Art. additionnels après l'art. 1er
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'élection des conseillers régionaux et des représentants au Parlement européen ainsi qu'à l'aide publique aux partis politiques
Art. additionnel avant l'art. 3

Article 2

M. le président. « Art. 2. - L'article L. 338 du code électoral est ainsi modifié :

« 1° - Au premier alinéa, les mots : ", avec dépôt de listes comportant autant de candidats que de sièges à pourvoir," sont supprimés. Le même alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Chaque liste est constituée d'autant de sections qu'il y a de départements dans la région. » ;

« 1° bis A la fin de la troisième phrase du troisième alinéa, le mot : "moins" est remplacé par le mot : "plus" ;

« 2° Au quatrième alinéa, le pourcentage : "3 %" est remplacé par le pourcentage : "5 %" ;

« 3° Le cinquième alinéa est supprimé ;

« 4° Dans la dernière phrase du dernier alinéa, le mot : "moins" est remplacé par le mot : "plus". »

M. le président. La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.

M. Robert Bret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le moins que l'on puisse dire est que le mode de scrutin régional, tel qu'il ressortirait de l'adoption de ce projet de loi, ne gagnerait pas en lisibilité.

Le mode de scrutin encore en vigueur aujourd'hui - il a notamment conduit à la situation que nous avons connue en 1998 et à la mise en chantier de la loi de 1999, d'ailleurs non appliquée - présenterait tant de défauts que cet article 2 en préparerait, avec l'article 3, la réforme profonde.

Cet article 2 vise essentiellement à donner corps à la notion de section départementale, notion qui, on le mesure aisément, présente d'emblée quelques défauts sérieux.

En effet, les différentes régions du territoire national ne sont pas toutes constituées de départements homogènes en termes de population, ce qui ne saurait manquer de créer, dès la première application de l'article 2, de sérieux problèmes de cohérence.

Examinons rapidement quelques exemples significatifs.

Ainsi, dans une région comme l'Auvergne, il existe un décalage évident entre la population du Puy-de-Dôme et celle de la Haute-Loire ou du Cantal, qui risque, dans les faits, d'inciter certaines listes à se dispenser d'une représentation des deux derniers départements.

La même remarque vaut également pour la région Languedoc-Roussillon, où les 73 509 habitants de la Lozère ne pèseront pas demain du même poids que les 896 441 habitants du département de l'Hérault.

Que dire encore de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, où les 139 561 habitants des Alpes-de-Haute-Provence pèsent peu, cher Claude Domeizel, face aux 1 011 326 résidents du département des Bouches-du-Rhône ?

Examinons également le cas de la région Midi-Pyrénées, où, par exemple, l'Ariège compte 137 205 habitants face aux 1 046 338 résidents de la Haute-Garonne.

Telle est la question que soulèvent la modification de l'article L. 338 du code électoral et la création de sections départementales, telles que vous nous les proposez.

En effet, si l'on tient essentiellement compte des votes qui se seront exprimés en faveur de telle ou telle sensibilité politique, le poids et le nombre d'élus issus de chaque élément du territoire régional seront inéluctablement minorés.

La modification de l'article L. 338 du code électoral pose un autre problème, qui n'est pas secondaire, celui du niveau minimal de voix à obtenir pour participer à la répartition des sièges.

En effet, a priori une influence régionale minimale sera exigée pour participer à cette répartition, alors même que telle ou telle force politique n'est pas nécessairement en situation d'être présente dans l'ensemble de la région, mais le sera éventuellement dans un seul ou dans deux des départements la composant.

Contrairement, en effet, à ce qu'affirme M. le rapporteur, cette méthode ne permet pas une légitime et juste représentation des minorités et des différentes sensibilités.

Nous risquons, si ce mode de scrutin est appliqué, de voir apparaître des situations dans lesquelles certains partis seront privés de représentation au seul motif qu'ils n'atteignent pas le seuil d'influence requis sur l'ensemble de la région, quand bien même ils l'atteindraient dans tel ou tel département.

C'est notamment en ce sens que nous ne pouvons suivre les recommandations du cinquième alinéa de cet article et renoncer au principe de l'élection en fonction de l'ordre des candidats déclarés dans chaque département.

Ce serait la porte ouverte - et cela ne peut manquer de nous surprendre de la part de ceux qui prêchent le rapprochement entre les élus et la population - à la désignation des élus en fonction de décisions d'état-major préférant valider l'élection de certains candidats en lieu et place de ce qui aurait procédé normalement d'une élection dans un cadre précis et lisible, c'est-à-dire celui du département.

Nous reviendrons également sur les conséquences que cette technique toute particulière de désignation des élus risque d'avoir sur le respect des principes de parité que nous avons pourtant retenus pour le devenir de notre système électoral.

J'interviendrai, enfin, sur la question de la préférence accordée au candidat le plus âgé en cas d'égalité de voix.

Une telle orientation, même si elle fait référence à une tradition assez clairement établie dans notre vie politique, je le reconnais volontiers - et qui a trouvé maintes fois à s'appliquer -, soulève néanmoins une question.

Ne serait-il pas temps, dans notre code électoral et donc dans nos institutions, d'inverser la logique et de faire, par exemple, des assemblées régionales un lieu de mise en oeuvre du rajeunissement par ailleurs indispensable de la vie politique ?

Comme, de surcroît, la porte semble ouverte à une remise en question assez significative de la parité, nous nous retrouverions avec des assemblées régionales à la fois moins féminisées et moins jeunes.

Est-ce réellement ce qu'attendent les habitants de ce pays ? Nous ne le croyons pas. Il convenait donc de le préciser à l'occasion de la discussion de cet article.

M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon.

Mme Josiane Mathon. Les modifications de l'article L. 338 du code électoral que vous proposez à l'article 2 touchent à la nature et à l'esprit de la loi du 19 janvier 1999. Non que celle-ci soit parfaite, mais elle préserve mieux que votre réforme ne le fait l'exigence de représentativité la nécessité de dégager des majorités stables.

En introduisant des sections départementales, votre projet de loi dénature toute la dimension proportionnelle du scrutin. Cette disposition complique singulièrement les opérations électorales en matière d'élection des conseillers régionaux. C'est une proportionnelle mêlée à une prime majoritaire, ventilée proportionnellement par section départementale !

En rendant totalement opaques les modes de scrutin, vous risquez non seulement de favoriser la progression de l'abstention, mais aussi d'attaquer le principe même de la parité. En effet, comment pouvez-vous garantir que sera respecté le principe de parité, l'important étant surtout que celle-ci soit vraiment exprimée dans un résultat final ?

Après l'instauration des sections départementales, l'élévation des seuils est la seconde mesure contre laquelle nous manifestons notre plus profonde désapprobation, en ce sens qu'elle constitue une attaque contre une représentation démocratique du corps électoral.

Comment peut-on sérieusement à la fois regretter le développement de l'abstention, la baisse de la participation citoyenne, et défendre la hausse des seuils d'éligibilité ?

L'élévation des seuils est une atteinte directe contre la source de richesse qu'est la diversité politique, car limiter la représentativité, c'est vouloir polariser l'expression des opinions et, par là même, réduire l'éventail de ceux qui contestent et ne se conforment pas à la pensée prétendument dominante.

Vous dites vouloir, avec votre réforme, favoriser l'émergence de majorités régionales stables, alors que vous n'avez même pas attendu d'appliquer les dispositions de la loi du 19 janvier 1999, dont l'objet était déjà de dégager des majorités stables sans pour autant réduire à néant la représentativité des assemblées élues.

Rien ne justifiait donc cette modification du mode de scrutin régional ; mais votre réforme électorale est clairement le complément logique de la création du parti unique de la majorité.

Face à la guerre qui menace et à la détérioration du climat social, rien ne justifie l'urgence avec laquelle vous souhaitez apporter des modifications au mode de scrutin des deux plus proches élections à venir.

Vos préoccupations électoralistes dénotent un faible souci démocratique !

Ce nouveau mode de scrutin apparaît taillé sur mesure par un parti pour son seul profit. Le plus grave, c'est que vous dénoncez une baisse démocratique de la représentation régionale, alors que le poids politique de celle-ci va augmenter considérablement grâce aux lois de décentralisation.

Une fois de plus, c'est le citoyen qui est trompé, et qui voit sa liberté de choix en matière électorale escamotée.

Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons approuver ni sur le fond ni sur la forme les modifications apportées par l'article 2 de ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Masson.

M. Jean-Louis Masson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, autant, sur la partie du projet de loi qui concerne les élections européennes, j'étais hostile d'emblée à l'idée de tronçonner la souveraineté nationale en petits morceaux en vue d'une future représentation à l'échelon européen, autant, s'agissant des élections régionales, certains points du projet de loi initial m'apparaissent comme extrêmement positifs, notamment le fractionnement départemental des listes régionales.

En outre, je considère que les articles 2 et 3 organisent sur une base équitable la représentation départementale et qu'ils préservent de manière tout à fait satisfaisante la parité et la représentativité des différents départements.

J'aurais certainement voté les articles qui constituent un aspect très positif de la réforme proposée, si le projet de loi n'avait pas été défiguré ultérieurement par le problème des seuils.

En fixant à 10 % des inscrits, soit, compte tenu de l'abstention, quasiment 20 % des suffrages exprimés, le seuil permettant de « subsister », et donc de recueillir des suffrages, on est passé dans un monde tout à fait extravagant, dépourvu, finalement, de véritable pluralisme démocratique.

Si j'ai voté contre l'article 1er, de même que je voterai contre les articles 2 et suivants, ce n'est pas parce qu'ils sont mauvais. Je trouve même que l'article 2 est excellent. Seulement, une réforme des élections régionales est un tout. Je considère qu'il est profondément anormal, voire scandaleux, d'avoir proposé un seuil de 10 % des inscrits, c'est-à-dire 20 % des suffrages exprimés pour subsister. Rien ne justifie une telle proposition, si ce n'est une considération purement politicienne.

Le Premier ministre a dit, à juste titre, que les élections régionales de 1998 avaient été l'illustration du régime des partis. Il est vrai que c'était scandaleux et anormal, du moins pour la stabilité des exécutifs. Chacun sait que la loi de 1999, prévoyant comme pour les élections municipales une prime majoritaire, permettait d'assurer à chaque région un exécutif stable. Si l'on fixe un seuil extravagant, c'est non pas pour se donner un exécutif stable mais uniquement pour instaurer une logique de parti unique. Pour ma part, je suis viscéralement hostile à la logique du parti unique.

C'est pourquoi, bien que cet article 2 soit bon, il n'est qu'un petit élément d'un tout qui dénature la démocratie. Aussi voterai-je contre cet article 2. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur celles de l'Union centriste.)

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.

M. Claude Domeizel. M. Masson, dans son intervention, a employé les arguments que j'allais utiliser.

M. Hilaire Flandre. Alors, n'en parlez plus !

M. le président. Dois-je conclure, monsieur Domeizel, que vous n'avez plus rien à dire ?

M. Claude Domeizel. Oh ! J'ai beaucoup de choses à dire, qui sont peut-être un peu compliquées. Si vous en êtes d'accord, je demanderai à M. Flandre de m'interrompre dès maintenant, ce qui le dispensera de le faire ultérieurement ! (Sourires.)

M. Hilaire Flandre. Je vais écouter d'abord !

M. Claude Domeizel. Quels sont donc les objectifs de ce projet de loi ?

Ce serait d'abord - premier objectif - d'obtenir des majorités stables. C'est ce qu'on a entendu tout au long de la discussion générale. Mais la loi de 1999 permettait déjà d'assurer des majorités stables, grâce aux 25 %. Donc, ce n'était pas la peine de modifier la loi. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean Chérioux. On a vu ce que cela donnait dans certains départements !

MM. Robert Bret et Claude Estier. Cette loi n'a jamais été appliquée !

M. Jean-Pierre Schosteck. Alors comment savez-vous quelle est si efficace ?

M. Claude Domeizel. Le deuxième objectif de ce projet de loi, ce sont les seuils, et, comme l'a dit notre collègue M. Masson, on entre dans un monde extravagant, j'y reviendrai.

Le relèvement des seuils a pour seul objectif d'exclure les petites listes ou celles qui gênent du débat démocratique.

Enfin, le troisième objectif est la présentation des listes par sections départementales. Alors là, c'est une trouvaille ! Si ce projet de loi est adopté, il faudra proposer à nos électeurs de suivre des stages de formation parce que je ne suis pas sûr qu'ils comprennent pour qui ou pourquoi ils votent.

M. Nicolas About. Ne les prenez pas pour des sots !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué aux libertés locales. Vous, vous avez bien compris ! Pourquoi ne comprendraient-ils pas le système ?

M. Eric Doligé. Bien sûr !

M. Claude Domeizel. Je ne comprends pas toujours, mais je vais tenter de formuler une explication.

Je ne comprends pas, par exemple, que les sections électorales puissent entraîner - comme l'a dit à juste titre notre collègue Robert Bret - une sous-représentation des départements les moins peuplés, ce qui est vraiment dommageable pour eux.

M. Nicolas About. Mais non !

M. Claude Domeizel. Peut-être même y aura-t-il des départements qui n'auront pas d'élus. Après tout, pourquoi pas ? Mais ce qui va poser problème - et cela m'amène à revenir sur la question des élections sénatoriales - c'est que les conseillers régionaux font partie des grands électeurs. Imaginez ce que cela va donner s'il n'y a pas ou s'il y a trop peu de conseillers régionaux pour les élections sénatoriales.

Autrement dit, je ne comprends pas toujours, et les électeurs ne comprendront pas mieux que moi.

M. Nicolas About. Mais si !

M. Claude Domeizel. C'est la raison pour laquelle j'ai déposé un amendement visant à maintenir le dispositif de la loi de 1999, mais qui, en ajoutant au nom de chaque candidat le département au titre duquel il se présente, permet de régler un grand nombre de problèmes, mais j'y reviendrai au moment de la présentation de cet amendement.

Enfin, je reprendrai un thème qui m'est cher et que j'ai déjà développé à propos des votes blancs.

J'ai expliqué hier que les votes blancs, comme les votes nuls, devaient être pris en considération. Les électeurs qui se déplacent doivent être respectés ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Certains électeurs - je le dis pour ceux qui n'étaient pas là hier soir - prennent même la peine de découper chez eux, avec beaucoup de soin, un bulletin blanc ; ils méritent d'être entendus. C'est la raison pour laquelle je propose, chaque fois qu'il est question de pourcentages par rapport aux suffrages exprimés, que l'on comptabilise ces pourcentages par rapport aux votants. C'est le seul moyen pour que soient reconnus ces votes blancs qui, je le répète, méritent d'être pris en compte.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. J'ai été d'accord avec notre collègue Jean-Louis Masson dès sa première intervention, qui visait à demander à notre collègue Hilaire Flandre soit d'intervenir, soit de se taire. (Sourires.)

Mais ce qui est vrai pour lui vaut également pour ses autres collègues de l'UMP, par exemple M. Chérioux, qui, tout en ne cessant de nous couper la parole, se refuse à intervenir, même s'il l'a fait une fois ce matin...

M. Jean Chérioux. Il ne vous appartient pas de me rappeler à l'ordre ; c'est le rôle du président ! (Rires sur les travées de l'UMP).

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... et nous avons été heureux de l'entendre. Donc, si vous avez quelque chose à dire, monsieur Chérioux, demandez la parole ; si ce n'est pas le cas, taisez-vous ! (Protestations sur plusieurs travées de l'UMP.)

M. Nicolas About. Nous avons déjà un président de séance !

M. Jean Chérioux. Je prends la parole quand cela me plaît, nous sommes en démocratie ! Il y a des moments où vous dites des choses insupportables !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce sont ces interruptions qui sont insupportables, et je répète que notre collègue Jean-Louis Masson l'a éprouvé dès sa première intervention.

M. Jean-Pierre Schosteck. Une hirondelle ne fait pas le printemps !

M. Nicolas About. A l'inverse de votre parti, le nôtre n'est pas monolithique !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. J'en arrive à l'article 2.

Le socialistes devraient évidemment être ravis de vous voir multiplier les sections, mais qu'est-ce qu'une section ? Dans la loi du 19 janvier 1999, dont je rappelle à notre collègue Jean Chérioux qu'elle n'a pas encore été appliquée,...

M. Jean Chérioux. Pourquoi alors dites-vous qu'elle est bonne ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... et que nous l'avions votée beaucoup plus d'un an avant les élections qu'elle organise - autant que je m'en souvienne, vous l'aviez d'ailleurs votée avec nous - il n'y a pas de sections départementales. Cette loi prévoit des listes régionales et c'est suffisant. Pourquoi ajouter des sections, les citoyens ne sachant pas du tout ce qu'elles recouvrent ? Non seulement, ce n'est pas clair, mais là où le projet de loi n'est pas du tout explicite, et il faut vraiment savoir lire pour s'en rendre compte,...

M. Jean Chérioux. Tout le monde ne sait pas lire !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... c'est que l'électeur ne saura même pas combien chaque section départementale aura d'élus puisque leur nombre dépendra de celui des abstentionnistes,...

M. Bernard Frimat. Eh oui !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... ce qui est scandaleux.

En matière d'élections, une tradition fonde notre république : ceux qui recueillent le plus grand nombre de voix sont élus, ceux qui n'en ont pas ne le sont pas, mais on sait ce qu'il en est. On ne tient pas compte, pour déterminer le nombre d'élus du nombre des abstentionnistes. En outre, le résultat de l'élection sénatoriale variera selon les résultats d'une autre élection, ce qui est évidemment anticonstitutionnel, et vous devriez le comprendre !

M. Eric Doligé. La Constitution, ce n'est pas vous quand même !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le Gouvernement a fini par modifier son point de vue et par comprendre que le système analogue qu'il avait proposé pour les élections européennes ne résistait pas à l'examen, et il y a renoncé.

Mais il l'a maintenu ici. Ce n'est évidemment pas possible. Vous savez que l'on peut être élu avec une voix d'écart. Ainsi siégeait il y a peu dans cet hémicycle - sur vos travées, chers collègues de la majorité - un ancien ministre, M. Bergelin, pour ne pas le nommer, qui n'avait été élu qu'à une voix de majorité. Il se trouve que les électeurs n'ont pas confirmé les résultats de la première élection et qu'un sénateur socialiste l'a remplacé, mais il aurait pu se faire, s'il n'y avait pas eu de recours par exemple, que M. Bergelin continue à siéger parmi nous grâce à cette seule voix de majorité.

M. Patrice Gélard, rapporteur. Et alors ?

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est du résultat des élections régionales que dépendra donc éventuellement le sort d'un candidat, qu'il soit de votre bord ou du nôtre, aux élections sénatoriales. Avouez que c'est tout à fait anormal !

M. Hilaire Flandre. Ce n'est pas nouveau !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pour les seuils, c'est là même chose. Vous voulez qu'il y ait une majorité ; nous aussi. C'est pourquoi nous avions voté la loi du 19 janvier 1999 qui donnait une prime à la majorité. Cela suffit. Pourquoi faudrait-il au surplus modifier les seuils pour se maintenir ou fusionner ? Aux municipales, il y a une prime départementale. Si vous craigniez qu'aux régionales la prime ne soit pas suffisante, vous pourriez, à la rigueur, proposer de l'augmenter, sans « tripatouiller » les seuils. Vous disposez déjà de toutes les majorités possibles, vous avez le Sénat, l'Assemblée nationale, Matignon, l'Elysée...

M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, vous avez largement dépassé votre temps de parole !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... - je termine ma phrase, si vous le permettez, monsieur le président -, cela devrait vous suffire, mais profitez-en, cela ne durera pas ! Le « tripatouillage » électoral se retourne toujours contre ses auteurs... (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - M. Robert Bret applaudit également.)

M. Nicolas About. J'ai connu d'autres lois qui se sont retournées contre leurs auteurs !

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.

M. Michel Mercier. Les articles 2, 3 et 4 sont au coeur du dispositif relatif aux élections régionales.

M. Robert Bret. C'est vrai !

M. Michel Mercier. Il est donc normal que nous les examinions de près,...

Mme Nicole Borvo. Et que nous prenions notre temps !

M. Michel Mercier. ... car c'est là que sont les points d'accord ou de désaccord.

L'article 2 comporte essentiellement deux dispositions, la première instituant les sections départementales, la seconde étant relative aux seuils d'admission à la répartition des sièges.

Nous sommes favorables à l'institution des sections départementales à condition que la loi soit précise.

Il s'agit de la présentation des candidats - je reviendrai sur ce point lors de l'examen de l'article 3 - et non du nombre de sièges par département. Or, il y a là une véritable ambiguïté.

M. Patrick Gélard, rapporteur. Non, il n'y a pas d'ambiguïté ! C'est un scrutin régional !

M. Michel Mercier. Par exemple, le département le plus peuplé d'une région pourrait avoir plus d'élus que de candidats, puisque la loi autorise plusieurs listes.

J'évoque cette hypothèse, parce que, lors de l'examen d'un projet de loi, nous devons évoquer toutes les possibilités qu'il renferme ; sinon, à quoi bon l'étudier ?

Je le dis donc très clairement au Gouvernement, au rapporteur et au président de la commission des lois, nous sommes d'accord pour la présentation des listes par sections départementales, mais nous souhaitons - et je parle là en tant qu'élu d'un département relativement peuplé comparativement aux autres départements de la région - que la représentation de chaque département soit garantie par l'attribution d'un nombre prédéterminé de sièges.

Or, la loi ne le précise pas, ce qui apparaît d'ailleurs en toutes lettres dans le rapport du doyen Gélard, qui, je n'hésite pas à le signaler, est excellent sur ce point. C'est un des meilleurs, un des plus clairs, un des plus explicites passages du rapport, et je crois en effet qu'une explication claire est nécessaire : nous ne devons pas donner à nos concitoyens l'illusion qu'il y aura un nombre garanti de sièges par département. Il sera posssible de présenter des candidats par département, ce qui est tout à fait différent.

Nous présentons donc un amendement visant à garantir des sièges aux petits départements. Dans la région Rhône-Alpes, par exemple, il suffirait qu'en proportion les Rhodaniens votent plus que les habitants de l'Ardèche ou de la Drôme, ce qui est le cas à chaque élection, pour que ces deux départements aient moins d'élus que de candidats par rapport au total des sièges obtenus par la liste alors que le département du Rhône obtiendrait davantage de sièges, ce qui ne serait peut-être pas très juste.

Nous acceptons par ailleurs le pourcentage de 5 %, mais nous refusons - et j'y reviendrai lors de la discussion de l'article 4 - le pourcentage de 10 % du nombre des électeurs inscrits.

Il y a, entre l'article 2 et l'article 3, une ambiguïté qu'il faut lever, car la loi manquera sinon de clarté et d'intelligibilité pour les électeurs.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je veux brièvement répondre à quelques-uns des arguments qui ont été avancés.

Tout d'abord, à propos des fameux 10 % d'inscrits, je rappelle, en particulier à M. Mercier, qui le sait bien, que, pour les élections législatives, le seuil est de 12,5 % des inscrits.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est un scrutin uninominal !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Vous le savez d'autant mieux, monsieur Mercier, que cette disposition a été adoptée pour la première fois en 1976.

M. Robert Bret. Ce n'était pas le même mode de scrutin !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Ensuite, les auteurs de ce dispositif ne sont pas mal intentionnés, comme je l'ai entendu dire de-ci de-là. Au contraire, leur philosophie est de favoriser la loyauté des alliances, car ce qui est critiquable, dans le système actuel, c'est que les alliances se nouent après le deuxième tour dans le dos du corps électoral, qui, pendant les deux tours de scrutin, ignore en définitive quelles alliances se constitueront et quelle majorité en sortira.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est le contraire !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Dans le nouveau système, le corps électoral saura forcément avant le deuxième tour quelles alliances auront été nouées, ce qui me paraît constituer une garantie de loyauté démocratique.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non !

M. Jean-Pierre Sueur. Cela n'a rien à voir avec le seuil !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Cela a justement tout à voir avec le seuil et c'est le dispositif actuel, puisqu'on parle de « magouillage », qui précisément permet la « magouille », c'est-à-dire de passer des alliances, éventuellement contre nature, après que le scrutin a eu lieu et sans que le corps électoral ne connaisse les résultats. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Roland du Luart. Je suis d'accord !

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. S'agissant des sections, le Gouvernement a voulu créer un lien entre le département et la région afin de tirer les conséquences de la récente réforme constitutionnelle. En effet, dès lors que le principe du chef de file est posé dans la Constitution, il semble souhaitable qu'il n'y ait pas de distinction tranchée entre les élus. L'objet des sections est d'assurer la représentation des départements.

A M. Dreyfus-Schmidt, qui disait que le dispositif initialement prévu pour les élections européennes était inconstitutionnel, et que nous avions eu raison de le supprimer mais tort de ne pas poursuivre la logique pour les élections régionales, je répondrai que la situation n'est pas la même.

Pour les élections européennes, le sectionnement avait pour objet de garantir des élus ; pour les élections régionales, le sectionnement n'a pour objet, comme l'a fait remarquer M. Mercier, que de garantir des candidatures. (M. Michel Mercier opine.)

C'est toute la différence, et c'est pourquoi l'inconstitutionnalité que vous soulevez pour les élections européennes - question qui est d'ailleurs dépassée maintenant - ne vaut pas pour les élections régionales.

M. le président. Sur l'article 2, je suis saisi de vingt-quatre amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune. Pour la clarté du débat, je les appellerai successivement. Les deux premiers amendements sont identiques.

L'amendement n° 45 est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 225 est présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme Michèle André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, Charles Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer l'article 2. »

La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 45.

M. Robert Bret. Dès l'article 2, vous attaquez, monsieur le ministre, l'esprit de la loi électorale du 19 janvier 1999. Celle-ci, qui n'a jamais été appliquée, avait été conçue - avec, certes, des imperfections que nous avions dénoncées à l'époque - pour remédier aux risques d'instabilité des exécutifs régionaux et pour assurer des majorités stables tout en respectant le pluralisme.

Monsieur le ministre, vous auriez tout de même pu attendre que cette loi s'applique, ne serait-ce qu'une fois, pour que le Parlement puisse évaluer sur pièces l'efficacité des réformes qui avait été apportées par vos prédécesseurs et se former une opinion appropriée.

Que nenni ! Dès cet article 2, vous sortez l'artillerie, à savoir les sections départementales puis l'effet de seuil. Cela vous permet de réduire la représentation proportionnelle à une peau de chagrin, d'amplifier lourdement les dynamiques majoritaires et, au passage, de rebuter le citoyen, qui n'y comprendra plus rien.

Cela vous permet aussi de saper la parité et d'obliger les petites formations à passer sous les fourches caudines des deux grands partis politiques. En définitive, cela vous permet de réduire l'assemblée régionale à une simple chambre d'enregistrement.

Prenons l'exemple des sections départementales. Elles permettent de détourner, subtilement, la nature proportionnelle du scrutin, avec la prime majoritaire de 25 % des sièges attribués proportionnellement en fonction du score de chaque section.

Monsieur le ministre, vous êtes-vous représenté la complexité de cette usine à gaz ? Si nous avons du mal à maîtriser ce calcul, imaginez-vous la perplexité de l'électeur de base qui y sera confronté ! Comment va-t-il pouvoir s'y retrouver ? Si l'électeur ne vote pas directement pour un candidat, le mode de comptabilité électorale que vous nous proposez va à l'encontre de l'ancrage territorial que vous prétendez faire valoir.

Vous portez également un mauvais coup au taux de participation. En effet, lorsque l'on n'y comprend rien, pourquoi se déplacer ? Vous déroulez un tapis rouge à l'abstention.

Pis, vous sapez le principe même de la parité avec l'instauration des sections départementales. En effet, rien n'est prévu pour assurer la parité au sein des sections de liste puisque rien n'empêche qu'elles soient conduites par des hommes.

La proportionnelle reste le scrutin le plus adapté au respect de la parité, monsieur le ministre.

Enfin, l'élévation des seuils est le deuxième déni insidieux de démocratie. Comment peut-on sérieusement défendre une démocratie véritable en cherchant à tout prix à réduire le débat à la confrontation de deux familles politiques seulement ?

La richesse de notre tradition politique nationale, c'est le nombre, la multiplicité, la diversité, laquelle ne pourra jamais se dissoudre dans le bipartisme. Remettre en cause le niveau des seuils, c'est révéler son peu d'aptitudes au débat, un débat qui est notamment lié au pluralisme. C'est aussi finalement trahir son incertitude quant à la qualité de son argumentation.

Les majorités stables que vous prétendez défendre ont bon dos. Mais qu'importe ! L'essentiel est de passer en force. Il faut compléter « l'opération UMP » par une loi électorale maison.

La certitude de votre force ajoutée à votre certitude d'avoir raison aurait pourtant dû vous donner un peu de hauteur. Mais, on le voit à la façon dont le débat au Parlement se déroule, vous allez à contresens de la plupart des pays européens. Vous choisissez délibérément de limiter la représentativité de nos assemblées régionales, et le rétrécissement de l'éventail démocratique dans ces dernières, alors même que leur poids politique est appelé à augmenter, est particulièrement pervers.

Il nous faut bien considérer le présent projet de loi comme le préambule de bien mauvais augure de vos futurs projets. Ceux que nous connaissons étaient déjà inquiétants, mais, attention, les mauvaises lois ont toujours des effets boomerang inattendus !

Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons approuver sur le fond non plus que sur la forme les modifications apportées par l'article 2 au code électoral, et nous vous proposons donc de supprimer cet article.

M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour présenter l'amendement n° 225.

M. Bernard Frimat. Comme M. Michel Mercier l'a dit voilà quelques instants, avec l'article 2, nous abordons le coeur du projet de loi. Les articles 2, 3 et 4 constituent en effet les innovations essentielles. Les autres, sans être négligeables, sont de moindre importance.

L'article 2 a deux objets : modifier les seuils existants et introduire les sections départementales.

L'amendement n° 225 tend à revenir sur ces propositions en supprimant l'article.

Monsieur le ministre, vous avez déclaré que vous vouliez des majorités claires et stables et que vous refusiez la « magouille » de la deuxième semaine. Nous sommes d'accord sur ce point. Mais vous oubliez qu'il existe une loi qui remédie à ce problème. Votre propos est fondé par rapport à l'ancien mode d'élection des conseils régionaux mais pas par rapport au mode que prévoit la loi de 1999, laquelle, on l'a dit, n'a jamais été appliquée.

Ce qui nous préoccupe dans votre proposition, c'est, nous l'avons dit lors de la discussion générale, l'affadissement de l'idée régionale. Vous nous proposez une liste d'affichage régional, mais où les candidats seraient répartis en autant de sections départementales que la région comporte de départements - on doit pouvoir aller jusqu'à huit - et, de fait, vous conservez le département comme circonscription de l'élection.

Il nous semble que ce choix des circonscriptions départementales, qui a été fait hier, et qui, d'une certaine façon, est reconduit aujourd'hui, ne permet pas à la région d'affirmer son identité de manière satisfaisante. Nous aurons l'occasion d'y revenir pusieurs fois au cours du débat. C'est, nous semble-t-il, en contradiction avec l'idée de donner à la région un aspect immédiatement saisissable par les électeurs. La région n'aura pas, du moins dans son cadre administratif, cette légitimité.

Vous allez donc à l'encontre d'une identité encore fragile dans l'opinion, parce que les régions sont de création relativement récente, et cela apparaît comme une contradiction au moment où M. le Premier ministre - il le disait encore cet après-midi - veut développer la décentralisation, et nous avons déjà eu le plaisir d'en débattre ensemble. Bref, au moment où vous allez confier plus de pouvoirs et de charges aux régions et aux départements, rendez à chacune de ces collectivités sa logique de désignation.

Je suis d'accord sur la nécessité d'une répartition harmonieuse des élus régionaux sur l'ensemble du territoire régional, mais, si nous nous en tenons à la Constitution, c'est la fonction des partis politiques de remplir ce rôle dans la démocratie.

Avec la création de sections départementales, le risque principal est que les régions qui comprennent de nombreux départements restent des « additions » de départements et que les régions qui comptent deux départements seulement - problème que je peux connaître - restent le cadre des rivalités départementales au détriment de l'intérêt régional. Or, les missions qui sont confiées à la région exigent la recherche de l'intérêt régional.

Prenons un élément tout simple de la politique régionale : la rénovation des lycées. C'est l'état de dégradation qui est important, pas le critère géographique ! L'égalité ne s'apprécie pas entre les départements, mais au regard du service public rendu à tous les lycéens de la région.

L'ancrage territorial ne me semble donc pas devoir être appréhendé comme vous le faites et ceux qui se présenteront...

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Frimat !

M. Bernard Frimat. Nous aurons en effet l'occasion de développer ce point dans la suite de la discussion et je ne voudrais surtout pas, monsieur le président, abuser de votre patience !

M. le président. L'amendement n° 226, présenté par MM. Domeizel et Frimat, Mme Blandin, MM. Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme Michèle André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, Charles Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit cet article :

« Le premier alinéa de l'article L. 338 du code électoral est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Chaque liste régionale mentionne explicitement pour chaque candidat le département auquel il est rattaché en application des critères fixés par le deuxième alinéa de l'article L. 194. »

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Il est en effet très important que toutes les alliances soient connues avant le second tour, afin d'éviter que des électeurs ayant en toute bonne foi voté pour une formation républicaine ne soient ensuite amenés à constater, comme ce fut le cas voilà quelques années, une alliance entre cette dernière et une formation ne partageant pas les mêmes principes.

Cependant, la loi Jospin de 1999 permet tout à fait de régler cette question de la clarté des alliances, tandis que la fixation de seuils, notamment celui de 10 % des électeurs inscrits, ne sera d'aucun effet.

Nous sommes confrontés ici à la difficulté suivante : définir les modalités des élections régionales tout en préservant un certain nombre de catégories départementales. Comme vient de l'expliquer M. Frimat, il est certes ardu d'établir un scrutin régional sur une base départementale.

De plus, monsieur le ministre, le texte tel qu'amendé par le Gouvernement à l'Assemblée nationale permet que la tête de liste ne soit pas élue, ce qui, à notre sens, soulève un problème d'inconstitutionnalité,...

M. Patrice Gélard, rapporteur. Absolument pas !

M. Jean-Pierre Sueur. ... dont nous reparlerons lors de l'examen de l'article 6.

L'amendement n° 226 tend à montrer qu'une autre possibilité existe : les listes peuvent très bien, en effet, mentionner le département d'origine de chaque candidat. Nous proposons que l'on retienne cette solution, car cela aurait l'avantage de ne pas imposer de créer des sections départementales.

En effet, l'instauration des sections départementales implique l'élection d'un nombre aléatoire de conseillers régionaux en fonction de la démographie et du taux d'abstention, donc une absence de visibilité pour l'électeur au moment du vote.

En outre, avec ce dispositif, il sera impossible, dans certains cas, de remplacer un ou plusieurs élus, en raison de l'épuisement de la section départementale à l'intérieur de la liste. En effet, la création des sections départementales est soumise aux dispositions de l'article 8, qui dispose qu'un siège de conseiller régional devenant vacant pour quelque cause que ce soit sera pourvu par le candidat venant immédiatement après le dernier élu dans la section départementale de la liste à laquelle appartient le conseiller à remplacer.

Or on peut imaginer que, pour diverses raisons, telles qu'un décès ou une démission, la section départementale d'une liste ne comporte plus de réserve. Cela risque d'être le cas, en particulier, pour les départements faiblement peuplés, compte tenu du petit nombre de candidats présentés. Que se passera-t-il alors ?

Je vous signale, mes chers collègues, que notre groupe a d'ailleurs proposé une solution à ce problème par le biais de l'amendement n° 270 rectifié bis à l'article 8. Elle permettrait de sortir de l'impasse dans le respect de la rédaction actuelle du texte, puisque nous prévoyons que, dans l'hypothèse où une section départementale ne comporterait plus de candidat non élu et où une vacance surviendrait, pour quelque cause que ce soit, il soit procédé au remplacement en appelant le suivant dans la section départementale où ladite liste a obtenu le meilleur score.

Cependant, pour régler le problème que pose incontestablement le projet de loi et pallier cette carence, il faudrait qu'un amendement puisse être adopté. C'est l'une des difficultés auxquelles nous sommes confrontés !

M. le président. L'amendement n° 46 rectifié, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

« Supprimer le 1° de cet article. »

La parole est à M. Robert Bret.

M. Robert Bret. La modification prévue au premier alinéa de l'article 2 vise à instaurer, dans chaque liste, autant de sections qu'il y a de départements. Au système à deux tours, au scrutin de liste, à la représentation proportionnelle et à la prime à la liste majoritaire, le Gouvernement ajoute, pour couronner l'ensemble, les sections départementales ! On secoue le tout bien fort et on finira par dissuader l'électeur de se déplacer !

Dans l'exposé des motifs du projet de loi est évoqué l'ancrage des élus et, pour assurer celui-ci, le Gouvernement présente une disposition qui tend à porter atteinte à la nature régionale du scrutin en instituant une procédure de répartition tellement complexe qu'elle risque de décourager le citoyen de bonne volonté et de le contraindre à faire son choix dans l'opacité.

La création de sections départementales n'entraîne que des complications, pour l'électeur, qui ne sait plus exactement pour qui il vote, et en termes de représentativité ou de parité.

L'introduction de sections départementales dans les listes ne se justifie pas pour un scrutin régional. Compte tenu des effets de seuil, elle se traduit par une limitation considérable de la représentation proportionnelle des familles politiques. Le principe de la circonscription régionale pour une élection à une assemblée régionale est plus pertinent si l'on ne veut pas s'écarter d'une juste représentation des sensibilités.

Cette mesure représente donc un non-sens absolu. Cela montre que l'objectif du Gouvernement est non pas la constitution de majorités stables, mais bien plutôt la construction d'un pôle ultramajoritaire.

Pour toutes ces raisons, nous proposons la suppression du 1° de l'article 2.

M. le président. L'amendement n° 227, présenté par MM. Domeizel et Frimat, Mme Blandin, MM. Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Supprimer le deuxième alinéa (1°) de cet article. »

L'amendement n° 228, présenté par MM. Domeizel et Frimat, Mme Blandin, MM. Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Supprimer le troisième alinéa de cet article. »

La parole est à M. Bernard Frimat, pour présenter ces deux amendements.

M. Bernard Frimat. L'amendement n° 227 vise à maintenir l'élection des conseillers régionaux dans le cadre de la circonscription régionale.

Comme je l'ai déjà indiqué tout à l'heure, une telle disposition nous apparaît comme un premier facteur de lisibilité et une première garantie que le débat sera véritablement régional et ne prendra pas, de ce fait, une dimension trop locale.

Un autre argument important en faveur du maintien de la liste régionale « réelle », si je puis m'exprimer ainsi, tient au fait qu'une telle liste comporte autant de candidats qu'il y a de sièges à pourvoir. Par conséquent, quand l'électeur accomplit son devoir civique, il sait pour combien de candidats il vote et combien il y aura d'élus.

Dans le dispositif présenté par le Gouvernement, l'électeur saura bien sûr quel sera le nombre des membres du conseil régional - c'est bien le moins -, mais il ignorera complètement combien d'élus représenteront son département. Qui plus est, le nombre des élus du département variera - nous reviendrons ultérieurement sur la question des seuils - en fonction du taux d'abstention, avec toutes les incertitudes qui pèsent sur celui-ci, liées en particulier à la fiabilité des listes électorales.

Nous savons tous que, pour de nombreuses raisons, il est régulièrement nécessaire de procéder à une révision des listes électorales, mais les électeurs qui demeurent inscrits sur celles-ci tout en ayant quitté la région ne viendront pas voter, ce qui affaiblira le potentiel de représentation du département. Or les élus ne représentent pas les électeurs, ils représentent les habitants d'un territoire.

Le projet de loi laisse donc subsister un élément d'incertitude. Poussons le raisonnement jusqu'au bout : si, dans un département, tous les électeurs font la grève du vote - je vous accorde que c'est absurde, monsieur le ministre, mais le raisonnement par l'absurde a son utilité en mathématiques -, ce département ne sera pas du tout représenté au conseil régional !

Vous ne pouvez présenter un texte de loi dont l'application peut mener à une telle aberration ! J'ai délibérément poussé à l'extrême mon raisonnement, par simplification, mais un fort taux d'abstention viendra minorer la représentation.

Cette incertitude, qui rejaillira d'ailleurs à la marge sur le collège électoral sénatorial, nous amène à soulever la question suivante : un élu représente-t-il les électeurs ou les habitants ? Selon la réponse que vous donnerez, monsieur le ministre, votre texte sera ou non anticonstitutionnel.

Quant à l'amendement n° 228, s'il répond à la même finalité que le précédent, il est d'une nature fondamentalement différente : il tend à supprimer les sections départementales, qui sont un facteur d'illisibilité et d'opacité pour le citoyen. Le scrutin organisé dans une circonscription régionale est plus clair.

Cette suppression permettrait d'éviter l'instauration d'un mode de scrutin complexe privant les électeurs d'un véritable choix et les empêchant de se reconnaître d'emblée dans l'assemblée qu'ils ont élue. Si notre proposition était adoptée, nos concitoyens sauraient exactement comment ils seraient représentés.

La région mérite mieux, me semble-t-il, que le sort que lui réserve le Gouvernement. Elle mérite mieux que cet affadissement, que ce recul qu'il est en train d'organiser.

Pour toutes ces raisons, il nous paraît très important de supprimer les sections départementales.

M. le président. L'amendement n° 229, présenté par MM. Domeizel et Frimat, Mme Blandin, MM. Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Compléter le troisième alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée : "Dans chaque liste régionale, il est mentionné explicitement le département de la région auquel chaque candidat est rattaché en application des critères fixés par le deuxième alinéa de l'article L. 194". »

La parole est à M. Bernard Frimat.

M. Bernard Frimat. Je le retire, monsieur le président. Il fait doublon avec l'amendement n° 226, que Jean-Pierre Sueur a excellemment présenté.

M. le président. L'amendement n° 229 est retiré.

L'amendement n° 230, présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Compléter le troisième alinéa de cet article par deux phrases ainsi rédigées : "Chaque section comporte un nombre déterminé de sièges à pourvoir. Ce nombre est fixé conformément au tableau n° 7 annexé au présent code". »

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Il s'agit d'un amendement de repli. En effet, dans l'hypothèse où les amendements défendus par M. Frimat ne seraient pas adoptés par notre assemblée, nous devons tout de même jouer notre rôle et formuler des propositions visant à améliorer le projet de loi.

C'est ainsi que nous présentons une mesure à la fois très simple et très importante, monsieur le ministre, en vue de lever l'un des points fondamentaux d'inconstitutionnalité de ce texte. Nous proposons, tout simplement, que les sections départementales, si elles devaient vraiment être créées, comptent un nombre de candidats défini dès avant le scrutin.

En effet, le dispositif actuel du projet de loi pose de très nombreux problèmes, puisque le nombre d'élus d'un département est largement déterminé par le nombre des abstentionnistes, ce qui est très bizarre. Cela porte atteinte au principe d'égalité, et des disparités injustifiées entre les départements pourraient apparaître. Il nous semble, en outre, assez immoral que le nombre des élus dépende du nombre des abstentionnistes, les élus devant, à nos yeux, représenter l'ensemble des habitants d'un département.

Par conséquent, nous ne voyons pas ce qui, dans la logique du Gouvernement et de la majorité sénatoriale, s'opposerait à ce que nous améliorions le texte, en prévoyant d'emblée le nombre d'élus pour chaque département.

Pour que cette suggestion de bon sens puisse être adoptée, ce qui permettrait au Gouvernement de lever un risque d'inconstitutionnalité, il faudrait naturellement que nos amendements aient quelque chance d'être votés ! Où nous voyons, une fois encore, le caractère quelque peu paradoxal, étrange et singulier de la situation dans laquelle nous nous trouvons !...

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 47 rectifié est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 231 est présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer le 1° bis de cet article. »

La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 47 rectifié.

M. Robert Bret. Cet amendement a pour objet de supprimer le troisième alinéa du nouvel article L. 338 du code électoral. Cet alinéa a été ajouté par le Gouvernement sans avoir été examiné par l'Assemblée nationale, grâce au recours à l'article 49, alinéa 3, de la Constitution.

Le troisième alinéa de l'actuel article L. 338 du code électoral dispose que, en cas d'égalité de suffrages entre les listes arrivées en tête, les sièges sont attribués à la liste dont les candidats ont la moyenne d'âge la moins élevée. Le nouvel alinéa prévoit, au contraire, que les sièges seront attribués à la liste dont les candidats ont la moyenne d'âge la plus élevée. Alors que vous essayez de nous expliquer, monsieur le ministre, qu'il est devenu primordial de rapprocher les citoyens de leurs élus et de la vie politique en général, vous proposez ni plus ni moins, par cet alinéa, d'accentuer le vieillissement du personnel politique !

Or nous souhaitons exactement l'inverse : nous souhaitons que les citoyens puissent enfin se reconnaître dans des femmes et des hommes proches de leur vie quotidienne, de leurs préoccupations, de leurs inquiétudes. Pour cela, il est nécessaire que nous favorisions le rajeunissement de la vie politique en permettant l'élection de femmes et d'hommes plus jeunes.

A cet égard, il n'est pas anodin de souligner que l'âge d'éligibilité aux fonctions de député est de vingt-trois ans ; heureusement, personne n'a encore osé le modifier !

Je rappelle cependant, pour mémoire, que les députés et les sénateurs de droite avaient déjà dénoncé, par leur saisine du Conseil constitutionnel, la priorité accordée par la loi du 19 janvier 1999 aux listes dont les candidats présentaient la moyenne d'âge la moins élevée. Ils invoquaient à l'époque le fait que ces dispositions violaient un principe fondamental reconnu par les lois de la République, selon lequel, en cas d'égalité de suffrages, la prime majoritaire ou le dernier siège devaient profiter respectivement à la liste dont les candidats présentaient la moyenne d'âge la plus élevée ou au plus âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus.

Le Conseil constitutionnel nous éclaire sur ce point en considérant que, en tout état de cause, la règle évoquée ne revêt pas une importance telle qu'elle puisse être regardée comme figurant au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République. Il n'y a donc aucune raison, mes chers collègues, de rester figés, en matière électorale, dans une sorte de conservatisme et d'immobilisme. L'âge de nos élus n'a rien à voir avec leur compétence, et si les plus jeunes d'entre eux manquent peut-être d'expérience, ils permettent un renouvellement des idées.

Par l'amendement n° 47 rectifié, nous proposons donc de supprimer l'alinéa ajouté par le Gouvernement, afin de revenir au dispositif prévu par la loi du 19 janvier 1999 et consistant, en cas d'égalité de suffrages, à attribuer les sièges à la liste présentant la moyenne d'âge la moins élevée ou au moins âgé des candidats susceptibles d'être élus.

Pour tout dire, la rédaction initiale du projet de loi maintenait les dispositions introduites par la loi du 19 janvier 1999 afin de favoriser l'émergence d'une classe politique plus jeune. Que de contradictions, que de conservatisme !

Dans un esprit positif et progressiste, nous vous demandons, mes chers collègues, de voter notre amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour défendre l'amendement n° 231.

Mme Marie-Christine Blandin. Cet amendement a également pour objet de supprimer la disposition visant à l'attribution des sièges, en cas d'égalité de suffrages, à la liste présentant la moyenne d'âge la plus élevée.

Ce matin, nous avons entendu M. le rapporteur et M. le secrétaire d'Etat saluer une sorte de tradition de respect et de mise en valeur des personnes les plus âgées. Loin de moi l'idée de vouloir écarter de nos assemblées des personnes très honorables dont la compétence nous est quotidiennement utile. J'ai en effet eu l'honneur de pouvoir apprécier l'appui et le travail de personnalités telles que André Diligent ou Maurice Schumann, qui ont siégé sur ces travées.

M. Jacques Legendre. Très bien !

Mme Marie-Christine Blandin. Mais il s'agit ici non pas d'individus, mais de moyenne d'âge. Il n'est pas question d'éloigner les uns pour faire de la place aux autres ; il est question de favoriser un rajeunissement global et d'envoyer un message très clair à des personnes arrivant dans notre démocratie et doutant encore que la politique les concerne. Envoyons-leur un message clair, ils nous enverront des idées neuves. Un parti astucieux pourrait même faire un savant cocktail sur sa liste, en y plaçant quelques sages à l'âge vénérable aux côtés de nombreux jeunes qui feraient baisser la moyenne d'âge.

Donc, personne n'est exclu ni bafoué. « Aux âmes bien nées, la valeur n'attend pas le nombre des années » ! Retenons-le et mettons en application.

M. Claude Estier. Très bien !

M. le président. L'amendement n° 232, présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le quatrième alinéa de cet article :

« 1° bis A la fin de la troisième phrase du troisième alinéa, les mots : "ont la moyenne d'âge la moins élevée" sont remplacés par les mots : "tirée au sort". »

La parole est à M. Bernard Frimat.

M. Bernard Frimat. Mme Marie-Christine Blandin vient de défendre une première proposition concernant la moyenne d'âge la moins élevée. Je rappelle, une fois encore, monsieur le ministre, que c'était la proposition initiale du Gouvernement.

Après le 49-3 et la reprise d'un certain nombre d'amendements de la commission des lois de l'Assemblée nationale, a été abandonnée la moyenne d'âge la moins élevée au profit de la moyenne d'âge la plus élevée.

Le dispositif prévu s'appliquera en cas d'égalité de voix. Comme il s'agit d'une répartition de sièges compliquée par les sections départementales, de telles situations seront, j'en conviens, rares. C'est précisément pour cette raison qu'il faut peut-être recourir à une disposition qui renvoie dos à dos les calculs de moyennes, même si, quand on choisit une moyenne plutôt qu'une autre, on ne porte atteinte à personne, la dignité de qui que ce soit n'étant pas en jeu.

Notre proposition, dont nous connaissons les limites - mais nous aurons l'occasion d'y revenir puisque nous avons déposé plusieurs amendements analogues -, vise à recourir au tirage au sort. Si l'électeur - puisque c'est l'électeur qui choisit ; élire, cela veut dire choisir - a fait un non-choix, on ne voit pas pour quelle raison il faudrait préférer le bénéfice de l'âge ou de la jeunesse.

Des citations ont été faites. Pour sa part, Mme Blandin a cité Corneille. Le tirage au sort assure l'égalité des chances...

M. Patrice Gélard, rapporteur. Pour la loterie, oui !

M. Bernard Frimat. ... et n'afflige pas, écrivait Montesquieu. Comme, depuis le début de ce débat, notre souhait fondamental...

M. Patrice Gélard, rapporteur. C'est d'amender le texte !

M. Bernard Frimat. ... est vraiment de n'affliger personne, nous nous retrouvons un court moment dans cette citation. (Sourires.)

M. Patrick Devedjian, ministre délégué. Je vous ai connu meilleur !

M. Bernard Frimat. C'est afin de pouvoir m'améliorer, monsieur le ministre ? (M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat prend place au banc du Gouvernement et M. le ministre délégué quitte l'hémicycle.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 48 rectifié est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 233 est présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer le cinquième alinéa (2°) de cet article. »

La parole est à M. Robert Bret, pour défendre l'amendement n° 48 rectifié.

M. Robert Bret. Avec le 2° de l'article 2, vous modifiez, monsieur le secrétaire d'Etat, le seuil à partir duquel sera ouverte la répartition des sièges. Le seuil passe de 3 % à 5 %. Il s'agit d'une petite élévation, mais elle a de grandes conséquences.

De deux choses l'une : ou bien cette modification est mineure, et alors nous ne voyons pas pourquoi vous touchez à ce seuil ; ou bien cette modification est significative et, dans ce cas, elle attente à la présence des petites listes dans les assemblées régionales.

Vous n'avez certainement pas fait ces choix par hasard, sans en mesurer les effets, même si nous n'avons toujours pas eu connaissance des projections qu'avait certainement demandées le ministère de l'intérieur.

Vous augmentez les seuils pour l'accès au deuxième tour. Vous les augmentez pour le droit à la fusion. Enfin, vous les augmentez pour l'admission à la répartition. L'effet cumulé de toutes ces augmentations joue comme un rouleau compresseur pour éliminer les petites formations. Il amplifie l'effet majoritaire et parachève l'exclusion de tous les candidats que vous considérez comme quantité négligeable.

Ces effets de seuils accentuant votre regroupement politique, vos déclarations de principe sur la démocratie nous paraissent quelque peu teintées de mauvaise foi et d'hypocrisie. De façon insidieuse, ces seuils laminent en effet la diversité. A terme, l'objectif visé, c'est la bipolarisation de notre vie politique. Mais, au-delà, vous marchez à grands pas vers la bipolarisation de la pensée tout court et vous vous privez des richesses qui peuvent surgir de la diversité et de la confrontation démocratique.

Les effets de seuil de la précédente loi électorale étaient suffisants pour assurer des majorités, nous l'avons dit et nous le répéterons. Vous n'avez même pas attendu de les expérimenter. Ces petites manipulations sur les seuils sont dangereuses pour la démocratie.

Pour toutes ces raisons, nous proposons un amendement visant à supprimer cet alinéa.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour présenter l'amendement n° 233.

M. Jean-Pierre Godefroy. Cet amendement vise à supprimer l'augmentation de 3 % à 5 % des suffrages exprimés nécessaires pour être admis à la répartition des sièges.

Les modes de scrutin doivent répondre, avant tout, à l'intérêt général, aux difficultés rencontrées par les élus, mais aussi et peut-être principalement aux préoccupations des électeurs, car le résultat d'une élection dépend avant tout de leur choix.

La loi du 19 janvier 1999, en instaurant un scrutin de liste proportionnel à deux tours avec une prime de 25 % des sièges à la liste obtenant la majorité absolue au premier tour ou arrivant en tête au second tour, permet de dégager une majorité nette. La liste arrivée en tête aura 25 % des sièges en plus de son pourcentage normal à la proportionnelle. Dans le même temps, par le jeu de la proportionnelle, ce mode de scrutin permet de représenter tous les courants politiques, et donc d'accorder une place aux minorités.

Cette loi n'a pas encore trouvé à s'appliquer. On ne peut donc, comme vous le faites, lui faire un procès d'intention sur son inefficacité.

Alors même que, en 1998, il était favorable à un scrutin départemental à un seul tour, le Premier ministre s'est rallié au scrutin proportionnel à deux tours, qui était qualifié il y a quatre ans d'« arme malicieuse » et démontrait le manque de sincérité du gouvernement de l'époque sur le sujet. Néanmoins, vous videz de sa substance le scrutin proportionnel par un mécanisme visant à diminuer le pluralisme.

Augmenter de 3 % à 5 % des suffrages exprimés le seuil pour accéder à la répartition des sièges ne se justifie pas. Le seuil de 3 % permet de mieux prendre en compte les minorités et de favoriser l'émergence des extrêmes, sans pour autant remettre en cause la nécessaire constitution de majorités stables.

Sans compter que cela permet de dégager des pensées nouvelles, qui doivent pouvoir s'exprimer. En effet, il n'est pas dit que ce que nous représentons comme opinions dans cette assemblée soit pour solde de tout compte. De nouvelles opinions peuvent voir le jour. Dans le monde actuel, de nouvelles conceptions de la vie politique peuvent apparaître et doivent trouver le moyen de s'exprimer. Elles s'exprimeront justement à travers de petites listes, au départ.

Le seuil de 3 % permet de mieux prendre en compte les minorités. L'augmentation du seuil requis pour bénéficier de la répartition des sièges, combinée avec l'augmentation des deux autres seuils - fusion et maintien au second tour -, aura pour effet de restreindre, de manière excessive, l'accès de la plupart des formations politiques au second tour, obligeant celles-ci à des alliances dès avant le premier tour, pour espérer faire élire quelques-uns de leurs représentants.

Comme je viens de le dire, un tel seuil ne permet pas de faire émerger de nouveaux courants d'idées. Quant aux négociations avant le premier tour, on sait que l'obligation de vote conforme fait souvent partie de la règle du jeu, les opinions divergentes risquent fort d'être mises sous le boisseau et de passer sous les fourches caudines des grandes formations ou de la grande formation qui propose ce texte.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Effectivement !

M. le président. L'amendement n° 234, présenté par MM. Domeizel, Courteau, Dreyfus-Schmidt, Masseret et Peyronnet, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le cinquième alinéa (2°) de cet article :

« 2° Au quatrième alinéa, les mots : "3 % des suffrages exprimés" sont remplacés par les mots : "2,5 % des votants" ; ».

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il est bien que les ministres et les secrétaires d'Etat se succèdent au banc du Gouvernement.

M. Henri de Raincourt. C'est très sympathique !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Absolument !

Cela démontre, une fois encore, que l'argument tiré par le Premier ministre pour expliquer son recours à l'article 49, alinéa 3, de la Constitution de la nécessaire présence de M. Sarkozy était un fallacieux argument. Cela étant dit, M. le secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat est le bienvenu puisqu'il s'agit en effet de réformer l'Etat.

M. Jean Chérioux. Voilà !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. M. le rapporteur ne pourra plus nous dire - il ne peut d'ailleurs pas le dire s'agissant de l'article 2 - que la réforme de l'Etat n'entre pas dans le cadre de ce projet de loi.

Je voudrais d'abord poser une nouvelle question à M. le secrétaire d'Etat. On nous dissimule les simulations (Exclamations sur les travées de l'UMP) et nous ne l'acceptons pas. Cela commence à suffire ! (Oh ! sur les mêmes travées.) La question avait été posée à M. le rapporteur. Ces simulations existent. Elles existent au point qu'il avait promis de les mettre en annexe de son rapport. Or le rapport a paru sans les simulations. Nous lui avons donc demandé s'il voulait nous les dissimuler. Il nous a répondu par la négative, arguant du fait qu'il ne les avait pas reçues du ministère de l'intérieur. La question a été posée hier, d'une manière solennelle, par notre collègue Robert Badinter. Nous ne les avons toujours pas. Nous pouvons nous demander si cela ne tient pas à des raisons particulières. Nous y avons droit. Nous finirons par prendre des mesures ou par demander une suspension de séance jusqu'à ce que nous les ayons. Elles sont nécessaires pour nous, comme pour vous, afin que vous sachiez ce qui se passera dans chacune de vos régions.

Un sénateur de l'UMP. C'est l'angoisse !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie d'en prendre note et d'avoir l'amabilité de nous faire tenir le plus rapidement possible ces simulations.

Quant à l'amendement n° 234, il essaie d'apporter du nouveau. Tout à l'heure, nous avons proposé - et nous pensions que vous seriez satisfaits, mais vous l'êtes peut-être d'ailleurs - de recourir au tirage au sort pour éviter la querelle entre les anciens et les jeunes. Nous verrons ce que vous en pensez. En l'occurrence, c'est la même chose : il y a les électeurs inscrits et les suffrages exprimés, mais, entre les électeurs inscrits et les suffrages exprimés, il y a les votants, et dans les votants, il y a évidemment les bulletins blancs et les bulletins nuls. Ces électeurs ont tout de même pris la peine de se déplacer et il est bon de les prendre en considération.

C'est pourquoi nous vous proposons de remplacer les mots : « 3 % des suffrages exprimés » par les mots : « 2,5 % des votants », ce qui revient à peu près au même en ce qui concerne l'application du seuil. Tel est l'objet de cet amendement. Nous espérons que vous y serez sensibles.

J'aimerais que, à l'avenir, M. le rapporteur évite de nous dire que certains amendements n'entrent pas, selon lui, dans le cadre du projet de loi tel qu'il est actuellement proposé. Il serait préférable qu'il nous dise au contraire ceux qui, selon lui, entrent dans le cadre du projet de loi tel qu'il persiste à vouloir le limiter : il gagnerait du temps !

M. Le président. L'amendement n° 235, présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans le cinquième alinéa (2°) de cet article, remplacer le pourcentage : "5 %" par le pourcentage : "3,5 %". »

La parole est à M. Bernard Frimat.

M. Bernard Frimat. Avec cet amendement, nous abordons l'un des deux problèmes de seuil. M. Michel Dreyfus-Schmidt vient de le rappeler par référence aux votants. Cet amendement, comme les suivants, mais je ne présente que celui-là, vise à abaisser le seuil d'admission à la répartition des sièges proposé dans le projet de loi.

Monsieur le secrétaire d'Etat, la loi de 1999 a fixé un seuil de 3 % des suffrages exprimés pour l'admission à la répartition des sièges. Vous proposez 5 %. Nous vous proposons, à titre de repli - et c'est l'objet du présent amendement - tout d'abord 3,5 %.

Il s'agit un peu d'un débat régional et je vous suis reconnaissant d'avoir succédé vos collègues au banc du Gouvernement. C'est un peu à l'image du scrutin : c'est un scrutin régional avec des sections ministérielles. (Sourires.)

Puisque nous abordons maintenant la section ministérielle de la réforme de l'Etat, j'évoquerai ce seuil de 3,5 %. Cet amendement, bien qu'il soit de repli, nous semble important, car il est combiné avec le seuil de 10 % des inscrits qui, lui, est un seuil «couperet », mais ce sera l'objet du débat sur l'article 4. En l'occurrence, il s'agit simplement des suffrages exprimés. Il nous semble nécessaire de permettre à la partie émergente, aux différentes opinions politiques, aux différents courants de participer à la répartition des sièges. Vous allez me rétorquer que nos amendements sont intéressants - je le devine à l'attention que vous portez à mon propos -, mais que, de toute façon, leur intérêt sera limité puisque, ayant exécuté tout le monde en application des dispositions de l'article 4, quelqu'un qui aura survécu aux dispositions de l'article 4 aura nécessairement atteint le seuil de 5 % des suffrages exprimés et participera donc à la répartition des sièges.

Dès lors, vous comprenez le bien-fondé de notre amendement. Nous vous permettons de retrouver l'essence même de votre philosophie politique. En effet, vous pouvez, dans un second temps, vous montrer libéral puisque, dans un premier temps, vous avez fait preuve d'autoritarisme.

M. le président. L'amendement n° 236, présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe Socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans le cinquième alinéa (2°) de cet article, remplacer le pourcentage : "5 %" par le pourcentage : "4 %". »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. A l'Assemblée nationale, les seuils avaient été déclinés beaucoup plus. Pour notre part, nous avons considéré que des différences de 0,5 % permettaient de s'expliquer suffisamment. Cependant, l'esprit même des amendements déposés à l'Assemblée nationale ou de ceux que nous avons présentés ici, c'est de vous montrer que nous ne sommes pas dogmatiques (M. le rapporteur rit),...

M. Jean Chérioux. Oh non !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... nous ne sommes pas sectaires, nous sommes prêts à aller vers vous, à faire des concessions.

M. Henri de Raincourt. C'est vrai ! Les seuils montent !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Puisque vous voulez que l'on passe de 3 % à 5 %, nous vous proposons des seuils intermédiaires. Par cet amendement, nous proposons un seuil intermédiaire, comme vient de le faire notre ami Bernard Frimat avec l'amendement précédent. Nous vous en proposerons d'autres. Nous vous donnons le choix. Nous faisons un pas vers vous. Nous sommes en droit d'attendre que vous en fassiez un vers nous.

Si l'Assemblée nationale avait une autre majorité que celle d'aujourd'hui, il pourrait y avoir une commission mixte paritaire. De nombreuses commissions mixtes paritaires ont abouti parce que les deux assemblées ont fait des efforts l'une envers l'autre. La loi de 1999, par exemple, ne résultait-elle pas d'un accord ?

30670025410Il n'est d'ailleurs pas bien de la part du Sénat, qui prétend vouloir peser, de revenir sur ce qu'il avait obtenu lui-même en commission mixte paritaire, et c'est pourtant ce que vous faites couramment. Mais je ne veux pas ici vous faire trop de reproches puisque j'essaie de vous convaincre de faire un pas vers nous en échange de celui que nous faisons vers vous. Après tout, entre 3 % et 5 %, 4 % est une bonne moyenne.

M. Jean Chérioux. C'est Dreyfus-Schmidt-Jekyll !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pardon, monsieur Chérioux ? Si vous vouliez bien prendre un micro.

M. Jean Chérioux. Mais oui !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Puisque vous voulez m'interrompre, j'accepte bien volontiers.

M. le président. MM. Chérioux et Dreyfus-Schmidt, je vous en prie, laissez-moi présider.

Terminez, monsieur Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si on ne peut pas autoriser un collègue à interrompre, monsieur le président, vous en prenez la responsabilité. (Sourires.)

M. le président. Poursuivez, monsieur Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, je m'en voudrais de vous faire quelque procès que ce soit, mais ne craignez-vous pas d'apparaître comme veillant à ce que les membres de l'UMP n'interviennent pas ? (Nouveaux sourires.) Je le crains.

M. le président. Laissez-moi le soin de présider et n'interprétez pas mes décisions. Poursuivez !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, je vous laisse, bien sûr, présider, mais reconnaissez-moi le droit de poser des questions sur la conduite que vous croyez devoir adopter.

Mme Nelly Olin. Cela n'a rien à voir avec le débat !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Bref, je ne pourrai pas répondre, en tout cas maintenant à M. Chérioux. Aussi, il faudra attendre un autre amendement pour qu'il puisse intervenir et que, ensuite, je lui réponde. Il aurait été plus clair que je puisse lui répondre immédiatement.

Je disais donc, et cela me paraît tout de même indiscutable, qu'entre 5 % et 3 % il y a 4 %. S'arrêter à 4 % paraîtrait une bonne transaction. C'est ce que prévoit notre amendement.

M. le président. L'amendement n° 237, présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Dans le cinquième alinéa (2°) de cet article, remplacer le pourcentage : "5 %" par le pourcentage : "4,5 %". »

La parole est à M. Bernard Frimat.

M. Bernard Frimat. Si je ne craignais de parodier mon ami Michel Dreyfus-Schmidt, je dirais que, de la même manière qu'entre 3 % et 5 %, il y a 4 %, entre 4 % et 5 %, il y a 4,5 %. (Sourires.)

Les ministres qui vous ont précédé, monsieur le secrétaire d'Etat, nous ont expliqué que nos collègues de l'Assemblée nationale avaient eu un comportement qui, si j'ai bien compris, a provoqué une certaine irritation chez le Premier ministre.

En effet, sur ce problème des seuils, sans doute par un souci de détail, ils avaient proposé une déclinaison des seuils par tranche de 0,1 %. Si nous avions fait de même, cela aurait pu effectivement allonger un peu le débat !

Par conséquent, soucieux de respecter des délais qui permettent non seulement de débattre, mais aussi de vaquer éventuellement à d'autres occupations, nous avons décidé de ne proposer que trois seuils.

Chers collègues de l'UMP, je vous sens, dans ce débat, quelque peu « bridés ». C'est peut-être une illusion de ma part, mais j'ai le sentiment que vous fonctionnez comme une cocotte-minute qui lâche de la vapeur. Comme la cuisson est un peu difficile, de temps en temps, vous « sortez » une interjection. Sachez que nous allons essayer de vous aider ! (Sourires.)

Mme Nelly Olin. Quelle sollicitude !

M. Bernard Frimat. Je vois, madame, que vous appréciez et j'en suis presque bouleversé. (Nouveaux sourires.)

Finalement, nous vous donnons le choix. Si nous vous avions proposé, par exemple, deux cents seuils, en calculant au dixième ou au centième près, le choix aurait été beaucoup plus difficile.

Je conçois qu'il faille une grande acuité d'esprit pour choisir entre un seuil de 3,28 % et un seuil de 4,32 %. Le Gouvernement a dû faire de telles simulations, mais il ne veut pas nous les donner.

Avec nous, les choses sont simples : soit 3,5 %, soit 4 %, soit 4,5 %. Monsieur le rapporteur, je m'en remets à votre sagesse : faites en sorte que nous puissions nous accorder sur un seuil et réaliser ainsi un grand moment d'unité dans notre Haute Assemblée. A la limite - peut-être y verrez-vous une certaine légèreté de notre part ! - si vous sous-amendiez l'un de ces trois amendements en proposant quelque chose d'un peu plus compliqué, j'arriverais sans doute à convaincre le président Claude Estier de vous apporter les voix du groupe socialiste. (Sourires.)

Je vous écouterai donc avec beaucoup d'attention.

M. Jean Chérioux. C'est la scène de la tentation !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Je ne suis pas saint Antoine !

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 49 est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

« L'amendement n° 238 est présenté par MM. Domeizel et Frimat, Mme Blandin, MM. Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer l'avant-dernier alinéa (3°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 338 du code électoral. »

La parole est à M. Robert Bret, pour défendre l'amendement n° 49.

M. Robert Bret. Monsieur le secrétaire d'Etat, je salue à mon tour votre arrivée. Les ministres se suivent et le monologue se poursuit.

Mes chers collègues, cet amendement portant sur le 3° de l'article 2 est un amendement de conséquence comme d'ailleurs peut apparaître elle-même comme une conséquence de la rédaction proposée la suppression du cinquième alinéa de l'article L. 338 du code électoral.

Dans ses termes actuels, l'article L. 338 du code électoral dispose que les sièges sont attribués aux candidats dans l'ordre de présentation sur chaque liste. Cela signifie concrètement que la lisibilité du mode de scrutin est évidente. Il s'agit encore aujourd'hui de faire en sorte que les élus désignés soient ceux qui figurent dans l'ordre normal de présentation de la liste. Quand une liste dispose des voix nécessaires pour obtenir cinq ou six sièges dans tel ou tel département, on se situe dans le cas où ce sont les cinq ou six premiers candidats figurant sur la liste déposée qui sont élus.

Cette simplicité des opérations électorales, qui a entre autres avantages de permettre à l'électeur ou à l'électrice d'identifier assez clairement pour qui il vote, est donc battue en brèche par la mise en place du système des sections départementales.

Nous savons bien que le rapport annexé au projet de loi tente désespérément de nous prouver que ce système de section départementale n'aura que peu d'influence sur la prépartition finale des sièges dans chacune des circonscriptions régionales. Mais permettez-nous de douter, une fois encore, de la lisibilité d'un système où finalement les élus seront désignés non plus par les électeurs d'un territoire pertinent, le département, mais par le jeu d'une moyenne arithmétique arbitraire, au niveau de la région. Cette moyenne sera propre à chaque organisation politique. Nous avons eu l'occasion de souligner cet aspect lors de la discussion de l'amendement visant à la suppression de la totalité de cet article, je n'y reviendrai pas.

Evidemment, dans ce contexte, l'amendement que nous déposons est un amendement de conséquence quant aux attendus mêmes du projet de loi et à ses implications concrètes.

Admettez que, dans un mode de scrutin, encore quelque peu marqué par une part de proportionnelle, remplacer le principe de l'élection des candidats en fonction de la place qu'ils occupent sur la liste par le recours à une forme de cooptation - cela se nomme ainsi - plus ou moins guidée par le poids relatif de chaque territoire dans une région donnée, c'est prendre le risque de rendre obscur et peu démocratique le système en question.

Ce n'est vraiment pas le meilleur service que l'on puisse rendre à la décentralisation et à l'affirmation du rôle des régions que l'on tend à promouvoir aujourd'hui !

Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement qui vise à supprimer le 3° de l'article 2.

M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour défendre l'amendement n° 238.

M. Bernard Frimat. L'amendement n° 238 est un amendement de coordination avec la suppression des sections départementales.

En effet, l'objet de cet amendement est de maintenir le cinquième alinéa de l'article L. 338 du code électoral, selon lequel les sièges sont attribués aux candidats dans l'ordre de présentation de la liste.

Vous avez effectivement prévu un système de remplacement particulier. A partir du moment où nous demandons la suppression des sections départementales et le retour à la circonscription régionale, il faut, par coordination, que nous supprimions aussi cette manière de répartir et que nous supprimions en l'espèce le 3° de l'article.

Ayant l'avantage, dirai-je, de pouvoir m'exprimer devant plusieurs membres du Gouvernement, je vais être obligé de réitérer un peu les explications que nous avons présentées. Sinon, même s'il y a une parfaite continuité de pensée au sein de l'équipe gouvernementale - et je ne peux que m'en réjouir pour vous, monsieur le secrétaire d'Etat -, la portée de notre argumentation s'en trouverait affaiblie. C'est le problème que va rencontrer M. Dreyfus-Schmidt, qui va présenter les deux amendements suivants.

J'expliquais tout à l'heure à M. Devedjian pourquoi nous en étions arrivés à la solution du tirage au sort. Cela a apparemment eu comme effet immédiat de le faire partir. J'espère qu'il n'y a pas de rapport entre le fait qu'on ait parlé du tirage au sort et le fait qu'il nous ait quittés à ce moment-là, ce dont d'ailleurs je ne saurais lui tenir rigueur, surtout que vous l'avez immédiatement remplacé et que, en quelque sorte, la permanence de la présence gouvernementale est assurée avec brio. (Sourires.)

Au demeurant, cela nous contraint, alors que nous aurions pu en faire l'économie, à reprendre à la fois notre argumentation et celle de Mme Blandin pour expliquer pourquoi, après avoir réfléchi sur « le plus âgé », le « moins âgé », nous avons choisi le tirage au sort.

Pour ne pas allonger le débat, je m'en tiendrai là, sur ce qui n'est qu'un simple amendement de coordination.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 50 est présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

L'amendement n° 239 est présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Supprimer le dernier alinéa (4°) du texte proposé par cet article pour l'article L. 338 du code électoral. »

La parole est à M. Robert Bret, pour défendre l'amendement n° 50.

M. Robert Bret. L'amendement n° 50 vise à supprimer le dernier alinéa du texte proposé par le Gouvernement pour l'article L. 338 du code électoral.

Je ferai une nouvelle fois remarquer que le texte de cet alinéa n'a été soumis à aucun débat parlementaire avant d'arriver devant notre assemblée.

L'article L. 338 dispose : « Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d'égalité de suffrages, le siège est attribué au moins âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus. »

Avec le nouvel alinéa prévu dans le projet de loi, si une égalité des suffrages survient, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus. Autrement dit, on en revient au droit antérieur à la loi du 19 janvier 1999.

Nous avons déjà longuement discuté à ce propos lors de l'examen de l'amendement n° 47 rectifié, qui concernait une disposition similaire figurant au 1° bis du nouvel article L. 338.

Toutefois, je crois qu'il est bon de revenir sur ce point encore quelques instants.

Nous l'avons déjà souligné, le projet de loi initial avait conservé les dispositions introduites par la loi de 1999 relative à l'élection des conseillers régionaux en ce qui concerne la règle du bénéfice de l'âge.

Ces dispositions tendaient, vous vous en doutez, à favoriser l'émergence d'une classe politique plus jeune.

Elles correspondaient au souci de rajeunir notre vie politique, de la rendre dynamique, attrayante, et donc plus proche de nos concitoyens.

Nous considérons que cela participe pleinement à l'exercice de la démocratie dans notre pays, aussi bien de la part des élus que des citoyens.

Il est important d'essayer de remotiver ces derniers en leur offrant un visage rajeuni de la politique.

Toutefois, d'après M. le rapporteur, « bien que le Conseil constitutionnel ait refusé de la qualifier de principe fondamental reconnu par les lois de la République, la règle du bénéfice de l'âge constitue un principe bien établi en droit électoral qui caractérise tous les scrutins ».

Ainsi, parce que la règle du bénéfice de l'âge constitue un principe de droit électoral caractérisant tous les scrutins, il faudrait rester immobile, figé.

Serait-il donc impossible d'adapter cette règle, de renverser la tendance qui veut que notre vie politique ne se déride guère ?

Vous adoptez une attitude pour le moins crispée sur le rajeunissement que nous proposons, et nous pouvons constater que vous adoptez une attitude similaire en ce qui concerne la parité.

Dans ce domaine, c'est le même problème : vous grincez des dents dès qu'une femme se présente en tête de liste. Et que dire de plusieurs femmes têtes de liste ! Il est vrai que vous préférez payer des amendes plutôt que de respecter le principe de parité.

Pour en revenir à la règle du bénéfice de l'âge, nous contestons vivement votre retour en arrière par rapport à l'avancée, pour le moins attendue, de la loi du 19 janvier 1999.

Le paradoxe de l'évolution démographique veut que, face au vieillissement de la population, les jeunes, qui constituent une partie de la population montant en puissance, se sentent mal représentés ou encore sous-représentés dans la vie politique.

Dois-je rappeler que le droit de vote en France est accordé aux citoyens âgés de 18 ans ?

Qui peut prétendre aujourd'hui représenter une population de cet âge, répondre à ses aspirations, à ses craintes ? A cet âge-là, on peut déjà avoir des inquiétudes en matière économique, sociale et politique.

Il s'agit aujourd'hui de permettre aux élus de représenter le plus justement possible tous nos concitoyens, en permettant un rajeunissement effectif de la vie politique.

C'est pourquoi, mes chers collègues, nous vous demandons de bien vouloir adopter notre amendement.

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 239.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Dans la loi qui avait été adoptée après accord en commission mixte paritaire, lorsqu'il s'était agi soit de départager les listes - c'était l'objet de l'amendement que nous avons présenté tout à l'heure et dont M. le secrétaire d'Etat ici présent n'a pas entendu l'exposé -, soit d'opérer la répartition du dernier siège, nous avions opté pour le plus jeune plutôt que pour le plus ancien.

Vous aviez approuvé cette solution. Mais peut-être avez-vous accepté le principe pour donner une meilleure image de vous avant les élections législatives. En tout cas, nous étions d'accord sur le fait qu'il fallait rompre avec une tradition très ancienne et conservatrice et montrer que l'on souhaitait encourager les jeunes à venir siéger dans les assemblées et se porter candidat. Un accord général était intervenu.

M. Patrice Gélard, rapporteur. Non !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si. Vous avez accepté le principe en commission mixte paritaire.

M. Patrice Gélard, rapporteur. Pas du tout !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Comment, pas du tout ?

M. Patrice Gélard. rapporteur. On ne l'a pas accepté. C'est vous qui l'avez accepté.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si cela figure dans les travaux de la commission mixte paritaire, c'est qu'il y avait eu accord.

M. Patrice Gélard, rapporteur. Non, pas du tout !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. En tout cas, une majorité s'était dégagée.

M. René Garrec, président de la commission des lois. Voilà !

M. Patrice Gélard, rapporteur Ce n'est pas la même chose !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il est tout de même important que l'on ne se déjuge pas et que chacun puisse avoir confiance dans les accords qui ont été passés. Il est bon qu'ils soient maintenus par la suite.

Toujours est-il que cette modification se justifiait parfaitement.

MM. René Garrec, président de la commission des lois, et Patrice Gélrard, rapporteur. Non !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Des anciens, il y en a déjà beaucoup !

Ce matin, nous avons discuté de la limite du nombre des mandats. Il est bien certain qu'avec un scrutin de liste sans panachage ni vote préférentiel, on est élu facilement aux régionales ! Demander, de temps en temps, aux anciens - car les anciens ont des chances d'être aussi des anciens élus - de passer la main aux jeunes, cela n'a rien de choquant. C'est exactement ce que nous avions mis en place avec la loi de 1999.

Voilà qu'aujourd'hui vous remplacez partout « le plus jeune » par « le plus ancien ». Vous n'avez donc pas peur, excusez-moi de vous le dire, du plus acerbe des critiques du Sénat, du plus talentueux aussi, je veux parler de M. Plantu, qui sera sûrement très intéressé de voir que vous tenez beaucoup, vous, sénateurs de la majorité - parce que ce n'est pas notre cas, comme vous le voyez -, à ce que ce soient les plus anciens - qui peuvent être très anciens -, qui soient préférés aux jeunes.

Nous vous demandons donc, mes chers collègues, de supprimer le 4° de cet article et de ne pas persister dans cet attitude qui consiste, de manière dérisoire, à revenir sur une réforme réalisée il y a si peu de temps pour remplacer « le plus ancien » par « le plus jeune ».

M. le président. L'amendement n° 240, présenté par M. Frimat, Mme Blandin, MM. Domeizel, Dreyfus-Schmidt, Estier, Godefroy, Lagauche, Masseret, Peyronnet et Sueur, Mme M. André, MM. Badinter, Courrière, Debarge, Frécon, C. Gautier, Mahéas, Sutour et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :

« Rédiger comme suit le dernier alinéa de cet article :

« 4° Dans la dernière phrase du dernier alinéa, les mots : "moins âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus" sont remplacés par les mots : "candidat tiré au sort". »

La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il s'agit du même problème. Nous allons devoir nous répéter.

Il s'agit d'un amendement de conséquence qui vise à ce que soit appliqué le même principe aux deux cas envisagés dans l'article 2, c'est-à-dire la détermination de la liste qui a obtenu le plus de voix et la répartition du dernier siège.

S'il n'y avait pas eu un changement de ministre, nous nous serions contentés de dire : « Amendement de conséquence par rapport à notre précédent amendement ». Mais, comme ce n'est pas le cas, nous sommes obligés de nous expliquer de nouveau.

Il en a été de même pour la justification de notre amendement visant à modifier le seuil. Nous avons proposé 4 %, ce qui a eu l'air de séduire notre ami M. Chérioux ; qui n'est plus là ; je serais navré qu'il ait été vexé, que M. le président ne lui ai pas donné la parole ; j'espère bien qu'il va revenir pour nous faire part de son sentiment.

M. Henri de Raincourt. Oui, oui !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous avons aussi proposé 4,5 %. Je dois dire que, même si je suis signataire de l'amendement qui contient cette proposition, je suis très réservé, parce c'est aller un peu trop loin, à mon avis, dans la voie des concessions : 3,5 % très bien, 4 % à la rigueur, parce que cela se situe dans la fourchette entre 3 % et 5 % mais, pour 4,5 %, j'émets des réserves.

Nous proposons, monsieur le secrétaire d'Etat - la plupart de nos collègues le savent déjà sauf ceux qui viennent de nous rejoindre entre-temps, car on ne se remplace pas seulement au banc du Gouvernement, on le fait aussi sur les travées de la majorité ! - nous proposons, disais-je, un tirage au sort.

Arrêtons cette querelle des anciens et des jeunes et tirons au sort ! Tous les candidats et toutes les candidates se valent, tous les citoyens et toutes les citoyennes également, bien entendu, et il n'y a aucune raison de ne pas tirer au sort : au contraire, cela montre qu'on respecte les uns et les autres. Aussi, nous vous proposons cette solution, même si c'est une concession de notre part. Nous espérons vous avoir convaincus car ce serait une concession intelligente de votre part que d'adhérer à la concession intelligente que nous vous soumettons.

M. Lucien Lanier. Nous ne sommes pas intelligents !

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 17 est présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste.

L'amendement n° 356 est présenté par M. Pelletier et les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen :

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

« Compléter cet article par un 5° et un 6° ainsi rédigés :

« 5° Dans la première phrase du deuxième alinéa, les mots : "un nombre de sièges égal au quart du nombre des sièges à pourvoir" sont remplacés par les mots : "un nombre de sièges égal au tiers du nombre de sièges à pourvoir" ;

« 6° Dans la deuxième phrase du troisième alinéa, les mots : "un nombre de sièges égal au quart du nombre des sièges à pourvoir" sont remplacés par les mots : "un nombre de sièges égal au tiers du nombre de sièges à pourvoir". »

La parole est à M. Michel Mercier, pour présenter l'amendement n° 17.

M. Michel Mercier. L'amendement n° 17 traite d'un aspect qui n'a pas encore été évoqué dans ce débat sur l'article 2.

Nous l'avons affirmé dès la discussion générale, nous sommes tout à fait favorables à la constitution de majorités stables et cohérentes pour gérer les régions. Notre choix, pour obtenir cette majorité stable, c'est celui de la prime majoritaire. Et cela pour une raison à la fois simple et évidente : la prime majoritaire est accordée à la liste que les électrices et les lecteurs ont placée en tête. C'est bien cette liste que la plus grande partie d'entre eux ont jugée apte à diriger la région. La prime majoritaire permet donc cette adéquation entre les voeux des électeurs et la garantie d'une majorité stable.

En revanche, le système consistant à donner une majorité à la région en excluant des élus par un seuil extrêmement élevé, de 10 % des inscrits, nous paraît tout à fait condamnable en ce qu'il nie le pluralisme. A l'inverse, accorder une prime majoritaire à ceux qui ont été placés en tête, c'est reconnaître que nous n'avons qu'un maître : le suffrage universel.

On nous objecte que, avec le seuil précité, la prime majoritaire correspondant au quart des sièges n'est pas suffisante. Nous sommes donc prêts à proposer, dans la cohérence de notre raisonnement, à aller jusqu'au tiers. Les estimations que nous avons faites - de manière artisanale puisque nous ne disposons d'aucune simulation - nous conduisent à penser qu'avec une prime majoritaire d'un tiers du nombre de sièges, des majorités stables et cohérentes seront assurées dans toutes les régions. En tout cas, ce sont bien les électrices et les électeurs qui auront choisi ceux qui doivent diriger les régions, et non les abstentionnistes, car c'est à cela que conduira finalement l'application d'un seuil de 10 % des inscrits.

Je résume donc notre position, que je crois parfaitement claire et cohérente : oui à la prime majoritaire, oui aux majorités cohérentes de rassemblement, non à des seuils qui excluent le pluralisme.

M. le président. La parole est à M. Jacques Pelletier, pour présenter l'amendement n° 356.

M. Jacques Pelletier. Cet amendement relève de la même philosophie que l'amendement qui vient d'être présenté par notre collègue Michel Mercier.

Nous voulons tous, ici, constituer des majorités dans nos conseils régionaux pour éviter les errements qui se sont produits lors des dernières élections régionales. Nous proposons, pour notre part, d'augmenter la prime majoritaire octroyée à la liste arrivée en tête pour la porter au tiers du nombre de sièges à pourvoir, soit 33 %.

Je rappelle que, pour les municipales, cette prime est de 50 % du nombre de sièges. Nous nous rapprocherions ainsi du système municipal, mais la prime de 33 % nous permettrait certainement d'avoir des majorités bien établies dans l'ensemble de nos conseils régionaux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les vingt-quatre amendements qui viennent d'être défendus ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. Après treize heures de débat et alors que nous n'avons adopté que l'article 1er, nous en arrivons enfin au coeur du sujet.

La commission est naturellement défavorable aux amendements n°s 45 et 225, qui visent à supprimer l'article 2. La réforme du mode de scrutin applicable aux élections régionales est, comme nous l'avons démontré au cours de la discussion générale, indispensable pour permettre aux conseils régionaux de disposer enfin de majorités de gestion stables et cohérentes ainsi que pour assurer une juste représentation des territoires et des citoyens.

M. Claude Estier. C'était le cas avec la loi de 1999 !

M. Patrice Gélard, rapporteur. L'institution des sections départementales au sein des listes régionales répond à l'objectif, défendu avec constance par le Sénat, d'une représentation des territoires par les conseillers régionaux.

Le seuil de 5 % des suffrages exprimés exigé pour l'admission à la répartition des sièges est identique à celui qui a été retenu pour les élections municipales dans les communes de 3 500 habitants et plus. Je rappelle que c'est ce que le Sénat avait voté en 1998.

Monsieur Dreyfus-Schmidt, je suis d'ailleurs obligé de rectifier vos propos : la commission mixte paritaire n'avait pas abouti, et nous nous étions battus pour maintenir le seuil de 5 % des suffrages exprimés, de même que la règle du bénéfice de l'âge au plus âgé des candidats en cas d'égalité des suffrages.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Dont acte !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Je vous remercie !

L'amendement n° 226 remet en cause l'économie de la réforme proposée par le projet de loi.

Je rappelle qu'il s'agit de listes régionales, et non pas départementales. Les électeurs voteront sur une liste régionale, donc aussi pour des candidats qui ne sont pas issus de leur département. Le but des sections départementales est de permettre à l'électeur de se reconnaître dans tel ou tel des candidats de son département ; cela ne signifie nullement qu'il y aura une représentation départementale.

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 226.

L'amendement n° 46 rectifié vise à supprimer le 1° de l'article 2. De la même façon que nous avons refusé tout à l'heure la suppression de l'article 2, nous refuserons celle des différents paragraphes qui composent cet article.

La commission est donc défavorable aux amendements n°s 46 rectifié, 47 rectifié, 48 rectifié, 49 et 50, ainsi qu'aux amendements n°s 227, 228, 231, 233, 238 et 239.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si vous preniez les amendements dans l'ordre, ce serait tout de même plus clair !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Mon souci est de faire gagner du temps !

L'amendement n° 229, qui prévoyait la mention sur chaque liste régionale du département de rattachement des candidats, a été retiré. Puisque nous avons prévu des sections départementales, il était inutile de prévoir sur la liste régionale le rattachement des candidats.

L'amendement n° 230, qui vise à fixer dans la loi la répartition des sièges entre les sections départementales, ne peut, sur le plan technique, être adopté en l'état puisqu'il ne précise pas les modalités de répartition des sièges entre les sections départementales.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Sous-amendez-le !

M. Patrice Gélard, rapporteur. En outre, sur le fond, la solution proposée est contestable, car elle aurait pour effet, à l'instar de ce qui était prévu par le projet de loi initial pour les élections européennes, d'attribuer à la section départementale ayant réalisé le moins bon résultat de la liste régionale un siège dépourvu de tout lien avec les votes des électeurs du département.

C'est la raison pour laquelle la commission rejette également cet amendement.

Avec l'amendement n° 232, nous en venons au problème de l'âge et du tirage au sort.

Cet amendement prévoit que, en cas d'égalité de suffrages, le dernier siège revient à la liste désignée par le sort. Or le tirage au sort n'est pas une règle particulièrement démocratique. Si elle a été utilisée à l'époque de la démocratie athénienne, c'était pour pourvoir les postes dont personne ne voulait !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. La tradition est encore plus ancienne !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Je suis personnellement contre le tirage au sort. Je vous invite d'ailleurs à relire Les Voyages de Gulliver. Dans son troisième voyage, Gulliver découvre une république où les titulaires des fonctions sont désignés par tirage au sort, mais on s'aperçoit bientôt que c'est en réalité une république de fous !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous caricaturez un peu !

M. Patrice Gélard, rapporteur. L'amendement n° 234 est le premier barreau de l'échelle qui va nous mener progressivement de 2,5 % des votants à 4,5 % des suffrages exprimés. M. Dreyfus-Schmidt a défendu avec talent ces amendements successifs. En vérité, le seuil de 5 % est au coeur de ce que nous voulons réaliser sur le plan politique. C'est la position que nous avions défendue en 1998, et c'est celle que nous défendons encore aujourd'hui. C'est aussi ce que les nouvelles démocraties ont remis en place devant les excès qu'entraînent les seuils trop bas.

Voilà pourquoi la commission est défavorable aux amendements n°s 234, 235, 236 et 237.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et voilà pourquoi votre fille est muette !

M. Patrice Gélard, rapporteur. L'amendement n° 240 prévoit un tirage au sort. Je me suis déjà exprimé. Je n'y reviens donc pas : la commission y est défavorable.

Enfin, les amendements n°s 17 et 356, qui tendent à augmenter la prime majoritaire, soulèvent une question intéressante : celle du seuil d'admission à la répartition des sièges.

Dans la version actuelle du projet de loi, avec un seuil fixé à 5 % des suffrages exprimés pour la fusion des listes et un seuil fixé à 10 % des suffrages exprimés pour se maintenir au second tour, il n'y a aucun risque qu'une liste ne puisse pas avoir la majorité absolue, compte tenu de la prime de 25 % des sièges.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous voulez sans doute parler de 10 % des inscrits !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Tout à fait, monsieur Dreyfus-Schmidt, et je vous remercie de m'avoir corrigé. Mais vous comprendrez sûrement que je sois fatigué après être resté si longtemps en séance !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous avons cru que vous nous donniez satisfaction ! (Sourires.)

M. Patrice Gélard, rapporteur. Donc, en plaçant la barre à 10 % des inscrits, il n'y a aucun risque qu'une liste n'atteigne pas la majorité absolue.

En revanche, si nous revenions à une barre moins haute, notamment à celle que prévoyait la loi de 1999, dans laquelle la barre de 5 % des suffrages exprimés permettait à quatre ou cinq listes de se maintenir au second tour, la prime fixée à 25 % serait trop faible.

En vérité, nous sommes là au coeur du sujet, monsieur Mercier, monsieur Pelletier, et la barre de 10 % des inscrits est l'un des choix fondamentaux de ce texte.

Par conséquent, je ne peux malheureusement pas vous donner satisfaction, sauf à être obligé de modifier les seuils d'admission au second tour et de fusion des listes prévus par les articles suivants.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est bien pour cela que cette modification est proposée !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Je me vois donc contraint d'émettre un avis défavorable sur les amendements identiques de M. Mercier et M. Pelletier, à moins qu'ils n'acceptent de les retirer.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat à la réforme de l'Etat. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais d'abord vous dire tout le plaisir que j'éprouve...

M. Serge Vinçon. Il est partagé !

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat. ... à goûter, un instant seulement, les charmes de ce débat, parfois plus passionné que passionnant. (Allons ! Allons ! sur les travées du groupe socialiste.)

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Celui qui vous a précédé au banc a dit qu'il était passionnant !

M. Robert Bret. Vous allez sûrement le rendre passionnant !

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat. Je voudrais tout de suite vous rassurer, monsieur Dreyfus-Schmidt. Croyez bien que l'ensemble des membres du Gouvernement sont parfaitement informés de ce projet dans ses moindres détails. Je crois donc être à même de répondre aux uns et aux autres.

Mme Nicole Borvo. Nous, nous ne disposons pas des simulations !

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat. Par ailleurs, monsieur Dreyfus-Schmidt, puisque, avec votre talent habituel, vous avez évoqué Plantu et son génie, je crains que, si Plantu devait évoquer le débat auquel j'ai eu le privilège d'assister, il ne choisisse, plutôt que de revenir sur le problème du rajeunissement des élus, d'ironiser sur ce qu'on appelait jadis un « train de sénateur », à quoi ressemble fort l'allure à laquelle avance le débat. (Applaudissements sur certaines travées de l'UMP.)

M. Claude Estier. Vous avez prévu deux semaines de débat ! Alors, laissez-nous débattre !

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat. Plus sérieusement, je voudrais répondre globalement aux préoccupations qui ont été exprimées à propos de l'article 2.

Je commencerai par ce qui est anecdotique, à savoir le choix du plus jeune ou du plus âgé.

Je m'étonne que, dans la Haute Assemblée, l'expérience ne soit pas une valeur davantage partagée.

M. Henri de Raincourt. Bravo ! Excellent !

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat. Je le rappelle, la tradition républicaine veut que la préférence aille au plus âgé. C'est d'ailleurs ce qu'a souhaité l'Assemblée nationale.

Mme Nicole Borvo. C'est aussi une tradition chinoise, à en croire M. Gélard !

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat. Selon le Gouvernement, il n'y a aucune raison, sauf à ce que l'ensemble des sénateurs estiment que l'expérience n'a plus de valeur, que nous retenions le plus jeune.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous êtes trop modeste !

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat. Croyez-moi, ce n'est pas en courant après le « jeunisme » que vous ramènerez les jeunes à la vie publique !

En ce qui concerne les sections départementales, il n'existe pas de solution parfaite, puisqu'il faut concilier la circonscription régionale, qui fait l'objet, je crois, d'un quasi-consensus dans cette assemblée, et l'enracinement dans le cadre du département, auquel les électeurs sont très attachés parce qu'il est mieux connu, plus visible et plus proche.

Je crois donc que l'article 2 offre un bon équilibre en maintenant le scrutin dans un cadre régional, en permettant l'émergence de majorités régionales, en prévoyant une répartition des sièges en fonction des résultats régionaux, mais en introduisant des sections départementales pour que les électeurs de chaque département se retrouvent dans la présentation de la liste.

Là encore, je m'étonne que, dans cette assemblée qui représente les collectivités territoriales, et qui est très attachée à cet élément de proximité, d'enracinement dans les terroirs, on puisse remettre en cause ce que je crois être une amélioration objective et équilibrée de la loi, tout en admettant volontiers que, en la matière, aucune solution n'est parfaite.

J'en viens aux nombreux amendements portant sur le seuil de 5 % des suffrages exprimés qui ouvre droit à la répartition des sièges.

Ce débat est tout de même très largement académique, dans la mesure où il est infiniment peu probable que le premier tour permette à une liste d'obtenir la majorité absolue, compte tenu de la diversité des listes, à laquelle, ai-je cru comprendre, vous êtes très attachés, notamment sur les travées de ce qui fut autrefois la majorité plurielle.

Bien entendu, il peut arriver qu'au second tour une liste recueille moins de 5 % des suffrages exprimés. Mais étant donné la barre prévue - y compris dans le projet antérieur, dont nous avons hérité - pour accéder au second tour, il est tout de même très peu probable que ce cas se produise.

En réalité, ce que le Gouvernement a voulu en relevant légèrement le seuil, de telle sorte que cela coïncide d'ailleurs, comme l'a excellemment précisé M. le rapporteur, avec le système qui s'applique aux élections municipales, c'est tout simplement éviter l'éparpillement extrême, la proportionnelle quasi intégrale, dont nous avons pu mesurer les effets dévastateurs lors de la dernière élection présidentielle.

M. Claude Estier. A la présidentielle, il n'y avait pas de problème de seuil !

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat. Du reste, j'ai cru comprendre que le candidat qui portait les couleurs de votre parti, monsieur Dreyfus-Schmidt, regrettait lui-même a posteriori les conséquences de cet éparpillement extrême.

Il serait donc, me semble-t-il, déraisonnable de maintenir le seuil de 3 %. Un tel maintien est en tout cas contraire à la volonté du Gouvernement, lequel veut moraliser le scrutin régional et faire en sorte que ce soit un scrutin efficace, permettant de respecter la diversité, mais permettant aussi aux électeurs de mesurer dans la clarté les conséquences de leur choix pour le futur de leur région.

Enfin, je m'adresserai à MM. Jacques Pelletier et Michel Mercier, qui ont proposé des amendements d'une tout autre nature. L'enjeu est ici particulièrement sérieux, puisqu'il s'agit de porter la prime majoritaire de 25 % à 33 %, au motif très louable - que le Gouvernement partage et qui peut recueillir, me semble-t-il, un consensus sur toutes les travées de la majorité - de garantir dans tous les cas une majorité stable.

Toutefois, je considère qu'il serait excessif, le mieux étant l'ennemi du bien, d'élever à ce point la prime majoritaire, car la liste arrivée en tête obtiendrait alors les deux tiers des sièges, la prime de 33 % et la moitié des 66 % restants. Nous avons estimé, conformément d'ailleurs au projet dont nous avons hérité, qu'il était plus raisonnable d'en rester à la prime de 25 %, système qui est bien connu des électeurs pour les élections municipales.

J'ai bien compris que cet amendement anticipait le débat que nous aurons à l'article 4 à propos du seuil permettant aux candidats d'être présents ou non au second tour. Vous aurez tout le loisir d'avoir alors ce débat et, s'il est aussi animé et prolongé que pour l'article 2, je ne doute pas que vous trouviez là d'autres occasions de faire valoir vos arguments.

Je conclurai en disant, au nom du Gouvernement, que nous avons fait le choix de l'équilibre entre la volonté de s'assurer de vraies majorités pour gouverner les régions - car telle est la préoccupation principale que nous devons avoir au moment où nous avons choisi de renforcer les compétences des régions - et celle de maintenir simultanément la diversité qui fait le charme de notre démocratie et de nos moeurs politiques.

Si j'avais nourri quelque inquiétude sur la difficulté des sénateurs de l'opposition à faire valoir leurs objections, après ce passage parmi vous, qui m'a permis de partager avec vous les charmes de ce débat,...

Mme Nicole Borvo. Les charmes !...

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat. ... je serais maintenant tout à fait rassuré : la démocratie parlementaire permet, au-delà du raisonnable et de la dignité de vos travaux, de faire valoir toutes les objections grâce à la défense d'amendements dont je ne méconnais pas la valeur même si je persiste à croire que certains auraient peut-être pu nous être épargnés. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Alfonsi, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 45 et 225.

M. Nicolas Alfonsi. Je ferai, sur le sectionnement, une observation d'ordre doctrinal. Que M. le secrétaire d'Etat estime que, finalement, les régions représentent des territoires - même si j'ai, moi, le sentiment que le Sénat est bien le représentant naturel des collectivités territoriales - me semble surprenant, d'autant que le Premier ministre s'est efforcé, pendant les six mois qui se sont écoulés avant les assises de la décentralisation, de distinguer deux niveaux de décentralisation : un niveau de cohérence Etat-régions, un niveau de proximité départements-communes.

Réintroduire le département dans les mécanismes d'expression des suffrages au niveau régional me paraît donc assez paradoxal et peu cohérent au moment où la collectivité régionale est érigée en institution par la Constitution.

Par conséquent, je voterai contre le sectionnement.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.

M. Henri Plagnol, secrétaire d'Etat. Monsieur Alfonsi, soyez rassuré : c'est précisément pour concilier la cohérence régionale - et donc la nécessité d'avoir une majorité régionale, de promouvoir le fait régional en régionalisant l'élection - et le niveau de proximité que représente le département, mieux connu des électeurs, plus visible dans les terroirs qui font la vie politique quotidienne, que le Gouvernement vous propose d'introduire des sections départementales.

Voilà qui devrait répondre, monsieur le sénateur, à la préoccupation que vous avez exprimée.

M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.

M. Bernard Frimat. Monsieur le rapporteur, permettez-moi de vous faire la remarque suivante : avec beaucoup de conviction, vous avez dit que cela faisait treize heures que nous débattions des amendements. C'est faux !

« Et nous abordons enfin le sujet », avez-vous ajouté.

J'avais cru comprendre - sinon, ce serait très cruel pour l'intervention très claire de M. de Raincourt - que, dans la discussion générale, nous avions abordé le sujet ! J'avais cru aussi que, en nous exprimant sur les motions de procédure, nous avions abordé le sujet...

M. Patrice Gélard, rapporteur. Je parlais de la discussion des amendements !

M. Bernard Frimat. Sur les amendements, nous connaissons la durée des séances ! Notre mémoire commune - c'est en effet un point sur lequel nous pouvons être d'accord - nous permet d'établir que, hier soir, nous avons travaillé de vingt-deux heures quinze à zéro heure quarante-cinq, soit deux heures et demie, sous la présidence efficace de M. Hoeffel ; que, ce matin, nous avons travaillé de neuf heures quarante-cinq à treize heures, sous la présidence aussi courtoise...

M. Robert Bret. Et aussi efficace ! (Sourires.)

M. Bernard Frimat. ... de M. Vinçon, soit près de trois heures ; que nous avons repris la discussion à seize heures quinze - le temps qu'entre seize heures et seize heures quinze puissent se dérouler les effusions habituelles après les questions au Gouvernement - soit un peu plus de trois heures. Si je fais le calcul, nous en sommes à neuf heures de discussion.

M. Patrice Gélard, rapporteur. Et mercredi après-midi ?

M. Bernard Frimat. Mercredi après-midi, nous avons examiné des motions de procédure et non des amendements, monsieur le rapporteur !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Tout de même !

M. Bernard Frimat. Vous ne pouvez donc pas nous reprocher de ne pas avoir examiné des amendements mercredi après-midi, car le règlement nous autorise à défendre des motions de procédure.

Je crois que, sur ce point au moins, nous pouvons être d'accord, car c'est un constat chronométrique.

Monsieur Plagnol, vous venez de nous rejoindre, et je vous ai dit le plaisir que nous éprouvions à cet égard. Mais lorsque vous nous dites, au-delà de votre argumentaire - dont je salue la cohérence même si je ne partage pas votre analyse - que cela ne va pas vite, je suis obligé de vous répondre qu'il est évident que l'essentiel de vos propositions se trouvent dans les articles 2, 3 et 4 !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Nous sommes d'accord !

M. Bernard Frimat. Comprenez bien qu'il a fallu le temps de permettre à M. Gélard de trouver ses marques (Sourires), qu'il a fallu un petit galop d'essai pour que nous trouvions le bon rythme et pour que nous permettions au Gouvernement de participer à ce débat par relais, selon la nouvelle procédure en vigueur : le témoin gouvernemental étant passé au ministre suivant, il faut qu'à chaque fois nous lui resituions l'ambiance. Tout cela a pris un peu de temps ! (Sourires sur les travées du groupe CRC.)

Cela étant, nous avons déposé moins de deux cents amendements, monsieur le secrétaire d'Etat. Deux cents amendements, est-ce donc un chiffre insupportable pour la majorité et le Gouvernement ? Il vous faudrait alors demander au Président du Sénat de nous proposer une modification du règlement intérieur : nous saurions alors à combien d'amendements nous avons droit ! Quant à nous, nous pensions que deux cents amendements, c'était raisonnable par rapport à douze mille.

M. Hilaire Flandre. C'est vrai !

M. Bernard Frimat. Nous pensions qu'il était également raisonnable de défendre des motions de procédure.

Vous considérez que cela ne va pas vite ? Mais moi, je ne suis pour rien dans la fixation de l'ordre du jour de nos travaux, je m'y plie ! Or je lis, dans l'ordre du jour, que le Sénat aura le temps de débattre puisque vous avez prévu que la discussion aurait lieu mardi, mercredi, jeudi, vendredi, puis mardi prochain, mercredi prochain et, éventuellement, vendredi prochain. De plus, nos collègues de l'UMP ont eu la courtoisie de ne pas déposer d'amendements pour nous permettre de parler plus longtemps afin de pouvoir les convaincre. (Sourires.) Nous avons apprécié ce geste !

Mme Nelly Olin. Merci de le reconnaître !

M. Bernard Frimat. Quoi qu'il en soit, nous en sommes aujourd'hui au deuxième jour de la discussion des amendements.

M. Alain Vasselle. Ce n'est pas une explication de vote !

M. Bernard Frimat. M. Copé, le relayeur précédent - non, pardon, le relayeur qui précédait le relayeur Devedjian - nous a dit ce matin : « C'est lent, c'est lent, c'est lent »...

M. Claude Estier. Mais passionnant !

M. Bernard Frimat. ... mais passionnant, en effet.

M. Alain Vasselle. C'est hors sujet ! Ce n'est pas une explication de vote !

M. Bernard Frimat. Ecoutez-moi, je réponds à M. le rapporteur !

Je voudrais donc simplement, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous nous laissiez le temps.

Je conclurai non pas en parodiant tel ou tel homme célèbre mais en citant ce vieux proverbe picto-charentais que vous connaissez sans doute : « Quand la pente est rude et que la route est droite, le rythme du marcheur ne se détermine que quand on connaît la fin du chemin. » (Rires.)

M. Hilaire Flandre. Il l'a inventé ce matin !

M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, pour explication de vote.

M. Michel Mercier. Tout d'abord, j'indique que nous sommes favorables au sectionnement. Mais encore faut-il savoir ce que recouvre exactement ce terme !

Or, tel qu'il nous est présenté, il s'applique à la présentation des candidats et non pas au nombre de candidats. J'y reviendrai dans un instant, parce qu'il faut être très clair sur ce point.

Partisans d'une rationalisation de l'expression, nous approuvons la fixation du seuil à 5 %. Mais, s'agissant du nombre de conseillers régionaux élus par département, il est bien évident - et je cite là l'excellent rapport de M. Gélard - que « le nombre de candidats par section départementale figurant au tableau n° 7 annexé au code électoral et repris à l'article 5 du projet de loi n'est, comme son nom l'indique, qu'un nombre de candidats ; il ne peut être interprété comme la traduction du nombre de conseillers régionaux ».

Il ne faut pas que les électeurs pensent que le nombre de conseillers régionaux correspondra au nombre de candidats !

Et, comme le rapport de M. Gélard est excellent, je lirai jusqu'au bout ce passage, pour que l'on en apprécie toute la richesse.

« Celui-ci - c'est-à-dire le nombre de conseillers régionaux par département - sera obligatoirement amené à varier en fonction de la démographie et du taux de participation. »

Ce sont donc les suffrages exprimés qui vont déterminer le nombre de conseillers régionaux par département.

J'en arrive tout naturellement à expliquer mon vote sur mon amendement, et comme cela je ne vous importunerai plus par la suite, monsieur le président.

M. le président. Vous ne m'importunez jamais, monsieur Mercier !

M. Michel Mercier. Le texte initial, celui qui a été soumis au Conseil d'Etat, présentait une grande unité. Tous les seuils, tous les mécanismes reposaient sur le nombre des suffrages exprimés, et c'était légitime. Notre démocratie est en effet fondée sur une idée toute simple : ce sont les électeurs volontaires, ceux qui vont voter, qui donnent le pouvoir et qui le délèguent. Ce ne sont pas ceux qui restent chez eux qui décident du sort d'une collectivité !

M. Claude Estier. Très bien !

M. Michel Mercier. Il faut donc - et c'est normal, personne ne peut le critiquer - donner aux suffrages exprimés dans chaque département le pouvoir de déterminer combien ce département comptera de conseillers régionaux, mais ce n'est pas la même chose pour le nombre de candidats !

Ainsi, nous sommes d'accord pour que l'on fixe à 5 % des suffrages exprimés le nombre de voix nécessaire pour obtenir des sièges, nous sommes d'accord aussi pour que des listes ne puissent fusionner qu'à la condition d'avoir obtenu 10 % des suffrages exprimés, mais nous considérons que vous avez commis une erreur - ou peut-être est-ce la conséquence d'un excès d'enthousiasme - lorsque, le 28 janvier au matin, vous avez remplacé l'expression : « 10 % des suffrages exprimés » par « 10 % des inscrits. »

La cohérence même du texte en a été compromise, et il faudra la rétablir lors de l'examen de l'article 4.

M. Pelletier et moi-même avons donc été conduits à déposer des amendements concordants, visant à donner une vraie majorité aux régions. Lorsque vous les aurez adoptés, mes chers collègues, la cohérence du projet sera restaurée, puisqu'il sera de nouveau nécessaire qu'une liste recueille 10 % des suffrages exprimés - et non des inscrits - pour pouvoir se maintenir au second tour.

M. Emmanuel Hamel. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Nicole Borvo, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo. Viser ici le nombre des inscrits et non plus celui des suffrages exprimés risque, je l'ai dit hier en défendant la question préalable, de nous conduire à une situation très curieuse. En effet, le nombre de suffrages non exprimés modifiera nécessairement, dans ces conditions, la représentation des suffrages exprimés. Or je trouve choquant que les abstentionnistes puissent, en quelque sorte, modifier la représentation des électeurs qui se sont exprimés.

Mais j'en viens aux conditions dans lesquelles se déroule notre discussion.

Depuis le début, ce débat montre à l'évidence qu'il y a, d'un côté, l'UMP, qui veut à tout prix cette réforme et, de l'autre, les autres groupes, qui n'en veulent pas... ou qui ne la veulent pas tout à fait.

La majorité sénatoriale nous a dit qu'elle voulait un débat dans cette enceinte, mais nous sommes obligés de constater que ce débat n'est pas tout à fait contradictoire, puisque certains ne s'expriment pas, même s'ils sont sans doute représentés par M. Gélard et par le Gouvernement.

Monsieur le secrétaire d'Etat, vous n'aimez pas le jeunisme, mais vous avez l'avantage d'être jeune. Permettez-moi donc de vous rappeler - peut-être ne le savez-vous pas - que nous avons eu au Sénat de longues semaines de débat sur le quinquennat, c'est-à-dire sur le passage du mandat présidentiel de sept à cinq ans. C'était absolument indispensable ! Aujourd'hui, on nous propose une modification du mode de scrutin pour les élections régionales et les élections européennes qui risque de pousser notre pays au bipartisme, ce qui est absolument contraire à nos traditions. Vous conviendrez donc qu'il est normal que nous considérions que quelques heures de débat sérieux sont nécessaires, et que nous n'acceptions pas d'être brocardés parce que nous travaillons lentement.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Patrice Gélard, rapporteur. Je veux simplement répondre aux propos que M. Frimat a tenus tout à l'heure.

Maladroitement, je l'admets, j'ai pris en compte les heures qui ont permis de discuter les motions de procédure en parlant de 13 heures.

Cela dit, au cours des neuf heures quinze restants, nous avons statué sur trente-cinq amendements, soit quatre amendements à l'heure. Nous sommes en train de battre des records de lenteur !

Mme Hélène Luc. Ce n'est pas la première fois que cela se produit !

M. Patrice Gélard, rapporteur. Vous avez parlé de 200 amendements déposés. Je répondrai que les références au Sénat en matière de dépôts d'amendements sur les lois électorales sont tout à fait convaincantes.

Quand on reprend l'ensemble des lois électorales que nous avons discutées depuis une dizaine d'années, on constate par exemple que, sur la loi du 5 février 1994, 22 amendements avaient été déposés au Sénat, dont 18 adoptés et 16 retenus par l'Assemblée nationale ; sur la loi du 19 janvier 1995, dont le projet initial comportait 22 articles, 42 amendements avaient été déposés au Sénat, dont 12 adoptés, 12 retenus par l'Assemblée nationale ; sur la loi du 20 janvier 1995 relative au financement de la campagne présidentielle, un amendement avait été déposé, qui n'a pas été adopté ; sur la loi du 19 janvier 1999, que nous évoquons actuellement, dont le projet comportait 24 articles, 53 amendements avaient été déposés, et aucun n'a été adopté, en raison du vote de la question préalable en première lecture. En nouvelle lecture au Sénat, 36 amendements avaient été déposés, dont 32 ont été adoptés, mais aucun n'a été retenu par l'Assemblée nationale. Nous étions dans l'opposition, mais nous étions raisonnables en ne proposant que 36 amendements. Sur la loi du 6 juin 2000 sur l'égal accès des hommes et des femmes aux mandats électoraux, dont le projet comportait 15 articles, 39 amendements avaient été déposés au Sénat, dont 21 adoptés et 6 retenus par l'Assemblée nationale. Enfin, sur la loi relative à l'élection des sénateurs, 21 amendements avaient été déposés, dont 14 adoptés et 6 retenus par l'Assemblée nationale.

M. Claude Estier. Que voulez-vous démontrer ? N'a-t-on plus le droit de déposer des amendements ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. Je veux démontrer que, en matière de lois électorales, qu'il soit dans l'opposition ou dans la majorité, le Sénat a toujours été raisonnable en ce qui concerne le nombre d'amendements déposés.

M. Claude Estier. Deux cents amendements, n'est-ce pas raisonnable ?

M. Patrice Gélard, rapporteur. Je n'ai pas dit cela !

M. Claude Estier. Qu'est-ce que vous voulez démontrer ?

Mme Nicole Borvo. Il faut modifier le règlement, ce sera plus simple !

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 45 et 225.

Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...

Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.)111313313157115198 Je mets aux voix l'amendement n° 226.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote sur l'amendement n° 227.

M. Bernard Frimat. L'amendement n° 227 vise à supprimer le deuxième alinéa de l'article 2. Il a pour objet de maintenir l'élection des conseillers régionaux dans la circonscription régionale. Je vais tenter d'expliquer les raisons pour lesquelles nous demandons cette suppression.

Si j'ai bien compris, pour la section départementale, vous fondez votre argumentation sur la proximité, l'ancrage. Les électeurs pourraient ainsi identifier plus facilement les conseillers régionaux.

C'est sans doute vrai dans les Alpes-de-Haute-Provence, en Lozère ou en Ariège, où les sections départementales sont modestes.

M. Hilaire Flandre. Dans les Ardennes aussi !

M. Bernard Frimat. Mais pour ma région, qui a deux départements et 113 conseillers régionaux, soit 72 dans le Nord et 41 dans le Pas-de-Calais, passer à 74 et 43 ne change rien !

Pensez-vous véritablement que, sur des effectifs de cette dimension, vous allez gagner en proximité et que les électeurs connaîtront nettement mieux les candidats du coeur de la liste régionale, entre le cinquantième et le quatre-vingtième rang ? Votre argument ne me paraît pas fondamentalement pertinent.

Ce n'est pas faire injure aux conseillers régionaux, qu'ils soient élus demain dans des sections départementales, dans des grands départements peuplés et avec beaucoup de candidats, ou dans des sections régionales, que de dire que leur notoriété - comment puis-je formuler ma remarque pour ne pas être désagréable ? - ouvre une certaine capacité d'optimisation des résultats. (Sourires.)

A partir de ce moment-là, il nous semble préférable de privilégier jusqu'au bout la circonscription régionale, de façon à renforcer l'idée d'appartenance à une région. C'est pourquoi nous vous demandons la suppression du 1° de l'article 2. (M. Hilaire Flandre s'exclame.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 227.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 228.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 230.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 47 rectifié et 231.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 232.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Mes chers collègues, vraiment, M. le rapporteur n'est pas sérieux.

Tout ce qu'il a trouvé à nous dire, c'est que le tirage au sort est une tradition très ancienne. Je me suis alors dit : lui qui aime la tradition, il va être pour ! Mais pas du tout ! Son objectif, c'était de caricaturer notre position. Il nous a dit qu'à Athènes, ou dans Swift, tous les emplois publics étaient tirés au sort, ce qui n'a aucun rapport avec les fonctions de conseiller régional.

Il ne faut pas nous prendre pour des fous, mais pour ce que nous sommes, des gens sérieux. Nous n'avons pas, comme vous, l'oeil rivé sur le chronomètre.

Nous vous avons fait une proposition sérieuse. Nous vous en ferons d'autres d'ailleurs tout à l'heure, car votre attitude, qui consiste à ne donner aucune explication à vos refus d'adopter les amendements que nous soumettons à votre examen, nous oblige à reprendre la parole.

Avec cet amendement n° 232, le moins que l'on puisse dire, c'est que nous proposons une position intermédiaire qui mérite que vous la preniez en considération.

La vérité est que, même lorsque nous sommes dans le cadre dans lequel vous voulez arbitrairement enserrer cette loi, vous ne voulez rien savoir. Vous avez décidé de ne faire aucune concession.

Aujourd'hui, c'est le Gouvernement qui doit faire la loi et c'est effectivement ce qui se passe depuis la rentrée parlementaire. Vous le savez bien et vous vous alignez. Le Sénat n'a plus de rôle. (M. Hilaire Flandre s'exclame.)

Il faudrait qu'on en arrive, dès lors que les deux assemblées sont du même avis, à supprimer les CMP pour les remplacer par l'UMP... (Rires.)

M. Patrice Gélard, rapporteur. C'est un bon mot.

M. Hilaire Flandre. Proposez un amendement en ce sens !

M. Claude Estier. Heureusement que nous sommes là pour vous distraire !

M. René Garrec, président de la commission des lois. Il y a des droits d'auteur !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je dois à la vérité de dire que le mot n'est pas de moi, qu'il est de mon ami Bernard Frimat. Je lui rends ce qui lui appartient !

On pourrait aussi supprimer complètement le Sénat, dès lors que la chambre haute s'aligne automatiquement sur la position de l'Assemblée nationale.

Mme Nicole Borvo. Cela ferait gagner du temps !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. On pourrait supprimer le Sénat, au moins quand sa majorité concorde avec celle de l'Assemblée nationale.

Mme Nicole Borvo. Ce serait dommage !

M. René Garrec, président de la commission des lois. Oui !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ce serait dommage, parce que le Sénat peut jouer son rôle...

M. Hilaire Flandre. Il le fait !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... même lorsque la même majorité siège à l'Assemblée nationale. Mais, pour cela, il faudrait que vous le remplissiez, que vous procédiez à un examen sans préjugés et que vous cherchiez à améliorer la loi quelle qu'elle soit, comme c'est votre devoir.

Vous faites du mauvais travail et, finalement, cela se retournera contre le Sénat, car le public finira bien par le savoir, même si notre travail n'est pas très médiatique et si l'excellent rapport de M. Gélard, par exemple, n'a retenu l'attention d'aucune chaîne de télévision, d'aucun journal.

M. Patrice Gélard, rapporteur. Je suis passé à la télévision à quatre reprises !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pardon, j'oubliais la chaîne parlementaire ! Mais, à part elle, notre travail n'intéresse personne. Vous pouvez vous plaindre, c'est ainsi.

Nous ne demanderons pas de scrutin public, parce que nous sommes gentils et que nous ne voulons pas faire durer le débat plus qu'il n'est raisonnable, c'est-à-dire au-delà de vendredi prochain. Je vous demande tout de même d'adopter l'amendement n° 232.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 232.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 48 rectifié et 233.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 234.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Peut-être vous souviendrez-vous nous avoir entendu dire qu'entre le nombre de suffrages exprimés et le nombre d'électeurs inscrits, il pouvait y avoir d'autres notions, comme celle du nombre des votants.

Monsieur le rapporteur, si vous aviez donné votre avis sur les amendements en respectant l'ordre de la discussion, vous n'auriez pas oublié l'amendement n° 234, sur lequel ni vous, ni le Gouvernement d'ailleurs, n'avez donné aucune explication.

Nous aurions aimé que vous nous disiez au moins ce que vous pensez de la notion de votant, nous aurions aimé que vous preniez en considération cette notion et que vous calculiez le seuil, en vous fondant sur elle.

Puisque vous ne nous avez pas donné votre avis, vous m'obligez à reprendre la parole. Mais parce qu'il est tard et parce que l'on veut vous être agréable, dans ce cas encore, nous ne demanderons pas de scrutin public. (Ah ! sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 234.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 235.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 236.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. J'aurais aimé que M. le rapporteur nous expliquât pourquoi « le fin du fin » c'est 5 %, et non 5,1 %, 5,2 % ou 4,8 %.(Rires sur les travées du groupe socialiste et groupe CRC.)

Notre proposition méritait un meilleur sort, d'autant qu'elle traduisait un effort de notre part pour chercher un consensus...

M. Henri de Raincourt. Un accord !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. ... dont je vous ai entendu dire qu'il était nécessaire en matière électorale.

Mme Nicole Borvo. Absolument !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si nous sommes aussi fâchés, si nous nous battons tant, c'est justement parce que vous ne cherchez pas le consensus. Vous avez fait semblant avant, cela a été dit, lorsque le Conseil d'Etat a été appelé à vous donner son avis, mais, après, vous avez tourné le dos, et vous abusez maintenant de votre force. (Murmures sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)

Ne croyez pas que cela échappe aux citoyens et aux citoyennes ! (Rires sur les mêmes travées.)

M. Hilaire Flandre. La presse n'en parle pas !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Certes, la presse n'en parle pas beaucoup, je l'ai dit tout à l'heure, mais cela ne fait rien, cela se voit, cela se sait, que vous abusez de votre force. Profitez-en avant que vous n'éclatiez en chapelles, comme cela ne va pas tarder à arriver. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Quand je dis profitez-en, c'est une façon de parler, car vous avez tort de le faire ; il n'est jamais bon d'abuser d'une situation dominante.

M. Henri de Raincourt. C'est vrai !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Oui, votre conduite constitue un abus de situation dominante. Vous ne voulez pas bouger des 5 %, vous ne voulez bouger de rien. C'est le Gouvernement qui fait la loi, c'est lui qui a décidé quels amendements seraient retenus avec le 49-3. Vous avez obéi jusqu'à présent en acceptant que le Sénat ne dépose aucun amendement. Vous en prenez la responsabilité, en attendant, si vous voulez voter l'amendement n° 236, ne vous gênez pas !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 236.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 237.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous le retirons, monsieur le président. (Rires.)

M. le président. L'amendement n° 237 est retiré.

Les amendements identiques n°s 49 et 238 n'ont plus d'objet.

Je mets aux voix les amendements identiques n°s 50 et 239.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 240.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques n°s 17 et 356.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, nous demandons une suspension de séance.

M. le président. Nous allons donc interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue, à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Serge Vinçon.)