M. Guillaume Gontard. Cet amendement vise à supprimer une exonération dont bénéficie le fret maritime, afin de le mettre à contribution à hauteur de son impact environnemental.

Le régime fiscal applicable aux activités de navigation maritime et au transport de marchandises sur ces voies questionne la pertinence de la politique environnementale française. Responsable d’une pollution dont l’impact est supérieur à celui de l’automobile, le transport maritime demeure bénéficiaire d’une exonération de taxe sur les carburants.

Alors que l’acheminement de marchandises se fait très majoritairement par ce moyen, les émissions d’oxyde de soufre qu’il génère et leurs lourdes conséquences sanitaires et écologiques contrastent avec la faiblesse des réglementations sur les carburants qu’il consomme.

Afin de rétablir une cohérence dans le traitement de l’urgence environnementale par la France, le présent amendement vise à faire participer ce secteur à l’effort fiscal français en faveur de la transition écologique, à hauteur de son impact sur les écosystèmes.

En outre, les armateurs français, au premier rang desquels CMA CGM, réalisent des profits records – 18 milliards de dollars en 2021 pour la compagnie citée – ; le maintien de cette exonération paraît d’autant plus aberrant.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1282.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 15 - Amendement n° I-1282
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article additionnel après l'article 15 - Amendement n° I-1281

M. le président. L’amendement n° I-1278, présenté par MM. Gontard, Breuiller, Parigi, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 421-178 du code des impositions sur les biens et services est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« À compter du 1er janvier 2023, le tarif est fixé à 21,96 € par 1000 kilomètres parcourus pour les véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 7,5 tonnes et à 7,32 € par 1 000 kilomètres parcourus pour les autres véhicules. Pour les années civiles ultérieures, il est égal à ce montant, majoré de 70 % de l’évolution de l’indice des prix à la consommation hors tabac et arrondi au centième d’euro par 1 000 kilomètres, la fraction égale à 0,005 comptant pour 0,01. »

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. Cet amendement vise à dégager un moyen de financement de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf).

La taxe sur la distance parcourue sur le réseau autoroutier concédé, aussi appelée taxe d’aménagement du territoire (TAT), est due par les concessionnaires d’autoroutes à raison du nombre de kilomètres parcourus par les usagers. Elle est répercutée par ses assujettis sur les péages perçus, quel que soit l’impact du véhicule concerné sur l’usure des routes.

Le présent amendement vise à appliquer un coefficient multiplicateur de 3 au montant de la taxe concernant les camions de plus de 7,5 tonnes. Une telle mesure permettra de faire contribuer l’ensemble des poids lourds, y compris ceux qui circulent sous pavillon étranger, à l’amélioration des infrastructures de transport en accroissant les moyens de l’Afitf.

Cet amendement et inspirée d’une proposition de France Nature Environnement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Toute modification de la fiscalité spécifique aux sociétés concessionnaires d’autoroute emporte, sur le fondement de l’article 32 des contrats de concession, un droit à compensation susceptible de provoquer une hausse des tarifs de péage.

Il me semble que cette conséquence est inverse à l’esprit de votre amendement.

Je me souviens d’une ministre qui faisait montre de sa grande volonté de faire plier les sociétés d’autoroute ; le droit des contrats relevant d’un accord entre les parties, son ambition n’avait pu prospérer.

L’avis est donc défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. J’entends les propos du rapporteur général, qui posent la question des concessions autoroutières.

Monsieur le ministre, quelles sont vos intentions à leur endroit ? Certaines d’entre elles arrivent à échéance, d’autres en sont proches, il va être temps de s’interroger et de prendre des décisions les concernant.

Actuellement, nous constatons que nous sommes pieds et poings liés s’agissant à la fois de la taxation et des possibilités d’intervention sur ces contrats.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1278.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 15 - Amendement n° I-1278
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article additionnel après l'article 15 - Amendement n° I-957

M. le président. L’amendement n° I-1281, présenté par MM. Gontard, Breuiller, Parigi, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mmes de Marco et Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le chapitre II du titre II du livre IV du code des impositions sur les biens et services est ainsi modifié :

1° Le paragraphe 2 de la sous-section de la section 1 est complété par un article L. 422-3-1 ainsi rédigé

« Art. L. 422-3-1 – Un siège vide s’entend par tout siège laissé vacant à bord d’un aéronef dont la vacance n’est pas justifiée par le bon déroulement du vol ou l’exécution des opérations inhérentes au vol. » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 422-14, après le mot : « taxe », sont insérés les mots : « tout siège vide au sens de l’article L. 422-3-1 ou » ;

3° L’article L. 422-20 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 5° Le tarif de compensation carbone dans les conditions prévues à l’article L. 422-22-1. » ;

4° Après l’article L. 422-22, il est inséré un article L. 422-22-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 422-22-1 – Le tarif de compensation carbone prévue au 5° de l’article L. 422-20 est déterminé par arrêté conjoint du ministre chargé du budget et du ministre chargé de l’aviation civile dans les limites inférieures et supérieures suivantes, qui sont fonction du taux de remplissage de l’aéronef :

« 

Taux de remplissage de l’aéronef

MINIMUM ( €)

MAXIMUM ( €)

Supérieur à 50 % de la capacité en sièges

10

20

Inférieur à 50 % de la capacité en sièges

100

200

La parole est à M. Guillaume Gontard.

M. Guillaume Gontard. De nombreuses compagnies aériennes effectuent des vols à vide, ou très peu remplis, faute de passagers et parce qu’elles y sont contraintes par la réglementation européenne sur la conservation des slots, les créneaux horaires qui autorisent une compagnie à décoller d’un aéroport ou à y atterrir à un moment précis.

Si la réglementation européenne n’oblige pas réellement une compagnie à opérer des vols à vide, elle l’empêche d’annuler massivement des vols insuffisamment pleins pour être rentables. Or de tels vols sont quasiment vides, en tout cas remplis à moins de 30 % de leur capacité maximale.

Le droit français alerte le droit européen, les vols à vide sont une aberration écologique à laquelle il faut mettre un terme dans les plus brefs délais, c’est pourquoi nous proposons cette disposition.

Un avion émet en moyenne neuf kilogrammes de CO2 par cent kilomètres par passager. Ainsi, un vol à vide intraeuropéen, par exemple un Paris-Athènes qui aurait pu accueillir 236 passagers, produit quarante-cinq tonnes de CO2.

Cet amendement a donc pour objet d’instaurer une taxe sur les sièges sans passager dans les avions, pendant de la taxe de solidarité sur les billets d’avion. Elle aura pour double effet de limiter les vols en sous-effectif, qui coûtent cher écologiquement et économiquement en raison du carburant qu’ils consomment, mais aussi de forcer les compagnies aériennes à mettre en vente des billets moins chers pour favoriser le remplissage de leurs avions.

Elle présente donc un double intérêt écologique et social, permettant à nos compatriotes les plus modestes de voyager à des prix abordables.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je demande le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1281.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 15 - Amendement n° I-1281
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 16

M. le président. L’amendement n° I-957, présenté par M. Gillé, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Par dérogation au plafond fixé à la quatrième ligne du tableau du second alinéa de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 et au produit fixé à la quatrième ligne du second alinéa de l’article 15 de la présente loi, pour l’année 2023, la part de l’accise sur les énergies mentionnée à l’article L. 312-1 du code des impositions sur les biens et services et perçue en métropole sur les produits autres que les charbons, les gaz naturels et l’électricité affectée à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France est calculée de manière à ce que les recettes totales de l’agence s’élèvent, après déduction du montant des autres recettes, à 3 811 000 000 euros.

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Hervé Gillé.

M. Hervé Gillé, au nom de la commission de laménagement du territoire et du développement durable. Cet amendement, présenté au nom de la commission de l’aménagement du territoire, qui l’a voté à l’unanimité, vise à sécuriser les ressources de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, laquelle concourt au financement de projets d’ampleurs qui s’inscrivent dans le temps long.

Lesdites ressources sont parfois incertaines, à l’image de la contribution du secteur aérien ou des amendes tirées des radars, dont l’Afitf est la dernière bénéficiaire, à l’issue de toutes les autres répartitions : alors que la décarbonation du secteur des transports est une priorité, il semble important de sécuriser ses recettes.

Le présent amendement vise donc, dans le cas où certains fonds viendraient à manquer – j’y insiste –, à affecter à l’Afitf une part plus importante du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), afin de lui permettre de respecter sa trajectoire de dépenses.

Je précise que nous avons entendu l’Afitf en audition. Celle-ci dispose bien de crédits, lesquels, s’ils sont gagés, ne sont pas engagés, indiquant qu’elle peine à mettre en œuvre les conventions et programmes qui requièrent son financement. Cette lourdeur juridique et décisionnelle la conduit à se trouver en difficulté.

Pour autant, cela n’a rien à voir avec les montants nécessaires à la réalisation de ces programmes. C’est pourquoi il importe de sécuriser la trajectoire financière et les ressources de l’Afitf.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. J’ai bien entendu le plaidoyer équilibré de M. Gillé.

Il y a encore quelques années, nous devions sauver l’Afitf à chaque projet de loi de finances rectificative de fin d’exercice ; dans ce projet de loi de finances, les choses se sont améliorées, vous le releviez vous-même.

Cette année, l’Afitf a été conduite à annuler des montants très significatifs de crédits dans son quatrième budget rectificatif, non parce qu’elle manquait de recettes, mais bien parce qu’elle n’était pas en mesure de les consommer. Ainsi, en 2022, elle aura annulé 500 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 260 millions d’euros de crédits de paiement.

Avant de nous engager dans une procédure de sécurisation des recettes de l’agence pour 2023, il serait raisonnable que nous examinions la manière dont elle dépensera ses ressources. Si cela s’avérait nécessaire, nous pourrons, ensuite, rectifier la trajectoire à l’occasion d’un projet de loi de finances rectificative.

C’est pourquoi je demande le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Monsieur Gillé, l’amendement n° I-957 est-il maintenu ?

M. Hervé Gillé. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° I-957 est retiré.

Article additionnel après l'article 15 - Amendement n° I-957
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2023
Article 17

Article 16

I. – Par dérogation à l’avant-dernier alinéa du II de l’article L. 452-4 du code de la construction et de l’habitation, en 2023, le taux mentionné au 1° du même II est fixé par arrêté des ministres chargés du logement, de l’économie et des finances afin que la somme totale des majorations prévues dans le cadre de la modulation de la cotisation soit inférieure de 300 millions d’euros à la somme totale des réductions prévues dans le même cadre.

II. – Par dérogation au 1° du II de l’article L. 435-1 du code de la construction et de l’habitation, en 2023, la fraction des cotisations mentionnées aux articles L. 452-4 et L. 452-4-1 du même code est fixée à 75 millions d’euros.

III. – Au titre de l’année 2023, la société mentionnée à l’article L. 313-19 du code de la construction et de l’habitation verse une contribution de 300 millions d’euros au Fonds national des aides à la pierre mentionné à l’article L. 435-1 du même code. Cette contribution est versée au plus tard le 30 juin. Elle est liquidée, ordonnancée et recouvrée selon les modalités prévues pour les recettes des établissements administratifs de l’État.

M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, sur l’article.

Mme Victoire Jasmin. Monsieur le ministre, j’appelle votre attention sur les mesures que vous envisagez de prendre et qui priveront de 300 millions d’euros le Fonds national des aides à la pierre (Fnap).

Or un quart de la collecte de la participation des employeurs à l’effort de construction (Peec) alimente le budget des programmes de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), d’Action cœur de ville et du plan d’investissement volontaire outre-mer (Pivom), lesquels seront très fortement impactés et risquent de subir une catastrophe. Il est urgent de prendre en compte les situations clairement identifiées et les besoins existants.

À mon sens, monsieur le ministre, vous devez au contraire abonder le Fonds national des aides à la pierre de 150 millions d’euros pour permettre la réalisation de l’ensemble des projets prévus.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-1636 rectifié, présenté par Mmes Létard, Gatel et Gacquerre, M. Henno, Mme Férat, MM. Hingray et Duffourg, Mmes Billon et Guidez, MM. Levi et Canévet, Mme Doineau, M. Kern, Mme de La Provôté, M. Moga, Mme Dindar, M. J.M. Arnaud, Mme Perrot, M. Le Nay et Mme Jacquemet, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Valérie Létard.

Mme Valérie Létard. Cet amendement a pour vocation de corriger une incongruité de ce projet de loi de finances, dont les effets seront dévastateurs pour un acteur central du logement social en France.

Le logement, premier poste de dépenses des foyers français, n’est-il pas l’une des priorités du Gouvernement ? Mettre à la disposition de nos concitoyens des logements abordables, n’est-ce pas un des moyens d’améliorer le sort des salariés aux revenus modestes de notre pays, comme de nos travailleurs clés dans les territoires en tension ?

Alors que plus de 2,2 millions de foyers sont en attente de logements sociaux, que le soutien des salariés et de leur pouvoir d’achat, sous la menace de l’inflation, est au centre de nos préoccupations, il paraît dangereux de risquer de déstabiliser ce modèle vertueux du développement du logement social.

Action Logement (AL) est aujourd’hui un producteur essentiel de logements sociaux, avec, dans les cinq dernières années, plus de 500 000 logements construits, 400 000 ménages logés, 800 000 garanties locatives Visale accordées, et j’en passe.

Or, depuis 2020, Action Logement Services (ALS) a connu plusieurs prélèvements « exceptionnels », entre guillemets, dont l’un, de 1,5 milliard d’euros, au profit du Fonds national d’aide au logement (Fnal), a conduit à mobiliser intégralement son surplus de trésorerie.

À cela s’ajoute la prise en charge par Action Logement d’une partie des contributions versées à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) par les bailleurs sociaux afin de financer le Fonds national des aides à la pierre, pour un montant de 300 millions par an pour les années 2020 à 2022.

Cette ponction ne saurait se poursuivre sans remettre en cause la structure même de cet organe du paritarisme à la française, dont les interventions en faveur du logement des salariés, de la rénovation urbaine, des cœurs de ville ou les effets générateurs pour nos territoires et nos communes ne sont plus à prouver.

Au 31 décembre, il subsistera 350 millions d’euros en réserve dans le Fnap, dont 200 millions d’euros sont fléchés et 150 millions d’euros restent à disposition.

Pour ces raisons, je vous propose de supprimer le III de l’article 16 et de mobiliser directement le reliquat de réserves du Fnap, à hauteur de 150 millions d’euros, pour compenser partiellement la perte de recettes de 300 millions qui en résultera.

En complément, les partenaires sociaux pourront, par voie conventionnelle, compléter ce montant par un versement exceptionnel au Fnap en 2023 de 150 millions d’euros, dans le cadre des négociations en cours avec MM. les ministres Béchu et Klein sur la convention quinquennale 2023-2027.

L’argent d’Action Logement n’est pas encore l’argent de l’État, même si nous avons de fortes raisons de soupçonner, au vu de ce qui se passe avec l’Insee, que telle est bien votre intention. À trop demander à Action Logement de se substituer à l’État, on prend le risque de capter l’argent du paritarisme.

L’amendement n° I-1637 rectifié est un amendement de repli qui vise à fixer le prélèvement à 150 millions d’euros au lieu de 300 millions d’euros, dans la mesure où il reste 150 millions d’euros non affectés en réserve au Fnap au 31 décembre 2022.

M. le président. L’amendement n° I-1637 rectifié, présenté par Mmes Létard, Gatel et Gacquerre, M. Henno, Mme Férat, MM. Hingray et Duffourg, Mmes Billon et Guidez, MM. Levi et Canévet, Mme Doineau, M. Kern, Mme de La Provôté, M. Moga, Mme Dindar, M. J.M. Arnaud, Mme Perrot, M. Le Nay et Mme Jacquemet, est ainsi libellé :

Alinéa 3, première phrase

Remplacer le montant :

300 millions

par le montant :

150 millions

Cet amendement a déjà été défendu.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je vais aller droit au but, car chacun connaît la situation du logement social et la problématique qu’a évoquée Valérie Létard.

Je demande le retrait de l’amendement n° I-1636 rectifié et je m’en remets à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° I-1637 rectifié.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023, le Gouvernement a décidé de reconduire – j’y insiste – une contribution d’Action Logement au profit du Fnap, à hauteur de 300 millions d’euros.

Cela va mener à la production de nouveaux logements et à la rénovation de logements anciens. Une telle contribution est parfaitement soutenable au regard de la trésorerie importante d’Action Logement, qui lui permettra de faire face à ses engagements. (Mme Valérie Létard le conteste.)

Je rappelle, en outre, qu’Action Logement dispose du flux annuel de la participation des employeurs à l’effort de construction, assise sur la masse salariale, qui augmente nettement et va continuer à le faire dans les années qui viennent. La somme concernée atteint 1,7 milliard d’euros en 2021 et croît avec la masse salariale alors que le chômage baisse. AL dispose également du retour des prêts financés par la Peec, pour 1,3 milliard d’euros additionnels.

Si cette contribution n’était pas portée à la charge d’Action Logement, il reviendrait aux bailleurs de la verser, par le biais de leur participation au budget de la CGLLS.

Mme Dominique Estrosi Sassone. Pourquoi pas à l’État ?

Mme Valérie Létard. L’État ne finance plus !

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Or on leur en demande déjà beaucoup : ils doivent construire et rénover, alors que les prix de l’énergie augmentent.

Enfin, vous avez évoqué l’Insee, mais nous ne décidons pas de ce que l’Insee qualifie comme administration publique !

La reconduction de cette contribution d’Action Logement au Fonds national des aides à la pierre est donc justifiée sur le fond et soutenable en termes financiers, au vu de la trésorerie de cet organisme et de ses recettes, lesquelles vont continuer à augmenter dans les années à venir.

L’avis est défavorable sur ces deux amendements.

M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour explication de vote.

Mme Dominique Estrosi Sassone. Je suis opposée à l’article 16, qui contraint Action Logement à verser 300 millions d’euros au Fnap, mais sa suppression ferait porter l’intégralité du poids financier de cette participation sur les bailleurs sociaux.

L’article 40 de la Constitution nous interdit malheureusement de reporter cette charge sur l’État, monsieur le ministre, ce qui serait parfaitement légitime. Le Fnap peut en effet être abondé par les bailleurs sociaux, par Action Logement et par l’État.

Pour autant, la diminution de la contribution d’Action Logement proposée par Valérie Létard réduirait les moyens du Fnap et empêcherait de mobiliser les reliquats existants pour la rénovation ou pour l’augmentation de l’aide personnalisée au logement dans un contexte de hausse des coûts.

Pour autant, je rejoins complètement Valérie Létard quant aux dangers qui pèsent sur Action Logement, particulièrement sur son financement.

Action Logement Services, filiale d’Action Logement qui collecte et distribue la Peec, pourrait être classée demain, en effet, parmi les organismes divers d’administration centrale (Odac).

Ce classement menacerait sa capacité à financer tous les programmes de renouvellement urbain, les Actions cœur de ville, mais aussi la garantie locative Visale ou même le Fnap. Surtout, cela conduirait à une scission du groupe paritaire, l’État contrôlant de fait étroitement la collecte et l’emploi de la Peec, ce que nous ne pouvons accepter.

Il ne va pourtant nullement de soi qu’un organisme paritaire collectant une contribution pour partie volontaire des entreprises soit classé comme Odac.

J’ajoute que, compte tenu de la situation du secteur du logement et des collectivités territoriales, la préservation de l’autonomie d’Action Logement, notamment en tant que financeur, relève de l’intérêt stratégique du premier comme des secondes.

Le danger est là, mais nous, parlementaires, sommes démunis dans le cadre du projet de loi de finances, car la suppression de cette ponction sur la trésorerie d’Action Logement rejaillirait sur les bailleurs sociaux.

À ce stade, monsieur le ministre, il faut que vous nous donniez de véritables garanties sur l’avenir d’Action Logement.

M. le président. La parole est à Mme Victoire Jasmin, pour explication de vote.

Mme Victoire Jasmin. Monsieur le ministre, les bailleurs sont en grande difficulté. Du fait des crises sanitaires et sociales qui se succèdent, ils déplorent un taux d’impayés très important.

Par ailleurs, la participation des entreprises à l’effort de construction n’est pas négligeable. Autrement dit, vous allez détricoter quelque chose qui fonctionne alors même que le BTP va mal – ses carnets de commandes sont vides. Il est pourtant unanimement reconnu que notre parc immobilier est en très mauvais état et que de nombreux travaux doivent être réalisés pour remédier à son vieillissement.

Vous souhaitez ponctionner la trésorerie d’un organisme qui peut encore agir pour nous éviter le pire. Que direz-vous, monsieur le ministre, quand un nouvel immeuble s’effondrera et qu’il y aura des morts ?

La raison commande donc de diminuer le montant de la contribution d’Action Logement de 300 à 150 millions d’euros.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour explication de vote.

Mme Valérie Létard. Avec Dominique Estrosi Sassone, Victoire Jasmin et bien d’autres collègues, nous sommes nombreux à partager la volonté de financer et d’accélérer l’effort de production de logements sociaux.

Votre réponse n’est vraiment pas satisfaisante, monsieur le ministre. Si Action Logement ne paie pas, nous dit-on, on ne fera pas ! Mais c’est impensable ! Où est l’État ? N’a-t-il donc pas l’ambition de trouver une solution pour chaque Français, que celle-ci passe par la rénovation ou par la construction de logements ?

L’État a alloué 15 millions d’euros à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine en 2022, à mettre en regard avec les 1,2 milliard d’euros demandés à Action Logement pour abonder cette même agence !

Mais Action Logement accompagne déjà Action cœur de ville et la garantie locative Visale : chaque euro demandé à Action Logement pour financer les politiques publiques de l’État à la place de l’État est un euro en moins pour le logement des salariés.

Comment recruter des infirmières pour les hôpitaux parisiens si l’on n’est plus capable de les loger ? Or les sommes ainsi prélevées manqueront au logement !

Action Logement a toujours été solidaire des politiques publiques de l’État. Mais l’État doit prendre toute sa part de l’effort exigé !

Ce que nous proposons ne met nullement le Fnap en difficulté, monsieur le ministre. Il reste en effet, après affectation de 200 millions d’euros à l’Union sociale pour l’habitat (USH) pour la rénovation thermique des logements, 150 millions d’euros de réserves de trésorerie disponibles.

Dans le cadre de la convention quinquennale, les partenaires sociaux pourraient compléter ce montant, mais cela doit se faire non pas sur décision unilatérale de l’État, mais dans le cadre d’une négociation entre partenaires, car au-delà de la question financière vous procédez à un changement de paradigme !

Et si le compte n’y est toujours pas, nous pourrons y remédier dans le cadre des PLFR que nous ne manquerons pas d’examiner l’année prochaine – peut-être l’État pourrait-il apporter son utile contribution à l’effort en faveur du logement dans notre pays…

En actant que l’argent d’Action Logement est celui de l’État, on tue Action Logement ; car c’est l’argent des salariés ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE, SER, GEST et CRCE. – Mmes Elsa Schalck et Else Joseph et MM. Marc Laménie, André Reichardt et Stéphane Sautarel applaudissent également.)