres, que Bruno Le Maire ne participe pas à nos travaux, son absence étant la manifestation d’une très grande désinvolture.

Premièrement, le budget de la France est un acte non pas seulement chiffré, mais profondément politique, dans la mesure où il résume une ligne politique. C’est un acte grave, dont le vote est confié au Parlement français, et le ministre doit venir, à un moment ou un autre, soutenir et présenter son budget.

Deuxièmement, cette année, bien particulière, est marquée par plusieurs crises – une crise sanitaire qui débouche sur une crise économique. Pour y répondre, on nous présente un plan de relance d’un montant de 37 milliards d’euros : ce n’est pas rien ! En dépit de cela, le ministre sera absent, ce qui révèle une forme de mépris du Parlement. Je ne doute pas que le ministre ait du travail – je sais que cette crise lui crée des obligations –, mais très franchement, « zapper » le Parlement n’est pas acceptable. D’autant qu’à l’occasion de cette crise, nous vous avons confié des pouvoirs très étendus : considérant que vous gouvernez par ordonnances, je pense que la contrepartie démocratique serait, précisément, de consacrer un peu d’attention au Parlement.

La situation est particulière, personne n’en disconvient, mais le rôle et la responsabilité du ministre auraient commandé qu’il apparaisse dans la conduite de nos travaux, au moins pour manifester son respect de la démocratie représentative.

Nous ne nous sentons pas vexés, mais cette absence exprime aussi une forme de mépris vis-à-vis de ceux et de celles que nous représentons, c’est-à-dire les Français. (Applaudissements sur toutes les travées, sauf celles du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour un rappel au règlement.

M. Patrick Kanner. Ce rappel au règlement, vous l’imaginez aisément, monsieur le ministre, va dans le même sens que les propos tenus par mon collègue Bruno Retailleau, et certainement que ceux qui suivront.

Je pense que nous ne sommes pas la voiture-balai du Parlement français. Dans ce cadre, l’absence de M. Véran, quasi permanente, y compris ce matin lors de la nouvelle lecture du PLFSS, et l’absence totale de M. Le Maire pendant les débats budgétaires qui nous intéressent, notamment s’agissant du plan de relance, lequel constitue certainement le point d’orgue de la discussion budgétaire, ne sont pas acceptables.

Comme l’a dit notre collègue Bruno Retailleau, nous n’avons rien contre vous. On vous aime bien, parce que vous êtes là, que vous prenez du temps pour travailler avec nous et que vous prenez le soin de respecter la représentation nationale. Vous agissez cependant dans une logique de solidarité gouvernementale : à ce titre, je tiens à vous le dire, cette absence non seulement répétée, mais presque systématique d’un ministre fantôme, n’est pas respectueuse de l’équilibre que représente le Sénat dans le Parlement français.

Nous sommes non pas un Bundesrat, mais une vraie chambre à part entière. Nous devons, en cette qualité, être respectés, non pas pour nous-mêmes, car ce ne sont pas des considérations corporatistes qui nous animent, mais compte tenu du débat de fond consistant à savoir si, malgré l’urgence et en dépit des circonstances, nous sommes dignes de l’écoute du Gouvernement.

Vous nous voyez donc mécontents et en colère, surtout eu égard aux citoyens que nous représentons. J’espère ainsi que vous répondrez à ces divers rappels au règlement. Les présidents de groupe, dans leur grande majorité, sont solidaires de la démarche engagée par un collectif de personnes qui souhaite simplement que nous puissions travailler dans de bonnes conditions. (Applaudissements sur toutes les travées, sauf celles du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Claude Requier. Je souhaite, à mon tour, m’associer aux remarques de mes homologues.

Il est parfaitement compréhensible que, compte tenu du contexte très particulier que nous vivons, les membres du Gouvernement soient mobilisés chaque jour pour gérer cette situation exceptionnelle, soutenir notre économie, nos entreprises durement touchées, nos personnels soignants en première ligne depuis des mois, et nos concitoyens : nous pouvons, de ce fait, comprendre les difficultés qu’il y a à articuler un agenda aussi contraint avec les nécessités du Parlement. En revanche, cette élasticité a des limites en pleine période budgétaire, surtout lorsque nous discutons de dépenses exceptionnelles, dans leur nature comme dans leur montant.

Sans rien enlever à la compétence des représentants du Gouvernement présents depuis le début de l’examen du PLF – qu’il me soit permis de saluer le ministre Olivier Dussopt – ni au respect que nous avons pour eux, il ne nous semble pas acceptable de n’avoir que trop rarement l’honneur de la présence du ministre de l’économie, des finances et de la relance ; relance dont nous allons précisément discuter dans quelques instants.

Le Sénat est non pas une instance consultative, mais une assemblée parlementaire de plein exercice, chargée, entre autres, d’autoriser la perception des impôts et de voter la loi de finances. À ce titre, il nous paraît indispensable, durant cette période si particulière qui engage fortement nos finances publiques, que le ministre chargé des finances vienne expliquer les choix du Gouvernement et débattre avec la représentation nationale.

Rendez-nous visite, monsieur le ministre de l’économie : cela nous ferait plaisir et honorerait le Sénat ! (Applaudissements sur toutes les travées, sauf celles du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, pour un rappel au règlement.

M. Hervé Marseille. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais, comme mes collègues, vous dire combien nous regrettons et déplorons l’absence du ministre de l’économie, des finances et de la relance.

Cela fait maintenant plusieurs mois – depuis le mois de juillet, précisément – que nous réclamons un plan de relance : on nous a dit, à l’époque, d’attendre le mois de septembre, mais le deuxième confinement est intervenu.

De l’adoption d’un plan de relance d’un montant de 15 milliards d’euros au titre du PLFR 3, en tenant compte de la discussion en cours de 45 milliards dans le présent PLF, jusqu’à l’attente du vote en fin d’année et de la décision finale du Conseil constitutionnel, avec une application de la loi prévue en début d’année prochaine : cela fait beaucoup de temps pour un pays confiné, dans lequel l’économie est exsangue et où l’on attend, de ce fait, des actions fortes de l’État !

Comme l’a dit Bruno Retailleau, de la même façon que nous avons témoigné au Gouvernement notre confiance, nous sommes en droit d’attendre de lui qu’il soit présent, ne serait-ce que pour marquer son intérêt et sa considération envers le Parlement.

Nous vivons dans un pays gouverné par un conseil de défense, dans lequel on légifère par ordonnances et on reporte les élections. Alors que nous ne regardons pas d’un bon œil les pays qui font cela ailleurs, nous l’avons consenti démocratiquement. En contrepartie, il conviendrait que le Gouvernement vienne rendre compte régulièrement devant le Parlement, par l’intervention de ses ministres les plus importants.

Aujourd’hui, monsieur le ministre, c’est vous qui vous trouvez au banc. Nous sommes contents de vous y voir et, cela a été dit par le président Kanner à l’instant, nous éprouvons beaucoup de sympathie à votre endroit, car c’est bien vous qui venez nous voir : nous sommes en plein syndrome de Stockholm ! (Sourires et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et CRCE.)

Nous avons, en effet, de la considération pour vous : vous avez accepté d’intervenir devant mon groupe, nous discutons volontiers avec vous et vous discutez volontiers avec nous, vous répondez à toutes les questions et le faites avec courtoisie ; bref, on vous aime bien ! Peut-être pourriez-vous devenir ministre de l’économie et des finances ! (Nouveaux sourires et applaudissements) L’heure n’est certes pas à la plaisanterie, mais il faut bien mettre un peu d’humour dans tout cela.

Nous allons aujourd’hui reparler du plan de relance, alors faites-vous, je vous prie, l’interprète du Sénat, et peut-être même du Parlement. La période est difficile : nous le savons tous, à commencer par le Gouvernement qui doit prendre des mesures difficiles.

Nous nous efforçons donc d’accompagner ce que vous faites, et sommes parfois un peu critiques – c’est normal, car c’est notre rôle –, mais de grâce, que le Gouvernement entende le Parlement, qu’il se présente devant le Parlement pour travailler avec le Parlement ! (Applaudissements sur toutes les travées, sauf celles du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour un rappel au règlement. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous avez vu que la présidente de notre groupe était là, mais le groupe CRCE forme une équipe,…

M. Pascal Savoldelli. … on le voit tout au long des débats.

Je voudrais, moi aussi, m’associer aux propos qui ont été tenus.

Pour ceux d’entre vous qui étaient présents hier, que vous ayez ou non assisté à toutes mes interventions, vous m’avez entendu dire que nous nous trouvions face à une série d’inédits.

Aujourd’hui, nous avons un inédit qui est double : il faut, monsieur le ministre, que vous le relayiez impérativement !

Sur l’examen du PLFSS, le ministre des solidarités et de la santé n’est pas là ! Et, alors que nous abordons la deuxième partie du PLF, le ministre de l’économie, des finances et de la relance n’est pas là. Ce n’est pas sérieux, voire très franchement irrespectueux !

N’ayant pas la mémoire de ce qu’ont pu observer les plus anciens ou plus anciennes d’entre nous, j’ai demandé autour de moi pour en avoir la confirmation : considérant l’absence du ministre, je fais, aujourd’hui, le constat que nous avons bien affaire à un inédit. Dans mon intervention d’hier, il y a un passage qui semblait nous convenir à tous : c’est que malgré tous ces inédits, le politique a un rendez-vous avec ses responsabilités.

Tout n’est pas politique, certes, mais beaucoup de choses le sont, et quand le politique est convoqué devant ses responsabilités, monsieur le ministre, on n’adopte pas la méthode de la chaise vide ! C’est vrai, tant pour le ministre des solidarités et de la santé, que pour le ministre de l’économie, des finances et de la relance !

Leur absence prouve un manque de sérieux ! Il n’est pas ici question pour nous de bienséances, mais de responsabilité politique, de responsabilité démocratique ! Je souhaite donc m’associer aux mécontentements qui ont été exprimés par la plupart des groupes de cet hémicycle.

Comme je l’ai dit, on a développé des analyses, des idées et parfois des propositions alternatives : elles méritaient d’être débattues ! J’aurais voulu débattre avec le ministre, au regard de ce que j’ai dit hier, pour qu’il n’y ait pas de confusion entre les mots « entreprise » et « capital ». Débattons ! Notre démocratie en sortira grandie et sera vivifiée par le pluralisme des analyses, des idées et des alternatives.

Il faut corriger le tir ! Que vous ne nous écoutiez pas : très bien ! Vous ne voulez pas changer de cap, nous avons les mêmes lois de finances depuis 2017 : d’accord ! Mais ayez pour nous un minimum de respect. Car entre les salariés, les chefs d’entreprise, les commerçants et les gens qui perdent leur travail, trop de gens déjà ne sont pas respectés.

Heureusement qu’il y a des institutions qui sont respectées ! Voyez plutôt : votre réforme de l’assurance chômage, par exemple, n’est pas suivie par le Conseil d’État. Heureusement donc que nous disposons de contre-pouvoirs, qui peuvent exercer une vigilance vis-à-vis de la démocratie sociale, et de la démocratie tout court !

Une fois encore, vous n’êtes pas en cause, monsieur le ministre. Vous nous avez respectés tout au long des débats et continuerez à le faire, mais faites passer le message ! (Applaudissements sur toutes les travées, sauf sur celles du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour un rappel au règlement.

Mme Sophie Taillé-Polian. Je voudrais également me joindre à mes collègues qui se sont exprimés précédemment.

Pardonnez-nous, monsieur le ministre, car vous êtes présent et vous répondez avec beaucoup de précision sur énormément de sujets. Nous avons cependant un ministre de l’économie, des finances et de la relance qui, plutôt que de venir, préfère faire paraître beaucoup d’annonces chiffrées dans la presse : nous l’avons vu hier matin, avec les chiffres annoncés à la suite de l’intervention du Président de la République portant sur l’aide destinée aux commerçants et restaurateurs qui ne pourront pas rouvrir, et ce matin même, également.

Nous sommes dans une situation double. D’une part, la crise oblige à des décisions rapides – je considère toutefois qu’elles sont en retard par rapport aux alertes lancées dans la société comme ici –, prises par un conseil de défense extrêmement opaque, lequel est attaqué, précisément parce qu’il n’est pas démocratique dans son fonctionnement. D’autre part, les ministres concernés par les dossiers que l’on traite, PLFSS ou PLF, ne viennent pas débattre avec la représentation nationale et la chambre des territoires, alors même que les territoires se sont mobilisés dès le début du premier confinement, et tout au long de la crise.

Nous ne pouvons que regretter, très fortement et solennellement, cette forme de désertion de la Chambre haute. Nous souhaitons que cela cesse, de manière que nos débats restent de qualité.

Nous préférons que les ministres concernés soient présents et répondent devant nous, au lieu d’aller s’exprimer dans la presse. (Applaudissements sur toutes les travées, sauf sur celles du groupe RDPI.)

M. le président. Acte vous est donné de vos rappels au règlement, mes chers collègues.

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de léconomie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les présidents de groupe, mesdames, messieurs les sénateurs, un mot d’abord pour vous saluer, avant que nous débattions de la mission « Plan de relance », qui nous occupera au moins une grande partie de l’après-midi, si ce n’est plus.

Je prends bien évidemment acte des rappels au règlement que vous avez eu l’occasion de faire. J’ai été appelé, par nombre d’entre vous, à les transmettre aux ministres directement intéressés et, si j’ai bien compris, au chef du Gouvernement. Je tiens à préciser cependant que les missions que j’exerce en qualité de ministre délégué auprès de Bruno Le Maire me donnent compétence sur l’intégralité des actes budgétaires, entre autres choses.

J’entends les remarques et les regrets que vous avez exprimés s’agissant de l’absence du ministre de la relance, alors précisément que nous examinons aujourd’hui la mission « Plan de relance ».

Je vous indique, pour des raisons de transparence, que le ministre accomplit aujourd’hui un voyage officiel en Italie, afin d’y rencontrer ses homologues pour évoquer la relance à l’échelon européen.

Cela étant dit, faisant un clin d’œil au président Marseille qui a évoqué le syndrome de Stockholm, je me demande, après avoir passé quelques jours auprès de MM. le rapporteur et le président de la commission, et de chacun d’entre vous, qui en est réellement la victime. (Sourires.) Trouvons là quelques motifs de satisfaction !

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Explications de vote sur l'ensemble de la première partie du projet de loi (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2021
Seconde partie

Loi de finances pour 2021

Suite de la discussion d’un projet de loi

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2021
Plan de relance - Plan d'urgence face à la crise sanitaire

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2021, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 137, rapport n° 138, avis nos 139 à 144).

Nous commençons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.

SECONDE PARTIE

MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

Plan de relance

Plan d’urgence face à la crise sanitaire

Seconde partie
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2021
Plan de relance - État B

M. le président. Le Sénat va examiner les crédits des missions « Plan de relance » (et articles 56 à 56 octies) et « Plan d’urgence face à la crise sanitaire ».

La parole est à M. le président de la commission.

M. Claude Raynal, président de la commission des finances. Je souhaitais intervenir avant que nous n’entamions l’examen des crédits de la mission « Plan de relance ».

Sur les crédits de cette mission, une centaine d’amendements sont en discussion commune, en raison – question technique – des prélèvements opérés par ces amendements sur les mêmes lignes budgétaires, qui empêchent qu’ils soient adoptés cumulativement. Il me paraît ainsi déraisonnable de maintenir une telle discussion commune, qui irait à l’encontre de l’intelligibilité de nos débats.

En conséquence, en application de l’article 46 bis, alinéa 2, du règlement, la commission des finances demande l’examen séparé de ces amendements, c’est-à-dire la suppression de cette discussion commune.

Par ailleurs, afin de restreindre le risque que plusieurs amendements ne deviennent sans objet sans avoir été présentés au préalable, et afin d’éviter qu’une même thématique soit évoquée à plusieurs reprises, je demande que les amendements portant sur un même sujet fassent l’objet de discussions communes séparées. Je demande aussi que l’amendement n° II-7 de M. le rapporteur spécial et les trente-deux amendements qui lui succèdent dans l’ordre de la discussion et avec lesquels il est incompatible, fassent également l’objet d’une discussion commune. J’appelle votre attention sur le fait ces amendements deviendront sans objet si l’amendement de M. le rapporteur spécial est adopté.

Je demande enfin que l’amendement n° II-9 de M. le rapporteur spécial et les deux amendements qui le suivent dans l’ordre de discussion, avec lesquels il est incompatible, pour les mêmes raisons, fassent l’objet d’une discussion commune.

Telles sont les propositions que formule la commission, de telle sorte que nous organisions au mieux la discussion de cet après-midi, avec deux objectifs : rendre nos débats les plus intelligibles possible, compte tenu des contraintes imposées par la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), et préserver, autant que faire se peut, le droit de chacun à présenter ses amendements.

Enfin, je vous rappelle que nous devons achever l’examen de cette mission et de l’ensemble des articles rattachés, ce soir, à minuit et demi. Quelque cent quatre-vingts amendements ayant été déposés, cela nécessitera de chacun un effort de compréhension et de concision.

Si toutefois nous ne parvenions pas à terminer la discussion ce soir, nous serions contraints – ne le voyez pas comme une menace, mes chers collègues – de terminer l’examen de la mission samedi soir ou dimanche.

Je vous encourage donc, sincèrement, à être concis !

M. le président. En application de l’article 46 bis, alinéa 2, du règlement, je suis saisi par la commission des finances d’une demande d’examen séparé des amendements portant sur les crédits de la mission « Plan de relance », à l’exception des amendements portant sur un même sujet, à savoir les amendements nos II-282 et II-59 rectifié bis, nos II-283 rectifié et II-57 rectifié, nos II-74 et II-318 rectifié, nos II-42 rectifié ter et II-41 rectifié ter et nos II-56 et II-285, qui feraient l’objet de discussions communes séparées.

L’exception porte également sur les amendements nos II-7 et les trente-deux amendements avec lesquels il est incompatible et qui le suivent dans l’ordre de discussion, sur les amendements nos II-257 rectifié, II-273 rectifié et II-275, qui feraient l’objet d’une discussion commune, ainsi que sur l’amendement n° II-9 et les deux amendements avec lesquels il est incompatible et qui le suivent dans l’ordre de discussion, qui feraient l’objet d’une discussion commune.

Il n’y a pas d’opposition ?…

Il en est ainsi décidé.

La parole est à M. le rapporteur spécial.

M. Jean-François Husson, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui les missions « Plan de relance » et « Plan d’urgence face à la crise sanitaire ». Cette dernière mission ne comporte, toutefois, à l’heure qu’il est, aucun crédit pour 2021. Or cette mission, nous le savons d’ores et déjà, récupérera des crédits importants reportés de 2020 sur les différents dispositifs d’urgence. Le Gouvernement a même indiqué qu’il demanderait l’ouverture de crédits budgétaires supplémentaires.

Je regrette que cela ne soit pas réalisé dès l’examen du PLF au Sénat, alors que le Président de la République s’est exprimé avant-hier et que nous disposons désormais d’une feuille de route sur l’évolution de la situation dans les prochaines semaines. Par ailleurs, le ministre de l’économie, des finances et de la relance ainsi que la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion ont apporté des précisions dans les médias. Peut-être pourriez-vous, monsieur le ministre, nous donner des informations sur ce point.

Je parlerai davantage, cet après-midi, de la mission « Plan de relance », qui déroge largement aux principes budgétaires, notamment à celui de la spécialité des crédits, puisqu’elle abonde des politiques publiques très variées. Elle comprend trois programmes tellement vastes que, par application du principe de fongibilité, l’autorisation parlementaire laissera une grande liberté d’action aux gestionnaires de programme.

Cette mission, avec 36 milliards d’euros d’autorisations d’engagement et 22 milliards d’euros de crédits de paiement, ne représente qu’un peu plus du tiers des 100 milliards d’euros présentés par le Gouvernement comme périmètre du plan de relance.

On trouve, au sein de ce plan, des mesures qui présentent une véritable dimension de relance de l’économie, en tant qu’elles auront un effet d’impulsion sur certaines filières. Si nous nous limitions à elles cependant, nous n’atteindrions pas le chiffre symbolique de 100 milliards d’euros.

Plusieurs des dépenses inscrites dans cette mission auraient pu, voire auraient dû, être intégrées aux programmes budgétaires traditionnels des ministères, lesquels seront d’ailleurs chargés de leur mise en œuvre opérationnelle. Ce plan de relance constitue donc, avant tout, un plan de rattrapage pour des actions que les ministères auraient dû déjà conduire, et qui, dans la mission « Plan de relance », trouvent un véhicule budgétaire d’opportunité.

Lorsque des dépenses portent sur le fonctionnement ou sur des achats courants, l’impact, en termes de relance de l’économie, est en effet pour le moins douteux. Nous aurons souvent le sentiment, aujourd’hui, de discuter un budget en réduction et d’anticiper sur les débats qui seront consacrés aux missions budgétaires dans les jours à venir.

L’hétérogénéité de cette mission amène à s’interroger sur son objectif. Le dispositif traditionnel des objectifs de performance budgétaire est trop limité pour couvrir l’ensemble des politiques concernées.

Le seul objectif clairement identifié et répété par le Gouvernement est la volonté de consommer les crédits rapidement : tel est, en effet, l’objectif fixé aux responsables de programmes, aux préfets et aux porteurs de projet. Or je crains que le Gouvernement ne confonde parfois la rapidité de consommation du budget, d’une part, et l’efficacité de mise en œuvre concrète des projets, d’autre part. Pour que nous soyons vraiment dans les temps de la relance, il aurait fallu, comme le Sénat l’avait préconisé cet été, agir plus tôt.

Mme Sophie Primas. Absolument !

M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. On risque aujourd’hui de favoriser des projets plutôt faciles à mettre en place, au détriment de projets plus structurants et plus durables, qui également, portent fortement l’empreinte de l’écoresponsabilité.

C’est pourquoi, afin de rattraper le retard accumulé et de pouvoir afficher des résultats, le Gouvernement multiplie, en ce moment, les appels à projet et les appels à manifestation d’intérêt, alors que les entreprises sur le terrain témoignent du fait qu’elles ne sentent toujours pas les effets des mesures annoncées : il y aura encore de nombreuses étapes d’ici à ce que la création d’activités se concrétise dans les territoires.

Je ne pense pas que l’organisation que le Gouvernement est en train de mettre en place rapproche véritablement les sommes importantes, versées dans le plan de relance, des personnes, des entreprises et des acteurs qui devraient en bénéficier.

Au lieu de véritablement travailler en partenariat avec les collectivités et leurs élus, qui connaissent bien leur territoire, en particulier avec les régions qui ont la compétence économique et conduisent une stratégie de développement, le Gouvernement met en place une organisation trop verticale. Les principaux dispositifs sont mis en œuvre de manière uniforme au niveau national : je pense par exemple à la réforme des impôts de production, aux aides « de guichet » comme MaPrimeRénov’ ou aux appels d’offres des grands opérateurs.

Quant aux dispositifs qui peuvent être mis en œuvre localement, ils sont très centrés autour des préfets, lesquels rendent compte au ministère de l’économie, attribuent les enveloppes en fonction des critères fixés à l’échelon national et font remonter l’information vers le ministère.

Les collectivités territoriales seront surtout sollicitées pour cofinancer les projets toutes les fois où cela sera nécessaire.

Malgré les insuffisances de ce plan de relance, il n’en reste pas moins que l’aide apportée dans les mois à venir sera décisive : alors que nous alternons entre des phases de confinement et de déconfinement partiel, il est indispensable, aujourd’hui encore plus qu’hier, de donner une visibilité, même imparfaite, sur l’action de l’État.

Je présenterai au nom de la commission certains amendements tendant notamment à améliorer le ciblage du plan de relance sur les mesures qui me semblent les plus efficaces. Je soutiendrai également certaines des propositions faites par les membres de notre assemblée.

Il faut en effet renforcer les politiques de l’emploi, en particulier pour les travailleurs jeunes ou peu qualifiés, qui sont les premiers à souffrir de la crise. Le fonds de solidarité devrait également évoluer. À cet égard, j’ai bien entendu les annonces du Président de la République, mais elles n’ont pas encore été traduites dans les textes et je reste persuadé qu’il faut travailler à une aide couvrant les charges fixes, y compris pour ceux qui ne subissent pas actuellement une fermeture administrative.

Enfin, je vous proposerai d’augmenter le budget de la prime à la conversion et d’apporter des aménagements aux contreparties demandées aux entreprises bénéficiant des crédits de la mission.

Sous réserve de ces éléments et de l’adoption des amendements qu’elle vous soumettra, la commission proposera l’adoption des crédits des deux missions et des articles rattachés. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)