TGAP : LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES DU SENAT
L’inexorable montée en puissance de la TGAP ou " comment trouver des recettes de poche pour financer les 35 heures "
La TGAP (Taxe générale sur les activités polluantes) a été créée dans la loi de finances pour 1999 à partir de cinq taxes fiscales et parafiscales affectées à l’ADEME (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie). Le produit de la TGAP est d’environ 2 milliards de francs en 1999.
Une extension tous azimuts dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000
Il est prévu d’étendre la TGAP :
- aux produits phytosanitaires (produit attendu : 300 millions de francs),
- aux produits de lessive (produit attendu : 500 millions de francs),
- aux granulats de minéraux naturels (produit attendu : 200 millions de francs).
Par ailleurs, deux taxes existantes, la taxe payée à l’occasion de la délivrance d’une autorisation d’installation d’une d’installation classée ainsi que la redevance annuelle payée par les plus grosses d’entre celles-ci, seront intégrées dans la TGAP et revalorisées (produit attendu : 130 millions de francs).
La création de ces nouveaux compartiments de TGAP ainsi que la revalorisation de compartiments existant devront porter son produit aux alentours de 3,2 milliards de francs en 2000.
Ces recettes issues de la TGAP seront dès 2000 intégralement affectées au financement de la politique des 35 heures (par affectation au nouveau fonds de financement des allégements de charges).
Comment trouver à tous prix 9 milliards pour 2001 ?
La taxation des consommations intermédiaires d’énergie, évoquée au printemps pour une application en 2000, a finalement été repoussée à 2001. Elle devrait donc être étudiée par le Parlement à l’automne 2000.
Les modalités d’application de cette nouvelle taxation ne sont pas encore connues : elles font l’objet d’une concertation avec les industriels concernés, dans le cadre d’un Livre Blanc publié par le gouvernement ; toutefois il est d’ores et déjà prévu que cette nouvelle taxation rapporte entre 8 et 9 milliards de francs par an. Il semblerait donc que les principales décisions aient déjà été prises !
La création de ce nouveau compartiment de TGAP devrait porter son produit aux alentours de 12 milliards de francs en 2001. A terme, la TGAP doit donc rapporter la moitié des 25 milliards de francs consacrés aux nouveaux allégements de charges prévus pour l’application de la loi sur les 35 heures (l’autre moitié proviendra de la nouvelle " contribution sociale sur les bénéfices " des sociétés qui réalisent un chiffre d’affaires annuel de plus de 50 millions de francs, instituée dès 2000). Celle-ci viendra " prendre le relais " de la surtaxe temporaire d’impôt sur les sociétés.
Un impôt " pseudo-écologique "
Dès l’annonce de la création de la TGAP en 1998, la Commission des finances du Sénat s’était émue de l’utilisation de recettes environnementales pour financer des dépenses sans lien avec l’amélioration de l’environnement. Les évolutions prévues et rappelées ci-dessus la confirment dans ses craintes quant aux intentions environnementales du gouvernement.
En effet, la Commission des finances s’interroge sur la vocation d’un tel impôt : il s’agit d’un impôt qui n’a qu’un prétexte écologique puisque sa principale motivation est de fournir des recettes pour financer la seconde loi sur les 35 heures. Il est paradoxal à ce titre que le gouvernement n’ait pas intérêt à voir l’assiette de cet impôt se réduire, afin d’assurer le financement de dépenses pérennes !
Il y a donc tout simplement pour des raisons politiques internes à la majorité plurielle " confiscation de ressources environnementales ", au profit d’un projet hasardeux sur les 35 heures.
Les effets contre-productifs de l’écotaxe : quand la taxation écologique devient l’ennemie de l’emploi.
Les projets de taxation des consommations intermédiaires d’énergie suscitent de nombreuses critiques :
TGAP sur les consommations intermédiaires d’énergie va créer de très importantes distorsions de concurrence, notamment entre territoires nationaux si elle est appliquée avant la mise en place de l’écotaxe européenne ;
outre, elle va occasionner un transfert massif des entreprises de base vers les entreprises de main d’œuvre ; l’affirmation du gouvernement (dans son Livre blanc) selon laquelle " la réforme n’induira aucun prélèvement net supplémentaire sur les entreprises " est fausse au niveau micro-économique : les entreprises qui consomment 75 % de l’énergie dans l’industrie n’emploient que 20 % des salariés et ne seront donc que peu bénéficiaires des allégements de charges sociales prévus ; en outre, il faut remarquer que la volonté d’une ouverture a minima du marché de l’électricité va également occasionner une perte de compétitivité pour les mêmes entreprises par rapport à leurs concurrentes européennes.
Cette taxation risque donc d’avoir un impact négatif sur l’emploi (on parle de 10 000 emplois) : effet particulièrement paradoxal pour un impôt destiné à financer des dépenses en faveur de l’emploi ! On est bien loin de la théorie du " double dividende " avancée par le gouvernement pour justifier ses projets !