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Table des matières



Mission commune d'information (Candidatures)

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 27 sexies A (Précédemment réservé)

Article 32 quinquies

Rappels au Règlement

Hommage à une délégation étrangère

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Rappel au Règlement

Discussion des articles (suite)

Article 32 quinquies (suite)

Rappel au Règlement

Discussion des articles (Suite)

Article 32 quinquies (Suite)

Article 32 sexies

Article 32 septies

Mission commune d'information (Nominations)

CMP (Accord)

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Rappels au Règlement

Discussion des articles (Suite)

Article 32 septies (Suite)

Article 32 octies

Article 33

Articles additionnels après l'article 3 octies

Mission commune d'information (Candidatures)

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Discussion des articles (Suite)

Article 27 sexies A (Précédemment réservé)

Article 32 quinquies

Rappels au Règlement

Hommage à une délégation étrangère

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Rappel au Règlement

Discussion des articles (suite)

Article 32 quinquies (suite)

Rappel au Règlement

Discussion des articles (Suite)

Article 32 quinquies (Suite)

Article 32 sexies

Article 32 septies

Mission commune d'information (Nominations)

CMP (Accord)

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Rappels au Règlement

Discussion des articles (Suite)

Article 32 septies (Suite)

Article 32 octies

Article 33

Articles additionnels après l'article 3 octies




SÉANCE

du mercredi 20 octobre 2010

14e séance de la session ordinaire 2010-2011

présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente

Secrétaires : M. Philippe Nachbar, M. Bernard Saugey.

La séance est ouverte à 14 heures 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Mission commune d'information (Candidatures)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la désignation des quinze membres de la mission commune d'information sur les toxicomanies.

En application de l'article 8, alinéas 3 à 11, de notre Règlement, la liste des candidats présentée par les groupes a été affichée.

Les candidatures seront ratifiées si la présidence ne reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure.

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites.

Discussion des articles (Suite)

Article 27 sexies A (Précédemment réservé)

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je suis très attentif dès lors qu'il est question de l'amiante.

La commission des affaires sociales a repoussé de deux ans l'accès de l'allocation des victimes de l'amiante. La première version de l'amendement était pourtant acceptable. Le drame de l'amiante a déjà conduit à des dizaines de milliers de décès. L'Igas, la Cour des comptes, le groupe de travail présidé par M. Le Garrec et le Médiateur ont insisté sur ce qu'avait d'indispensable le calcul actuel de l'Acata.

Aujourd'hui, on empêche les parlementaires de défendre leurs amendements sur l'attribution de l'allocation amiante en leur opposant l'article 40 !

J'ai lu avec attention l'amendement que le Gouvernement a déposé ce matin. Il ne règle pas le problème mais le complexifie en mettant des conditions impossibles à gérer. La notion de temps d'exposition n'est pas pertinente.

M. Roland Courteau.  - Très juste !

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Dans certains cas, il suffit d'une brève exposition à l'amiante pour développer un cancer !

Mme Annie David.  - Vous condamnez les travailleurs de l'amiante à travailler deux ans de plus. Si l'on attend que la pathologie soit déclarée pour atteindre l'âge de départ en retraite, ce qui reviendra à réduire considérablement la durée de leur retraite, la cessation anticipée d'activité est un droit. Elle a été créée pour compenser le raccourcissement de leur espérance de vie !

Il sera souvent impossible aux salariés de faire connaître leur temps d'exposition à l'amiante dans l'entreprise où ils ont été contaminés. L'amendement du Gouvernement ne répond en rien à la légitime revendication des victimes de l'amiante.

M. Robert Navarro.  - Les risques cliniques de la contamination ne sont pas précisément perceptibles à l'âge du départ en retraite. On sait pourtant que l'amiante pourrait encore causer plus de 100 000 décès d'ici 2025.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Le Gouvernement veut que chacun fasse un effort, à l'exception des privilégiés. S'agissant de l'amiante, il franchit la ligne rouge. Hier, à l'Assemblée nationale, 400 veuves de l'amiante demandaient justice à Mme Alliot-Marie. Puisque vous voulez que La Poste fasse autre chose que distribue le courrier, je vous transmettrai, monsieur le ministre, leurs lettres.

Les employeurs qui ont été auditionnés ont reconnu avoir refusé de signer les attestations d'exposition. Ils ont aussi reconnu continuer à utiliser l'amiante au Brésil.

Le renvoi de cet article avait semé un espoir chez les victimes de l'amiante. Hélas non ! Avec le sang froid qui vous caractérise... (Exclamations à droite)

M. Jean-Claude Gaudin.  - Un peu de respect !

Mme Marie-Christine Blandin.  - ...vous persistez dans votre logique purement comptable à ne rien céder à ceux qu'il faudrait défendre, pour protéger les plus riches.

Mme Nathalie Goulet.  - Sénatrice de l'Orne, je suis concernée par la « vallée de l'amiante ». Dans certaines conditions, l'inversion de la charge de la preuve pose problème : c'est le cas des victimes de l'amiante, qui sont aussi concernées par l'application de la directive européenne du 19 septembre 1983, incompatible avec la reconnaissance du taux d'incapacité permanente de 25 %. Peu de dispositions dans notre droit ont entraîné autant de questions et de rapports que la question de l'amiante. Nombre de parlementaires bas-normands ont interrogé le Gouvernement parce que les Cram de nos trois départements ont des appréciations différentes. Les salariés de Moulinex ont subi une nouvelle inégalité par rapport à leur reclassement.

Il reste vraiment beaucoup de problèmes à régler en la matière, sans parler du désamiantage des anciens sites industriels.

Mme Michelle Demessine.  - Cet article touche des salariés qui vivent un drame épouvantable, dont certains sont déjà décédés, et qui méritent le plus grand respect.

J'étais hier avec Mme Blandin avec les 400 veuves venues à Paris réclamer un procès pénal pour qu'il n'y ait « plus jamais ça ». Elles exigent que les responsabilités soient bien établies. Il aura fallu des dizaines de milliers de morts pour que le dispositif de réparation soit mis en place et voici que vous le remettez en cause : ce serait les faire mourir une deuxième fois. Quant aux survivants, ils sont en permanence sous le coup d'une terrible épée de Damoclès, par la faute de leurs employeurs...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - ...qui étaient au courant !

M. Alain Gournac.  - Vous étiez au Gouvernement aussi ! Qu'avez-vous fait ? Rien !

M. Guy Fischer.  - Vous connaissez l'Acata. Les victimes de l'amiante, il en meurt chaque jour. La vérité du monde du travail, c'est que les expositions à l'amiante continuent. Deux millions de salariés sont concernés.

M. Roland Courteau.  - C'est énorme !

M. Guy Fischer.  - La plupart souvent avant même leur départ en retraite, ou dans les mois qui suivent : l'âge moyen du décès des victimes de l'amiante, c'est 63 ans.

Le Gouvernement ne peut feindre d'ignorer que les deux tiers des cancers d'origine professionnelle se déclarent après l'âge de 60 ans.

Le Gouvernement argue que les caisses de l'État sont vides. Qui les a vidées ? Pas les victimes de l'amiante ! Ce n'est d'ailleurs pas à l'État de les indemniser, ce devrait être aux employeurs, qui ne se déclarent ni responsables ni coupables.

Le Gouvernement renie ses engagements.

Mme Mireille Schurch.  - Face à l'intransigeance du Gouvernement, le rapporteur a été contraint d'aggraver la rédaction issue de l'Assemblée nationale. Nous souhaiterions vous parler des ravages de l'amiante, des victimes de ce scandale de santé publique. Vous n'avez donc aucune humanité ! Il a fallu une accumulation des drames pour surmonter la résistance obstinée des entreprises. Ce n'est pas sans rappeler l'attitude des fabricants de tabac, d'antennes-relais, de nanoparticules.

Avec ce gouvernement, rien n'est jamais acquis. Nous vous attendons, monsieur le ministre !

Mme la présidente.  - Amendement n°454 rectifié, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 41 de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les établissements visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. »

2° Le septième alinéa est ainsi rédigé :

« 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les ports visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. »

3° Le treizième alinéa est ainsi rédigé :

« L'allocation cesse d'être versée lorsque le bénéficiaire remplit les conditions de durée d'assurance requises pour bénéficier d'une pension de vieillesse au taux plein, à condition qu'il soit âgé d'au moins soixante ans. Les conditions de durée d'assurance sont réputées remplies au plus tard à l'âge de soixante-cinq ans. »

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Cet amendement maintient les conditions d'âge actuelles. Le FCAATA s'assimile à un régime de préretraite : il s'agit de compenser la perte d'espérance de vie due à l'amiante.

A Condé-sur-Noireau, l'espérance de vie n'est plus que de 58 ans, ce qui justifie que l'on parle de « vallée de la mort ». Le mésothéliome mène à la mort dans les dix-huit mois, après d'atroces souffrances. La mort n'attendra pas deux ans de plus pour frapper. Elle n'a que faire de vos dispositions législatives.

L'Acata n'est pas un privilège mais une réparation par la société d'un dommage qu'elle a laissé causer. Je répète que pour le mésothéliome, il n'y a pas de proportionnalité entre le temps d'exposition et la probabilité d'être atteint de l'affection. (On s'impatiente à droite)

M. Roland Courteau.  - Écoutez un peu ! C'est grave !

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Il est donc indispensable d'en revenir au dispositif actuel.

L'amendement n°491 n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°522 rectifié, présenté par M. Dériot.

M. Gérard Dériot.  - Cet amendement vise à maintenir les conditions actuelles d'âge de cessation d'activité et de perception d'une retraite à taux plein aux bénéficiaires d'une allocation de cessation anticipée d'activité au titre de leur exposition à l'amiante.

L'Acata vise à compenser la perte d'espérance de vie à laquelle sont confrontées statistiquement les personnes contaminées par l'amiante, espérance de vie qui peut être inférieure à 60 ans. Il semblerait donc particulièrement injuste de reculer leur âge d'entrée dans le dispositif.

L'argument fondant le report de l'âge de la retraite est l'allongement de l'espérance de vie. Or, les victimes de l'amiante ne connaîtront pas un tel allongement. La notion de temps d'exposition ne vaut pas : il suffit d'une fibre d'amiante pour causer un cancer. Les mesures prises ont porté leur fruit : on voit de moins en moins d'entrées dans le dispositif Acata.

La situation actuelle doit absolument être maintenue. (Applaudissements sur la plupart des bancs)

Mme la présidente.  - Amendement n°1244, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

Le I de l'article 41 de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« 2° Avoir atteint, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans :

« a) en cas de durée de travail dans un des établissements visés au 1° supérieure à un seuil fixé par décret, l'âge de soixante ans, diminué du tiers de cette durée ;

« b) dans les autres cas, un âge déterminé par décret, qui pourra varier en fonction de la durée du travail effectuée dans les établissements visés au 1°. » ;

2° Le septième alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« 2° Avoir atteint, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans :

« a) en cas de durée de travail dans un des ports visés au 1° supérieure à un seuil fixé par décret, l'âge de soixante ans, diminué du tiers de cette durée ;

« b) dans les autres cas, un âge déterminé par décret, qui pourra varier en fonction de la durée du travail effectuée dans les ports visés au 1°. »

M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.  - Le sujet est assez douloureux pour nous éviter des déclarations à l'emporte-pièce. (Exclamations à gauche) Je ne polémiquerai pas sur ce sujet. Nous souhaitons évidemment que les victimes de l'amiante puissent continuer à bénéficier des dispositions existantes.

Il y a actuellement de l'ordre de 35 000 personnes au FCAATA, avec environ 5 000 entrées par an. La quasi-totalité de ceux qui en sortent se retrouvent à la retraite.

Le Gouvernement a voulu préciser les conditions d'accès au dispositif après le recul de l'âge de la retraite. MM. Dériot et Godefroy ont insisté pour que l'on reste à 60 ans. Les bénéficiaires du FCAATA vont se retrouver dans un vide juridique entre 60 et 62 ans. C'est ce problème que nous avons voulu résoudre.

Nous avons voulu éviter un deuxième écueil : qu'une personne qui aurait passé quelques semaines dans une entreprise listée puisse partir à 60 ans. Ce serait injuste par rapport aux autres ouvriers.

Puisque nous ne sommes pas compris, je suis prêt à me rallier à l'amendement de M. Dériot, quitte à ce qu'il crée des problèmes, mais c'est votre choix.

M. Dominique Leclerc, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - MM. Godefroy et Dériot ont animé une mission d'information de la commission sur le drame de l'amiante. Ils proposent de maintenir le dispositif actuel. De même que nous avons maintenu à 55 ans la retraite des handicapés, nous acceptons leurs amendements -à l'unanimité.

M. Marc Daunis.  - Merci, monsieur le rapporteur !

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Nous pourrions rectifier l'amendement Dériot-Godefroy en ajoutant « par dérogation à l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, ils bénéficient immédiatement d'une pension de retraite ».

Je souhaite une brève suspension de séance.

La séance, suspendue à 15 heures 25, reprend à 15 heures 30.

Mme la présidente.  - Amendement n°454 rectifié bis, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 41 de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les établissements visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. »

2° Le septième alinéa est ainsi rédigé :

« 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les ports visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. »

3° Le treizième alinéa est ainsi rédigé :

« L'allocation cesse d'être versée lorsque le bénéficiaire remplit les conditions de durée d'assurance requises pour bénéficier d'une pension de vieillesse au taux plein, à condition qu'il soit âgé d'au moins soixante ans. Par dérogation aux dispositions de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, il bénéficie immédiatement d'une pension de retraite. Les conditions de durée d'assurance sont réputées remplies au plus tard à l'âge de soixante-cinq ans. »

Amendement identique n°522 rectifié bis, présenté par M. Dériot.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 41 de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les établissements visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. »

2° Le septième alinéa est ainsi rédigé :

« 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les ports visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. »

3° Le treizième alinéa est ainsi rédigé :

« L'allocation cesse d'être versée lorsque le bénéficiaire remplit les conditions de durée d'assurance requises pour bénéficier d'une pension de vieillesse au taux plein, à condition qu'il soit âgé d'au moins soixante ans. Par dérogation aux dispositions de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, il bénéficie immédiatement d'une pension de retraite. Les conditions de durée d'assurance sont réputées remplies au plus tard à l'âge de soixante-cinq ans. »

L'amendement n°1244 est retiré.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Nous acceptons cette rectification. (« Très bien ! » et applaudissements à droite)

M. Gérard Dériot.  - Nous aussi. (Mêmes applaudissements)

M. Éric Woerth, ministre.  - Je suis dans le même état d'esprit que tout à l'heure. Cet amendement ne résout pas tout. (Exclamations à gauche) Quand on parle de justice, il faut tout regarder : ce dispositif peut négliger certains salariés. Accord du Gouvernement.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - M. le ministre a bien fait de retirer son amendement pour le moins maladroit qui revenait sur des mesures de justice, et notamment sur le FCAATA. Ce fonds va s'éteindre mais il concerne encore plus de 30 000 personnes.

Le Gouvernement faisait trois erreurs. D'abord, pour l'amiante, il n'y a pas un temps minimum d'exposition ; une seule fibre peut provoquer un cancer foudroyant ! Ensuite, le nombre de travailleurs touchés par l'amiante est la conséquence d'une vaste manipulation des entreprises dont l'État s'est rendu complice, consciemment ou non, entre 1976 et 1996. L'État doit donc réparer. Enfin, il n'y a pas d'effet d'aubaine : prétendre cela est insupportable. Il faut rendre justice à ces travailleurs exposés. Le groupe centriste votera ces amendements. (Applaudissements)

M. Nicolas About.  - J'approuve ce qui vient d'être dit. A l'avenir, sur ce type d'amendement, je souhaite qu'on ne fasse pas référence à un décret car cela donne l'impression que l'on envoie à d'autres le soin de trancher des problèmes humains très douloureux qui relèvent du Parlement. (Applaudissement au centre et à droite)

M. Alain Vasselle.  - La commission souhaite préserver les droits actuels. Il n'est pas question d'imaginer faire des économies aux dépens de personnes touchées par ce drame. Nous aurions quand même intérêt à toiletter le dispositif ; dans les entreprises dont la liste a été fixée par arrêté, il y a aussi du personnel purement administratif qui n'a jamais été exposé à l'amiante.

Sur un sujet aussi sensible, il faut connaitre le projet de décret pour pouvoir en débattre.

Le ministre est-il prêt à aller plus loin que les dispositions actuelles ? On a l'impression que l'adoption de l'amendement de Mme David pourrait léser certains. Je suggère donc que d'ici à la CMP, nous améliorions la rédaction de ce texte pour que personne ne puisse reprocher au Sénat d'avoir légiféré à la va-vite. (Applaudissements à droite)

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Je voulais dire la même chose.

Mme Annie David.  - Nous voterons ces amendements : une fois n'est pas coutume, je vais remercier notre rapporteur pour la confiance qu'il a accordée aux spécialistes que sont MM. Godefroy et Dériot. Comme quoi il est possible de travailler en bonne intelligence quand on sait s'accorder. Je n'irai pas jusqu'à remercier M. le ministre. (Rires et exclamations à droite)

Vous voulez une réponse juste, avez-vous dit. La justice, c'est de permettre aux victimes de l'amiante de partir à la retraite plus tôt !

J'espère que les associations de victimes pourront participer à ce travail. La liste des entreprises a été fixée par arrêté. Il faudrait revoir cette liste incomplète, sur laquelle ne figure pas, par exemple, l'entreprise Arkema.

Depuis 1998, le site a fermé et les salariés se battent pour être reconnus victimes. La grandeur d'une société se mesure à la place qu'elle fait aux femmes mais aussi à celle qu'elle accorde aux victimes. (Applaudissements à gauche)

M. Jean Louis Masson.  - Cette solution est satisfaisante. Méfions-nous des renvois aux décrets qui se révèlent souvent plus restrictifs que ne le souhaite le législateur. Chacun doit faire preuve de souplesse, à commencer par le Gouvernement.

M. Jean-Louis Lorrain.  - Il s'agit d'être le moins injuste possible. Pourquoi avoir autant attendu ? Je ne vois pas d'ouverture spectaculaire mais, en discutant, on peut parvenir à des solutions raisonnables. (On le confirme sur les bancs socialistes) Lorsque nous opposons à nos concitoyens seulement la raison, c'est insuffisant car nous devons prendre les sujets dans la globalité. Nous devons prendre en compte les facteurs subjectifs ! Une amorce de dialogue a eu lieu mais elle reste insuffisante. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Marc Todeschini.  - Tout le monde va s'approprier cette avancée. Nous nous réjouissons de la prise en compte de ces victimes ; contrairement à Mme David (sourires), je suis prêt à remercier M. le ministre ! J'aimerais qu'il nous associe à un vaste dialogue s'il faut modifier, voire améliorer le dispositif actuel.

M. Jacky Le Menn.  - Vous ne voulez pas être injuste, c'est bien, monsieur le ministre. La commission est tout à fait capable d'apporter des réponses au problème posé. Associez le Parlement à votre réflexion à venir ! Ainsi, le temps d'exposition ne signifiait rien ! Il nous faut maintenant apporter les bonnes réponses.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Je ne vais pas sauter au plafond.

M. Jean-Claude Gaudin.  - Et bien asseyez-vous !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Je suis surpris que, face à l'intelligence collective qui s'est déployée, M. le ministre se soit rangé à votre avis tout en émettant des doutes. Avec cet amendement de dernière minute, vous n'avez pas permis au Sénat de fonctionner correctement. Nous voterons ces deux amendements qui traitent d'un sujet extrêmement sensible ; un tel sujet justifie que nous échappions aux calculs millimétriques dont vous avez le secret, monsieur le ministre !

Mme Michelle Demessine.  - Nous voterons cet amendement.

M. Charles Revet.  - Mme David l'a déjà dit !

Mme Michelle Demessine.  - Je me réjouis de ce débat de qualité que nous devons à la mission d'information suscitée par le groupe communiste... (« Ah ! » à droite) qui a constitué une véritable bouffée d'oxygène pour les victimes. Le dispositif actuel est dérogatoire. Hier, à l'Assemblée nationale, de nombreux députés ont écouté les veuves des victimes de l'amiante ; elles ont adressé un courrier au Président de la République qui n'a, à ce jour, toujours pas répondu.

M. Jean-Claude Gaudin.  - Il va le faire !

Mme Michelle Demessine.  - J'ai entre les mains le témoignage d'une épouse dont le mari est mort en 42 jours et qui a vécu l'enfer. « L'atroce était le quotidien », dit-elle. Devant de telles lettres, nous avons un devoir de modestie et de responsabilité. Ces victimes attendaient de la représentation nationale une réelle reconnaissance.

Mme la présidente.  - C'est terminé. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je ne serais pas intervenu si je n'avais pas entendu dans la bouche de M. Vasselle un propos qui m'inquiète : la CMP pourrait arranger les choses... Le Sénat doit faire savoir que sa position ne doit être ni déformée ni améliorée !

Quand on dit que le personnel administratif n'a pas été exposé à l'amiante, il faut faire attention. J'ai travaillé sur le chantier du Redoutable. Nos bottes, nos gants, nos tabliers étaient en amiante. Il y avait de la poussière d'amiante partout et les administratifs eux-mêmes la respiraient. Les premières victimes de l'amiante, ce sont les femmes de ménage qui travaillaient sur ces sites mais étaient employées par des entreprises intérimaires qui se sont empressées de disparaître. Elles ne peuvent donc pas faire valoir leurs droits.

Si nous avions un carnet médical de travail pour ces femmes, nous pourrions reconstituer facilement leurs carrières. (Applaudissements à gauche et au centre)

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Il s'agira seulement, en CMP, d'améliorer le dispositif. Nous ne voterons que ce qu'auraient accepté MM. Godefroy et Dériot. (« Très bien ! » à gauche)

M. François Fortassin.  - Notre groupe votera ces amendements qui améliorent la situation. Ce débat fait honneur au Sénat. (Applaudissements)

M. Gérard Longuet.  - Effectivement, ce travail honore notre assemblée. Je veux rendre hommage à la mission d'information. Nous n'avons pas l'intention de dire en CMP le contraire de ce que nous disons ici.

Le témoignage de Mme Demessine était poignant : j'y suis d'autant plus sensible que je suis l'élu d'une région industrielle. La position de M. le ministre est très difficile ; il doit éviter les voyageurs clandestins dans un dispositif qui n'est pas fait pour eux alors que d'autres souffrent dans leur chair.

La solidarité ne doit pas être dispersée. Les moyens collectifs doivent être accordés avant tout aux victimes de l'amiante. (Applaudissements à droite)

L'amendement n°454 rectifié bis, identique à l'amendement no522 rectifié bis, est adopté et devient l'article 27 sexies A.

Mme la présidente.  - A l'unanimité ! (Applaudissements)

M. Nicolas About.  - Ce qu'a dit M. le ministre m'a intéressé : il y a un temps entre maintenant et la CMP qui doit être mis à profit : le cas des polypensionnés n'est pas prévu. Il faudra se pencher sur la question. (Applaudissements à droite)

Article 32 quinquies

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Cet article ne manque ni d'ironie ni de cynisme : il légitime les mécanismes de retraite chapeau. Nous sommes opposés à la capitalisation et à ces parachutes dorés qui pénalisent les retraites par répartition. Avec votre projet, les pensions vont baisser. Les salariés n'auront d'autres choix que d'épargner. Le Français moyen devra épargner 800 euros par mois pour compléter sa future retraite : ce sera mission impossible !

On ne peut non plus compter sur la générosité des employeurs, qui vont geler les salaires. Les risques vont désormais peser sur les salariés : voyez ce qui se passe aux États-Unis où le système des retraites est en perdition.

Rappels au Règlement

M. Jean-Pierre Bel.  - (Mmes et MM. les sénateurs de l'opposition se lèvent) Voilà maintenant plus de quinze jours que nous débattons de ce texte. La France est inquiète, angoissée. Le blocage du pays est une réalité et ce blocage est de la responsabilité du Gouvernement. Nous en appelons solennellement au Président de la République.

Les Français qui manifestent sont mécontents, inquiets, angoissés ; ils tournent leurs regards vers le Parlement. Nous avons voulu, dans un débat serein et équilibré (rires ironiques à droite), présenter un projet alternatif. Une démocratie implique démocraties sociale et parlementaire. Nous sommes attentifs à ce que disent les manifestants et les grévistes et nous craignons des évolutions dangereuses. (Exclamations à droite)

Il est encore temps de s'adresser au Président de la République pour qu'il suspende les débats. (On s'indigne à droite)

M. Charles Revet.  - Ce n'est pas sérieux !

M. Jean-Pierre Bel.  - Il y a matière à faire bouger les choses. Agissez avec sagesse, ne cherchez pas le conflit. Il est encore temps d'entendre les Français. Suspendez les débats et engagez la concertation. (Applaudissements nourris et prolongés à gauche ; vives protestations à droite)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Comme vient de le dire M. Bel, je m'adresse solennellement à tous mes collègues et au ministre. Nous sommes les représentants du peuple. (« Nous aussi ! » à droite) Oui, nous tous, parlementaires. Une grande majorité du peuple (« Non ! » à droite) rejette la réforme en cours. Il est temps d'entendre sa voix ! Les organisations syndicales sont responsables, (exclamations à droite) et n'appellent pas à mettre le pays à feu et à sang.

Rouvrez des négociations et suspendez la discussion de ce texte ! (Applaudissements nourris et prolongés des sénateurs à gauche)

M. Jean-Claude Gaudin.  - Cinéma !

M. Alain Gournac.  - Pyromanes !

M. Yvon Collin.  - Voila plus d'une centaine d'heures qu'avec application et dignité nous discutons de ce projet de loi.

Manifestement, nous ne sommes pas entendus et le peuple français nous dit que cette réforme lui paraît injuste. (Rires à droite) Ce serait de l'autisme de ne pas l'entendre !

A cet instant, j'en appelle à la sagesse du Gouvernement et au Président. On ne peut aller au blocage dans ce pays. La situation est tendue. Le plus sage serait de suspendre nos travaux (« Non ! » à droite) et de rétablir un vrai dialogue : il est nécessaire pour élaborer cette grande réforme sur les retraites dont nous avons besoin. Entendez-vous, Monsieur le ministre. Ce n'est pas de la démagogie. (« Si, si ! » à droite) Il est encore temps de nous entendre. (Applaudissements nourris et prolongés des sénateurs de l'opposition, toujours debout)

M. Gérard Longuet.  - Je prie mes collègues de bien vouloir s'asseoir. (Sourires)

Au nom de l'UMP, je m'adresse, à travers le ministre, au gouvernement tout entier.

Nous sommes fiers de participer à ce débat. Notre pays va pouvoir enfin régler ce problème posé en 1982 mais qui n'a pas jamais été réglé. En 1982, Pierre Mauroy avait procédé par ordonnances : nous n'avions pu, à l'époque, évaluer les conséquences de cette réforme populaire, mais dont le financement n'était pas assuré.

Il a fallu attendre 1991 pour avoir le Livre Blanc de M. Rocard, qui a débouché sur une loi présentée en 1993 par M.  Balladur. Lionel Jospin avait engagé avec prudence la réforme créant le FRR et COR.

En 2003, M. Fillon a eu le courage de présenter une réforme de fond. Aujourd'hui, nous devons assumer notre responsabilité de parlementaire. Dans notre histoire sociale, le débat est toujours ouvert, et le vote d'une loi ne le clôt pas définitivement. Cette réforme est notre fierté, car elle met notre pays devant ses responsabilités. Il y aura un débat politique, qui sera tranché aux prochaines élections présidentielles et législatives. Nous ne sommes ni masochistes, ni pervers ; nous ne cherchons pas à nous faire des ennemis par plaisir : nous prenons nos responsabilités. Nous ne voulons plus nous payer de mots et transmettre aux futures générations la facture de notre propre lâcheté. (Applaudissements à droite, exclamations à gauche) Nous ne serons pas la majorité de l'impuissance, de la facilité et de la résignation. (Applaudissements à droite, vives protestations à gauche) Nous ne serons jamais, comme vous l'avez été si souvent, la majorité du mensonge. Les Français s'exprimeront en 2012 : nous aurons la fierté de nous présenter devant eux avec un programme, un bilan et des réformes courageuses et responsables. (Mmes et MM. les sénateurs de la majorité se lèvent et applaudissent longuement sous les huées de la gauche)

M. Éric Woerth, ministre.  - Non, nous ne suspendrons pas les débats. Quelle drôle d'idée ! (Rires à droite) Si votre politique c'est de toujours remettre à plus tard, (exclamations à gauche) de demander des moratoires, c'est une curieuse façon d'exercer sa responsabilité ! (Exclamations à gauche)

Notre devoir, c'est de faire évoluer notre système de retraite pour en garantir la durée pour les générations à venir, pas de créer une commission, pas d'instituer un moratoire ! Nous refusons les faux-semblants. Mais nous ne confondons pas le dialogue social et la démocratie politique. Nous avons été au bout du dialogue social. (Exclamations prolongées à gauche) Nous avons entendu les organisations syndicales, les partis politiques, les Français. (Exclamations à gauche) Ce texte a évolué de plusieurs milliards depuis son examen par l'Assemblée nationale.

Nous ne confondons pas non plus la démocratie politique et la pression de la rue. Nous ne confondons pas le droit de grève avec le droit de blocage ou le droit d'incendier. Il y a des limites à ne pas franchir ; le gouvernement fera respecter l'ordre public, car il en va de la liberté de tous.

La démocratie est bien vivante et elle s'exprime à l'Assemblée nationale et au Sénat par le biais de élus, mais à un moment donné, le débat doit se terminer et le Sénat doit voter : c'est l'expression de nos institutions et pas celle de la rue.

Nous sommes attentifs aux retraités de ce pays, retraités d'aujourd'hui et de demain, ces jeunes Français qui souhaitent bénéficier de la même protection sociale que nous. Vous voudriez transférer les efforts indispensables aux générations futures. C'est votre solution, pas la nôtre. Beaucoup se joue avec cette réforme. C'est difficile, mais vous n'avez jamais eu le courage de faire des réformes difficiles : vous n'avez jamais fait que des réformes faciles ! (Applaudissements à droite, protestations à gauche) Avec ce texte se joue l'avenir de nos retraites, l'image de la France dans le monde et notre capacité à bouger. (Exclamations prolongées à gauche) Nous devons savoir résister au vieux démon de l'immobilisme. Puisque vous avez fait des demandes à la majorité et au Président de la République -je transmettrai, bien sûr-, je demande à l'opposition de garder son calme. (Exclamations à gauche) Je lui demande aussi d'être responsable vis-à-vis des générations futures. (Applaudissement nourris et prolongés à droite)

M. Jean-Pierre Bel.  - (Exclamations à droite) Nous avons entendu les discours de M. Longuet et de M. le ministre : toujours les mêmes ! Rien de changé... Nous nous adressons directement au Président de la République. Nous demandons une suspension de séance. (« Non, non ! » à droite)

M. Nicolas About.  - Cela fait plus de quinze jours que l'opposition fait traîner les choses. (Vives exclamations à gauche ; applaudissements à droite) Quand nous parlons, vous hurlez ! Quand on prétend diriger un pays, on apprend la politesse ! (Cris et protestations à gauche ; applaudissements à droite) Nous souhaitons que le débat se poursuive, il faut mettre en oeuvre cette réforme indispensable. (Mêmes mouvements)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Je m'associe à la demande de suspension. Chers collègues de la majorité, vous êtres de vrais provocateurs ! (Rires et protestations à droite) Vous refusez tout véritable débat en voulant imposer une réforme dont le peuple ne veut pas ! (Applaudissements à gauche)

Hommage à une délégation étrangère

Mme la présidente.  - (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent) J'ai le très grand plaisir, au nom du Sénat, de saluer la présence, dans notre tribune officielle, d'une délégation de la Chambre de la Fédération d'Ethiopie, conduite par Mme Dimitu Anbisa. Nous sommes particulièrement sensibles à l'intérêt et à la sympathie que cette jeune démocratie porte à notre institution.

Au nom du Sénat de la République, je forme des voeux pour que le séjour de nos collègues en France contribue à établir des liens d'amitié entre nos deux pays et je leur souhaite la plus cordiale bienvenue. (Applaudissements)

La séance, suspendue à 16 heures 35, reprend à 16 heures 50.

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Rappel au Règlement

M. Jean Louis Masson.  - En tant que non-inscrit, j'avais aussi demandé à m'exprimer. Je regrette que vous ne m'ayez pas donné la parole. Cette désinvolture me désole. Nous avons des droits, comme les autres sénateurs.

Mme la présidente.  - Ce sont les présidents de groupes qui se sont exprimés.

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente.  - Nous reprenons la discussion du projet de loi portant réforme des retraites.

Article 32 quinquies (suite)

Mme Christiane Demontès.  - Notre pays vit une situation très grave, une situation de crise. Cela est déjà arrivé. Mais à chaque fois, le Président de la République et le Gouvernement ont réussi à ouvrir des espaces de dialogue. Je demande à nouveau solennellement que les travaux du Sénat soient suspendus le temps nécessaire (« Non ! » à droite) et que le Président de la République prenne l'initiative de mettre autour de la table les partenaires sociaux (protestations à droite) car le dialogue, contrairement à ce que ne cesse de dire le ministre, n'est pas allé à son terme. (Applaudissements à gauche)

M. Éric Woerth, ministre.  - La séance a été suspendue dix minutes, cela me semble suffisant...

M. Guy Fischer.  - Dix minutes pour le dialogue social, c'est trop !

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Les Français apprécieront !

Mme Annie David.  - Cette réponse est indigne, monsieur le ministre !

M. Robert Navarro.  - La France va très mal et les incidents se multiplient ; il y a un risque que des accidents graves surviennent. Les violences sont inacceptables et je les condamne ; mais il est déraisonnable de semer les raisins de la colère !

Il est encore temps, monsieur le ministre, d'éviter au pays une crise dramatique. Rien ne vous empêche de reporter à l'après-présidentielle tout ou partie de l'application de la loi. Le calendrier de la réforme est tel que nous ne sommes pas à quelques mois près ! (Marques de dénégation à droite) La loi pourrait ainsi être votée et nous pourrions aller sur le terrain ramener le calme. Nous avons tous à gagner à une modification du calendrier. Ne prenons pas le risque d'avoir un mort sur la conscience !

J'en viens à l'article 32 quinquies. Il ne concerne en réalité que très peu de Français et il risque de nuire à la retraite par répartition. Il s'agit seulement de sauver les retraites chapeau. Je voterai la suppression. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean Louis Masson.  - Dans une démocratie parlementaire, c'est au Parlement de délibérer. Il n'a pas à subir la pression de la rue. (Marques d'approbation à droite) La démocratie doit être respectée, quoi que l'on pense de telle ou telle disposition législative.

Je suis très réservé sur les retraites chapeau. Au prétexte de les moraliser, on va donner un petit quelque chose aux salariés... Les retraites chapeau devraient être soumises au régime fiscal et social de droit commun. Si la loi comportait quelques mesures équitables, il y aurait moins de gens dans la rue ! (Marques d'approbation à gauche)

M. Jean-Pierre Fourcade.  - La politique du tout ou rien n'est pas une bonne politique. Tout le monde constate qu'il y a eu des retraites chapeau d'un montant scandaleux. Mais il est impossible de les supprimer ; dans l'économie mondialisée d'aujourd'hui, les chefs d'entreprises et les sièges sociaux iraient à l'étranger. (Marques d'accablement à gauche)

Mme Raymonde Le Texier.  - C'est cela qui est inacceptable !

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Cet article moralise les retraites chapeau. En le refusant, vous restez dans une perspective franco-française du type 1950 amélioré ! (Applaudissements à droite)

M. Claude Bérit-Débat.  - Malgré leur mobilisation massive, les Français devront subir une régression sociale sans précédent. Cet article 32 quinquies franchit un pas supplémentaire dans le cynisme. On fait une petite concession aux salariés pour pérenniser un gros avantage aux dirigeants. On marche sur la tête ! Vous légitimez des pratiques que l'opinion, la morale et même la justice réprouvent ; je pense à la décision de la Cour de cassation dans l'affaire Daniel Bernard... Ces pratiques doivent être strictement encadrées et conserver un caractère socialement acceptable, sinon disparaître.

Une fois de plus, on veut nous faire croire qu'il y a avancée alors qu'on veut préserver des rentes de situation. En juin, le ministre avait estimé que les patrons devaient donner l'exemple et faire des efforts ; le Premier ministre, lui, avait jugé que le mécanisme qui consiste à faire financer par l'entreprise les retraites de leurs hauts dirigeants n'était pas acceptable. Une fois encore, ses actes contredisent ses paroles. (Applaudissements à gauche)

M. Jean Desessard.  - Excellent !

M. Martial Bourquin.  - Cette réforme des retraites n'était pas prévue : le Président de la République avait dit qu'il ne la ferait pas.

Quand on voit le projet commun de la CNP et de Malakoff Médéric, entreprise dirigée par le frère du Président de la République, on peut se demander s'il y a coïncidence et si on ne prépare pas le dynamitage de la retraite par répartition.

Le ministre dit à l'envi qu'il veut la sauver. Mais chacun se souvient de la promesse, répétée sur tous les tons par M. Sarkozy, que GDF ne serait pas privatisée ! On sait ce que vaut sa parole ! (Exclamations à droite)

Avec la mise en place d'un fonds de pension à la française s'ouvre un marché estimé de 40 à 100 milliards d'euros : l'argent des salariés sera utilisé pour la financiarisation de l'économie. Avec la mise en place de la capitalisation, vous préparez la fin de la répartition -se rappelle-t-on l'aventure des retraités d'Enron ?

Cela explique votre fermeture dans le présent débat.

M. Longuet a parlé d'une « majorité responsable ». L'est-elle si elle impose cette réforme des retraites et préserve en même temps le bouclier fiscal ? Il ne faut pas dialoguer seulement entre soi mais dialoguer avec le peuple. Vous pouvez rouvrir les négociations avec les organisations syndicales ! (Applaudissements à gauche)

M. François Fortassin.  - Nous sommes au coeur d'un dispositif excessivement important. Nos concitoyens attendent un signe d'espoir. Ils considèrent ce qui est proposé comme injuste, inéquitable, et même scandaleux. Une réforme est indispensable, encore faut-il qu'elle soit acceptée par la population. (Marques d'approbation à gauche)

M. Bernard Piras.  - Et qu'elle soit juste !

M. François Fortassin.  - Il ne faut pas, pour cela, que les plus fragiles paient pour les plus fortunés. Vous êtes bardés dans vos certitudes. Un parlementaire ne se déshonore pas en faisant des compromis. Écoutez le pays ! Nos concitoyens ont le sentiment que la seule nécessité dans ce pays, c'est de devenir riche ! Avec le bouclier fiscal, vous vous êtes mis une belle balle dans le pied. N'amochez pas l'autre pied ! (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Sueur.  - On nous répète que la retraite pas répartition sera préservée. Et puis, pour ceux qui veulent, il y a l'épargne retraite, un choix volontaire. Mais cette nuit, vous avez inventé l'épargne retraite obligatoire, le choix forcé. Premier mélange des genres. Puis est venue la participation, qui pourra se transformer automatiquement en épargne retraite si on omet de prendre ses précautions. Et maintenant, le complément en échange de la retraite chapeau... Qui se retrouvera dans ce système tarabiscoté ? Sans compter que vous créez une liaison perverse entre l'épargne retraite obligatoire et la retraite chapeau. Il y en a assez de ces retraites chapeau, de ce bouclier fiscal, de ces revenus financiers exorbitants, de ces stock-options, de cet étalement éhonté de richesses ! Les Français ne comprennent pas que dans cette réforme, on demande aux bénéficiaires du bouclier fiscal de leur faire l'aumône.

Il peut y avoir l'obstination de ceux qui sont certains d'avoir raison ; il peut y avoir la sagesse de se mettre autour de la table pour élaborer une réforme juste. La politique du pire est la pire des politiques ! (Applaudissements à gauche)

M. Claude Domeizel.  - Avec cet article 32 quinquies, on est dans une situation irréaliste. Nous parlons de retraite chapeau et, aux portes du Sénat, manifestent précisément ceux qui n'en veulent pas. (« Il n'y a personne ! » à droite)

Mon expérience m'a appris que dans les situations difficiles, il fallait faire preuve d'humilité, sortir du schéma « j'ai raison, tu as tort » et toujours laisser une porte ouverte. C'est ce que vous ont demandé les présidents Bel, Borvo Cohen-Seat et Collin.

M. Jacques Muller.  - Cet article 32 quinquies légitime les retraites chapeau. M. Fourcade parle de notre ouverture au monde et de notre exposition aux délocalisations. Hier, c'étaient la fiscalité trop lourde aux entreprises, les normes sociales, les normes environnementales. Aujourd'hui, ce sont les retraites chapeau, dont nous ne pourrions nous passer. Demain, peut-être, les systèmes de protection sociale...

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Et les congés payés !

M. Jacques Muller.  - Je suis sûr que vous soutiendrez mon amendement alignant la retraite des parlementaires sur le régime général : là, il n'y a pas risque de délocalisation ! (Sourires)

M. Desessard vous a posé hier une question, à laquelle nous n'avons toujours pas de réponse : quel est le montant de la défiscalisation des plans d'épargne retraite ?

Mme Catherine Tasca.  - La droite ressasse l'idée que toute diminution des privilèges exorbitants que s'accordent les grands dirigeants susciterait un large mouvement d'exode et d'expatriation. Ce n'est pas sérieux.

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Certains sont partis !

Mme Catherine Tasca.  - La France est restée la France... Il y a deux ans, quand il y a eu la crise des banques, c'est l'État qui les a sauvées ! Votre majorité ne cesse d'en appeler à la responsabilité les parlementaires de l'opposition, les grévistes, les manifestants, au-delà de la raison : nous demandons seulement que ces privilèges soient ramenés à de justes proportions de sorte qu'ils puissent être acceptés par l'opinion.

Je suggère que l'argument du risque de délocalisation sorte du débat parce qu'il n'est pas crédible économiquement. Vous ne voulez pas toucher aux stock-options et autre parachutes dorés mais vous imposez aux salariés de travailler plus longtemps pour des retraites affaiblies, quand ils ont un emploi. (Applaudissements à gauche)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Vous soutenez les privilèges exorbitants. Jusqu'où soutiendrez-vous la mise aux normes de la France, face à la concurrence internationale ? Dans certains pays, les salariés touchent un euro par jour. Dans certains pays, il n'y a aucune protection sociale... C'est cela votre modèle ? Nous allons à une catastrophe nationale et internationale !

On voit bien qui vous écoutez. Vous êtes sourds à ceux qui refusent votre réforme injuste mais tout ouïe pour les exigences du patronat. Vous avez tout simplement repris, en l'habillant un peu, le programme du Medef.

Comme vous ne voulez pas dire que vous appliquez le programme du Medef, vous prétendez sauver la répartition. Mais il faudra y venir en 2018 ! D'ailleurs, je vous invite à vous reporter au petit livre Besoin d'air, publié par le Medef : il dénonce la retraite par répartition comme une de ces erreurs historiques dont la France a le triste secret et prône le glissement progressif vers la capitalisation. Tous les amis du Fouquet's l'attendent !

M. Ronan Kerdraon.  - A gauche, nous nous sommes tous demandés pour quelle raison le Président de la République avait engagé cette réforme.

M. Jean-Claude Gaudin.  - Il y a la crise !

M. Ronan Kerdraon.  - Il y a d'autres motivations : en 2006, Guillaume Sarkozy (« Ah ! » à droite) est devenu le PDG du groupe Médéric, devenu Malakoff Médéric, qui a conclu un partenariat avec la Caisse des dépôts et sa filiale CNP. Comment faire main basse sur l'épargne des Français ? En déstabilisant les retraites par répartition. Il y a un marché estimé entre 40 et 110 milliards.

A l'horizon 2020, une baisse du taux de remplacement de 8 % est attendue, nous dit Médiapart. Chez Malakoff Médéric, on se frotte les mains ! Quelle belle équipe que celle de Nicolas et de Guillaume, l'un asphyxie le système par répartition et l'autre met en place la capitalisation. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. David Assouline.  - Cet article est un cheval de Troie. La réforme dans notre pays a une histoire : à chaque fois, on a voulu améliorer le sort fait à l'humain. Oui, il faut réformer le système des retraites pour l'améliorer concernant l'égalité hommes/femmes et la pénibilité. Mais vous avez fait l'inverse ! Il n'y aura que 30 000 personnes à voir leur sort s'améliorer. Pour les autres, rien. Et pour les femmes qui n'ont pas eu trois enfants, ce sera 67 ans pour une retraite sans décote.

Les enquêtes d'opinion actuelles prouvent que les Français ne font pas confiance au régime par répartition pour les années à venir.

Arrêtez de nous faire des leçons sur la réforme : une réforme, oui ; mais pas une régression. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Roland Courteau.  - Les Français ne veulent pas d'une réforme injuste et les manifestants vous le disent régulièrement. Mais vous restez sourds, enfermés dans votre bunker.

Ici, il est question des retraites chapeau dont la France ne saurait se passer, d'après M. Fourcade, pour empêcher les délocalisations. N'est-ce pas du chantage, exercé sur les Français qui vivent avec des retraites de misère ? Il faut un consensus national, comme en Suède où l'on a pris le temps nécessaire pour avancer, avec l'appui du peuple et non contre lui.

Bien évidemment, il faut réformer les retraites, mais pas comme vous le faites. Certains se sont réjouis tout à l'heure d'une réconciliation sur l'amiante. C'est la preuve qu'on peut avancer en matière de justice : écoutez l'opposition, la majorité du peuple et la rue. Cela devrait vous conduire à interrompre cette discussion. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Alain Fouché.  - Beaucoup de sénateurs estiment qu'en matière de parachutes dorés, de stock-options et de retraites chapeau, il y a des excès. Je souhaite plus de taxation et d'ailleurs, des amendements ont été déposés en ce sens que nous examinerons plus tard. (M. François Fortassin applaudit)

Mme la présidente.  - Amendement n°51, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Alors que notre système de protection sociale a joué un rôle d'amortisseur de la crise, vous proposez la généralisation des retraites par capitalisation pour justifier les retraites chapeau. C'est indécent.

Les effets de la crise de 2008 n'ont pas fini de se faire sentir que vous proposez de tourner le dos à notre protection sociale. Comment garantir les emplois, les pensions élevées et la pérennité de ces fonds ? Ce n'est pas possible.

Au Chili, les fonds de pension mis en place sous la dictature de Pinochet devaient produire leur effet en 2007. Or, 50 % des Chiliens ne bénéficient pas des retraites pour lesquelles ils ont cotisé !

Il faut suspendre le débat, afin de renouer le dialogue social, en votant notre amendement. (Applaudissements sur les bancs CRC)

Mme la présidente.  - Amendement identique n°282, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet.

M. Jacques Muller.  - Vous voulez sauver les apparences avec cet article. Mais la disposition est perverse puisqu'elle permet de légitimer les retraites chapeau qui scandalisent nos concitoyens. En outre, cet article est un aveu d'échec du Gouvernement : les pensions versées étant trop faibles, dans quelques années, les salariés devront capitaliser.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°387 rectifié, présenté par MM. Collin et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

Mme Françoise Laborde.  - Permettez, en guise de rappel au Règlement, un billet d'humeur, je n'ai pas dis d'humour car je n'ai pas le coeur à rire. Comme beaucoup d'entre nous, je suis restée jusqu'à 3 h 25 cette nuit. Et je découvre qu'un article est appelé en priorité : comment travailler correctement ? J'ai l'impression que nous jouons aux charades.

Sans doute vous inspirez-vous du magnifique traité de Luc Etienne, L'art de la charade à tiroirs.

M. Josselin de Rohan.  - Il est épuisé, comme nous !

Mme Françoise Laborde.  - J'ai suivi de près ce projet de loi, mais quand des articles sont discutés dans le désordre, comment trouver une cohérence ? Avez-vous tiré au sort l'ordre de passage des articles ?

Après le vote des articles 5 et 6, des électeurs se sont étonnés de me voir repartir à Paris : « c'est voté », m'ont-ils dit, et nous y sommes encore.

M. Josselin de Rohan.  - Grâce à vous !

Mme Françoise Laborde.  - Cet examen en désordre fait certes travailler nos neurones mais je dirai avec amertume et tristesse mon regret que cette loi si importante soit traitée en dépit du bon sens.

Cet amendement combat la retraite par capitalisation, pour les raisons exposées par mes collègues. (Applaudissement à gauche)

Mme la présidente.  - Amendement identique n°475, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Mme Gisèle Printz.  - Cet article est un bon exemple de jésuitisme.

Il conditionne la mise en place de régimes de retraite supplémentaire à prestations définies à certaines catégories de salariés dans les entreprises à l'existence de Perco ou de contrats d'épargne retraite.

Les régimes de retraite supplémentaire sont en majorité réservés à une infime catégorie de cadres dirigeants de grandes entreprises, les plus connus de ces régimes ad hoc étant « les retraites chapeau ».

Il incite donc les cadres dirigeants qui souhaitent continuer à en bénéficier à mettre en place un Perco ou un contrat d'épargne retraite, afin de dissimuler les privilèges qui leur sont octroyés.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Avis défavorable à ces amendements de suppression. Madame Laborde, nous avons appelé en priorité les articles sur les mesures d'âge, au coeur de ce projet, et renvoyé les additionnels en fin de discussion, mais il n'y a aucune malignité dans ce procédé.

M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.  - Même avis. Cet article permet d'équilibrer le système de retraites chapeau. Le supprimer serait en rester en statu quo.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Cet article est symptomatique de l'esprit de cette loi : il a été sans doute dicté par le Medef car il garantit les retraites chapeau au prix de quelques contraintes.

Ceux qui nous expliquent que les retraites chapeau éviteront les délocalisations nous expliquaient que le bouclier fiscal le permettrait et brandissaient la liste secrète des exilés fiscaux qu'ils allaient faire revenir de Suisse : combien l'ont fait ?

En présentant les retraites par capitalisation comme une fatalité, vous reconnaissez que vous avez condamné la retraite par répartition. C'est un marché de dupes.

M. Jacques Muller.  - Le développement de l'épargne retraite est un aveu d'échec. Le déséquilibre démographique ne pourra pas être réglé par cette réforme. M. Woerth nous expliquait qu'il faut entrer dans les détails, mais l'un d'entre eux a été oublié : les revenus liés aux capitaux. Vous jouez la carte de la spéculation -plutôt que la sécurité : c'est un véritable saut dans l'inconnu. La répartition est le meilleur système mais il faut parvenir à l'équilibre, qui implique un choix politique délicat entre prélèvements sur les actifs et préservation d'un bon niveau de pension.

La spéculation sur l'épargne retraite va s'accentuer : on nous dit, épargnez tout de suite, on verra plus tard. C'est une catastrophe annoncée. Voyez Enron, la situation britannique... Nous nous y opposons résolument. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Martial Bourquin.  - On veut nous faire accepter les retraites chapeau, pour éviter les délocalisations. Comme l'a dit le secrétaire général de la CFDT, « Mais qu'est-ce qu'ils font de leur fric ? ». La ficelle, je veux dire la corde, est trop grosse ! Cet article introduit la capitalisation qui va progressivement l'emporter. Je ne crois pas que Guillaume Sarkozy ait pris la tête de Malakoff Médéric par hasard. (Exclamations à droite) Nous avons un mur devant nous. Vous faites comme l'Ancien Régime : tout pour les privilégiés -les gens du CAC 40- sans entendre ce que pensent bien des gens, de droite comme de gauche, de l'injustice de votre réforme.

Le Gouvernement veut dynamiter le système par répartition.

M. Roland Courteau.  - C'est ça, la vérité !

M. Martial Bourquin.  - Après les manifestations sans précédent, il est temps d'en revenir à la raison. (On le confirme à droite) Passez à la table des négociations et revenez au Parlement avec une vraie réforme qui ne soit pas ce retour en arrière que vous nous présentez. Il est encore temps : cessez d'être sourds aux revendications du peuple ! (Applaudissements à gauche)

M. Christian Cointat.  - « Des mots, des mots, des mots » !

M. Nicolas About.  - « Retour en arrière » et pourquoi pas « descendre en bas » ?

Mme Marie-France Beaufils.  - Le principal intérêt des retraites chapeau, c'est leur régime fiscal dérogatoire. Vous les mettez en parallèle avec le système par capitalisation pour les salariés en espérant ainsi faire passer la pilule. Nous ne pouvons accepter ce glissement progressif vers la capitalisation. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. François Marc.  - Cet article justifie l'existence des retraites chapeau. Ce projet de loi est injuste, nous l'avons dit, je crois. Ici, c'est l'article de trop. C'est une sorte d'autolégitimation pour des avantages qui se montent souvent à plusieurs millions d'euros. Ces dernières semaines, les journaux font état de l'explosion des rémunérations des administrateurs des entreprises. C'est totalement illégitime. (Marques d'impatience à droite) Depuis 2006, les dépenses fiscales en faveur des entreprises se sont multipliées. Et même le Conseil des prélèvements obligatoires trouve ces retraites chapeau injustes.

Nous vous invitons à voter ces amendements.

Cet article n'est vraiment pas acceptable. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

A la demande du groupe UMP, les amendements identiques nos51, 282, 387 rectifié et 475 sont mis aux voix par scrutin public. (« Obstruction ! » à gauche)

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 153
Contre 83

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°1148, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

M. François Autain.  - Nous sommes opposés à l'épargne retraite. Tous les titres de ce projet de loi sont inadmissibles (on le confirme à gauche) mais celui-ci l'est particulièrement puisqu'il fragilise la retraite par répartition pour mieux pousser les salariés à s'engager dans l'épargne individuelle. La retraite par capitalisation n'est un miroir aux alouettes car elle n'est pas garantie.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Jacques Muller.  - L'épargne retraite est un avantage donné aux plus riches. C'est une rupture avec le principe de solidarité qui fonde notre système créé au lendemain de la deuxième guerre mondiale.

Sur le principe, tout le monde a le droit d'épargner. Mais en fait, tout le monde ne le peut pas. L'ignorer, c'est pratiquer la politique de l'autruche.

Cette exonération fiscale revient à faire payer les pauvres pour les riches. Une loi économique fondamentale, la loi de Keynes, enseigne que la propension à épargner est une fonction croissante du revenu : plus on est riche, plus on épargne. Avec ce dispositif, le Gouvernement se prépare à aider les plus riches ! Pour la troisième fois, je demande au ministre quel est le coût de l'épargne retraite pour la collectivité.

Nous sommes loin, avec cette redistribution à l'envers, des principes fondateurs de notre système de retraite. Le général de Gaulle et Jean Moulin, son délégué au CNR, doivent se retourner dans leurs tombes !

L'amendement n°1148 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°1149, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

Mme Mireille Schurch.  - Cet article organise la retraite par capitalisation. La prochaine étape sera sans doute de la rendre obligatoire.

Les Français le savent et vous le disent : la retraite par capitalisation amplifie les inégalités salariales.

Il faut supprimer votre mécanique douteuse et incompréhensible. Écoutez la rue ! (Exclamations à droite) Les Français veulent des retraites leur permettant de vivre dignement ! (Applaudissements à gauche)

L'amendement n°1149, repoussé par la commission et le Gouvernement,n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°1150, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

Mme Michelle Demessine.  - Quand nos concitoyens ont découvert les exorbitantes retraites chapeau qui viennent après les exorbitantes rémunérations des grands patrons, ils ont été saisis par l'immoralité du système libéral, cher à votre coeur, dans lequel vous voulez faire rentrer les Français à marches forcées. Eux savent qu'ils devront travailler plus longtemps pour gagner moins ; pour eux, pas de retraite chapeau, mais une retraite au rabais !

Le Président de la République voulait « moraliser le capitalisme » ; je doute qu'il y parvienne avec cet article scandaleux et arrogant !

Mme la présidente.  - Amendement n°1212, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

I. - Alinéas 3 et 4

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

2° Régime de retraite supplémentaire auquel l'affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale.

II. - En conséquence, alinéa 5

Remplacer la référence :

par la référence :

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Amendement de simplification.

Mme la présidente.  - Amendement n°1151, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

Mme Éliane Assassi.  - Ne tournons pas autour du pot. C'est pourtant ce que vous faites, en cherchant insidieusement à inciter les Français à préparer une retraite par capitalisation. Nous assistons à la mainmise des intérêts privés sur la manne des pensions, marché colossal que les banques et les assurances ne veulent pas laisser échapper.

Mme la présidente.  - Amendement n°1152, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

M. François Autain.  - Je veux vous faire observer très respectueusement, madame la présidente, que je n'ai pas compris pourquoi mon amendement avait été rétrogradé. (Exclamations à droite)

Mme la présidente.  - Tout aussi respectueusement (sourires), je vous indique que c'est la conséquente logique du retrait de l'amendement n°623.

M. François Autain.  - Votre explication n'est pas convaincante, mais je m'en contenterai ! (Rires)

Je ne vais pas revenir sur le fond de notre argumentation contre cet article : le temps presse. (Marques d'irritation à droite)

Ce n'est pas tant le délai qui nous importe que le principe même que pose cet alinéa.

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Défavorable.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Favorable à l'amendement n°1212, défavorable aux autres.

Rappel au Règlement

M. Charles Gautier.  - Rappel au Règlement sur l'organisation des séances ! Cet après-midi, on nous a rappelé longuement que nous vivions dans une démocratie parlementaire et que nous ne devions pas débattre sous la pression de la rue. (On le confirme à droite)

M. Nicolas About.  - Ni de la presse !

M. Charles Gautier.  - Dans une dépêche de l'AFP, datée de 18 heures 14...

M. Robert del Picchia.  - L'AFP, ce n'est pas la Bible !

M. Charles Gautier.  - ...le secrétaire général de l'Élysée « somme le Sénat de presser le pas » ! (Exclamations)

M. Guy Fischer.  - Scandaleux !

M. Laurent Béteille.  - C'est vous qui avez fait appel au Président de la République !

M. Charles Gautier.  - Pas à un de ses acolytes ! (Applaudissements à gauche ; protestations à droite)

Je souhaite que le Bureau se réunisse pour donner son opinion. (Applaudissements à gauche)

Discussion des articles (Suite)

Article 32 quinquies (Suite)

M. Jacques Muller.  - Je reviens sur l'article 32 quinquies : le développement des Perco pose un problème économique majeur. Il participe de la logique d'une économie casino : cela représente 230 milliards, qui ne sont pas investis. La presse spécialisée confond investissement et placement. (Mme Muguette Dini le confirme) L'investissement, c'est la formation brute de capital fixe : c'est la création de moyens de production dans l'entreprise, la création d'infrastructures, de logements, y compris sociaux. Le déficit de formation brute de capital fixe pose un problème économique.

Avec la thésaurisation en placements financiers, qui n'est que la version modernisée du bas de laine, on ôte une grande quantité d'argent du circuit proprement économique. Se développent ainsi des bulles financières qui, inéluctablement, crèvent à rythme régulier. (Applaudissements à gauche)

L'amendement n°1150 n'est pas adopté.

L'amendement n°1212 est adopté.

Les amendements nos1151 et 1152 deviennent sans objet.

Mme Nicole Bricq.  - Le groupe socialiste votera contre l'article 32 quinquies.

D'abord parce que le ministre du travail répète à l'envi que ce projet de loi est fait pour sauver la retraite par répartition. Ce n'est pas le cas de cet article, qui concerne le Perco.

Ensuite, et l'amendement n°1212 le confirme, l'épargne salariale méritait un texte spécifique. Les divergences entre l'Assemblée nationale et notre commission des affaires sociales ne sont pas minces... Vous pourrez dire à M. Guéant que nous n'aimons pas les manoeuvres dilatoires : nos amendements ont été déposés le 5 octobre. Nous ne prenons personne par surprise ! Les retraites chapeau ne concernent qu'un nombre très limité de personnes, mais elles sont nichées dans l'épargne salariale. Et je comprends, du coup, vos hésitations.

Enfin, depuis la loi Tepa, le Gouvernement ressasse que le paquet fiscal permet d'éviter l'exil de ceux qui contribuent à la richesse du pays. J'ai fait adopter un amendement demandant un rapport au Gouvernement : il n'y en a jamais eu !

Ne resservez pas des plats réchauffés : c'est indigeste. (Applaudissements à gauche)

M. François Fortassin.  - La majorité de notre groupe votera contre cet article. On arrive, avec les retraites chapeau, à des écarts de revenus encore plus élevés que quand les gens sont en activité. Ils sont pourtant encore moins justifiés.

La réduction des écarts de retraite aurait été un symbole fort, mais vous ne l'avez pas voulu car vous voulez protéger les privilégiés.

Nos concitoyens ne l'acceptent pas, et je ne peux que leur donner raison. (Applaudissements à gauche)

A la demande du groupe CRC, l'article 32 quinquies est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 338
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l'adoption 184
Contre 154

Le Sénat a adopté.

Article 32 sexies

Mme la présidente.  - Amendement n°52, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

M. Guy Fischer.  - Il est défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°476, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Mme Patricia Schillinger.  - Quelle est la différence entre information, communication et publicité ? La différence est parfois ténue entre ces deux dernières. L'article 32 sexies parle de « communication » ; de fait, ce ne sera pas de l'information neutre !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Il y a déjà un dispositif d'information qui permet de connaître le montant de l'épargne, et l'article le complète sur le versement d'une rente. Ce n'est pas pour autant un dispositif engageant.

M. Gérard Le Cam.  - L'offensive à marche forcée pour faire avancer ce texte malgré l'opposition des Français vous mène, ici, à ménager un espace encore plus grand pour le soir.

Le Gouvernement applique benoîtement les « recommandations » conjointes de Bruxelles et des marchés financiers. Il faut s'aligner dans la perspective d'« Europe 2020 ». Vous cassez le système solidaire pour dire à nos concitoyens qu'il ne fonctionne pas et qu'il faut le remplacer par un système par capitalisation.

Les amendements identiques nos52 et 476 ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°185 rectifié, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Un arrêté précise les conditions d'application du présent alinéa.

M. Jean-Jacques Jégou.  - L'article modifie l'article L. 132-22 du code des assurances relatif à l'obligation d'information annuelle concernant les contrats de retraite afin de prévoir la communication d'une estimation de la rente viagère qui serait versée au titre des contrats liés à la cessation d'activité professionnelle.

Cet amendement prévoit que les modalités d'application de cette nouvelle obligation seront fixées par arrêté afin de tenir compte de la spécificité des contrats, qu'ils soient formulés en unités de compte ou non. Il faut que les salariés soient informés sans que cela pèse sur les assureurs.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Favorable.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Favorable.

M. Jean Desessard.  - Je ne comprends absolument pas cet amendement. En général, cela se passe comment ? On dit souvent que la loi est bavarde. Mais quel est l'intérêt d'écrire une telle phrase dans la loi ?

L'amendement n°185 rectifié est adopté.

L'article 32 sexies modifié est adopté.

Article 32 septies

Mme Odette Terrade.  - Il est à croire que vous ne considérez pas les salariés comme propriétaires de leur propre épargne ! Pourquoi tenez-vous tant à ce que le versement se fasse par rente ? Sans doute pour que les spéculateurs de toute sorte puissent continuer à jouer avec l'argent des salariés.

Hier, Mme Debré évoquait la nécessité d'un traitement fiscal différencié de l'épargne à court terme et de l'épargne à long terme. Le salarié qui a épargné toute sa vie pour sa retraite croit pouvoir en profiter ; vous voulez lui interdire de retrouver son argent sous la forme qu'il aura choisie !

L'amendement n°53, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°753, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC-SPG.

I. - Rédiger ainsi cet article :

Le quatrième alinéa du I de l'article L. 144-2 du code des assurances est ainsi rédigé :

Le plan d'épargne retraite populaire peut, à compter de la date de liquidation de sa pension dans un régime obligatoire d'assurance vieillesse ou de l'âge fixé en application de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, être payable, à cette échéance, par un versement en capital.

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État et pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Gérard Le Cam.  - Il convient de rendre aux personnes ayant souscrit un Perco la possibilité de disposer, dès la liquidation des droits à la retraite, de la totalité des sommes épargnées sur un plan. Les salariés qui ont consenti des efforts financiers pour épargner doivent être considérés comme propriétaires de leur propre argent. Il est inadmissible que les marchés financiers en confisquent 80 %.

Mme la présidente.  - Amendement n°477, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Alinéa 2

Après les mots :

à cette même date

supprimer la fin de cet alinéa.

M. René Teulade.  - Cette disposition souligne le caractère très aléatoire du rendement du plan épargne-retraite : le salarié qui accepte, plus ou moins contraint, de faire un placement lâche la proie pour l'ombre. Vous voulez que le résultat de son travail n'aille pas au travailleur mais au capital. Introduire le bonus-malus dans la sécurité sociale, c'est remettre en cause ses fondements. Soyons vigilants ! Il faut que le dialogue se rétablisse avec le peuple. (Approbations à gauche)

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - En application de l'article 44, alinéa 6, et en accord avec la commission, je demande la priorité pour les amendements nos83 rectifié quater, 558 rectifié quater, 652 rectifié, 1220, 557 rectifié bis, 69 rectifié et 327 rectifié, initialement placés après l'article 3 octies.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - D'accord.

La priorité est de droit.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Il est offensant que le Sénat reçoive des instructions de M. Guéant. Le Parlement n'a pas à recevoir d'injonctions de l'exécutif, et encore moins du secrétaire général de l'Elysée. Quelle sera la suite de nos travaux, et notamment ce soir ? (Vives protestations à gauche, où l'on demande une réponse)

Mission commune d'information (Nominations)

Mme la présidente.  - Je rappelle que les groupes ont présenté leurs candidatures pour la mission commune d'information sur les toxicomanies.

La présidence n'a reçu aucune opposition. En conséquence, elles sont ratifiées et je proclame MM. Alduy, Barbier, Mmes Bonnefoy, Bout, Demontès, Ghali, M. Gilles, Mmes Hermange, Hummel, Klès, MM. Le Menn, Milon, Mme Pasquet, MM. Pillet et Pozzo di Borgo membres de la mission commune d'information sur les toxicomanies.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Et la réponse à Mme Borvo ?

Mme la présidente.  - Je suspends la séance. (Vives protestations à gauche)

M. David Assouline.  - Le Parlement se plie aux injonctions de M. Guéant !

La séance est suspendue à 19 heures 30.

présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente

La séance reprend à 21 heures 30.

CMP (Accord)

Mme la présidente.  - La commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de l'examen du projet de loi sur la réforme des retraites.

Rappels au Règlement

M. Guy Fischer.  - Tout au court de cette journée, Guillaume Sarkozy a été omniprésent dans nos débats. Quelle ne fut pas ma surprise de trouver sur ma table une invitation ! « Monsieur le vice-président, nous organisons un prochain déjeuner de travail, auquel nous vous convions, sur le thème : quelle sera l'assurance maladie de demain ? ». Autour de qui ? De Guillaume Sarkozy, délégué général de Malakoff Médéric. (Sourires) Il a toujours une longueur d'avance sur nous... Et puis cet autre document qui dit : il ne faut pas avoir peur des retraites complémentaires privées. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Bernard Frimat.  - Comment allons-nous travailler ? Mme la présidente Dini a demandé la priorité -que nous ne discutons pas, puisqu'elle est de droit en l'espèce- pour quelques articles additionnels. A quel moment vont-ils venir en discussion ? Maintenant ? Après l'article 33 ?

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Ces amendements viendront après l'article 33.

M. Bernard Frimat.  - Merci pour cette précision.

Discussion des articles (Suite)

Article 32 septies (Suite)

Mme la présidente.  - Nous en sommes parvenus au vote sur l'amendement n°753.

A la demande du groupe UMP, l'amendement n°753 est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 153
Contre 183

Le Sénat n'a pas adopté.

A la demande du groupe UMP, l'amendement n°477 est mis aux voix par scrutin public. (M. Daniel Raoul s'exaspère)

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 339
Nombre de suffrages exprimés 338
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l'adoption 153
Contre 185

Le Sénat n'a pas adopté.

A la demande du groupe UMP, l'article 32 septies est mis aux voix par scrutin public.

M. Daniel Raoul.  - C'est M. Guéant qui fait de l'obstruction !

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 183
Contre 153

Le Sénat a adopté.

M. David Assouline.  - M. Guéant nous a dit d'accélérer ! (Sourires)

M. Daniel Raoul.  - En tant que porte-parole de mon groupe, je vous demande, madame la présidente, qu'on puisse continuer de travailler dans des conditions raisonnables. Le groupe UMP doit être en nombre, ou alors c'est qu'il vote avec ses pieds et montre ainsi son attachement à ce texte... (Exclamations à droite)

Mme la présidente.  - Je vous trouve bien agités ce soir ! (Exclamations à gauche)

M. David Assouline.  - Je ne suis pas agité, M. Raoul non plus, mais nous voulons travailler normalement. (Exclamations à droite) Nous voulons savoir où nous allons, mais nous sommes prêts à aller au bout du bout. Quand je suis arrivé ici en 2004, il était inconcevable que l'Élysée puisse dire comment le Sénat devait travailler. (Nouvelles exclamations) Si cela était arrivé, je suis persuadé que l'un de vous se serait levé pour protester. Il ne faudrait pas qu'il y ait une accoutumance. Ce qu'a fait M. Guéant est un scandale, du jamais vu ! (Exclamations indignées à droite) En plus, le groupe UMP ralentit la séance par son nombre. (Exclamations ironiques sur les mêmes bancs)

M. Éric Woerth, ministre.  - Je ne vois pas ce qui est choquant dans les propos de M. Guéant. Chacun peut s'exprimer comme il veut. Les sénateurs commentent bien ce que fait l'Élysée...

M. Charles Gautier.  - C'est scandaleux ! Et la séparation des pouvoirs !

Article 32 octies

Mme la présidente.  - Amendement n°54, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Marie-France Beaufils.  - Quels vont être nos horaires ce soir ?

Cette série d'articles a été insérée par la majorité de l'Assemblée nationale pour favoriser le développement de différentes formes de capitalisation ; son seul objectif est de mettre à bas notre système solidaire. Ce dernier titre est véritablement un bouquet final destructeur pour notre système par répartition. Tout est en place pour créer les conditions d'une individualisation.

Chacun connaît l'état de nos finances publiques ; toutes ces mesures vont contribuer à vider les caisses. De nouvelles ressources sont défiscalisées et soustraites aux cotisations sociales, donc de retraite. Je suis surprise que vous acceptiez des dispositions qui aggravent la situation financière de l'État alors que vous prétendez combattre les niches fiscales.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

Mme Marie-France Beaufils.  - Je croyais que le Gouvernement, sur pareil sujet fiscal, se donnerait la peine de nous répondre.

M. Charles Gautier.  - C'est le mépris !

L'amendement n°54 n'est pas adopté.

L'article 32 octies est adopté.

Article 33

M. Pierre Mauroy.  - J'interviens au lendemain de la sixième journée d'action organisée par les organisations syndicales et les lycéens. On dit que Nicolas Sarkozy veut trouver la sortie mais ce n'est pas en voulant passer en force qu'il y parviendra.

Il faut une retraite qui donne satisfaction à nos concitoyens. En réponse à mon intervention de vendredi, M. le ministre a ironisé en disant que la gauche aimait les chiffres ronds. Je ne suis pas banquier et je ne sais pas quelle vertu particulière ont les chiffres ronds par rapport aux autres. D'ailleurs, les chiffres des victoires de la gauche ne sont pas ronds : 1871, 1936 ne sont pas des chiffres ronds... (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Le chiffre rond de 60 ans a eu une résonnance dans le pays, il me semble. Il n'est pas possible de rejeter la retraite à 60 ans aux oubliettes de la République. (Applaudissements à gauche)

Nous sommes attachés à la réforme, on nous qualifie même quelquefois de réformistes. M. Sarkozy se dit lui aussi attaché à la réforme mais il y a de bonnes et de mauvaises réformes, et même de très mauvaises. Il faut des réformes qui plaisent aux Français ; c'est le cas de la nôtre, pas de la vôtre.

J'ajoute que chemin faisant, on laisse beaucoup de problèmes sur le côté. Non, la retraite à 60 ans n'aggrave pas la situation des jeunes ni celle des seniors. Le comble, c'est que ces derniers sont mis à la porte de plus en plus jeunes et que cette réforme les oblige à rester sur le marché du travail ! C'est inimaginable.

Vous pouvez bomber le torse, mais il y aura un autre appel, cette fois devant le peuple, et c'est lui qui tranchera. Vous marquez de mauvais points, tous les sondages le montrent : les deux tiers des Français sont opposés à votre réforme. Vous devez en tenir compte.

Le Gouvernement se réfugie dans une position de faiblesse qui sera jugée par le peuple au-delà des péripéties du vote de notre assemblée. On sait la réputation du Sénat sous la IIIe République, la IVe et le début de la Ve. Le Sénat ne doit pas redevenir la chambre noire de la République. (Applaudissements à gauche ; exclamations et marques d'impatience à droite)

Mme la présidente.  - Veuillez conclure.

M. Pierre Mauroy.  - Je commence à peine ! (Rires à gauche) Il y a deux problèmes fondamentaux : la durée de cotisation... (La voix de l'orateur est couverte par les exclamations à droite)

M. Charles Gautier.  - Écoutez-le !

M. Pierre Mauroy.  - La retraite, c'est une mesure de civilisation. (Les exclamations à droite redoublent)

M. Roland Courteau.  - Un peu de respect !

M. Pierre Mauroy.  - Contre toutes les mesures sociales que j'ai présentées en tant que Premier ministre, j'avais la droite vent debout. (Nouvelles exclamations à droite)

Ce ne sont pas les salariés seuls qui doivent payer, il faut mettre le capital à contribution. Si vous ne prenez pas les mesures que le peuple attend, les conséquences seront redoutables. Il faut suivre un autre chemin, le nôtre. (Applaudissements à gauche)

Mme la présidente.  - Amendement n°1156, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Cet alinéa retarde au 1er janvier 2012 l'entrée en vigueur du droit à information des assurés -un droit bienvenu- prévu à l'article 3. Pourquoi attendre ? Le droit d'information a été institué par la loi de 2003. Nous craignons que le point d'étape ne serve, outre à l'information de l'assuré, à promouvoir la souscription de produits financiers de retraite par capitalisation. Nous ne voulons pas d'une information orientée.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°1156 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°241, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

Mme Bariza Khiari.  - Cet article traite des conditions d'entrée en vigueur de diverses dispositions du texte ; cet alinéa, de l'application dans le temps des mesures d'âge. Votre politique est barbare. Vous vous placez sur le terrain de la démographie et non de l'économie. Les femmes seront les grandes perdantes de cette réforme, ainsi que les précaires. Si certains veulent travailler plus, qu'ils le fassent, mais laissons prendre leur retraite plus tôt ceux à qui la vie n'a pas fait de cadeaux. La solidarité doit avoir un sens. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme la présidente.  - Amendement n°1157, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 2

Supprimer les références :

26, 27 quater et 27 quinquies

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Ces articles ont été supprimés lors du passage en commission. Leur maintien dans l'article 33 prouve que le travail a été mené beaucoup trop vite et dans la confusion.

Mme la présidente.  - Amendement n°1213, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

Alinéa 2

Remplacer les références :

26, 27 quater et 27 quinquies

par les références :

27 ter AC, 27 ter AF et 27 ter AG

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Amendement de coordination. Sur les amendements nos241 et 1157, avis défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Favorable à l'amendement n°1213 et défavorable aux deux autres.

Mme Annie David.  - L'avis défavorable du rapporteur est surprenant : nous demandons la même chose que lui ! Ses réponses ne sont pas respectueuses de notre travail. Les amendements du groupe CRC-SPG sont traités à la va-vite. Je le regrette.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Ces propos ne sont pas admissibles. J'ai eu un moment d'inattention. Un peu de respect ne ferait pas de mal. (Exclamations sur les bancs CRC ; applaudissements sur les bancs UMP) Mon amendement satisfait le vôtre et il est plus complet.

M. Jacques Mahéas.  - Vous venez nous parler de respect, monsieur le rapporteur. Respecter ce texte, ç'aurait été d'abord de discuter avec les organisations syndicales. (Exclamations à droite) J'entends que la référence aux syndicats vous irrite. (Protestations à droite) Ils sont dans la rue avec le peuple français pour vous dire que votre texte est mauvais. Pour respecter la démocratie, il aurait fallu intervenir bien en amont, comme ce qui s'est fait dans d'autres pays.

M. Roland Courteau.  - En Suède !

M. Jacques Mahéas.  - En Suède, en effet, la discussion a duré des mois et des mois.

Certes, il faut une réforme des retraites, mais une bonne réforme, comme l'a dit Pierre Mauroy, c'est une réforme admise par tous qui ne favorise pas les uns tandis qu'elle brime les autres. On aurait pu étaler dans le temps la mise en oeuvre de ces dispositions. Une femme qui a commencé à travailler à 14 ans aura cotisé 44 ans avant de pouvoir prendre sa retraite, bien plus que le maximum exigé. Il s'agit souvent de métiers durs, pénibles. Vous n'avez pas l'habitude de laisser du temps aux gens pour qu'ils puissent réfléchir. Ce fut le cas pour les infirmières ; elles reçoivent maintenant des courriers comminatoires leur demandant leur choix.

Enfin, quand on entre dans la fonction publique, on en connaît les inconvénients et les avantages. Comme vous rognez sur les avantages, il y a rupture de contrat de la part de l'État. Pourquoi ne pas étaler ces mesures dans le temps ? Au lieu de cela, le couperet tombe brutalement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

A la demande du groupe UMP, l'amendement n°241 est mis aux voix par scrutin public. (Marques d'agacement à gauche)

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 153
Contre 183

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme la présidente.  - A la demande de l'UMP... (Exclamations à gauche)

M. Gérard Longuet.  - Je retire ma demande de scrutin public.

L'amendement n°1157 n'est pas adopté.

M. David Assouline.  - Combien de voix ?

Mme la présidente.  - Nous avons compté ! (Exclamations à gauche)

L'amendement 1213 est adopté.

M. Jean-Pierre Caffet.  - Selon M. Guéant, cela fait combien ? (Sourires)

Mme la présidente.  - 53 contre 63. (Applaudissements à droite)

Amendement n°1158, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Vous avez mis dans cet article toutes les mesures de datation des dispositions adoptées dans le cadre de ce projet de loi.

Selon cet alinéa, l'article 25, qui concerne la prévention de la pénibilité et le carnet de santé au travail, ne sera applicable qu'aux expositions intervenues à compter d'une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2012. Ce dossier médical permet de tirer un trait sur le passé des salariés. Cette solution est très choquante : on passe ainsi par pertes et profits toutes les expositions subies par le salarié.

Mme la présidente.  - Amendement n°478, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 4

Remplacer le mot :

intervenues

par les mots :

en cours ou prenant effet

M. Jean-Pierre Godefroy.  - J'ai trouvé discourtois que nos collègues de l'UMP veuillent empêcher M. Mauroy de conclure son intervention. (Exclamations à droite) Si M. Raffarin venait nous exposer son point de vue et dépassait son temps de parole, cela ne me choquerait pas

Nous ne savons pas ce qu'il en sera demain : considèrera-t-on que certains salariés n'auront été exposés à certains risques qu'à partir de 2012 ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Il est impossible de reconstituer toute la carrière et les expositions aux produits dangereux. On n'a pas de réponse pertinente sur la traçabilité du tracé. Défavorable, donc.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Même réponse.

Mme Annie David.  - Cela signifie que l'article 25 ne s'appliquera qu'à partir d'une date fixée par décret et que la pénibilité d'aujourd'hui ne sera pas prise en compte. Vous individualisez tout -sauf la date de prise en compte de la pénibilité. C'est une escroquerie à l'endroit des millions de travailleurs concernés. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je vous ai parlé des travailleurs de l'amiante employés par des sous-traitants, dont certains ont disparu. M. Longuet m'avait entendu. Mais avec cet article 33, vous effacez d'un trait le passé des salariés ! Vous ne pouvez faire cela délibérément !

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Il y a déjà des outils pour le passé ; nous en mettons en place un nouveau, qui recueillera toutes les données. C'est aussi simple que cela.

M. Martial Bourquin.  - S'il y a une grande injustice dans ce projet de loi, c'est celle de la pénibilité, qui raccourcit l'espérance de vie de six ou sept ans. Pourquoi ne pas la prendre en compte? Par mépris ?

Les études de l'Anact ont montré comment les TMS et des pathologies identifiées touchent certaines professions. Pourquoi remettre les choses à demain ? La question de la pénibilité fait partie intégrante de celle des retraites. Nous parler de statistiques pour demain, ce n'est pas sérieux ! Beaucoup de ceux qui sont dans la rue aujourd'hui pensent à ceux qui ont des travaux pénibles. Les carreleurs qui sont à genoux à longueur de journées, les maçons qui ont des problèmes de dos... (Murmures à droite) Ils ne peuvent pas partir en retraite plus tard. Certaines choses sont de l'ordre de la dignité. (Murmures à droite) On doit se faire honneur. Avec cet article, vous vous déshonorez ! (Applaudissements à gauche)

Mme Jacqueline Panis.  - Soyons pragmatiques et directs !

M. Guy Fischer.  - J'ai eu l'expérience avec BSN : à Givors, les maîtres verriers ont eu le plus grand mal à faire valoir leurs droits. Ils en sont aux tribunaux, devant qui il est très difficile d'apporter des preuves, du fait de la mauvaise volonté des patrons. La réalité, c'est le monde du travail, que vous ne connaissez pas, que vous méprisez ! (Protestations à droite)

M. René Garrec.  - C'est excessif !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Le ministre nous parle d'un outil nouveau. Si je l'entends bien, on va créer une injustice flagrante pour les personnes qui seront passées d'un métier exposé et pénible vers un qui le sera moins. Comment prouver qu'une exposition aura eu lieu, pendant vingt ans peut-être ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Si j'ai bien compris M. Tron, il y aura la pénibilité prise en compte par l'article 25 et puis la pénibilité antérieure prise en compte par d'autres documents. Le sujet de la pénibilité est très important et appelle une attitude semblable à celle que nous avons eue pour l'amiante.

Il est vrai que c'est compliqué et que cela peut coûter cher, mais nous devrons le faire avec certains articles additionnels.

A la demande du groupe CRC, l'amendement n°1158 est mis aux voix par scrutin public. (Exclamations à droite)

M. Guy Fischer.  - Pas pour les mêmes raisons !

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 219
Majorité absolue des suffrages exprimés 110
Pour l'adoption 37
Contre 182

Le Sénat n'a pas adopté.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Cet après-midi, à propos de l'exposition à l'amiante, nous sommes tous tombés d'accord sur le fait qu'il était très difficile de reconstituer les carrières chez les sous-traitants ; M. Longuet en est convenu.

Avec cet article, vous faites en sorte que la pénibilité ne sera prise en compte qu'à partir de 2012. Il est pourtant tout à fait possible d'inscrire dès aujourd'hui dans le dossier d'expositions les travailleurs exposés. Cela ne serait pas ruineux, le médecin du travail pourrait le faire. Il ne le fera pas.

M. Gilbert Barbier.  - Mais si !

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Mais non ! Il n'y a pas de traçabilité. Pourquoi refuser de tenir compte des expositions en cours ? Ce n'est pas la mer à boire... (Applaudissements à gauche)

A la demande du groupe socialiste, l'amendement n°478 est mis aux voix par scrutin public. (Murmures moqueurs à droite)

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 153
Contre 183

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme Bariza Khiari.  - Vous ne voulez pas nous entendre mais nous vous répéterons jusqu'au bout que cette réforme est injuste et inefficace. Vous proposez aux Français une vie de galère conforme à l'exigence des théologiens du marché.

Vous avez eu l'inélégance de ne pas écouter M. Mauroy qui, fort de son expérience, vous met en garde contre la discorde. Il n'est ni nostalgique ni passéiste mais juste ! Il a voulu changer la vie des ouvriers. Nous qui sommes ses héritiers, nous ne renonçons pas à changer la vie. La politique, c'est prendre sur soi le destin d'autrui. Vous supprimez un acquis social majeur.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Mais non !

Mme Bariza Khiari.  - Nous voterons contre cet article qui met en oeuvre des articles iniques.

Mme Annie David.  - Dès qu'il s'agit d'un droit pour les travailleurs, vous le rognez. Il faut attendre 2012 pour que soient pris en compte la pénibilité et les congés de maternité. Les ministres rient, comme d'habitude ! Les droits des femmes, ce n'est pas sérieux !

Mais quand il s'agit du Perco, on ne rit plus ; il faut que ce soit d'application immédiate !

M. Guy Fischer.  - Malakoff Médéric !

Mme Annie David.  - Guillaume Sarkozy et les assureurs vous remercient ! Pour l'information des travailleurs, il faudra aussi attendre 2012. Mais pour engraisser encore un peu plus le capital, il faut aller vite ! (Applaudissements sur les bancs CRC)

Mme Christiane Demontès.  - C'est un fait, les Français rejettent majoritairement votre texte. Votre conception de l'équité les inquiète et ils réprouvent votre conception de la justice.

A terme, ce sont plusieurs centaines d'euros qui manqueront à ceux qui ont des revenus modestes. A vos yeux, c'est peu de chose ; pas pour ceux qui gagnent peu. Il ne suffit pas de légiférer pour imposer le travail jusqu'à 62 ans !

L'argument des comptes sociaux ne tient pas : la crise n'y a rien changé. Ils étaient déjà en déficit avant. En revanche, la multiplication des niches sociales pour les personnes aisées coûte cher et les exonérations de cotisations, 30 milliards.

Vous allez faire porter le poids de cette réforme à l'Unedic et vous générez toujours plus de dettes, on l'a vu avec le prolongement de la Cades. Face à votre montage financier, nous vous opposons une justice sociale et fiscale, que nous instaurons là où vous voulez iniquité et injustice. Vous pénalisez les plus faibles, dans une économie déjà terriblement marquée par l'inégalité salariale. Vous avez voulu faire croire que vous endossiez le costume de Robin des Bois ; il ne vous sied pas et vous jouez son rôle à l'envers, prenant aux pauvres pour donner aux riches ! (Applaudissements à gauche)

M. David Assouline.  - Vous ne cessez de nous opposer des exemples étrangers. Regardez déjà l'ampleur du choc que subit notre pays et vous verrez que vous avez perdu la bataille de l'opinion. En février, le Gouvernement annonce une réforme, sans plus. On savait que le Président de la République s'était engagé comme candidat à ne pas toucher à l'âge de la retraite et qu'il l'avait ensuite confirmé.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - C'est faux d'un bout à l'autre !

M. David Assouline.  - En juin, on apprend que le temps de la retraite à 60 ans est fini. Ensuite, viennent les vacances... pour un Français sur deux. En septembre, après six mois dont deux mois de vacances, un passage dare-dare à l'Assemblée nationale quand les Suédois ont mis dix ans pour réformer, et avec de vraies négociations.

M. Gérard Longuet.  - Cela fait trente ans qu'on en parle !

M. David Assouline.  - En Allemagne, où la durée de cotisation est de 35 ans, les mesures sur la durée s'appliqueront en 2027, pas en juillet 2011. Cette brutalité ajoute à l'injustice de la réforme. Les Français ne supportent pas l'injustice de cette réforme, non plus que la façon dont vous gouvernez. C'est pourquoi vous avez perdu la bataille de l'opinion ! (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Ça suffit, monsieur Assouline. Vous n'avez pas gagné la bataille de l'opinion. Vous vous vantez d'avoir déjà gagné 2012 ? Ce n'est pas encore fait ! Nous ferons en sorte d'informer les Français. M. Balladur a informé les Français, M. Juppé a informé les Français, et je l'ai fait aussi !

C'est parce qu'il y a plus de retraités et moins de cotisants qu'il faut réformer la retraite ; cela, les Français le savent.

Vous essayez de nous faire perdre du temps en comptant sur la rue, mais la démocratie est ici. Nous sommes fiers d'être rassemblés. La vérité ? Sans travail, pas d'avenir, sans effort, pas de progrès !

Je comprends ce que peut ressentir M. Mauroy : il a fait un acte historique. Mais depuis ce temps là, les choses ont changé. Je répète qu'il n'y a pas d'avenir pour la France sans effort des Français. (Applaudissements prolongés à droite, où de nombreux sénateurs se lèvent)

M. Pierre-Yves Collombat.  - Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le Premier ministre, nous vous reprochons non pas ce que vous dites mais ce que vous ne dites pas. La situation actuelle résulte de votre politique, qui fait fi de l'emploi. Si vous ne modifiez pas le cap, nous allons dans le mur. (Exclamations à droite)

Mettez tout sur la table. Parlez d'une politique de l'emploi, d'une politique fiscale et alors nous pourrons discuter. Vous parlez simplement de l'allongement de l'âge légal mais ceux que vous voulez garder au travail ne pourront pas travailler. Vous voulez réduire les pensions, mais nous ne le dites pas.

Voix sur les bancs UMP.  - C'est Aubry !

M. Gérard Collomb.  - Une réforme des retraites qui ne tient pas compte de la politique économique, c'est du vent ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Monsieur le Premier ministre, nous sommes surpris par votre agressivité. (Exclamations à droite) Mais votre discours est à usage interne : vous avez besoin de galvaniser vos troupes. Si vous voulez remonter le temps, il faut rappeler la situation de l'emploi il y a dix ans. Quand au manque de cotisations, c'est parce que le chômage progresse.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Et la démographie ?

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Vous auriez été plus présent lors de nos débats, vous auriez constaté que nous ne niions pas la nécessité d'une réforme (exclamations à droite) mais que nos propositions s'inspirent des principes du CNR.

Venir en fin de discussion nous donner des leçons, c'est facile ! Démonstration a été faite, à gauche, qu'une autre politique était possible. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Vos interventions ne facilitent pas la présence de la majorité !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Nous sommes très honorés de votre présence, monsieur le Premier ministre.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - C'est pour vous, madame. (Rires)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Nos concitoyens ne supportent plus que vous demandiez toujours aux mêmes de faire des efforts. A l'inverse, pour les plus riches, pas d'efforts, mais des privilèges, des sourires et des avantages. L'effort doit être également réparti et profiter à tous : ce n'est pas le cas de votre réforme, qui sera supportée exclusivement par les salariés.

En 2018, le régime sera encore en déficit et on passera à la capitalisation...

M. Nicolas About.  - Pas du tout ! C'est une contre-vérité !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - ...mais vous n'avez pas le courage de le dire !

Voix sur les bancs UMP.  - Et vous, pas le courage de le faire !

M. Jean-Pierre Caffet.  - M. le Premier ministre a dit que Pierre Mauroy était l'homme du passé.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - C'est une caricature. Ayez autant de respect pour Mauroy que moi !

M. Jean-Pierre Caffet.  - Vous, vous êtes l'homme du passif. (Exclamations à droite)

M. Jean-Pierre Raffarin.  - M. Mauroy ne prendrait pas ce ton. Respectez-le autant que je le respecte !

M. Jean-Pierre Caffet.  - Ce sont toujours les mêmes qui passent à la caisse ! Cette réforme est financée à 85 % par les salariés. Ce sont toujours aux mêmes qu'on demande des efforts !

Voix sur les bancs UMP.  - Calmez-vous, il n'y a pas lieu de crier ! 

M. Jean-Pierre Caffet.  - Je vous ai connu plus attentif à nos propositions.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Je vous aime mieux comme ça.

M. Jean-Pierre Caffet.  - Je suis surpris que vous défendiez une réforme symbole de l'injustice. (Protestations à droite)

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Ma patience a des limites !

M. Éric Woerth, ministre.  - Selon M. Assouline, nous sommes allés trop vite, sans concertation, nous avons tenté de passer en force... bref, tout ce que nous avons entendu depuis deux semaines. La majorité a réformé en 1993, 2003 et 2007. (Vives exclamations à gauche) Évidement, votre expérience en la matière est limitée... (Même mouvement) A chaque fois qu'on parle, vous montez sur vos grands chevaux. Vous passez votre temps à nous agresser : laissez-nous vous répondre. (Exclamations à gauche)

Nous avons publié en mai un document d'orientation après des centaines d'heures de discussion. Un débat public a eu lieu pendant des mois.

Voix à gauche.  - Avec qui ?

M. Éric Woerth, ministre.  - Avec notamment les partenaires sociaux !

Un projet de texte a été discuté et nous avons passé des jours et des nuits à l'Assemblée nationale, puis ici. Ne me dites pas qu'il n'y a pas eu discussion !

Des exemples étrangers, vous ne retenez que ce qui vous arrange. Pour l'Allemagne, dites la vérité : les 35 ans de cotisation, c'est à 63 ans! L'âge du taux plein est à 65 ans et va passer à 67 ans, non pas en 2027 mais en 2029 !

Pourquoi oubliez-vous de dire que les pensions de retraite en Suède vont baisser de 3 % dès cette année et sans doute autant l'an prochain ? Dites la vérité ! Vous seriez incapables de défendre pareille réforme. (Applaudissements à droite)

Ce n'est pas la bataille de l'opinion que vous avez gagnée, c'est celle de la démagogie ! (Protestations à gauche ; applaudissements à droite)

M. Martial Bourquin.  - Vous exposez votre vérité, mais il y en a une autre : cette réforme est injuste. Nous aimons la justice.

M. Gérard Longuet.  - Vous l'aimez, mais vous ne l'épousez pas !

M. Martial Bourquin.  - Comment payer des pensions à 1 000 euros et envoyer de très gros chèques à certains contribuables ? (Exclamations à droite) Une réforme de retraite, soit, mais quelle réforme ? La votre est injuste ! Il faudrait taxer le capital. S'il y avait eu des gestes importants en ce sens, une vraie négociation aurait été possible.

Que cherche le Gouvernement ? A quoi joue-t-il, quand des millions de personnes sont dans la rue ? Vous bloquez la France. Il fallait un vrai projet. M. Bel a demandé, avec les autres présidents de groupe de gauche, d'arrêter le débat et de rouvrir les négociations. Vous voulez que cette réforme passe à toute vitesse et vous vous plaignez parce que nous débattons. Il faut arrêter le débat et négocier avec les organisations syndicales.

Ce projet de loi est injuste et vous le savez. Vous allez bientôt retirer la résidence principale de l'ISF ; vous écoutez les plus aisés, mais vous restez sourds aux revendications populaires ! Nous sommes dans une démocratie bloquée et cela se paiera très cher. Le peuple tranchera. Votre sourire, monsieur le ministre, ne change rien. Vous êtes condamnés par ce projet cynique. (Applaudissements à gauche ; exclamations à droite)

A la demande du groupe UMP, l'article 33 est mis aux voix par scrutin public.

M. Guy Fischer.  - J'avais demandé la parole. (Exclamations à gauche)

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 183
Contre 153

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements à droite)

présidence de M. Gérard Larcher

Articles additionnels après l'article 3 octies

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - J'ai rapporté la réforme de 2003 et donc celle-ci. Je veux défendre en priorité l'amendement n°1220 qui me semble extrêmement important.

La priorité, acceptée par le Gouvernement, est de droit.

M. le président.  - Amendement n°1220 rectifié, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

Après l'article 3 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - A compter du premier semestre 2013, le Comité de pilotage des régimes de retraite organise une réflexion nationale sur les objectifs et les caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque vieillesse.

Parmi les thèmes de cette réflexion, figurent :

1° Les conditions d'une plus grande équité entre les régimes de retraite légalement obligatoires ;

2° Les conditions de mise en place d'un régime universel par points ou en comptes notionnels, dans le respect du principe de répartition au coeur du pacte social qui unit les générations ;

3° Les moyens de faciliter le libre choix par les assurés du moment et des conditions de leur cessation d'activité.

II. - En s'appuyant sur l'expertise du Conseil d'orientation des retraites, le Comité de pilotage des régimes de retraite remet au Parlement et au Gouvernement les conclusions de cette réflexion, dans le respect des principes de pérennité financière, de lisibilité, de transparence, d'équité intergénérationnelle et de solidarité intragénérationnelle.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Il convient d'organiser, à compter du premier semestre 2013, une réflexion nationale sur les objectifs et les caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque vieillesse.

En raison du vieillissement de la population, la question de l'équilibre des régimes va se poser rapidement. Il faut engager une réflexion à plus long terme. Pour mener cette réflexion, il faut du temps, s'inspirer des réformes menées dans les pays voisins. Les futurs retraités doivent avoir la garantie que les pensions seront fonction de leurs cotisations. Un haut niveau de revenu de pension doit être garanti. L'assurance vieillesse a besoin d'un électrochoc. Les actifs d'aujourd'hui paient les retraites d'aujourd'hui : nous sommes donc dans la répartition. La solidarité intergénérationnelle est donc garantie. Pourquoi un système par point ? Parce qu'il existe et qu'il a fait ses preuves. Avec une grande transparence, ce système garantira l'équité.

Enfin, les jeunes générations ne croient plus au système actuel. Nous devons les rassurer et sauver la répartition... (Applaudissements à droite)

M. le président.  - Amendement n°69 rectifié, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 3 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 31 décembre 2015, le Comité d'orientation des retraites présente au Gouvernement et au Parlement un rapport envisageant une réforme systémique.

Ce rapport est rendu public.

Mme Raymonde Le Texier.  - Notre pays connaît des dizaines de régimes de retraite. Cette opacité nuit à la crédibilité de notre système.

Mercredi 20 octobre 2010

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Sommaire

Mission commune d'information (Candidatures)1

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)1

Discussion des articles (Suite)1

Article 27 sexies A (Précédemment réservé)1

Article 32 quinquies6

Rappels au Règlement6

Hommage à une délégation étrangère7

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)8

Rappel au Règlement8

Discussion des articles (suite)8

Article 32 quinquies (suite)8

Rappel au Règlement13

Discussion des articles (Suite)14

Article 32 quinquies (Suite)14

Article 32 sexies14

Article 32 septies15

Mission commune d'information (Nominations)16

CMP (Accord)16

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)16

Rappels au Règlement16

Discussion des articles (Suite)16

Article 32 septies (Suite)16

Article 32 octies17

Article 3317

Articles additionnels après l'article 3 octies23

SÉANCE

du mercredi 20 octobre 2010

14e séance de la session ordinaire 2010-2011

présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente

Secrétaires : M. Philippe Nachbar, M. Bernard Saugey.

La séance est ouverte à 14 heures 30.

Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.

Mission commune d'information (Candidatures)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la désignation des quinze membres de la mission commune d'information sur les toxicomanies.

En application de l'article 8, alinéas 3 à 11, de notre Règlement, la liste des candidats présentée par les groupes a été affichée.

Les candidatures seront ratifiées si la présidence ne reçoit pas d'opposition dans le délai d'une heure.

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites.

Discussion des articles (Suite)

Article 27 sexies A (Précédemment réservé)

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je suis très attentif dès lors qu'il est question de l'amiante.

La commission des affaires sociales a repoussé de deux ans l'accès de l'allocation des victimes de l'amiante. La première version de l'amendement était pourtant acceptable. Le drame de l'amiante a déjà conduit à des dizaines de milliers de décès. L'Igas, la Cour des comptes, le groupe de travail présidé par M. Le Garrec et le Médiateur ont insisté sur ce qu'avait d'indispensable le calcul actuel de l'Acata.

Aujourd'hui, on empêche les parlementaires de défendre leurs amendements sur l'attribution de l'allocation amiante en leur opposant l'article 40 !

J'ai lu avec attention l'amendement que le Gouvernement a déposé ce matin. Il ne règle pas le problème mais le complexifie en mettant des conditions impossibles à gérer. La notion de temps d'exposition n'est pas pertinente.

M. Roland Courteau.  - Très juste !

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Dans certains cas, il suffit d'une brève exposition à l'amiante pour développer un cancer !

Mme Annie David.  - Vous condamnez les travailleurs de l'amiante à travailler deux ans de plus. Si l'on attend que la pathologie soit déclarée pour atteindre l'âge de départ en retraite, ce qui reviendra à réduire considérablement la durée de leur retraite, la cessation anticipée d'activité est un droit. Elle a été créée pour compenser le raccourcissement de leur espérance de vie !

Il sera souvent impossible aux salariés de faire connaître leur temps d'exposition à l'amiante dans l'entreprise où ils ont été contaminés. L'amendement du Gouvernement ne répond en rien à la légitime revendication des victimes de l'amiante.

M. Robert Navarro.  - Les risques cliniques de la contamination ne sont pas précisément perceptibles à l'âge du départ en retraite. On sait pourtant que l'amiante pourrait encore causer plus de 100 000 décès d'ici 2025.

Mme Marie-Christine Blandin.  - Le Gouvernement veut que chacun fasse un effort, à l'exception des privilégiés. S'agissant de l'amiante, il franchit la ligne rouge. Hier, à l'Assemblée nationale, 400 veuves de l'amiante demandaient justice à Mme Alliot-Marie. Puisque vous voulez que La Poste fasse autre chose que distribue le courrier, je vous transmettrai, monsieur le ministre, leurs lettres.

Les employeurs qui ont été auditionnés ont reconnu avoir refusé de signer les attestations d'exposition. Ils ont aussi reconnu continuer à utiliser l'amiante au Brésil.

Le renvoi de cet article avait semé un espoir chez les victimes de l'amiante. Hélas non ! Avec le sang froid qui vous caractérise... (Exclamations à droite)

M. Jean-Claude Gaudin.  - Un peu de respect !

Mme Marie-Christine Blandin.  - ...vous persistez dans votre logique purement comptable à ne rien céder à ceux qu'il faudrait défendre, pour protéger les plus riches.

Mme Nathalie Goulet.  - Sénatrice de l'Orne, je suis concernée par la « vallée de l'amiante ». Dans certaines conditions, l'inversion de la charge de la preuve pose problème : c'est le cas des victimes de l'amiante, qui sont aussi concernées par l'application de la directive européenne du 19 septembre 1983, incompatible avec la reconnaissance du taux d'incapacité permanente de 25 %. Peu de dispositions dans notre droit ont entraîné autant de questions et de rapports que la question de l'amiante. Nombre de parlementaires bas-normands ont interrogé le Gouvernement parce que les Cram de nos trois départements ont des appréciations différentes. Les salariés de Moulinex ont subi une nouvelle inégalité par rapport à leur reclassement.

Il reste vraiment beaucoup de problèmes à régler en la matière, sans parler du désamiantage des anciens sites industriels.

Mme Michelle Demessine.  - Cet article touche des salariés qui vivent un drame épouvantable, dont certains sont déjà décédés, et qui méritent le plus grand respect.

J'étais hier avec Mme Blandin avec les 400 veuves venues à Paris réclamer un procès pénal pour qu'il n'y ait « plus jamais ça ». Elles exigent que les responsabilités soient bien établies. Il aura fallu des dizaines de milliers de morts pour que le dispositif de réparation soit mis en place et voici que vous le remettez en cause : ce serait les faire mourir une deuxième fois. Quant aux survivants, ils sont en permanence sous le coup d'une terrible épée de Damoclès, par la faute de leurs employeurs...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - ...qui étaient au courant !

M. Alain Gournac.  - Vous étiez au Gouvernement aussi ! Qu'avez-vous fait ? Rien !

M. Guy Fischer.  - Vous connaissez l'Acata. Les victimes de l'amiante, il en meurt chaque jour. La vérité du monde du travail, c'est que les expositions à l'amiante continuent. Deux millions de salariés sont concernés.

M. Roland Courteau.  - C'est énorme !

M. Guy Fischer.  - La plupart souvent avant même leur départ en retraite, ou dans les mois qui suivent : l'âge moyen du décès des victimes de l'amiante, c'est 63 ans.

Le Gouvernement ne peut feindre d'ignorer que les deux tiers des cancers d'origine professionnelle se déclarent après l'âge de 60 ans.

Le Gouvernement argue que les caisses de l'État sont vides. Qui les a vidées ? Pas les victimes de l'amiante ! Ce n'est d'ailleurs pas à l'État de les indemniser, ce devrait être aux employeurs, qui ne se déclarent ni responsables ni coupables.

Le Gouvernement renie ses engagements.

Mme Mireille Schurch.  - Face à l'intransigeance du Gouvernement, le rapporteur a été contraint d'aggraver la rédaction issue de l'Assemblée nationale. Nous souhaiterions vous parler des ravages de l'amiante, des victimes de ce scandale de santé publique. Vous n'avez donc aucune humanité ! Il a fallu une accumulation des drames pour surmonter la résistance obstinée des entreprises. Ce n'est pas sans rappeler l'attitude des fabricants de tabac, d'antennes-relais, de nanoparticules.

Avec ce gouvernement, rien n'est jamais acquis. Nous vous attendons, monsieur le ministre !

Mme la présidente.  - Amendement n°454 rectifié, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 41 de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les établissements visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. »

2° Le septième alinéa est ainsi rédigé :

« 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les ports visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. »

3° Le treizième alinéa est ainsi rédigé :

« L'allocation cesse d'être versée lorsque le bénéficiaire remplit les conditions de durée d'assurance requises pour bénéficier d'une pension de vieillesse au taux plein, à condition qu'il soit âgé d'au moins soixante ans. Les conditions de durée d'assurance sont réputées remplies au plus tard à l'âge de soixante-cinq ans. »

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Cet amendement maintient les conditions d'âge actuelles. Le FCAATA s'assimile à un régime de préretraite : il s'agit de compenser la perte d'espérance de vie due à l'amiante.

A Condé-sur-Noireau, l'espérance de vie n'est plus que de 58 ans, ce qui justifie que l'on parle de « vallée de la mort ». Le mésothéliome mène à la mort dans les dix-huit mois, après d'atroces souffrances. La mort n'attendra pas deux ans de plus pour frapper. Elle n'a que faire de vos dispositions législatives.

L'Acata n'est pas un privilège mais une réparation par la société d'un dommage qu'elle a laissé causer. Je répète que pour le mésothéliome, il n'y a pas de proportionnalité entre le temps d'exposition et la probabilité d'être atteint de l'affection. (On s'impatiente à droite)

M. Roland Courteau.  - Écoutez un peu ! C'est grave !

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Il est donc indispensable d'en revenir au dispositif actuel.

L'amendement n°491 n'est pas défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°522 rectifié, présenté par M. Dériot.

M. Gérard Dériot.  - Cet amendement vise à maintenir les conditions actuelles d'âge de cessation d'activité et de perception d'une retraite à taux plein aux bénéficiaires d'une allocation de cessation anticipée d'activité au titre de leur exposition à l'amiante.

L'Acata vise à compenser la perte d'espérance de vie à laquelle sont confrontées statistiquement les personnes contaminées par l'amiante, espérance de vie qui peut être inférieure à 60 ans. Il semblerait donc particulièrement injuste de reculer leur âge d'entrée dans le dispositif.

L'argument fondant le report de l'âge de la retraite est l'allongement de l'espérance de vie. Or, les victimes de l'amiante ne connaîtront pas un tel allongement. La notion de temps d'exposition ne vaut pas : il suffit d'une fibre d'amiante pour causer un cancer. Les mesures prises ont porté leur fruit : on voit de moins en moins d'entrées dans le dispositif Acata.

La situation actuelle doit absolument être maintenue. (Applaudissements sur la plupart des bancs)

Mme la présidente.  - Amendement n°1244, présenté par le Gouvernement.

Rédiger ainsi cet article :

Le I de l'article 41 de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« 2° Avoir atteint, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans :

« a) en cas de durée de travail dans un des établissements visés au 1° supérieure à un seuil fixé par décret, l'âge de soixante ans, diminué du tiers de cette durée ;

« b) dans les autres cas, un âge déterminé par décret, qui pourra varier en fonction de la durée du travail effectuée dans les établissements visés au 1°. » ;

2° Le septième alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« 2° Avoir atteint, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans :

« a) en cas de durée de travail dans un des ports visés au 1° supérieure à un seuil fixé par décret, l'âge de soixante ans, diminué du tiers de cette durée ;

« b) dans les autres cas, un âge déterminé par décret, qui pourra varier en fonction de la durée du travail effectuée dans les ports visés au 1°. »

M. Éric Woerth, ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique.  - Le sujet est assez douloureux pour nous éviter des déclarations à l'emporte-pièce. (Exclamations à gauche) Je ne polémiquerai pas sur ce sujet. Nous souhaitons évidemment que les victimes de l'amiante puissent continuer à bénéficier des dispositions existantes.

Il y a actuellement de l'ordre de 35 000 personnes au FCAATA, avec environ 5 000 entrées par an. La quasi-totalité de ceux qui en sortent se retrouvent à la retraite.

Le Gouvernement a voulu préciser les conditions d'accès au dispositif après le recul de l'âge de la retraite. MM. Dériot et Godefroy ont insisté pour que l'on reste à 60 ans. Les bénéficiaires du FCAATA vont se retrouver dans un vide juridique entre 60 et 62 ans. C'est ce problème que nous avons voulu résoudre.

Nous avons voulu éviter un deuxième écueil : qu'une personne qui aurait passé quelques semaines dans une entreprise listée puisse partir à 60 ans. Ce serait injuste par rapport aux autres ouvriers.

Puisque nous ne sommes pas compris, je suis prêt à me rallier à l'amendement de M. Dériot, quitte à ce qu'il crée des problèmes, mais c'est votre choix.

M. Dominique Leclerc, rapporteur de la commission des affaires sociales.  - MM. Godefroy et Dériot ont animé une mission d'information de la commission sur le drame de l'amiante. Ils proposent de maintenir le dispositif actuel. De même que nous avons maintenu à 55 ans la retraite des handicapés, nous acceptons leurs amendements -à l'unanimité.

M. Marc Daunis.  - Merci, monsieur le rapporteur !

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Nous pourrions rectifier l'amendement Dériot-Godefroy en ajoutant « par dérogation à l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, ils bénéficient immédiatement d'une pension de retraite ».

Je souhaite une brève suspension de séance.

La séance, suspendue à 15 heures 25, reprend à 15 heures 30.

Mme la présidente.  - Amendement n°454 rectifié bis, présenté par M. Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 41 de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les établissements visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. »

2° Le septième alinéa est ainsi rédigé :

« 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les ports visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. »

3° Le treizième alinéa est ainsi rédigé :

« L'allocation cesse d'être versée lorsque le bénéficiaire remplit les conditions de durée d'assurance requises pour bénéficier d'une pension de vieillesse au taux plein, à condition qu'il soit âgé d'au moins soixante ans. Par dérogation aux dispositions de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, il bénéficie immédiatement d'une pension de retraite. Les conditions de durée d'assurance sont réputées remplies au plus tard à l'âge de soixante-cinq ans. »

Amendement identique n°522 rectifié bis, présenté par M. Dériot.

Rédiger ainsi cet article :

L'article 41 de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 est ainsi modifié :

1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les établissements visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. »

2° Le septième alinéa est ainsi rédigé :

« 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les ports visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. »

3° Le treizième alinéa est ainsi rédigé :

« L'allocation cesse d'être versée lorsque le bénéficiaire remplit les conditions de durée d'assurance requises pour bénéficier d'une pension de vieillesse au taux plein, à condition qu'il soit âgé d'au moins soixante ans. Par dérogation aux dispositions de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, il bénéficie immédiatement d'une pension de retraite. Les conditions de durée d'assurance sont réputées remplies au plus tard à l'âge de soixante-cinq ans. »

L'amendement n°1244 est retiré.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Nous acceptons cette rectification. (« Très bien ! » et applaudissements à droite)

M. Gérard Dériot.  - Nous aussi. (Mêmes applaudissements)

M. Éric Woerth, ministre.  - Je suis dans le même état d'esprit que tout à l'heure. Cet amendement ne résout pas tout. (Exclamations à gauche) Quand on parle de justice, il faut tout regarder : ce dispositif peut négliger certains salariés. Accord du Gouvernement.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - M. le ministre a bien fait de retirer son amendement pour le moins maladroit qui revenait sur des mesures de justice, et notamment sur le FCAATA. Ce fonds va s'éteindre mais il concerne encore plus de 30 000 personnes.

Le Gouvernement faisait trois erreurs. D'abord, pour l'amiante, il n'y a pas un temps minimum d'exposition ; une seule fibre peut provoquer un cancer foudroyant ! Ensuite, le nombre de travailleurs touchés par l'amiante est la conséquence d'une vaste manipulation des entreprises dont l'État s'est rendu complice, consciemment ou non, entre 1976 et 1996. L'État doit donc réparer. Enfin, il n'y a pas d'effet d'aubaine : prétendre cela est insupportable. Il faut rendre justice à ces travailleurs exposés. Le groupe centriste votera ces amendements. (Applaudissements)

M. Nicolas About.  - J'approuve ce qui vient d'être dit. A l'avenir, sur ce type d'amendement, je souhaite qu'on ne fasse pas référence à un décret car cela donne l'impression que l'on envoie à d'autres le soin de trancher des problèmes humains très douloureux qui relèvent du Parlement. (Applaudissement au centre et à droite)

M. Alain Vasselle.  - La commission souhaite préserver les droits actuels. Il n'est pas question d'imaginer faire des économies aux dépens de personnes touchées par ce drame. Nous aurions quand même intérêt à toiletter le dispositif ; dans les entreprises dont la liste a été fixée par arrêté, il y a aussi du personnel purement administratif qui n'a jamais été exposé à l'amiante.

Sur un sujet aussi sensible, il faut connaitre le projet de décret pour pouvoir en débattre.

Le ministre est-il prêt à aller plus loin que les dispositions actuelles ? On a l'impression que l'adoption de l'amendement de Mme David pourrait léser certains. Je suggère donc que d'ici à la CMP, nous améliorions la rédaction de ce texte pour que personne ne puisse reprocher au Sénat d'avoir légiféré à la va-vite. (Applaudissements à droite)

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Je voulais dire la même chose.

Mme Annie David.  - Nous voterons ces amendements : une fois n'est pas coutume, je vais remercier notre rapporteur pour la confiance qu'il a accordée aux spécialistes que sont MM. Godefroy et Dériot. Comme quoi il est possible de travailler en bonne intelligence quand on sait s'accorder. Je n'irai pas jusqu'à remercier M. le ministre. (Rires et exclamations à droite)

Vous voulez une réponse juste, avez-vous dit. La justice, c'est de permettre aux victimes de l'amiante de partir à la retraite plus tôt !

J'espère que les associations de victimes pourront participer à ce travail. La liste des entreprises a été fixée par arrêté. Il faudrait revoir cette liste incomplète, sur laquelle ne figure pas, par exemple, l'entreprise Arkema.

Depuis 1998, le site a fermé et les salariés se battent pour être reconnus victimes. La grandeur d'une société se mesure à la place qu'elle fait aux femmes mais aussi à celle qu'elle accorde aux victimes. (Applaudissements à gauche)

M. Jean Louis Masson.  - Cette solution est satisfaisante. Méfions-nous des renvois aux décrets qui se révèlent souvent plus restrictifs que ne le souhaite le législateur. Chacun doit faire preuve de souplesse, à commencer par le Gouvernement.

M. Jean-Louis Lorrain.  - Il s'agit d'être le moins injuste possible. Pourquoi avoir autant attendu ? Je ne vois pas d'ouverture spectaculaire mais, en discutant, on peut parvenir à des solutions raisonnables. (On le confirme sur les bancs socialistes) Lorsque nous opposons à nos concitoyens seulement la raison, c'est insuffisant car nous devons prendre les sujets dans la globalité. Nous devons prendre en compte les facteurs subjectifs ! Une amorce de dialogue a eu lieu mais elle reste insuffisante. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Marc Todeschini.  - Tout le monde va s'approprier cette avancée. Nous nous réjouissons de la prise en compte de ces victimes ; contrairement à Mme David (sourires), je suis prêt à remercier M. le ministre ! J'aimerais qu'il nous associe à un vaste dialogue s'il faut modifier, voire améliorer le dispositif actuel.

M. Jacky Le Menn.  - Vous ne voulez pas être injuste, c'est bien, monsieur le ministre. La commission est tout à fait capable d'apporter des réponses au problème posé. Associez le Parlement à votre réflexion à venir ! Ainsi, le temps d'exposition ne signifiait rien ! Il nous faut maintenant apporter les bonnes réponses.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Je ne vais pas sauter au plafond.

M. Jean-Claude Gaudin.  - Et bien asseyez-vous !

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Je suis surpris que, face à l'intelligence collective qui s'est déployée, M. le ministre se soit rangé à votre avis tout en émettant des doutes. Avec cet amendement de dernière minute, vous n'avez pas permis au Sénat de fonctionner correctement. Nous voterons ces deux amendements qui traitent d'un sujet extrêmement sensible ; un tel sujet justifie que nous échappions aux calculs millimétriques dont vous avez le secret, monsieur le ministre !

Mme Michelle Demessine.  - Nous voterons cet amendement.

M. Charles Revet.  - Mme David l'a déjà dit !

Mme Michelle Demessine.  - Je me réjouis de ce débat de qualité que nous devons à la mission d'information suscitée par le groupe communiste... (« Ah ! » à droite) qui a constitué une véritable bouffée d'oxygène pour les victimes. Le dispositif actuel est dérogatoire. Hier, à l'Assemblée nationale, de nombreux députés ont écouté les veuves des victimes de l'amiante ; elles ont adressé un courrier au Président de la République qui n'a, à ce jour, toujours pas répondu.

M. Jean-Claude Gaudin.  - Il va le faire !

Mme Michelle Demessine.  - J'ai entre les mains le témoignage d'une épouse dont le mari est mort en 42 jours et qui a vécu l'enfer. « L'atroce était le quotidien », dit-elle. Devant de telles lettres, nous avons un devoir de modestie et de responsabilité. Ces victimes attendaient de la représentation nationale une réelle reconnaissance.

Mme la présidente.  - C'est terminé. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je ne serais pas intervenu si je n'avais pas entendu dans la bouche de M. Vasselle un propos qui m'inquiète : la CMP pourrait arranger les choses... Le Sénat doit faire savoir que sa position ne doit être ni déformée ni améliorée !

Quand on dit que le personnel administratif n'a pas été exposé à l'amiante, il faut faire attention. J'ai travaillé sur le chantier du Redoutable. Nos bottes, nos gants, nos tabliers étaient en amiante. Il y avait de la poussière d'amiante partout et les administratifs eux-mêmes la respiraient. Les premières victimes de l'amiante, ce sont les femmes de ménage qui travaillaient sur ces sites mais étaient employées par des entreprises intérimaires qui se sont empressées de disparaître. Elles ne peuvent donc pas faire valoir leurs droits.

Si nous avions un carnet médical de travail pour ces femmes, nous pourrions reconstituer facilement leurs carrières. (Applaudissements à gauche et au centre)

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Il s'agira seulement, en CMP, d'améliorer le dispositif. Nous ne voterons que ce qu'auraient accepté MM. Godefroy et Dériot. (« Très bien ! » à gauche)

M. François Fortassin.  - Notre groupe votera ces amendements qui améliorent la situation. Ce débat fait honneur au Sénat. (Applaudissements)

M. Gérard Longuet.  - Effectivement, ce travail honore notre assemblée. Je veux rendre hommage à la mission d'information. Nous n'avons pas l'intention de dire en CMP le contraire de ce que nous disons ici.

Le témoignage de Mme Demessine était poignant : j'y suis d'autant plus sensible que je suis l'élu d'une région industrielle. La position de M. le ministre est très difficile ; il doit éviter les voyageurs clandestins dans un dispositif qui n'est pas fait pour eux alors que d'autres souffrent dans leur chair.

La solidarité ne doit pas être dispersée. Les moyens collectifs doivent être accordés avant tout aux victimes de l'amiante. (Applaudissements à droite)

L'amendement n°454 rectifié bis, identique à l'amendement no522 rectifié bis, est adopté et devient l'article 27 sexies A.

Mme la présidente.  - A l'unanimité ! (Applaudissements)

M. Nicolas About.  - Ce qu'a dit M. le ministre m'a intéressé : il y a un temps entre maintenant et la CMP qui doit être mis à profit : le cas des polypensionnés n'est pas prévu. Il faudra se pencher sur la question. (Applaudissements à droite)

Article 32 quinquies

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Cet article ne manque ni d'ironie ni de cynisme : il légitime les mécanismes de retraite chapeau. Nous sommes opposés à la capitalisation et à ces parachutes dorés qui pénalisent les retraites par répartition. Avec votre projet, les pensions vont baisser. Les salariés n'auront d'autres choix que d'épargner. Le Français moyen devra épargner 800 euros par mois pour compléter sa future retraite : ce sera mission impossible !

On ne peut non plus compter sur la générosité des employeurs, qui vont geler les salaires. Les risques vont désormais peser sur les salariés : voyez ce qui se passe aux États-Unis où le système des retraites est en perdition.

Rappels au Règlement

M. Jean-Pierre Bel.  - (Mmes et MM. les sénateurs de l'opposition se lèvent) Voilà maintenant plus de quinze jours que nous débattons de ce texte. La France est inquiète, angoissée. Le blocage du pays est une réalité et ce blocage est de la responsabilité du Gouvernement. Nous en appelons solennellement au Président de la République.

Les Français qui manifestent sont mécontents, inquiets, angoissés ; ils tournent leurs regards vers le Parlement. Nous avons voulu, dans un débat serein et équilibré (rires ironiques à droite), présenter un projet alternatif. Une démocratie implique démocraties sociale et parlementaire. Nous sommes attentifs à ce que disent les manifestants et les grévistes et nous craignons des évolutions dangereuses. (Exclamations à droite)

Il est encore temps de s'adresser au Président de la République pour qu'il suspende les débats. (On s'indigne à droite)

M. Charles Revet.  - Ce n'est pas sérieux !

M. Jean-Pierre Bel.  - Il y a matière à faire bouger les choses. Agissez avec sagesse, ne cherchez pas le conflit. Il est encore temps d'entendre les Français. Suspendez les débats et engagez la concertation. (Applaudissements nourris et prolongés à gauche ; vives protestations à droite)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Comme vient de le dire M. Bel, je m'adresse solennellement à tous mes collègues et au ministre. Nous sommes les représentants du peuple. (« Nous aussi ! » à droite) Oui, nous tous, parlementaires. Une grande majorité du peuple (« Non ! » à droite) rejette la réforme en cours. Il est temps d'entendre sa voix ! Les organisations syndicales sont responsables (exclamations à droite) et n'appellent pas à mettre le pays à feu et à sang.

Rouvrez des négociations et suspendez la discussion de ce texte ! (Applaudissements nourris et prolongés des sénateurs à gauche)

M. Jean-Claude Gaudin.  - Cinéma !

M. Alain Gournac.  - Pyromanes !

M. Yvon Collin.  - Voila plus d'une centaine d'heures qu'avec application et dignité nous discutons de ce projet de loi.

Manifestement, nous ne sommes pas entendus et le peuple français nous dit que cette réforme lui paraît injuste. (Rires à droite) Ce serait de l'autisme de ne pas l'entendre !

A cet instant, j'en appelle à la sagesse du Gouvernement et au Président. On ne peut aller au blocage dans ce pays. La situation est tendue. Le plus sage serait de suspendre nos travaux (« Non ! » à droite) et de rétablir un vrai dialogue : il est nécessaire pour élaborer cette grande réforme sur les retraites dont nous avons besoin. Entendez-vous, Monsieur le ministre. Ce n'est pas de la démagogie. (« Si, si ! » à droite) Il est encore temps de nous entendre. (Applaudissements nourris et prolongés des sénateurs de l'opposition, toujours debout)

M. Gérard Longuet.  - Je prie mes collègues de bien vouloir s'asseoir. (Sourires)

Au nom de l'UMP, je m'adresse, à travers le ministre, au gouvernement tout entier.

Nous sommes fiers de participer à ce débat. Notre pays va pouvoir enfin régler ce problème posé en 1982 mais qui n'a pas jamais été réglé. En 1982, Pierre Mauroy avait procédé par ordonnances : nous n'avions pu, à l'époque, évaluer les conséquences de cette réforme populaire, mais dont le financement n'était pas assuré.

Il a fallu attendre 1991 pour avoir le Livre Blanc de M. Rocard, qui a débouché sur une loi présentée en 1993 par M.  Balladur. Lionel Jospin avait engagé avec prudence la réforme créant le FRR et COR.

En 2003, M. Fillon a eu le courage de présenter une réforme de fond. Aujourd'hui, nous devons assumer notre responsabilité de parlementaire. Dans notre histoire sociale, le débat est toujours ouvert, et le vote d'une loi ne le clôt pas définitivement. Cette réforme est notre fierté, car elle met notre pays devant ses responsabilités. Il y aura un débat politique, qui sera tranché aux prochaines élections présidentielles et législatives. Nous ne sommes ni masochistes, ni pervers ; nous ne cherchons pas à nous faire des ennemis par plaisir : nous prenons nos responsabilités. Nous ne voulons plus nous payer de mots et transmettre aux futures générations la facture de notre propre lâcheté. (Applaudissements à droite, exclamations à gauche) Nous ne serons pas la majorité de l'impuissance, de la facilité et de la résignation. (Applaudissements à droite, vives protestations à gauche) Nous ne serons jamais, comme vous l'avez été si souvent, la majorité du mensonge. Les Français s'exprimeront en 2012 : nous aurons la fierté de nous présenter devant eux avec un programme, un bilan et des réformes courageuses et responsables. (Mmes et MM. les sénateurs de la majorité se lèvent et applaudissent longuement sous les huées de la gauche)

M. Éric Woerth, ministre.  - Non, nous ne suspendrons pas les débats. Quelle drôle d'idée ! (Rires à droite) Si votre politique c'est de toujours remettre à plus tard, (exclamations à gauche) de demander des moratoires, c'est curieuse façon d'exercer sa responsabilité ! (Exclamations à gauche)

Notre devoir, c'est de faire évoluer notre système de retraite pour en garantir la durée pour les générations à venir, pas de créer une commission, pas d'instituer un moratoire ! Nous refusons les faux-semblants. Mais nous ne confondons pas le dialogue social et la démocratie politique. Nous avons été au bout du dialogue social. (Exclamations prolongées à gauche) Nous avons entendu les organisations syndicales, les partis politiques, les Français. (Exclamations à gauche) Ce texte a évolué de plusieurs milliards depuis son examen par l'Assemblée nationale.

Nous ne confondons pas non plus la démocratie politique et la pression de la rue. Nous ne confondons pas le droit de grève avec le droit de blocage ou le droit d'incendier. Il y a des limites à ne pas franchir ; le gouvernement fera respecter l'ordre public, car il en va de la liberté de tous.

La démocratie est bien vivante et elle s'exprime à l'Assemblée nationale et au Sénat par le biais de élus, mais à un moment donné, le débat doit se terminer et le Sénat doit voter : c'est l'expression de nos institutions et pas celle de la rue.

Nous sommes attentifs aux retraités de ce pays, retraités d'aujourd'hui et de demain, ces jeunes Français qui souhaitent bénéficier de la même protection sociale que nous. Vous voudriez transférer les efforts indispensables aux générations futures. C'est votre solution, pas la nôtre. Beaucoup se joue avec cette réforme. C'est difficile, mais vous n'avez jamais eu le courage de faire des réformes difficiles : vous n'avez jamais fait que des réformes faciles ! (Applaudissements à droite, protestations à gauche) Avec ce texte se joue l'avenir de nos retraites, l'image de la France dans le monde et notre capacité à bouger. (Exclamations prolongées à gauche) Nous devons savoir résister au vieux démon de l'immobilisme. Puisque vous avez fait des demandes à la majorité et au Président de la République -je transmettrai, bien sûr-, je demande à l'opposition de garder son calme. (Exclamations à gauche) Je lui demande aussi d'être responsable vis-à-vis des générations futures. (Applaudissement nourris et prolongés à droite)

M. Jean-Pierre Bel.  - (Exclamations à droite) Nous avons entendu les discours de M. Longuet et de M. le ministre : toujours les mêmes ! Rien de changé... Nous nous adressons directement au Président de la République. Nous demandons une suspension de séance. (« Non, non ! » à droite)

M. Nicolas About.  - Cela fait plus de quinze jours que l'opposition nous traîne. (Vives exclamations à gauche ; applaudissements à droite) Quand nous parlons, vous hurlez ! Quand on prétend diriger un pays, on apprend la politesse ! (Cris et protestations à gauche ; applaudissements à droite) Nous souhaitons que le débat se poursuive, il faut mettre en oeuvre cette réforme indispensable. (Mêmes mouvements)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Je m'associe à la demande de suspension. Chers collègues de la majorité, vous êtres de vrais provocateurs ! (Rires et protestations à droite) Vous refusez tout véritable débat en voulant imposer une réforme dont le peuple ne veut pas ! (Applaudissements à gauche)

Hommage à une délégation étrangère

Mme la présidente.  - (Mmes et MM. les sénateurs se lèvent) J'ai le très grand plaisir, au nom du Sénat, de saluer la présence, dans notre tribune officielle, d'une délégation de la Chambre de la Fédération d'Ethiopie, conduite par Mme Dimitu Anbisa. Nous sommes particulièrement sensibles à l'intérêt et à la sympathie que cette jeune démocratie porte à notre institution.

Au nom du Sénat de la République, je forme des voeux pour que le séjour de nos collègues en France contribue à établir des liens d'amitié entre nos deux pays et je leur souhaite la plus cordiale bienvenue. (Applaudissements)

La séance, suspendue à 16 heures 35, reprend à 16 heures 50.

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Rappel au Règlement

M. Jean Louis Masson.  - En tant que non-inscrit, j'avais aussi demandé à m'exprimer. Je regrette que vous ne m'ayez pas donné la parole. Cette désinvolture me désole. Nous avons des droits, comme les autres sénateurs.

Mme la présidente.  - Ce sont les présidents de groupes qui se sont exprimés.

Discussion des articles (suite)

Mme la présidente.  - Nous reprenons la discussion du projet de loi portant réforme des retraites.

Article 32 quinquies (suite)

Mme Christiane Demontès.  - Notre pays vit une situation très grave, une situation de crise. Cela est déjà arrivé. Mais à chaque fois, le Président de la République et le Gouvernement ont réussi à ouvrir des espaces de dialogue. Je demande à nouveau solennellement que les travaux du Sénat soient suspendus le temps nécessaire (« Non ! » à droite) et que le Président de la République prenne l'initiative de mettre autour de la table les partenaires sociaux (protestations à droite) car le dialogue, contrairement à ce que ne cesse de dire le ministre, n'est pas allé à son terme. (Applaudissements à gauche)

M. Éric Woerth, ministre.  - La séance a été suspendue dix minutes, cela me semble suffisant...

M. Guy Fischer.  - Dix minutes pour le dialogue social, c'est trop !

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Les Français apprécieront !

Mme Annie David.  - Cette réponse est indigne, monsieur le ministre !

M. Robert Navarro.  - La France va très mal et les incidents se multiplient ; il y a un risque que des accidents graves surviennent. Les violences sont inacceptables et je les condamne ; mais il est déraisonnable de semer les raisins de la colère !

Il est encore temps, monsieur le ministre, d'éviter au pays une crise dramatique. Rien ne vous empêche de reporter à l'après-présidentielle tout ou partie de l'application de la loi. Le calendrier de la réforme est tel que nous ne sommes pas à quelques mois près ! (Marques de dénégation à droite) La loi pourrait ainsi être votée et nous pourrions aller sur le terrain ramener le calme. Nous avons tous à gagner à une modification du calendrier. Ne prenons pas le risque d'avoir un mort sur la conscience !

J'en viens à l'article 32 quinquies. Il ne concerne en réalité que très peu de Français et il risque de nuire à la retraite par répartition. Il s'agit seulement de sauver les retraites chapeau. Je voterai la suppression. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean Louis Masson.  - Dans une démocratie parlementaire, c'est au Parlement de délibérer. Il n'a pas à subir la pression de la rue. (Marques d'approbation à droite) La démocratie doit être respectée, quoi que l'on pense de telle ou telle disposition législative.

Je suis très réservé sur les retraites chapeau. Au prétexte de les moraliser, on va donner un petit quelque chose aux salariés... Les retraites chapeau devraient être soumises au régime fiscal et social de droit commun. Si la loi comportait quelques mesures équitables, il y aurait moins de gens dans la rue ! (Marques d'approbation à gauche)

M. Jean-Pierre Fourcade.  - La politique du tout ou rien n'est pas une bonne politique. Tout le monde constate qu'il y a eu des retraites chapeau d'un montant scandaleux. Mais il est impossible de les supprimer ; dans l'économie mondialisée d'aujourd'hui, les chefs d'entreprises et les sièges sociaux iraient à l'étranger. (Marques d'accablement à gauche)

Mme Raymonde Le Texier.  - C'est cela qui est inacceptable !

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Cet article moralise les retraites chapeau. En le refusant, vous restez dans une perspective franco-française du type 1950 amélioré ! (Applaudissements à droite)

M. Claude Bérit-Débat.  - Malgré leur mobilisation massive, les Français devront subir une régression sociale sans précédent. Cet article 32 quinquies franchit un pas supplémentaire dans le cynisme. On fait une petite concession aux salariés pour pérenniser un gros avantage aux dirigeants. On marche sur la tête ! Vous légitimez des pratiques que l'opinion, la morale et même la justice réprouvent ; je pense à la décision de la Cour de cassation dans l'affaire Daniel Bernard... Ces pratiques doivent être strictement encadrées et conserver un caractère socialement acceptable, sinon disparaître.

Une fois de plus, on veut nous faire croire qu'il y a avancée alors qu'on veut préserver des rentes de situation. En juin, le ministre avait estimé que les patrons devaient donner l'exemple et faire des efforts ; le Premier ministre, lui, avait jugé que le mécanisme qui consiste à faire financer par l'entreprise les retraites de leurs hauts dirigeants n'était pas acceptable. Une fois encore, ses actes contredisent ses paroles. (Applaudissements à gauche)

M. Jean Desessard.  - Excellent !

M. Martial Bourquin.  - Cette réforme des retraites n'était pas prévue : le Président de la République avait dit qu'il ne la ferait pas.

Quand on voit le projet commun de la CNP et de Malakoff Médéric, entreprise dirigée par le frère du Président de la République, on peut se demander s'il y a coïncidence et si on ne prépare pas le dynamitage de la retraite par répartition.

Le ministre dit à l'envi qu'il veut la sauver. Mais chacun se souvient de la promesse, répétée sur tous les tons par M. Sarkozy, que GDF ne serait pas privatisée ! On sait ce que vaut sa parole ! (Exclamations à droite)

Avec la mise en place d'un fonds de pension à la française s'ouvre un marché estimé de 40 à 100 milliards d'euros : l'argent des salariés sera utilisé pour la financiarisation de l'économie. Avec la mise en place de la capitalisation, vous préparez la fin de la répartition -se rappelle-t-on l'aventure des retraités d'Enron ?

Cela explique votre fermeture dans le présent débat.

M. Longuet a parlé d'une « majorité responsable ». L'est-elle si elle impose cette réforme des retraites et préserve en même temps le bouclier fiscal ? Il ne faut pas dialoguer seulement entre soi mais dialoguer avec le peuple. Vous pouvez rouvrir les négociations avec les organisations syndicales ! (Applaudissements à gauche)

M. François Fortassin.  - Nous sommes au coeur d'un dispositif excessivement important. Nos concitoyens attendent un signe d'espoir. Ils considèrent ce qui est proposé comme injuste, inéquitable, et même scandaleux. Une réforme est indispensable, encore faut-il qu'elle soit acceptée par la population. (Marques d'approbation à gauche)

M. Bernard Piras.  - Et qu'elle soit juste !

M. François Fortassin.  - Il ne faut pas, pour cela, que les plus fragiles paient pour les plus fortunés. Vous êtes bardés dans vos certitudes. Un parlementaire ne se déshonore pas en faisant des compromis. Écoutez le pays ! Nos concitoyens ont le sentiment que la seule nécessité dans ce pays, c'est de devenir riche ! Avec le bouclier fiscal, vous vous êtes mis une belle balle dans le pied. N'amochez pas l'autre pied ! (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Sueur.  - On nous répète que la retraite pas répartition sera préservée. Et puis, pour ceux qui veulent, il y a l'épargne retraite, un choix volontaire. Mais cette nuit, vous avez inventé l'épargne retraite obligatoire, le choix forcé. Premier mélange des genres. Puis est venue la participation, qui pourra se transformer automatiquement en épargne retraite si on omet de prendre ses précautions. Et maintenant, le complément en échange de la retraite chapeau... Qui se retrouvera dans ce système tarabiscoté ? Sans compter que vous créez une liaison perverse entre l'épargne retraite obligatoire et la retraite chapeau. Il y en a assez de ces retraites chapeau, de ce bouclier fiscal, de ces revenus financiers exorbitants, de ces stock-options, de cet étalement éhonté de richesses ! Les Français ne comprennent pas que dans cette réforme, on demande aux bénéficiaires du bouclier fiscal de leur faire l'aumône.

Il peut y avoir l'obstination de ceux qui sont certains d'avoir raison ; il peut y avoir la sagesse de se mettre autour de la table pour élaborer une réforme juste. La politique du pire est la pire des politiques ! (Applaudissements à gauche)

M. Claude Domeizel.  - Avec cet article 32 quinquies, on est dans une situation irréaliste. Nous parlons de retraite chapeau et, aux portes du Sénat, manifestent précisément ceux qui n'en veulent pas. (« Il n'y a personne ! » à droite)

Mon expérience m'a appris que dans les situations difficiles, il fallait faire preuve d'humilité, sortir du schéma « j'ai raison, tu as tort » et toujours laisser une porte ouverte. C'est ce que vous ont demandé les présidents Bel, Borvo Cohen-Seat et Collin.

M. Jacques Muller.  - Cet article 32 quinquies légitime les retraites chapeau. M. Fourcade parle de notre ouverture au monde et de notre exposition aux délocalisations. Hier, c'étaient la fiscalité trop lourde aux entreprises, les normes sociales, les normes environnementales. Aujourd'hui, ce sont les retraites chapeau, dont nous ne pourrions nous passer. Demain, peut-être, les systèmes de protection sociale...

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Et les congés payés !

M. Jacques Muller.  - Je suis sûr que vous soutiendrez mon amendement alignant la retraite des parlementaires sur le régime général : là, il n'y a pas risque de délocalisation ! (Sourires)

M. Desessard vous a posé hier une question, à laquelle nous n'avons toujours pas de réponse : quel est le montant de la défiscalisation des plans d'épargne retraite ?

Mme Catherine Tasca.  - La droite ressasse l'idée que toute diminution des privilèges exorbitants que s'accordent les grands dirigeants susciterait un large mouvement d'exode et d'expatriation. Ce n'est pas sérieux.

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Certains sont partis !

Mme Catherine Tasca.  - La France est restée la France... Il y a deux ans, quand il y a eu la crise des banques, c'est l'État qui les a sauvées ! Votre majorité ne cesse d'en appeler à la responsabilité les parlementaires de l'opposition, les grévistes, les manifestants, au-delà de la raison : nous demandons seulement que ces privilèges soient ramenés à de justes proportions de sorte qu'ils puissent être acceptés par l'opinion.

Je suggère que l'argument du risque de délocalisation sorte du débat parce qu'il n'est pas crédible économiquement. Vous ne voulez pas toucher aux stock-options et autre parachutes dorés mais vous imposez aux salariés de travailler plus longtemps pour des retraites affaiblies, quand ils ont un emploi. (Applaudissements à gauche)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Vous soutenez les privilèges exorbitants. Jusqu'où soutiendrez-vous la mise aux normes de la France, face à la concurrence internationale ? Dans certains pays, les salariés touchent un euro par jour. Dans certains pays, il n'y a aucune protection sociale... C'est cela votre modèle ? Nous allons à une catastrophe nationale et internationale !

On voit bien qui vous écoutez. Vous êtes sourds à ceux qui refusent votre réforme injuste mais tout ouïe pour les exigences du patronat. Vous avez tout simplement repris, en l'habillant un peu, le programme du Medef.

Comme vous ne voulez pas dire que vous appliquez le programme du Medef, vous prétendez sauver la répartition. Mais il faudra y venir en 2018 ! D'ailleurs, je vous invite à vous reporter au petit livre Besoin d'air, publié par le Medef : il dénonce la retraite par répartition comme une de ces erreurs historiques dont la France a le triste secret et prône le glissement progressif vers la capitalisation. Tous les amis du Fouquet's l'attendent !

M. Ronan Kerdraon.  - A gauche, nous nous sommes tous demandés pour quelle raison le Président de la République avait engagé cette réforme.

M. Jean-Claude Gaudin.  - Il y a la crise !

M. Ronan Kerdraon.  - Il y a d'autres motivations : en 2006, Guillaume Sarkozy (« Ah ! » à droite) est devenu le PDG du groupe Médéric, devenu Malakoff Médéric, qui a conclu un partenariat avec la Caisse des dépôts et sa filiale CNP. Comment faire main basse sur l'épargne des Français ? En déstabilisant les retraites par répartition. Il y a un marché estimé entre 40 et 110 milliards.

A l'horizon 2020, une baisse du taux de remplacement de 8 % est attendue, nous dit Médiapart. Chez Malakoff Médéric, on se frotte les mains ! Quelle belle équipe que celle de Nicolas et de Guillaume, l'un asphyxie le système par répartition et l'autre met en place la capitalisation. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. David Assouline.  - Cet article est un cheval de Troie. La réforme dans notre pays a une histoire : à chaque fois, on a voulu améliorer le sort fait à l'humain. Oui, il faut réformer le système des retraites pour l'améliorer concernant l'égalité hommes/femmes et la pénibilité. Mais vous avez fait l'inverse ! Il n'y aura que 30 000 personnes à voir leur sort s'améliorer. Pour les autres, rien. Et pour les femmes qui n'ont pas eu trois enfants, ce sera 67 ans pour une retraite sans décote.

Les enquêtes d'opinion actuelles prouvent que les Français ne font pas confiance au régime par répartition pour les années à venir.

Arrêtez de nous faire des leçons sur la réforme : une réforme, oui ; mais pas une régression. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Roland Courteau.  - Les Français ne veulent pas d'une réforme injuste et les manifestants vous le disent régulièrement. Mais vous restez sourds, enfermés dans votre bunker.

Ici, il est question des retraites chapeau dont la France ne saurait se passer, d'après M. Fourcade, pour empêcher les délocalisations. N'est-ce pas du chantage, exercé sur les Français qui vivent avec des retraites de misère ? Il faut un consensus national, comme en Suède où l'on a pris le temps nécessaire pour avancer, avec l'appui du peuple et non contre lui.

Bien évidemment, il faut réformer les retraites, mais pas comme vous le faites. Certains se sont réjouis tout à l'heure d'une réconciliation sur l'amiante. C'est la preuve qu'on peut avancer en matière de justice : écoutez l'opposition, la majorité du peuple et la rue. Cela devrait vous conduire à interrompre cette discussion. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Alain Fouché.  - Beaucoup de sénateurs estiment qu'en matière de parachutes dorés, de stock-options et de retraites chapeau, il y a des excès. Je souhaite plus de taxation et d'ailleurs, des amendements ont été déposés en ce sens que nous examinerons plus tard. (M. François Fortassin applaudit)

Mme la présidente.  - Amendement n°51, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Alors que notre système de protection sociale a joué un rôle d'amortisseur de la crise, vous proposez la généralisation des retraites par capitalisation pour justifier les retraites chapeau. C'est indécent.

Les effets de la crise de 2008 n'ont pas fini de se faire sentir que vous proposez de tourner le dos à notre protection sociale. Comment garantir les emplois, les pensions élevées et la pérennité de ces fonds ? Ce n'est pas possible.

Au Chili, les fonds de pension mis en place sous la dictature de Pinochet devaient produire leur effet en 2007. Or, 50 % des Chiliens ne bénéficient pas des retraites pour lesquelles ils ont cotisé !

Il faut suspendre le débat, afin de renouer le dialogue social, en votant notre amendement. (Applaudissements sur les bancs CRC)

Mme la présidente.  - Amendement identique n°282, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery, M. Muller et Mme Voynet.

M. Jacques Muller.  - Vous voulez sauver les apparences avec cet article. Mais la disposition est perverse puisqu'elle permet de légitimer les retraites chapeau qui scandalisent nos concitoyens. En outre, cet article est un aveu d'échec du Gouvernement : les pensions versées étant trop faibles, dans quelques années, les salariés devront capitaliser.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°387 rectifié, présenté par MM. Collin et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

Mme Françoise Laborde.  - Permettez, en guise de rappel au Règlement, un billet d'humeur, je n'ai pas dis d'humour car je n'ai pas le coeur à rire. Comme beaucoup d'entre nous, je suis restée jusqu'à 3 h 25 cette nuit. Et je découvre qu'un article est appelé en priorité : comment travailler correctement ? J'ai l'impression que nous jouons aux charades.

Sans doute vous inspirez-vous du magnifique traité de Luc Etienne, L'art de la charade à tiroirs.

M. Josselin de Rohan.  - Il est épuisé, comme nous !

Mme Françoise Laborde.  - J'ai suivi de près ce projet de loi, mais quand des articles sont discutés dans le désordre, comment trouver une cohérence ? Avez-vous tiré au sort l'ordre de passage des articles ?

Après le vote des articles 5 et 6, des électeurs se sont étonnés de me voir repartir à Paris : « c'est voté », m'ont-ils dit, et nous y sommes encore.

M. Josselin de Rohan.  - Grâce à vous !

Mme Françoise Laborde.  - Cet examen en désordre fait certes travailler nos neurones mais je dirai avec amertume et tristesse mon regret que cette loi si importante soit traitée en dépit du bon sens.

Cet amendement combat la retraite par capitalisation, pour les raisons exposées par mes collègues. (Applaudissement à gauche)

Mme la présidente.  - Amendement identique n°475, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Mme Gisèle Printz.  - Cet article est un bon exemple de jésuitisme.

Il conditionne la mise en place de régimes de retraite supplémentaire à prestations définies à certaines catégories de salariés dans les entreprises à l'existence de Perco ou de contrats d'épargne retraite.

Les régimes de retraite supplémentaire sont en majorité réservés à une infime catégorie de cadres dirigeants de grandes entreprises, les plus connus de ces régimes ad hoc étant « les retraites chapeau ».

Il incite donc les cadres dirigeants qui souhaitent continuer à en bénéficier à mettre en place un Perco ou un contrat d'épargne retraite, afin de dissimuler les privilèges qui leur sont octroyés.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Avis défavorable à ces amendements de suppression. Madame Laborde, nous avons appelé en priorité les articles sur les mesures d'âge, au coeur de ce projet, et renvoyé les additionnels en fin de discussion, mais il n'y a aucune malignité dans ce procédé.

M. Georges Tron, secrétaire d'État chargé de la fonction publique.  - Même avis. Cet article permet d'équilibrer le système de retraites chapeau. Le supprimer serait en rester en statu quo.

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Cet article est symptomatique de l'esprit de cette loi : il a été sans doute dicté par le Medef car il garantit les retraites chapeau au prix de quelques contraintes.

Ceux qui nous expliquent que les retraites chapeau éviteront les délocalisations nous expliquaient que le bouclier fiscal le permettrait et brandissaient la liste secrète des exilés fiscaux qu'ils allaient faire revenir de Suisse : combien l'ont fait ?

En présentant les retraites par capitalisation comme une fatalité, vous reconnaissez que vous avez condamné la retraite par répartition. C'est un marché de dupes.

M. Jacques Muller.  - Le développement de l'épargne retraite est un aveu d'échec. Le déséquilibre démographique ne pourra pas être réglé par cette réforme. M. Woerth nous expliquait qu'il faut entrer dans les détails, mais l'un d'entre eux a été oublié : les revenus liés aux capitaux. Vous jouez la carte de la spéculation -plutôt que la sécurité : c'est un véritable saut dans l'inconnu. La répartition est le meilleur système mais il faut parvenir à l'équilibre, qui implique un choix politique délicat entre prélèvements sur les actifs et préservation d'un bon niveau de pension.

La spéculation sur l'épargne retraite va s'accentuer : on nous dit, épargnez tout de suite, on verra plus tard. C'est une catastrophe annoncée. Voyez Enron, la situation britannique... Nous nous y opposons résolument. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Martial Bourquin.  - On veut nous faire accepter les retraites chapeau, pour éviter les délocalisations. Comme l'a dit le secrétaire général de la CFDT, « Mais qu'est-ce qu'ils font de leur fric ? ». La ficelle, je veux dire la corde, est trop grosse ! Cet article introduit la capitalisation qui va progressivement l'emporter. Je ne crois pas que Guillaume Sarkozy ait pris la tête de Malakoff Médéric par hasard. (Exclamations à droite) Nous avons un mur devant nous. Vous faites comme l'Ancien Régime : tout pour les privilégiés -les gens du CAC 40- sans entendre ce que pensent bien des gens, de droite comme de gauche, de l'injustice de votre réforme.

Le Gouvernement veut dynamiter le système par répartition.

M. Roland Courteau.  - C'est ça, la vérité !

M. Martial Bourquin.  - Après les manifestations sans précédent, il est temps d'en revenir à la raison. (On le confirme à droite) Passez à la table des négociations et revenez au Parlement avec une vraie réforme qui ne soit pas ce retour en arrière que vous nous présentez. Il est encore temps : cessez d'être sourds aux revendications du peuple ! (Applaudissements à gauche)

M. Christian Cointat.  - « Des mots, des mots, des mots » !

M. Nicolas About.  - « Retour en arrière » et pourquoi pas « descendre en bas » ?

Mme Marie-France Beaufils.  - Le principal intérêt des retraites chapeau, c'est leur régime fiscal dérogatoire. Vous les mettez en parallèle avec le système par capitalisation pour les salariés en espérant ainsi faire passer la pilule. Nous ne pouvons accepter ce glissement progressif vers la capitalisation. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. François Marc.  - Cet article justifie l'existence des retraites chapeau. Ce projet de loi est injuste, nous l'avons dit, je crois. Ici, c'est l'article de trop. C'est une sorte d'autolégitimation pour des avantages qui se montent souvent à plusieurs millions d'euros. Ces dernières semaines, les journaux font état de l'explosion des rémunérations des administrateurs des entreprises. C'est totalement illégitime. (Marques d'impatience à droite) Depuis 2006, les dépenses fiscales en faveur des entreprises se sont multipliées. Et même le Conseil des prélèvements obligatoires trouve ces retraites chapeau injustes.

Nous vous invitons à voter ces amendements.

Cet article n'est vraiment pas acceptable. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

A la demande du groupe UMP, les amendements identiques nos51, 282, 387 rectifié et 475 sont mis aux voix par scrutin public. (« Obstruction ! » à gauche)

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 153
Contre 83

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°1148, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

M. François Autain.  - Nous sommes opposés à l'épargne retraite. Tous les titres de ce projet de loi sont inadmissibles (on le confirme à gauche) mais celui-ci l'est particulièrement puisqu'il fragilise la retraite par répartition pour mieux pousser les salariés à s'engager dans l'épargne individuelle. La retraite par capitalisation n'est un miroir aux alouettes car elle n'est pas garantie.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Avis défavorable.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Même avis.

M. Jacques Muller.  - L'épargne retraite est un avantage donné aux plus riches. C'est une rupture avec le principe de solidarité qui fonde notre système créé au lendemain de la deuxième guerre mondiale.

Sur le principe, tout le monde a le droit d'épargner. Mais en fait, tout le monde ne le peut pas. L'ignorer, c'est pratiquer la politique de l'autruche.

Cette exonération fiscale revient à faire payer les pauvres pour les riches. Une loi économique fondamentale, la loi de Keynes, enseigne que la propension à épargner est une fonction croissante du revenu : plus on est riche, plus on épargne. Avec ce dispositif, le Gouvernement se prépare à aider les plus riches ! Pour la troisième fois, je demande au ministre quel est le coût de l'épargne retraite pour la collectivité.

Nous sommes loin, avec cette redistribution à l'envers, des principes fondateurs de notre système de retraite. Le général de Gaulle et Jean Moulin, son délégué au CNR, doivent se retourner dans leurs tombes !

L'amendement n°1148 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°1149, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

Mme Mireille Schurch.  - Cet article organise la retraite par capitalisation. La prochaine étape sera sans doute de la rendre obligatoire.

Les Français le savent et vous le disent : la retraite par capitalisation amplifie les inégalités salariales.

Il faut supprimer votre mécanique douteuse et incompréhensible. Écoutez la rue ! (Exclamations à droite) Les Français veulent des retraites leur permettant de vivre dignement ! (Applaudissements à gauche)

L'amendement n°1149, repoussé par la commission et le Gouvernement,n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°1150, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 3

Supprimer cet alinéa.

Mme Michelle Demessine.  - Quand nos concitoyens ont découvert les exorbitantes retraites chapeau qui viennent après les exorbitantes rémunérations des grands patrons, ils ont été saisis par l'immoralité du système libéral, cher à votre coeur, dans lequel vous voulez faire rentrer les Français à marches forcées. Eux savent qu'ils devront travailler plus longtemps pour gagner moins ; pour eux, pas de retraite chapeau, mais une retraite au rabais !

Le Président de la République voulait « moraliser le capitalisme » ; je doute qu'il y parvienne avec cet article scandaleux et arrogant !

Mme la présidente.  - Amendement n°1212, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

I. - Alinéas 3 et 4

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

2° Régime de retraite supplémentaire auquel l'affiliation est obligatoire et mis en place dans les conditions prévues à l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale.

II. - En conséquence, alinéa 5

Remplacer la référence :

par la référence :

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Amendement de simplification.

Mme la présidente.  - Amendement n°1151, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

Mme Éliane Assassi.  - Ne tournons pas autour du pot. C'est pourtant ce que vous faites, en cherchant insidieusement à inciter les Français à préparer une retraite par capitalisation. Nous assistons à la mainmise des intérêts privés sur la manne des pensions, marché colossal que les banques et les assurances ne veulent pas laisser échapper.

Mme la présidente.  - Amendement n°1152, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

M. François Autain.  - Je veux vous faire observer très respectueusement, madame la présidente, que je n'ai pas compris pourquoi mon amendement avait été rétrogradé. (Exclamations à droite)

Mme la présidente.  - Tout aussi respectueusement (sourires), je vous indique que c'est la conséquente logique du retrait de l'amendement n°623.

M. François Autain.  - Votre explication n'est pas convaincante, mais je m'en contenterai ! (Rires)

Je ne vais pas revenir sur le fond de notre argumentation contre cet article : le temps presse. (Marques d'irritation à droite)

Ce n'est pas tant le délai qui nous importe que le principe même que pose cet alinéa.

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Défavorable.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Favorable à l'amendement n°1212, défavorable aux autres.

Rappel au Règlement

M. Charles Gautier.  - Rappel au Règlement sur l'organisation des séances ! Cet après-midi, on nous a rappelé longuement que nous vivions dans une démocratie parlementaire et que nous ne devions pas débattre sous la pression de la rue. (On le confirme à droite)

M. Nicolas About.  - Ni de la presse !

M. Charles Gautier.  - Dans une dépêche de l'AFP, datée de 18 heures 14...

M. Robert del Picchia.  - L'AFP, ce n'est pas la Bible !

M. Charles Gautier.  - ...le secrétaire général de l'Élysée « somme le Sénat de presser le pas » ! (Exclamations)

M. Guy Fischer.  - Scandaleux !

M. Laurent Béteille.  - C'est vous qui avez fait appel au Président de la République !

M. Charles Gautier.  - Pas à un de ses acolytes ! (Applaudissements à gauche ; protestations à droite)

Je souhaite que le Bureau se réunisse pour donner son opinion. (Applaudissements à gauche)

Discussion des articles (Suite)

Article 32 quinquies (Suite)

M. Jacques Muller.  - Je reviens sur l'article 32 quinquies : le développement des Perco pose un problème économique majeur. Il participe de la logique d'une économie casino : cela représente 230 milliards, qui ne sont pas investis. La presse spécialisée confond investissement et placement. (Mme Muguette Dini le confirme) L'investissement, c'est la formation brute de capital fixe : c'est la création de moyens de production dans l'entreprise, la création d'infrastructures, de logements, y compris sociaux. Le déficit de formation brute de capital fixe pose un problème économique.

Avec la thésaurisation en placements financiers, qui n'est que la version modernisée du bas de laine, on ôte une grande quantité d'argent du circuit proprement économique. Se développent ainsi des bulles financières qui, inéluctablement, crèvent à rythme régulier. (Applaudissements à gauche)

L'amendement n°1150 n'est pas adopté.

L'amendement n°1212 est adopté.

Les amendements nos1151 et 1152 deviennent sans objet.

Mme Nicole Bricq.  - Le groupe socialiste votera contre l'article 32 quinquies.

D'abord parce que le ministre du travail répète à l'envi que ce projet de loi est fait pour sauver la retraite par répartition. Ce n'est pas le cas de cet article, qui concerne le Perco.

Ensuite, et l'amendement n°1212 le confirme, l'épargne salariale méritait un texte spécifique. Les divergences entre l'Assemblée nationale et notre commission des affaires sociales ne sont pas minces... Vous pourrez dire à M. Guéant que nous n'aimons pas les manoeuvres dilatoires : nos amendements ont été déposés le 5 octobre. Nous ne prenons personne par surprise ! Les retraites chapeau ne concernent qu'un nombre très limité de personnes, mais elles sont nichées dans l'épargne salariale. Et je comprends, du coup, vos hésitations.

Enfin, depuis la loi Tepa, le Gouvernement ressasse que le paquet fiscal permet d'éviter l'exil de ceux qui contribuent à la richesse du pays. J'ai fait adopter un amendement demandant un rapport au Gouvernement : il n'y en a jamais eu !

Ne resservez pas des plats réchauffés : c'est indigeste. (Applaudissements à gauche)

M. François Fortassin.  - La majorité de notre groupe votera contre cet article. On arrive, avec les retraites chapeau, à des écarts de revenus encore plus élevés que quand les gens sont en activité. Ils sont pourtant encore moins justifiés.

La réduction des écarts de retraite aurait été un symbole fort, mais vous ne l'avez pas voulu car vous voulez protéger les privilégiés.

Nos concitoyens ne l'acceptent pas, et je ne peux que leur donner raison. (Applaudissements à gauche)

A la demande du groupe CRC, l'article 32 quinquies est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 338
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l'adoption 184
Contre 154

Le Sénat a adopté.

Article 32 sexies

Mme la présidente.  - Amendement n°52, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

M. Guy Fischer.  - Il est défendu.

Mme la présidente.  - Amendement identique n°476, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Mme Patricia Schillinger.  - Quelle est la différence entre information, communication et publicité ? La différence est parfois ténue entre ces deux dernières. L'article 32 sexies parle de « communication » ; de fait, ce ne sera pas de l'information neutre !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Il y a déjà un dispositif d'information qui permet de connaître le montant de l'épargne, et l'article le complète sur le versement d'une rente. Ce n'est pas pour autant un dispositif engageant.

M. Gérard Le Cam.  - L'offensive à marche forcée pour faire avancer ce texte malgré l'opposition des Français vous mène, ici, à ménager un espace encore plus grand pour le soir.

Le Gouvernement applique benoîtement les « recommandations » conjointes de Bruxelles et des marchés financiers. Il faut s'aligner dans la perspective d'« Europe 2020 ». Vous cassez le système solidaire pour dire à nos concitoyens qu'il ne fonctionne pas et qu'il faut le remplacer par un système par capitalisation.

Les amendements identiques nos52 et 476 ne sont pas adoptés.

Mme la présidente.  - Amendement n°185 rectifié, présenté par M. Jégou, au nom de la commission des finances.

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Un arrêté précise les conditions d'application du présent alinéa.

M. Jean-Jacques Jégou.  - L'article modifie l'article L. 132-22 du code des assurances relatif à l'obligation d'information annuelle concernant les contrats de retraite afin de prévoir la communication d'une estimation de la rente viagère qui serait versée au titre des contrats liés à la cessation d'activité professionnelle.

Cet amendement prévoit que les modalités d'application de cette nouvelle obligation seront fixées par arrêté afin de tenir compte de la spécificité des contrats, qu'ils soient formulés en unités de compte ou non. Il faut que les salariés soient informés sans que cela pèse sur les assureurs.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Favorable.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Favorable.

M. Jean Desessard.  - Je ne comprends absolument pas cet amendement. En général, cela se passe comment ? On dit souvent que la loi est bavarde. Mais quel est l'intérêt d'écrire une telle phrase dans la loi ?

L'amendement n°185 rectifié est adopté.

L'article 32 sexies modifié est adopté.

Article 32 septies

Mme Odette Terrade.  - Il est à croire que vous ne considérez pas les salariés comme propriétaires de leur propre épargne ! Pourquoi tenez-vous tant à ce que le versement se fasse par rente ? Sans doute pour que les spéculateurs de toute sorte puissent continuer à jouer avec l'argent des salariés.

Hier, Mme Debré évoquait la nécessité d'un traitement fiscal différencié de l'épargne à court terme et de l'épargne à long terme. Le salarié qui a épargné toute sa vie pour sa retraite croit pouvoir en profiter ; vous voulez lui interdire de retrouver son argent sous la forme qu'il aura choisie !

L'amendement n°53, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°753, présenté par M. Fischer et les membres du groupe CRC-SPG.

I. - Rédiger ainsi cet article :

Le quatrième alinéa du I de l'article L. 144-2 du code des assurances est ainsi rédigé :

Le plan d'épargne retraite populaire peut, à compter de la date de liquidation de sa pension dans un régime obligatoire d'assurance vieillesse ou de l'âge fixé en application de l'article L. 351-1 du code de la sécurité sociale, être payable, à cette échéance, par un versement en capital.

II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État et pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. Gérard Le Cam.  - Il convient de rendre aux personnes ayant souscrit un Perco la possibilité de disposer, dès la liquidation des droits à la retraite, de la totalité des sommes épargnées sur un plan. Les salariés qui ont consenti des efforts financiers pour épargner doivent être considérés comme propriétaires de leur propre argent. Il est inadmissible que les marchés financiers en confisquent 80 %.

Mme la présidente.  - Amendement n°477, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste et apparentés.

Alinéa 2

Après les mots :

à cette même date

supprimer la fin de cet alinéa.

M. René Teulade.  - Cette disposition souligne le caractère très aléatoire du rendement du plan épargne-retraite : le salarié qui accepte, plus ou moins contraint, de faire un placement lâche la proie pour l'ombre. Vous voulez que le résultat de son travail n'aille pas au travailleur mais au capital. Introduire le bonus-malus dans la sécurité sociale, c'est remettre en cause ses fondements. Soyons vigilants ! Il faut que le dialogue se rétablisse avec le peuple. (Approbations à gauche)

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - En application de l'article 44, alinéa 6, et en accord avec la commission, je demande la priorité pour les amendements nos83 rectifié quater, 558 rectifié quater, 652 rectifié, 1220, 557 rectifié bis, 69 rectifié et 327 rectifié, initialement placés après l'article 3 octies.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - D'accord.

La réserve est de droit.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Il est offensant que le Sénat reçoive des instructions de M. Guéant. Le Parlement n'a pas à recevoir d'injonctions de l'exécutif, et encore moins du secrétaire général de l'Elysée. Quelle sera la suite de nos travaux, et notamment ce soir ? (Vives protestations à gauche, où l'on demande une réponse)

Mission commune d'information (Nominations)

Mme la présidente.  - Je rappelle que les groupes ont présenté leurs candidatures pour la mission commune d'information sur les toxicomanies.

La présidence n'a reçu aucune opposition. En conséquence, elles sont ratifiées et je proclame MM. Alduy, Barbier, Mmes Bonnefoy, Bout, Demontès, Ghali, M. Gilles, Mmes Hermange, Hummel, Klès, MM. Le Menn, Milon, Mme Pasquet, MM. Pillet et Pozzo di Borgo membres de la mission commune d'information sur les toxicomanies.

M. Jean-Pierre Sueur.  - Et la réponse à Mme Borvo ?

Mme la présidente.  - Je suspends la séance. (Vives protestations à gauche)

M. David Assouline.  - Le Parlement se plie aux injonctions de M. Guéant !

La séance est suspendue à 19 heures 30.

présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente

La séance reprend à 21 heures 30.

CMP (Accord)

Mme la présidente.  - La commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique relatif à la gestion de la dette sociale est parvenue à l'adoption d'un texte commun.

Réforme des retraites (Procédure accélérée - Suite)

Mme la présidente.  - L'ordre du jour appelle la suite de l'examen du projet de loi sur la réforme des retraites.

Rappels au Règlement

M. Guy Fischer.  - Tout au court de cette journée, Guillaume Sarkozy a été omniprésent dans nos débats. Quelle ne fut pas ma surprise de trouver sur ma table une invitation ! « Monsieur le vice-président, nous organisons un prochain déjeuner de travail, auquel nous vous convions, sur le thème : quelle sera l'assurance maladie de demain ? ». Autour de qui ? De Guillaume Sarkozy, délégué général de Malakoff Médéric. (Sourires) Il a toujours une longueur d'avance sur nous... Et puis cet autre document qui dit : il ne faut pas avoir peur des retraites complémentaires privées. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Bernard Frimat.  - Comment allons-nous travailler ? Mme la présidente Dini a demandé la priorité -que nous ne discutons pas, puisqu'elle est de droit en l'espèce- pour quelques articles additionnels. A quel moment vont-ils venir en discussion ? Maintenant ? Après l'article 33 ?

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Ces amendements viendront après l'article 33.

M. Bernard Frimat.  - Merci pour cette précision.

Discussion des articles (Suite)

Article 32 septies (Suite)

Mme la présidente.  - Nous en sommes parvenus au vote sur l'amendement n°753.

A la demande du groupe UMP, l'amendement n°753 est mis aux voix par scrutin public.

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 153
Contre 183

Le Sénat n'a pas adopté.

A la demande du groupe UMP, l'amendement n°477 est mis aux voix par scrutin public. (M. Daniel Raoul s'exaspère)

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 339
Nombre de suffrages exprimés 338
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l'adoption 153
Contre 185

Le Sénat n'a pas adopté.

A la demande du groupe UMP, l'article 32 septies est mis aux voix par scrutin public.

M. Daniel Raoul.  - C'est M. Guéant qui fait de l'obstruction !

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 183
Contre 153

Le Sénat a adopté.

M. David Assouline.  - M. Guéant nous a dit d'accélérer ! (Sourires)

M. Daniel Raoul.  - En tant que porte-parole de mon groupe, je vous demande, madame la présidente, qu'on puisse continuer de travailler dans des conditions raisonnables. Le groupe UMP doit être en nombre, ou alors c'est qu'il vote avec ses pieds et montre ainsi son attachement à ce texte... (Exclamations à droite)

Mme la présidente.  - Je vous trouve bien agités ce soir ! (Exclamations à gauche)

M. David Assouline.  - Je ne suis pas agité, M. Raoul non plus, mais nous voulons travailler normalement. (Exclamations à droite) Nous voulons savoir où nous allons, mais nous sommes prêts à aller au bout du bout. Quand je suis arrivé ici en 2004, il était inconcevable que l'Élysée puisse dire comment le Sénat devait travailler. (Nouvelles exclamations) Si cela était arrivé, je suis persuadé que l'un de vous se serait levé pour protester. Il ne faudrait pas qu'il y ait une accoutumance. Ce qu'a fait M. Guéant est un scandale, du jamais vu ! (Exclamations indignées à droite) En plus, le groupe UMP ralentit la séance par son nombre. (Exclamations ironiques sur les mêmes bancs)

M. Éric Woerth, ministre.  - Je ne vois pas ce qui est choquant dans les propos de M. Guéant. Chacun peut s'exprimer comme il veut. Les sénateurs commentent bien ce que fait l'Élysée...

M. Charles Gautier.  - C'est scandaleux ! Et la séparation des pouvoirs !

Article 32 octies

Mme la présidente.  - Amendement n°54, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Supprimer cet article.

Mme Marie-France Beaufils.  - Quels vont être nos horaires ce soir ?

Cette série d'articles a été insérée par la majorité de l'Assemblée nationale pour favoriser le développement de différentes formes de capitalisation ; son seul objectif est de mettre à bas notre système solidaire. Ce dernier titre est véritablement un bouquet final destructeur pour notre système par répartition. Tout est en place pour créer les conditions d'une individualisation.

Chacun connaît l'état de nos finances publiques ; toutes ces mesures vont contribuer à vider les caisses. De nouvelles ressources sont défiscalisées et soustraites aux cotisations sociales, donc de retraite. Je suis surprise que vous acceptiez des dispositions qui aggravent la situation financière de l'État alors que vous prétendez combattre les niches fiscales.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

Mme Marie-France Beaufils.  - Je croyais que le Gouvernement, sur pareil sujet fiscal, se donnerait la peine de nous répondre.

M. Charles Gautier.  - C'est le mépris !

L'amendement n°54 n'est pas adopté.

L'article 32 octies est adopté.

Article 33

M. Pierre Mauroy.  - J'interviens au lendemain de la sixième journée d'action organisée par les organisations syndicales et les lycéens. On dit que Nicolas Sarkozy veut trouver la sortie mais ce n'est pas en voulant passer en force qu'il y parviendra.

Il faut une retraite qui donne satisfaction à nos concitoyens. En réponse à mon intervention de vendredi, M. le ministre a ironisé en disant que la gauche aimait les chiffres ronds. Je ne suis pas banquier et je ne sais pas quelle vertu particulière ont les chiffres ronds par rapport aux autres. D'ailleurs, les chiffres des victoires de la gauche ne sont pas ronds : 1871, 1936 ne sont pas des chiffres ronds... (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Le chiffre rond de 60 ans a eu une résonnance dans le pays, il me semble. Il n'est pas possible de rejeter la retraite à 60 ans aux oubliettes de la République. (Applaudissements à gauche)

Nous sommes attachés à la réforme, on nous qualifie même quelquefois de réformistes. M. Sarkozy se dit lui aussi attaché à la réforme mais il y a de bonnes et de mauvaises réformes, et même de très mauvaises. Il faut des réformes qui plaisent aux Français ; c'est le cas de la nôtre, pas de la vôtre.

J'ajoute que chemin faisant, on laisse beaucoup de problèmes sur le côté. Non, la retraite à 60 ans n'aggrave pas la situation des jeunes ni celle des seniors. Le comble, c'est que ces derniers sont mis à la porte de plus en plus jeunes et que cette réforme les oblige à rester sur le marché du travail ! C'est inimaginable.

Vous pouvez bomber le torse, mais il y aura un autre appel, cette fois devant le peuple, et c'est lui qui tranchera. Vous marquez de mauvais points, tous les sondages le montrent : les deux tiers des Français sont opposés à votre réforme. Vous devez en tenir compte.

Le Gouvernement se réfugie dans une position de faiblesse qui sera jugée par le peuple au-delà des péripéties du vote de notre assemblée. On sait la réputation du Sénat sous la IIIe République, la IVe et le début de la Ve. Le Sénat ne doit pas redevenir la chambre noire de la République. (Applaudissements à gauche ; exclamations et marques d'impatience à droite)

Mme la présidente.  - Veuillez conclure.

M. Pierre Mauroy.  - Je commence à peine ! (Rires à gauche) Il y a deux problèmes fondamentaux : la durée de cotisation... (La voix de l'orateur est couverte par les exclamations à droite)

M. Charles Gautier.  - Écoutez-le !

M. Pierre Mauroy.  - La retraite, c'est une mesure de civilisation. (Les exclamations à droite redoublent)

M. Roland Courteau.  - Un peu de respect !

M. Pierre Mauroy.  - Contre toutes les mesures sociales que j'ai présentées en tant que Premier ministre, j'avais la droite vent debout. (Nouvelles exclamations à droite)

Ce ne sont pas les salariés seuls qui doivent payer, il faut mettre le capital à contribution. Si vous ne prenez pas les mesures que le peuple attend, les conséquences seront redoutables. Il faut suivre un autre chemin, le nôtre. (Applaudissements à gauche)

Mme la présidente.  - Amendement n°1156, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 1

Supprimer cet alinéa.

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Cet alinéa retarde au 1er janvier 2012 l'entrée en vigueur du droit à information des assurés -un droit bienvenu- prévu à l'article 3. Pourquoi attendre ? Le droit d'information a été institué par la loi de 2003. Nous craignons que le point d'étape ne serve, outre à l'information de l'assuré, à promouvoir la souscription de produits financiers de retraite par capitalisation. Nous ne voulons pas d'une information orientée.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Même avis.

L'amendement n°1156 n'est pas adopté.

Mme la présidente.  - Amendement n°241, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

Mme Bariza Khiari.  - Cet article traite des conditions d'entrée en vigueur de diverses dispositions du texte ; cet alinéa, de l'application dans le temps des mesures d'âge. Votre politique est barbare. Vous vous placez sur le terrain de la démographie et non de l'économie. Les femmes seront les grandes perdantes de cette réforme, ainsi que les précaires. Si certains veulent travailler plus, qu'ils le fassent, mais laissons prendre leur retraite plus tôt ceux à qui la vie n'a pas fait de cadeaux. La solidarité doit avoir un sens. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme la présidente.  - Amendement n°1157, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 2

Supprimer les références :

26, 27 quater et 27 quinquies

Mme Josiane Mathon-Poinat.  - Ces articles ont été supprimés lors du passage en commission. Leur maintien dans l'article 33 prouve que le travail a été mené beaucoup trop vite et dans la confusion.

Mme la présidente.  - Amendement n°1213, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

Alinéa 2

Remplacer les références :

26, 27 quater et 27 quinquies

par les références :

27 ter AC, 27 ter AF et 27 ter AG

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Amendement de coordination. Sur les amendements nos241 et 1157, avis défavorable.

M. Éric Woerth, ministre.  - Favorable à l'amendement n°1213 et défavorable aux deux autres.

Mme Annie David.  - L'avis défavorable du rapporteur est surprenant : nous demandons la même chose que lui ! Ses réponses ne sont pas respectueuses de notre travail. Les amendements du groupe CRC-SPG sont traités à la va-vite. Je le regrette.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Ces propos ne sont pas admissibles. J'ai eu un moment d'inattention. Un peu de respect ne ferait pas de mal. (Exclamations sur les bancs CRC ; applaudissements sur les bancs UMP) Mon amendement satisfait le vôtre et il est plus complet.

M. Jacques Mahéas.  - Vous venez nous parler de respect, monsieur le rapporteur. Respecter ce texte, ç'aurait été d'abord de discuter avec les organisations syndicales. (Exclamations à droite) J'entends que la référence aux syndicats vous irrite. (Protestations à droite) Ils sont dans la rue avec le peuple français pour vous dire que votre texte est mauvais. Pour respecter la démocratie, il aurait fallu intervenir bien en amont, comme ce qui s'est fait dans d'autres pays.

M. Roland Courteau.  - En Suède !

M. Jacques Mahéas.  - En Suède, en effet, la discussion a duré des mois et des mois.

Certes, il faut une réforme des retraites, mais une bonne réforme, comme l'a dit Pierre Mauroy, c'est une réforme admise par tous qui ne favorise pas les uns tandis qu'elle brime les autres. On aurait pu étaler dans le temps la mise en oeuvre de ces dispositions. Une femme qui a commencé à travailler à 14 ans aura cotisé 44 ans avant de pouvoir prendre sa retraite, bien plus que le maximum exigé. Il s'agit souvent de métiers durs, pénibles. Vous n'avez pas l'habitude de laisser du temps aux gens pour qu'ils puissent réfléchir. Ce fut le cas pour les infirmières ; elles reçoivent maintenant des courriers comminatoires leur demandant leur choix.

Enfin, quand on entre dans la fonction publique, on en connaît les inconvénients et les avantages. Comme vous rognez sur les avantages, il y a rupture de contrat de la part de l'État. Pourquoi ne pas étaler ces mesures dans le temps ? Au lieu de cela, le couperet tombe brutalement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

A la demande du groupe UMP, l'amendement n°241 est mis aux voix par scrutin public. (Marques d'agacement à gauche)

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 153
Contre 183

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme la présidente.  - A la demande de l'UMP... (Exclamations à gauche)

M. Gérard Longuet.  - Je retire ma demande de scrutin public.

L'amendement n°1157 n'est pas adopté.

M. David Assouline.  - Combien de voix ?

Mme la présidente.  - Nous avons compté ! (Exclamations à gauche)

L'amendement 1213 est adopté.

M. Jean-Pierre Caffet.  - Selon M. Guéant, cela fait combien ? (Sourires)

Mme la présidente.  - 53 contre 63. (Applaudissements à droite)

Amendement n°1158, présenté par Mme David et les membres du groupe CRC-SPG.

Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

Mme Marie-Agnès Labarre.  - Vous avez mis dans cet article toutes les mesures de datation des dispositions adoptées dans le cadre de ce projet de loi.

Selon cet alinéa, l'article 25, qui concerne la prévention de la pénibilité et le carnet de santé au travail, ne sera applicable qu'aux expositions intervenues à compter d'une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2012. Ce dossier médical permet de tirer un trait sur le passé des salariés. Cette solution est très choquante : on passe ainsi par pertes et profits toutes les expositions subies par le salarié.

Mme la présidente.  - Amendement n°478, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Alinéa 4

Remplacer le mot :

intervenues

par les mots :

en cours ou prenant effet

M. Jean-Pierre Godefroy.  - J'ai trouvé discourtois que nos collègues de l'UMP veuillent empêcher M. Mauroy de conclure son intervention. (Exclamations à droite) Si M. Raffarin venait nous exposer son point de vue et dépassait son temps de parole, cela ne me choquerait pas

Nous ne savons pas ce qu'il en sera demain : considèrera-t-on que certains salariés n'auront été exposés à certains risques qu'à partir de 2012 ?

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Il est impossible de reconstituer toute la carrière et les expositions aux produits dangereux. On n'a pas de réponse pertinente sur la traçabilité du tracé. Défavorable, donc.

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Même réponse.

Mme Annie David.  - Cela signifie que l'article 25 ne s'appliquera qu'à partir d'une date fixée par décret et que la pénibilité d'aujourd'hui ne sera pas prise en compte. Vous individualisez tout -sauf la date de prise en compte de la pénibilité. C'est une escroquerie à l'endroit des millions de travailleurs concernés. (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Je vous ai parlé des travailleurs de l'amiante employés par des sous-traitants, dont certains ont disparu. M. Longuet m'avait entendu. Mais avec cet article 33, vous effacez d'un trait le passé des salariés ! Vous ne pouvez faire cela délibérément !

M. Georges Tron, secrétaire d'État.  - Il y a déjà des outils pour le passé ; nous en mettons en place un nouveau, qui recueillera toutes les données. C'est aussi simple que cela.

M. Martial Bourquin.  - S'il y a une grande injustice dans ce projet de loi, c'est celle de la pénibilité, qui raccourcit l'espérance de vie de six ou sept ans. Pourquoi ne pas la prendre en compte? Par mépris ?

Les études de l'Anact ont montré comment les TMS et des pathologies identifiées touchent certaines professions. Pourquoi remettre les choses à demain ? La question de la pénibilité fait partie intégrante de celle des retraites. Nous parler de statistiques pour demain, ce n'est pas sérieux ! Beaucoup de ceux qui sont dans la rue aujourd'hui pensent à ceux qui ont des travaux pénibles. Les carreleurs qui sont à genoux à longueur de journées, les maçons qui ont des problèmes de dos... (Murmures à droite) Ils ne peuvent pas partir en retraite plus tard. Certaines choses sont de l'ordre de la dignité. (Murmures à droite) On doit se faire honneur. Avec cet article, vous vous déshonorez ! (Applaudissements à gauche)

Mme Jacqueline Panis.  - Soyons pragmatiques et directs !

M. Guy Fischer.  - J'ai eu l'expérience avec BSN : à Givors, les maîtres verriers ont eu le plus grand mal à faire valoir leurs droits. Ils en sont aux tribunaux, devant qui il est très difficile d'apporter des preuves, du fait de la mauvaise volonté des patrons. La réalité, c'est le monde du travail, que vous ne connaissez pas, que vous méprisez ! (Protestations à droite)

M. René Garrec.  - C'est excessif !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Le ministre nous parle d'un outil nouveau. Si je l'entends bien, on va créer une injustice flagrante pour les personnes qui seront passées d'un métier exposé et pénible vers un qui le sera moins. Comment prouver qu'une exposition aura eu lieu, pendant vingt ans peut-être ?

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Si j'ai bien compris M. Tron, il y aura la pénibilité prise en compte par l'article 25 et puis la pénibilité antérieure prise en compte par d'autres documents. Le sujet de la pénibilité est très important et appelle une attitude semblable à celle que nous avons eue pour l'amiante.

Il est vrai que c'est compliqué et que cela peut coûter cher, mais nous devrons le faire avec certains articles additionnels.

A la demande du groupe CRC, l'amendement n°1158 est mis aux voix par scrutin public. (Exclamations à droite)

M. Guy Fischer.  - Pas pour les mêmes raisons !

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 337
Nombre de suffrages exprimés 219
Majorité absolue des suffrages exprimés 110
Pour l'adoption 37
Contre 182

Le Sénat n'a pas adopté.

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Cet après-midi, à propos de l'exposition à l'amiante, nous sommes tous tombés d'accord sur le fait qu'il était très difficile de reconstituer les carrières chez les sous-traitants ; M. Longuet en est convenu.

Avec cet article, vous faites en sorte que la pénibilité ne sera prise en compte qu'à partir de 2012. Il est pourtant tout à fait possible d'inscrire dès aujourd'hui dans le dossier d'expositions les travailleurs exposés. Cela ne serait pas ruineux, le médecin du travail pourrait le faire. Il ne le fera pas.

M. Gilbert Barbier.  - Mais si !

M. Jean-Pierre Godefroy.  - Mais non ! Il n'y a pas de traçabilité. Pourquoi refuser de tenir compte des expositions en cours ? Ce n'est pas la mer à boire... (Applaudissements à gauche)

A la demande du groupe socialiste, l'amendement n°478 est mis aux voix par scrutin public. (Murmures moqueurs à droite)

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 153
Contre 183

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme Bariza Khiari.  - Vous ne voulez pas nous entendre mais nous vous répéterons jusqu'au bout que cette réforme est injuste et inefficace. Vous proposez aux Français une vie de galère conforme à l'exigence des théologiens du marché.

Vous avez eu l'inélégance de ne pas écouter M. Mauroy qui, fort de son expérience, vous met en garde contre la discorde. Il n'est ni nostalgique ni passéiste mais juste ! Il a voulu changer la vie des ouvriers. Nous qui sommes ses héritiers, nous ne renonçons pas à changer la vie. La politique, c'est prendre sur soi le destin d'autrui. Vous supprimez un acquis social majeur.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Mais non !

Mme Bariza Khiari.  - Nous voterons contre cet article qui met en oeuvre des articles iniques.

Mme Annie David.  - Dès qu'il s'agit d'un droit pour les travailleurs, vous le rognez. Il faut attendre 2012 pour que soient pris en compte la pénibilité et les congés de maternité. Les ministres rient, comme d'habitude ! Les droits des femmes, ce n'est pas sérieux !

Mais quand il s'agit du Perco, on ne rit plus ; il faut que ce soit d'application immédiate !

M. Guy Fischer.  - Malakoff Médéric !

Mme Annie David.  - Guillaume Sarkozy et les assureurs vous remercient ! Pour l'information des travailleurs, il faudra aussi attendre 2012. Mais pour engraisser encore un peu plus le capital, il faut aller vite ! (Applaudissements sur les bancs CRC)

Mme Christiane Demontès.  - C'est un fait, les Français rejettent majoritairement votre texte. Votre conception de l'équité les inquiète et ils réprouvent votre conception de la justice.

A terme, ce sont plusieurs centaines d'euros qui manqueront à ceux qui ont des revenus modestes. A vos yeux, c'est peu de chose ; pas pour ceux qui gagnent peu. Il ne suffit pas de légiférer pour imposer le travail jusqu'à 62 ans !

L'argument des comptes sociaux ne tient pas : la crise n'y a rien changé. Ils étaient déjà en déficit avant. En revanche, la multiplication des niches sociales pour les personnes aisées coûte cher et les exonérations de cotisations, 30 milliards.

Vous allez faire porter le poids de cette réforme à l'Unedic et vous générez toujours plus de dettes, on l'a vu avec le prolongement de la Cades. Face à votre montage financier, nous vous opposons une justice sociale et fiscale, que nous instaurons là où vous voulez iniquité et injustice. Vous pénalisez les plus faibles, dans une économie déjà terriblement marquée par l'inégalité salariale. Vous avez voulu faire croire que vous endossiez le costume de Robin des Bois ; il ne vous sied pas et vous jouez son rôle à l'envers, prenant aux pauvres pour donner aux riches ! (Applaudissements à gauche)

M. David Assouline.  - Vous ne cessez de nous opposer des exemples étrangers. Regardez déjà l'ampleur du choc que subit notre pays et vous verrez que vous avez perdu la bataille de l'opinion. En février, le Gouvernement annonce une réforme, sans plus. On savait que le Président de la République s'était engagé comme candidat à ne pas toucher à l'âge de la retraite et qu'il l'avait ensuite confirmé.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - C'est faux d'un bout à l'autre !

M. David Assouline.  - En juin, on apprend que le temps de la retraite à 60 ans est fini. Ensuite, viennent les vacances... pour un Français sur deux. En septembre, après six mois dont deux mois de vacances, un passage dare-dare à l'Assemblée nationale quand les Suédois ont mis dix ans pour réformer, et avec de vraies négociations.

M. Gérard Longuet.  - Cela fait trente ans qu'on en parle !

M. David Assouline.  - En Allemagne, où la durée de cotisation est de 35 ans, les mesures sur la durée s'appliqueront en 2027, pas en juillet 2011. Cette brutalité ajoute à l'injustice de la réforme. Les Français ne supportent pas l'injustice de cette réforme, non plus que la façon dont vous gouvernez. C'est pourquoi vous avez perdu la bataille de l'opinion ! (Applaudissements à gauche)

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Ça suffit, monsieur Assouline. Vous n'avez pas gagné la bataille de l'opinion. Vous vous vantez d'avoir déjà gagné 2012 ? Ce n'est pas encore fait ! Nous ferons en sorte d'informer les Français. M. Balladur a informé les Français, M. Juppé a informé les Français, et je l'ai fait aussi !

C'est parce qu'il y a plus de retraités et moins de cotisants qu'il faut réformer la retraite ; cela, les Français le savent.

Vous essayez de nous faire perdre du temps en comptant sur la rue, mais la démocratie est ici. Nous sommes fiers d'être rassemblés. La vérité ? Sans travail, pas d'avenir, sans effort, pas de progrès !

Je comprends ce que peut ressentir M. Mauroy : il a fait un acte historique. Mais depuis ce temps là, les choses ont changé. Je répète qu'il n'y a pas d'avenir pour la France sans effort des Français. (Applaudissements prolongés à droite, où de nombreux sénateurs se lèvent)

M. Pierre-Yves Collombat.  - Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le Premier ministre, nous vous reprochons non pas ce que vous dites mais ce que vous ne dites pas. La situation actuelle résulte de votre politique, qui fait fi de l'emploi. Si vous ne modifiez pas le cap, nous allons dans le mur. (Exclamations à droite)

Mettez tout sur la table. Parlez d'une politique de l'emploi, d'une politique fiscale et alors nous pourrons discuter. Vous parlez simplement de l'allongement de l'âge légal mais ceux que vous voulez garder au travail ne pourront pas travailler. Vous voulez réduire les pensions, mais nous ne le dites pas.

Voix sur les bancs UMP.  - C'est Aubry !

M. Gérard Collomb.  - Une réforme des retraites qui ne tient pas compte de la politique économique, c'est du vent ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Monsieur le Premier ministre, nous sommes surpris par votre agressivité. (Exclamations à droite) Mais votre discours est à usage interne : vous avez besoin de galvaniser vos troupes. Si vous voulez remonter le temps, il faut rappeler la situation de l'emploi il y a dix ans. Quand au manque de cotisations, c'est parce que le chômage progresse.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Et la démographie ?

M. Jean-Jacques Mirassou.  - Vous auriez été plus présent lors de nos débats, vous auriez constaté que nous ne niions pas la nécessité d'une réforme (exclamations à droite) mais que nos propositions s'inspirent des principes du CNR.

Venir en fin de discussion nous donner des leçons, c'est facile ! Démonstration a été faite, à gauche, qu'une autre politique était possible. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Vos interventions ne facilitent pas la présence de la majorité !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Nous sommes très honorés de votre présence, monsieur le Premier ministre.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - C'est pour vous, madame. (Rires)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - Nos concitoyens ne supportent plus que vous demandiez toujours aux mêmes de faire des efforts. A l'inverse, pour les plus riches, pas d'efforts, mais des privilèges, des sourires et des avantages. L'effort doit être également réparti et profiter à tous : ce n'est pas le cas de votre réforme, qui sera supportée exclusivement par les salariés.

En 2018, le régime sera encore en déficit et on passera à la capitalisation...

M. Nicolas About.  - Pas du tout ! C'est une contre-vérité !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.  - ...mais vous n'avez pas le courage de le dire !

Voix sur les bancs UMP.  - Et vous, pas le courage de le faire !

M. Jean-Pierre Caffet.  - M. le Premier ministre a dit que Pierre Mauroy était l'homme du passé.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - C'est une caricature. Ayez autant de respect pour Mauroy que moi !

M. Jean-Pierre Caffet.  - Vous, vous êtes l'homme du passif. (Exclamations à droite)

M. Jean-Pierre Raffarin.  - M. Mauroy ne prendrait pas ce ton. Respectez-le autant que je le respecte !

M. Jean-Pierre Caffet.  - Ce sont toujours les mêmes qui passent à la caisse ! Cette réforme est financée à 85 % par les salariés. Ce sont toujours aux mêmes qu'on demande des efforts !

Voix sur les bancs UMP.  - Calmez-vous, il n'y a pas lieu de crier ! 

M. Jean-Pierre Caffet.  - Je vous ai connu plus attentif à nos propositions.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Je vous aime mieux comme ça.

M. Jean-Pierre Caffet.  - Je suis surpris que vous défendiez une réforme symbole de l'injustice. (Protestations à droite)

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Ma patience a des limites !

M. Éric Woerth, ministre.  - Selon M. Assouline, nous sommes allés trop vite, sans concertation, nous avons tenté de passer en force... bref, tout ce que nous avons entendu depuis deux semaines. La majorité a réformé en 1993, 2003 et 2007. (Vives exclamations à gauche) Évidement, votre expérience en la matière est limitée... (Même mouvement) A chaque fois qu'on parle, vous montez sur vos grands chevaux. Vous passez votre temps à nous agresser : laissez-nous vous répondre. (Exclamations à gauche)

Nous avons publié en mai un document d'orientation après des centaines d'heures de discussion. Un débat public a eu lieu pendant des mois.

Voix à gauche.  - Avec qui ?

M. Éric Woerth, ministre.  - Avec notamment les partenaires sociaux !

Un projet de texte a été discuté et nous avons passé des jours et des nuits à l'Assemblée nationale, puis ici. Ne me dites pas qu'il n'y a pas eu discussion !

Des exemples étrangers, vous ne retenez que ce qui vous arrange. Pour l'Allemagne, dites la vérité : les 35 ans de cotisation, c'est à 63 ans! L'âge du taux plein est à 65 ans et va passer à 67 ans, non pas en 2027 mais en 2029 !

Pourquoi oubliez-vous de dire que les pensions de retraite en Suède vont baisser de 3 % dès cette année et sans doute autant l'an prochain ? Dites la vérité ! Vous seriez incapables de défendre pareille réforme. (Applaudissements à droite)

Ce n'est pas la bataille de l'opinion que vous avez gagnée, c'est celle de la démagogie ! (Protestations à gauche ; applaudissements à droite)

M. Martial Bourquin.  - Vous exposez votre vérité, mais il y en a une autre : cette réforme est injuste. Nous aimons la justice.

M. Gérard Longuet.  - Vous l'aimez, mais vous ne l'épousez pas !

M. Martial Bourquin.  - Comment payer des pensions à 1 000 euros et envoyer de très gros chèques à certains contribuables ? (Exclamations à droite) Une réforme de retraite, soit, mais quelle réforme ? La votre est injuste ! Il faudrait taxer le capital. S'il y avait eu des gestes importants en ce sens, une vraie négociation aurait été possible.

Que cherche le Gouvernement ? A quoi joue-t-il, quand des millions de personnes sont dans la rue ? Vous bloquez la France. Il fallait un vrai projet. M. Bel a demandé, avec les autres présidents de groupe de gauche, d'arrêter le débat et de rouvrir les négociations. Vous voulez que cette réforme passe à toute vitesse et vous vous plaignez parce que nous débattons. Il faut arrêter le débat et négocier avec les organisations syndicales.

Ce projet de loi est injuste et vous le savez. Vous allez bientôt retirer la résidence principale de l'ISF ; vous écoutez les plus aisés, mais vous restez sourds aux revendications populaires ! Nous sommes dans une démocratie bloquée et cela se paiera très cher. Le peuple tranchera. Votre sourire, monsieur le ministre, ne change rien. Vous êtes condamnés par ce projet cynique. (Applaudissements à gauche ; exclamations à droite)

A la demande du groupe UMP, l'article 33 est mis aux voix par scrutin public.

M. Guy Fischer.  - J'avais demandé la parole. (Exclamations à gauche)

Mme la présidente.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 338
Nombre de suffrages exprimés 336
Majorité absolue des suffrages exprimés 169
Pour l'adoption 183
Contre 153

Le Sénat a adopté.

(Applaudissements à droite)

présidence de M. Gérard Larcher

Articles additionnels après l'article 3 octies

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - J'ai rapporté la réforme de 2003 et donc celle-ci. Je veux défendre en priorité l'amendement n°1220 qui me semble extrêmement important.

La priorité, acceptée par le Gouvernement, est de droit.

M. le président.  - Amendement n°1220 rectifié, présenté par M. Leclerc, au nom de la commission des affaires sociales.

Après l'article 3 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - A compter du premier semestre 2013, le Comité de pilotage des régimes de retraite organise une réflexion nationale sur les objectifs et les caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque vieillesse.

Parmi les thèmes de cette réflexion, figurent :

1° Les conditions d'une plus grande équité entre les régimes de retraite légalement obligatoires ;

2° Les conditions de mise en place d'un régime universel par points ou en comptes notionnels, dans le respect du principe de répartition au coeur du pacte social qui unit les générations ;

3° Les moyens de faciliter le libre choix par les assurés du moment et des conditions de leur cessation d'activité.

II. - En s'appuyant sur l'expertise du Conseil d'orientation des retraites, le Comité de pilotage des régimes de retraite remet au Parlement et au Gouvernement les conclusions de cette réflexion, dans le respect des principes de pérennité financière, de lisibilité, de transparence, d'équité intergénérationnelle et de solidarité intragénérationnelle.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Il convient d'organiser, à compter du premier semestre 2013, une réflexion nationale sur les objectifs et les caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque vieillesse.

En raison du vieillissement de la population, la question de l'équilibre des régimes va se poser rapidement. Il faut engager une réflexion à plus long terme. Pour mener cette réflexion, il faut du temps, s'inspirer des réformes menées dans les pays voisins. Les futurs retraités doivent avoir la garantie que les pensions seront fonction de leurs cotisations. Un haut niveau de revenu de pension doit être garanti. L'assurance vieillesse a besoin d'un électrochoc. Les actifs d'aujourd'hui paient les retraites d'aujourd'hui : nous sommes donc dans la répartition. La solidarité intergénérationnelle est donc garantie. Pourquoi un système par point ? Parce qu'il existe et qu'il a fait ses preuves. Avec une grande transparence, ce système garantira l'équité.

Enfin, les jeunes générations ne croient plus au système actuel. Nous devons les rassurer et sauver la répartition... (Applaudissements à droite)

M. le président.  - Amendement n°69 rectifié, présenté par Mme Demontès et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.

Après l'article 3 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 31 décembre 2015, le Comité d'orientation des retraites présente au Gouvernement et au Parlement un rapport envisageant une réforme systémique.

Ce rapport est rendu public.

Mme Raymonde Le Texier.  - Notre pays connaît des dizaines de régimes de retraite. Cette opacité nuit à la crédibilité de notre système.

Sur le fond, si l'on persiste à asseoir les recettes sur les cotisations, l'immense majorité de nos concitoyens va s'appauvrir. Nous avons besoin d'une réforme et la convergence s'impose. Nous souhaitons mettre en oeuvre une vraie réforme qui traduirait un choix de société clair.

Nous regrettons que le Gouvernement n'ait pas engagé une concertation avec les organisations syndicales. Nous demandons donc au COR d'engager des travaux pour qu'en 2013, il puisse proposer une réforme systémique. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. le président.  - Amendement n°83 rectifié quater, présenté par MM. Lardeux et J. Blanc.

Après l'article 3 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - À compter du premier semestre 2014, le Comité de pilotage des régimes de retraite et le Conseil d'orientation des retraites organisent une réflexion nationale sur les objectifs et les caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque vieillesse.

Parmi les thèmes de cette réflexion, figurent :

1° La convergence progressive des paramètres des différents régimes de retraite légalement obligatoires ;

2° Les conditions de mise en place d'un régime de base universel par points ou en comptes notionnels, dans le respect du principe de répartition au coeur du pacte social qui unit les générations ;

3° Les moyens de faciliter le libre choix par les assurés du moment et des conditions de leur cessation d'activité.

II. -  En s'appuyant sur l'expertise du Conseil d'orientation des retraites, le Comité de pilotage des régimes de retraite propose au Parlement et au Gouvernement un ensemble de mesures visant à mettre en oeuvre les conclusions de cette réflexion, dans le respect des principes de pérennité financière, de lisibilité, de transparence, d'équité intergénérationnelle et de solidarité intragénérationnelle.

M. Jacques Blanc.  - Cet amendement répond aux préoccupations exprimées sur différents bancs de notre assemblée.

M. le président.  - Amendement n°558 rectifié quinquies, identique à l'amendement n° 1220 de la commission, présenté par M. About et les membres du groupe UC.

Après l'article 3 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - À compter du premier semestre 2013, le Comité de pilotage des régimes de retraite organise une réflexion nationale sur les objectifs et les caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque vieillesse.

Parmi les thèmes de cette réflexion, figurent :

1° Les conditions d'une plus grande équité entre les régimes de retraite légalement obligatoires ;

2° Les conditions de mise en place d'un régime universel par points ou en comptes notionnels, dans le respect du principe de répartition au coeur du pacte social qui unit les générations ;

3° Les moyens de faciliter le libre choix par les assurés du moment et des conditions de leur cessation d'activité.

II. - En s'appuyant sur l'expertise du Conseil d'orientation des retraites, le Comité de pilotage des régimes de retraite remet au Parlement et au Gouvernement les conclusions de cette réflexion, dans le respect des principes de pérennité financière, de lisibilité, de transparence, d'équité intergénérationnelle et de solidarité intragénérationnelle.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Nous proposons l'organisation d'une réflexion nationale sur les objectifs et les caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque vieillesse.

Nous devons ouvrir un nouvel horizon dès aujourd'hui. Une réforme s'impose mais à moyen et long terme, nous ne ferons pas l'économie d'une réforme systémique. Nous appelons de nos voeux une telle réforme depuis 2003 et le rapport du COR a démontré comment un système par point réduit les inégalités : il y a une relation directe entre les cotisations et les pensions versées.

L'équilibre est garanti, lisible et la solidarité renforcée. Le changement de système implique de grandes transformations : il faut de quinze à vingt ans pour passer à ce système. Nous souhaitons donc qu'une grande réflexion nationale s'engage dès 2013. (Applaudissements au centre)

M. le président.  - Amendement identique n°652 rectifié bis, présenté par M. Vasselle et les membres du groupe UMP.

M. Alain Vasselle.  - Cet amendement est identique à celui qui vient d'être présenté. Il est le fruit de la réflexion de la Meccs et des travaux de M. Leclerc et de Mme Demontès : c'est dire qu'une large majorité peut approuver ce dispositif.

La crise nous contraint d'engager une réforme paramétrique, mais il faut préparer l'avenir de notre système de retraite. (Applaudissements à droite)

M. le président.  - Amendement n°327 rectifié bis, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

Après l'article 3 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 30 septembre 2011, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la possibilité de faire évoluer le système de retraite actuel vers un régime à points.

M. François Fortassin.  - Il ne s'agit pas de remettre en cause le système par répartition auquel les Français sont attachés mais il faut penser à l'avenir.

M. le président.  - Amendement n°557 rectifié bis, présenté par M. Arthuis et les membres du groupe UC.

Après l'article 3 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'assurance vieillesse universelle garantit une pension de retraite à l'assuré qui en demande la liquidation.

Le montant de la pension est égal au montant du compte de cotisations retraite de l'assuré divisé par le nombre d'années d'espérance de vie de sa génération au moment de la liquidation de la pension.

Le compte de cotisations retraite est alimenté par les cotisations retraite de l'assuré et par les intérêts produits par ce compte. Ces intérêts sont garantis par l'État.

Le taux de cotisation retraite obligatoire est fixé à un pourcentage déterminé du revenu brut de l'assuré.

Le taux d'intérêt garanti par l'État est égal au taux de croissance de la masse salariale entre l'année de versement des cotisations et l'année de liquidation de la pension.

Sauf dans les cas définis par la loi, l'assuré ne peut liquider sa pension de retraite avant l'âge de soixante ans.

II. - Le I du présent article entre en vigueur à compter du 1er janvier 2020.

III. - Remplacer les huit premiers alinéas de l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 114-2. - Le Conseil d'orientation des retraites a pour mission de produire et rendre publiques les informations nécessaires à la mise en oeuvre de l'article n° ... de la loi n°....portant réforme des retraites.

« Il formule toutes recommandations ou propositions qui lui paraissent de nature à faciliter cette mise en oeuvre. »

M. Jean Arthuis.  - Notre système de retraite souffre de deux maux qui le condamnent.

Le premier, c'est qu'il va tout droit à la faillite. Ce projet de loi s'efforce de répondre au problème, même si c'est de façon partielle. En 2018, le système devrait s'équilibrer.

Le second mal qui condamne notre système, c'est qu'il est inégalitaire et illisible : 21 systèmes de base, des régimes complémentaires obligatoires... A cotisations égales, pensions inégales. Cela ne peut plus durer.

Nous devons donc nous orienter vers un système par point. Pourquoi attendre 2013 ou 2014 ? Arrêtons le déni de réalité. Cette réforme systémique doit intervenir le plus tôt possible. L'égalité des Français devant la retraite doit être réaffirmée. (Applaudissements à droite ; exclamations à gauche)

M. Guy Fischer.  - Vous sabordez la retraite par répartition !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - L'amendement n°69 rectifié manque d'ambition. (Rires à gauche) Le septième rapport du COR traite déjà de cette question : retrait.

L'amendement n°83 rectifié quater doit être retiré au profit des amendements identiques nos558 rectifié sexies, 652 rectifié bis et 1220 rectifié. Même avis sur l'amendement n°327 rectifié bis.

Enfin, l'amendement n°557 rectifié bis fait des propositions très intéressantes mais il ne prévoit pas l'organisation d'une réflexion nationale préalable. L'horizon 2020 semble trop court. Retrait au profit des trois amendements identiques.

M. Éric Woerth, ministre.  - Ces amendements proposent une réflexion sur une réforme systémique de notre système de retraites. Trois objectifs auxquels on ne peut que souscrire : renforcer la lisibilité de nos systèmes de retraite, prolonger la convergence des systèmes et permettre la prolongation de l'activité.

Trois possibilités s'offraient à nous pour réformer le système des retraites. Nous pouvions baisser les pensions, mais nous l'avons refusé.

M. Guy Fischer.  - Elles baissent déjà !

M. Éric Woerth, ministre.  - Nous refusons aussi la hausse des cotisations et des impôts. Nous avons donc choisi de prolonger la vie active. On ne peut faire croire qu'en basculant sur un régime par points, tous les problèmes seraient réglés. Il faut avant tout revenir à l'équilibre. La réforme d'abord, la réflexion sur une réforme systémique ensuite !

Le Gouvernement appelle cette réflexion de ses voeux. Les échanges que nous avons eus avec les groupes UC et UMP nous font penser que les trois amendements identiques vont dans le bon sens. La réflexion s'engagera dès 2013, prolongeant celle du COR. Menons à bien notre réforme, puis demandons-nous s'il est opportun d'avoir un régime unique. La réflexion s'engagera en 2013 -nous acceptons le changement de date- et devrait aboutir au basculement en 2020. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Pierre Bel.  - Compte tenu de l'élément nouveau constitué par ces trois amendements identiques et la réponse du ministre, je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à minuit vingt-cinq, reprend à minuit cinquante.

M. le président.  - Nous allons procéder au vote sur les amendements identiques 1120 rectifié, 558 rectifié quinquies et 652 rectifié bis. Je suis saisi de demandes de scrutin public de la part des groupes UMP et UC.

Mme Christiane Demontès.  - Nous sommes confrontés à un vote en priorité sur des amendements proposant une autre réforme, une réforme systémique. Nous sommes favorables à une réforme systémique, qui mette tout sur la table, les exemples étrangers comme ce que la France peut inventer de neuf.

M. Roland du Luart.  - Très bien.

Mme Christiane Demontès.  - Notre système doit reposer sur des droits collectifs solides, avec une retraite choisie qui permettent à ceux qui n'en peuvent plus de partir à 60 ans, et à ceux qui le veulent et le peuvent à travailler plus longtemps ; avec un compte temps qui permettrait de décloisonner les trois temps de la vie : formation, travail, retraite.

Nos propositions ont été formulées. Nous sommes donc étonnés de retrouver ces amendements débattus en priorité. Pourquoi ce soir, après le vote du dernier article du projet de loi, et pas avant ? Ce débat-là aurait dû avoir lieu comme préalable ! Nous ne pouvons pas faire comme si tout ce qu'a voté la majorité était nécessaire et qu'ensuite on nous dise qu'il faut faire une autre réforme.

M. Nicolas About.  - Non, un débat !

Mme Christiane Demontès.  - Quel aveu ! Dans deux ans, on va faire une vraie réforme ! Votre réforme n'en est pas une, c'est une contre-réforme, une série d'ajustements comptables. Dans ces conditions, nous ne pouvons accepter ce débat et nous retirons notre amendement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

L'amendement n°69 rectifié est retiré.

30

Sur le fond, si l'on persiste à asseoir les recettes sur les cotisations, l'immense majorité de nos concitoyens va s'appauvrir. Nous avons besoin d'une réforme et la convergence s'impose. Nous souhaitons mettre en oeuvre une vraie réforme qui traduirait un choix de société clair.

Nous regrettons que le Gouvernement n'ait pas engagé une concertation avec les organisations syndicales. Nous demandons donc au COR d'engager des travaux pour qu'en 2013, il puisse proposer une réforme systémique. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. le président.  - Amendement n°83 rectifié quater, présenté par MM. Lardeux et J. Blanc.

Après l'article 3 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - À compter du premier semestre 2014, le Comité de pilotage des régimes de retraite et le Conseil d'orientation des retraites organisent une réflexion nationale sur les objectifs et les caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque vieillesse.

Parmi les thèmes de cette réflexion, figurent :

1° La convergence progressive des paramètres des différents régimes de retraite légalement obligatoires ;

2° Les conditions de mise en place d'un régime de base universel par points ou en comptes notionnels, dans le respect du principe de répartition au coeur du pacte social qui unit les générations ;

3° Les moyens de faciliter le libre choix par les assurés du moment et des conditions de leur cessation d'activité.

II. -  En s'appuyant sur l'expertise du Conseil d'orientation des retraites, le Comité de pilotage des régimes de retraite propose au Parlement et au Gouvernement un ensemble de mesures visant à mettre en oeuvre les conclusions de cette réflexion, dans le respect des principes de pérennité financière, de lisibilité, de transparence, d'équité intergénérationnelle et de solidarité intragénérationnelle.

M. Jacques Blanc.  - Cet amendement répond aux préoccupations exprimées sur différents bancs de notre assemblée.

M. le président.  - Amendement n°558 rectifié quinquies, identique à l'amendement n° 1220 de la commission, présenté par M. About et les membres du groupe UC.

Après l'article 3 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - À compter du premier semestre 2013, le Comité de pilotage des régimes de retraite organise une réflexion nationale sur les objectifs et les caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque vieillesse.

Parmi les thèmes de cette réflexion, figurent :

1° Les conditions d'une plus grande équité entre les régimes de retraite légalement obligatoires ;

2° Les conditions de mise en place d'un régime universel par points ou en comptes notionnels, dans le respect du principe de répartition au coeur du pacte social qui unit les générations ;

3° Les moyens de faciliter le libre choix par les assurés du moment et des conditions de leur cessation d'activité.

II. - En s'appuyant sur l'expertise du Conseil d'orientation des retraites, le Comité de pilotage des régimes de retraite remet au Parlement et au Gouvernement les conclusions de cette réflexion, dans le respect des principes de pérennité financière, de lisibilité, de transparence, d'équité intergénérationnelle et de solidarité intragénérationnelle.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe.  - Nous proposons l'organisation d'une réflexion nationale sur les objectifs et les caractéristiques d'une réforme systémique de la prise en charge collective du risque vieillesse.

Nous devons ouvrir un nouvel horizon dès aujourd'hui. Une réforme s'impose mais à moyen et long terme, nous ne ferons pas l'économie d'une réforme systémique. Nous appelons de nos voeux une telle réforme depuis 2003 et le rapport du COR a démontré comment un système par point réduit les inégalités : il y a une relation directe entre les cotisations et les pensions versées.

L'équilibre est garanti, lisible et la solidarité renforcée. Le changement de système implique de grandes transformations : il faut de quinze à vingt ans pour passer à ce système. Nous souhaitons donc qu'une grande réflexion nationale s'engage dès 2013. (Applaudissements au centre)

M. le président.  - Amendement identique n°652 rectifié bis, présenté par M. Vasselle et les membres du groupe UMP.

M. Alain Vasselle.  - Cet amendement est identique à celui qui vient d'être présenté. Il est le fruit de la réflexion de la Meccs et des travaux de M. Leclerc et de Mme Demontès : c'est dire qu'une large majorité peut approuver ce dispositif.

La crise nous contraint d'engager une réforme paramétrique, mais il faut préparer l'avenir de notre système de retraite. (Applaudissements à droite)

M. le président.  - Amendement n°327 rectifié bis, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi.

Après l'article 3 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Avant le 30 septembre 2011, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la possibilité de faire évoluer le système de retraite actuel vers un régime à points.

M. François Fortassin.  - Il ne s'agit pas de remettre en cause le système par répartition auquel les Français sont attachés mais il faut penser à l'avenir.

M. le président.  - Amendement n°557 rectifié bis, présenté par M. Arthuis et les membres du groupe UC.

Après l'article 3 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'assurance vieillesse universelle garantit une pension de retraite à l'assuré qui en demande la liquidation.

Le montant de la pension est égal au montant du compte de cotisations retraite de l'assuré divisé par le nombre d'années d'espérance de vie de sa génération au moment de la liquidation de la pension.

Le compte de cotisations retraite est alimenté par les cotisations retraite de l'assuré et par les intérêts produits par ce compte. Ces intérêts sont garantis par l'État.

Le taux de cotisation retraite obligatoire est fixé à un pourcentage déterminé du revenu brut de l'assuré.

Le taux d'intérêt garanti par l'État est égal au taux de croissance de la masse salariale entre l'année de versement des cotisations et l'année de liquidation de la pension.

Sauf dans les cas définis par la loi, l'assuré ne peut liquider sa pension de retraite avant l'âge de soixante ans.

II. - Le I du présent article entre en vigueur à compter du 1er janvier 2020.

III. - Remplacer les huit premiers alinéas de l'article L. 114-2 du code de la sécurité sociale par deux alinéas ainsi rédigés :

« Art. L. 114-2. - Le Conseil d'orientation des retraites a pour mission de produire et rendre publiques les informations nécessaires à la mise en oeuvre de l'article n° ... de la loi n°....portant réforme des retraites.

« Il formule toutes recommandations ou propositions qui lui paraissent de nature à faciliter cette mise en oeuvre. »

M. Jean Arthuis.  - Notre système de retraite souffre de deux maux qui le condamnent.

Le premier, c'est qu'il va tout droit à la faillite. Ce projet de loi s'efforce de répondre au problème, même si c'est de façon partielle. En 2018, le système devrait s'équilibrer.

Le second mal qui condamne notre système, c'est qu'il est inégalitaire et illisible : 21 systèmes de base, des régimes complémentaires obligatoires... A cotisations égales, pensions inégales. Cela ne peut plus durer.

Nous devons donc nous orienter vers un système par point. Pourquoi attendre 2013 ou 2014 ? Arrêtons le déni de réalité. Cette réforme systémique doit intervenir le plus tôt possible. L'égalité des Français devant la retraite doit être réaffirmée. (Applaudissements à droite ; exclamations à gauche)

M. Guy Fischer.  - Vous sabordez la retraite par répartition !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - L'amendement n°69 rectifié manque d'ambition. (Rires à gauche) Le septième rapport du COR traite déjà de cette question : retrait.

L'amendement n°83 rectifié quater doit être retiré au profit des amendements identiques nos558 rectifié sexies, 652 rectifié bis et 1220 rectifié. Même avis sur l'amendement n°327 rectifié bis.

Enfin, l'amendement n°557 rectifié bis fait des propositions très intéressantes mais il ne prévoit pas l'organisation d'une réflexion nationale préalable. L'horizon 2020 semble trop court. Retrait au profit des trois amendements identiques.

M. Éric Woerth, ministre.  - Ces amendements proposent une réflexion sur une réforme systémique de notre système de retraites. Trois objectifs auxquels on ne peut que souscrire : renforcer la lisibilité de nos systèmes de retraite, prolonger la convergence des systèmes et permettre la prolongation de l'activité.

Trois possibilités s'offraient à nous pour réformer le système des retraites. Nous pouvions baisser les pensions, mais nous l'avons refusé.

M. Guy Fischer.  - Elles baissent déjà !

M. Éric Woerth, ministre.  - Nous refusons aussi la hausse des cotisations et des impôts. Nous avons donc choisi de prolonger la vie active. On ne peut faire croire qu'en basculant sur un régime par points, tous les problèmes seraient réglés. Il faut avant tout revenir à l'équilibre. La réforme d'abord, la réflexion sur une réforme systémique ensuite !

Le Gouvernement appelle cette réflexion de ses voeux. Les échanges que nous avons eus avec les groupes UC et UMP nous font penser que les trois amendements identiques vont dans le bon sens. La réflexion s'engagera dès 2013, prolongeant celle du COR. Menons à bien notre réforme, puis demandons-nous s'il est opportun d'avoir un régime unique. La réflexion s'engagera en 2013 -nous acceptons le changement de date- et devrait aboutir au basculement en 2020. (Applaudissements à droite)

M. Jean-Pierre Bel.  - Compte tenu de l'élément nouveau constitué par ces trois amendements identiques et la réponse du ministre, je demande une suspension de séance.

La séance, suspendue à minuit vingt-cinq, reprend à minuit cinquante.

M. le président.  - Nous allons procéder au vote sur les amendements identiques 1120 rectifié, 558 rectifié quinquies et 652 rectifié bis. Je suis saisi de demandes de scrutin public de la part des groupes UMP et UC.

Mme Christiane Demontès.  - Nous sommes confrontés à un vote en priorité sur des amendements proposant une autre réforme, une réforme systémique. Nous sommes favorables à une réforme systémique, qui mette tout sur la table, les exemples étrangers comme ce que la France peut inventer de neuf.

M. Roland du Luart.  - Très bien.

Mme Christiane Demontès.  - Notre système doit reposer sur des droits collectifs solides, avec une retraite choisie qui permettent à ceux qui n'en peuvent plus de partir à 60 ans et à ceux qui le veulent et le peuvent à travailler plus longtemps, avec un compte temps qui permettrait de décloisonner les trois temps de la vie : formation, travail, retraite.

Nos propositions ont été formulées. Nous sommes donc étonnés de retrouver ces amendements débattus en priorité. Pourquoi ce soir, après le vote du dernier article du projet de loi, et pas avant ? Ce débat là aurait dû avoir lieu comme préalable ! Nous ne pouvons pas faire comme si tout ce qu'a voté la majorité était nécessaire et qu'ensuite on nous dise qu'il faut faire une autre réforme.

M. Nicolas About.  - Non, un débat !

Mme Christiane Demontès.  - Quel aveu ! Dans deux ans, on va faire une vraie réforme ! Votre réforme n'en est pas une, c'est une contre-réforme, une série d'ajustements comptables. Dans ces conditions, nous ne pouvons accepter ce débat et nous retirons notre amendement. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

L'amendement n°69 rectifié est retiré.

Mme Annie David.  - Le rapporteur a rectifié son amendement en séance, sans consulter la commission. Ce n'est donc plus l'amendement de celle-ci.

M. Gilbert Barbier.  - Presque !

Mme Annie David.  - Sur le fond, nous nous y opposons parce que nous ne sommes pas favorables à une réforme systémique. Vous fixez déjà la feuille de route, les bornes de la réflexion. Depuis le début, nous sommes demandeurs d'une réforme du financement du système de retraite par répartition, mais vous avez refusé de la mettre en débat.

Dans les systèmes par points, le niveau des pensions n'est jamais fixé, qui dépend de la valeur du point à l'heure de la liquidation. En Suède, l'État a dû renflouer le système par points parce que le niveau des pensions avait dégringolé à cause de la crise. J'ajoute que la valeur du point n'est pas toujours communiquée aux salariés et qu'elle n'a qu'une valeur indicative lorsqu'elle l'est -les salariés ne peuvent la rendre opposable, ce qui laisse une grande latitude aux gouvernements. Dans ce système, il n'y a plus de solidarité intergénérationnelle puisque seule s'exerce la solidarité à l'intérieur d'une même génération.

La question fondamentale du financement n'est pas plus réglée. Sans ressources nouvelles, je ne vois donc pas comment un tel système répondrait aux besoins de notre système par répartition. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Gérard Longuet.  - L'UMP votera avec conviction ces amendements identiques. Sur le fond et dans la forme, ce débat est légitime dans l'instant. Nous avions l'obligation absolue, rendue plus pressante par la crise, de parer tout de suite au déficit de notre système de retraites, alors que nous devons consolider nos finances publiques. La croissance restera faible, loin en tout cas des 3 %... (Exclamations à gauche)

M. Jean Desessard.  - Nous l'avons toujours dit !

M. Gérard Longuet.  - ...et la France est exposée comme les autres pays au jugement de ceux qui lui prêtent de l'argent.

Il fallait donc absolument la réforme paramétrique qui vient d'être votée. Avons-nous pour autant épuisé le sujet ? Depuis dix ans, le Sénat a conduit une réflexion approfondie sur la structure des retraites, à laquelle les uns et les autres ont été associés. M. Assouline nous a rappelé que la Suède avait mis dix ans à mettre en place sa réforme ; c'est ce que nous faisons. Comme le disait Alfred Sauvy, le régime par répartition ne peut pas être déficitaire parce que les cotisations d'une année nourrissent les pensions de la même année. Or, notre système est équivoque, qui a l'apparence de la répartition mais repose sur des droits sociaux capitalisés.

Les travaux du COR ont montré que le système par points revient à celui de Sauvy : l'énergie d'une année finance les retraites d'une année.

Notre régime de retraite est très ancien ; il faut apporter d'ici une décennie à nos compatriotes, qui ont découvert -médusés- le déficit de notre système, l'espérance d'une solution durable pour le long terme. (Applaudissements sur les bancs UMP)

M. Jacques Mahéas.  - Comment voulez-vous qu'on ait confiance ?

M. Pierre-Yves Collombat.  - L'opposition est cohérente avec tout ce qu'elle a dit mais je peine à suivre M. Longuet. Il me rappelait le poète : « Les chants désespérés sont les chants les plus beaux »...

« Jusqu'en 2020, on n'a pas de souci majeur à avoir pour les retraites, grâce aux lois Fillon. ». Qui dit cela ? M. Sarkozy en 2007, lors de son débat avec Mme Royal.

M. Jean-Pierre Fourcade.  - Il y a eu la crise !

M. Pierre-Yves Collombat.  - La crise, d'où vient-elle ? Ce n'est pas une catastrophe naturelle ! Elle est l'effet d'une politique ! (Exclamations à droite)

En 2007, il n'y avait plus de souci à se faire. En octobre 2010, on vote une réforme courageuse qui règle tous les problèmes que les socialistes n'ont pas su régler. Et on nous dit maintenant qu'en 2014, il faudra y revenir sérieusement ! Votre réforme ne tient pas la route ! Tous les trois ans, vous nous annoncez la réforme du siècle ! Décidez-vous. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Guy Fischer.  - Malgré toutes vos dénégations, ce 21 octobre restera le jour où la retraite par répartition aura été jetée par-dessus bord ! (Applaudissements à gauche)

Nous voulons une réforme du financement de la retraite par répartition. Nous avons une proposition de loi que vous n'avez même pas regardée.

Votre réforme est brutale ; elle fera de la France le pays le plus régressif de l'Union européenne. Nous sommes le seul pays où l'on agisse à la fois sur les bornes d'âge et sur la durée de cotisation.

Votre réforme est injuste : quand les entreprises du CAC 40 voient leurs résultats bondir de 85 %, on fait payer la réforme à 85 % par les salariés et l'on égratigne à peine le capital. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat le confirme) Injuste aussi parce que c'est la réforme de la super-austérité : elle va s'accompagner d'une véritable glaciation des salaires.

Elle est enfin inefficace parce que vous ne voulez pas nuire à vos amis. Resteront toujours à la fin les 4 milliards de déficit. Les quelques avancées en direction des femmes ou des polypensionnés, c'est epsilon ! (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Nicolas About.  - Le Mecss a bien travaillé. Nous avons considéré que nous devions porter ses propositions. Elles sont pour nous emblématiques. Nous avons défendu, réécrit, négocié pour que cet amendement soit accepté puis adopté par le Sénat. Ce soir, certains nous lâchent pour des motifs tactiques sous des prétextes peu convaincants. (Murmures désapprobateurs sur les bancs socialistes)

L'amendement adopté ne figurera pas à la fin du texte, il figurera en bonne place à l'article 3 octies, mais il était logique d'adopter d'abord des mesures de sauvegarde avant d'évoquer les désirs d'avenir. (Sourires) Nous sommes heureux et fiers de voter une réforme qui sauve notre régime par répartition.

M. Jacques Mahéas.  - C'est faux !

M. Nicolas About.  - Mais nous sommes conscients de la nécessité d'une réforme à long terme, qui commencera par le débat national que vous ne cessez de réclamer. Quand on vous le propose, vous le refusez ! Nous souhaitons qu'y figure la convergence des régimes. Nous souhaitons un système par points dans une logique par répartition. Nous souhaitons qu'on s'appuie sur l'expertise du COR. Le Parlement sera appelé à mettre en oeuvre les propositions du comité de pilotage.

Voilà un beau défi ! Chacun se souviendra de ceux qui auront eu un peu plus que le bout de leur langue pour faire adopter ces dispositions. (Applaudissements au centre et à droite)

M. David Assouline.  - J'entends beaucoup d'échos à ce que nous répétons depuis trois semaines. Avant que cet amendement n'existe, la réforme a été vendue au pays comme réglant tous les problèmes. Vous nous disiez : si vous ne la votez pas, vous ne pourrez pas regarder vos enfants dans les yeux... Nous vous disions que manquaient 15 milliards, que votre réforme était injuste. Et à la fin, on entend M. Arthuis nous dire tranquillement qu'il y a des injustices incroyables, un déficit incroyable qui confine à la banqueroute ! C'est ce que nous ne cessons de répéter.

Que faire ? Suspendre la réforme, adopter cet amendement comme fondement de la négociation et on cherche le consensus sur une réforme systémique juste et efficace ? Mais vous voulez nous faire avaler le truc en annonçant qu'on y reviendra en 2014 ! Vos spots, payés par les contribuables, n'ont cessé de répéter que cette réforme réglait le problème pour les nouvelles générations. Vous avez menti au pays. Comment voulez-vous qu'on vous fasse confiance ?

Après la deuxième manifestation, vous avez décidé de lâcher un peu de lest pour quelques femmes et les handicapés. Maintenant, vous sortez cet amendement de votre chapeau. Pourquoi n'avoir pas d'emblée dit les choses ? Nous ne marcherons pas dans votre manoeuvre ! (Applaudissements à gauche)

Mme Marie-Agnès Labarre.  - La réforme systémique serait sécurisée puisque le mécanisme existe déjà avec l'Agirc et l'Arrco. Mais on voit les dévalorisations qui ont eu lieu ! Le taux de rendement a baisé de 30 % entre 1993 et 2007.

Dans un système à points, les salariés n'ont aucune visibilité à long terme sur le montant de leur retraite ; il n'y a pas de taux de remplacement garanti. Ce système mime en réalité la logique de la capitalisation. Vous voulez faire disparaître les solidarités. Nous refusons ce mouvement vers l'individualisation et ne voterons pas cet amendement.

M. Jacques Blanc.  - Je retire mon amendement n°83 rectifié quater puisque l'amendement du rapporteur nous donne entière satisfaction. Jugez de ma surprise : les socialistes avaient déposé un amendement allant exactement dans le même sens et ne veulent plus le voter ! A cause de la position de leurs amis communistes ? Parce qu'ils ne songent qu'à casser ce que nous proposons ? La logique, c'était d'abord d'assainir le système pour lui permettre plus tard d'évoluer. Vous êtes pris en flagrant délit d'utiliser des arguments auxquels vous ne croyez pas ! (Applaudissements à droite)

M. Jean-Pierre Caffet.  - Ce soir, cet hémicycle ressemble à un théâtre d'ombres. Je n'ai jamais vu autant de cynisme de la part du Gouvernement et de sa majorité.

Depuis des mois, a-t-on entendu quelqu'un évoquer une réflexion sur une réforme systémique ? (M. le président brandit un document) Non. En revanche, vous avez dit que cette réforme était la seule possible et qu'il fallait faire peser 85 % de l'effort sur les salariés. Pourtant, il y a eu un grain de sable. Le mouvement social, beaucoup plus important que vous ne vous y attendiez. Vous parlez maintenant d'une réforme systémique.

Ce soir, nous avons affaire à une manoeuvre pour désamorcer le mouvement social. Vous avez fait la même chose il y a dix jours, monsieur le ministre, en sortant de l'Élysée avec deux amendements présentés comme une merveilleuse avancée. Vous comptiez sur un essoufflement du mouvement. Comme il continue, vous sortez de votre chapeau un lapin ! Dans une dépêche AFP, on lit que Nicolas Sarkozy pourrait laisser passer un amendement pour organiser un débat sur une réforme systémique. Nous ne pouvons l'accepter. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Jean Desessard.  - La retraite par répartition, c'est quand les actifs paient pour les retraités. Ce n'est pas un système égalitaire, on l'a vu, car il reproduit les inégalités de carrière. Les centristes disent qu'il est préférable d'instaurer un système par point (M. Nicolas About s'exclame) mais ce système n'est pas plus juste. Il faudrait réduire les inégalités de carrières et de pensions. Je souhaite la réduction des écarts entre les petites et les grandes retraites.

M. Jean-Pierre Raffarin.  - Tout le monde a la petite !

M. Jean Desessard.  - Au XXe siècle, le travail était indissociable de la production. Désormais, la priorité est de préserver la planète. Il est fondamental de travailler moins.

Mme Jacqueline Panis.  - Encore moins !

M. Jean Desessard.  - La cotisation ne peut régler la question puisque nous voulons moins de travail. D'autres ressources seront donc nécessaires. Je suis extrêmement déçu de voir qu'à la fin d'un texte, on nous demande de discuter de grandes orientations. Nous voulons qu'on définisse un projet de société. Nous voulons des retraites plus égalitaires. (Applaudissements sur les bancs socialistes)

M. Bernard Vera.  - Nous sommes confrontés au papy-boom, nous dit-on. Une étude réalisée par Eurostat vient de paraître : la France est loin d'être le pays le plus à la peine pour y faire face. La part du PIB pour financer les retraites de 2010 à 2020 passerait de 13,5 à 13,6 points. La hausse atteindrait 14,5 % en 2035 avant de redescendre à 14 % dans les décennies suivantes grâce à la hausse actuelle de la natalité. La France est en excellente position dans l'Union. En réalité, vous cherchez à inquiéter nos concitoyens pour qu'ils acceptent le sacrifice que vous leur demandez et à favoriser l'émergence des fonds de pension.

Rappelons-nous ce que déclarait en 1993 Raymond Soubie, l'un des inspirateurs de ce texte. Nous voterons contre cet amendement. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Pierre Mauroy.  - Avouez que nous vivons des choses extraordinaires ce soir. C'est vous qui apportez cette réforme et c'est nous qui n'en voulons pas. Dans les discussions, vous avez fermé toutes les portes. Mais les Français la refusent dans leur grande majorité, et vous le prouvent par leurs manifestations.

Vous n'avez rien entendu, rien voulu. A l'heure de vérité, vous ne croyez plus à cette réforme, qui n'est pas financée. Vous voulez l'emporter au Parlement, mais c'est tout. Les salariés ne peuvent supporter seuls le financement du système. Ce soir, vous proposez d'élargir le débat. Restons dans la clarté.

M. Jacques Mahéas.  - L'honnêteté!

M. Pierre Mauroy.  - Le peuple ne veut pas de cette réforme. Vous croyez que vous allez réaliser ce tour de passe-passe en vous appuyant sur nous. N'y comptez pas. Alors que le débat est fini, que vous maintenez cette réforme déjà caduque, vous voulez que l'on vote votre amendement ! C'est impensable. Nous avons subi votre réforme, nous l'avons dit, nous avons essayé de l'amender, en vain. Dans ces conditions, faites ce que vous voulez. Quant à nous, nous disons non à cette réforme. (Applaudissements à gauche)

Mme Odette Terrade.  - C'est avec beaucoup d'honneur et d'émotion que je parle après Pierre  Mauroy. Jeune syndicaliste, ouvrière d'usine, j'ai porté cette revendication de la retraite à 60 ans. Nous y croyions et Pierre Mauroy l'a fait quand d'autres valeurs, de solidarité, avaient alors cours. (Applaudissements à gauche). Et je suis vraiment très émue...

Les systèmes par points suppriment une notion fondamentale, celle d'assurer un taux de remplacement défini à l'avance. Ils entérinent la décote : plus l'espérance de vie est longue, plus le ratio est élevé. Ce serait gravissime dans le contexte actuel.

Dans le texte aujourd'hui présenté, le Gouvernement ne prend aucune disposition pour la pénibilité. Nous ne pouvons nous inscrire au sein de cette logique de réduction des pensions et de poursuite obligée de son activité, au-delà même des forces du salarié. Nous ne voterons donc pas cet amendement qui introduit les bases de la capitalisation. (Applaudissements à gauche)

M. Martial Bourquin.  - Nous aurions pu commencer par cet amendement. Enfin, on s'aperçoit qu'il faut une grande réforme systémique. Mme Demontès a fait des propositions qui prouvent que si nous avions eu ce débat au début, une véritable réforme était possible.

Rien n'a été dit sur l'emploi des jeunes. Nous sommes à la traîne de l'Europe en matière de chômage des jeunes. Il y a 4,2 millions d'inscrits à Pôle emploi, dont 3 millions de chômeurs. La société ne peut continuer à vivre ainsi.

On ne peut avoir eu des débats aussi fermés, aussi violents, avec des « circulez, il n'y a rien à voir » et ensuite venir vous dire : pourquoi ne pas réfléchir ensemble sur une réforme systémique ?

M. Nicolas About.  - Vous la demandez depuis huit jours !

M. Martial Bourquin.  - Nous ne voterons pas cet amendement : s'il y a alternance, ce sera une de nos premières tâches que de la mener à bien...

M. Nicolas About.  - Il vous faudrait une majorité, et ce n'est avec les communistes que vous l'aurez !

M. Martial Bourquin.  - Avec cette réforme, vous faites plaisir aux agences de notation, comme le voulait Nicolas Sarkozy. Mais le coup porté aux salariés est tellement dur qu'il faudra un autre artifice que celui-ci pour le faire oublier ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)

Mme Mireille Schurch.  - Nous sommes ce soir floués. Vous avez dit votre attachement au système par répartition. Et maintenant, vous dites vouloir réfléchir à d'autres régimes. Avec cet amendement, on ira à une individualisation des retraites. Le système voulu par M. Arthuis prendrait en compte l'intégralité des carrières, et non les vingt cinq meilleures années, ce qui pénaliserait encore plus les femmes.

En Suède, en Italie, le basculement au régime par point a entraîné une réduction des pensions, surtout pour les réversions.

Enfin, ce système pénaliserait les salariés, qui se retrouveraient acteurs de la bourse avec les risques que l'on imagine. Le partage des richesses serait définitivement gelé et les fruits de la productivité seraient confisqués par les actionnaires. (Applaudissements sur les bancs CRC)

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Mme Demontès déclare que la commission n'a pas examiné cet amendement.

Mme Christiane Demontès.  - Je n'ai pas dit cela !

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - J'ai dit que cet amendement méritait un débat en séance publique et nous l'avons eu.

En 2003, M. Raffarin et M. Fillon ont mené à bien la réforme des retraites dans la perspective de 2050 mais des rendez-vous réguliers ont été prévus tous les quatre ans.

Le COR nous a dit que si l'on ne faisait rien, il faudrait baisser les pensions, augmenter les cotisations ou allonger la durée du travail. Mais vous avez oublié la crise : en 2009, les rentrées fiscales ont diminué, la masse salariale s'est contractée. Ce qui devait arriver en 2030 s'est brutalement rapproché de nous. Il y avait donc urgence car le risque était important. Nous y faisons face mais nous vous disons aussi qu'il faut envisager une réforme systémique. Nous la lançons ce soir parce que, comme l'a indiqué la Meccs, une telle réforme appelle une longue préparation.

Vous opposez votre projet au nôtre. Mais c'est à l'exécutif de présenter un projet. Vous auriez pu le faire en 1991 si vous aviez écouté M. Rocard, mais vous n'en avez pas eu le courage. C'est ce gouvernement qui va sauver la retraite par répartition.(Exclamations à gauche ; applaudissements à droite) Enfin, avec tout le respect que je dois au premier ministre Mauroy, je ne sais pas ce que c'est que le tour de passe-passe dont il a parlé : nous préparons l'avenir pour rendre confiance aux jeunes. Je suis désolé que vous n'ayez pas eu la patience de lire le rapport de la Meccs. Arrêtez de nous caricaturer : tout dépend de l'emploi, bien sûr, de l'emploi des seniors et des jeunes. Il faut que ces derniers entrent le plus vite possible dans l'emploi, pour trouver leur place dans la société. Vous croyez encore aux trois âges de la vie : scolarité, emploi retraite ? Les Français ont compris que la formation, c'est tout au long de la vie. Sortez de votre bulle ! (Exclamations à gauche) Nombre d'entre eux souhaitent prendre une retraite progressive : c'est dans notre programme. Nous proposons une réforme urgente mais aussi qui prépare l'avenir. (Applaudissements à droite)

Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales.  - Je vous renvoie au rapport d'information de la Meccs publié en mai, intitulé Régler l'urgence et refonder l'avenir. Aux pages 134 et 135, il est dit que l'année 2010 pourrait être l'occasion de poser le principe d'une telle réforme et que le rendez-vous de 2010 pour les retraites peut être le moment d'engager la refondation du pacte intergénérationnel. C'est exactement ce que nous proposons maintenant. (Applaudissements à droite)

M. Éric Woerth, ministre.  - En mai, le Gouvernement écrivait qu'il n'écartait pas, pour le long terme, une réforme systémique dans le cadre de la répartition. Avec cette réforme, nous allons assainir les comptes, dans l'urgence. Nous devons avoir une perspective sur l'évolution du régime et c'est pourquoi nous acceptons ces amendements.

M. Jacques Mahéas.  - La bouée de sauvetage !

M. Éric Woerth, ministre.  - Un système universel de retraite permettrait d'enrichir notre pacte social. Vous proposez de mener cette réflexion à partir de 2013 et de prendre des décisions à l'horizon 2020. Ce serait un changement de culture mais pas total : regardez la façon dont sont gérés l'Agirc et l'Arrco. Les choix que nous faisons avec cette réforme pourront être transférés dans un régime universel.

Enfin, j'ai trouvé que vous étiez très laborieux, à gauche : il est difficile de faire le grand écart.

Alors que nous allons dans votre sens, vous faites marche arrière ! En réalité, vous êtes gênés. (On le conteste à gauche) Bref, rien ne change. (Applaudissements à droite)

A la demande des groupes UMP et UC, les amendements identiques nos558 rectifié quinquies, 652 rectifié bis et 1220 rectifié sont mis aux voix par scrutin public.

M. le président.  - Voici les résultats du scrutin :

Nombre de votants 339
Nombre de suffrages exprimés 338
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l'adoption 198
Contre 140

Le Sénat a adopté et l'article additionnel est inséré.

(Applaudissements à droite)

M. le président.  - Nous en arrivons à l'amendement n°557 rectifié bis.

M. Jean Arthuis.  - J'ai entendu le souhait de retrait mais cet amendement est le fruit d'une conviction. Dans quelques semaines, monsieur le ministre, vous allez nous proposer le PLFSS et vous allez demander d'affecter des impôts au financement d'une partie des retraites et de la santé. S'il y a financement par l'État, il y a automatiquement universalité. Il faut mettre un terme à l'injustice du calcul des pensions. Il est donc urgent d'instaurer des comptes individuels. Pour prendre en compte les longues carrières, c'est la seule façon de procéder. Cette loi colmate le régime actuel mais il faut le réformer profondément, tout en maintenant la répartition. Réglons la question de la justice et de la transparence. Voilà pourquoi je maintiens cet amendement.

M. Dominique Leclerc, rapporteur.  - Conviction contre conviction : nous n'avons jamais parlé de transposer le système. Si nous demandons une réflexion nationale, c'est parce que nous voulons plus de transparence et plus d'équité.

Laissons le débat s'installer, se développer. Il est prématuré de se prononcer sur un modèle déterminé.

Notre système actuel est injuste, profondément injuste. Il est grand temps d'instiller plus de justice et d'instaurer un plancher, et peut-être aussi un plafond. Mais là, nous ne faisons pas l'unanimité. La Prefon, c'est quoi ? De la capitalisation ! Alors, assez d'hypocrisie. Il faut instaurer un système plus juste pour tous les Français : c'est le sens de notre amendement. (Applaudissements à droite)

Mme Annie David.  - J'entends M. Arthuis et je respecte sa conviction. Nous aussi en avons une, qui mérite d'être respectée.

L'État pratique des exonérations sociales qui font que manquent 30 milliards pour les retraites. Il faut aussi une autre politique de l'emploi, une autre fiscalité,- je vous renvoie au rapport de la Cour des comptes. !

M. Pierre-Yves Collombat. - - Tout le monde est d'accord pour un système juste mais qu'est-ce que la justice ? Est-ce rendre à proportion de ce qui a été cotisé ? En fonction des catégories ? Ce serait analogue aux calculs des assurances, où plus il y a risque de vie, moins la retraite est grosse...

Mme Marie-France Beaufils.  - Dès lors que M. Arthuis maintient son amendement, il faut y répondre.

Avec un salaire de 1 500 euros, on verse 120 euros de cotisation de retraite, ce qui permet d'envisager 120 000 euros disponibles -à voir comment on calcule ! Cela représente 6 000 euros annuels, soit le tiers de la dernière rémunération... Cela ne nous satisfait pas : cela ferait une retraite proche du minimum vieillesse.

M. Jean Arthuis.  - Vous caricaturez.

L'amendement n°557 rectifié bis n'est pas adopté.

Prochaine séance aujourd'hui, jeudi 21 octobre 2010, à 11 heures 45.

La séance est levée à 2 heures 35.

Le Directeur du service du compte rendu analytique :

René-André Fabre

ORDRE DU JOUR

du jeudi 21 octobre 2010

Séance publique

A 11 HEURES 45

1. Suite du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme des retraites (n°713, 2009-2010).

Rapport de M. Dominique Leclerc, fait au nom de la commission des affaires sociales (n°733, 2009-2010).

Texte de la commission (n°734, 2009-2010).

Avis de M. Jean-Jacques Jégou, fait au nom de la commission des finances (n°727, 2009-2010).

Rapport d'information de Mme Jacqueline Panis, fait au nom de la Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes (n°721, 2009-2010).

A 15 HEURES, LE SOIR ET LA NUIT

2. Questions d'actualité au Gouvernement.

3. Suite de l'ordre du jour du matin.

En application de l'article 60 bis du Règlement du Sénat, la Conférence des Présidents a décidé que le Sénat se prononcerait sur l'ensemble du projet de loi par un scrutin public à la tribune.

4. Éventuellement, projet de loi organique, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la limite d'âge des magistrats de l'ordre judiciaire (n°714 2009-2010).

Rapport de M. Yves Détraigne, fait au nom de la commission des lois (n°728, 2009-2010).

Texte de la commission (n°729 rectifié, 2009-2010).