Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.
M. Vincent Louault. Le chef d’entreprise dont j’ai porté la voix n’est pas le seul à être dans cette situation problématique : cette disposition fiscale plombe entre 100 et 150 entreprises !
Monsieur le ministre, je prends acte de votre engagement à coconstruire, dans le cadre du PLF, un amendement qui permettra de résoudre l’entièreté du problème. La direction de la législation fiscale (DLF) y est d’ailleurs favorable et je l’en remercie.
En confiance, monsieur le ministre, je retire mon amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 1516 rectifié bis est retiré.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 1302 rectifié est présenté par M. Sol, Mme Petrus, MM. Milon, Khalifé, Burgoa, Panunzi et H. Leroy, Mme Richer, MM. Hugonet, Chatillon et Anglars, Mmes Canayer et Bonfanti-Dossat, MM. Genet, Saury et Belin, Mmes Micouleau et Evren et M. Meignen.
L’amendement n° 1534 rectifié quater est présenté par Mmes Demas et Borchio Fontimp et MM. Delia, Cambon, Séné et Levi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 9 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 241-13-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 241-13-1. – I. – Les employeurs relevant du secteur de la restauration mentionnés aux codes APE de 5610A Restauration traditionnelle, 5610C Restauration de type rapide, 5621Z Services des traiteurs, 5630Z Débits de boissons et 5510Z Hôtels et hébergement similaire et dont l’établissement propose une carte composée exclusivement de plats élaborés sur place à partir de produits bruts, au sens de l’article L. 122-21-1 du code de la consommation, bénéficient d’une exonération partielle de cotisations sociales patronales dues au titre des rémunérations versées aux salariés affectés aux activités de préparation, de cuisson et de dressage des plats.
« II. – L’exonération s’applique dans la limite d’un plafond de rémunération fixé à 2,5 fois le salaire minimum de croissance. Elle est égale à 50 % du montant des cotisations patronales de sécurité sociale visées à l’article L. 241-6.
« III. – Le bénéfice de l’exonération est subordonné à la déclaration annuelle de conformité aux critères du “fait maison” auprès de l’administration, dans des conditions fixées par décret.
« IV. – En cas de manquement constaté par l’administration, le bénéfice de l’exonération est retiré pour l’année en cours et les sommes indûment exonérées sont reversées selon les modalités prévues à l’article L. 243-7. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Jean Sol, pour présenter l’amendement n° 1302 rectifié.
M. Jean Sol. Afin de préserver une restauration de qualité, en incitant à son développement, et de valoriser la gastronomie française, le présent amendement vise à instaurer un mécanisme d’exonération partielle de cotisations sociales patronales au bénéfice des restaurants qui proposent une carte composée exclusivement de plats faits maison, au sens de l’article L. 122-21-1 du code de la consommation.
Le bénéfice de l’exonération serait subordonné à une déclaration annuelle de conformité aux critères définis par la loi, auprès de l’administration, dans des conditions fixées par décret.
Ce dispositif simple permettrait de valoriser le travail artisanal et la transmission du savoir-faire culinaire, d’encourager la création et la pérennisation d’emplois qualifiés en cuisine et de renforcer la qualité de l’offre alimentaire, en cohérence avec les politiques publiques de santé et de transition écologique : réduction des produits ultratransformés, circuits courts, origine locale, etc.
Cet amendement, travaillé avec l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (Umih), aurait pour effet d’améliorer de façon progressive la qualité du parc de restauration, sans créer de rupture d’égalité ni de distorsion de concurrence.
Mme la présidente. L’amendement n° 1534 rectifié quater n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Dans cette assemblée, nous défendons tous la gastronomie française au quotidien.
Cet amendement a pour objet de privilégier le fait maison et nous sommes d’accord sur le principe. Mais est-ce à la sécurité sociale de vérifier que tel restaurant propose bien ce genre de carte ? N’est-ce pas plutôt au consommateur de choisir, le plus souvent possible, les établissements qui inscrivent sur leur menu des plats faits maison ?
Ces derniers sont bien meilleurs pour la santé et ont meilleur goût, nous sommes d’accord, mais ce n’est pas à la sécurité sociale de prendre en charge ce contrôle. En conséquence, l’avis de la commission est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Le Gouvernement soutient fermement le secteur de la restauration, en général, et le fait-maison, en particulier. Plus largement, tout produit fait maison ou fabriqué en France doit être soutenu.
Le secteur de la restauration profite déjà de systèmes d’aides destinés à la main d’œuvre en cuisine ou dans le service. Ainsi, il existe un dispositif de réduction générale dégressive unique destiné à tous les secteurs professionnels, dont celui de la restauration, ciblé sur les salariés percevant une rémunération équivalente au Smic.
Après réflexion, nous avons conclu que le caractère opérationnel de votre mesure n’était pas évident, compte tenu de la complexité des modalités déclaratives qu’elle implique. En effet, ce sont des petites structures qui ne disposent pas de beaucoup de personnel ni de service administratif qui seraient concernées. Les formalités supplémentaires pour les entreprises, comme pour les organismes de contrôle, ne seraient pas légères.
Pour ces raisons, monsieur le sénateur, le Gouvernement émet un avis défavorable sur votre amendement, même s’il reconnaît que votre intention est louable.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L’amendement n° 340 rectifié est présenté par Mmes Muller-Bronn et Aeschlimann, MM. Pointereau et Panunzi, Mmes P. Martin, Gosselin et Evren, M. Anglars, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Genet et D. Laurent et Mmes Pluchet et Ventalon.
L’amendement n° 764 rectifié est présenté par Mme Bourguignon, MM. Dhersin, Henno et Levi, Mmes Saint-Pé et Billon, MM. Canévet et Bleunven et Mmes Patru, Vermeillet, Antoine et Sollogoub.
L’amendement n° 949 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 9 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le II de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les dépenses supportées par l’employeur s’agissant des véhicules terrestres motorisés quels que soient leurs nature et qualification, mis à la disposition des salariés tels que définis à l’article L. 241-10 sur les aides à domicile. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour présenter l’amendement n° 340 rectifié.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Cet amendement de notre collègue Laurence Muller-Bronn vise à exclure de l’assiette de cotisations sociales les véhicules mis à la disposition permanente des intervenants à domicile avec un usage privé, même limité par l’employeur, afin d’effectuer leur tournée au domicile de personnes âgées en perte d’autonomie ou de personnes en situation de handicap.
En l’état actuel du droit, le régime applicable est celui de l’avantage en nature véhicule, qui est assujetti aux cotisations sociales. En effet, seule la mise à disposition d’un véhicule à un salarié pour un usage exclusivement professionnel n’est pas soumise à charges sociales, car aucun avantage en nature n’est caractérisé. Il s’agit d’ailleurs du régime le plus courant.
À travers cet amendement, nous souhaitons accroître l’attractivité des métiers d’aide à domicile, qui sont particulièrement en tension dans un contexte de vieillissement de la population.
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Bourguignon, pour présenter l’amendement n° 764 rectifié.
Mme Brigitte Bourguignon. Permettez-moi d’évoquer une scène que nous connaissons tous, celle d’une aide à domicile, souvent une femme, qui passe sa journée sur la route pour se rendre d’un domicile à un autre, tout cela pour percevoir un petit salaire et connaître des fins de mois très difficiles.
Lorsque cette aide à domicile ne possède pas de voiture, le service qui l’emploie en met une à sa disposition, dans le meilleur des cas : ce n’est pas un luxe, c’est juste la condition pour qu’elle puisse travailler.
Pourtant, ce véhicule est aujourd’hui considéré comme un avantage en nature, si bien qu’il est réintégré dans l’assiette sociale et fiscale. Autrement dit, on taxe l’outil qui permet à cette personne d’accompagner nos aînés et d’assurer le bien-vieillir à domicile.
Par cet amendement, nous proposons une mesure simple et ciblée : exclure ces véhicules de l’assiette de cotisations pour les aides à domicile. Nous ferions un geste concret pour préserver le pouvoir d’achat de ces professionnels et pour assurer l’attractivité d’un métier déjà en forte tension. C’est d’ailleurs l’une des pistes d’amélioration de l’attractivité de ces métiers que nous avions identifiée.
Oui, mes chers collègues, c’est bien à la sécurité sociale de soutenir l’aide à domicile via l’exonération de cotisations proposée. Cela ne démunira pas le système, bien au contraire !
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 949.
Mme Raymonde Poncet Monge. Mes collègues l’ont rappelé, seule la mise à disposition d’un véhicule à un salarié pour un usage exclusivement professionnel n’est pas soumise à charges sociales et devient, de facto, un avantage en nature. Le présent amendement vise donc à l’exclure de l’assiette de cotisations.
J’attire votre attention sur le temps que cela représente pour les aides à domicile de reconduire leur véhicule au siège social de l’entreprise, le soir, après leur tournée, puis de revenir le chercher le lendemain matin. C’est du temps qui est payé, et il doit l’être : certaines associations le font, comme le réseau Aide à domicile en milieu rural (ADMR) qui est pourtant en difficulté financière. Mais c’est surtout du temps de fatigue inutile pour des personnes qui exercent dans une branche d’activité désormais classée première en matière de sinistralité, devant le secteur du bâtiment.
En définitive, ces temps de trajet le matin et le soir, qui pourraient être comparés dans un autre domaine aux tâches chronophages de reporting, raccourcissent le temps qui aurait pu être consacré à l’accompagnement ou à une dernière intervention. Pourtant, l’on sait que 20 % des plans d’aide à domicile ne sont pas réalisés, à cause de la crise d’attractivité qui frappe la profession.
J’y insiste : s’il faut exonérer de cotisations un avantage en nature, c’est bien celui-là.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je remercie mes collègues pour leur plaidoyer, auquel j’adhère pleinement.
En France, les allégements généraux ont été créés parce qu’un certain nombre d’entreprises n’arrivaient plus à soutenir la concurrence avec les entreprises étrangères, ou même avec d’autres sociétés établies dans l’Hexagone qui subissaient moins de contraintes et versaient des salaires non soumis à cotisations.
Parce qu’il y avait trop de cotisations, les employeurs créaient moins d’emplois. Les allégements généraux ont permis de sortir de cette impasse et ont assuré aux entreprises d’être de nouveau concurrentielles sur les marchés de production.
À travers leurs amendements, nos collègues ciblent un secteur qui n’est pas suffisamment rémunéré et proposent de créer une exonération de cotisations pour l’octroi d’un avantage en nature, à savoir la mise à disposition d’un véhicule.
Néanmoins, je ne suis pas sûre qu’ils répondent à la problématique, car ne font-ils pas en réalité que réparer les décisions que certains employeurs ont prises collectivement ? C’est une question qui vaut plus largement, et je me la pose depuis le début de nos échanges et de nos réflexions sur ce texte.
Nos collègues proposent une exonération supplémentaire ; or la philosophie de la commission est de refuser ce type de mesure, compte tenu de l’état dégradé de nos comptes sociaux. L’avis est donc défavorable, même si j’adhère au plaidoyer.
Plus largement, je me demande de quelle manière nous pourrons faire tenir tout le système. Si l’on rehausse les cotisations, les salaires ne peuvent pas augmenter, en conséquence de quoi l’on crée des allégements ou des exonérations… Il en ressort que le système semble un peu grippé. Même quand nous évoquons des sujets bien précis, comme celui de la mobilité des aides à domicile, nous devons continuer d’envisager le système dans sa globalité.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Pierre Farandou, ministre. Ces amendements identiques visent à exonérer de cotisations sociales les véhicules mis à la disposition d’une aide à domicile de façon permanente. C’est bien le mot « permanent » qui fait débat, car il englobe l’utilisation professionnelle et l’utilisation privée du véhicule.
Comment déterminer le moment précis où chacune de ces utilisations commence et finit ? Certains sénateurs ont tenté de répondre à cette question en proposant une définition élargie.
Le code de la sécurité sociale est très clair : un avantage en nature est bel et bien constitué par la mise à disposition d’un véhicule, en conséquence de quoi il est assujetti à cotisations et contribution sociale.
Sur un terrain davantage macroéconomique, je rappelle que, en application de l’article 20 de la loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie, 75 millions d’euros sont destinés à soutenir la mobilité des aides à domicile.
Compte tenu de ces éléments, et pour des raisons de principe, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.
Mme Corinne Féret. Une fois de plus, nous nous trouvons confrontés à une situation que je ne saurais qualifier autrement que par cette formule, qui pourrait devenir notre slogan : deux poids, deux mesures.
Vous affirmez qu’il n’est pas raisonnable de prévoir des exonérations de charges, arguant du déficit du budget de la sécurité sociale. Pourtant, ce matin, vous adoptiez une approche radicalement différente !
Vous souteniez à l’instant que cette mesure pourrait présenter un intérêt, mais qu’une revalorisation des salaires serait préférable. Or, lorsque nous avons évoqué cette possibilité ce matin, vous nous avez opposé que les primes étaient plus intéressantes.
Vous êtes dans une contradiction totale.
Pour notre part, nous ne suivons qu’une seule ligne : soutenir et accompagner celles et ceux qui ont le moins. J’ai en particulier à l’esprit toutes ces personnes, majoritairement des femmes, qui interviennent dans le secteur domiciliaire pour accompagner ceux qui sont contraints de rester chez eux.
Leurs salaires ne sont absolument pas assez élevés, vous l’avez certes reconnu, mais des charges et des dépenses s’imposent également à elles quand elles se rendent au domicile de chacun des bénéficiaires.
L’adoption de ces amendements, que nous soutenons, sera une manière de reconnaître leur engagement et de rendre ces métiers un peu plus attractifs.
Certes, une mesure a été prise dans le cadre de la loi du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie, dite loi Bien Vieillir, pour accroître le nombre de postes, mais encore faut-il renforcer l’attractivité de ces professions afin que des candidats s’intéressent à ces emplois. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes GEST et RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. J’aurais tendance à voter en faveur de ces amendements. Pour autant, j’ai écouté monsieur le ministre et j’avoue que le mot « permanent » me gêne également. En tant qu’ancien employeur, ce sujet me pose problème.
Le débat est fidèle au travail que mène depuis toujours notre commission, animée par l’obsession du temps médical. Le sujet d’aujourd’hui est proche de cette question : il s’agit de tout ce temps payé et perdu, non pas au service des personnes, mais pour déplacer un véhicule parce que l’intervenant n’a pas le droit de le garer devant chez lui. Il y a là un équilibre à trouver.
Je suis certes un Lévrier, je n’aime pas les niches (Sourires.), mais tout de même !
En conclusion, puisque l’humour est de mise aujourd’hui, je suis désolé, madame la rapporteure générale, mais je n’ai pas d’inquiétude au sujet du vote : la droite ne devrait pas vous suivre, puisqu’elle-même a décidé de considérer les billets de matchs de football comme un avantage en nature, ses membres défendront cette logique et voteront sans aucun doute ces amendements !
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je tiens à préciser à madame la rapporteure générale qu’il ne s’agit nullement d’une affaire d’exonération. Je l’ai indiqué et M. Lévrier l’a parfaitement compris : l’objectif est de supprimer des temps improductifs rémunérés au profit de temps d’intervention, eux aussi rémunérés.
Que l’heure soit qualifiée d’improductive ou d’intervention, elle demeure soumise à cotisations ; il n’est donc pas question d’exonération.
De quoi s’agit-il ? Nous parlons d’une aide à domicile qui utilise le véhicule le lundi matin. Je rassure monsieur le ministre : elle ne le conserve pas le week-end, son usage n’est pas permanent, car des tournées sont organisées le samedi et le dimanche, et la salariée de service, qui n’est pas la même, récupère alors le véhicule.
Concrètement, l’aide à domicile qui dispose de la voiture du lundi matin au vendredi doit avoir la possibilité de la ramener à son domicile le soir, du lundi au jeudi, afin d’éviter ces temps improductifs qui doivent être payés et soumis aux charges.
Il ne s’agit évidemment pas d’une voiture de fonction, qui serait l’apanage du directeur. Ce véhicule tourne sans cesse. Le réseau Aide à domicile en milieu rural (ADMR) dispose d’un volant de voitures affectées aux tournées. Lorsque la salariée n’est pas en tournée ou ne travaille pas la journée, elle ne bénéficie pas du véhicule. Elle ne part ni en week-end ni en vacances avec celui-ci. L’usage n’est donc pas permanent, il s’agit seulement de rentrer chez soi.
Par ailleurs, ce n’est pas une affaire salariale. Si tel avait été le cas, j’aurais rappelé à M. le ministre la nécessité d’agréer l’avenant 68, ce que vous avez refusé, pour mettre à niveau les grilles de la branche de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile. Le débat n’est pas là.
L’objet de ces amendements est de reconnaître que le fait de conserver la voiture pour rentrer chez soi et repartir le lendemain ne constitue pas un avantage en nature, mais qu’il s’agit véritablement d’une affaire d’efficacité.
Je le rappelle, il s’agit de temps perdu. À l’instar des temps de reporting, ce sont des heures qui ne sont pas consacrées à l’intervention, alors même que des plans d’aide sont refusés, faute d’effectifs.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je fais pleinement miens les propos de Mme Poncet Monge.
En territoire rural, les lieux d’intervention à domicile sont parfois à une très grande distance du siège de la structure ; le soir, lors de la dernière intervention, le salarié peut donc s’en trouver très éloigné. Il apparaît totalement anormal qu’il soit contraint de ramener le véhicule, alors que celui-ci ne sera pas utilisé durant la nuit, par exemple.
Ces amendements visent à exclure de l’assiette des cotisations sociales les véhicules mis à disposition pour intervenir auprès des personnes âgées en perte d’autonomie et des personnes handicapées. Vous savez que les organismes gestionnaires rencontrent des difficultés. Il s’agit, en réalité, de donner davantage de salaire à ces personnels.
Je suis donc favorable à l’exclusion de ces cotisations. Cette mesure pourrait d’ailleurs s’étendre au portage de repas à domicile, puisque cette activité constitue, elle aussi, un maillon du maintien à domicile.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Hébergeant ma mère âgée de 97 ans, je vois intervenir quatre personnes au titre de l’aide à domicile : ces amendements ne recouvrent pas une abstraction. Je propose, monsieur le ministre, de les sous-amender en mentionnant un « usage temporaire » ou le « temps de travail ».
Si le terme « permanent » soulève une difficulté, nous avons la faculté d’adopter dès maintenant en séance un tel sous-amendement qui réglerait la question et lèverait votre hésitation quant à un usage permanent risquant d’être détourné à des fins personnelles.
Je connais bien ceux qui travaillent à domicile, ma mère recourant à leurs services. J’ai pu les voir à l’œuvre encore hier alors que la neige couvre le centre de l’Orne. Il convient vraiment de dérouler un tapis rouge devant ces personnes, tant elles mettent de passion à exercer ce métier si difficile d’accompagnement de nos aînés.
Je vous propose donc, monsieur le ministre, madame la rapporteure générale, de sous-amender ces amendements pour régler le problème d’un éventuel usage permanent.
Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Ces amendements vont assurément dans le bon sens. Pour avoir géré durant des années, en tant qu’élue, un service intercommunal d’aide à domicile, je mesure ce que représente l’obligation pour le personnel d’aller chercher le véhicule le matin et de le rapporter le soir.
L’exclusion de ces frais de l’assiette des cotisations sociales de l’avantage en nature et, par conséquent, de l’assiette des revenus imposables marquerait une avancée majeure, qui soulagerait non seulement les structures, mais aussi, et surtout, ces aides à domicile, dont nous tenons tous à souligner le rôle capital.
Je souhaite toutefois attirer votre attention sur la différence existant entre les services de soins à domicile gérés par le secteur public ou par une association à but non lucratif, il a été question de l’ADMR, qui est certainement la plus connue, et les services privés mettant à disposition des aides à domicile.
Dans ces derniers services règne une forme d’esclavage : aucun véhicule n’est mis à disposition et le quart d’heure de battement entre deux interventions n’est pas comptabilisé comme temps de travail. Je souhaite donc que l’on ne leur accorde pas cet avantage d’exclusion de l’assiette des cotisations.
Il existe ainsi une foule de structures qui exploitent encore davantage ces aides à domicile ; ces travailleurs accomplissent une tâche remarquable, mais fort mal reconnue et très mal rémunérée.
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La proposition qui vient d’être avancée est susceptible de satisfaire l’ensemble de l’assemblée. Nous pourrions ainsi exclure du texte la notion de permanence afin d’indiquer qu’il s’agit bien d’un usage professionnel.
Je me propose de déposer un sous-amendement en ce sens, afin que nous puissions tous nous accorder pour atterrir sur cette mesure.
Mme la présidente. Je suis saisie du sous-amendement n° 1868, présenté par Mme Doineau, qui est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, dans leurs déplacements professionnels, selon des conditions définies par décret
Ce sous-amendement a déjà été défendu.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour explication de vote.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Mme la rapporteure générale a exposé avec justesse ce que je me proposais de vous soumettre.
Après avoir entendu nos collègues Raymonde Poncet Monge et Nathalie Goulet, il me semble indispensable d’établir une distinction claire entre l’usage d’un véhicule de fonction, qui constitue un avantage salarial assujetti en tant que tel aux cotisations sociales, et l’usage d’un véhicule de service.
Il est donc opportun de supprimer la notion de permanence des amendements, qui est un irritant nous empêchant de cheminer ensemble vers une rédaction de compromis et de réaffirmer la prévalence de la notion de véhicule de service.
Ces voitures sont utilisées dans le cadre exclusif de l’exercice professionnel, pour les tournées. Au demeurant, différents intervenants se succèdent pour les conduire, y compris durant le week-end. Nous ne connaissons que très peu d’intervenants à domicile empruntant le véhicule de service pour faire leurs courses ou pour partir en week-end.
Une telle clarification constituerait un signal fort, de nature à rallier l’ensemble de notre assemblée.
Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je souhaite que l’assemblée saisisse bien l’enjeu – ayant dirigé des services, je parle d’expérience. Les déplacements durant les intervacations, c’est-à-dire entre deux bénéficiaires, qu’il s’agisse de personnes handicapées ou âgées, constituent des déplacements professionnels. Ils sont rémunérés ; c’est une obligation.
Si vous mentionnez « pour l’activité professionnelle », l’interprétation se limitera à ces temps de déplacement entre deux interventions.
Or la difficulté surgit lorsque la journée s’achève, par exemple à dix-huit heures : le temps nécessaire pour regagner son domicile ne relève plus du temps professionnel. Toutefois, si la salariée conserve le véhicule pour en disposer le lendemain matin, sans avoir à le déposer pour le reprendre ensuite, cela devient un avantage en nature. Ce n’est donc pas un usage permanent – j’ignore si ce terme avait été retenu.
Je le répète : le trajet de retour au domicile, à la fin de la journée de travail, n’est pas du temps professionnel. Si vous inscrivez cette mention, vous ne ferez que rappeler l’existant, à savoir que les déplacements entre deux personnes durant les intervacations sont obligatoirement rémunérés.
Cette règle s’applique partout, sauf dans le secteur privé. Il conviendrait donc de limiter la mesure au secteur privé à but non lucratif et aux associations, car le secteur privé lucratif ne rémunère pas ces temps ; il est dès lors inutile de lui accorder un tel avantage.
Prêtons toutefois une attention particulière à la formulation : il s’agit d’un temps qui n’est plus professionnel, celui du retour au domicile. C’est l’intervalle entre deux jours travaillés durant lequel l’intervenante conserve le véhicule pour rentrer chez elle.
Ne vous contentez pas de mentionner le « temps professionnel », car ce point est d’ores et déjà satisfait.