Mme Marie-Hélène des Esgaulx, rapporteur spécial

III. LES RELATIONS FINANCIÈRES ETAT-AFITF

A. UN BUDGET LARGEMENT ALIMENTÉ PAR L'AFITF

L'AFITF a été créée en 2004 et ses missions sont définies par l'article 1 er du décret n° 2004-1317 du 26 novembre 2004 ( cf. encadré). L'Agence, un établissement public administratif purement financier et comptablement « transparent » pour l'Etat, est l'opérateur de référence du programme 203 et assure toujours la majeure partie du financement des infrastructures terrestres et maritimes .

L'Agence de financement des infrastructures de transport de France
Article 1 er du décret n° 2004-1317 du 26 novembre 2004 relatif à l'Agence de financement des infrastructures de transport de France

Il est créé un établissement public national à caractère administratif dénommé « Agence de financement des infrastructures de transport de France », doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière.

L'établissement, placé sous la tutelle du ministre chargé des transports, a pour mission de concourir, dans le respect des objectifs du développement durable et selon les orientations du Gouvernement, au financement :

a) De projets d'intérêt national, international ou ayant fait l'objet d'un contrat de plan ou d'une convention équivalente entre l'Etat et les régions, relatifs à la réalisation ou à l'aménagement d'infrastructures routières, ferroviaires, fluviales, portuaires, y compris les équipements qui en sont l'accessoire indissociable, d'ouvrages de défense contre la mer, ainsi qu'à la création ou au développement de liaisons ferroviaires, fluviales ou maritimes régulières de transport de fret ;

b) De projets relatifs à la création ou au développement de transports collectifs de personnes, y compris l'acquisition des matériels de transport ;

c) Des concours publics dus, au titre de l'Etat, au titulaire du contrat de partenariat prévu à l'article 153 de la loi du 27 décembre 2008 susvisée.

Pour l'exercice de ses missions, l'établissement accorde des subventions d'investissement et des avances remboursables, apporte des fonds de concours et participe au financement des investissements prévus par des contrats de partenariat au sens de l'ordonnance du 17 juin 2004 susvisée. Lorsque des avances remboursables sont accordées aux opérateurs du secteur concurrentiel, elles sont consenties à titre onéreux. Elles financent des opérations spécifiques et présentent un caractère exceptionnel. L'établissement peut également fournir des aides au démarrage pour les liaisons maritimes régulières de transport de fret.

L'AFITF présente la particularité d'être à la fois un opérateur du programme 203 mais également un de ses principaux « pourvoyeurs », par l'utilisation de fonds de concours ( cf. encadré).

Les fonds de concours

Aux termes de l'article 17 de la LOLF, « les fonds de concours sont constitués [...] par des fonds à caractère non fiscal versés par des personnes morales ou physiques pour concourir à des dépenses d'intérêt public [...]

« Les fonds de concours sont directement portés en recettes au budget général [...] .

« Les recettes des fonds de concours sont prévues et évaluées par la loi de finances . [...]

« L'emploi des fonds doit être conforme à l'intention de la partie versante . À cette fin, un décret en Conseil d'Etat définit les règles d'utilisation des crédits ouverts par voie de fonds de concours ».

L'AFITF est financée par un ensemble de taxes affectées : la taxe d'aménagement du territoire (TAT), acquittée par les sociétés autoroutières ; la redevance domaniale, acquittée par les mêmes redevables ; une fraction des amendes radars ; et enfin l'éco-taxe poids lourds. Depuis plusieurs années, l'Etat apporte une subvention d'équilibre compte tenu du report de l'entrée en vigueur de l'éco-taxe. Pour 2014, cette subvention est établie (avant « suspension » de l'éco-taxe) à 334 millions d'euros .

Au total, le budget de l'AFITF devrait s'élever autour de 2 200 millions d'euros en 2014 .

Au sein de cette somme, une grande partie est reversée à l'Etat sur le programme 203 . En 2012, près de 65 % de son budget a ainsi été transféré.

En 2014,

le programme 203 porte environ 5 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 5,6 milliards en crédits de paiement (CP). Il devrait à nouveau recevoir d'importants fonds de concours, de l'ordre d'1,4 milliard d'euros en AE et 1,9 milliard d'euros en CP , soit respectivement 27 % des AE et 35 % des CP .

Les fonds de concours proviennent majoritairement de l'AFITF et, pour le solde, des collectivités territoriales. Il faut en particulier relever que l'action 1 du programme « Développement des infrastructures routières » est exclusivement financée par des fonds de concours.

Fonds de concours inscrits sur le programme 203

AFITF

Collectivités territoriales

TOTAL

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Action 1 - Développement des infrastructures routières

368,0

753,0

230,0

357,0

597,5

1 109,3

Action 10 - Infrastructures de transports collectifs et ferroviaires

395,0

429,6

395,0

429,6

Action 11 Infrastructures fluviales, portuaires et aéroportuaires

36,0

65,0

36,0

65,0

Action 12 - Entretien et exploitation du réseau routier national

271,0

325,0

5,0

5,0

276,0

330,0

Action 13 - Soutien, régulation, contrôle et sécurité des services de transports terrestres

54,0

38,9

54,0

38,9

Action 14 - Soutien, régulation et contrôle dans les domaines des transports fluviaux, maritimes et aériens

15,8

5,8

15,8

5,8

Action 15 - Stratégie et soutien

1,8

1,8

1,8

1,8

Total

1 141,6

1 619,1

235,0

362,0

1 376,1

1 980,3

Source : projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances pour 2014

Au final, les relations financières entre l'Etat et l'AFITF, retracées dans le schéma ci-dessous, font apparaître un entrecroisement des lignes de crédit. Pour être tout à fait complet, il faudrait d'ailleurs ajouter à ce graphique RFF et VNF qui, outre leurs ressources propres, perçoivent des subventions de la part de l'Etat et de l'AFITF. Au total, près de 10 milliards d'euros seront investis en 2014 dans les infrastructures de transports .

Relations financières entre l'Etat et l'AFITF

(en millions d'euros)

Taxes affectées

TAT

566

Budget Etat

Eco-taxe

760

Subvention d'équilibre

334

Redevance domaniale

300

Amendes radars

250

AFITF

1876

2 210

Fonds de concours

Action 1

Action 10

Action 11

Action 12

Action 13

Action 14

753

430

65

325

35

5,8

TOTAL

1 619,1

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires et les réponses au questionnaire budgétaire

B. DES ENGAGEMENTS IMPORTANTS

Par nature, les interventions de l'AFITF s'inscrivent dans un cadre pluri-annuel : lorsqu'elle participe au financement d'une infrastructure, les montants engagés sont décaissés sur plusieurs exercices. L'Agence compte environ 16 milliards d'euros de crédits engagés mais non décaissés .

Cette somme est particulièrement élevée, au point que la Cour des comptes s'est inquiétée de la soutenabilité budgétaire de l'opérateur. Lors de leurs auditions devant votre rapporteur spécial, le président de l'AFITF et le DGITM ont admis que les possibilités de l'Agence pour engager de nouveaux projets seraient contraintes au moins jusqu'en 2015 . En tout état de cause, ils ont également fait valoir que les projets de grande ampleur, tels que les LGV Atlantique, Pays-de-Loire-Bretagne, Est ou encore le contournement Nîmes-Montpellier ont d'ores et déjà été engagés.

Les nouveaux projets présentés à l'Agence dans les mois qui viennent devraient être d'une ampleur moins substantielle, lui permettant de s'engager sans compromettre sa capacité à décaisser les crédits résultant d'engagements antérieurs.

Néanmoins, comme indiqué précédemment, cette situation n'est viable qu'à la condition que la suspension de l'éco-taxe soit compensée auprès de l'AFITF. Dans le cas contraire, tous les projets nouveaux devraient purement et simplement être reportés .