Mme Florence Blatrix Contat. Cet amendement vise à introduire une dimension environnementale dans la fiscalité du capital, en modulant le taux du prélèvement forfaitaire unique selon le caractère durable ou non des activités des entreprises concernées.
L’idée est simple. Aujourd’hui, le taux de la flat tax est uniforme sur tous les revenus du capital, qu’ils proviennent d’entreprises pleinement engagées dans la transition écologique ou d’activités qui s’en écartent totalement. Cette neutralité fiscale n’est plus tenable face aux urgences climatiques.
Concrètement, pour les titres issus d’entreprises dont les activités ne contribuent pas substantiellement aux objectifs de la taxonomie européenne, le taux du PFU serait porté à 22,8 %. À l’inverse, rien ne changerait pour les entreprises alignées sur la transition. Il s’agit de donner un signal clair, lisible, proportionné et cohérent par rapport aux standards européens.
Cette modulation vise un objectif écologique et économique, mais aussi budgétaire, puisqu’elle tend à accroître le rendement de l’impôt.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Les amendements n° I-1395 et n° I-1312 visent à supprimer le PFU. Je veux rappeler que ce dispositif ne nous a pas fait perdre de recettes, mais que sa suppression dégraderait l’attractivité que la France a pu regagner. Je ne suis d’ailleurs pas certain qu’un retour en arrière produirait autant de recettes que le laissent espérer les auteurs de ces amendements.
L’avis est donc défavorable.
Sur les autres amendements en discussion commune, je ne suis pas certain que leur rédaction soit opérante, dès lors que les autres articles pertinents du code général des impôts ne sont pas modifiés dans le même temps.
L’avis est donc également défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Contrairement à une idée reçue, la flat tax, cet impôt censé être plat, ne l’est en fait pas : la taxe est progressive. En effet, à la première tranche du barème, son taux est de 23,8 % sur les dividendes ; 30 % au-delà.
Pour les personnes éligibles à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, le taux monte à 33 % ou 34 %. Enfin, pour les redevables de la contribution différentielle sur les hauts revenus, le taux s’élève à 37,2 %.
On considère souvent que le taux est plat, flat, à 30 %, alors qu’il oscille en réalité entre 23,8 % et 37,2 %. Il existe donc déjà une progressivité, qui est le fruit d’une superposition d’impositions.
Ensuite, comme l’a dit M. le rapporteur général, la réforme n’a pas amené une baisse des recettes ; c’est plutôt l’inverse.
Par conséquent, le Gouvernement souhaite que nous nous en tenions là.
Je vous rappelle par ailleurs que, dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, il existe un débat sur le taux de la contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine. Voilà aussi pourquoi nous ne souhaitons pas modifier le volet « impôt sur le revenu » de l’imposition de ces revenus.
Je suis donc défavorable à l’ensemble des amendements en discussion commune.
M. le président. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.
M. Thomas Dossus. Madame la ministre, voulez-vous dire que vous êtes favorable à l’augmentation de la CSG sur les revenus du capital ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Amélie de Montchalin, ministre. J’ai simplement signalé, monsieur le sénateur, qu’il existait un débat, dans le cadre du PLFSS, au sujet de la CSG sur le patrimoine.
J’ajoute que l’Assemblée nationale a voté, avec le soutien de nombreux groupes, l’augmentation du taux de cette CSG et que le Gouvernement s’en était remis à la sagesse des députés sur cet amendement – j’avais même parlé d’un « avis favorable de méthode » afin que ce sujet puisse faire partie des débats. Je ne me fais donc que la porte-parole de ce qui s’est passé au Parlement.
Au regard de ce débat, dont les résultats peuvent avoir un impact sur l’imposition des revenus du capital, et considérant que la flat tax n’est déjà pas complètement plate, comme je viens de l’expliquer, je suis défavorable à ces amendements.
J’espère, monsieur le sénateur, avoir été suffisamment claire, mais je suis naturellement prête à vous donner des explications complémentaires.
M. le président. La parole est à M. Thierry Cozic, pour explication de vote.
M. Thierry Cozic. Il commence à se faire tard, mais ce sujet est important. Madame la ministre, j’entends ce que vous dites, mais je rappelle que l’acte de naissance du macronisme, c’est justement la flat tax. Votre avis paraît donc, de ce point de vue, assez logique…
La flat tax, qu’est-ce que c’est ? C’est l’instauration d’un déséquilibre entre l’imposition des revenus du travail et celle des revenus du capital. C’est un vieux rêve d’économiste libéral persuadé que la baisse des taux stimulera, par sa simplicité, les prélèvements obligatoires. En instaurant la flat tax dans le projet de loi de finances pour 2018 au plafond de 30 %, Emmanuel Macron a d’emblée offert des cadeaux aux plus aisés.
Après huit ans et quelques centaines de milliards d’euros de dettes supplémentaires, personne n’a réussi à démontrer l’existence d’un lien direct entre le paquet de mesures pro-patrimoine d’Emmanuel Macron et la relance de l’investissement productif, qui était pourtant l’objectif affiché.
Aujourd’hui, le bilan, c’est que 4 000 foyers captent un tiers des dividendes et que 96 % des dividendes bénéficient à seulement 1 % de la population. L’avantage conféré à cette toute petite part de la population s’est avéré si important qu’il explique en partie la multiplication par deux des dividendes depuis 2017. Dans les bénéfices des entreprises, les dividendes l’ont largement emporté sur les investissements.
Que s’est-il passé ? Je prends un exemple : si vous êtes cadre supérieur dans une société, vous pouvez choisir d’être rémunéré par un salaire, soumis à cotisations et à l’imposition afférente, ou par des dividendes. Si ces derniers sont imposés à 30 %, il est bien normal que vous choisissiez cette deuxième solution. Cela a, mécaniquement et progressivement, entraîné une défiscalisation.
Par conséquent, il est vrai de dire que le rendement de la fiscalité du capital n’a jamais été aussi élevé que depuis l’instauration de la flat tax, mais, en réalité, cela provient du fait que le versement des dividendes a doublé. Voilà le lien de cause à effet !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-1315 rectifié, I-1396 et I-1503.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné 215 amendements au cours de la journée. Il en reste 2 155 à examiner sur la première partie de ce projet de loi de finances.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
2
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, samedi 29 novembre 2025 :
À neuf heures trente, l’après-midi, le soir et la nuit :
Projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l’Assemblée nationale (texte n° 138, 2025-2026) :
Examen des articles de la première partie (suite).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le samedi 29 novembre 2025, à zéro heure vingt-cinq.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
JEAN-CYRIL MASSERON


