Article 77

Rétablissement d'un système de bourse de collège

I. Commentaire du texte du projet de loi

Cet article introduit un nouvel article 21-1 dans la loi d'orientation du 10 juillet 1989 sur l'éducation afin de rétablir un système de bourse de collège en remplacement de l'aide à la scolarité qui a été supprimée par l'article 76 sus-examiné.

Il tend ainsi à transposer l'article 23 de la loi du 25 juillet 1994 sur la famille, qui avait institué l'aide à la scolarité, et maintient donc une distinction entre les bourses nationales d'études versées aux familles des élèves fréquentant les classes des lycées publics et privés sous contrat ou des lycées privés habilités à recevoir des boursiers nationaux, qui restent régies par la loi du 21 septembre 1951 portant ouverture de crédits sur l'exercice 1951, et les nouvelles bourses de collège.

- Le paragraphe I du nouvel article 21-1 de la loi d'orientation précise d'abord les conditions d'attribution des bourses de collège  : il remplace le critère d'âge requis pour l'attribution de l'aide à la scolarité (11-16 ans) par une condition d'inscription de l'élève, quel que soit son âge, dans un collège public, un collège privé sous contrat ou un collège privé habilité à recevoir des boursiers nationaux.

Le critère des ressources des familles reste en revanche apprécié, comme pour l'aide à la scolarité, selon un plafond variant avec le nombre d'enfants à charge et revalorisé comme le SMIC.

Il en est de même pour le calcul du montant de la bourse qui est égal à un pourcentage de la base mensuelle de calcul des prestations familiales.

D'après les indications fournies, les bourses de collège devraient désormais comporter un troisième taux d'un montant de 1 800 F par an, pour les élèves des familles les plus défavorisées, qui s'ajouterait aux deux taux existants de l'aide à la scolarité (346 F et 1 108 F).

- Le paragraphe II du nouvel article 21-1 précise que les bourses nationales de collège sont à la charge de l'Etat et attribuées par le ministre chargé de l'éducation nationale.

Il convient de rappeler que la loi de finances pour 1998 prévoit 850 millions de francs pour l'aide à la scolarité qui seront donc affectés au financement des bourses de collège, le surcoût entraîné par les mesures nouvelles et le troisième taux étant évalué à 150 millions de francs.

Son deuxième alinéa indique que les bourses sont servies aux familles par les collèges publics ou par les services académiques pour les élèves inscrits dans un collège privé.

Le remplacement des caisses d'allocations familiales, qui versaient l'aide à la scolarité, par les établissements, devrait permettre d'appréhender plus précisément les familles en difficulté et, à ces dernières, de mieux distinguer la bourse de l'allocation de rentrée scolaire.

D'après les indications fournies, les mesures réglementaires d'application de cet alinéa devraient préciser que le versement de bourse sera trimestriel pour les deux taux les plus élevés et intervenir en une fois, au mois de décembre, pour le premier taux, cette solution paraissant opportune compte tenu de la faiblesse du montant annuel servi.

Ce deuxième alinéa précise enfin que la bourse sera servie aux familles par les établissements, après déduction éventuelle des frais de pension ou de demi-pension.

Ce dispositif de précompte automatique par l'établissement des frais de demi-pension, qui ne vaut que pour les établissements publics, apparaît plus satisfaisant que les systèmes qui prévalaient antérieurement : en application de l'article L. 553-4 du code de la sécurité sociale, la procédure de saisie-attribution pouvait, en effet, être appliquée à l'aide à la scolarité, tandis que l'article 57 de la loi du 4 février 1995 portant DDOS permettait, en cas de non-paiement des frais de cantine, que l'aide à la scolarité soit versée à l'établissement, sur sa demande, après information et mise en demeure préalable de l'allocataire.

Le rétablissement du versement trimestriel de la bourse, accordé au paiement trimestriel de la demi-pension, et ce dispositif de précompte automatique par l'établissement devraient contribuer à améliorer la fréquentation des cantines scolaires, notamment dans les zones d'éducation prioritaires.

- Le paragraphe III du nouvel article 21-1 substitue le nouveau dispositif du paragraphe I aux anciennes bourses nationales attribuées aux élèves de collège en application de la loi du 21 septembre 1951.

Il a ainsi pour conséquence de créer deux types de bourses pour l'enseignement secondaire, celles des collèges et celles des lycées, alors que le système antérieur de l'aide à la scolarité ne prévoyait qu'une seule catégorie de bourses comportant des régimes différenciés.

- Le paragraphe IV du nouvel article 21-1 précise la portée de l'article 1er de la loi du 21 septembre 1951 qui continue de régir les bourses nationales d'études du second degré pour les seuls élèves inscrits dans les classes des lycées publics, des lycées privés sous contrat ou des lycées privés habilités à recevoir des boursiers nationaux.

Cet article 1er se borne à indiquer que des bourses sont attribuées aux élèves sur un critère de ressources des familles, qui a succédé à l'ancien critère de mérite, que les parents peuvent inscrire leurs enfants dans un établissement public ou privé et que les modalités d'octroi de ces bourses sont fixées par décret.

Le paragraphe IV confère ensuite une base législative à l'attribution des bourses nationales aux élèves des établissements régionaux d'enseignement adapté qui sont chargés d'accueillir des élèves souffrant d'une déficience physique ou d'un trouble social associé.

En outre, il permet de pérenniser le système dérogatoire dont bénéficie l'enseignement agricole.

Il convient à cet égard de rappeler qu'une initiative de votre commission des affaires culturelles, dans la discussion de la loi du 4 février 1995 portant DDOS, a permis aux élèves des établissements de l'enseignement agricole, de continuer à percevoir leurs bourses après la création de l'aide à la scolarité afin d'éviter des pertes de revenus pour les familles.

- Le paragraphe V prévoit enfin un décret pour définir les modalités d'application du nouvel article 21-1 de la loi d'orientation de 1989 sur l'éducation.

II. Texte adopté par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a d'abord modifié la place de cet article dans la loi d'orientation de 1989 sur l'éducation en insérant le nouveau dispositif des bourses de collège non plus dans le titre III relatif aux établissements d'enseignement mais dans le chapitre III (droits et obligations) du titre premier relatif à la vie scolaire et universitaire.

Au paragraphe II de l'article, elle a supprimé la précision aux termes de laquelle ces bourses sont attribuées par le ministre chargé de l'éducation nationale en estimant que celle-ci était inutile et contraire à l'esprit de la réforme qui vise à déconcentrer au plus près possible des élèves et de leur famille, l'appréciation des situations.

Au paragraphe IV de l'article, elle a adopté un amendement rédactionnel concernant les établissements régionaux d'enseignement adapté.

Elle a enfin supprimé le paragraphe V qui prévoit que les modalités d'application de l'article seront définies par un décret simple, qu'elle a jugé inutile, le gouvernement disposant d'un pouvoir réglementaire d'application des lois en vertu de l'article 21 de la Constitution.

III. Position de la commission

Si elle ne peut que se satisfaire d'un retour à un système de bourses simplifié pour les familles, votre commission souhaiterait cependant obtenir des assurances du gouvernement quant aux modalités d'application de l'article 77 qui sont renvoyées pour l'essentiel au règlement.

Elle souhaiterait notamment recevoir des précisions sur les conditions d'attribution d'un troisième taux de bourse s'ajoutant aux deux taux existants, et qui serait créé en faveur des familles les plus défavorisées, ainsi que sur les modalités du versement des bourses qui redeviendrait trimestriel, à l'exception du premier taux.

Elle voudrait surtout obtenir du gouvernement l'engagement que le montant des bourses, notamment pour le premier taux, et les plafonds de ressources des familles seront substantiellement revalorisés.

En effet, compte tenu des plafonds existants, les bourses de collège resteront pour l'essentiel réservées aux familles assistées subsistant grâce aux différents minima sociaux alors que les salariés rémunérés au SMIC en seront exclus.

A cet égard, elle ne peut que s'inquiéter des dérives d'un système de bourse qui avait été créé à l'origine pour les élèves méritants et qui bénéficie aujourd'hui quasi exclusivement aux familles bénéficiant de l'assistance.

Elle note enfin que les crédits affectés aux fonds sociaux (120 millions de francs pour le fonds social collégien et lycéen, 290 millions de francs pour le fonds social pour les cantines) représentent aujourd'hui plus de la moitié des crédits dévolus à l'aide à la scolarité (850 millions de francs) et ne peut qu'exprimer son inquiétude devant la montée en puissance d'aides sociales accordées aux élèves les plus défavorisés, accordées au cas par cas par les chefs d'établissement après une démarche personnelle des familles, au détriment de l'exercice d'un droit aux bourses subordonné à des conditions objectives de ressources des familles.

Votre commission considère ainsi qu'une revalorisation et une extension du champ des bénéficiaires des bourses de collège sont indispensables, sauf à développer encore davantage les formules sociales d'assistance qui devraient être réservées aux cas marginaux. Elle observe enfin que le coût d'une revalorisation et d'une extension des bourses serait sans commune mesure avec les crédits considérables dégagés par la seule éducation nationale pour financer les emplois-jeunes (4,5 milliards de francs pour trois ans).

Sous réserve de ces observations, elle a émis un avis favorable à l'adoption de l'article 77.

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