M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial

PREMIÈRE PARTIE :
UN TROISIÈME PROGRAMME D'INVESTISSEMENTS
D'AVENIR LANCÉ SANS CRÉDIT DE PAIEMENT

I. UN NOUVEAU PROGRAMME S'INSCRIVANT EN APPARENCE DANS LES PAS DES PRÉCÉDENTS

A. 10 MILLIARDS D'EUROS S'AJOUTANT AUX 35 MILLIARDS D'EUROS DE 2010 ET AUX 12 MILLIARDS D'EUROS DE 2014

1. Un financement exceptionnel et sanctuarisé, au service de l'investissement public...

Le troisième programme d'investissements d'avenir (PIA 3), annoncé par le Président de la République en mars 2015 et ayant fait l'objet d'une communication en Conseil des ministres le 22 juin 2016 1 ( * ) , s'inscrit dans le prolongement direct des deux précédents PIA.

a) Deux programmes représentant 47 milliards d'euros désormais contractualisés à plus de 80 % et dont les premiers résultats sont globalement salués

Pour mémoire, le PIA 1 a été instauré par la première loi de finances rectificative pour 2010 2 ( * ) , avec 35 milliards d'euros consacrés à ce grand « emprunt national ». Le Gouvernement de l'époque s'appuyait ainsi sur le rapport de MM. Alain Juppé et Michel Rocard, co-présidents de la commission chargée de mener une réflexion sur les investissements porteurs d'avenir 3 ( * ) .

Un deuxième PIA de 12 milliards d'euros est venu le compléter lors de l'examen de la loi de finances initiale pour 2014 4 ( * ) .

Destinés à relancer l'investissement public dans les secteurs et les projets à fort potentiel pour l'avenir, les PIA 1 et 2 interviennent dans un nombre important de domaines sectoriels mais concentrent toutefois l'essentiel de leurs crédits sur les missions « Recherche et enseignement supérieur » (27,2 milliards d'euros) et « Économie » (9,9 milliards d'euros).

Si elles ont vocation à soutenir l'investissement, les dotations du PIA n'entrent pas nécessairement dans la catégorie des investissements au sens de la comptabilité nationale et peuvent notamment couvrir des dépenses de fonctionnement.

Comme l'indique le projet annuel de performances ainsi que le rapport de présentation du programme publié en juin dernier, lors de la communication au conseil des ministres, le PIA « obéit à trois mots d'ordre qui en font la marque : l'excellence, l'innovation et la coopération ».

Répartition par mission des crédits des PIA 1 et PIA 2

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat

Lors de sa création, le premier programme d'investissements d'avenir avait été qualifié par le rapporteur général de la commission des finances de l'époque, Philippe Marini, d'« opération originale aussi bien sur le plan opérationnel que sur le plan institutionnel » 5 ( * ) . En effet, comme cela sera présenté plus en détail dans la suite du présent rapport, il repose sur des modalités de gestion et de gouvernance éloignées des pratiques habituelles 6 ( * ) .

Au 30 juin 2016, 38,6 milliards d'euros sont engagés et 38,2 milliards d'euros contractualisés sur l'enveloppe globale qui s'établit à 46,9 milliards d'euros.

L'engagement correspond pour 23,8 milliards d'euros à des dotations consommables et le reste (14,8 milliards d'euros) à des dotations non consommables 7 ( * ) .

15,5 milliards d'euros ont été décaissés, dont 1,9 milliard d'euros d'intérêt sur dotations non consommables.

80 % de l'enveloppe globale des PIA 1 et 2 sont désormais engagés et contractualisés , même si ce chiffre cache des situations contrastées selon les actions.

Évolution de la situation financière des investissements d'avenir
depuis 2010

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du Commissariat général à l'investissement (CGI)

Même s'il est encore tôt pour évaluer véritablement l'efficacité de la dépense publique, il apparaît, notamment à la suite des travaux du comité d'examen du PIA issu de France Stratégie 8 ( * ) que cette « initiative originale produit des effets positifs, à la fois quantitatifs et qualitatifs », même si des dérives ont également été mises en exergue, notamment par la Cour des comptes 9 ( * ) , s'agissant de ses modalités de mise en oeuvre (substitution de crédits budgétaires par exemple) mais aussi de l'utilité des fonds engagés (effet de levier vis-à-vis des financements privés, défaillances de marché à pallier...).

b) Un PIA 3 doté de 10 milliards d'euros d'autorisations d'engagement principalement tourné vers l'enseignement supérieur et la recherche, la valorisation de la recherche et l'innovation

Le présent projet de loi de finances pour 2017 prévoit un troisième PIA (PIA 3), pour un montant de 10 milliards d'euros en autorisation d'engagement , tourné vers la modernisation de l'économie, en axant son action sur l'enseignement supérieur et la recherche, la valorisation de la recherche et l'accélération de la modernisation de l'entreprise par l'innovation.

Le Gouvernement ayant décidé de faire du PIA 3 une mission budgétaire propre 10 ( * ) , les trois priorités retenues font l'objet de trois programmes distincts : programme 412 « Soutien des progrès de l'enseignement et de la recherche » (2,9 milliards d'euros), programme 422 « Valorisation de la recherche » (3 milliards d'euros) et programme 423 « Accélération de la modernisation des entreprises » (4,1 milliards d'euros).

Par ailleurs, 60 % du PIA, soit 6 milliards d'euros, devront contribuer au développement durable et à la croissance verte . Ce principe s'inscrit dans la droite ligne du PIA 2 qui imposait déjà le respect de l'éco-conditionnalité pour 50 % de ses crédits.

Source : commission des finances d'après le projet annuel de performances de la mission « Investissements d'avenir »

Si certains domaines sont davantage investis dans le cadre de ce programme que pour les deux précédents, à l'instar de la formation initiale et continue à travers l'expérimentation d'innovations pédagogiques ou encore la santé, notamment dans le secteur de la recherche, il apparaît qu'il tend surtout à poursuivre, consolider voire renforcer certaines des actions déjà engagées, comme par exemple les structures instaurées et financées par les investissements d'avenir, les Initiatives d'excellence (Idex), les Instituts hospitalo-universitaires (IHU) et les sociétés d'accélération du transfert de technologie (SATT).

Les thématiques sectorielles les plus concernées sont le numérique et le développement durable, ce qui semble logique au regard de l'objectif d'y consacrer 60 % des crédits, mais aussi l'éducation, la santé, l'agroalimentaire, les transports ou encore le tourisme.

2. ...qui s'ajoute en principe aux crédits budgétaires...
a) Le principe d'additionnalité des crédits...

En principe, les programmes d'investissements d'avenir prévoient des financements exceptionnels qui s'ajoutent aux crédits budgétaires habituellement prévus. Répondant au principe d'additionnalité, ils ne doivent donc pas se substituer à des crédits budgétaires puisqu'ils visent à aller « au-delà des actions poursuivies par les ministères dans le cadre budgétaire habituel » 11 ( * ) .

b) ... toutefois inégalement respecté par les PIA 1 et PIA 2

Si cette règle constitue l'une des principales caractéristiques des programmes d'investissements d'avenir, il n'en demeure pas moins qu'elle a pu être mise à mal en pratique, depuis 2010.

S'agissant de la recherche, l'importance des financements issus des PIA a pu avoir pour effet de justifier la baisse des crédits budgétaires alloués à l'Agence nationale de la recherche (ANR) au cours des dernières années.

Ainsi, dans son rapport au titre de la loi de finances pour 2016, Michel Berson, rapporteur de la mission « Recherche et enseignement supérieur » pour les crédits de la recherche, avait mis en évidence la diminution récurrente des crédits d'intervention de l'ANR depuis 2012, en partie justifiée par le Gouvernement par le fait que, « parallèlement, des financements sur projets ont été alloués dans le cadre de différentes actions des programmes d'investissements d'avenir , avec une durée de réalisation de 9 à 10 ans. La plupart de ces actions sont également opérées par l'ANR ».

Évolution des crédits d'intervention de l'ANR entre 2012 et 2016

(en millions d'euros)

2012

2013

2014

2015

PLF 2016

Crédits d'intervention LFI (AE)

728,9

656,2

575,2

575,1

555,1

Variation en valeur

-22,9

- 72,7

- 81,0

-0,1

-20

Variation en pourcentage

-3,1%

- 10,0 %

-12,3 %

-3,5 %

Source : réponse du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche au questionnaire de Michel Berson, rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur - Examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016, dans le rapport précité n° 164 (2015-2016)-tome III-Annexe 24

En outre, comme cela sera évoqué plus loin et mis en évidence par les rapports ayant évalué les premières années de mise en oeuvre des investissements d'avenir 12 ( * ) , il existe un risque à ce que les dotations du PIA soient employées pour opérer des « débudgétisations ». Indépendamment de la légitimité des dépenses concernées, la question s'est notamment posée dans le cadre de l'application du programme « Habiter mieux », les crédits du Fonds d'aide à la rénovation thermique (Fart) complétant les subventions de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) pour la rénovation énergétique des logements privés des ménages modestes. De même, l'action « Innovation numérique pour l'excellence éducative », créée par voie de redéploiement opéré dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2015 du 29 décembre 2015 13 ( * ) et désormais dotée de 168 millions d'euros, contribue au plan numérique à l'école en fournissant notamment un outil numérique à l'ensemble des collégiens d'ici 2018 14 ( * ) .

Ainsi en est-il également pour les actions où les dotations qui prennent le relai de crédits budgétaires pour le financement de projets préexistants. Ce fut le cas pour les projets de recherche nucléaire, avec les actions « Réacteur de 4 eme génération » (627 millions d'euros) et « réacteur Jules Horowitz » (248 millions d'euros), pour le fonds démonstrateur de l'Adème (867 millions d'euros au titre du PIA 1 et 800 millions d'euros au titre du PIA 2) ou encore l'action « Démonstrateurs technologiques aéronautiques et aéronefs du futur » qui a notamment permis le financement des projets Airbus A350, Hélicoptère X4 et Hélicoptère X6 pour 1,8 milliard d'euros.

2 milliards d'euros, correspondant à 17 % de l'enveloppe du PIA 2, prévus au sein de l'action « Excellence technologique des industries de défense » ont également couvert les besoins de financement pour 2014 et jusqu'ici pris en charge par le programme 146 de la mission « Défense ».

Pour le PIA 3, le risque de « débudgétisations » est également réel, certaines actions ne manquant pas d'interpeller votre rapporteur 15 ( * ) .

3. ... et qui ne pèse pas sur la norme de dépenses : un principe encore justifié ?

Les crédits consacrés aux programmes d'investissements d'avenir ne pèsent pas sur la norme de dépenses .

La double norme de dépenses : zéro valeur et zéro volume

Si des normes d'évolution des dépenses de l'État ont été introduites dès le début des années 2000, c'est la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014 qui a mis en place la double norme de dépenses aujourd'hui appliquée : d'une part, les dépenses du budget général de l'État et les prélèvements sur recettes, hors charge de la dette et hors contributions aux pensions des fonctionnaires de l'État, doivent être stabilisés en valeur à périmètre constant : c'est la norme « zéro valeur » ; d'autre part, la progression annuelle des crédits du budget général de l'État et des prélèvements sur recettes, y compris charge de la dette et dépenses de pension, doit être, à périmètre constant, au plus égale à l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation : c'est la norme « zéro volume » .

Source : commission des finances du Sénat

Ceci se justifie à la fois par leur caractère exceptionnel et la nécessité de les protéger de tout risque d'arbitrages défavorables : si les programmes d'investissements d'avenir étaient intégrés à la norme de dépenses, un dérapage de crédits des ministères pourrait être compensé par des « coupes » sur le budget du PIA.

Dans le cas du PIA 3, le caractère exceptionnel des dépenses d'investissement couvertes mérite d'être interrogé . En effet, il intervient après deux programmes engagés en six ans et le Gouvernement a fait le choix de l'inscrire dans une mission budgétaire propre du projet de loi de finances pour 2017.

En outre, contrairement aux deux précédents PIA où autorisations d'engagement et crédits de paiement étaient intégralement décaissés du budget de l'État dans le cadre de la loi de finances qui les instauraient, il a été décidé pour le PIA 3 de lisser sur plusieurs années l'ouverture des crédits de paiement, entre 2018 et 2022 selon un calendrier provisoire 16 ( * ) .

B. DES MODALITÉS DE GESTION ET DE GOUVERNANCE GLOBALEMENT RECONDUITES

Avec ce troisième PIA, ce mode d'intervention et de gouvernance de l'État pour financer l'investissement public perd son caractère exceptionnel. Il conserve toutefois une forme d'originalité dans ses modalités de mises en oeuvre.

1. Des modes de financement adaptés à l'investissement soutenu et ayant un impact différent sur la dette et les déficits

Comme pour les précédents programmes, le PIA 3 intervient différemment, dans la nature des financements retenus, selon ses domaines d'intervention.

Les PIA 1 et 2 prévoyaient des subventions , des avances remboursables et des prêts, des dotations non consommables (ou non consomptibles) générant des intérêts annuels, des dotations à fonds de garantie et des prises de participations (ou dotations en fonds propres).

Définition des différents modes d'intervention des PIA 1 et 2

- subvention : aide financière apportée à un projet ou à un organisme (avec ou sans contreparties) ;

- avance remboursable : aide financière apportée à un projet, qui doit être remboursée en cas de succès du projet, avec paiement d'intérêts défini en fonction du type de projet ;

- dotation à fonds de garantie : assimilable à une subvention, elle permet d'assumer le risque de défaut de l'emprunteur ;

- prêt : remise de fonds à une entreprise ou un organisme moyennant le paiement d'un intérêt, avec l'engagement de remboursement de la somme prêtée ;

- dotation en fonds propres : apport en capital - ou en quasi fonds propres - à une société, en tant qu'« investisseur avisé » (c'est-à-dire avec la même façon d'apprécier l'opportunité financière qu'un investisseur privé) ;

- dotation non consommable : capital dont seuls les intérêts qui le rémunèrent sont rendus disponibles année après année.

Source : rapport d'activité 2015 du Commissariat général à l'investissement

Mode de financement particulièrement innovant, les dotations non consommables ont été instituées dans le cadre du PIA 1 . Elles servent d'assiette au calcul d'intérêts à taux fixe versés aux bénéficiaires. Seule l'Agence nationale de la recherche (ANR) a été dépositaire de dotations non consomptibles, à destination d'actions relevant de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Comme l'a démontré la Cour des comptes dans son rapport précité sur les investissements d'avenir, ce ne sont donc pas 47 milliards d'euros qui pourront être consommés au titre des PIA 1 et 2 puisque seuls les intérêts annuels des dotations non consomptibles sont décaissés, en aucun cas les dotations elles-mêmes. La Cour des comptes estime ainsi que le montant total disponible s'élève en réalité à 24 milliards d'euros pour le PIA 1 et à 10 milliards d'euros pour le PIA 2, soit un total de 34 milliards d'euros (dont 5,7 milliards d'euros au titre des intérêts des dotations non consommables).

Situation financière des investissements d'avenir au 30 juin 2016
par nature de financement

(en millions d'euros)

Source : commission des finances d'après le bilan du Commissariat général à l'investissement du 30 juin 2016

Il convient également de rappeler que la nature du financement retenu a un impact très différent sur le déficit budgétaire, le déficit au sens de Maastricht et la dette (cf. le tableau ci-dessous). Les prises de participation ont ceci de particulièrement intéressant pour l'État qu'elles n'ont aucun impact sur le déficit maastrichtien.

Impact budgétaire des différentes interventions des PIA 1 et 2

Dette

Déficit budgétaire

Déficit maastrichtien

Dotations non consommables

Intérêts annuels

100 % de l'année de la loi de finances

Intérêts annuels

Prêts / prises de participation

Impact lors du décaissement

100 % de l'année de la loi de finances

0 % au décaissement, impact si réévaluation ultérieure

Subventions

Impact lors du décaissement

100 % de l'année de la loi de finances

100 % au décaissement

Avances remboursables

Impact lors du décaissement

100 % de l'année de la loi de finances

100 % au décaissement (impact positif les années de remboursement)

Source : Commissariat général à l'investissement

Selon le projet de loi de finances pour 2017, le PIA 3 se composera :

- de subventions , à hauteur de 3,05 milliards d'euros ;

- de dotations décennales , pour 2 milliards d'euros, en remplacement des dotations non consomptibles ;

- d' avances remboursables , à hauteur de 950 millions d'euros ;

- de prises de participation, pour 4 milliards d'euros.

Les investissements en fonds propres que constituent les prises de participation prennent une place importante (40 % du montant total) et se concentrent sur des actions visant la valorisation économique, pour lesquels l'État prend des risques et peut donc espérer, en contrepartie, un retour sur investissement.

Les avances remboursables apparaissent également risquées pour l'État qui engage alors son financement sur la réussite du projet, condition nécessaire pour le remboursement avec intérêts. Dans son rapport présentant le PIA, le Commissariat général à l'investissement indique ainsi que « chaque fois que cela est possible, il conviendra d'examiner la possibilité de [substituer aux avances remboursables] des apports en fonds propres ou quasi fonds propres ». Il indique également qu'il conviendra de « veiller à ce que les retours pour l'État, au cas où le succès commercial du projet est avéré, soient plus élevés et prennent pleinement en compte le risque assumé par l'État . »

Avec près de la moitié des dotations du PIA prévues en dotations sur fonds propres et avances remboursables, il appartiendra donc à l'État d'intervenir en « investisseur avisé », en sélectionnant avec prudence les projets pour espérer un retour financier.

Les subventions et les dotations décennales se concentreront pour leur part sur les investissements relevant de l'enseignement supérieur et de la recherche , bien en amont de la valorisation commerciale.

Impact budgétaire des différentes modalités d'intervention du PIA 3

Dette

Déficit budgétaire

Déficit maastrichtien

Dotations décennales

Impact lors du décaissement de chaque fraction annuelle

Lors de l'inscription des crédits de paiement en loi de finances

Chaque fraction annuelle de la dotation

Prêts / prises de participation

Impact lors du décaissement

Lors de l'inscription des crédits de paiement en loi de finances

0 % au décaissement, impact si réévaluation ultérieure

Subventions

Impact lors du décaissement

Lors de l'inscription des crédits de paiement en loi de finances

100 % au décaissement

Avances remboursables

Impact lors du décaissement

Lors de l'inscription des crédits de paiement en loi de finances

100 % au décaissement (impact positif les années de remboursement)

Source : commission des finances du Sénat

2. Le remplacement des dotations non consommables par des dotations décennales dans le PIA 3

Les dotations décennales ont vocation à remplacer les dotations non consomptibles prévues pour les PIA 1 et 2. Les crédits prévus seront décaissés progressivement, pendant dix ans, et ne peuvent dépasser 10 % du total chaque année.

Il semblait effectivement inutile de conserver le financement par dotations non consomptibles .

Tout d'abord, celles-ci n'avaient que peu d'intérêt dans le contexte économique actuel de taux d'intérêt particulièrement faibles. Ensuite, elles ont fait l'objet d'un certain nombre de critiques , en particulier de la Cour des comptes 17 ( * ) , dans la mesure où, d'une part, elles r endent difficilement lisibles le montant des financements réellement disponibles (versement des intérêts et non de la dotation elle-même) et, d'autre part, l'avenir de ces dotations non consomptibles reste inconnu puisqu'aucune date de fin de versement n'est prévue et qu'elles sont, dès lors, susceptibles de créer des « engagements de dépenses budgétaires pour l'État sans limitation de durée ».

La dotation décennale , retenue dans le cadre du PIA 3, répond à ces critiques , en ce qu'elle permet de connaître le montant exact qui sera versé et la durée pendant laquelle les bénéficiaires la percevront. En revanche, elle ne constitue pas un dispositif de financement pérenne et laisse donc pendante la question du devenir des structures qui la perçoivent et de l'obligation pour les crédits budgétaires de « prendre le relai » à l'issue de cette période de 10 ans.

Enfin, d'un point de vue budgétaire , ces dotations décennales peuvent être assimilées à des subventions .

3. Une gouvernance reposant sur le Commissariat général à l'investissement et les opérateurs

Avec l'article 56 du projet de loi de finances pour 2017, rattaché à la présente mission, le Gouvernement propose, pour ce troisième programme d'investissements d'avenir, de reconduire, quasiment à l'identique, les modalités de gouvernance prévues pour les deux précédents PIA , notamment à l'article 8 de la loi précitée du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010.

a) Un pilotage assuré par le Commissariat général à l'investissement

La gouvernance repose en particulier sur le Commissariat général à l'investissement, institué par le Gouvernement en 2010 18 ( * ) , en s'appuyant sur les recommandations du rapport de MM. Alain Juppé et Michel Rocard. Spécifiquement chargé de la mise en oeuvre des PIA et placé auprès du Premier ministre, il doit notamment préparer les décisions du Gouvernement sur les contrats passés entre l'État et les opérateurs gestionnaires des fonds, coordonner la préparation des cahiers des charges accompagnant la sélection des projets, formuler des avis et des propositions sur lesdits projets et veiller à l'évaluation des investissements (y compris leur rentabilité).

b) Une gestion et une utilisation des fonds confiées à des opérateurs qui sont liés par une convention avec l'État

La mise en oeuvre des actions du PIA et la gestion de ses dotations n'est pas confiée aux ministères concernés sur le fond par les investissements mais à des opérateurs . Il peut ainsi s'agir de l'Agence nationale de la recherche (ANR) ou d'autres établissements publics de l'État, voire des sociétés dans lesquelles ce dernier détient, directement ou indirectement, une majorité du capital ou des droits de vote. La Caisse des dépôts et consignations (CDC) gère également certains fonds du PIA, pour le compte de l'État ou des opérateurs qu'il a désignés.

Liste des opérateurs de l'État au titre des PIA 1 et 2

- Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Adème) ;

- Agence nationale de l'habitat (Anah) ;

- Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) ;

- Agence nationale de la recherche (ANR) ;

- Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) ;

- Agence de services et de paiement (ASP) ;

- Banque publique d'investissement (BPI) ;

- Caisse des dépôts et consignations (CDC) ;

- Centre national d'études spatiales (CNES) ;

- Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ;

- FranceAgriMer ;

- Office national d'études et de recherches aérospatiales (Onera).

Pour le PIA 3, le Gouvernement a décidé de restreindre à quatre le nombre d'opérateurs . Il s'agit de l'Adème, de l'agence nationale de la recherche (ANR), de Bpifrance et de la Caisse des dépôts et consignations (CDC).

Les relations entre l'État et l'opérateur sont formalisées par voie conventionnelle , tant pour les modalités de gestion que d'utilisation des fonds 19 ( * ) . Ceux-ci sont déposés sur un compte du Trésor , garantissant ainsi un meilleur suivi pour l'État.

c) Une sélection des projets les plus innovants assurée par une mise en concurrence et un jury indépendant

Les opérateurs doivent sélectionner les projets en garantissant une mise en concurrence , par un dispositif d'appel à projets, ainsi que la transparence de la procédure .

Les projets sont retenus après examen par un jury indépendant, généralement composé d'experts internationaux.

d) Le suivi des PIA et le contrôle du Parlement

Pour suivre la mise en oeuvre des PIA, l'article 8 précité de la première loi de finances rectificative pour 2010 prévoit plusieurs dispositions.

Tout d'abord, chaque année, le Gouvernement doit décrire, pour les années passées, présente ou à venir, les conséquences sur les finances publiques des investissements financés par les crédits ouverts. Ces éléments figurent dans le rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances initiale.

Ensuite, un « jaune » budgétaire , annexé au projet de loi de finances, propose chaque année un bilan de la mise en oeuvre et du suivi des programmes d'investissements d'avenir 20 ( * ) .

Le suivi des PIA est, enfin, également assuré par le comité de surveillance des investissements d'avenir qui, initialement présidé par MM. Alain Juppé et Michel Rocard et désormais par MM. Jean-Pierre Raffarin et Jean-Paul Huchon, est chargé d'évaluer le programme d'investissements d'avenir et de « dresser un bilan annuel de son exécution ».

Concernant plus spécifiquement le contrôle du Parlement , essentiel compte tenu de la spécificité des PIA, il s'appuie toute d'abord sur les documents annexés annuellement au projet de loi de finances pour suivre leur exécution. Par ailleurs, le Commissariat général à l'investissement adresse aux commissions des finances un bilan sur les financements des PIA chaque trimestre .

Les commissions des finances et les commissions permanentes compétentes peuvent également communiquer au Premier ministre leurs observations sur les projets de conventions qui leur sont adressés en amont de leur signature, ainsi que leurs éventuels avenants.

Elles sont aussi informées des projets de redéploiements de crédits qui modifient la répartition initiale des fonds entre les différentes actions des programmes, avant d'être approuvés par le Premier ministre.

Enfin, il convient de préciser que quatre députés et quatre sénateurs sont membres du comité de surveillance des investissements d'avenir.

Programmes et actions du PIA 3

(en millions d'euros)

PRIORITÉS

OBJECTIFS

ACTIONS

Subventions/
Avances remboursables

Dotations
décennales

Fonds propres

TOTAL

PROGRAMME 421
« SOUTIEN DES PROGRÈS DE L'ENSEIGNEMENT ET DE LA RECHERCHE »

1

Développer l'innovation pédagogique

"Territoires d'innovation pédagogique" dans l'enseignement scolaire

400

100

-

500

Nouveaux cursus à l'université

0

250

-

250

2

Amplifier des programmes de recherche

Programmes prioritaires de recherche

50

350

-

400

Équipements structurants pour
la recherche

200

150

-

350

3

Intégrer recherche et enseignement supérieur

Soutien des grandes universités de recherche

0

700

-

700

Constitution d'écoles universitaires de recherche

0

300

-

300

4

Diversifier de nouveaux modes de gestion des universités

Création expérimentale de "sociétés universitaires et de recherche"

-

-

400

400

Total Programme 421

650

1 850

400

2 900

PROGRAMME 422 « VALORISATION DE LA RECHERCHE

5

Promouvoir des territoires d'innovation et des démonstrateurs

Nouveaux écosystèmes d'innovation

80

150

-

230

Démonstrateurs et territoires d'innovation de grande ambition

800

-

700

1 500

Accélérer le développement des écosystèmes d'innovation performants

620

-

-

620

6

Faciliter l'appropriation de l'innovation

Intégration des SATT, incubateurs et accélérateurs

50

-

100

150

Fonds national post-maturation « Frontier venture »

0

0

500

500

Total Programme 422

1 550

150

1 300

3 000

PROGRAMME 423

ACCÉLÉRATION DE LA MODERNISATION DES ENTREPRISES

7

Soutenir l'innovation

Soutien à l'innovation collaborative

550

-

0

550

Accompagnement et transformation des filières

500

-

500

1 000

8

Accompagner "l'industrie du futur"

Industries du futur

350

-

-

350

Adaptation et qualification de la main d'oeuvre

100

-

-

100

9

Accélérer la croissance des PME et ETI

Concours d'innovation

300

-

-

300

Fonds national d'amorçage n° 2

-

-

500

500

Fonds de fonds « Multi-cap-croissance » n° 2

-

-

400

400

Fonds à l'internationalisation des PME

-

-

200

200

Grands défis

-

-

700

700

Total Programme 423

1 800

0

2 300

4 100

TOTAL

4 000

2 000

4 000

10 000

Source : commission des finances d'après les données du projet annuel de performances et rapport précité de juin 2016 du Commissariat général à l'investissement sur le PIA 3


* 1 Rapport du Commissariat général à l'investissement sur le 3 eme programme d'investissements d'avenir « Préparer la France aux défis de demain ».

* 2 Loi n° 2010-237 du 9 mars 2010 de finances rectificative pour 2010.

* 3 Rapport du 19 novembre 2009 au Président de la République, « Investir pour l'avenir, Priorités stratégiques d'investissement et emprunt national ».

* 4 Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013.

* 5 Rapport n° 278 (2009-2010) de M. Philippe Marini, au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances rectificative pour 2010.

* 6 Cf. le B du présent I.

* 7 Les dotations non consommables représentent un capital dont seuls les intérêts qui le rémunèrent sont rendus disponibles année après année.

* 8 Cf . le rapport à mi-parcours du comité d'examen de France Stratégie, présidé par Philippe Maystadt, mars 2016.

* 9 Cf . rapport public thématique de la Cour des comptes, « Le programme d'investissements d'avenir, une démarche exceptionnelle, des dérives à corriger », décembre 2015.

* 10 Cf . le I de la seconde partie du présent rapport.

* 11 Rapport précité du Commissariat général à l'investissement, de juin 2016.

* 12 Cf. en particulier les rapports précités de la Cour des comptes de décembre 2015 et du comité d'examen de France Stratégie, présidé par Philippe Maystadt, mars 2016.

* 13 Loi n°2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015.

* 14 Le principe retenu consiste à ce que, pour un euro dépensé par les conseils départementaux pour équiper les collégiens d'un outil numérique, l'État contribue également à hauteur d'un euro.

* 15 Cf le A du II de la seconde partie.

* 16 Cf. la seconde partie du présent rapport.

* 17 Rapport précité supra.

* 18 Décret n° 2010-80 du 22 janvier 2010.

* 19 Pour le détail des dispositions devant figurer dans la convention, voir le commentaire de l'article 56 rattaché à la présente mission.

* 20 Pour le détail des éléments devant figurer dans ce rapport, voir le commentaire de l'article 56 rattaché à la présente mission.