M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. La commission spéciale constate avec plaisir qu’elle partage le même but avec M. le garde des sceaux et nos collègues du groupe CRCE. Il s’agit bien de maintenir la jurisprudence telle qu’elle résulte des décisions antérieures de la Cour de cassation, c’est-à-dire transcrire la filiation biologique de l’enfant né d’une GPA, mais l’instaurer d’une autre façon pour l’autre parent afin de permettre un contrôle. Monsieur le garde des sceaux, nous sommes d’accord avec cela. Pour autant, nous différons sur les moyens.

Ces amendements identiques ont pour objet de préciser que la réalité des faits déclarés dans l’acte de l’état civil étranger est « appréciée au regard de la loi française » par les magistrats. Si nous avons aujourd’hui ce débat, c’est précisément parce que les magistrats ont, dans leurs dernières jurisprudences, apprécié cette réalité d’une façon qui nous déplaît. Par conséquent, indiquer qu’ils devront l’apprécier au regard de la loi française leur donne toute latitude pour faire ce qu’ils veulent, ce qui ne nous convient pas.

Il me semble que cette précision n’est pas de nature à apporter une quelconque sécurité au regard de l’objectif que nous nous fixons, à savoir ne pas avoir de transcription automatique d’enfants nés d’un système de GPA, laquelle est interdite en droit français. Que ferions-nous si l’adoption était impossible, demandez-vous, monsieur le garde des sceaux ? J’entends cette question, mais l’adoption est de plus en plus possible, d’autant que nous avons voté précédemment l’amendement n° 12 rectifié septies de Mme Martine Berthet, qui élargit l’adoption de l’enfant du conjoint aux couples non mariés. Il me semble même que vient d’être voté à l’Assemblée nationale un texte permettant également cet élargissement.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous voulons conserver le système précédemment voté par le Sénat, qui paraît plus sûr pour empêcher une fraude au droit français. La commission spéciale a donc émis un avis défavorable sur ces amendements identiques.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. La liberté du législateur est, je le répète, encadrée par la Constitution.

Au regard de ce que prévoit l’article 4 bis, il existera des enfants fantômes…

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Non.

M. Jean-Yves Leconte. … qui ne pourront pas être adoptés, en particulier par des couples de femmes. C’est probablement ce qui motive les amendements identiques du Gouvernement et du groupe communiste.

Comme l’a dit le garde des sceaux hier, la proposition du Gouvernement et du groupe communiste, « c’est du brutal » ! En effet, cette disposition ne vise pas que la GPA : d’une manière générale, elle remet en cause la force probante de tout acte d’état civil étranger en France.

Il s’agit d’une révision absolument complète de l’article 47 du code civil, pour répondre à une difficulté majeure, mais précise. Pour le coup, c’est totalement incontrôlé. On s’étonne de voir surgir ce genre de disposition sans étude d’impact, subrepticement, dans un projet de loi relatif à la bioéthique, compte tenu des conséquences graves que cela peut représenter en matière de crédibilité de notre état civil et pour tous ceux qui ont une partie de leur état civil à l’étranger, puisque celui-ci n’aura plus force probante en France.

Oui, l’article 4 bis soulève une difficulté ! C’est la raison pour laquelle nous avions demandé sa suppression. Toutefois, ce que propose le Gouvernement aura un impact bien supérieur dans de nombreux autres domaines, et il n’est bien entendu absolument pas responsable de le valider. Cette méthode brutale de remise en cause globale de la force probante des actes d’état civil étrangers ne peut être utilisée pour régler cette difficulté.

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Il est vrai qu’il y a peu d’adoptions impossibles, mais il y en a. Il n’est qu’à penser aux époux Mennesson, à qui l’on doit cette jurisprudence. C’est de l’ordre de trois ou quatre par an.

Que fait-on ? Laisse-t-on ces enfants sur le bord de la route ? Voilà l’enjeu de la disposition que je défends et que vous ne souhaitez pas retenir. Certes, la loi a vocation à s’appliquer erga omnes, mais quid des quelques situations particulières qui demeurent ? L’objet, c’est que les enfants aient une filiation et qu’ils ne soient pas abandonnés dans des difficultés humaines que nous ne pouvons pas accepter. Bien sûr, ils ne sont que quelques-uns, mais c’est déjà trop.

M. Jean-Yves Leconte. Et les autres conséquences de cette disposition ?

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 31 et 91 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis de la commission spéciale est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 72 :

Nombre de votants 292
Nombre de suffrages exprimés 289
Pour l’adoption 70
Contre 219

Le Sénat n’a pas adopté.

L’amendement n° 9 rectifié, présenté par MM. Mizzon, Duffourg, Masson et Kern, Mmes Herzog et Belrhiti, M. Moga, Mme Morin-Desailly et M. L. Hervé, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer les mots :

, à l’exception des jugements d’adoption,

La parole est à M. Jean-Marie Mizzon.

M. Jean-Marie Mizzon. À la différence de certains collègues qui sont opposés à la GPA, qui n’ont pas de mots assez durs pour la condamner, mais qui s’empressent de voter tout ce qui la prépare, trompant quelque peu leur monde, je suis pour ma part opposé à la GPA et je vote contre tout ce qui concourt à son avènement. C’est la raison pour laquelle je défends cet amendement visant à interdire la transcription de jugements d’adoption étrangers. Cela revient en effet à contourner la loi française, qui prohibe encore la gestation pour autrui. Il s’agit là d’apporter de la clarté.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. On peut relever la cohérence de M. Mizzon. Pour autant, je rappelle que la transcription des jugements d’adoption étrangers est aujourd’hui possible en droit français, sous contrôle de l’autorité judiciaire.

La commission spéciale n’a pas entendu que l’on puisse revenir sur cette possibilité. Par conséquent, elle demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 9 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 4 bis.

(Larticle 4 bis est adopté.)

TITRE II

PROMOUVOIR LA SOLIDARITÉ DANS LE RESPECT DE L’AUTONOMIE DE CHACUN

Chapitre Ier

Conforter la solidarité dans le cadre du don d’organes, de tissus et de cellules

Article 4 bis
Dossier législatif : projet de loi relatif à la bioéthique
Article 6

Article 5 A

L’article L. 1231-1 A du code de la santé publique est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Dans le respect des dispositions du dernier alinéa de l’article 16-1 du code civil, le statut de donneur d’organe, de tissus ou de cellules, reconnu par la Nation, peut ouvrir droit à une distinction honorifique.

« La neutralité financière du don est garantie pour le donneur. »

M. le président. L’amendement n° 124, présenté par M. Mohamed Soilihi, Mme Schillinger, MM. Iacovelli, Lévrier, Théophile, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mmes Duranton et Evrard, MM. Gattolin et Hassani, Mme Havet, MM. Haye, Kulimoetoke, Marchand et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard, Rohfritsch, Yung et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. Le don d’organes est un acte essentiel, et c’est parce que nous prenons en considération toutes les conséquences qu’un tel geste peut avoir dans la vie du donneur que nous estimons que cet acte altruiste ne devrait pas être incité par une quelconque contrepartie.

Ainsi, même si la neutralité financière du don est explicitement indiquée dans cet article, il n’est pas exclu que toute autre contrepartie puisse faire suite au don. De fait, si aucune contrepartie n’est induite, quel est l’intérêt de ce nouveau statut ?

Comme l’indique sa racine latine, le don est un cadeau, un acte dénué de tout intérêt personnel : n’est-ce pas cela la contrepartie la plus enrichissante et le statut le plus grand ?

Le CCNE lui-même dans son avis 129 soulignait que la création d’un statut du donneur, bien que pertinente pour favoriser la reconnaissance du don, impliquait des modalités complexes et nécessitait une analyse plus poussée.

De plus, l’une des motivations premières est d’assurer un suivi médical des donneurs d’organes ; or l’Agence de la biomédecine gère déjà un registre relatif au suivi des donneurs vivants d’organes depuis 2004.

Enfin, si le statut de donneur est créé dans le but de mobiliser davantage de donneurs en soulignant l’acte altruiste réalisé, je rappelle que la journée nationale de réflexion sur le don d’organes et la greffe du 22 juin remplit déjà cette mission.

Pour toutes ces raisons, il apparaît que la création d’un statut du donneur serait finalement contraire à la vision altruiste des dons en France et ne semble pas adéquate au vu des éléments d’appréciation actuels. C’est pourquoi nous proposons la suppression de cet article.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Bernard Jomier, rapporteur chargée dexaminer le projet de loi relatif à la bioéthique. Je reconnais volontiers que le présent article n’est pas parfait, qu’il présente des limites et qu’il n’est pas la solution aux problèmes de pénurie de donneurs que nous rencontrons. Cela étant dit, il pose le débat, beaucoup moins développé en France que dans d’autres pays, sur la question du don d’organes.

Je sais les efforts déployés par l’Agence de la biomédecine, qui a notamment créé le site dondorganes.fr, qui mériterait d’ailleurs d’être mieux connu.

J’entends aussi les arguments relatifs au principe de neutralité financière. Ce dernier est certes déjà garanti de façon indirecte par des dispositions en vigueur, mais celles-ci sont éparses et doivent être rassemblées. En pratique, les associations rencontrent des difficultés du fait de la complexité résultant de cet éparpillement et de la mauvaise connaissance de ces dispositifs en dépit du guide publié par l’Agence de biomédecine. L’inscription de ce principe dans la loi vise à remédier à ces carences.

Par ailleurs, l’article permet d’envisager une distinction honorifique qui ne serait pas une contrepartie au don. Il existe déjà dans un certain nombre d’établissements des « murs des donneurs » qui ne sont pas considérés comme constituant une atteinte au principe de la neutralité du don. Cette distinction est une reconnaissance symbolique de la Nation.

Enfin, l’article 5 A ne vise en rien à donner une priorité au donneur pour recevoir lui-même un don ultérieurement.

Je partage la position exprimée par le CCNE sur cette question, y compris les limites soulignées dans son avis. En tout état de cause, cette proposition qui permettra de valoriser davantage les donneurs ne me paraît pas contraire aux valeurs du don. Je vous invite à l’approuver, et donc, à rejeter l’amendement n° 124.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Adrien Taquet, secrétaire dÉtat. Nous partageons un certain nombre de constats dressés par le rapporteur, qui, sauf erreur de ma part, est à l’origine de l’introduction du présent article. Toutefois, nous soutiendrons cet amendement de suppression.

Accorder une distinction honorifique est en effet un acte d’une forte portée symbolique. Donner un élément du corps humain est un geste noble et altruiste, mais qui peut difficilement être comparé, nous semble-t-il, avec le don de sa vie par un militaire tué dans l’exercice de son devoir par exemple.

Par ailleurs, monsieur le rapporteur, le principe de neutralité financière que vous avez évoqué figure déjà parmi les principes généraux qui encadrent le don et l’utilisation du corps humain. Il nous semble donc superfétatoire de l’inscrire dans la loi.

J’émets un avis favorable sur cet amendement de suppression.

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

M. Philippe Bas. Permettez-moi de rappeler que, si les dons d’organes et de sang sont d’intérêt public, les règles d’attribution de la Légion d’honneur ou de l’ordre national du Mérite ne prévoient pas une liste des actes qui, pour reprendre une expression de ce texte, pourraient « ouvrir droit à une distinction honorifique ». Si l’on entreprenait de l’élaborer, cette liste serait fort longue ; c’est pourquoi il faut laisser au Président de la République la capacité d’apprécier librement quels sont les mérites qui permettent d’obtenir une distinction honorifique.

Si l’on comprend les raisons pour lesquelles l’on pourrait flécher plus particulièrement les donneurs pour qu’ils reçoivent cette distinction, on serait tenté, dans d’autres textes, de flécher la création de nombreux emplois, l’invention de nouveaux traitements, le service d’une association caritative, etc. On pourrait même dresser la liste des actes qui n’ouvrent pas droit à des distinctions honorifiques !

Ne nous embarquons pas dans un tel processus.

Je soutiens fermement l’amendement de notre collègue Thani Mohamed Soilihi.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Il est parfois difficile de comprendre les raisons pour lesquelles une médaille est décernée. En l’occurrence, il s’agit non pas d’une contrepartie, mais d’une reconnaissance symbolique marquant l’attachement de la Nation, cette reconnaissance pouvant favoriser les dons.

Cet article ne favorisera sans doute pas beaucoup de dons, mais s’il nous permet de répondre en partie au manque de greffons, ce sera ça de pris.

Je ne voterai pas cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Bernard Jomier, rapporteur. Je veux dire à Philippe Bas que je présente cette disposition, qui ne remet nullement en cause notre droit, avec une certaine humilité. Des distinctions et des médailles sont déjà décernées pour des dons, notamment pour les donneurs de sang – pour 10, 25 et jusqu’à 200 dons. Il n’y a donc aucune nouveauté.

Compte tenu des difficultés que nous rencontrons pour recruter des donneurs d’organes, j’estime que ce type de dispositif mérite d’exister, d’autant qu’il ne porte aucunement atteinte au principe de neutralité financière et de désintéressement du don. Il s’agit d’une proposition supplémentaire visant à accroître le nombre de donneurs dans notre pays, ni plus ni moins.

M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.

Mme Michelle Gréaume. Je voterai cet amendement de suppression.

Mes chers collègues, avez-vous déjà décerné la médaille du Sénat à un donneur d’organes ? Pour ma part, j’ai décerné la médaille du Sénat à la plus jeune donneuse d’organes de son vivant.

Nous pouvons décerner quantité de médailles, notamment celle de la ville ou celle du Sénat. Si vous souhaitez valoriser un donneur d’organes, je vous suggère de commencer par là.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 124.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 5 A est supprimé.

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Article 5 A
Dossier législatif : projet de loi relatif à la bioéthique
Article 7

Article 6

I. – Le chapitre Ier du titre IV du livre II de la première partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° l’article L. 1241-3 est ainsi modifié :

a) Au deuxième alinéa, après le mot : « bénéfice », sont insérés les mots : « de l’un de ses parents, » ;

b) Le troisième alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Le prélèvement au bénéfice d’un membre de la famille autre que les parents ne peut être pratiqué que sous réserve du consentement de chacune des personnes investies de l’exercice de l’autorité parentale ou, le cas échéant, du tuteur du mineur, informés des risques encourus par le mineur et des conséquences éventuelles du prélèvement par le praticien qui a posé l’indication de greffe ou par tout autre praticien de leur choix. Le consentement est exprimé devant le président du tribunal judiciaire ou le magistrat désigné par lui, qui s’assure au préalable que ce consentement est libre et éclairé. En cas d’urgence vitale, le consentement est recueilli, par tout moyen, par le procureur de la République. Le consentement est révocable sans forme et à tout moment. Le prélèvement est subordonné à l’autorisation du comité d’experts mentionné à l’article L. 1231-3.

« Dans le cas du prélèvement réalisé à titre exceptionnel sur un mineur au bénéfice de l’un de ses parents, investi de l’exercice de l’autorité parentale, le président du tribunal judiciaire désigne sans délai un administrateur ad hoc, qui ne peut être un ascendant ou un collatéral des parents et du mineur, pour représenter ce dernier dans les conditions prévues à l’article 388-2 du code civil, en lieu et place de ses parents. Le praticien qui a posé l’indication de greffe ou tout autre praticien au choix des parents informe l’administrateur ad hoc, dans les mêmes conditions que ces derniers, des risques encourus par le mineur et des conséquences éventuelles du prélèvement.

« Le président du tribunal judiciaire autorise le prélèvement après avoir entendu le mineur, s’il est capable de discernement, les parents ainsi que l’administrateur ad hoc et après avoir recueilli l’avis du comité d’experts mentionné à l’article L. 1231-3 du présent code.

« Par dérogation aux trois alinéas précédents, dès l’âge de seize ans, le mineur exprime lui-même son consentement devant le président du tribunal judiciaire ou le magistrat désigné par lui, qui s’assure au préalable que le consentement est libre et éclairé. En cas d’urgence vitale, le consentement est recueilli, par tout moyen, par le procureur de la République. Le consentement est révocable sans forme et à tout moment. Le prélèvement est subordonné à l’autorisation du comité d’experts mentionné à l’article L. 1231-3. » ;

c) Le début de la première phrase du dernier alinéa est ainsi rédigé : « Avant de délivrer l’autorisation ou de formuler l’avis prévus au présent article, le comité d’experts mentionné au même article L. 1231-3 s’assure que, notamment… (le reste sans changement). » ;

2° L’article L. 1241-4 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « légale » est remplacé par les mots : « juridique avec représentation relative à la personne » ;

b) Les deuxième à avant-dernier alinéas sont ainsi rédigés :

« En l’absence d’autre solution thérapeutique appropriée, le prélèvement de cellules hématopoïétiques issues de la moelle osseuse ou du sang périphérique peut, à titre exceptionnel, être effectué sur une personne vivante majeure faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne au bénéfice de l’un de ses parents, de l’un de ses enfants, de son cousin germain ou de sa cousine germaine, de son oncle ou de sa tante, de son neveu ou de sa nièce.

« Lorsque le receveur est l’un de ses parents ou la personne chargée de la mesure de protection, ou lorsque la personne chargée de la mesure de protection est un ascendant ou un collatéral du receveur, le juge des tutelles désigne sans délai un administrateur ad hoc, qui ne peut être un ascendant ou un collatéral des parents ou du majeur protégé, pour représenter ce dernier et recevoir l’information par le praticien qui a posé l’indication de greffe ou tout autre praticien, des risques encourus par le majeur protégé et des conséquences éventuelles du prélèvement.

« Pour l’application des trois premiers alinéas du présent article, si le juge des tutelles compétent estime, après l’avoir entendue, que la personne protégée a la faculté de consentir au prélèvement, il reçoit ce consentement au prélèvement, lequel ne peut être réalisé qu’après avoir été autorisé par le comité d’experts mentionné à l’article L. 1231-3. Dans le cas contraire, le juge des tutelles autorise le prélèvement après avoir recueilli l’avis de la personne concernée, lorsque cela est possible, de la personne chargée de la mesure de protection, lorsque celle-ci n’est ni le receveur, ni un descendant, ni un collatéral du receveur, du comité d’experts et, le cas échéant, de l’administrateur ad hoc.

« Avant de formuler son avis ou de délivrer l’autorisation prévus au quatrième alinéa du présent article, le comité d’experts mentionné à l’article L. 1231-3 s’assure que tous les moyens ont été mis en œuvre pour trouver un donneur majeur suffisamment compatible avec le receveur. »

II et III. – (Non modifiés) – (Adopté.)

Article 6
Dossier législatif : projet de loi relatif à la bioéthique
Article 7 bis

Article 7

I. – (Non modifié)

II. – L’article L. 1232-2 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « ou un majeur sous tutelle » sont supprimés et les mots : « chacun des titulaires de l’autorité parentale ou le tuteur » sont remplacés par les mots : « chacune des personnes investies de l’exercice de l’autorité parentale » ;

2° Au second alinéa, les mots : « l’un des titulaires » sont remplacés par les mots : « l’une des personnes investies de l’exercice de l’autorité parentale » et la seconde occurrence du mot : « titulaire » est remplacée par les mots : « personne investie de l’exercice de l’autorité parentale » ;

3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Si la personne décédée était un majeur faisant l’objet d’une protection juridique avec représentation relative à la personne, aucun prélèvement ne peut avoir lieu. »

III et IV. – (Non modifiés)

V. – (Non modifié) L’article L. 1272-2 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, la référence : « quatrième alinéa » est remplacée par la référence : « III » et les références : « aux deuxième et sixième alinéas du même article » sont remplacées par les références : « au second alinéa du I et au deuxième alinéa du IV du même article L. 1231-1 » ;

2° Au dernier alinéa, le mot : « légale » est remplacé par les mots : « juridique avec représentation relative à la personne ».

VI. – (Non modifié) L’article 511-3 du code pénal est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, la référence : « quatrième alinéa » est remplacée par la référence : « III » et les références : « aux deuxième et sixième alinéas du même article » sont remplacées par les références : « au second alinéa du I et au deuxième alinéa du IV du même article L. 1231-1 » ;

2° Au second alinéa, le mot : « légale » est remplacé par les mots : « juridique avec représentation relative à la personne ».

M. le président. L’amendement n° 134 rectifié, présenté par M. Salmon, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme de Marco, M. Parigi et Mmes Poncet Monge et Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Alinéas 5 et 6

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Daniel Salmon.

M. Daniel Salmon. Actuellement, la loi dispose que le don d’organes post mortem d’une personne protégée nécessite l’autorisation substitutive du tuteur. Alors que l’article 7 vise à lever partiellement l’interdiction des dons d’organes, de tissus et de cellules applicable aux majeurs protégés, la commission spéciale du Sénat a fait le choix d’interdire de manière catégorique le recours au prélèvement d’organes chez les majeurs faisant l’objet d’une protection juridique avec représentation relative à la personne après leur décès.

Or lorsque l’état de la personne protégée ne lui permet pas de prendre seule une décision personnelle et éclairée, le juge, ou le conseil de famille s’il a été constitué, peut prévoir qu’elle bénéficie, pour l’ensemble des actes relatifs à sa personne, notamment pour l’expression d’un refus de prélèvement d’organes, de l’assistance de la personne chargée de sa protection.

Tenant compte de cette garantie, nous souhaitons, par cet amendement, faire entrer les majeurs protégés dans le droit commun, et ainsi lutter contre ce qui peut être ressenti par les publics concernés comme une discrimination.

Il sera ainsi prévu de s’appuyer sur la mission de la personne chargée de la mesure de protection afin que, désormais, l’ensemble des majeurs, qu’ils fassent l’objet ou non d’une mesure de protection, soient soumis au régime de droit commun. Leur consentement au don d’organes sera présumé, sauf expression d’un refus exprès, à l’instar de ce qui a été décidé pour l’ensemble de la population.

M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?

M. Bernard Jomier, rapporteur. Monsieur Salmon, vous indiquez dans l’objet de votre amendement que nous aurions souhaité « interdire purement et simplement le recours au prélèvement d’organes chez les majeurs protégés ». Cela n’est pas exact, puisque seuls sont visés les majeurs qui font l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne, c’est-à-dire les majeurs protégés souffrant de troubles cognitifs qui ne leur permettent pas d’émettre un avis libre et éclairé.

Les majeurs faisant l’objet d’une mesure de représentation relative aux biens ou d’une simple assistance, eux, continuent de relever du droit commun, c’est-à-dire que leur consentement resterait présumé.

La commission spéciale a ainsi mis en cohérence le don post mortem avec le régime choisi par le Gouvernement en matière de don d’organes, de tissus et de cellules de son vivant, qui reste interdit pour les majeurs faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne, sauf dans deux cas très spécifiques.

Nous avions adopté cette position en première lecture, et la commission spéciale de l’Assemblée nationale avait suivi notre position. C’est en séance publique que les députés sont revenus sur ces dispositions.

Un majeur faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne souffre par définition d’une atteinte majeure de ses facultés mentales qui l’empêche de pourvoir seul à ses propres intérêts. En conséquence, nous avons considéré qu’il n’a pas la capacité d’autonomie, voire de discernement requise pour être informé du système de consentement présumé, en comprendre les enjeux, s’inscrire sur le registre national des refus ou exprimer un refus à son entourage.

Par ailleurs, je rappelle que le choix de s’inscrire ou non de son vivant sur le registre national des refus ou de laisser ou non prélever ses organes après sa mort est un choix éminemment personnel qui est pris non pas dans l’intérêt de la personne, mais dans un objectif purement altruiste. Or ce choix ne relève pas de la mission du représentant légal du majeur protégé.

Telles sont les raisons pour lesquelles la commission spéciale a souhaité ne pas appliquer le droit commun du prélèvement post mortem aux majeurs faisant l’objet d’une mesure de protection avec représentation relative à la personne.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.