Présidence de Mme Sylvie Vermeillet
vice-présidente
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Mise au point au sujet d'un vote
Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Vérien.
Mme Dominique Vérien. Le 9 décembre 2025, lors du scrutin public n° 110 portant sur l'amendement n° II-1 du rapporteur général de la commission des finances, M. Hervé Maurey souhaitait voter pour.
Mme la présidente. Acte est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle figurera dans l'analyse politique du scrutin.
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Loi de finances pour 2026
Suite de la discussion d'un projet de loi
Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2026, considéré comme rejeté par l'Assemblée nationale (projet n° 138, rapport général n° 139, avis nos 140 à 145).
Nous poursuivons l'examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
SECONDE PARTIE (suite)
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
Pouvoirs publics
Conseil et contrôle de l'État
Direction de l'action du Gouvernement
Budget annexe : Publications officielles et information administrative
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Pouvoirs publics », de la mission « Conseil et contrôle de l'État », de la mission « Direction de l'action du Gouvernement » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Grégory Blanc, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, la mission « Pouvoirs publics » est caractérisée par l'autonomie financière des institutions qu'elle recouvre. Cette autonomie trouve son fondement dans le principe constitutionnel de séparation des pouvoirs, énoncé par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
À cette fin, la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (Lolf) prévoit l'existence de cette mission budgétaire. En outre, l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires dispose que les crédits nécessaires à leur fonctionnement font l'objet de propositions préparées par les questeurs et arrêtées par une commission commune, puis inscrites au « projet de loi budgétaire ».
Fort de ces textes, le Conseil constitutionnel a confirmé que « les pouvoirs publics constitutionnels déterminent eux-mêmes les crédits nécessaires à leur fonctionnement », un principe dont je serai amené à rappeler la nécessaire application dans le cadre de l'examen des amendements déposés.
S'agissant des crédits présentés pour 2026, je n'entrerai pas dans le détail ; non seulement ce serait trop long, mais je sais que vous suivez attentivement ces sujets. J'insisterai, en revanche, sur les grandes évolutions et sur quelques points d'attention qui me semblent importants.
Tout d'abord, le gel des dotations, finalement acté en 2025 dans une logique d'exemplarité pour la Présidence de la République, l'Assemblée nationale et le Sénat, est reconduit en 2026. La dotation de l'Élysée s'élève ainsi à 122,6 millions d'euros, celle de l'Assemblée nationale à 607,6 millions d'euros et celle du Sénat à 353,5 millions d'euros.
Si ce gel, continu depuis 2024, peut, à première vue, être salué, il pose dès à présent les limites de ce que ces institutions peuvent financer à dotation constante. Un regard rétrospectif permet d'ailleurs de mesurer les enjeux : entre 2011 et 2025, le montant total des dotations de la mission a progressé de 12 % en euros courants ; mais, en neutralisant l'inflation, il a diminué en réalité d'environ 10 %.
Dans le détail, cette baisse en euros constants atteint près de 13 % pour le Sénat, 12 % pour la Présidence de la République et 8 % pour l'Assemblée nationale. Cette évolution a été rendue possible par un effort soutenu de maîtrise des dépenses.
Un effort supplémentaire devrait être effectué s'agissant des effectifs du cabinet du Président de la République, du fait de la dissolution et de la redistribution des pouvoirs. Il semble que les effectifs de ce cabinet auraient pu être diminués davantage ; or c'est l'inverse qui s'est produit.
Néanmoins, cette évolution de l'ensemble des crédits s'est également traduite par une érosion importante des réserves des trésoreries de chacune des institutions. Pour la seule année 2026, le solde budgétaire prévu s'établirait à environ - 34 millions d'euros pour l'Assemblée nationale, tandis que le prélèvement sur les disponibilités atteindrait 22 millions d'euros au Sénat.
Or, j'y insiste, la faiblesse des réserves pose des problèmes. Il appartient en effet aux pouvoirs publics de garantir la continuité du fonctionnement démocratique. En cas de crise institutionnelle, nos institutions doivent en effet pouvoir fonctionner. Aujourd'hui, la hauteur des réserves, ou plutôt leur faiblesse, interroge cette garantie.
Par ailleurs, la contrainte budgétaire pèse très fortement sur la capacité d'investissement des institutions, notamment pour la rénovation du patrimoine historique et des installations techniques qui leur sont confiés, ainsi que celles qui sont nécessaires à la transition écologique. Sans revalorisation adaptée des dotations, ces investissements devront être différés pour une part, au détriment de la préservation du patrimoine et des objectifs environnementaux, en particulier la trajectoire vers la neutralité carbone.
J'en viens aux autres institutions.
La dotation de la Cour de justice de la République (CJR) recule certes de 8,5 %, mais son activité demeure très limitée. La Chaîne parlementaire (LCP) et le Conseil constitutionnel voient, quant à eux, leurs crédits progresser respectivement de 1 % et de 11,5 %, dans un contexte, pour le Conseil, de reconstitution de son niveau de trésorerie, d'investissements, ainsi que de préparation de l'élection présidentielle de 2027.
Au total, les crédits de la mission atteignent 1,14 milliard d'euros en 2026, soit une hausse modérée de 0,2 % par rapport à 2025.
La commission des finances appelle donc à l'adoption des crédits de la mission « Pouvoirs publics ».
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Christian Bilhac, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il me revient de vous présenter, au nom de la commission des finances, la mission « Conseil et contrôle de l'État », qui rassemble les crédits des juridictions administratives et financières, ainsi que du Conseil économique, social et environnemental (Cese).
Le projet de loi de finances pour 2026 prévoit une baisse de 2,6 % des crédits de paiement de la mission, qui atteindraient 869,3 millions d'euros. En tenant compte de la cible d'inflation de 1,3 % annoncée par le Gouvernement, cette baisse est encore plus importante et s'élève à 3,3 %. Cette mission contribue donc fortement à l'effort de redressement des finances publiques.
Je commencerai par évoquer la situation des juridictions financières.
Leurs crédits augmentent de 3,2 % en 2026, hausse due presque exclusivement aux dépenses de personnel, notamment du fait de l'application en année pleine du nouveau régime indemnitaire des magistrats financiers. À l'inverse, les dépenses hors personnel demeurent stables, après deux années de baisse. Il faut s'en féliciter : la Cour des comptes a poursuivi un effort réel de maîtrise budgétaire, notamment grâce à la réduction des frais énergétiques et à l'optimisation des achats.
S'agissant du Cese, son budget atteint 34,1 millions d'euros en 2026, un niveau globalement stable. J'ai parfois exprimé, à titre personnel, des réserves sur les moyens consacrés à cette institution, en particulier sur l'enveloppe consacrée à la participation citoyenne. Néanmoins, le Sénat s'est toujours montré attentif à ce que le Cese, troisième assemblée constitutionnelle, dispose des ressources nécessaires à la préservation de son autonomie.
J'en viens au programme 165, « Conseil d'État et autres juridictions administratives ». Après une stabilisation en 2025, celui-ci connaît en 2026 une baisse marquée des crédits de paiement, de l'ordre de 5,2 %. Cette diminution tient surtout à l'achèvement d'investissements importants, dont les travaux de relogement du tribunal administratif et de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) à Montreuil. Les investissements reculent mécaniquement de 56,7 %.
Les crédits de fonctionnement poursuivent, quant à eux, une trajectoire vertueuse, en léger recul. La généralisation des téléprocédures, via Télérecours, entraîne depuis plusieurs années des économies substantielles sur les frais postaux : elles pourraient atteindre près de 6 millions d'euros en 2026.
Je souhaite toutefois revenir sur la situation des effectifs. L'année dernière déjà, j'alertais sur les risques créés par le gel décidé par le Gouvernement. Le PLF pour 2026 prolonge ce gel, alors même que l'activité des juridictions administratives explose. Les recours augmentent massivement depuis trois ans : le stock des affaires a progressé de près de 30 % depuis 2019, et 2025 devrait établir un record, avec environ 40 000 requêtes supplémentaires.
Le cas du tribunal du stationnement payant (TSP) est à cet égard particulièrement préoccupant : son activité a triplé depuis 2018, sans augmentation des effectifs.
Le Conseil d'État lui-même le reconnaît, à moyens constants, absorber un tel flux sera difficile pour les juridictions administratives. Il faut donc s'attendre à un allongement des délais de jugement en 2026. Pour faire face, les juridictions administratives explorent des pistes : recours à l'intelligence artificielle (IA) et extension du recours au juge unique pour certains contentieux, par exemple.
Monsieur le ministre, ne nous y trompons pas : ces réponses ne suffiront pas. Une réflexion globale devra s'ouvrir sur les moyens à consacrer à nos juridictions administratives. Le redressement des finances publiques ne peut durablement se faire au détriment des fonctions régaliennes, piliers du pacte républicain.
Malgré ces réserves, je vous invite, au nom de la commission des finances, à adopter les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – MM. Vincent Capo-Canellas et Jean-Marc Vayssouze-Faure applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Christopher Szczurek, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits prévus dans le projet de loi de finances pour 2026 pour la mission « Direction de l'action du Gouvernement », qui réunit les services du Premier ministre, ainsi que plusieurs autorités administratives indépendantes (AAI), s'élèvent à 1,283 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE), un niveau quasi constant par rapport à 2025, et à 1,060 milliard d'euros en crédits de paiement (CP), ce qui représente une hausse modérée de 3,3 %.
En 2026, la mission « Direction de l'action du Gouvernement » poursuit ainsi ses efforts de maîtrise des dépenses publiques, dans la continuité de la loi de finances initiale (LFI) pour 2025.
En particulier, les crédits hors personnel ne connaissent pas de progression par rapport à la LFI pour 2025, en dehors de ceux qui sont dédiés au secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), qui augmentent de 10,2 millions d'euros, en cohérence avec la priorité budgétaire donnée aux moyens alloués à la défense dans le cadre du présent projet de loi de finances.
S'agissant des crédits de personnel, ceux-ci présentent une hausse de 23,6 millions d'euros par rapport à la LFI pour 2025, pour atteindre 390,4 millions d'euros en 2026. Les crédits de titre 2 dédiés au SGDSN représentent l'essentiel de cette progression, avec une augmentation de 14,7 millions d'euros.
Dans le même sens, les efforts de maîtrise des crédits sur le programme 129, « Coordination du travail gouvernemental », se traduisent par un schéma d'emplois négatif : -7 équivalents temps plein (ETP) en 2026.
Quant aux autorités administratives indépendantes rattachées au programme 308, « Protection des droits et libertés », leur schéma d'emplois est nul en 2026.
Je souhaiterais développer plus particulièrement deux observations concernant les évolutions prévues pour les administrations et autorités rattachées à la mission en 2026.
En premier lieu, et dans la suite du rapport de contrôle de la commission des finances sur le Haut-Commissariat au plan (HCP), je voudrais souligner les économies associées à la fusion entre le HCP et France Stratégie au sein du Haut-Commissariat à la stratégie et au plan (HCSP), dont la traduction budgétaire sera effective au 1er janvier 2026.
La mise en œuvre de cette fusion devrait permettre des économies importantes, en proportion des moyens du Haut-Commissariat, avec, d'une part, une réduction des dépenses de fonctionnement du fait de la mutualisation de certaines fonctions, et, d'autre part, une diminution des effectifs, avec un schéma d'emplois négatif de 10 ETP.
À cet égard, la commission des finances propose, au travers de son amendement n° II-4, de poursuivre ce mouvement de rationalisation des instances de stratégie et de prospective, en fusionnant trois hauts conseils rattachés au HCSP.
En second lieu, les enjeux de cybersécurité et de protection des données personnelles devraient continuer à fortement mobiliser les administrations et les autorités compétentes.
De fait, la France connaît une intensification des cyberattaques, avec une hausse de 15 % entre 2023 et 2024. Dans ce contexte, l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi), rattachée au SGDSN, devrait de nouveau voir ses effectifs progresser, de 4 ETP en 2025 et de 8 ETP en 2026.
De même, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) a vu ses missions s'élargir grandement depuis l'entrée en vigueur du règlement général sur la protection des données (RGPD) en 2018, puis, dans la période récente, avec l'adoption de nouveaux textes européens en matière de régulation des acteurs du numérique.
Le PLF pour 2026 prévoit pour la Cnil une enveloppe de 31,23 millions d'euros en AE et en CP. La hausse observée sur les crédits de personnel, de 0,95 million d'euros, résulte principalement des facteurs d'évolution automatique, la Cnil ne bénéficiant d'aucune création d'emploi, tout comme les autres AAI du programme 308.
Afin de limiter l'augmentation des crédits de la mission, résultant de la hausse des moyens alloués à la défense et à la sécurité nationale au sens large, la commission des finances propose, au travers de son amendement n° II-5, de geler en valeur les crédits de plusieurs actions budgétaires.
Avant de conclure, je voudrais dire quelques mots sur le budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
Ce budget annexe, géré par la direction de l'information légale et administrative (Dila), devrait connaître en 2026 un niveau de recettes de 175,3 millions d'euros, en baisse de 5 % par rapport à 2025, du fait des effets du cycle électoral sur les recettes du Bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP). Compte tenu de la diminution des dépenses de 1,6 million d'euros, pour représenter 147,4 millions d'euros, la gestion du budget annexe dégagerait un nouvel excédent de 27,9 millions d'euros en 2026, proche de celui qui était prévu pour 2025.
Présentant un schéma d'emploi à zéro pour 2026, qui fait suite à une baisse de 37 % des effectifs sur la période 2014-2024, la Dila devrait poursuivre activement le déploiement de ses projets de modernisation numérique.
Au regard de ces différents éléments, la commission des finances proposera d'adopter les crédits ainsi modifiés de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », ainsi que les crédits sans modification du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Olivier Cadic, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà neuf ans que je présente le budget du programme 129, « Coordination du travail gouvernemental », et, désormais, nul n'est besoin d'expliquer son utilité : chacun a eu connaissance, ou a subi, une cyberattaque, qu'elle vise France Travail, l'Urssaf, un hôpital, ou qu'elle prenne la forme d'un faux message bancaire ou d'un faux colis.
L'objet de l'action n° 02, « Coordination de la sécurité et de la défense » entre dans le champ de compétence de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, au titre des fonctions de cybersécurité, de protection contre les ingérences numériques étrangères et de soutien aux services de renseignement, prévues par la Revue nationale stratégique (RNS) 2025.
C'est d'ailleurs parce qu'il concerne la défense et la sécurité nationale que ce projet de budget est l'un des rares à augmenter par rapport à 2025, avec 431 millions d'euros pour 2026. Seront donc confortés les moyens du SGDSN, de l'Anssi, du service de vigilance et de protection contre les ingérences numériques étrangères (Viginum) et de l'Opérateur des systèmes d'information interministériels classifiés (Osiic), ainsi que les fonds spéciaux pour le financement des actions couvertes par le secret de la défense nationale.
La commission a proposé l'adoption des crédits de la mission « Direction de l'action du Gouvernement ».
Je voudrais, pour conclure, évoquer plusieurs questions restées sans réponses qui sont autant de points d'alerte.
De nouvelles stratégies nationales de cybersécurité et de lutte contre les manipulations de l'information avaient été annoncées l'an dernier. Quand nous seront-elles communiquées ? Quand seront-elles publiées ?
Les cyberattaques et les manipulations de l'information concernent toute la population. Quand disposerons-nous des retours d'expériences de l'Anssi sur les attaques massives que j'ai évoquées ?
En ma qualité de président de la commission spéciale sur le projet de loi relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité, je veux évoquer le problème des points d'entrée dans le dispositif de lutte contre les cyberattaques, et surtout la manière dont l'Anssi envisage la mise en œuvre réglementaire de la directive NIS 2 (Network and Information Security).
Dans ce cadre, il est essentiel de rappeler que la norme ISO 27001, relative aux systèmes de management de la sécurité de l'information, constitue aujourd'hui un référentiel reconnu permettant de répondre aux exigences de la directive NIS 2, notamment en Belgique, où elle fait déjà office de standard de conformité. La récente attaque contre l'Urssaf montre que les administrations comme les entreprises devraient s'y conformer au plus vite pour garantir un niveau homogène de protection et de résilience.
La question centrale est de savoir en quoi d'autres obligations imposées aux entreprises et aux collectivités leur permettront d'être mieux protégées.
Il y a ici une révolution des esprits à mener au sein des services de l'État, pour que la résilience et la sécurité soient l'affaire non pas de quelques-uns, mais de tous. C'est d'ailleurs ce que tend à indiquer la publication du guide Tous responsables, que je salue, en espérant qu'y soit bientôt inscrit, parmi les numéros d'urgence, le 17Cyber, dont on fêtera le premier anniversaire dans une semaine.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Mickaël Vallet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, Olivier Cadic vient de présenter le cadre budgétaire et l'avis de la commission en faveur de l'adoption des crédits pour 2026 de cette mission. Je ne reviendrai donc pas sur ce point, que nous partageons.
Je commencerai par indiquer qu'il faut s'interroger sur la cohérence d'ensemble du dispositif de lutte contre les cyberattaques, avec quelques nuances au sein de la commission sur l'opposition qui peut être faite entre la notion de guichet unique, laquelle pourrait paraître idéale, et l'intérêt de susciter le foisonnement de l'offre de cybersécurité.
Il est de fait que personne ne remet en cause la compétence de l'Anssi. Toutefois, les missions et les financements de cet écosystème ne sont pas suffisamment clairs à nos yeux.
C'est une préoccupation majeure, car les différences d'approches de quantification de la cybermenace – 4 386 saisines de l'Anssi, contre 500 000 demandes d'assistance de la part de particuliers auprès de la plateforme Cybermalveillance.gouv.fr, devenue le 17Cyber – illustrent la disproportion entre le champ d'action de l'Agence et les besoins du grand public.
Les personnes victimes d'une cyberattaque sont démunies : elles cherchent une porte d'entrée. Elles peuvent la trouver avec le 17Cyber, mais seulement si celui-ci fonctionne correctement, avec les budgets afférents. C'est pour nous un point de vigilance.
À ce stade, ni les ministres de tutelle successifs ni l'Anssi n'ont présenté de schéma global sur les contours de ce qui relèvera de la compétence directe de l'Agence, et de ce qui sera partagé ou confié à d'autres entités institutionnelles, lesquelles sont très variées – peut-être trop – en nombre et en compétences : le 17Cyber, les Cert (Computer Emergency Response Team) sectoriels, les Csirt (Computer Security Incident Response Team) régionaux et les nouveaux opérateurs qui sont retenus par l'Anssi dans le cadre de l'appel à manifestation d'intérêt pour le renforcement de l'accompagnement local aux enjeux de cybersécurité. Celui-ci est doté de 7 millions d'euros sur trois ans, ce qui n'est pas énorme.
Cette nouvelle enveloppe temporaire vient s'ajouter aux dispositifs régionaux, dont le financement reste à la charge des régions, ce qui n'assure aucune garantie de pérennité.
Les financements pourraient s'arrêter du jour au lendemain, par une simple délibération du conseil régional, alors même que l'écosystème global de cybersécurité monte en compétence et nous interdit, si j'ose dire, tout trou dans la raquette. La clarification de l'organisation et du financement de cet écosystème est une recommandation que nous reformulons tous les ans.
Je signale à cet égard deux points d'attention, parmi beaucoup d'autres.
Premièrement, la Cour des comptes s'est interrogée sur la simplification des critères de labellisation des solutions de cybersécurité pour les petites et moyennes entreprises (PME) et les collectivités territoriales. Une très petite entreprise (TPE) ou une commune doivent savoir quels logiciels utiliser : une labellisation est nécessaire.
Deuxièmement, la subvention de 845 000 euros accordée par l'Anssi au groupement d'intérêt public Action contre la cybermalveillance (GIP Acyma) n'a pas varié depuis 2017, ce qui équivaut à une réduction tendancielle des moyens.
Pour conclure, je voudrais évoquer l'académie de la lutte contre les manipulations de l'information et l'adoption d'une posture de défense active contre les ingérences étrangères, voulue par notre collègue Rachid Temal, rapporteur de la commission d'enquête sénatoriale sur les politiques publiques face aux opérations d'influences étrangères, qu'il faudra coordonner avec les nouveaux outils, que nous saluons, notamment le compte de risposte (French Response) du ministère des affaires étrangères.
Au bénéfice de ces observations, mes chers collègues, nous vous proposons l'adoption des crédits pour 2026 de la mission « Direction de l'action du Gouvernement », tout en restant vigilants sur les points d'alerte que j'ai évoqués. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Éric Kerrouche, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Pouvoirs publics » occupe une place singulière au sein du débat budgétaire. Les institutions qu'elle finance jouissent en effet d'une autonomie budgétaire, garantie de leur indépendance.
Le montant global de cette mission demeure modeste : un peu plus de 1,140 milliard d'euros, soit 0,25 % du budget général, et l'équivalent de 17 euros par citoyen. La démocratie représentative repose ainsi sur des moyens contenus.
Cette année encore, la Présidence de la République, l'Assemblée nationale et le Sénat ont choisi de reconduire leur dotation. Ce geste, compréhensible dans un contexte de discipline budgétaire nationale, doit cependant être appréhendé avec prudence : si un gel ponctuel peut être vertueux, un gel répété devient un signal politique aux effets cumulatifs. Il amenuise progressivement les marges de manœuvre et fragilise la capacité de nos institutions.
Je souhaite alerter une nouvelle fois, comme l'année dernière et celle d'avant, sur ce point : la sobriété ne doit pas devenir, involontairement, un affaiblissement de la démocratie représentative. La stabilité apparente masque en réalité une contrainte croissante ; pour maintenir l'équilibre budgétaire, les institutions recourent chaque année davantage à leurs réserves. Ce n'est pas soutenable à moyen terme.
Ainsi, la Présidence de la République ne parvient à rester à l'équilibre qu'en comprimant son investissement et en maîtrisant ses dépenses opérationnelles. Sa trésorerie, autrefois confortable, ne constitue plus qu'une marge de sécurité très réduite.
L'Assemblée nationale reconduit sa dotation, mais son déficit structurel atteint un niveau élevé, absorbé par des prélèvements sur disponibilités. Le Sénat, pour sa part, ne préserve son équilibre qu'en mobilisant fortement ses réserves. Si cette trajectoire devait se poursuivre en 2027 ou 2028, les prélèvements deviendraient manifestement excessifs.
C'est pourquoi je renouvelle avec insistance un appel formulé depuis plusieurs années : la création d'une dotation autonome dédiée à l'entretien du patrimoine institutionnel.
Aujourd'hui, les dépenses immobilières et écologiques sont fondues dans les crédits de fonctionnement, ce qui les expose, en période de gel, à des arbitrages défavorables. Or nos bâtiments sont un patrimoine national ; leur entretien ne saurait constituer une variable d'ajustement. (Mme Marie-Arlette Carlotti et M. Olivier Cigolotti approuvent.)
Pour ce qui concerne le Conseil constitutionnel, la hausse de sa dotation est justifiée, notamment pour renforcer sa cybersécurité à l'approche des échéances électorales. Mais je souligne une difficulté récurrente : la qualité insuffisante des prévisions budgétaires transmises au Parlement, trop peu détaillées, parfois erronées, et régulièrement sous-évaluées.
Mes chers collègues, la conclusion est claire : nos institutions participent pleinement à l'effort collectif, mais leur modèle financier actuel atteint ses limites. Le gel des dotations se fait au détriment de la qualité du travail législatif, du contrôle parlementaire et de la permanence du débat démocratique.
Sous réserve de ces observations, et dans le contexte de maîtrise des finances publiques, la commission des lois a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Pouvoirs publics » pour 2026. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Guy Benarroche, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'ai l'honneur de vous présenter l'avis de la commission des lois sur les programmes 164 et 165, qui financent les juridictions financières et les juridictions administratives.
La commission a émis un avis favorable, mais vigilant – je le serai particulièrement pour ce qui me concerne –, à l'adoption de ces crédits.
Nous avons constaté que les crédits de paiement affectés à ces programmes apparaissaient en hausse de 3,2 % pour les juridictions financières et en baisse de 5,2 % pour les juridictions administratives. Pour ces dernières, la diminution est en partie liée au fait que la dotation pour 2025 finançait des projets immobiliers majeurs, lesquels arriveront à leur terme à compter de 2026, plutôt qu'à des coupes sèches.
Nous retenons surtout que, malgré ces évolutions en apparence contrastées, les deux programmes se caractérisent par une stabilité d'ensemble.
Cette stabilité est compréhensible pour les juridictions financières, qui ont mis en œuvre avec succès le programme « JF2025 » lancé par le Premier président Pierre Moscovici, lequel quitte son poste à la fin de l'année, et qui sont désormais dans l'attente de la détermination des nouvelles priorités de son successeur.
Ainsi, la hausse de 3,2 % des crédits est uniquement portée par les dépenses de personnel, notamment pour poursuivre la revalorisation indemnitaire des magistrats financiers, dans le cadre de la réforme, désormais ancienne, de la haute fonction publique. L'alignement complet des rémunérations n'a cependant toujours pas eu lieu : nous veillerons à ce que la réforme aboutisse aussi pour les autres corps que celui des magistrats.
En revanche, la stabilité d'ensemble du budget des juridictions administratives soulève d'énormes difficultés. En effet, dans le contexte d'accroissement tendanciel de leur activité, le fait de ne pas engager de nouveaux projets structurants, que ce soit de nature immobilière ou en termes de recrutements, constitue une forte mesure d'économie, qui semble même exagérée.
À l'exception de la Cour nationale du droit d'asile, qui a mis en œuvre sans difficulté la territorialisation que le Sénat avait votée dans le cadre de la loi du 26 janvier 2024 et qui a contribué, même si cette tendance est récente, à réduire de 15 % son stock d'affaires, l'activité des juridictions administratives suit un rythme toujours aussi soutenu, au sujet duquel nous tirons la sonnette d'alarme : nous le faisons tous les ans, mais encore plus fortement cette année.
Les juridictions administratives non spécialisées ont dépassé pour la première fois les 300 000 entrées contentieuses en 2024, avec une hausse de 7,4 %. L'année 2025 s'annonce plus inquiétante encore, puisqu'une hausse une hausse de 20 % des saisines des tribunaux administratifs est anticipée, sans aucune augmentation de personnels. En effet, les deux augmentations prévues dans le plan du ministère, c'est-à-dire 40 postes en 2024 et 40 en 2025, n'ont pas eu lieu ; elles ont été annulées ou supprimées. Et rien n'est prévu pour 2026.
Les magistrats administratifs et le personnel administratif nous l'ont dit : après quatre ans d'efforts immodérés pour essayer de rationaliser, de travailler mieux et davantage, ils ne peuvent aller plus loin sans l'aide de l'État. Or celui-ci a décidé de ne rien faire, c'est-à-dire de laisser la situation régresser encore. Je tenais à vous alerter sur ce point, monsieur le ministre.
Pour cette raison, j'émettrai personnellement un avis négatif sur ce budget.


