M. le président. L’amendement n° 1, présenté par Mme Benbassa, est ainsi libellé :

Alinéa 18

Après le mot :

renoncent

insérer le mot :

explicitement

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Cet amendement tend à s’inscrire dans la philosophie du présent texte.

Quitter le foyer est l’une des décisions les plus difficiles. Le retour, quant à lui, est parfois inévitable. Cette proposition de loi encourage la victime à prendre l’initiative de la demande. Nous devons également nous assurer qu’elle lui permette d’être accompagnée jusqu’au bout de sa démarche.

Il faut que le dernier lien soit rompu entre l’agresseur et l’agressé et que le parcours judiciaire de la victime soit complet. Le renoncement à la poursuite civile doit alors être un choix éclairé, délesté de l’emprise souvent persistante du conjoint violent.

Cet amendement vise donc à préciser que le renoncement à la poursuite civile de l’agresseur doit être explicite.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. L’article 1er permet à la caisse d’allocations familiales (CAF) d’être subrogée dans les droits de la victime pour se constituer partie civile au procès pénal si la victime renonce à exercer ce droit.

Le présent amendement tend à préciser le caractère explicite du renoncement de la victime. Cette précision n’apparaît pas comme utile et se trouve en réalité satisfaite.

La caisse exercera les droits de la victime de manière subsidiaire. Il est donc clair, à ce titre, qu’elle informera expressément la victime de son intention d’agir en justice et que son action sera interrompue dès lors que la victime se constituera elle-même partie civile.

Il ne s’agit nullement de décourager les victimes d’exercer leurs droits, mais, au contraire, de faire en sorte qu’elles soient informées de la possibilité qui leur est offerte de demander réparation du préjudice, y compris matériel, qu’elles ont subi.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Isabelle Rome, ministre déléguée. Madame la sénatrice Benbassa, vous souhaitez par cet amendement renforcer le principe de choix éclairé de la victime, pour aller jusqu’au bout de la démarche à l’encontre de son agresseur.

Nous ne pouvons qu’être favorables à cette démarche. Néanmoins, les dispositions de l’amendement, tel qu’elles sont rédigées, ne conduisent pas tant à renforcer le principe de choix éclairé de la victime en matière de poursuites à l’encontre de l’agresseur qu’à préciser dans quel cas la caisse peut être subrogée, en l’étendant du renoncement simple au renoncement explicite.

Je le répète, la rédaction que vous proposez pour l’alinéa 18 ne constitue pas une solution juridiquement opérationnelle.

C’est pourquoi j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Madame Benbassa, l’amendement n° 1 est-il maintenu ?

Mme Esther Benbassa. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 1 est retiré.

Je mets aux voix l’article 1er.

(Larticle 1er est adopté.)

M. le président. Je constate que cet article a été adopté à l’unanimité des présents.

Article 1er
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Article additionnel après l'article 2 - Amendement n° 4 rectifié

Article 2

Après l’article 15-3-2 du code de procédure pénale, il est inséré un article 15-3-2-1 ainsi rédigé :

« Art. 15-3-2-1. – En cas de plainte déposée pour une infraction punie d’au moins trois ans d’emprisonnement commise par le conjoint de la victime, son concubin ou le partenaire lié à elle par un pacte civil de solidarité, l’officier ou l’agent de police judiciaire qui reçoit la plainte informe la victime qu’elle peut, le cas échéant, bénéficier d’une avance d’urgence au titre de l’article L. 214-8 du code de l’action sociale et des familles.

« L’officier ou l’agent de police judiciaire ayant reçu la plainte ou, le cas échéant, le travailleur social mentionné à l’article L. 121-1-1 du même code enregistre la demande et la transmet à la caisse d’allocations familiales mentionnée au II de l’article L. 214-8 dudit code selon des modalités prévues par le décret prévu à l’article L. 214-10 du même code. La demande est transmise au président du conseil départemental. »

M. le président. L’amendement n° 5, présenté par Mme Guidez, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Après la seconde occurrence du mot :

plainte

insérer les mots :

ou, sous leur contrôle, l’assistant d’enquête

II. – Alinéa 3, première phrase

Après le mot :

plainte

insérer les mots :

ou, sous leur contrôle, l’assistant d’enquête

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. Cet amendement de la commission tend à proposer une coordination avec le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), qui a été adopté par le Sénat.

Il est ainsi prévu de créer la fonction d’assistant d’enquête pour seconder les officiers et agents de police judiciaire sur certaines tâches de procédure. Les assistants d’enquête exerceront donc les nouvelles missions que l’article 2 vise à confier à ces officiers ou agents.

Dans les commissariats ou gendarmeries où ils seront présents, ces assistants d’enquête seront mieux à même d’enregistrer les demandes d’avances d’urgence et de les transmettre à la CAF.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Isabelle Rome, ministre déléguée. Madame la rapporteure, nous souhaitons vraiment aller plus loin, ensemble, en nous inspirant des différentes expérimentations ou dispositifs mis en place dans les territoires. Mais je m’en tiendrai à votre disposition initiale, pour que nous avancions au mieux et dans le même état d’esprit : mieux protéger les victimes et leur permettre de reprendre leur autonomie.

S’agissant de cet amendement, il semble nécessaire que les assistants d’enquête disposent d’une compétence d’attribution limitée, définie dans un nouvel article 21-3 inséré au code de procédure pénale, et sans autonomie d’intervention. Ce n’est qu’à cette condition essentielle que le Conseil d’État a admis la validité de la disposition dans son avis du 10 mars dernier.

En outre, il est prématuré d’ajouter des compétences aux assistants d’enquête alors que l’Assemblée nationale n’a pas encore examiné le texte. Le Sénat a d’ailleurs souhaité évaluer ce nouveau dispositif.

Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Madame la rapporteure, l’amendement n° 5 est-il maintenu ?

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. C’est justement le moment ou jamais d’ajouter ce genre de dispositions ! Il serait dommage de ne pas les introduire dès le vote de cette proposition de loi.

Je ne comprends pas votre réponse, madame la ministre. Aussi, je maintiens cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.

Mme Valérie Létard. Je remercie Mme la rapporteure de nous donner une possibilité supplémentaire d’appuyer cette mission des officiers de police ou de gendarmerie. En effet, si ces derniers sont accompagnés en principe de travailleurs sociaux, tel n’est pas le cas partout.

Si, demain, nous confions à des agents d’enquête complémentaires des prérogatives faisant d’eux un soutien supplémentaire, cette demande sera mieux prise en compte. Il s’agira d’une avancée.

Tout cela demande vérification, mais il me semble que ces dispositions sont cohérentes avec la loi que nous avons votée tout récemment.

Par ailleurs, dans cet article 2, il est précisé que la demande est transmise simultanément au président du conseil départemental au moment du dépôt de plainte ou du signalement. Cela répond à un point abordé par notre collègue Michelle Gréaume : au travers des présidents de conseil départemental, nous mobilisons les services sociaux, dotant ainsi le dispositif d’une approche globale.

Cela permet d’utiliser tous les outils dont nous disposons pour l’accompagnement social et administratif des bénéficiaires du RSA vers l’emploi. La demande d’aide, d’instruction sociale et d’accompagnement sera immédiatement transmise à la CAF, ce qui n’est pas anodin.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 5.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.

(Larticle 2 est adopté.)

M. le président. Je constate que cet article a été adopté à l’unanimité des présents.

Article 2
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Article 3

Après l’article 2

M. le président. L’amendement n° 4 rectifié, présenté par MM. Chasseing, Decool, Wattebled, Guerriau et Menonville, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Capus et A. Marc, Mme Paoli-Gagin, M. Détraigne, Mme Berthet, M. Daubresse, Mme N. Delattre, M. Calvet, Mme Sollogoub, MM. Cadec et Laménie, Mmes Dindar, N. Goulet, Ract-Madoux, Létard et Guidez, MM. Fialaire, Belin, Guérini, Longeot et Chauvet, Mmes Gruny et Bonfanti-Dossat, M. H. Leroy, Mme Lopez, M. Nougein, Mme Perrot et MM. Gold et Moga, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur l’intérêt de permettre aux mutuelles sociales agricoles de procéder, aux côtés des caisses d’allocations familiales, au versement de l’avance d’urgence en faveur des victimes de violences conjugales.

La parole est à M. Daniel Chasseing.

M. Daniel Chasseing. Cet amendement, qui a peut-être été mal rédigé, tendait, dans mon esprit, à permettre aux caisses de la Mutualité sociale agricole (MSA) de procéder aux côtés des CAF au versement de l’avance d’urgence pour les victimes de violences conjugales.

Le dispositif risque en effet de manquer certaines cibles, car il a pour interlocuteur les CAF plutôt que les caisses de la MSA. Or il me semble pertinent d’ouvrir la possibilité à la MSA de procéder au versement de cette aide. Par là même, nous éviterions une incompréhension du dispositif, tel qu’il est prévu par la proposition de loi, car les 35 cosignataires, dont Mme Létard et Mme la rapporteure, l’ont interprété de la même manière que moi.

Cet amendement vise donc à ouvrir le dispositif à la MSA.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. Mon cher collègue, je souscris entièrement à votre intention. Par ailleurs, grâce à cette demande de rapport, nous pouvons discuter de ce sujet sans tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution.

C’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai cosigné cet amendement avec Valérie Létard. À terme, il conviendra aux caisses de la MSA de verser l’aide d’urgence à leurs allocataires – je m’adresse ici à Mme la ministre. Il y a un trou dans la raquette, si j’ose dire, qu’il est important de combler.

Toutefois, comme cet amendement tend à demander un rapport, je suis obligée de vous demander de le retirer ; mon cher collègue ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Isabelle Rome, ministre déléguée. Même avis.

M. le président. Monsieur Chasseing, l’amendement n° 4 rectifié est-il maintenu ?

M. Daniel Chasseing. Il me semble évident, et je ne comprends pas ce que vient faire l’article 40 de la Constitution ici, que les personnes assujetties à la CAF bénéficieront de cette aide d’urgence, alors que celles qui sont assujetties à la MSA ne pourront la toucher.

Les violences conjugales existent aussi, malheureusement, dans le monde rural. Je ne comprends donc absolument pas pourquoi nous n’associons pas la MSA. Dans mon esprit, cet amendement est pratiquement rédactionnel : il s’agit d’un oubli dans la proposition de loi – je pense que tout le monde en conviendra.

Cela dit, je retire mon amendement, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 4 rectifié est retiré.

Mme Laurence Rossignol. Vous auriez dû le maintenir, monsieur Chasseing ! Je le reprends !

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 4 rectifié bis, présenté par Mme Rossignol.

Vous avez la parole pour le défendre, ma chère collègue.

Mme Laurence Rossignol. Il y a quelques mois, la délégation aux droits des femmes a travaillé, de manière transpartisane comme à son habitude, et quatre de nos collègues ont produit un rapport sur les inégalités spécifiques dont les femmes sont victimes en milieu rural, rapport intitulé Femmes et ruralités : en finir avec les zones blanches de légalité.

Dans ce document, il est très clairement indiqué que les femmes victimes de violences en milieu rural souffrent encore plus que celles qui se trouvent en milieu urbain, car l’environnement de soutien et le tissu associatif y sont plus limités. (Mme Victoire Jasmin applaudit.)

En tant que membre de la délégation aux droits des femmes, il me semble totalement cohérent de reprendre et de faire voter l’amendement présenté par notre collègue Chasseing. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. En principe, il faudrait que la commission se réunisse pour prendre une décision ! Je maintiens donc mon avis défavorable sur cet amendement, en renvoyant la balle à Mme la ministre, à qui revient, à mon sens, la décision.

En effet, qu’on le veuille ou non, cette disposition aura un coût supplémentaire et devrait donc tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution. (Mme Laurence Rossignol proteste.)

M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.

Mme Victoire Jasmin. Je suis très favorable au texte, mais nous ne devons pas créer une fois de plus des disparités, madame la rapporteure.

Nous adhérons tous à la proposition de loi de Mme Létard, qui porte sur un sujet sérieux. Or la proposition de notre collègue est parfaitement cohérente avec le rapport publié par la délégation aux droits des femmes, auquel l’ensemble des groupes politiques a concouru.

Dans sa prise de parole dans la discussion générale, Mme la ministre a déclaré qu’elle allait faire évoluer les choses. Par conséquent, votons cet amendement, et Mme la ministre fera le nécessaire pour améliorer le dispositif !

Je le répète, nous ne devons pas créer de disparités entre les femmes selon qu’elles vivent ou non en milieu rural, d’autant plus que nous avons été unanimes à reconnaître les mérites du rapport et de ses préconisations, qui reflètent la réalité de nos territoires. Les femmes de nos territoires sont malheureusement les victimes de ces disparités.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.

Mme Valérie Létard. Il faut que les choses soient très claires : Mme la rapporteure ne fait qu’appliquer une règle imposée aux commissions de façon générale. Toutefois, elle approuve cette disposition, d’autant que, si celle-ci ne passait pas par un rapport, nous serions confrontés à un problème budgétaire difficile.

Aussi, nous pouvons nous accorder sur le fait que Mme la rapporteure, tout en ayant émis un avis défavorable, soutient l’amendement… (Exclamations amusées.)

Pour ma part, je ferai une exception à la règle imposée aux commissions et voterai pour cet amendement, tout simplement parce que l’esprit de ce texte l’exige : la MSA doit être intégrée au dispositif.

Madame la ministre, j’espère que vous avez bien entendu le message ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et SER.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Isabelle Rome, ministre déléguée. Si je relis son dispositif, cet amendement vise à demander au Gouvernement la remise au Parlement d’un rapport sur l’opportunité d’ouvrir le dispositif à la MSA en plus des CAF. Voilà exactement ce dont nous sommes saisis.

Si le dispositif fait preuve d’efficacité, il apparaîtra nécessaire de l’élargir aux caisses de la MSA, par équité de traitement entre les allocataires et par simplification de l’accès à l’aide pour les personnes victimes relevant du régime agricole, même si, pour le prêt d’urgence sans intérêt, ces dernières devront toujours s’adresser à la CAF.

La production d’un tel rapport n’apparaît pas nécessaire. C’est pourquoi je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2.

Article additionnel après l'article 2 - Amendement n° 4 rectifié
Dossier législatif : proposition de loi créant une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 3

I. – Les conséquences financières résultant pour les collectivités territoriales de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale de la présente loi est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. le président. Madame la ministre, acceptez-vous de lever le gage sur cet article ?

Mme Isabelle Rome, ministre déléguée. Non, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’article 3.

(Larticle 3 est adopté.)

Vote sur l’ensemble

Article 3
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.

Mme Michelle Gréaume. Je regrette le rejet de l’étude conjointe de cette proposition de loi et de la mienne, car cette dernière, je le précise, répondait aussi aux besoins de personnes en situation d’emploi, retraitées ou se trouvant dans d’autres situations. En effet, il s’agissait d’instaurer non pas un prêt, mais une avance de RSA, avec révision des ressources au bout de trois mois.

Je me réjouis cependant de l’avancée que constitue ce texte. Comme je l’avais annoncé lors de la discussion générale, notre groupe votera cette proposition de loi : elle est complémentaire des dispositifs déjà mis en place et elle est impérative pour toutes les personnes qui l’attendent et qui en ont besoin.

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.

Mme Annie Le Houerou. Cette proposition de loi vise à mettre en place une avance universelle d’urgence à taux zéro, financée par la CAF, pour les victimes de violences conjugales.

Même s’il s’agit d’un prêt, qui devra donc être remboursé – avec souplesse, espérons-le –, elle apporte un soutien à ces femmes trop souvent confrontées à un départ sans ressources, qui les contraint parfois à revenir.

Toutes les mesures de nature à aider ces femmes à quitter le domicile, le plus souvent avec des enfants, doivent être activement soutenues – 102 féminicides ont eu lieu en 2022, soit un décès tous les trois jours et demi…

Madame la ministre, il faudra aussi donner aux associations les moyens d’accompagner dignement ces femmes en leur proposant des hébergements d’urgence adaptés. Je le redis, un logement d’urgence situé au bord d’une quatre voies et sans accompagnement n’est pas une solution incitative à quitter l’enfer de la violence conjugale, une fois la crise aiguë passée.

Or nous connaissons le phénomène du cycle infernal de la violence : la victime trouve des justifications aux violences qu’elle a subies, ce qui conduit à une phase dite « de lune de miel », qui suit la crise aiguë, jusqu’à la prochaine…

Je salue l’action des intervenants sociaux dans les gendarmeries, les commissariats et les centres hospitaliers : leur présence doit se généraliser sur tout le territoire. Je souligne par ailleurs la nécessité de former les policiers et les gendarmes.

Je remercie la commission d’avoir amélioré le texte en intégrant l’amendement proposé par notre collègue Victoire Jasmin sur la domiciliation bancaire dans un centre communal d’action sociale (CCAS) ou un centre intercommunal d’action sociale (CIAS).

Comme l’a dit Laurence Rossignol lors de la discussion générale, notre groupe soutient avec enthousiasme cette proposition de loi. Celle-ci n’apporte pas de solution miracle, mais l’indépendance économique des femmes est une condition indispensable à leur émancipation.

Enfin, je rejoins la proposition formulée par Laurence Cohen d’une loi-cadre contre les violences conjugales. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Je félicite tout d’abord Mme Létard et Mme la rapporteure de cette très importante proposition de loi.

Il faut bien sûr poursuivre la prévention. Des progrès ont eu lieu, vous l’avez dit, madame la ministre, mais il faut absolument mettre un frein aux encore trop nombreux féminicides. Cela passe par la mise à disposition de logements, mais aussi par l’aide financière que vous proposez et qui est vraiment très importante pour empêcher la personne dépendante financièrement de retourner dans son foyer, où les violences continueront.

Je remercie également mes collègues ayant voté mon amendement, car, cela a été dit, les violences ont aussi lieu en milieu rural. L’État doit soutenir les associations, de sorte qu’elles assurent également des permanences dans les zones rurales. En Corrèze, les deux associations dont j’ai rencontré les représentants sont en difficulté pour ce qui concerne le logement à cause d’une augmentation des violences.

Nous voterons avec enthousiasme ce texte. Je voudrais que le dispositif proposé soit généralisé à tous les départements.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.

Mme Valérie Létard. Je remercie mes collègues, sur quelques travées qu’ils siègent, de leur contribution, de leur travail et de leur unanimité. Ce sujet dépasse largement les sensibilités politiques et mérite que nous ne perdions pas de temps.

Je salue également les professionnels, ici présents, qui ont largement contribué à cette expérimentation, donc à la réflexion sur le dispositif de la proposition de loi. En effet, nous avons travaillé sur les écueils de l’expérimentation, sur ce qui manquait pour traduire concrètement une telle initiative. C’est d’ailleurs pour cela qu’il nous faut légiférer.

Madame Vogel, vous m’avez interrogée sur la forme de cette aide. Nous avons choisi le prêt, parce que c’était le seul moyen d’arriver à l’universalité. Ainsi, nous pouvons faire en sorte qu’une personne salariée, malgré ses conditions de ressources, si elle est privée de ses revenus, puisse y avoir accès dans ce temps intermédiaire.

Nous avons travaillé avec la CAF, qui nous a dit que le système de l’avance sur droits supposés était trop rigide et ne fonctionnait pas. Les prêts, eux, fonctionnent. Surtout, ils ouvrent la possibilité d’une remise gracieuse pour les personnes en précarité. Autrement dit, il y a une solution pour toutes les situations.

Nous devons aller au bout de ce dispositif, qui a été pensé. La construction a été complexe, mais la mise en application ne pose aucun problème aux professionnels : ils la connaissent sur le bout des doigts et apporteront la garantie, la sécurité et les affinements nécessaires.

Le cadre est posé. De grâce, madame la ministre, ne perdons pas de temps. (Applaudissements.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi.

(La proposition de loi est adoptée.)

M. le président. Je constate que le texte a été adopté à l’unanimité des présents. (Applaudissements.)

La parole est à Mme la rapporteure.

Mme Jocelyne Guidez, rapporteure. Madame la ministre, force est de constater que, malgré toutes les lois qui existent, le nombre de féminicides en France ne diminue pas, ce qui est inquiétant. En ce sens, la proposition de loi de Valérie Létard, améliorée par la commission, est importante, car elle constitue une marche supplémentaire.

Chaque fois que nous déposons une proposition de loi, on nous dit que c’est compliqué. Je ne sais pas pourquoi, mais, en France, tout est compliqué. Même lorsque nous déposons des textes de peu d’importance, nous avons l’impression que nous faisons une révolution !

Madame la ministre, cessons de dire que c’est compliqué : avançons ensemble, et dépêchons-nous ! (Applaudissements.)

M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures vingt-cinq, est reprise à douze heures vingt-sept.)

M. le président. La séance est reprise.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi créant une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales