M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Le fils et frère d’agriculteurs que je suis – comme d’autres parmi nous – considère qu’il faut respecter une proportionnalité en matière de crédits d’impôt. Le taux de 50 % me paraît déjà intéressant, surtout pour ces services dits de remplacement. Nous devons travailler plutôt sur la durée des congés.

Je partage pour une bonne part les propos de notre collègue sur la difficulté du métier aujourd’hui, notamment pour ce qui est des éleveurs, mais je pense que les solutions à mettre en œuvre – qui, malheureusement, ne dépendent pas que de la France – doivent viser à rendre des revenus décents à nos paysans. Tel doit être notre combat !

M. Vincent Segouin. Exactement !

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je demande donc le retrait de l’amendement, même revu et corrigé par rapport à la première version.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Défavorable, en dépit des ajustements apportés par M. le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Non seulement je ne suis pas satisfait par la demande de retrait, mais je suis même quelque peu outré : mon intention est simplement que la grande majorité des agriculteurs français puissent prendre au moins une semaine de vacances par an – une semaine, mes chers collègues !

Les uns et les autres, nous avons travaillé sur la détresse du monde agricole, notamment avec Henri Cabanel. La solitude, le manque d’ouverture, l’absence de décompression font que nombre d’agriculteurs se retrouvent en difficulté – avec aussi les dettes et d’autres facteurs.

Certes oui, si les agriculteurs avaient un revenu décent, ils pourraient prendre des vacances… Mais c’est un vœu pieux, puisque rien n’est fait pour cela ! La loi Égalim, il faut le dire, est un échec total du point de vue du revenu des agriculteurs !

Il est vrai que d’aucuns souhaitent, sans le dire, que les agriculteurs soient moins nombreux encore, pour que les exploitations soient encore plus concentrées… Telle n’est pas notre conception, et c’est pourquoi nous sommes si attachés à cette mesure.

M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.

M. Michel Canevet. Pour ma part, je voterai cet amendement, car Joël Labbé soulève un vrai problème de nos zones rurales.

Le monde agricole fait face à la détresse, parce que les prix ne sont pas suffisamment rémunérateurs.

Tous ceux qui vivent à la campagne savent combien le métier d’agriculteur est difficile et accaparant : pour les éleveurs laitiers, c’est sept jours sur sept ! Il est absolument indispensable que les agriculteurs puissent prendre des congés, ce qu’ils ne font pas tous, en particulier pour des raisons financières, compte du niveau de rémunération tiré des productions. Inutile de dire que, à 34 centimes le litre de lait, nos producteurs ne peuvent pas gagner leur croûte…

Même si le taux de 75 % proposé pour la première semaine peut paraître élevé, je trouve que ce relèvement est bienvenu s’il permet aux agriculteurs de bénéficier de congés, comme tous nos concitoyens.

M. le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour explication de vote.

M. Vincent Segouin. J’appuie sans réserve le propos du rapporteur général : ce que demandent les agriculteurs, c’est de gagner leur vie ! Je voterai donc contre l’amendement.

Certes, la loi Égalim n’est pas parfaite ; il faut travailler à l’améliorer. En tout cas, aucun agriculteur de ma connaissance ne demande l’aumône. Nos agriculteurs ne veulent pas qu’on prenne en charge leurs vacances ou qu’on les fasse bénéficier de je ne sais quel comité d’entreprise : ils nous demandent des perspectives d’avenir et la possibilité de gagner leur vie !

M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.

Mme Angèle Préville. Quant à nous, nous voterons cet amendement. Oui, il est absolument indispensable que les agriculteurs puissent vivre de leur activité, mais il y a urgence, puisque la plupart d’entre eux ne prennent pas de congés ! Cette situation ne peut qu’aggraver leur souffrance psychique. La mesure proposée me paraît utile pour pallier, un temps, des problèmes qui devront être examinés plus avant par la suite.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-1458 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 43 duodecies - Amendement n° II-1458 rectifié bis
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2021
Article 43 quaterdecies (nouveau)

Article 43 terdecies (nouveau)

I. – L’article 568 du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le tableau du neuvième alinéa est ainsi rédigé :

 

« 

Année

Taux (en %)

À partir du 1er janvier 2022

17,729

 » ;

2° Le dixième alinéa est ainsi modifié :

a) À la quatrième phrase, l’année : « 2021 » est remplacée par l’année : « 2022 » et le montant : « 117 977 € » est remplacé par le montant : « 125 842 € » ;

b) À la fin de la cinquième phrase, le montant : « 400 000 € » est remplacé par le montant : « 500 000 € ».

II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2022. – (Adopté.)

Article 43 terdecies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2021
Article additionnel après l'article 43 quaterdecies - Amendement n° II-1482

Article 43 quaterdecies (nouveau)

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° Après le 11° de l’article 995, il est inséré un 11° bis ainsi rédigé :

« 11° bis Les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur dont la source d’énergie exclusive est l’électricité et dont le certificat d’immatriculation a été émis à partir du 1er janvier 2021, y compris la part se rapportant à l’obligation d’assurance en matière de circulation de véhicules terrestres à moteur prévue au même article L. 211-1 ; »

2° Le second alinéa du 5° quater de l’article 1001 est complété par les mots : « et au 11° bis de l’article 995 du présent code ».

II. – Les dispositions du I s’appliquent aux primes, cotisations et accessoires dont l’échéance intervient à compter du 1er janvier 2021 et jusqu’au 31 décembre 2023.

M. le président. L’amendement n° II-1429 rectifié, présenté par Mme Lavarde, MM. J.B. Blanc et Sautarel, Mmes Dumas et Belrhiti, MM. Paccaud, de Legge, Lefèvre et Mandelli, Mmes Delmont-Koropoulis, Jacques, L. Darcos et Garriaud-Maylam, MM. Bonhomme, Darnaud, Cuypers, Longuet et Bascher, Mmes Berthet et Deromedi, M. E. Blanc, Mme M. Mercier, MM. Chatillon et Le Gleut, Mme Di Folco, MM. Rapin et Bouloux, Mme Joseph, MM. Somon et Anglars, Mme Gruny et M. Cardoux, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Christine Lavarde.

Mme Christine Lavarde. Je me suis intéressée à cet article, parce que j’ai flairé un dispositif qui tient du gadget…

Il s’agit de diminuer la prime d’assurance pour l’achat d’un véhicule électrique. J’ai bien compris que l’objectif est d’encourager l’achat de véhicules électriques, mais il y a un gros décalage entre la petite incitation donnée sur la prime d’assurance et le surcoût d’un tel véhicule… Ce dispositif ne bénéficiera donc qu’à ceux qui peuvent déjà acheter un véhicule électrique, donc les ménages les plus aisés.

De surcroît, la prime d’assurance varie en fonction de la qualité du conducteur. La mesure proposée masquerait ce signal-prix. J’attends qu’on me montre des statistiques prouvant qu’un conducteur de véhicule électrique est bien meilleur qu’un conducteur de véhicule diesel ou thermique…

Enfin, les auteurs de l’amendement dont cette disposition est issue ne disent rien, dans leur exposé des motifs, de la compensation de la baisse des financements départementaux pour les SDIS, des ressources de la Caisse nationale des allocations familiales et de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés pour les contrats d’assurance maladie et des moyens du Conseil national des barreaux pour les contrats de protection juridique.

Monsieur le ministre, j’ai le sentiment qu’il arrivera avec ce dispositif ce qui est déjà arrivé avec l’article 2 du quatrième projet de loi de finances rectificative, relatif à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France : ce sont encore les collectivités territoriales qui verront leurs recettes baisser !

Pour toutes ces raisons, il me paraît sage de supprimer l’article 43 quaterdecies.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je partage les craintes exprimées quant à la portée de ce dispositif. Reste que celui-ci constitue une aide à l’achat d’un véhicule électrique. Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.

Il est vrai qu’il faut prendre garde aux effets d’affichage. Il n’y a pas de corrélation étroite entre l’ambition écologique et l’aléa déterminant les tarifs d’assurance automobile – en fonction de la réalité des risques et des zones de circulation : il n’y a donc aucun rapport entre le risque et la réduction proposée. Au surplus, en ne visant que l’électrique, on oublie d’autres modes de carburation propres, comme l’hydrogène.

De telles mesures peuvent même être dangereuses, dans la mesure où elles sont temporaires : le réveil risque d’être douloureux à la fin de la réduction…

Le prix d’achat moyen d’un véhicule électrique neuf, comme la Zoé, est d’environ 20 000 euros. Aujourd’hui, les propriétaires de véhicule électrique sont, pour la moitié d’entre eux, âgés de plus de 55 ans ; ils vivent très majoritairement en zone urbaine. Je le précise parce que, faute d’équipements disponibles sur la totalité des territoires, ce dispositif risque, au moins dans un premier temps, de taper complètement à côté de la cible en matière de développement des mobilités propres.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Comme l’a expliqué Mme la sénatrice, ce dispositif est une incitation parmi d’autres à l’achat de véhicules électriques ; il s’ajoute aux primes que le Gouvernement a mises en place pour la conversion. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-1429 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 43 quaterdecies est supprimé.

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué. Je prends acte de ce vote, mais la mesure supprimée avait été proposée par la Convention citoyenne… (Exclamations sur diverses travées.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le ministre délégué, vous avez la chance d’avoir devant vous ce matin un peu moins que cent cinquante citoyens, mais ce sont des sénateurs, également citoyens ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE et SER.)

Article 43 quaterdecies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2021
Article 43 quindecies (nouveau)

Article additionnel après l’article 43 quaterdecies

M. le président. L’amendement n° II-1482, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Après l’article 43 quaterdecies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code des assurances est ainsi modifié :

1° Après le chapitre V du titre II du livre Ier, il est inséré un chapitre V bis ainsi rédigé :

« Chapitre V bis

« Lassurance contre des évènements sanitaires exceptionnels

« Art. L. 125-7. – Les contrats d’assurance souscrits dans le cadre de l’exercice à titre professionnel d’une activité économique et garantissant les dommages d’incendie à des biens situés sur le territoire national ouvrent droit à la garantie de l’assuré contre des évènements sanitaires exceptionnels, caractérisés par une baisse d’activité économique consécutive aux mesures prises en application de l’article L. 3131-1, des 1° à 6° du I de l’article L. 3131-15 et des articles L. 3131-16 à L. 3131-17 du code de la santé publique.

« Art. L. 125-8. – La garantie prévue à l’article L. 125-7 bénéficie aux assurés justifiant d’une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % durant la période d’application des mesures mentionnées au même article L. 125-7.

« Le montant de l’indemnisation versée à l’assuré correspond aux charges fixes d’exploitation constatées au cours de la période mentionnée au premier alinéa du présent article, après déduction des impôts, taxes et versements assimilés ainsi que de l’allocation versée en application du II de l’article L. 5122-1 du code du travail.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article.

« Art. L. 125-9. – Les entreprises d’assurance doivent insérer dans les contrats mentionnés à l’article L. 125-7 une clause étendant leur garantie aux dommages mentionnés au même article L. 125-7.

« Cette garantie est couverte par une prime ou cotisation additionnelle, individualisée dans l’avis d’échéance du contrat mentionné audit article L. 125-7 et calculée à partir d’un taux unique défini par arrêté.

« Art. L. 125-11. – Sans préjudice de stipulations plus favorables, une provision sur l’indemnisation due au titre du présent chapitre est versée à l’assuré au moins une fois par mois à compter de la date de réception par l’entreprise d’assurance de la déclaration de l’assuré ouvrant droit à la garantie prévue à l’article L. 125-7.

« Les modalités de versement de l’indemnisation sont prévues par décret.

« Lorsque l’assureur ne respecte pas le délai mentionné au premier alinéa du présent article, ou verse dans le délai imparti un montant inférieur à celui auquel il est tenu, la somme à verser à l’assuré est, jusqu’à son versement, majorée de plein droit d’un intérêt égal au double du taux de l’intérêt légal.

« Art. L. 125-12. – Lorsqu’un assuré s’est vu refuser par une entreprise d’assurance l’application des dispositions du présent chapitre, il peut saisir le bureau central de tarification, qui impose à l’entreprise d’assurance concernée de le garantir contre les évènements sanitaires exceptionnels mentionnés à l’article L. 125-7. Lorsque le risque présente une importance ou des caractéristiques particulières, le bureau central de tarification peut demander à l’assuré de lui présenter, dans les mêmes conditions, un ou plusieurs autres assureurs afin de répartir le risque entre eux.

« Toute entreprise d’assurance ayant maintenu son refus de garantir un assuré dans les conditions fixées par le bureau central de tarification est considérée comme ne fonctionnant plus conformément à la réglementation en vigueur et encourt le retrait de l’agrément administratif prévu aux articles L. 321-1 ou L. 321-7.

« Est nulle toute clause des traités de réassurance tendant à exclure le risque objet du présent chapitre de la garantie de réassurance en raison des conditions d’assurance fixées par le bureau central de tarification.

« Art. L. 125-13. – Toute clause contraire aux dispositions du présent chapitre est nulle d’ordre public. » ;

2° Au huitième alinéa de l’article L. 194-1, après la référence : « L. 114-3 », sont insérées les références : « , L. 125-7 à L. 125-13 » ;

3° Le livre IV est ainsi modifié :

a) Le titre II est complété par un chapitre VII ainsi rédigé :

« Chapitre VII

« Fonds d’aide à la garantie contre des évènements sanitaires exceptionnels

« Art. L. 427-1. – Un fonds d’aide à la garantie contre des évènements sanitaires exceptionnels contribue à l’indemnisation définie à l’article L. 125-8 et à laquelle sont tenues les entreprises d’assurance en application du chapitre V bis du titre II du livre Ier, dès lors que la période d’application des mesures mentionnée à l’article L. 125-7 est supérieure à quinze jours ou que lesdites mesures s’appliquent sur tout le territoire métropolitain.

« Ce fonds est alimenté par un prélèvement annuel d’un minimum de 500 millions d’euros sur le produit des primes ou cotisations des contrats d’assurance de biens professionnels. Un arrêté du ministre chargé des assurances fixe chaque année, au plus tard le 1er février, le taux de ce prélèvement permettant d’atteindre ce minimum. Cette contribution est perçue par les entreprises d’assurance suivant les mêmes règles et sous les mêmes garanties et sanctions que la taxe sur les conventions d’assurance prévue à l’article 991 du code général des impôts.

« Par arrêté du ministre chargé des assurances, pris après avis d’une commission interministérielle chargée de se prononcer sur l’ampleur des indemnisations dues aux assurés, les ressources du fonds sont réparties entre les entreprises d’assurance proportionnellement à la part prise par chacune d’elles dans l’ensemble des indemnisations versées en application de l’article L. 125-8 du présent code. Cette répartition doit intervenir dans un délai de trois mois à compter de la fin de la période mentionnée au même article L. 125-8. À cette fin, les entreprises d’assurance communiquent à la caisse centrale de réassurance le total des indemnisations qu’elles ont versées dans le délai de soixante jours à compter de la fin de cette période.

« Les membres de la commission interministérielle mentionnée au troisième alinéa du présent article ne sont pas rémunérés.

« La gestion comptable, financière et administrative du fonds est assurée par la caisse centrale de réassurance, mentionnée au chapitre Ier du titre III du présent livre, dans un compte distinct de ceux retraçant les autres opérations qu’elle effectue. Les frais qu’elle expose pour cette gestion sont imputés sur le fonds.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. » ;

b) La section 2 du chapitre Ier du titre III est complétée par un paragraphe 5 ainsi rédigé :

« Paragraphe 5

« Risques d’évènements sanitaires exceptionnels

« Art. L. 431-10-1. – La caisse centrale de réassurance est habilitée à pratiquer les opérations de réassurance des risques résultant d’évènements sanitaires exceptionnels définis à l’article L. 125-7, avec la garantie de l’État, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. » ;

4° L’article L. 471-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les articles L. 427-1 et L. 431-10-1 sont applicables dans les îles Wallis et Futuna. »

II. – Le présent article entre en vigueur le premier jour du treizième mois suivant la promulgation de la présente loi.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Une forme de convergence s’opère, non pas des luttes, mais des temps, puisque je présente cet amendement visant à consacrer la position du Sénat à l’égard des acteurs économiques durement affectés par la situation actuelle, notamment dans leur trésorerie, au moment où l’on assiste à une défaillance du secteur des assurances, en particulier parce que le risque de pandémie, la plupart du temps, n’est pas couvert.

Le 2 juin dernier, nous avons adopté, à l’unanimité des suffrages exprimés, une proposition de loi visant, dans un premier temps, à organiser la solidarité interprofessionnelle entre les acteurs économiques et, dans un second temps, à renforcer les garanties par l’intervention de l’État – puisqu’un risque touchant tout le monde n’est, par définition, pas assurable. Je propose au Sénat de confirmer sa volonté qu’un dispositif de cette nature soit progressivement mis en place, en liaison avec les assureurs.

Monsieur le ministre, un accord est intervenu ce matin entre les compagnies d’assurances et le Gouvernement sur un gel des primes d’assurance en 2021 pour un certain nombre de secteurs d’activité, dont les hôtels, cafés et restaurants. Seulement, le ministre de l’économie a bien expliqué qu’il n’y aurait pas d’assurance pandémie, pas d’assurance obligatoire : des « captives d’assurance » seront mises en place par les acteurs économiques qui le pourront, mais les autres ?

C’est une forme de gifle donnée à notre réflexion. Quant au groupe de travail mis en place par le Gouvernement sur les risques exceptionnels – auquel je participe, parmi de nombreux membres –, il n’en est qu’au stade de l’état des lieux… Or le ministre annonce aujourd’hui qu’il n’y aura pas d’assurance. Je n’appelle pas ça du dialogue, mais une forme de mépris à l’égard du travail collectif entrepris.

Je continue d’affirmer que ce choix est une erreur, une faute même : nous avons besoin de construire, en prenant le temps nécessaire, un dispositif qui bénéficie non pas seulement à ceux qui pourraient faire de l’entre soi, mais à toutes les entreprises de France ! (M. Roger Karoutchi applaudit.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, ministre délégué. J’entends la volonté du rapporteur général d’inscrire dans le projet de loi de finances les dispositions que le Sénat a adoptées en ce qui concerne les assurances.

En effet, un accord est intervenu ce matin qui prévoit le gel des cotisations d’assurance pour le secteur de l’hôtellerie, des cafés et de la restauration, mais aussi pour les autres secteurs les plus touchés, comme le tourisme, l’événementiel, la culture et le sport – je ne les cite pas tous, car nous finissons par bien connaître les secteurs S1 et S1 bis.

Cet accord est plutôt une bonne nouvelle et s’ajoute aux dispositions déjà prises par le secteur des assurances, que j’ai rappelées en première partie : participation à hauteur de 400 millions d’euros au fonds de solidarité – les assurances sont le seul secteur à l’avoir fait –, plan d’investissement dans les secteurs les plus touchés pour 1,5 milliard d’euros et remises commerciales gracieuses aux assurés à hauteur de 2 milliards d’euros – soit 4 milliards d’euros au total.

Une question reste à trancher, dont le ministre Le Maire a indiqué qu’elle ne le serait pas à moyen terme. Je dis bien : à moyen terme – il n’y a donc rien de définitif, ni refus de trancher. Je veux parler de la prise en charge assurantielle d’une perte d’exploitation et des conditions dans lesquelles une telle prise en charge pourrait être envisagée. Le groupe de travail qui a été évoqué doit continuer sa réflexion ; nous devons y veiller.

Le ministre de l’économie a indiqué ce matin que, dans l’attente de la refonte des contrats, qui nécessite une analyse détaillée, nous établirions un système permettant aux entreprises concernées et qui le pourront – j’ai conscience du caractère relatif de mes propos à cet instant – de mettre en place des provisions, à l’aide d’un régime fiscal particulièrement avantageux.

Compte tenu de l’ensemble de ces dispositifs, j’émets un avis défavorable sur l’amendement de M. le rapporteur général. Les travaux engagés doivent se poursuivre, et les avancées obtenues ce matin seront complétées par le dispositif fiscal dont j’ai parlé, destiné à accompagner les provisions.

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Monsieur le ministre délégué, vous répondez au rapporteur général : c’est une première étape, poursuivons le groupe de travail… Mais le rapporteur général a bien souligné que, en dépit de l’existence de ce groupe de travail, le Gouvernement décide sans nous associer, sans procéder à un échange de conclusions avec le rapporteur général ou d’autres parlementaires. Il faut arrêter de tourner en rond !

Ce matin, nous apprenons que trente citoyens vont être tirés au sort…

M. Roger Karoutchi. … pour définir la campagne vaccinale. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Moi qui suis favorable au référendum d’initiative populaire, je dis : halte au feu !

M. Jérôme Bascher. Pourquoi pas trente citoyens consultés sur le nucléaire ?

M. Roger Karoutchi. De tirage au sort en tirage au sort, cela va devenir n’importe quoi. En réalité, c’est un moyen pour le Gouvernement de ne plus être responsable devant le Parlement, de se défausser de ce qui peut se passer.

L’activité politique a une noblesse qui consiste à décider, à trancher et à être responsable devant les électeurs. Ce n’est pas du tirage au sort ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Segouin, pour explication de vote.

M. Vincent Segouin. Monsieur le ministre délégué, les professionnels, dans l’hôtellerie et ailleurs, demandent que ce dossier des catastrophes exceptionnelles avance. Quant aux assureurs, eux aussi touchés, ils attendent une position claire sur leur mode d’intervention à l’avenir.

Le ministre fait aujourd’hui la promotion des banquiers, mais, avec les prêts garantis par l’État, entre autres dispositifs, les banquiers n’ont fait que gérer l’argent que vous leur avez confié !

Depuis le départ, nous vous disons que les assureurs savent traiter des pertes d’exploitation et que des professions telles que l’hôtellerie et la restauration ne se remettront pas d’un deuxième confinement, surtout s’il dure – car les grosses périodes d’activité seront passées. Depuis le départ, nous vous disons que, indéniablement, il faudra indemniser les pertes d’exploitation de ces professions.

Puisque vous avez confié de l’argent aux banquiers, pourquoi ne pas en avoir confié aussi aux assureurs pour régler ce problème de pertes d’exploitation et sauvegarder les entreprises concernées ? En tout cas, ce ne sont pas les assureurs qui auraient envoyé de l’argent sur des comptes à l’étranger, comme cela a été fait pour le chômage partiel…

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je souscris tout à fait à la position de M. Karoutchi.

En instaurant ce dispositif intermédiaire, mais peut-être quasi définitif, le Gouvernement commet une erreur : il laisse agir les entreprises qui peuvent faire leur affaire d’un dispositif de prévention et laisse les assureurs tranquilles. Nous pensons, nous, que l’assurance a une réflexion à mener, qui certes n’est pas évidente.

La présidente de la Fédération française des assurances a déclaré que les politiques, faute de décider, n’avaient jamais comme solution que taxer et imposer. Je l’invite à un peu plus de retenue. Pour notre part, nous essayons de jeter les bases d’un nouveau dispositif, mais ce travail doit s’accompagner de mesures permettant aux entreprises, dans un premier temps, de mieux s’organiser, éventuellement de constituer des réserves de précaution – c’est la question des fonds propres.

Notre volonté est de travailler à faire des propositions, pas d’éviter la question. C’est cela, pour nous, être au rendez-vous de la responsabilité !